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LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
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Cet Ecusson de Bône a été généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
Les dix derniers Numéros :
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EDITO
LA RENTRÉE !
La canicule, les vacances, la rentrée scolaire des jeunes et le début de l'automne sont derrière nous. Le raccourcissement des jours est bien entamé avec une température en baisse.
Il y a quelques années, octobre était considéré comme la rentrée pour tous car c'était la rentrée parlementaire avec son lot de nouvelles propositions de lois ou de budgets.
Ces parlementaires, comme d'habitude, sur " injonction du gouvernement ", vont voter des nouvelles lois : sur la burka ; sur la déchéance de la nationalité ; sur les retraites ; sur le budget 2011 avec un nouveau serrement de ceinture, etc.. On sait très bien que ce ne sont que des lois de " pacotille " visant à nous faire avaler d'autres pilules non remboursées par la " Sécurité Sociale ". Une institution qui n'a de sociale que le mot et la discrimination à cause des deux vitesses instituées par les élus du peuple.
Discrimination à deux vitesses sur bien des choses importantes comme par exemple :
- La sécurité des riches et celle des pauvres ;
- La médecine des riches et celle des pauvres ;
- La retraite des riches et celle des pauvres ;
- La scolarité des riches et celle des pauvres ;
- Les lois des riches et celle des pauvres ;
- La fiscalité des riches et celle des pauvres ;
- Les jugements des riches et ceux des pauvres ;
Certes on pourrait rajouter d'autres inégalités comme par exemple :
- L'aide sociale des français et celle des étrangers ;
- La libre expression de certains français et celle des irrespectueux de la république ;
Ces sentiments d'injustices gagnent de plus en plus les couches sociales de la population, celles qui participent activement à la vie du pays par leurs efforts continus et obligatoires. Cela engendre des sentiments de révolte qui pour le moment sont mis en cache ou en berne par les boniments des élus et l'insouciance naturelle des français et de " la Marquise ". Comme dirait l'autre (expression P.N.), " tout va bien Mme la … ", défilez, faites la fête et les parades, manifestez en musique dans les rues car pendant ce temps, " la cour et le roi Nico1er " s'amusent et se gaussent de vos pitreries.
Pour nous, expatriés, il y a des fêtes qui nous rendent triste par les faits sanglants qui nous les rappellent et qui nous rendent nostalgiques pour les souvenirs heureux se remémorant dans nos esprits.
Ce sont les fêtes de la Toussaint qui se rapprochent. N'omettez pas d'aller nettoyer et fleurir les tombes de vos proches décédés sur cette terre d'exil. Il ne faut surtout pas oublier d'avoir une pensée très forte pour ceux que nous avons laissé là-bas et qui ont construit notre Algérie de naissance et de cœur où il faisait bon vivre.
Là-bas tout était plus simple car les parents et amis étaient proches. Depuis le début de l'exil, tout a changé. Avec nos modestes biens, nous avons perdu aussi tout ce qui composait notre environnement. C'est-à-dire, nos lieux de vie, le travail, nos distractions, nos amis et familles qui ont été dispersés bien souvent au gré de l'administration chargée de l'accueil des rapatriés ou plutôt des dépatriés car nous sommes considérés soit comme des étrangers soit comme des apatrides.
Grâce à nos ancêtres pionniers, nous avons eu et nous avons vécu de belles années en Algérie. Le temps et l'histoire récente nous séparent d'eux et de leurs tombes en partie détruites dans de nombreux cimetières sans respects pour les morts.
Si vous avez l'occasion de faire fleurir leurs tombes encore debout, n'hésitez pas, car c'est leur mémoire, notre mémoire que vous perpétuerez.
Sans haine, avec le recul nécessaire à l'apaisement et à la réflexion, pensez à instruire vos enfants et petits enfants qui sont certainement nombreux à ne pas connaître toutes les vérités car à l'école elles sont généralement déformées ou omises. Ne parlons pas de la TV, des journaux ou des films manipulés par une intelligentsia hostile à notre véritable histoire et à notre mémoire.
Permettez-moi de débuter, ce numéro, par un deuil, celui d'un très cher Ami de la Seybouse, Jacques Vassieux. En bon bônois, je lui adresse, je vous adresse fraternellement, ainsi qu'à nos disparus, un bouquet virtuel d'olivier et de jujubier. L'olivier de la paix cher à Saint Augustin et le jujubier, qui pique et nourrit (Ferit et Alit), emblème cher à notre coquette ville de Bône.
Jean Pierre Bartolini
Diobône,
A tchao.
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Pour nos chers Amis Disparus
Nos Sincères condoléances à leur Familles et Amis
Envoi de M. Jean Pierre Bartolini
Décès de M. Jacques Vassieux
"Chers(es) amis (es),
Bonjour
Ce mercredi 22 septembre 2010, c’est avec beaucoup de peine que nous avons appris le décès de notre ami Jacques Vassieux qui vient de perdre au matin le dernier combat de sa vie contre un cancer du pancréas.
Il était âgé d’à peine 59 ans.
Les obsèques de Jacques Vassieux ont eu lieu lundi 28 septembre 2010 à 15h30 à Poisy (74).
Nous présentons nos sincères condoléances et notre soutien à sa famille et à ses proches.
Repose en paix, Jacques !
L’homme, conseiller régional Rhône-Alpes, était également ancien conseiller municipal de Meythet.
Dans le civil, l’homme dirigeait un cabinet d’immobilier et était un expert reconnu en matière d’urbanisme et de construction.
Plus qu’un ami, Jacques aura été pour nous tous un modèle de courage et d’abnégation, tant dans le combat politique que dans celui qui l’opposait depuis plus d’un an et demi à la maladie.
Jacques le Bônois était un fidèle lecteur de la Seybouse qu’il relayait et faisait partager avec d’autres amis.
C’était un homme très courageux et lucide qui n’avait pas hésité à présenter et décrire sa maladie en écrivant ses adieux à ses amis. Lorsque j’ai reçu « ces Adieux », je lui ai répondu car c’était un ami d’Internet de longue date et sur qui l’on pouvait compter. Ce message (ci-dessous) était un hommage que je lui rendais en privé de son vivant et que je rends public car il le mérite amplement.
Jean Pierre Bartolini
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Mon message adressé à Jacques :
Le 2 juin 10 à 18:46.
BARTOLINI Jean-pierre a écrit :
Cher Jacques,
C'est par mails que j'ai reçu tes " ADIEUX " et tes confidences remplies de dignité face à cette cruelle épreuve. Ton esprit clairvoyant et chevaleresque démontre que tu te battras jusqu'à l'ultime minute et que tu es toujours prêt à transpercer l'ennemi avec ton épée tranchante.
Même si l'année dernière tu m'avais parlé avec pudeur de " tes ennuis de santé par cette saleté de crabe ", inutile de te dire que cette nouvelle m'a bouleversé.
On ne peut qu'être compatissant, admiratif et sensible à ta souffrance, à ton courage, à ton ultime combat, contre le fléau du siècle, que tu mènes et que tu décris de façon si lucide. Je suis de tout coeur avec toi.
Nous ne nous connaissons pas physiquement, juste au travers des échanges par mails, toujours sincères et fraternels depuis des années grâce au site de Bône et à notre chère ville. Tu as toujours respecté mon apolitisme, ma liberté de pensée et mon combat pour notre mémoire. Je n'oublierai jamais que tu m'as été d'un grand soutien lorsque moi aussi j'ai eu " affaire à des cons " et que ma vie a été menacée par des gens que tu nommais " les sales ennemis de l'intérieur de notre communauté ". Tu as montré comme toujours une grande liberté de parole et tu as mouillé la chemise avec fermeté quand il le fallait face à eux.
Tu es un homme formidable et tu le resteras dans les mémoires. C'est certain que le vide que tu laisseras ne sera pas comblé de sitôt. Tu es un exemple pour les nouvelles générations, mais surtout pour les plus anciennes qui oublient souvent d'où nous venons et de qui nous descendons.
On ne peut que rendre hommage et respect à un homme de convictions, car tout le monde sait que tu es un patriote exemplaire hors norme avec :
Un raisonnement sincère et toujours bien argumenté;
une amitié et une fidélité indéfectibles ;
une honnêteté conforme à la morale, à la droiture, à la probité et à la loyauté ;
une intégrité, sans aucune altération, faite d'abnégation et de franchise;
une volonté jusqu'au-boutisme en mettant ta peau au bout de tes idées.
Tu mérites bien les éloges que ne manqueront pas de faire tous nos amis, car ton œuvre se poursuivra, ne serait-ce que dans les esprits.
Mon cher Jacques, je ne te dis pas Adieu mais " Au Revoir mon frère Bônois ". Je me permets de penser aussi à ta famille à qui je souhaite beaucoup de force et de courage pour t'accompagner dans les moments difficiles que tu prévois avec lucidité.
Je t'embrasse fraternellement.
Jean Pierre BARTOLINI
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Il est temps de vous dire adieu
Posté par Jacques le 31 mai 2010
Je savais bien qu’un jour viendrait le moment où je vous le dirais mais j’avais peur de le faire et je reculais la date de plus en plus.
Là je suis contraint de le faire car le temps m’est désormais compté. Je sais que cela va se terminer dans quelques jours, voire quelques semaines – j’ai toujours été optimiste - tout au plus. Et je ne voudrais pas partir sans expliquer l’histoire, la sale histoire qui m’est arrivée.
Voilà, je suis atteint d’un cancer.
Un cancer « haut de gamme », comme dirait Dominique Martin … Le cancer du pancréas.
J’ai été diagnostiqué le 3 janvier 2009 alors que j’étais à des milliers de kilomètres de mon cher pays. Le médecin mauricien que j’avais consulté pour un ictère survenu soudainement n’y était pas allé par quatre chemins pour m’annoncer la terrible nouvelle : « M. Vassieux, je suis désolé de vous apprendre que vous avez une tumeur située à la tête du pancréas. C’est très grave. C’est un cancer. Nous, ici, nous ne pouvons rien faire pour vous. Il faut que vous rentriez d’urgence en France ». 1ère mauvaise nouvelle de l’année. Europe assistance, superbe organisation, m’a alors rapatrié, avec le plein d’angoisse, à Lyon.
Je suis arrivé, deux jours plus tard, à minuit, à l’hôpital Lyon Sud. Les infirmières m’attendaient. Je vous laisse imaginer dans quel état moral je pouvais être…
J’ai été immédiatement pris en charge par les services du Professeur Jean-louis Caillot qui a décidé de m’opérer le 22 janvier 2009.
Ah cette opération… Un vrai calvaire. Cela a duré 6 heures. Le chirurgien a pratiqué l’ablation de la tête du pancréas, de la vésicule, de la moitié de l’estomac, du duodénum, du cholédoque… Et pendant ce temps certains petits cons écrivaient sur des forums tenus par d’autres petits cons, que je léchais le cul des patrons du FN et de Marine Le Pen pour avoir une bonne place au sein du Front.. Je ne souhaite jamais à ces abrutis de connaître l’état dans lequel j’étais, même si c’est la seule façon de se rendre compte que quand on subit ce que je subis depuis 17 mois, la seule préoccupation que l’on ait ne soit pas de « récupérer » un poste mais de survivre !
Après l’intervention je suis resté 15 jours allongé sur mon lit d’hôpital avec sondes, perfusions, et tuyaux branchés. Douze jours, allongé sur le dos sans pouvoir bouger. Malgré la morphine, l’enfer venait de commencer.
J’ai alors entamé une chimiothérapie. Toutes les semaines. C’est infect. Nausées, vomissements, courbatures, fatigue intense, maux de tête, tels étaient les quelques effets secondaires parmi d’autres que cela me provoquait à chaque fois.
Et en juin je passais mon premier contrôle scanner. J’avais raison d’angoisser car la deuxième mauvaise nouvelle de l’année venait de me tomber dessus. Si je n’avais plus rien au pancréas, mon foie était désormais atteint par des métastases. Et pendant ce temps, les mêmes petits cons continuaient toujours de m’insulter sur les mêmes forums ou sites tenus par d’autres petits cons… Parce que la cellule riposte du FN que j’avais créée et que je dirigeais leur entrait dans la gueule avec de plus en plus d’efficacité !
La cancérologue qui me suivait m’avait alors conseillé d’aller « hurler ma colère » sur le parking de l’hôpital car, d’après elle, il n’y avait plus d’espoir pour moi.
C’est que je fis en sortant de l’hôpital en serrant très fort la main de mon adorable épouse. Les passants avaient du me prendre alors pour un fou. Tant pis.
En septembre, d’autres tumeurs. En janvier elles étaient devenues volumineuses et là, en mai, elles sont énormes.
Les chimiothérapies que je n’ai jamais cessé de faire depuis n’ont donné aucun résultat. Tout ça, toutes ces souffrances pour rien ! C’est injuste.
La peur et la douleur se sont désormais installées en moi. Je souffre physiquement et de plus en plus intensément. Je n’en peux plus. Parfois je tente de donner le change mais autour de moi, plus personne n’est dupe. Chaque jour me voit maigrir, mes forces s’en sont allées et le moral n’y est plus.
Et pourtant je me suis tant battu. Pendant des mois, pour continuer à militer à ma façon, j’écrivais sur NPI et sur NP Mag. Je me suis même payé le luxe de faire campagne pour les régionales. Fallait voir la tête des adversaires et des journalistes quand ils me voyaient arriver sur le plateau avec la pompe à chimio branchée sur ma poitrine et accrochée autour de ma taille. Et puis j’ai été réélu. Cela m’avait requinqué cette bataille. Comme me requinquaient toutes les conneries que je pouvais lire sur moi çà ou là. Combien de fois m’est-il arrivé d’éclater de rire en lisant les abrutis de service parler de moi et me prêter des intentions que l’on peut avoir, peut-être, que lorsque l’on a la forme. Je me disais : si seulement ils savaient ces pauvres fous. Moi je m’épuisais physiquement. Eux me faisaient grand manitou du FN. Trop drôles les cons quand même quand ils s’y mettent.
Et puis le 27 mai dernier je suis allé de nouveau à Lyon Sud pour rencontrer un professeur qui s’est fait une certaine réputation en mettant au point une formule de destruction de cellules cancéreuses par le froid. Nouvel espoir. Il m’a examiné, mais lorsque j’ai vu sa tête j’ai compris. Cela a été mon troisième choc. Ma troisième mauvaise nouvelle. Il m’a aussitôt confirmé que je ne pouvais pas bénéficier de cette technique. Et d’aucune autre d’ailleurs. Ni opération, ni greffe. Il m’a juste indiqué que je devrais essayer de voir s’il n’y avait pas des essais en cours auxquels je pourrais participer. Que ce serait une sorte de dernière chance. Et quand je lui ai demandé si j’étais foutu, il m’a juste répondu que mon cas était très préoccupant.
Voilà. C’est donc fait, il n’y a plus rien à faire. Et c’est pour cela qu’il fallait que je vous dise maintenant ce qui m’arrive.
Et puis je le vois bien.
Je maigris de jour en jour et les douleurs augmentent jusqu’à être devenues presque insupportables. C’est donc la fin. Je ne vais donc plus pouvoir militer, écrire, défendre mes amis du Front, piquer des colères. Jean-Marie Le Pen, qui m’appelle toutes les semaines pour prendre de mes nouvelles, m’a demandé samedi de «tenir bon la barre», de «m’accrocher à la rampe». J’ai essayé, j’ai tenu, je me suis battu comme un fou, mais là je vais décevoir mon Président, je n’y arrive plus.
Pas une semaine ne s’est passée non plus sans que Marine Le Pen ne m’ait envoyé des mots d’encouragements, des bises téléphonées et sans que Bruno Gollnisch ne prie pour moi. Ils vont tellement me manquer. Mais celui que va le plus me manquer c’est incontestablement Louis. Mon ami Louis Aliot. Pas un jour depuis le départ de ma maladie ne s’est passé sans qu’il ne prenne de mes nouvelles, sans qu’il ne m’encourage, qu’il ne me soutienne. Louis est devenu pour moi comme un petit frère qui veille sur son grand frère malade. Il est le dernier ami que Dieu m’ait permis d’avoir et il est celui dont les conversations vont le plus me manquer. C’est quelqu’un de bien Louis. De très bien. C’est mon frère.
Et puis je ne verrais plus Dominique Martin. Dom avec qui pendant plus d’un quart de siècle j’ai milité. Qui m’a vu rire, me battre, déconner, danser, gueuler. C’est sans doute celui qui me connaît le plus. Et puis Bernard. Mon ami Bernard qui tous les jours passe me voir pour satisfaire le moindre de mes désirs. La pelouse à tondre, me conduire au PMU voir mes copains, m’emmener chez France 3 à Grenoble, ou au Conseil régional. Bernard s’occupe de tout ça pour moi. C’est un saint.
Voilà, ce que je voulais vous dire.
Que je ne pourrais plus participer comme je le faisais à NPI ou à NP Mag. Je voulais vous dire aussi que je vous ai aimés, même vous les cons. Que ma famille et mon pays ont été les choses qui ont le plus comptées pour moi. Mais aussi que je n’arrive pas à me faire à l’idée de ne pas participer à la bataille finale. Celle qui donnera la victoire au Front national. Je l’aurais pourtant, en tout cas me semble-t-il, un peu mérité. Ça, ça m’énerve profondément. Comme cela m’énerve de ne pas être là pour lire les mémoires de JMLP quand elles seront publiées, de ne pas participer au Congrès en janvier, de ne pas voir grandir ma petite fille Jade, de laisser mon épouse se débrouiller désormais toute seule pour tout affronter, et aussi de ne plus revoir Alexandra ma fille et Anthony mon garçon. Ça c’est dur.
Mais, dans mon malheur, j’ai quand même de la chance, j’ai encore toute ma tête et je peux vous dire tout ce que je vous ai dis.
Et puis je peux aussi vous dire Adieu.
Votre Dévoué et Ami Jacques Vassieux
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AVENIR DE L'EST
Extraits des chroniques du Journal de Bône, Constantine, Guelma
Source BNF
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2 janvier 1891
GRAND CAFÉ ET RESTAURANT CAPION.
M. Capion n'est pas un inconnu parmi nous.
Venu à Bône comme simple garçon de café, ainsi qu'il ne s'en cache pas sans
fausse modestie, par son travail, par son habileté, par son activité
infatigable, en peu de temps il parvint à devenir patron.
C'est alors, que de nouvelles luttes commencèrent. Il fallait se faire un nom. Il fallait se faire connaître.
M. Capion ne se rebuta pas. Il alla franchement de l'avant. Après avoir tenu pendant quelques années le grand Bar Américain, il trouva que les modestes fonctions de limonadier ne suffisaient point à ses aptitudes. Il acheta l'ancien Grand Café du Soudan, qu'il transforma en Café-Restaurant.
Depuis trois ans qu'il est installé dans son nouveau local, il a su, par son aménité, par l'empressement qu'il met à satisfaire tout ses clients, par son entente des progrès sans cesse croissants de l'industrie qu'il ne néglige jamais d'appliquer à son établissement, il a su, disons-nous, conquérir rapidement, une des meilleures places parmi les cafés les plus réputés de la ville.
Aussi son café, ainsi que son restaurant, ne désemplissent-ils pas.
Tout le monde veut goûter de la cuisine de M. Capion et ceux qui n'en ont pas encore goûté n'ont qu'un rêve, c'est d'y aller voir.
жoω-жoω-жoω-жoω
19 janvier 1891
LA NEIGE, LE TEMPS.
De mémoire de vieux Bônois, on n'a jamais vu tomber pareille quantité de neige à Bône à cette époque de l'année.
Aussi beaucoup de personnes, peu accoutumées à ce spectacle, en sont-elles toutes stupéfaites et ne peuvent se lasser d'admirer les festons et les astragales déposés par la blanche fée à toutes les corniches, à tous les balcons, à toutes les moulures de nos monuments et de nos maisons. Les cariatides du Palais Calvin placées au dessus de la Compagnie générale Transatlantique avaient, ce matin, des barbes de fleuve faites de neige.
On a photographié la statue de Thiers, avantagé d'un bedon phénoménal.
Ce ne sont que stalactites et stalagmites faisant de toute la ville un décor de rêve et de féerie, comme on n'en voit pas souvent dans nos contrées.
Toute cette neige, si belle à voir dans sa blancheur immaculée d'hermine, aura cependant, de graves conséquences pour notre région, car au dégel, les torrents de l'Edough se précipiteront dans la plaine et causeront des inondations redoutables, à moins qu'un chaud soleil ne vienne à temps arrêter leurs ravages.
Ce temps exceptionnel règne sur toute l'Algérie. De toutes parts on signale l'envahissement de la neige. Alger n'a pas été épargnée. La température n'y dépasse pas 4 degrés, comme ici. Dans le département d'Oran le village de Sebdou a été entièrement bloqué par les neiges.
Un convoi de vivres qui lui était destiné n'a pu y parvenir.
жoω-жoω-жoω-жoω
30 janvier 1891
Expulsion des Etrangers
SANS PAPIERS NI TRAVAIL !
M. le Procureur minéral vient d'adresser à MM. les Procureurs de la République une circulaire dont nous extrayons les passages suivants :
" MM. les Préfets de l'Algérie, en présence de la progression sans cesse croissante des attentats commis contre les personnes et la propriété, ont, sur l'invitation de M. le Gouverneur général, prescrit de procéder à l'arrestation des individus sans papiers, sans domicile et sans travail ni ressources connues. l
Dans cette catégorie, les indigènes sujets français, signalés comme dangereux, ont été rapatriés dans leurs tribus par les soins de la gendarmerie ; quant aux Marocains, il leur a été délivré des permis de voyage, avec, itinéraire obligé, pour se rendre dans leur pays. Malheureusement un grand nombre de ces derniers, ne tenant pas compte des mesures dont ils ont été l'objet, n'ont pas quitté notre territoire.
Afin de ne pas laisser sans sanction les mesures prises par l'administration dans l'intérêt du bon ordre et de la sécurité publique, il importe que le délit de vagabondage soit poursuivi, quelles que soient la nationalité et la catégorie des individus qui s'en rendent coupables. Toutefois, en ce qui concerne les vagabonds indigènes, il n'y aura lieu de traduire devant les tribunaux que ceux dont la circulation en Algérie constituerait un danger pour la sécurité publique.
Quant aux indigènes non sujets français qui, après avoir été l'objet d'arrêtés d'expulsion et avoir reçu l'ordre de quitter le territoire français en suivant un itinéraire obligé et dans un délai fixé d'avance, persistent à y demeurer, les rigueurs de la loi leur sont applicables. "
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LE MUTILE N° 191, 1er mai 1921
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LE MARECHAL GALLIENI
Toute la France a applaudi le vote du Parlement décernant la dignité suprême, au toujours regretté général Gallieni. C'est la première fois qu'un bâton de maréchal est donné à un mort - car, on ne peut compter, le titre de maréchal que Louis XVIII avait conféré à la veuve du générai Moreau !
Il est regrettable seulement que cet hommage ait été si tardif, il a fallu presque une polémique inopportune fut engagée sur la nomination de nouveaux maréchaux pour que l'accord, se fît sur le nom de Gallieni, cinq ans, presque jour pour jour, après sa mort. Pourquoi donc le gouvernement de 1916 ne déposa-t-il pas le bâton sur le cercueil du grand chef à l'heure émouvante et inoubliable de ses obsèques qui, partant de la chapelle des "Invalides sous le regard de bronze de Napoléon, allaient se dérouler dans ce Paris qu'il avait sauvé en août 1914 ?
Il serait peut-être facile d'en trouver l'explication rien, qu'en lisant les vigoureux mémoires qu'a laissés Gallieni et qui ont été récemment publiés. Mais je ne viens pas faire ici de la politique rétrospective, et je veux simplement, en quelques mots, rappeler ce que fut, Gallieni et plus particulièrement le rôle qu'il a joué en 1914.
Ce que fut Gallieni qui ne le sait en France. Même nos écoliers apprennent - trop sommairement sans doute - qu'il fut le principal créateur et organisateur de notre empire colonial. Le Soudan, le Tonkin, Madagascar marquent les trois grandes étapes de cette carrière coloniale, magnifique entre toutes, presque unique. Les Anglais, qui s'y connaissent en chefs coloniaux, ne lui ont épargné ni la louange, ni l'hostilité, alors qu'ils continuaient ardemment la lutte séculaire contre l'expansion coloniale de la France.
Puis Gallieni dut accepter les commandements que son grade et ses services lui imposaient en France. Successivement commandant de corps d'armée et membre du conseil supérieur de la guerre, ce colonial silencieux, réservé, auquel certains de ses collègues, tout en rendant hommage au gouverneur de Madagascar, refusaient l'expérience de la guerre européenne, prenait peu à peu une autorité incontestée par sa fermeté froide et son jugement précis. Le général Joffre, colonial lui aussi, qui avait servi sous les ordres de Gallieni à Madagascar et avait été, avoue-t-il lui-même, " bien noté par lui ", l'a en haute estime, au point de lui faire délivrer dès 1912, une lettre de service l'appelant au commandement suprême en cas de guerre, si lui, Joffre, disparaissait. Il est considéré même, après qu'il a été atteint par la limite d'âge en 1914, comme l'ad latus du généralissime en temps de guerre.
Désigné comme commandant de la 5e armée, il a étudié et discerné avec le bon sens qui le caractérise, l'importance de la zone d'opérations dans laquelle son armée doit agir, d'après le dispositif du plan de concentration à l'aile gauche des armées, au voisinage de la Belgique. Il prévoit que la stratégie allemande cherchera la surprise sur cette aile gauche par la violation de la neutralité de la Belgique. Et celui qui lui succédera à la 5" armée, en 1914, le général Laurezac, partagera sa conviction.
Je me rappelle avoir rencontré le général Gallieni, le 4 ou 5 août 1914, dans les couloirs du gouvernement, de Paris. La tristesse austère de sa figure, m'impressionna. Je savais qu'il venait d'être éprouvé par un deuil cruel. Je croyais qu'il avait un commandement effectif. Dès les premiers jours de la campagne, je connus les noms des commandants de nos armées, et je fus fort surpris qu'il n'en fût pas, Quand j'appris, le 28 août, en pleine retraite, sur la rive gauche de la Meuse, qu'il était nommé gouverneur militaire de Paris, je me doutai, que les affaires ne marchaient pas très bien, Ce qui se passait, à la IIIème armée, dont je faisais partie, n'était déjà pas si rassurant. Mais je me souviens avoir dit, à mon officier d'ordonnance : " Gallieni à Paris, ça va ! "
Et, certes, j'étais loin de penser que Paris n'était, pas en état, de subir le choc de l'ennemi et que, depuis le 2 août, rien ou à peu près rien, comme allait le constater Gallieni, n'avait été fait pour mettre Paris à l'abri de l'orage qui se rapprochait avec une vitesse effrayante ! J'ai connu pourtant un plan de défense très complet du camp retranché qui fut préparé et approuvé en haut lieu en 1904. J'ai su depuis qu'il était resté sur le papier.
Jusqu'au bout ! Ces trois mots, si simples ; allaient devenir le mot d'ordre de la France et de ses alliés. Toute la victoire était dans le serment de Gallieni
Et il semble qu'il a suffit de cette fière affirmation d'un chef conscient de sa responsabilité et de la vertu française pour que le danger terrible qui menaçait Paris et la France fût écarté, et que la retraite qui entraînait nos armées après les premiers revers fut arrêtée et transformée en une contre-offensive victorieuse.
Car le jugement de I'histoire est acquis aujourd'hui non sans qu'on ait essaye de le déformer et de le fausser. Je crois avoir été un des premiers, du vivant même de Gallieni, à définir et préciser la part prépondérante qu'il eut dans la bataille de la Marne. Dès la fin de 1915, j'avais eu connaissance des documents du gouvernement militaire, et je m'en servis discrètement, dans mes chroniques du Temps, car déjà certains récits prématurés et tendancieux de la bataille de la Marne omettaient, avec une persistance singulière, de mentionner le rôle personnel et capital du gouverneur militaire de Paris, dans les journées des 3, 4 et 5 septembre. Dans l'article nécrologique que je dus -- la tristesse plein le cœur - consacrer à Gallieni dans le Temps, le jour de sa mort, je terminais ainsi : " Il y a assez de gloire pour les chefs qui ont gagné la Marne pour qu'on ne dispute ni ne diminue celle de Gallieni "
Il est, bien avéré par les documents publiés et par les mémoires si fermes et si simples de Gallieni que c'est à son intervention et à son initiative personnelles qu'on dut l'attaque de la 6° armée contre le flanc droit de la 1ère armée allemande, défilant à l'est de Paris, dans son audacieuse poursuite de l'aile gauche de nos armées et de l'armée anglaise. Il ne se contente pas d'avertir le généralissime du changement d'orientation de l'aile droite allemande, qui, au lieu de marcher droit sur Paris, s'en écarte à partir du 3 septembre; il prend la résolution de profiter de l'occasion qu'offre soudain le commandement allemand, ignorant ou dédaignant, la garnison de Paris, et de "lui taper dans le flanc ", comme le dit énergiquement son chef d'état-major, le général Glergerie. Il donne ses ordres au général Maunoury, et il place, pour ainsi dire, le généralissime devant le fait accompli, tellement il pressent que la victoire en sera arrachée à ces Allemands qui marchent Tumultueusement dans l'ivresse du triomphe prochain. Mais sa foi et son énergie sont telles qu'à coups de téléphone il convainc le généralissime qui que l'heure du destin a sonné.
Et, voilà bien en effet, l'instant, dans cette journée décisive du 4 septembre, que l'histoire marquera à l'honneur mutuel des deux chefs, du chef suprême et du chef de Paris, le premier cédant noblement à la sollicitation ardente de l'autre, prenant à son tour la responsabilité et, contre l'avis même de ses conseillers les plus intimes, décidant " qu'on se battrait sur la Marne ".
De ce que fut la bataille de l'Ourcq dirigée par Mounoury sous l'impulsion de Gallieni, dans la bataille de la Marne, qu'ai-je à dire qu'on ne sache.
Mais nous savons aujourd'hui, par les rapports des chefs allemands, que la décision de Gallieni les surprit dans un désordre stratégique extraordinaire, conséquence de la résistance de la Belgique, de la retraite rapide de nos armées échappant à l'enveloppement de l'aile droite allemande et des contre-attaques heureuses de nos troupes à Guise, en Argonne, sur la Meuse, sur la Meurthe.
C'est ainsi, je l'ai expliqué dans le Temps, il y a quelques mois que Von Kluck avait porté de sa propre autorité, la 1ère armée en avant de la 2ème Armée (Von Bulow) au lieu de rester, conformément aux directives du G.Q.G., en échelon à droite, couvrant les 4° et 3° armées, qui étaient chargées de l'attaque principale sur la gauche française et sur Paris. Il dut rappeler, sur un ordre du G.Q.G., les corps d'armée aventurés au sud de la Marne, et c'est cet ordre, malencontreux en apparence, qui sauva la 1ère armée, car elle eût été engagée tout entière contre l'armée anglaise, et Von Kluck n'aurait pas pu jeter, contre la 6* armée française, les deux corps qui ramenés ainsi au nord de la Marne, balancèrent un moment l'heureuse issue de la manoeuvre de l'Ourcq, par suite de la lenteur de la marche en avant de l'armée anglaise.
Gallieni restera donc l'initiateur de la bataille de la Marne. Sur le socle où s'élèvera, bientôt, nous l'espérons, sa statue, devant l'Hôtel des Invalides, le glorieux maréchal mort pourra recevoir le salut fraternel du maréchal survivant qui fut son chef, et qui est bien le vainqueur de la Marne grâce à lui.
signé : Général MALLETERRE
Maréchal Galliéni Général Malletterre
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ANECDOTE
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Nostalgie des vieux films
dans nos cinémas bônois
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J'ai le mal du pays
De M. François Molines
Envoyé Par M. Fernandez
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Sur les quais bariolés du vieux port de Marseille,
L'univers tout entier s'est donné rendez-vous,
Et l'accent des Pieds-Noirs qui frappe mon oreille,
Me pousse lentement aux rêves les plus doux...
J'ai le mal du pays….
Un soleil radieux... la Méditerranée...
Un palmier près de Nice... un envol d'étourneaux
Décidés à tenter la longue traversée
Vers l'accueillant décor des rivages nouveaux...
J'ai le mal du pays….
Un marché se remplit de senteurs exotiques ;
Celui de Bab-el-Oued avait le même attrait.
Les fruits, en tas croulants, mêlaient leurs mosaïques
Aux plateaux variés d'un somptueux banquet...
J'ai le mal du pays….
Des absents tant aimés hantent ce cimetière.
Sur le marbre des croix, je puis lire : "ci-gît..."
Mais ne retrouve point la tombe de mon père
Perdue, hélas ! Dans l'herbe folle de la nuit.
J'ai le mal du pays….
Et quand je suis tout seul, tout seul avec ma peine,
Que mon coeur se remplit d'un chimérique espoir,
Que l'ombre du passé toujours plus loin m'entraîne
Jusques à concevoir l'impossible au revoir...
J'ai le mal du pays….
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TRADITIONS POPULAIRES D'ALGERIE
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REMÈDE CONTRE L'ÉPILEPSIE
ET AUTRES ACCIDENTS NERVEUX.
A nechra (sacrifice) est une pratique des plus répandues chez tous les indigènes du nord de l'Afrique pour combattre l'épilepsie et autres maladies nerveuses.
Les différents détails de cette pratique doivent être rigoureusement observés, si l'on veut obtenir une guérison certaine.
Voici la façon dont procèdent les indigènes : si la personne malade est un homme, on égorge une poule, si c'est une femme c'est un coq qu'il faut tuer.
Au moment de l'égorgement, le sang de la volaille est soigneusement recueilli et mis de côté avec les plumes.
Puis cette volaille est cuite comme pour un repas ordinaire. Après la cuisson, elle est placée sur un plat dans un endroit élevé de l'habitation, sur un meuble quelconque, les lumières sont alors éteintes et pendant une heure personne ne touche au mets afin de permettre aux Djenoun (génies) de consommer un peu de la nourriture se trouvant dans le plat.
Ensuite la famille du malade mange la volaille en ayant bien soin de ne pas Loucher à la tête ni de broyer les os des pattes et des ailes du volatile.
Ces os et la tête sont précieusement conservés et placés dans une marmite en terre (bourma) dans laquelle se trouvent déjà les plumes et le sang de la volaille, ainsi qu'une petite quantité d'orge.
Un membre de la famille doit alors prendre cette marmite, et la placer le matin de bonne heure sur un chemin.
Lorsqu'il transporte la marmite il ne doit ni retourner la tête, ni répondre à un appel qui lui serait adressé. Il dépose dévotement le récipient sur le chemin en proférant le traditionnel " Bism Allah " (au nom de Dieu)
Dès que cette marmite sera cassée par un individu quelconque, homme, femme ou enfant, la maladie quittera immédiatement le malade et ce sera celui qui aura brisé la marmite qui en sera affecté.
signé : ACHILLE ROBERT.
Revue des traditions populaires
N°1 janvier 1897
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CONTE EN SABIR
Par Kaddour
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LI CHACAIL Y L'ISCARGOT
Fable imitée de la " REVUE ALGÉRIENNE "
On jor dans la motagne, qui s'appil Djurjura,
Ji counit on chacal qui n'iti pas bian gras.
Il y crivi la faim, barc' qui li chian kabyles
Y son gardi tri bian, li pol y li zouaïles,
Y va sarchi bartou, qualqui soge por mangi
Son trouvi di crotin ou bian di chian crivi.
Pas moyen di risti blous lontan dans cit bled
Bisouan qui ji partir, qui dir cit yaouled,
Por marchir dans Algir, ou ji trouve Garagousse
Qui cit on bon garçoun, qui mi donne bon couscousse.
Y son marchi la rote, afic on gran matraque.
To pris Tizi-Ouzou, son trouvit on scargot,
Qui marchi docement, barc' qui porte son baraque.
Osqui ti va comme ça, afic barda su l'dos ?
Ji marchi por Algir por ji voir ma maman.
Mon zami vos ites fol ! au mouan blous di dos ans
Bisoan qui ti marchi. Y pit être qui ti mort,
Qui ti crivi la route. Ji crois vos avi tort.
Ti rigolé ji crois. Ji parie afic toi,
Qui j'arrive li promier, qui répond l'iscargot,
Y ji ti donne encore trois pas avance sor moi.
Li chacal y son rire, y pense il est idiot.
Ji parie bon couscousse. - Ci bon ti po courir,
Marchi bor en avan, on, dos, ti po bartir.
L'iscargot qui barli, il est on gran canail.
Y monti to di souite, dans la queue di chacail.
Ci loui là son barti, il corir la montagne,
Fissa, fissa, fissa ; ji souis seur qui ji gagne.
Il son rivi Algir, encore ji fi pas jour,
La porte ji son farmi, pas moyen fir li tour.
Ji va cochir on peu qui pensi li chacail,
Y cochi. Y tot souite, l'iscargot y sortir.
Pas trop tôt son fini, bisoan qui ji m'en aille
Por rentrer dans la ville. Y toi ti po dormir.
L'iscargot son bassi par dissous di la porte.
Y rentri dans la ville, son monti sor rempart.
Il appil li chacail tot à fit en retard.
Y bian, quisqui ti fi ? Ti bisouan qui ji sorte ?
Ti dormir mon zami ; yana blous di dos hore
Ji souis rivit ici, y di perdre ji pore.
Y mon couscousse, ti va beyer ji crois.
Barc'qui ji bian compti quand ti part on, dos, trois.
Li chacail il y fou y regarde cit scargot,
Y pense qui cit on djinn y fot moi le camp bientôt.
MORALE
Porquoi fir qui ti cour, puisqui t'a pas la sanche ?
Pas bisoin fir mariol, afic jambe comme lapin,
Barc' qui ti part samedi, ti viendra li dimanche.
Millor qui part li soir, y j'arrive li matin.
Ci comme ça qui barlit afic on gran chacail
On citoyen scargot qui gagni la batail.
Quand ti marchi la rote, si ti n'a pas la ch'val
Sarchit on bon chacail, s'est tot à fit égal.
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PHOTOS DE VIE BÔNOISE
Envoyé par M. divers donateurs
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COLLEGE MERCIER DE BÔNE
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ELOGE AU COLON ALGERIEN
Paru sur le Mutilé du 1er mai 1821, N°191
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Jadis, belle. Algérie, ton sol était stérile ;
L'haleine du désert martyrisait tes fleurs ;
L'oranger, l'olivier laissaient couler des pleurs
Et le troupeau, de faim, allait d'un pas débile.
Le Colon algérien, de sa charrue féconde,
Après de durs travaux, a reverdi les près.
Regarde étinceler les anciens minarets !
Convoités par les yeux des Nations du monde !
Vois la belle Campagne ! Elle toute fleurie !
Qui donc a ravivé et ton sol et ta vie ?
Ce n'est point Jupiter, car, regarde ma fille :
Là-bas, parmi ces blés, dis-moi, ne vois-tu rien ?
France! Mère je vois la féconde faucille
Du joyeux moissonneur, le Colon algérien !
Joachim CAMPILLO.
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PHOTOS D'ECOLE
Envoyé par Mme Michèle Rochas née Dilettato
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ECOLE BEAUSEJOUR
Maternelle 1953/1954
Michelle Dilettato : en partant de la gauche, 7ème du 2ème rang
___________________
Maternelle 1954/1955
Michelle Dilettato : 1ère à gauche du 2ème rang
___________________
ECOLE VACCARO ???
CP en 1955/1956
Michelle Dilettato : en partant de la gauche 10ème du 1er rang en Haut
Est-ce que d'autres amies se reconnaîtront-elles ?
Merci Michèle
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L'ŒUVRE DE F.-C. MAILLOT
N° 7
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ANCIEN PRÉSIDENT
DU CONSEIL DE SANTÉ DES ARMÉES
Deuxième Edition
PARIS 1894
OCTAVE DOIN, ÉDITEUR
8, PLACE DE L'ODEON |
MAILLOT François-Clément, né à BRIEY (Moselle) le 13 Février1804. Ancien Président du Conseil de Santé des Armées, Commandeur de la Légion d’Honneur, récompense nationale attribuée par la loi du 25 juillet 1888. Ancien médecin en chef de l’hôpital militaire de Bône 1834-1836. |
TRIBUT DE RECONNAISSANCE DU COMITÉ
D'ÉTUDES MÉDICALES DE L'ALGERIE
MORBIDITÉ ET MORTALITÉ
DE L'ARMÉE EN FRANCE ET EN ALGÉRIE
A Monsieur le Docteur E. LE SOURD,
Directeur de la Gazette des Hôpitaux
MON CHER DIRECTEUR,
Dans mon article intitulé : Origine et développement de la thérapeutique algérienne, que vous avez bien voulu insérer dans la Gazette des Hôpitaux du 29 mai 1883, j'émets la proposition que la " proportion des décès aux maladies traitées dans les ce hôpitaux est à très peu de chose près la même " en Algérie qu'en France ".
Ne pensez-vous pas qu'une affirmation de cette importance mérite qu'on l'appuie sur des chiffres, surtout si on la rapproche de l'impression douloureuse qu'ont laissée en France les désastres du début de notre séjour en Algérie? C'est du moins mon avis ; et dans cette persuasion j'ai cherché si je ne pourrais en trouver la preuve dans la Statistique médicale de Vannée. J'ai donc dépouillé les quatre dernières années de ce document officiel, qui s'arrête à 1880. Voici le résultat de mes recherches.
J'ai pris pour point de comparaison le gouvernement de Paris, qui embrasse une des contrées les plus salubres de France et dont l'effectif militaire est à peu près le même que celui de l'Algérie.
J'ai alors trouvé que la morbidité dans notre armée d'Afrique est de beaucoup plus considérable qu'en France, que par suite la mortalité y dépasse d'environ un tiers celle du gouvernement de Paris ; mais que la proportion des morts au nombre des malades y est notablement inférieure.
Cette triple énonciation, qui va causer bien des surprises, se base sur les mouvements hospitaliers des années 1877, 1878, 1879 et 1880.
Le travail officiel auquel- je les emprunte ne va pas au-delà, comme je viens déjà de le dire, et il m'a révélé ce qui suit :
Les entrées aux hôpitaux en Algérie et dans le gouvernement de Paris réunis ont été au nombre de 137,043; les morts, à celui de 4,833 ; ce qui donne 1 mort sur 28.
Si l'on décompose ce chiffre d'ensemble, on a pour l'Algérie 86,298 entrées et 2,747 morts ; pour la France, 50,745 entrées et 2,860 morts.
D'où une mortalité en Algérie de 1 sur 31, et dans le gouvernement de Paris de 1 sur 24, en nombres ronds, laissant de côté des fractions tout à fait insignifiantes, sans portée.
Ne pensez-vous pas, mon cher Directeur, que la vulgarisation de ce fait officiel soit de nature à dissiper bien des préventions contre l'Algérie et à rassurer les familles qui ont leurs enfants dans cette contrée, autrefois si meurtrière? Il est loin, en effet, le temps où, sur une garnison de 3,000 à; 4,000 hommes, on en perdait 1,526 en un an. Il est proche, au contraire, celui où la mortalité générale sera moindre en Algérie qu'en France, comme il arrive depuis quelques années pour la mortalité proportionnelle au chiffre des malades. Cette évolution se fera à bref délai, à mesure que le dessèchement des marais, le drainage, l'endiguement des cours d'eau, le reboisement, les travaux déjà si considérables de l'agriculture et de la viticulture, feront disparaître les causes spéciales bien connues, bien déterminées des maladies jadis si redoutables et qui obéissent aujourd'hui si facilement à la thérapeutique.
J'avoue que pour mon compte, en commençant cette intéressante étude, j'étais encore dans la croyance que la mortalité proportionnelle au nombre des malades était un peu moins favorable dans notre armée d'Afrique qu'en France ; la réserve avec laquelle j'ai formulé mon sentiment dans la proposition que j'ai rappelée plus haut - et dont cette note n'est qu'un complément et une simple démonstration - indique suffisamment quel était ce sentiment.
Permettez-moi, en finissant, de vous faire remarquer que le résultat que je signale à l'attention publique est dû en grande partie au dévouement des médecins militaires, car, depuis plus d'un demi siècle, ils ne cessent de combattre, au milieu des fatigues et des dangers, un mal qui avait très gravement compromis la conservation de l'Algérie. Je connais trop l'élévation de vos sentiments pour n'être pas sûr à l'avance que vous vous associerez à mon appréciation ; l'insertion de cette appréciation dans votre journal, si universellement lu et si grandement estimé, sera pour ces vaillants lutteurs le plus précieux des encouragements.
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CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES
SUR L'ÉTAT SANITAIRE DE LA GARNISONDE BÔNE
DE 1832 A 1881
I
La ville de Bône a été occupée par l'armée française au mois de mars 1832. L'effectif de sa garnison a été, pendant plusieurs années, de 3,000 à 5,000 hommes ; il s'est ensuite abaissé dans des proportions variables, à mesure que s'opérait et s'étendait la pacification du pays ; c'est ainsi que, de 1872 à 1880, il ne s'est élevé qu'une fois à 2,250; que son minimum a été de 1,337 en 1873, et en 1874 de 1,240; le reste du temps, il s'est maintenu un peu au-dessous de 2,000. Il m'a paru utile d'exposer ces chiffres, parce que leur connaissance permettra d'apprécier d'un coup d'oeil les proportions entre les valides, les malades et les morts.
Cela posé, j'interroge les mouvements hospitaliers de cette longue période et voici ce qu'ils répondent :
En 1832, on a eu 4,033 entrants; 449 morts; 1 mort sur 9 ;
En 1833, on a eu 6,704 entrants; 1,526 morts; 1 mort sur 4 ;
En 1834, jusqu'au 16 mars 1835, on a eu 11,593 entrants; 538 morts ; 1 mort sur 21.
Cette période de quatorze mois et demi qui, avec 856 malades en plus que pendant les deux années précédentes réunies, compte 1,437 morts en moins, correspond au temps où j'ai rempli les fonctions de médecin en chef de l'hôpital de Bône et où j'ai fondé la thérapeutique qu'on peut appeler algérienne, thérapeutique qui a fini, après bien des traverses, par s'imposera tous; une expérience demi-séculaire en a confirmé les principes et les résultats, comme va nous le démontrer la Statistique médicale de l'armée prescrite par la loi du 22 janvier 1851, mais dont, malheureusement pour mes recherches, le premier fascicule n'a paru qu'en 1865.
Il est sans doute très regrettable que, dans ce longtemps, de 1835 à 1865, il n'ait été publié aucun document, soit médical, soit administratif, qui me permettrait de baser sur des chiffres mes assertions, à savoir que, durant cet intervalle, on n'a vu qu'une seule fois, en 1852 et 1853, l'épidémie estivale prendre un grand développement; et que la mortalité proportionnelle non seulement est restée presque toujours dans les mêmes limites qu'en 1834, mais encore qu'elle a fini par devenir beaucoup moindre. On ne peut, du reste, mettre en doute cette progression, quand on voit les résultats énoncés en 1865 dans le premier fascicule de la Statistique médicale de l'armée, qui désormais va régler tout mathématiquement et nous conduire au grand jour, sans hésitation, sans le moindre faux-fuyant, jusqu'en 1880, où a paru son dernier numéro.
J'ai relevé dans ce grand et important ouvrage les chiffres qui concernent l'hôpital de Bône et je les ai dressés dans le tableau ci-dessous.
Mouvement de l'hôpital militaire de Bône
du 1" janvier 1865 au 31 décembre 1880
Années |
Entrants |
Morts |
Proportions des morts aux entrées |
1865 1866 1867 1868 1869 1872 (1) 1873 1874 1875 1876 1877 1878 1879 1880 |
1595 1248 1212 1970 1436 1956 1184 1078 1340 1614 1367 1100 1014 951 |
25 21 23 68 31 48 28 22 36 26 24 67 25 71 |
1 mort sur... 62 " 59 " 52
" 28 " 46 " 40
" 42 " 49 " 37
" 62 " 56 " 16
" 40 " 55 |
1) Par suite de la guerre, la statistique de 1870 et de 1871 n'a pas été établie.
Ces chiffres ont une éloquence saisissante ; ils démontrent que Bône, après avoir été un séjour des plus pernicieux, est devenue une des localités de l'Algérie où l'on meurt le moins ; on ne peut les suspecter d'erreurs, car ils sont fournis par un document, officiel, rédigé sous la haute surveillance du Conseil de santé des armées et publié par le ministre de la Guerre, conformément à une loi spéciale. Quand on a assisté aux désastres qui ont tant assombri nos jeunes années en Afrique, on est heureux d'avoir assez vécu, pour voir couronnés par de semblables succès les efforts des pionniers de la première heure.
Mais continuons notre étude et voyons si elle ne nous révélera pas des faits non moins curieux pour le science. J'en découvre immédiatement ; c'est la faible mortalité que donnent aujourd'hui à Bône les fièvres intermittentes et rémittentes, ces affections autrefois si meurtrières. Je dis si meurtrières, et j'ajoute : à un point dont on ne s'est jamais douté en France. En voici un exemple, qui avait fini par prendre dans mon esprit un caractère de légende: dans le doute, je priai mon excellent ami, l'inspecteur Hutin, à qui nous devons une remarquable histoire de l'épidémie de 1833, de m'en rappeler les détails ; il me répondit ceci de Saint-Germain, le 10 mars 1834 : " Comme il était un peu tourmenté par les Arabes, on renforça ce poste (le blockaus de la fontaine, à moins de 2 kilomètres de la ville ; on y mit 27 hommes. Sur ce nombre 24 ou 25 sont morts après deux ou trois jours de maladie; le médecin était des morts " On trouverait difficilement un témoignage plus frappant de la gravité du mal et de l'insuffisance de la médication, qu'on nous avait enseignée dans les écoles universitaires tout aussi bien qu'au Val-de-Grâce, si souvent incriminé, mais qui ne le méritait pas plus que les autres centres d'instruction, où nous n'avions pour classiques en la matière que la Nosographie de Pinel et le Traité d'Alibert.
J'appuie mes assertions sur le tableau suivant, qui indique le nombre des fièvres intermittentes et rémittentes traitées pendant onze ans à l'hôpital de Bône, et celui des décès qu'elles ont fournis :
Années |
Nombre des fièvres |
Décès |
1865 1866 1867 1868 1869 1875 (1) 1876 1877 1878 1879 1880 |
958 652 480 1011 867 661 891 605 520 412 247
|
5 6 1 15 8 10 10 2 12 5 2 |
1) Par suite de la guerre, point de statistique en 1870et en 1871; les fascicules de 1872, 1873, 1874, ne donnent que le chiffre brut des malades, sans indiquer le genre des maladies
Je crois que les praticiens prendront un grand intérêt aux faits que j'expose et que ces faits n'auront pas moins de prix aux yeux des statisticiens et des économistes, car ils sont d'un bien grand poids dans les questions que l'on agite depuis cinquante ans et qui semblent n'avoir pas encore été définitivement résolues pour tout le monde : à savoir, si les Européens ont la puissance de s'acclimater en Algérie et d'y perpétuer leur race. Pour moi, je n'en fais pas le moindre doute : la ville de Bône nous en fournit une preuve irréfutable. Elle était en ruines, lorsque nous y sommes entrés ; elle avait à peine 5,000 habitants, Maures et Arabes, pauvres, chétifs, déguenillés.
Aujourd'hui c'est une cité florissante, riche, coquette, siège d'un grand commerce, comptant une population de plus de 28,000 âmes, ayant ouvert de larges rues et élevé des maisons splendides sur ce terrain empoisonné, dont le voisinage avait, à deux reprises, si grandement compromis les brillantes destinées qui l'attendaient. Comme dans presque toute l'Algérie, les fièvres y sont encore fréquentes, mais on les dompte facilement; en les arrêtant immédiatement, on prévient les accidents consécutifs et la cachexie palustre y est devenue rare ; les malades recouvrent leurs forces en quelques jours et reprennent vite, les soldats leur service, les colons leurs travaux. C'est là ce quia permis, d'une part, de diminuer l'effectif de la garnison; d'autre part, de mettre en culture des plaines immenses et de planter ces vignobles, qui vont constituer une grande richesse pour l'Algérie et fournir à la métropole les ressources que lui a enlevées le phylloxéra.
Je sais très bien, et je m'en suis déjà expliqué ailleurs, que dans cette diminution du nombre des lièvres, dans leur atténuation, dans l'abaissement si considérable de la mortalité, tout l'honneur ne revient pas à la médecine ; je ne méconnais pas l'influence des autres facteurs, telle qu'une meilleure installation, une alimentation plus riche, plus substantielle, plus variée, le dessèchement d'un assez grand nombre de localités marécageuses et rendues ainsi à l'agriculture. Mais, s'il est difficile de faire exactement la part qui revient à la première et celle qui est due à ces dernières conditions, il n'y a pas moins ce fait qui appartient uniquement à la thérapeutique; l'arrêt subit de la mortalité en 1834; l'influence persistante de l'action de cette thérapeutique ; la diminution immédiate des décès dans les diverses stations aussitôt qu'elle a été adoptée; le retour non moins prompt des revers aussitôt qu'on s'en écartait, comme il est arrivé souvent, par exemple quand les médecins venant de France étaient sans préparation, sans aucun avertissement, chargés de diriger des services de fiévreux.
II
J'ai toujours été convaincu que nous n'arriverions à maîtriser les fièvres du pays qu'avec l'aide des travaux décolonisation et je le prouve en transcrivant ici les quelques lignes par lesquelles, en 1836, je terminais mon traité des fièvres intermittentes: " Il n'y a qu'un moyen de faire cesser ces désolantes endémies: c'est la destruction des marais, à laquelle on peut arriver par deux voies, en les desséchant ou en les couvrant d'eau. Mais la conversion des marais en étangs est encore une demi-mesure, parce qu'à l'époque des chaleurs leurs bords, dans une étendue plus ou moins grande, restent à nu, et alors ils ont une influence presque aussi désastreuse... Il n'y a donc que le dessèchement sur lequel on puisse compter, pour détruire entièrement ces maladies, qui sont du nombre de celles qu'on doit faire disparaître, avec les progrès de la civilisation Les générations donc qui entreprendront le dessèchement des marais ne mèneront à bien cette noble et importante opération qu'avec de grandes dépenses d'hommes et d'argent, mais elles rendront à l'industrie des terrains immenses ; mais elles donneront des populations mâles et vigoureuses à ces pays où l'on ne voit aujourd'hui que des habitants clairsemés, débiles et arrachant avec peine à un sol ingrat et meurtrier les moyens de prolonger de quelques jours leur misérable existence. "
Ces lignes étaient à peine écrites depuis deux ans, que le génie militaire entreprit l'assainissement de la place de Bône ; on y établit une espèce de drainage, en creusant des canaux qui recevaient aussi les eaux des pluies torrentielles de l'automne et de l'hiver et les conduisaient à la mer ; on y fit des remblais pour exhausser le terrain dans les points les plus déclives ; on développa les travaux d'agriculture, dont les soldats avaient déjà donné l'exemple en créant, sous l'autorité du commandement, des jardins qui leur procuraient d'excellents légumes pour améliorer leur ordinaire. L'opération, commencée en 1838, fut terminée l'année suivante ; et depuis 1840 on eut une accalmie qui se prolongea jusqu'en 1852, où éclata alors une explosion de fièvres qui se renouvela en 1853, pour rappeler les mauvais jours du début par le nombre, mais heureusement non parla gravité des atteintes. En effet, si en 1852 on a eu 5,715 entrants, on n'a compté que 127 décès, c'est-à-dire 1 mort sur 45 malades ; si en 1853 on a reçu 4,952 malades, on n'a inscrit que 150 morts, 1 sur 33 entrants.
Cette réapparition d'une endémo-épidémie sérieuse, qui avait été précédée par le choléra de 1849, n'aurait pas dû surprendre autant qu'elle l'a fait; j'ai sous les yeux les preuves écrites que, dès 1847, elle se laissait pressentir par la manifestation de cas plus nombreux et plus graves, qui relevaient de conditions dont on n'a pas tenu assez de compte ; je veux dire que, déjà à cette époque, un ingénieur et un médecin avaient constaté et révélé que les canaux de la plaine commençaient à s'envaser, se remplissaient par des éboulements successifs, qu'ils ne pouvaient plus recevoir la totalité des eaux de pluie qui s'épandaient dans la plaine ; que le ruisseau d'Or qui la traverse, arrêté dans son cours par une arche trop basse, passait par-dessus ses berges et noyait les terrains environnants. On négligea ces premiers avertissements, et les conditions topographiques de la plaine finirent par revenir à peu près à l'état antérieur aux travaux de 1838.
C'est ainsi que furent préparées et déterminées les épidémies de 1852 et 1853. J'en rendis compte au ministre pendant mon inspection de cette dernière année ; j'étais sur le théâtre même de ces événements, et au moment où une commission administrative étudiait la question et proposait des moyens analogues à ceux qui ont été employés dans l'assainissement et le dessèchement des polders. De mon côté, j'émis l'avis de désencombrer les canaux, de rétablir l'écoulement des eaux en détruisant le barrage que le sable de mer et la vase des canaux avaient créé au point où ceux-ci devaient se décharger dans la mer. Le principe fut adopté ; mais on jugea qu'il serait plus facile et plus simple de creuser de nouveaux canaux, tout en comblant les anciens.
J'avais aussi exprimé, dans mon rapport au ministre, ma pensée sur le danger permanent que constituait pour la ville de Bône le voisinage du lac Fezzara, qui pour moi avait une double action nuisible : d'abord en donnant naissance à un grand nombre de fièvres, malgré son éloignement de 25 kilomètres ; puis, et surtout, en augmentant leur gravité par les miasmes qui s'en dégageaient et que les vents apportaient souvent sur la ville. J'ai su que mon avis, combattu par des opinions contraires, n'avait pas été accueilli favorablement ; aussi je ne me flatte pas d'avoir été pour quelque chose dans la gigantesque entreprise du dessèchement de ce fameux lac, qui avait une surface de 14,000 hectares, opération qui, mise à exécution vingt ans plus tôt, aurait bien avancé la colonisation. Maintenant, si l'on désire savoir quelle influence ont eue, sur l'état sanitaire de la ville de Bône, les travaux dont nous venons de parler et si les faits ont répondu à la théorie, je dirai que, depuis les épidémies de 1852 et de 1853, les maladies ont repris les allures modérées dont on s'est tant félicité de 1840 à 1852.
Je ne puis mieux faire, au surplus, que de copier textuellement ce que dit à ce sujet, dans son rapport sur le service médical du 1er avril 1881 au 31 mars 1881, M. Hattute, médecin en chef de l'hôpital de Bône, aujourd'hui médecin en chef de l'hôpital militaire du Gros-Caillou, à Paris : " Les plantations, dit-il, l'aménagement des eaux par l'extension des zones de culture ont tellement assaini Bône et ses environs que les fièvres d'accès y deviennent tout à fait exceptionnelles... Actuellement les plantations d'eucalyptus, faites sur les terrains conquis sur le lac Fezzara, assurent pour l'avenir la salubrité des campagnes environnantes, désolées jusqu'à présent chaque année par l'endémie,
pendant la saison des chaleurs... Sur le nombre total des fièvres intermittentes pernicieuses ou rémittentes observées pendant l'année, très peu sont originaires de Bône. "
Le mouvement hospitalier de l'année est en complet accord avec les réflexions qui précèdent ; 932 malades, 14 morts (296 fièvres intermittentes, dont 2 pernicieuses comateuses; 15 fièvres rémittentes). " Les cas de cachexie, dit encore M. Hattute, se montrent presque exclusivement chez les hommes du pénitencier militaire, en raison de leurs missions pénibles, ouvertures de routes, dessèchement des marais, défrichements, etc., d'où de nombreuses récidives ; les cas de dysenterie sont aussi nombreux chez eux... Les deux hommes, morts par accès comateux, venaient de camps éloignés. "
Je n'ai pas, dans ce travail, dissimulé l'importance des travaux de colonisation pour arriver à rendre à l'Algérie la salubrité qu'elle avait du temps des Romains, qui n'ont pas connu les maladies qui nous ont tant éprouvés. Est-ce à dire pour cela que j'entende reléguer la médecine au second plan?
Non : Dieu m'en préserve ! Son rôle dans la colonisation algérienne a été trop grand, pour qu'on ne lui en conserve pas l'honneur. Je crois même que sans son intervention on n'aurait pu rien mener à bien. C'est elle, en effet, qui a fourni les instruments primordiaux du travail, c'est-à-dire des hommes restés valides malgré plusieurs atteintes de fièvres, ces hommes ayant été défendus à temps par des remèdes héroïques contre un mal qui, s'il n'avait pas été arrêté immédiatement, les aurait tués en quelques jours ou rendus en quelques semaines impropres à tout métier, à tout effort violent Cette appréciation des services rendus par la thérapeutique en Algérie a été formulée, de la façon la plus humoristique, par M. le Dr Bordier, professeur à l'Ecole d'anthropologie de Paris, lorsque, dans le National du 5 octobre 1881, il a dit : " La devise du général Bugeaud, Ense et aratro, est célèbre ; mais que serait devenue la colonie de l'Algérie sans celle de Maillot : Le sulfate de quinine! "
A SUIVRE
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NOS BUVARDS D'ANTAN
Envoyé par M. Jean Pierre PEYRAT
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Source : collection personnelle de M. Paul Rost de Constantine.
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NOTES
Bulletin de l'Algérie
N° 6, février 1856
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DU COTON ARTIFICIEL DE PALMIER
ET SON APPLICATION A LA FABRICATION DU PAPIER.
Une industrie nouvelle, essentiellement algérienne, a été fondée, il y a à peine un an, dans notre belle colonie du nord de l'Afrique. Elle utilise un produit naturel, jusqu'aujourd'hui sans valeur. La surface des terrains couverts de palmiers est incalculable dans notre conquête. Le sol où cette plante croît abondamment, et qui était réputé sans valeur, en acquiert une considérable. Admettant, en moyenne, au minimum, une touffe de palmiers par deux mètres de superficie, dans un hectare de terre dite à palmier, et supposant que cette touffe ne donne par année que 3 kilogrammes de feuilles, de ces deux chiffres, évidemment bien au-dessous de la réalité, il résultera par hectare une production de 150 quintaux métriques qui, payés sur les lieux au prix de 1 fr. 50 c., rapporteront, chaque année, par hectare, un total de 225 fr.
Le palmier coupé repousse avec tant de vigueur, que, l'année suivante, on peut le récolter encore, et alors, même après un incendie, il est plus tendre, plus flexible et se prête mieux à la fabrication. Libre au colon de le cueillir en tout temps; pour lui point d'avances comme dans les cultures ordinaires; il n'a besoin, ni de labourer, ni de semer; point d'époque fixe pour la fauchaison; pas la moindre chance de perdre, par l'intempérie des saisons, la récolte sur laquelle il compte.
D'on vient donc que l'on n'avait pas songé jusqu'à présent à utiliser une matière première, si abondante, et qu'il est si facile de se procurer?
Pourquoi encourager, sans cesse, la destruction de ce qui existe, pour lui substituer, à grands frais, ce qui n'existe pas?
Ne vaudrait-il pas mieux chercher dans des produits méconnus de nouvelles ressources pour l'industrie?
A quoi bon offrir des primes à ceux qui arrachent le palmier, quand il n'y a qu'à le couper pour le vendre et en tirer profit?
Pourquoi enfin tourner en ridicule ceux qui, s'engageant dans des voies nouvelles, cherchent, par tous les moyens, à utiliser les moindres produits dont la nature se montre si prodigue envers nos possessions algériennes?
Mais, répond aussitôt la routine, le palmier-nain d'Afrique est une plante nuisible et inutile.
Nuisible? En quoi? Nous attendons qu'on nous le démontre.
Inutile? Le pays entier proteste contre cette assertion, et voici quelques-uns de ses principaux usages : les indigènes en font des balais, des nattes, des tapis, des paniers, des pinceaux à badigeonner, des couffins (et Dieu sait si le couffin est indispensable en Afrique!), des chapeaux, des cordes, du crin végétal, etc., etc. Les fruits servent dans leur bijouterie; ils se nourrissent de sa racine, ou plutôt de son bourgeon; et avec la pulpe du fruit, qu'ils laissent fermenter, ils font de la piquette.
Ayant médité tous ces détails, le 15 février 1855, un honorable propriétaire d'Alger, M. Théophile Foucault, a fondé dans cette ville, en nom collectif à son égard, en commandite à l'égard de tous ses associés, une compagnie ayant pour objet la mise en commun de la propriété d'un procédé qu'il a découvert, et des brevets d'invention y relatifs, pris ou à prendre en son nom, pour l'effilochage des plantes fibreuses et leur réduction en pales ou en charpies, ledit procédé devant être exploité, soit par la création d'usines ou de centres de population sur des propriétés louées, achetées ou concédées, soit par des cessions partielles du procédé à exploiter dans les localités où la société ne jugerait pas convenable d'établir directement des usines.
Elle est formée pour quinze années, à partir dudit jour, et peut être prorogée. Son capital social est fixé provisoirement à 200.000 fr., représentés par 2.000 actions de 100 fr.
Il sera réalisé eu deux émissions successives :
La première, qui, sous le titre d'Actions de fondation, est de 100 actions, représente le capital de 10.000 fr. fournis par les fondateurs : moyennant le produit de cette émission, et du quart des bénéfices nets réservé à l'inventeur, M. Foucault se trouve couvert de l'apport de son procédé, et s'engage à forfait, à ses risques et périls, à pourvoir aux frais de constitution de la société; à préparer, avec le matériel qu'il possède, à titre d'échantillons, 1,000 kilogrammes de produits, en pâtes ou en charpies, dont un dixième au moins, en présence des membres du comité de surveillance; à faire transformer ces matières en papier ou en autres produits dans des usines, eu France ou ailleurs, en présence d'une commission d'hommes compétents; et à démontrer que les prix obtenus par le nouveau procédé sont, à qualité égale, inférieurs à ceux des similaires ou analogues dans le commerce.
La deuxième émission ne sera faite que lorsque tout ce qui vient d'être prescrit aura été effectué dans le délai de six mois; qu'il en aura été justifié au comité de surveillance, et que, sur son rapport, elle aura été autorisée par l'assemblée générale, aux trois quarts des voix des actionnaires fondateurs présents. Elle sera de 190.000 fr., représentés par 1.900 actions de 100 fr., et complétera le capital de la société.
Les propriétaires des actions de fondateurs auront le droit de prendre au pair jusqu'à 19 actions de la deuxième émission par chacune de leurs actions premières, pourvu qu'ils usent de ce droit dans les trente jours qui suivront la publication de la décision qui l'aura autorisée.
Le produit de cette émission nouvelle servira à la création de la première usine de la société, à son fonds de roulement, à son fonds de réserve.
L'établissement d'autres usines et la création de centres de populations, s'ils sont jugés nécessaires, auront lieu, ou par de nouvelles émissions d'actions, ou par la création d'obligations à intérêt, autorisée par l'assemblée générale.
Dans toutes ces émissions ultérieures, moitié du capital sera réservée, au pair, aux propriétaires d'actions des deux premières émissions, moitié aux propriétaires des actions de fondateurs, le tout en proportion du nombre de leurs actions et sous la condition d'user de ce droit dans les trente jours.
Telles sont les principales dispositions des statuts de la société d'effilochage des plantes fibreuses, fondée, il y aura bientôt un an, par M. Foucault. De ses produits il est parvenu à extraire, en outre, une couleur verte et une sépia du plus beau ton, utilisables pour la peinture en bâtiment, et précieuses pour l'aquarelle; une étoupe abondante, d'une force remarquable; un coton des plus fins, d'une blancheur éblouissante; des papiers divers, enfin, reconnus supérieurs par l'homogénéité de leur matière, la solidité de la fibre et leur bon marché.
Et à supposer que, par la suite, on n'en retire pas d'autres produits, cette énumération n'est-elle pas déjà assez concluante pour une plante repoussée si longtemps comme inutile?
La consommation du papier, qui est devenu moins cher depuis l'introduction des cylindres dans cette industrie, n'est plus en rapport avec le peu de chiffon qu'on recueille. Aussi la disette extrême de cette matière première se fait-elle généralement sentir en Europe. Les sociétés savantes et industrielles proposent des primes pour qu'on tente d'y suppléer; elles encouragent, de toutes parts, les introducteurs de matières nouvelles pouvant être utilisées dans la papeterie.
Le coton artificiel de palmier fabriqué par M. Foucault est maintenant jugé à la suite de nombreuses expériences décisives. Le but est atteint. Le problème si difficile de trouver une matière aussi bonne que le chiffon et pas plus chère, est résolu, à la grande satisfaction des papetiers, qui avaient été les premiers à le déclarer insoluble. Déjà ils assimilent le coton artificiel aux sortes dites bonnes toiles, devant donner du corps aux cotons qui, par eux-mêmes, en manquent, bien qu'ils soient maintenant la base principale de la papeterie.
Jamais, en outre, la matière première ne manquera an coton artificiel : l'Algérie entière proteste coutre toute crainte de cette nature.
Jamais, non plus, ce nouveau produit n'atteindra un prix assez haut pour le faire rejeter. Voyez déjà la compagnie Foucault le livrer à 40 fr les 100 kilogrammes, rendu en France, c'est-à-dire, dans l'état où se trouve cette matière, à 30 pour 100 meilleur marché que le chiffon.
Aussi les intéressés dans cette affaire ont-ils déjà en perspective des chances de bénéfice. L'abondance de la matière première, son bas prix, son écoulement facile, les décisions du conseil de surveillance de la société, après mûr examen, sont autant de garanties de succès.
Ce comité de surveillance, composé d'hommes sérieux et compétents, a contrôlé toutes les opérations du gérant, suivi tous les détails de sa fabrication, et, satisfait des résultats, a proposé aux intéressés l'émission de la deuxième série d'actions, exprimant le voeu qu'une prompte réalisation du fonds social fournît tous les moyens d'exploiter les procédés qu'il honore du nom flatteur de belle découverte de N. Foucault.
Le gérant, malgré l'adoption, à l'unanimité, de cette proposition par l'assemblée générale, a cru devoir, dans l'intérêt de ses actionnaires, agir avec une prudence, une réserve, qui lui ont valu l'assentiment de tous, en se bornant à demander 90.000 fr. au lieu des 190.000 que lui allouaient les statuts. Il a fort bien expliqué que, ne se proposant de fonder aujourd'hui qu'un seul établissement, il craindrait d'avoir par devers lui un capital considérable inutile, quant à présent, aux besoins de l'entreprise. Autorisé ainsi à en restreindre le chiffre par décision des actionnaires, qui lui en témoignent leur gratitude, il s'empresse de leur déclarer, en outre, que, sur ces 90.000 fr., il n'en demandera que 50.000, soit 500 actions de 100 fr. par chaque action de fondateur. Un pareil fait est au-dessus de tout éloge.
J. R. FABRE.
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SAGESSE CORSE ...
Envoyé Par Chamalo
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Un couple corse célèbre son 38ème anniversaire de mariage.
Leur tranquillité a toujours été le sujet de conversation dans leur village.
Un journaliste local décide donc de faire un reportage sur ce couple afin de connaître les raisons de ce bonheur.
Cela remonte à notre voyage de noce, explique la femme. Nous visitions le Grand Canyon et avions décidé de le traverser à dos d'âne. Nous n'avions pas encore parcouru une grande distance que l'âne de mon mari a trébuché.
Mon mari, sur un ton tranquille a dit : "Première fois". Il a fait se relever l'âne et nous avons continué.
Après une courte distance l'âne trébuche de nouveau. Une fois de plus, mon mari, sur un ton tranquille, dit :"Seconde fois". Il a encore fait se relever l'âne et nous sommes repartis.
Nous n'avions pas fait la moitié d'un kilomètre que l'âne trébuche pour une 3ème fois.
Tranquillement, mon mari a sorti un pistolet de son sac et a abattu l'âne.
C'est alors que je me suis fâchée et que je lui ai dit ce que je pensais de la façon dont il avait traité cette pauvre bête, quand soudain, il m'a regardé et m'a dit d'une voix tranquille : "Première fois".
Depuis ce jour, nous vivons heureux ...
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HISTOIRE et ARCHEOLOGIE
Compte-rendu de la 51e session, Cosntantine 1927 / Congrès Association française pour l'avancement des sciences...: Source BNF
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Commandant A. MAITROT DE LA MOTTE-CAPRON
Alger
DE RE PUNICA IN HIPPONENSIUM REGIONUM ARTIBUS
Nombreux ont été les peuples qui ont passé et ont séjourné plus ou moins longtemps sur le sol du Nord de l'Afrique, mais aucun n'a laissé une trace aussi nette et aussi durable que ne le firent les Phéniciens et les Carthaginois, leurs descendants, ou mieux, pour employer le terme générique, les Puniques.
C'est à tel point qu'à la belle époque de l'empire romain, au moment où l'Afrique du Nord donna naissance à saint Cyprien et à Tertullien de Carthage, à saint Augustin de Thagaste et à l'écrivain Arnobe, le vulgum pecus (pour employer un barbarisme courant) ne parlait que les langues berbère ou punique.
La soeur de l'empereur Septime Sévère, de l'ordre équestre de Leptis Magna, balbutiait à peine le latin et Sicinius Prudens, gendre d'Apulée de Madura, l'auteur de l'" Ane d'Or " ne comprenait que le punique ; c'était la même langue que parlaient la plupart des Hipponéens, à l'époque de saint Augustin.
Mais ce fut surtout dans les arts que cette empreinte profonde se manifesta.
Chacun sait que la Trinité grecque et la Trinité romaine dérivaient de la Trinité phénicienne. Baal ou Moloch, à moins que ce ne fût Malach, ne fut que l'ancêtre de Kpovoç ou de Saturne ; Melcarth se mua en Apollon ; Thanit ou Thanat s'humanisa en Diane.
Mais dans tout l'empire romain, comme dans la mythologie grecque, la parenté en resta là. Chacun des dieux se sépara nettement de ses frères d'origine ; l'un d'eux même, Melcarth, se détripla en Apollon, Hercule et Bacchus. En Afrique, au contraire, la Trinité resta indissoluble et sur toutes les stèles, on trouve une figure barbue d'homme fait, une tête gracile d'éphèbe et le masque aimable d'une jeune femme. Quelques sculpteurs poussèrent même le punisme jusqu'à accoster la barbe imposante du personnage central, d'un soleil rayonnant et d'un croissant de lune.
Mais je ne veux pas faire ici l'étude des traces puniques dans toute l'Afrique du Nord, mais, rechercher seulement quelles elles ont été à Hippone et à Bône.
Il ne faut pas s'étonner de les trouver si nombreuses dans la cité de saint Augustin. Fondée autant qu'on peut le savoir au XIIème siècle avant notre ère, la vieille ville subit le sort de Carthage, jusqu'au me siècle, époque à laquelle les rois numides en firent leur capitale de prédilection. Cette situation dura jusqu'en l'an 25, avec une interruption de 16 ans, lors de l'existence éphémère de la province romaine d'Africa Nova (46 à 30).
Comme les Numides n'eurent jamais d'art et de génie particuliers, les choses restèrent ce qu'elles étaient lors de la domination punique. Puis ce fut la période romaine, mais les habitudes étaient prises et les maîtres du monde observant fidèlement les règles qu'ils s'étaient tracées, respectèrent les coutumes et les moeurs qui ne les gênaient pas dans l'exercice de leur autorité.
De sorte que les Hipponéens continuèrent fort tranquillement à semer des fleurs puniques sur la trame nouvelle, mais assez lâche, qui leur était donnée.
Les traces puniques peuvent se diviser en deux catégories : ce qui concerne l'architecture et ce qui concerne les arts.
Il est très curieux de constater que les maîtres du grand appareil ne firent que très rarement usage de leur science. Tout au contraire, ils continuèrent à laisser construire suivant les procédés, excellents d'ailleurs, des Carthaginois, blocage et pisé. Mieux encore, les gens du pays enterrèrent leurs morts suivant les procédés chananéens et dans la direction de Tyr qu'ils ignoraient très probablement.
De même, très certainement qu'ils ne connaissaient pas l'origine des fleurs, des feuilles de lotus, des haches de sacrifice, des triangles, des disques, des croissants, de tous les emblèmes religieux dont ils décoraient leurs mosaïques, leurs frises, leurs statues, leurs stèles. Ils allèrent même jusqu'à n'employer que les couleurs qui étaient phéniciennes d'origine : le noir, couleur de deuil ; le jaune, d'essence religieuse et le rouge, devenu national par souvenir de la pourpre de Tyr el ces couleurs et ces emblèmes étaient tellement passés dans les moeurs que les chrétiens s'en servirent pour décorer leur basilique.
Plus tard encore, les artistes également chrétiens qui composèrent des mosaïques ornementales, en faisant appel aux ressources nombreuses que leur offrait la mythologie ancienne, représentèrent non les dieux romains, mais les divinités phéniciennes romanisées.
Ce qui est beaucoup plus curieux encore, c'est que ces traces se retrouvent à Bône, créée beaucoup plus tard et sur un emplacement tout autre. D'une façon générale, l'influence romaine se fait sentir dans les cintres classiques des maisons, alors que les arcs mauresques sont si nombreux dans les autres villes de l'Algérie. Mais le punisme joue toujours un très grand rôle et à Bône, comme à Hippone, plus inconsciemment encore, on jette à pleines mains, sur une trame très fidèlement romaine, des roses, des lotus, des croissants aussi purs, aussi délicats que ceux que l'on trouve dans la vieille ville dont le sol, tout au moins, avait connu les Puniques.
Que conclure de tout ceci ? Ou que l'influence phénicienne a été telle que les peuples qui se sont succédés en Afrique Mineure se la sont transmise, ou, ce qui est plus vraisemblable et plus conforme à la vérité historique, qu'il n'y a jamais eu qu'un seul peuple : les Berbères. Ceux-ci ont reçu des Phéniciens, des Romains, des Juifs, des Chrétiens, des Musulmans, des traditions dont la plus vive a été celle des Carthaginois, c'est-à-dire celle du premier peuple qui les a arrachés à leur barbarie.
Je n'ignore pas que je froisse quelques théories. Mais ce froissement est plus apparent que réel. Je sais qu'on attribue aux Romains une grande, une très grande influence sur les peuples qu'ils ont si bien civilisés dans l'Afrique du Nord, influence dont les traces sont si nombreuses que la trace romaine est la plus nette et que nous pouvons considérer les Berbères comme les continuateurs, au travers des siècles de l'Islam, de la vieille tradition latine.
Je vais beaucoup plus et beaucoup moins loin. Je ne dénie pas que les Berbères sont nos frères en Japhet, mais bien avant même que les Romains n'existassent. Je reconnais les traces latines dans certaines vénérations pour des restes de monuments chrétiens, comme le témoigne la lettre du savant abbé Delapart que j'ai reproduite dans la survie des Symboles. Dans la langue si particulariste des Kabyles, on trouve des mots latins non déformés, comme orto, le jardin, ulmo, l'orme. Les employés des mosquées, au Maroc, sonnent les heures des nuits de Rhamadan, avec des naffar, de grandes trompettes de cuivre, qui ne sont pas autre chose que la tuba romaine...
Mais, bien que latin d'origine, j'ai, dans l'esprit, un peu de la rudesse et de la vitalité du peuple le plus ancien du Monde, de ce peuple dont parlent toutes les traditions, tous les livres antiques et parmi eux, le plus ancien de tous, la Bible. Chacun naturellement, lui donne un nom dans sa langue, mais ce qui est curieux, c'est que tous ces noms ont la même étymologie et c'est à cette étymologie que j'en réfère pour moi-même. Je suis, moi aussi, un Berbère, un homme libre et je ne crains nullement de dire, parce que je crois que c'est la vérité que les rois indépendants de la Numidie, que les chefs des cavaliers mercenaires de Cartilage, que les sénateurs africains de Rome, que les patrices diocésains de Byzance, que les chefs des dynasties musulmanes de l'Ifrikia, qui ont vécu dans l'Afrique Mineure, ont tenu leurs fiefs, leurs qualités, leurs privilèges des races conquérantes, mais ils ont toujours fini par absorber leurs vainqueurs. Ils furent, tour à tour, puniques, romains, vandales, byzantins, arabes, turcs, français, mais ils furent surtout berbères et sont restés berbères.
Ils ont conservé quelques traces des civilisations qu'ils ont subies, mais ces traces sont devenues tellement vagues, se sont tellement diluées dans leurs propres moeurs restées immuables qu'il est difficile aujourd'hui, même à des yeux d'archéologue, de les discerner de façon intéressante. Toutefois, exception doit être faite pour les Puniques, qu'on les appelle Phéniciens, Carthaginois ou Chananéens. Ce sont les premiers qui sont venus les troubler en leurs coutumes assez rudimentaires et assez peu précises, ceci à l'appui de la thèse des savants qui veulent que le bassin méditerranéen ait été civilisé par des migrateurs de la mer Egée. Et ces esprits fiers qui devaient réagir contre les influences étrangères, ont conservé inconsciemment trace de celle de leurs premiers vainqueurs. C'est ce qu'on appelle physiologiquement l'empreinte, la marque ineffaçable et sans cesse reproduite à la suite du premier croisement quel que soit le temps écoulé depuis et quel que soit le nombre des croisements postérieurs. C'est pourquoi, j'ai intitulé ce mémoire, non de rébus, des choses, des traces, mais de re de la marque par excellence, de l'empreinte.
La question en elle-même n'est pas neuve. Quatre de mes savants collègues l'ont traitée. M. Thépenier, de la Société de Constantine, lorsqu'il a étudié les stèles punico saturnines découvertes dans l'intérieur des terres, à Guelma et à Hamman Meskoutine en particulier, M. Bosco, de la même société, lorsqu'il a découvert et étudié la nécropole phénicienne du Mansourah et des quantités de stèles d'autres provenances, le docteur V. Trenga, de la Société de Géographie d'Alger, dans ses Essais sur las Juifs berbères et le regretté Chanoine Leroy, de l'Académie d'Hippone, lorsqu'il a décrit le temple de Baal-Saturne qui dominait de sa masse, la cité romaine qui devait avoir comme évêque, le plus grand docteur de la Chrétienté, un berbère latinisé.
Et ce dernier ne devait-il pas nous donner raison, par une sorte de prescience, lorsqu'il faisait, dans une de ses Homélies, un rapprochement entre le mot latin Salus (salut) et le mot punique Tsalos (trois) et en concluait spirituellement que le Salut était dans la Trinité et ses ouailles ne se souvenaient certainement plus de la Trinité, qui avait tenu une si grande place dans l'hagiographie phénicienne, mais comprenaient encore le mot qui eut dû leur être étranger.
Moi-même l'ai traitée à propos des traces puniques découvertes dans les cimetières marocains, sous le litre : Survie des symboles (Société de Constantine) et des origines phéniciennes des tatouages de l'Afrique du Nord (Société de Géographie d'Alger). Mais j'ai voulu, aujourd'hui, prendre un endroit bien déterminé et chercher si, depuis la création du centre habité, ces traces se sont conservées. Bone-Hîppone se prête merveilleusement à cette étude, car les deux villes ont vécu l'une après l'autre, mais à des endroits différents et il aurait pu se faire que la cadette eut échappé à l'empreinte qui est très nette chez l'aînée. Or Bône créée à une époque où le souvenir historique des Puniques avait disparu entièrement, où dominaient dans le pays, des races, des moeurs, des croyances absolument nouvelles, Bône, dis-je, reproduit toujours avec la même intensité, faut-il même dire, avec la même pureté l'empreinte, reçue plus de deux mille ans avant sa fondation et trois mille ans plus tard, au moment de l'arrivée des Français, héritiers des Romains, on bâtissait encore des immeubles que l'on décorait des emblèmes chers à Salamboo, la Carthaginoise.
Et si l'on avait interrogé les décorateurs, ils auraient répondu, comme me le fit le sculpteur de la ville sainte de Boujad, au Maroc : " Je le fais, parce que mon Père l'a fait ".
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Les Souvenirs militaires
de M. le Colonel Henri Fabre-Massias
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A MONSIEUR GARBÉ
Rédacteur en chef du CENTRE AFRICAIN
14 Août 1856.
MONSIEUR ET AMI,
Vous n'avez probablement jamais -rencontré un petit livre imprimé en 1734, et intitulé : Mémoires des deux dernières campagnes de M. de Turenne. Cela n'a point de nom d'auteur; par conséquent, point de prétention personnelle. Je l'ai lu avec un plaisir extrême : on sent que l'écrivain n'a cherché, comme il le dit dans sa préface, " qu'à dire la vérité avec beaucoup de simplicité ", mais qu'il a vu ce qu'il raconte et que la vérité vit dans son souvenir. Je voudrais avoir des mémoires de ce genre sur toutes les parties de l'histoire militaire, et je lirais volontiers, après les commentaires ou les campagnes d'Italie, les souvenirs de quelque lieutenant obscur de César ou de Napoléon, qui pourrait, sans réticence et sans modestie, tout dire de son général.
J'ai voulu faire comme le narrateur anonyme des dernières années de Turenne. Témoin d'une évolution décisive du système français en Algérie, j'ai prétendu dire, sur une époque digne de l'intérêt d'un soldat et d'un bon citoyen, "la vérité avec simplicité ". La mode n'est plus de taire son nom; mais je désire que le mien soit seulement un gage de ma sincérité : mes souvenirs, d'ailleurs, n'auront rien de personnel : tous mes camarades ont vu, comme moi, ce que je raconte, et beaucoup l'auraient mieux raconté; mais, pour beaucoup sans doute, l'impression s'en efface déjà, et ils allaient oublier.
Ce qui peut donner encore quelque intérêt à ce travail, c'est que les lecteurs y rencontreront la plupart des illustrations de notre armée actuelle : c'est en 1840 que beaucoup de vaillants soldats ont commencé à faire connaître an monde leurs noms déjà aimés, admirés de leurs camarades.
Je vous prie d'agréer mes sentiments de cordiale et affectueuse estime.
HENRI FABRE,
Chef d'escadron d'artillerie.
Les observations ci-dessous sont tirées du livre "Les Souvenirs militaires de M. le Colonel Henri Fabre-Massias" qui ont paru d'abord par parties successives dans le Centre africain, précédés de cette lettre qui tient lieu d'introduction.
(Note de l’éditeur.)
OBSERVATIONS
SUR LE
GOUVERNEMENT DE L'ALGÉRIE
A l'origine des colonies anglo-saxonnes les plus modernes, notamment en Australie, en Californie, nous voyons les colons, dès qu'ils comptent quelques milliers d'âmes, élire un juge, un maire, un député, un conseil de gouvernement. Plus ils sont isolés, privés des traditions de la mère patrie et des ressources que laissent après elles les générations passées, plus ils jugent nécessaire de se gouverner énergiquement eux-mêmes, et d'appliquer immédiatement les théories les plus avancées du self government.
Si, en Algérie, on réclamait pour nos colons le droit d'élire leurs gouvernements municipaux, voire même leurs juges de première instance, le droit d'administrer le domaine, de se recruter eux-mêmes par les moyens qui leur sembleraient le plus utiles, je n'essayerais pas de combattre de telles propositions.
Mais c'est au territoire indigène que l'on propose d'appliquer nos lois administratives et notre code de procédure, et l'on croit être libéral en appuyant ces propositions! C'est là une erreur grave, et l'on va le comprendre.
La loi du territoire indigène est celle qu'appliquaient les Romains au pays conquis : respecter l'autonomie communale ou provinciale, se réserver le contrôle, la haute police, le droit de paix et de guerre.
Ainsi, les communes kabyles sont plus démocratiquement organisées que les nôtres : le maire, nommé pour un an, ne peut prendre aucune résolution importante sans l'attache du conseil municipal, et même, dans les cas très graves, sans l'assentiment de tous les chefs de famille. Enfin, on y applique encore les prescriptions d'un code spécial, et nous n'avons innové qu'où cas de crime capital.
Les tribus aristocratiques ont conservé leurs cheiks ou leurs caïds et les conserveront tant qu'elles le voudront. On ne déplace pas l'autorité à volonté, indépendamment de ce qu'il y a de tyrannique à prétendre modifier, suivant ses propres idées, le régime de gens qu'on a sous sa puissance.
Tâchons qu'ils en viennent à désirer d'être complètement identifiés avec leurs voisins français : ils ont fait vers cette solution bien du chemin depuis vingt ans, et leur marche s'accélérera plus rapidement quand les mesures dont nous allons parler auront rapproché les deux races : n'essayons pas de remplacer par la contrainte cette bonne volonté qu'on prévoit aisément, et comprenons que l'application de nos lois â des gens si éloignés de nos traditions et de nos moeurs serait une véritable cruauté.
Mais, dira-t-on, cette prétendue liberté que vous attribuez aux indigènes les laisse entièrement sous la main de vos agents militaires qui exercent, sans nulle garantie, le pouvoir qu'il leur convient d'exercer.
Il manque ici, en effet, la garantie suprême, la faculté de faire entendre ses plaintes. Et je ne parle pas seulement de la liberté de la presse, mais aussi des relations habituelles avec le monde. Les colons ont pu faire soutenir leurs griefs par MM. Favre ou Lanjuinais. En pays indigène, les habitants n'écrivent pas : les agents français ont le devoir de tout dire à leurs chefs et rien au public. Enfin, quant à présent, l'incertitude de la propriété, l'irrégularité des titres, ne permettent pas d'autoriser les transactions qui amèneraient les Français au milieu des Arabes ou des Kabyles. Ces transactions ont été, partout où elles se sont produites avant la fixation de la propriété par l'autorité française, la source de dols et l'origine des procès qui font de la cour d'Alger l'une des plus occupées de l'Empire.
L'exécution du sénatus-consulte, sur lequel nous allons revenir, est donc urgente, et doit précéder cette introduction de l'élément civil, qui sera une garantie sérieuse pour la liberté de l'indigène.
Signalons tout de suite une autre infirmité de la société indigène, dont les effets sont éminemment fâcheux: l'absence de probité judiciaire. En payant mieux les cadis, en les ramenant sans cesse dans le droit chemin par un mélange de sévérité et d'inaltérable patience, on aura la faculté de se préparer des juges pouvant inspirer confiance, et cela rendra faciles bien des mesures impossibles aujourd'hui.
Nous avons parlé des États-Unis pour recommander, en Algérie, l'imitation ou du moins l'étude de quelques-unes de leurs pratiques administratives. On y a songé beaucoup : longtemps après 1830, on a voulu voir au delà de la Méditerranée des États-Unis français. On s'irritait presque contre cette population indigène qui ne disparaissait pas comme avaient fait les Hurons ou les Iroquois devant les colons anglais. Cette assimilation très erronée a exercé une fâcheuse influence même sur les pratiques gouvernementales, et il n'est peut-être pas inutile d'en dire quelques mots.
En signalant le rapide peuplement de l'Amérique et l'extension incessante du territoire colonisé, Tocqueville rappelle ce fait que, souvent, l'établissement d'une ferme isolée, vingt lieues en avant des limites de la colonie, faisait le vide dans tout cet intervalle. Le gibier émigrait d'abord, gêné par cet obstacle fixe, par les allées et venues des hommes de cette avant-garde, par les sons mêmes de la cloche des bestiaux au pâturage ; et l'émigration du gibier entraînait celle des indigènes.
Cela seul fait ressortir une différence capitale entre l'Algérie et l'Amérique. L'Algérien tient au sol, bien qu'il le cultive mal : c'est un laboureur ou un berger, et, dans ce dernier cas, il ne se meut encore, comme les bergers de la Provence ou de l'Espagne, que des pâturages d'été aux pâturages d'hiver. - Le renvoyer de chez lui, sous quelque prétexte que ce soit, c'est le blesser, et c'est aussi, ne l'oublions pas, lui ôter quelques-unes des vertus conservatrices que perd le paysan en s'éloignant de son clocher.
Refoulement, cantonnement, tous ces mots ont signifié pour lui l'exil et l'expropriation arbitraire: il faut de bien grandes utilités des deux parts pour que ces déplacements se puissent justifier!
Arrêtons-nous encore ici un moment: il ne manque pas de gens qui demandent encore " qu'on livre de larges espaces à la colonisation ", c'est-à-dire qu'on prenne aux indigènes une part de leur territoire.
Ils cultivent mal, dit-on, et pourraient subsister sur une étendue très réduite. - Puis, on leur donne un titre de propriété-ferme sur une terre plus restreinte : ils peuvent bien acheter d'une partie de leur avoir la sécurité du reste.
Le premier motif est faible : le Berry est dix fois moins peuplé que la Flandre, et peut-être nos paysans n'ont-ils pas toujours des titres bien réguliers. Essayez, sous ce prétexte, de leur ôter une part de leurs champs, et, préparez-vous à vous défendre contre les faux emmanchées à rebours et les coups de fusil!
Oui, vraiment, il faut que les Arabes des plaines apprennent à mieux cultiver, et la sécurité de la propriété est la première condition pour le faire. C'est celle qui leur a manqué depuis trois siècles de domination turque; mais celle bonne culture, il faut la chercher comme un bien national, comme un enrichissement du pays, comme un avantage pour tous par conséquent. Retarder son avènement en la faisant acheter, c'est une faute grave !
Et cependant vous avez pu commettre cette faute en Algérie, sans avoir sur les bras des révoltes incessantes : c'est que ce peuple, habitué à l'oppression, n'est pas, comme nous, gâté, si l'on peut employer ce mot, par une longue jouissance de la liberté civile. Enseignez-lui, avec le respect de la propriété, l'indépendance et les fières vertus qu'elle engendre. Il sera moins facile de l'opprimer: il sera plus riche et plus ombrageux. Faut-il donc vous en plaindre? Et, maîtres de lui départir cette prospérité morale et matérielle, ne voyez-vous que vous pouvez attendre de lui reconnaissance et affection pour le nouvel ordre social auquel il -aura dû ces biens inconnus aujourd'hui hors de la Kabylie et des inaccessibles retraites où l'indépendance humaine avait trouvé asile?
Vous pouvez faire, et faire promptement, de l'indigène un Français affectionné, un citoyen utile, bien qu'on doive ajourner son assimilation complète. Il faut, pour cela, lui assurer la terre qu'il possède à des titres divers et que nul ne peut cultiver avec autant d'amour et de sécurité que lui. S'il est fidèle, pourquoi pas lui aussi bien qu'un Européen? Et pourquoi ne serait-il pas fidèle au régime qui peut seul lui donner ces biens suprêmes: l'indépendance civile et l'existence politique?
Est-ce à dire qu'il faut renoncer à introduire l'élément européen en Algérie? A Dieu ne plaise ! Comme chefs d'industrie et de culture, comme intermédiaires du commerce avec le monde, les Européens auront dans cette société la large place qui leur convient le mieux. Ils ont les capitaux, la science, les relations faites, et ils n'auraient pas tout avantage à exploiter, en le servant, ce pays devenu plus fécond en productions de toute sorte !
Mais, pour que les deux populations se pénètrent, il faut des conditions qui n'existent pas aujourd'hui.
Permettre les transactions dans l'état où la conquête a trouvé la propriété indigène, c'est ouvrir la porte à tous les dols, et donner naissance à des procès incessants et sans issue. Aussi a-t-on dû les interdire jusqu'à l'établissement d'un ordre nouveau. Hâte-t-on autant qu'on le pourrait cette fixation de la propriété, objet d'un sénatus-consulte célèbre? Je n'en crois rien et je tiens pour certain qu'il serait possible et très nécessaire d'accélérer considérablement cette opération. Il y a là, pour donner une base certaine à cette propriété, dont je voudrais pourtant enseigner le respect, un véritable coup d'État administratif à faire : je le regrette, mais il est inévitable, et il faudrait qu'il fût très promptement achevé; quel serait, pour cela, le moyen pratique à employer? Je vais tâcher de l'indiquer.
Ce n'est pas la première fois qu'on fait, en Algérie, des délimitations de terrain. Comment agissait-on quand il y avait litige, entre des tribus, sur leurs limites ?
Le commandant supérieur ou son délégué se rendait sur le terrain et y convoquait les représentants autorisés de la tribu. Chacun énonçait sa prétention et exposait ses titres, les témoignages écrits ou verbaux en sa faveur. Avec quels cris, quelle animation, quelles protestations, Dieu le sait! Après avoir tout écouté, le commandant décidait que la limite suivrait tel ruisseau, ou irait de tel arbre à tel rocher : il faisait enregistrer la décision par les cadis, avec les noms des témoins, et gardait copie de l'instrument ainsi établi. - L'animation tombait avec les plaidoiries, et le jugement était accepté par les plaideurs avec une résignation sincère: cette résignation est habituelle; on comprend qu'ils n'ont pas toujours eu des gouvernants cherchant, de bonne foi, la vérité et la justice; et cette bonne foi, ils y croient chez nous.
C'est quelque chose d'analogue que je voudrais pour l'exécution du sénatus-consulte â tous les degrés.
Certes, il serait désirable que l'établissement cadastral complet précédât ou accompagnât la fixation de la propriété; mais ce, n'est pas là une nécessité absolue ; je n'ai pas besoin d'insister sur les différences qui ont existé et existent encore en France entre les différents plans terriers et la réalité. Pour les savants jurisconsultes qui se sont occupés des moyens de délimitation des territoires et des héritages, l'un des plus convenables résulte des témoignages oraux que je propose d'employer exclusivement, en Algérie, pour asseoir les titres nouveaux : les géomètres suivraient et fixeraient sur leurs cartes les limites écrites d'abord dans les titres.
Ainsi des commissions présidées par des fonctionnaires élevés, et, si l'on veut même, par des sénateurs, des députés ou des conseillers d'État, partageraient le territoire à délimiter ; chacune d'elles fonctionnerait sur place; elle serait nantie de registres et de titres détachés portant imprimé : " Au nom du peuple français, Napoléon Itt, etc., déclare que la propriété ci-après désignée appartient à... " Une colonne serait consacrée à l'indication des limites; une autre aux noms des témoins, une autre à l'énonciation des litres, une autre à la nature de la propriété invoquée par le réclamant, propriétaire ou fermier emphytéotique, ou occupant actuel, - sauf les droits des tiers; on ne serait pas difficile sur les prétentions des travailleurs, et on leur sacrifierait sans hésiter celles de l'État qui seraient incomplètes ou litigieuses.
L'extension du domaine de l'État au delà d'une proportion très restreinte du domaine général est funeste à toutes les transactions, au bon aménagement des terres, et par conséquent au fisc lui-même. Il ne faut garder tous les droits de l'État que sur les forêts et les eaux, tout en respectant les usages exercés de tout temps par la population et tâchant de lui en laisser l'équivalent (1).
En agissant ainsi, vous devez pouvoir, en peu de mois, ou, au plus, en très peu d'années, avoir attribué à chaque terre un seigneur. Ce seigneur pourra être collectif; mais vous pourrez donner à la commune indigène, tribu ou douar, selon le cas, la faculté d'aliéner une part de ce domaine collectif: ce n'est plus que le fait de règlements administratifs pour assurer, autant que possible, la sécurité des transactions. On pourra, par exemple, recommander aux indigènes traitant avec des Européens de n'accepter que de l'argent comptant ou du papier garanti par la Banque algérienne, qui trouverait là l'emploi de ses capitaux et de ses relations.
Voilà donc toute la terre algérienne mise dans la circulation. L'Européen peut partout et sans formalités administratives devenir propriétaire, et il ne le sera plus par voie de concession entraînant des conditions fâcheuses à sa liberté, et, à coup sûr, des relations difficiles avec les expropriés qui en jouissaient avant lui ; il sera accepté, protégé, aidé par le douar qui lui aura vendu, ou dont un membre lui aura vendu sa terre, et qui apprendra promptement à tirer parti des lumières et des relations de son nouveau citoyen. - Il sera, en tous cas, en meilleure situation qu'un Français qui s'établit à la Plata ou au Mexique.
L'autorité française, en effet, ne pourra pas, de longtemps, abandonner ses nationaux à la justice locale. Il y a là une autre difficulté de la pénétration réciproque des deux races, sur laquelle il est bon de s'arrêter encore.
On ne pouvait pas, après la conquête, compter sur l'impartialité du juge indigène quand il aurait à décider entre un compatriote et le compatriote des conquérants, et son esprit de justice, nous l'avons dit, ne le garantissait pas contre ses préjugés et ses ressentiments nationaux.
Qu'a-t-on fait ? On s'est souvenu d'un droit rappelé en beaux termes dans le plaidoyer de Cicéron contre Verrés. Nos souvenirs classiques avaient laissé une grande valeur à ce titre de civis romanus invoqué par le grand orateur romain. On résolut de transporter aux Français en Algérie, en le précisant et l'étendant, le privilège du civis romanus, et l'on décida que le Français, même en territoire indigène, ne serait justiciable que du juge français le plus voisin : toute instruction même échappe au juge indigène.
Vous comprenez bien : un Français se trouve, à un titre quelconque, en territoire arabe ou kabyle. S'il offense un homme du pays, celui-ci devra s'aller plaindre, à quinze lieues de là peut-être, au juge français, lui ramener ses témoins et s'en rapporter à sa justice. Or, les témoins indigènes se déplacent peu ; c'est au marché que, jusqu'à présent, le plaignant, rencontrant son offenseur, le saisit par son bernons, en criant à haute voix (la vraie clameur de haro), appelant ses témoins, invoquant le cadi toujours présent ou suppléé. Tout le personnel du procès se réunit devant le tertre où siége le cadi : témoignages, plaidoiries, sentence, punition même, tout tient dans la séance ; tout est fini avant le marché.
Assujettir à nos formes de procédure les gens qui ont de telles habitudes, c'est, tout simplement, leur dénier la justice. On renonce une fois, deux fois, à faire valoir son droit; puis vient un jour où l'on en appelle à son fusil.
Il y a là, on le comprend, un obstacle à la pénétration des races. La juridiction française est absolue et s'exerce sur tous dans son territoire. On ne peut pas donner les mêmes droits au juge indigène : son code n'est pas le nôtre ; les pénalités de la loi arabe ou kabyle sont à la fois pécuniaires et corporelles, et la détention n'y est ni comprise, ni possible. Pourtant il faut que le crime ou délit commis par le Français ne reste pas impuni, qu'un litige civil même puisse être an moins jugé en première instance sur place, dans le lieu du fait ou du bien disputé. Les jurisconsultes et les hommes d'État jugeront du degré où doit s'arrêter la juridiction indigène, en attendant l'assimilation complète : on aura, soit une instruction sur laquelle le juge français statuera, soit un jugement du cadi avec transformation des peines édictées, soit des réunions de cadis présidées, à époques fixes, par un homme de loi français.
Cela fait, les Européens et les indigènes pouvant vivre à côté les uns des autres, le devoir du gouvernement sera presque entièrement rempli ; le temps fera le reste : au dire des Arabes les plus intelligents, il amènera promptement l'assimilation qu'on ne pourrait introduire aujourd'hui sans contrainte tyrannique, sans dangers graves.
En 1844, le duc d'Aumale essaya de porter atteinte à la féodalité qui tenait alors, surtout dans le sud, la province de Constantine. Le cheik du Belezma fut interné comme un raya de l'Inde, et cette grande province fut partagée entre quatre caïds, pris, pour plus de sûreté, parmi les marabouts de grande naissance. - (Le cheik était laïc, comme toute l'aristocratie de l'est.)
Les choses allèrent à peu près bien et l'autorité française fut plus complète tant qu'aucune complication politique ne se manifesta. Aux approches du soulèvement de Zaatcha, nos quatre caïds furent assassinés ou se réfugièrent dans le camp français : nous avions pu en faire des fonctionnaires ; nous n'avions pas pu leur donner l'autorité : l'autorité ne se départit pas à l'heure du maître et à sa volonté.
S'il arrivait qu'une tribu, se trouvant bien du règne de son caïd ou de son cheik, voulût le garder, laissons-le-lui : plus intelligent et mieux instruit que les siens, il nous garantira de ces soulèvements qu'ont produits ou entretenus si souvent des espérances ou des aspirations insensées ; l'ôter d'ailleurs, contre la volonté de son peuple et contre son droit ancien, c'est un acte de la force, ce doit en paraître un abus.
Mais ne croyez pas que rien subsiste, après quelques générations, en dehors de notre état social et politique si nous restons justes et bienfaisants. C'est affaire de patience, et de patience même assez courte.
11 y a, disait au général Bedeau un grand de la province de Bône, il y a un mouvement qui vous échappe et nous frappe vivement : c'est que le peuple nous quitte et va à vous. - C'est justice, ajoutait-il mélancoliquement. Pour vous, le droit, c'est la justice ; - chez nous, c'est la force. ,,
" Nous resterons ce que nous sommes, (lisait encore un caïd des Zibans ; mais nos fils seront chrétiens. "
Attaquons enfin, pour terminer cette rapide étude, l'une des questions les plus ardemment controversées de notre temps. - S'il est vrai qu'on ne doive pas immédiatement modifier le régime du gouvernement des Arabes; s'il est vrai même qu'il n'y ait ni libéralisme, ni générosité, ni intérêt national à le modifier par voie de contrainte, dans l'avenir, faut-il changer le personnel qui l'applique, et chercher dorénavant ce personnel dans l'ordre civil ?
On a pu comprendre, d'après ce qui précède, que les fonctions de nos bureaux arabes et de nos commandants de cercle ne sont pas essentiellement militaires. Si, pendant longtemps, la police armée a constitué leur principale fonction, il n'en est plus de même aujourd'hui, et un fonctionnaire civil n'aurait pas à requérir tous les jours le chef de la force armée de monter à cheval pour réprimer une révolte ou empêcher un conflit. Quand il en était ainsi, on simplifiait fort l'action du pouvoir et on la rendait bien plus efficace, en en confiant l'exercice à ce chef même de la force armée.
Il reste, cependant, de bonnes raisons pour que la plupart de nos agents soient militaires. Il s'agit de trouver une centaine de fonctionnaires instruits, actifs, connaissant le pays, animés de bonnes intentions; il s'agit de leur imposer une besogne qui n'a point d'analogue en France et qui exige une éducation spéciale ; il s'agit de les mettre à l'épreuve et de les remplacer aisément s'ils ne remplissent pas des conditions pour lesquelles on n'a pu, d'avance, mesurer exactement leur aptitude. - L'armée fournit tout cela: sans compromettre leur carrière, les officiers peuvent entrer dans les bureaux arabes et les quitter dans le cas où ce genre d'occupations ne convient pas à leurs goûts ou à leurs aptitudes. Le recrutement s'en fait avec de grandes précautions, et bien peu, parmi les élus, ont donné lieu à des plaintes graves et fondées. Ils exercent un grand pouvoir, que la confiance des populations a souvent étendu encore bien au delà de leurs attributions légales. Quelques-uns en ont été enivrés. L'immense majorité l'a exercé dans un esprit constant de justice et de bienveillance. On n'en douterait pas, si l'on réfléchissait à tout ce qu'il a fallu de tact et de mesure pour maintenir habituellement une paix complète dans une population si différente de nous et la rapprocher continuellement de conquérants qui veulent n'être que des concitoyens.
La surveillance hiérarchique, seule garantie des sujets en l'absence des appels à l'opinion publique, est facile et complète dans l'organisation actuelle. Les commandants de cercles, de subdivisions, de divisions, exercent le pouvoir supérieur et contrôlent leurs subordonnés en vertu non seulement de leurs fonctions, mais de la supériorité du grade. Tous ressortissent au gouverneur général, qui doit être nécessairement un des premiers de l'armée par le grade, un des plus respectés par le caractère.
D'autre part, et en ce qui concerne le gouverneur général, ces conditions absolues restreignent les choix, et il peut être quelquefois nécessaire ou très utile de le prendre en dehors de l'armée.
En résumé :
I° Le régime civil en Algérie pourrait et devrait peut-être devenir plus libéral et offrir l'application de cette théorie de décentralisation qui semble prévaloir dans la mère patrie ; elle serait bien plus utile et bien plus facile â appliquer là où les intérêts sont bien plus localisés, où les populations sont rares et les communications difficiles. Les communes seraient presque souveraines, le pouvoir central conservant seulement la justice supérieure, la haute police, le veto administratif (2).
2° En territoire indigène, on s'efforcerait de faire pénétrer les Français en préparant leur installation par la fixation de la propriété arabe. On Miterait l'application du sénatus-consulte, et l'État, renonçant absolument à coloniser directement, le prendre de la terre pour la vendre ou la donner, livrerait â la liberté absolue les transmissions de propriété.
3° On suivrait avec une sollicitude extrême l'établissement d'un régime judiciaire satisfaisant en pays indigène. L'éducation spéciale des cadis, et une organisation analogue à celle des juges de paix et des cours de circuit d'Angleterre, permettraient de renvoyer les conseils de guerre tt leur juridiction exclusivement militaire.
4° Le recrutement, parmi les officiers exclusivement, des agents du gouvernement français en pays indigène, offre des avantages très importants ; mais il n'est pas indispensable, et, dans l'état de l'opinion, il peut être utile d'introduire des fonctionnaires civils dans cette hiérarchie.
5° On en peut dire autant même pour le gouvernement général.
Paris, 24 janvier 1870
FIN.
1) Le jugement prononcé sur place serait définitif et les revendications ne pourraient plus donner lieu qu'à des compensations en argent.
2) Les communes, notamment, seraient mises en possession des propriétés domaniales situées sur leur territoire, avec faculté d'en disposer.
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LES EXIGENCES
Envoyé par Michèle
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Un couple marié est en train de rouler tranquillement à 90 km/h sur une route départementale.
L'homme conduit. Soudain, la femme le regarde enfin et lui dit :
"Ecoute, nous sommes mariés depuis 15 ans, mais je veux divorcer..."
Le mari ne dit rien et se contente d'accélérer, 100 km/h.
"J'ai eu une aventure avec ton meilleur ami et il est bien meilleur amant que toi ".
Encore une fois, le mari ne dit rien et se contente d'accélérer, 110 km/h.
Elle : "Je veux la maison et les enfants".
Le mari se contente d'accélérer, 120 km/h.
Elle : "Je veux la voiture, le compte en banque et les cartes de crédit".
La voiture arrive près d'un mur et le mari encore une fois se contente d'accélérer, 130 km/h.
Elle : "Et toi, que veux-tu ?"
Lui : "Rien, j'ai déjà tout ce dont j'ai besoin !"
Elle : "Et c'est quoi ?"
Le mari lui dit juste avant de percuter le mur à 130 km/h :
"C'est moi qui ai l'aibag..."
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BULLETIN N°11
DE L'ACADÉMIE D'HIPPONE
SOCIÉTÉ DE RECHERCHES SCIENTIFIQUES
ET D'ACCLIMATATION
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RAPPORT
SUR LE MADRAZEN (*)
ET LE KBOUR ER-ROUMIA
Par M. MOUGEL
Curé de Duvivier, membre correspondant.
(Séance du 14 octobre 1875.)
MESSIEURS,
Mon devoir consiste à commencer par des remerciements, à l'adresse de M. le Président pour l'honneur qu'il a bien voulu me faire en convoquant cette séance l'occasion de mon passage.
(*) L'orthographe de ce mot varie selon les auteurs. Les Arabes et F. Becker, architecte, disent Madr'asen ; Dr Shaw, Medraeshem ou Mail'cashe ; Dureau de la Malle, Peyssonnel, Mannert, Mérach'em ; le général Garbuccia et le chef de bataillon Foy, Madrazen ; H. Fournel, Medr' acen ; les statistiques publiées par le ministère de la guerre, Medghassem ; Carette, carte de l'Algérie, Maïdh-Assem : A Berbrugger, Medracen. On le trouve encore écrit Madrazem. Nous adoptons l'orthographe Madrazen.
La signification de ce mot est aussi incertaine que son orthographe. Nous croyons inutile de rappeler les différentes hypothèses des archéologues. Voir, du reste, Annuaire de la Société archéologique de Constantine, 1854-55 et 1855-56, et le Tombeau de la Chrétienne, par A. Berbrugger.
A vous, Messieurs, je demande un peu de cette indulgence qu'a droit de réclamer quiconque n'ayant pas l'habitude d'écrire pour le public, ni de porter la parole devant un auditoire d'élite, ose néanmoins traiter un sujet étranger â ses études professionnelles.
Du fond de ma solitude je vous apporte une théorie nouvelle sur le tombeau de la chrétienne et le Madrazen, avec l'exposé des motifs sur lesquels je m'appuie pour tirer les conséquences que vous connaissez déjà et que vous avez bien voulu insérer dans un de vos précédents comptes-rendus.
Un membre de la Société Archéologique de Constantine, qui tient le premier rang parmi les épigraphistes de l'Algérie, l'un de mes parrains à l'Académie d'Hippone, M. le docteur Riboud, m'a dit : " Vous êtes très audacieux " Messieurs, c'était déjà mon opinion. En effet, je suis bien petit, bien obscur, la distance qui me sépare de Berbrugger et de son école est bien grande pour me poser en contradicteur d'une opinion généralement admise par des savants qui sont la gloire de notre colonie et dont l'autorité est incontestable.
Alors, pourquoi passer outre ? Mais est-ce qu'une conviction ne brave pas le danger de se faire écraser, comme la valeur guerrière celui de se faire tuer sur le champ de bataille ? Vous dirai-je, au surplus, que d'autres savants m'ont encouragé et conseillé de poursuivre à mon point de vue l'étude de nos vieux monuments ? En compagnie de ces derniers vous pouvez ranger Mgr l'évêque de Constantine et d'Hippone. Telle est mon excuse. Je vous prie, Messieurs, de vouloir bien l'agréer.
Précautions prises pour acquérir une juste connaissance
des monuments algériens.
L'esprit contemporain, plongé dans l'antiquité, remonte, s'il n'est maintenu par une force étrangère, sans cesse la surface des siècles, comme le liége à la surface de l'eau. Je veux dire qu'il juge naturellement ses découvertes archéologiques d'après I'actualité, selon des idées faites. Tel architecte, je suppose, poursuit la reconnaissance d'un temple païen. Fort de ses connaissances en son art, ébloui par le progrès, ne tenant aucun compte des degrés qu'il a du franchir, notre architecte prétend retrouver un monument semblable à son idéal. Dans ces dispositions, il commet une méprise, et ses découvertes portent faux. Il faut s'isoler de son époque, se faire homme fossile, en quelque sorte, pour pénétrer dans la profondeur des siècles.
En m'isolant dans ce milieu obscur que nous appelons antiquité profane, je me suis dit : Le temple est un théâtre. Ayant pour but d'aider à la représentation publique d'un drame, il doit être muni d'accessoires appropriés aux différentes scènes que le sentiment religieux pousse à manifester, aux usages, aux cérémonies de l'époque et des peuples qui en ont fait les frais. C'est sur la liturgie (1) de ces peuples que l'architecte a calqué son plan. II n'est que coordonnateur et conducteur de travaux. C'est le praticien qui s'ingénie, invente, perfectionne l'appareil, les engins et I'outillage qui lui sont nécessaires. Aaron, Moïse sont les ingénieurs de l'arche sainte et du temple d'Israël au même titre que Jacquard et Grangé le furent du métier et de la charrue, en leurs qualités de tisserand et de cultivateur. C'est pourquoi nous posons comme condition d'une interprétation exacte dans nos recherches, la connaissance aussi parfaite que possible des usages, des pratiques et des cérémonies religieuses de l'ancien temps, en un mot, de la liturgie. Si donc les restes d'un édifice se présente avec un aménagement, des détails qui correspondent, prêtent à la manifestation de cette liturgie, on peut le considérer comme latreutique (2), c'est-à dire propre au culte divin.
(1) Liturgie, nature, ordre, ensemble des cérémonies et des prières dont se compose le culte rendu publiquement à la divinité
(2) Latreutique. La théologie catholique reconnaît trois sortes de cultes le culte de latrie, réservé à dieu seul; le culte d'hyperdulie, rendu à la sainte Vierge, et le culte de dulie, qui ne s'adresse qu'aux saints.
C'est ensuite le concours de l'histoire que j'invoque. Passant d'Hérodote au livre de Moïse, d'Anthony Rich au docteur Schaw, à Darernberg .. etc., etc., je me présente avec une conviction basée sur les renseignements qui suivent.
D'après l'auteur d'un dictionnaire archéologique fort estimé, le monument qui est comme le nec plus ultra du bon goût, de la perfection, et que nous appelons temple, tire son origine de quelques points imaginés dans l'espace ou sur le sol pour déterminer un périmètre sur lequel devaient s'accomplir certaines cérémonies religieuses : consulter les augures, prier, sacrifier. TEMPLUM, en grec Temenos, dit Anthony Rich (3) d'après Varron, signifie une partie qui est coupée, retranchée, limitée par les augures, avec certaines formules solennelles et avec la baguette lituus (4). Tel est, ni plus hi moins, le temple des âges primitifs de ces peuples lointains qu'on accuse, faussement à mon avis, d'avoir prodigué les adorations aux montagnes, aux pics, aux rochers pointus, à tous les objets naturels capables de frapper l'imagination.
D'après cette définition, il y a une immense lacune à combler, je l'avoue, entre les temples d'alors et ceux de la période artistique. Si tenace est la tradition en matière religieuse, qu'on ne peut supposer une brusque transition des uns aux autres ; ainsi il est permis d'admettre que le premier pas fait dans cette voie est marqué par ces enceintes appelées chaminin par les Hébreux, pyreus, par les grecs, cromlechs par les Bretons. Une enceinte de ce genre et couronnant un rocher brut rencontre dans les Vosges, près de Plombière. Le vulgaire l'appelle Château des Fées. M. Maud'heux, président de la Société d'émulation, I'a soigneusement étudiée, et il y a vu un sanctuaire druidique (5).
(3) Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, article templum.
(4) Lituus, bâton d'environ 45 centimètres de longueur, recourbé à l'une de ses extrémités, qui avait la forme d'une trompette de cavalerie. Les augures s'en servaient pour déterminer les diverses régions célestes, etc. On pense que la crosse des évêques catholiques n'est qu'une imitation du lituus des augures. Voyage A. Rich.
(5) Annales de la Société, d'émulation des Vosges, 1er cahier du tome X., année 1858.
Druidique ou non, comme le cromlech, le pyreus, le chaminin est un sanctuaire, un temple déjà limité par des pierres, par des murs disposés suivant la ligne tracée par l'augure dans le but de séparer de la terre profane l1espace de terre consacré, d'en éviter la profanation en le rendant reconnaissable.
A une certaine époque, je ne me fais pas fort de la déterminer, un monument, inspiré par le génie de l'art, vint s'asseoir sur le temenos, rétrécir son périmètre, accaparer son titre, puisqu'il fut appelé temple (6). Aujourd'hui, quiconque oserait dire de ce chef-d'oeuvre, qu'il porte un faux nom, un nom technique emprunté à la géométrie, celui-là passerait aux yeux du public pour un insensé et un ignorant.
Certains auteurs s'astreignent difficilement à l'idée d'une priorité d'existence et à une distinction de destination entre ces deux autres monuments que les Latins appelaient ara et altare. Suivant l'opinion d'A. Rieh (7), tous les deux sont des autels de sacrifices destinés, le premier, moins élevé au culte des demi dieux, le second, plus élevé, à honorer les dieux supérieurs. Tout en m'inclinant devant cet auteur, je lui demanderai la permission de ne pas penser comme lui.
(6) On pourrait citer ici comme un pas fait en avant le temple élevé à César après que le Sénat l'eut proclamé dieu. Ce n'est encore qu'un fronton anguleux porté sur quatre colonnes. (Voir une monnaie reproduite par MM. Daremberg et Saglio, dans leur Dictionnaire des antiquités, au mot apothéose.) Après celui-là vient celui qui fut élevé par Tibère et inauguré par Caligula. C'est toujours le triangle, emblème de la divinité, mais remportant sur le précédent par le nombre des colonnes qui le supportent et par ses décorations.
(7) Dictionnaire des antiquités grecques et romaines. Voir aussi Darernberg, Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, au mot ara.
Le mot ara est aussi un terme emprunté à la géométrie ; il signifie surface et on l'employait en religion pour indiquer I'espace restreint et déterminé par un périmètre, dans le temple à ciel ouvert, pour égorger la victime et en dépecer les chairs avant .de la livrer aux flammes. Qu'à l'époque de l'édification d'un monument sur le temenos, sur le temple, l'ara ait pris les proportions d'une table surélevée, sans nuire au ministère du sacrificateur, c'est incontestable ; mais les proportions en hauteur de cet appareil n'ont jamais justifié le titre d'autel qu'une traduction inexacte lui attribue. Le nom d'abattoir lui convient mieux que tout autre.
L'ara eu le privilège d'être adoptée, enrichie des attributs du nouveau culte, par la religion chrétienne. C'est elle que nos pères dans la foi ont appelée mensa mysyca, magna, tremenda, regia, immortalis, coelestis, pour la distinguer d'une autre table, mensa martyrum, Cypriani, Stephani, sur laquelle se célébraient les repas et les cérémonies du culte dulitique (8). L'autel, altare, proprement dit, essentiellement païen impropre au service du culte chrétien, n'a pu jouir, puisqu'il offre un caractère différent, du privilège que, d'après saint Augustin (9), l'Église primitive accordait aux temples, aux idoles ou symbole; aux lois sacrés, d'être employés à des usages communs ou à l'honneur du vrai Dieu. Dans ce cas, il fallait bien subir, au point de vue de leur destination, sans trop s'en défendre, dit M. Martigny (10), le reproche fait aux chrétiens de n'avoir point d'autel, sauf, plus tard, à leur reprocher aussi de profaner cet objet divin en le plaçant comme mémorial sur les tombeaux de leurs martyrs.
(8) Voir la note au sujet du mot latreutique.
(9) Saint Augustin, Lettre à Publicola, tome II, " Et cum templa, idola, luci et aliquid hujusmodi... Cum vero in usus communes non proprios ac privatos, vel in honorem Dei veri convertuntur, hoc de illis fit quod de ipsis homnibus, cum ex sacrilegis et impiis in veram religionem mutantur. "
(10) Dictionnaire des antiquités chrétiennes, au mot autel.
Mais laissons l'ara que nous venons de déterminer, et disons d'une manière absolue que l'autel ne tire son origine et la légitimité de son titre que de sa hauteur, abstraction faite de toutes ses autres dimension géométriques. Se confiant aveuglément au témoignage de ses sens, pénétré du plus profond respect pour les choses divinement établies, le monde païen adorait les astres tels qu'ils sont, tels que par une illusion d'optique il les voyait sortir des hauteurs le matin et rentrer le soir. L'évidence pour lui n'allait pas plus loin. Une montagne qui s'entrouvrait pour donner passage à Phébus, à Lupus, était sans aucun doute le séjour de ces divinités, séjour sacré, inviolable. Telle autre qui vomissait des flammes lui donnait la certitude que la substance divine était de feu (11), grosse question métaphysique qui, au quatrième ou cinquième siècle, à Hippone, fut encore débattue entre Fauste et saint Augustin.
(11) " Stoici ignen, viventem et sapientem, et ipsius mundi fabricatorem .. eumque omnino ignem deum esse putaverunt. " Saint Augustin, De Civitate Dei, tome III. Le stoïcisme attribué à Zénon, le manichéisme attribué à Manès, sont des réformes successives de l'ancien culte idolâtrique qui ont maintenu la croyance l'ignition divine, professée, peut-être par les Hébreux eux-mêmes ; car il est écrit ( Deus est ignis edax.) " Les Perses croient, que le feu est un dieu. " D'après cette croyance, il n'était pas permis de brûler les morts, puisqu'un dieu ne doit pas, selon eux, se nourrir du cadavre d'un homme. Hérodote, Thalie.
Je ne sais comment les idolâtres interprétaient cette présence divine et universelle. A l'état latent, peut-être, comme nos physiciens lorsqu'ils traitent du calorique. Mais que l'on peut considérer comme certain, c'est qu'il la pressentaient " dans I' intérieur des rochers abrupts, dans les arbres, dans tout ce qui, selon l'expression ,juste de M. Féraud, pointait vers le ciel, aussi bien que sous .les montagnes et dans l'intérieur de notre planète. Sous ce rapport, Amestris, reine de Perse, maintenait dans l'orthodoxie de son siècle lorsque, parvenue à un âge avancé, elle fit enterrer vifs quatorze jeunes gens des plus nobles familles du royaume, pour rendre grâces aux dieux qu'on croyait résider sous terre, nous dit hérodote.
Peut-être une tradition dégénérée les inspirait encore ces malheureux venus, en 1868, brouter l'herbe de nos sentiers. Maintes fois je les ai aperçus déposant au pied ou au sommet d'un rocher qu'ils n'avaient jamais vu, quelques charbons allumés sous de la résine, bout de bougie ramassé dans la rue et un fragment des haillons qui couvraient à peine leur nudité.
En parcourant rapidement les siècles écoulés, nous voyons que tous les dieux, même Jéhovah, ont eu des montagnes en apanage. Jupiter, Junon, Phébus, Minerve, etc., avaient leur montagne. La Lune possède encore la sienne, disent nos voyageurs contemporains, dans les régions centrales de cette terre africaine (12).
(12) " C'était une maxime religieuse des païens, qu'il fallait ériger les autels et les statues du soleil dans les lieux ouverts et sur les montagnes. Baron Henrion Histoires ecclésiastiques IV, 184.
Hérodote, en nous retraçant le tableau du sentiment religieux en Grèce, en Syrie, en Perse, les écrivains sacrés, pour ce qui concerne la terre de Chanaan et de la race d'Abraham, attestent de la coutume et de l'empressement des générations à se porter en foule vers les collines pour prier et pour sacrifier. C'est en vain que Jéhovah, pour la commodité de son peuple, abandonnant le sommet du Sinaï, se fait construire dans la plaine un tabernacle portatif. Moise à peine mort, la Terre promise à peine conquise, les Israélites transportent avec un nouvel empressement leurs dévotions sur les hauts lieux, dont l'un est appelé Selmon, qualifié gras et coagulé : mons Dei, mon pinguis, mons coagulatus. C'est le nouveau Sinaï.
Pourquoi gras et coagulé ? A cause du sang des victimes répandu et figé sur sa surface. Thabor et Hermon in nomine tuo exsulyabunt, ont dit aussi les idolâtres, et pour motif ils ont respecté, vénéré les montagnes.
Par l'autel que Moïse érigea au passage de la mer Rouge, par l'arche sainte qu'il fit construire plus tard, nous voyons que la règle de se transporter vers les montagnes accréditées pour les oblations n'était pas de rigueur chez les Israélites. Elle ne l'était pas davantage chez les idolâtres, puisque le choix de l'emplacement du temenos était laissé à la volonté de l'augure. Par circonstance et par exception, il pouvait le circonscrire autour du premier rocher venu, ou dresser au centre de l'endroit déterminé une pierre brute servant d'autel. Spontanément, plutôt que par la conjuration du mage, la divinité le pénétrait. " Avant que d'avoir pu bien former leurs statues, dit saint Clément d'Alexandrie, cité par Shaw, les anciens élevaient des colonnes et les vénéraient comme les sièges de la divinité. "
Mais dès l'instant que l'artiste mettait la main à l'oeuvre, il y avait obligation pour lui de se conformer aux exigences de la tradition qui voulait des autels semblables à ceux que les dieux s'étaient choisis ou créés, c'est-à-dire représentant en quelque sorte des montagnes. Il lui fallait en outre, respecter le produit de la nature, ouvrage des dieux, jusqu'à s'abstenir d'appareiller les matériaux qui devaient entrer dans leur construction. C'est Jacob, petit-fils d'un idolâtre, qui offre le premier modèle d'un autel artistique. Il est aidé dans son œuvre par Laban, autre idolâtre, qui poursuivait ses enfants soupçonnés d'avoir dérobé ses dieux païens. C'est toute une famille païenne enfin qui met la main à l'oeuvre. Quelle forme va-t-on donner à ce monument qui doit renfermer un dieu témoin invisible de l'alliance faite entre le gendre et le beau-père ? Celle d'une montagne aplatie au sommet où seront célébrés une fête et un repas de réconciliation, et depuis plus de trois mille six cents ans cet autel porte le nom de tumulus (13).
(13) Josué, sur la montagne d'Hébal, ordonne de n'employer que des pierres brutes pour la construction des autels : ex lapidibus quas ferrum non telegit.
Je demeure avec la conviction que les montagnes, que les éminences de terre ou de rochers qui rencontrent sur le globe celles surtout qui frappent l'imagination, ont servi primitivement d'autels, qu'elles ont été prises pour modèles de ceux que l'art, dans son enfance, a produits pendant une certaine période, et longtemps chez certains peuples arriérés ou tenus éloignés du foyer du progrès.
Abandonné aux inspirations de l'intelligence humaine, l'autel a toujours conservé l'altitude comme symbole caractéristique et sacré. Ainsi l'a voulu la tradition, si tenace en. matière religieuse mais pour chacune des formes géométriques dont le hasard a revêtu les Montagnes, pour les excelsa consacrés aux divinités, un mot sera choisi pour les spécifier. C'est ainsi que l'image ou autel du soleil revêtira la forme conique : ab imo rotundum et sensim fastigiatum, dit Hérodien au sujet du monument consacré à cet astre et conservé à Édesse.
Pour l'autel de ce dieu qui a changé de sexe, Lunus devenu Luna, divinité carthaginoise, on peut le définir : ab imo quadratum et sensim fastigiatum. Celui qui lui fut élevé au mont Carmel nous y autorise.
Indépendamment de ces deux figures caractéristiques des autels de l'antiquité la plue reculée, nous sommes en droit d'ajouter que le seing , le seau, le contre seing de ses monuments religieux se rencontrent dans le triangle, le carré et le cercle que l'on .y trouve représenté. Un triangle équilatéral ou aigu, dit Porphyre, marque la nature et l'élément du feu. "
" Le carré représente le monde matériel et élémentaire divisé en quatre saisons." (Platon, Khpcher, cités par le docteur Shaw). "Lorsque les idolâtres veulent représenter le soleil, dit saint Clément d'Alexandrie; ils peignent un cercle. " Ce symbole reconnu de tous, est avoué par les archéologues qui le rencontrent fréquemment sur nos ruines algériennes. Peut-on, après cet accord unanime, dénier au soleil un monument qui occupe dans l'espace le vide du cône, dont la base est le cercle et qui a pour sommet la flèche, symboles de la nature et de la forme de cet astre-dieu ?
Il faut des milliers d'années et de graves événements pour interrompre le cours d'une tradition religieuse. A en juger par cette ténacité et par ce qui suit, nous pouvons affirmer que, pendant la durée du paganisme, tous ces symboles tout ce qui avait forme de temple ou d'autel réservés aux divinités était rigoureusement interdit à I'homme. A une époque relativement rapprochée de nous, Rome .crée une loi pénale pour défendre le triangle représenté par un fronton sur les, maisons particulières. Auguste, il est vrai, s'est fait construire un vrai temple enrichi de cette décoration ; mais il était le maître du monde et se sentait devenir dieu ; il préparait ainsi les honneurs de son apothéose.
Le manichéisme, qui, à vrai dire, n'est qu'un système synthétique, à peu près comme le Koran, de croyances recueillies dans le paganisme, le judaïsme et le christianisme, respecte l'autel et réserve aux dieux seuls le droit de I'ériger. J'en appelle ici à la déposition de deux témoins sérieux qui, certes, n'étaient pas de connivence.
A Hippone, Fauste reproche aux fidèles devant saint Augustin d'élever des autels aux martyrs, à des hommes. C'était le crime d'idolâtrie attribué aux chrétiens par l'idolâtrie elle-même, et prouvé par l'hommage de monuments divins élevés à la gloire des mortels. Comment saint Augustin détruira-t-il cette grave accusation ? Il répond tout simplement : Neque templa sicut diis, neque altaria, neque sacerdotia sacra erigimus ; sed martyribus mémorias fabricamus, sicut hominibus mortuis ... Le cas de conscience est écarté ; donc saint Augustin I'admet tacitement. Le principe de Fauste n'est pas attaqué non plus, et il avait pour lui les apparences; car, enfin, ne sont-elles pas de vrais autels païens, à en juger par la forme, ces stèles que nous rencontrons dans les cimetières chrétiens? Obélisques réduits, elles portent l'inscription consacrée D.M.S.; des symboles païens, tels que le fronton anguleux, le disque solaire, le croissant, autant d'idoles qui avaient scandalisé Publicola et que justifie son ami Augustin, en lui répondant que la conversion au service du vrai Dieu de toutes ces idoles est semblable à la conversion des hommes et est tout aussi permise.
Nous nous croyons suffisamment autorisé à le dire depuis cet angle aigu rudimentaire qui rase le sol sur les tombes mégalithiques du Coudiat-el-Bathoum, toujours orientées face au levant, jusqu'aux obélisques et aux Pyramides grandioses, y compris le tumulus, leur frère aîné, tous les excelsa objets de la dévotion sont des autels engendrés par le dogme de la présence d'une divinité entre les molécules de la matière et par la croyance à son séjour dans l'intérieur des montagnes.
On m'objectera, sans doute, les sépultures sous stèles et sous tumuli. Aux yeux des anciens, la déification de l'homme après sa mort emportait un certain droit à I'autel. En outre, il convenait d'appeler les dieux à sa rencontre en leur élevant des demeures sur sa tombe. En un mot, la sépulture d'un mortel n'était qu'une occasion d'augmenter le nombre .des autels, et ces enclos dont nous parlerons ailleurs ne sont autre chose que des Champs-Élysées où dieux et hommes se donnaient rendez-vous.
Par imitation, par respect des choses et de la tradition, l'artiste a conservé à l'autel l'élévation comme cachet distinctif et sacré. Nous le remarquons dans tous les monuments des religions antérieures au christianisme. II est évident pour tous que ce nouveau culte, venu le dernier, ait été en butte aux persécutions des sectaires de toute sorte dont il condamnait les excès, et que, par conséquent, réduit pendant plus de trois siècles à se cacher, il n'ait point élevé de monuments. Mais passons par-dessus les siècles et contemplons ces basiliques, ces cathédrales que la foi de nos pères a élevés à la divinité, n'y retrouvons-nous pas le caractère du tumulus, de l'altare primitif ? Que sont nos yeux de l'antiquaire et du savant ces tours, ces clochers, ces dômes, ces pyramides, autre chose qu'un altare, abstraction faite de tous les appendices qui les accompagnent? Leur orientation même, que l'on dit d'origine chrétienne et qui vise Jésus-Christ, est toute païenne et se retrouve dans toutes les religions et chez tous les peuples, même modernes : la face du sacrificateur, du prêtre, du fidèle, est tournée vers le soleil levant.
L'oblation était, toujours précédée de cérémonies préliminaires : purification, procession, cris ou chants, que nous voyons se perpétuer d'age en âge, et dont le christianisme nous offre une réminiscence. Mais quelle était la nature des offrandes et des sacrifices dans l'antiquité la plus reculée ? Les produits de la nature, soit végétaux, soit animaux, paraissent avoir été agréables aux dieux. Le sacrificateur semble n'avoir tenu compte que de la quantité et la qualité de la chose offerte, quelle qu'elle fut. Le plus et le mieux, pour la divinité, était un principe de haute convenance qui, poussé à l'excès, jusqu'au nec plus ultra, n'a rencontré le sacrifice adéquat que dans la personne du Christ, victime d'un prix infini, se proposant lui-même.
Chez les Israélites, l'holocauste, sacrifice impérial, était cependant, limité à cent têtes de la même espèce; mais je considère cette mesure comme une réforme, et peut-être comme une précaution pour arrêter la décadence.
Nous avons parlé du sacrifice d'Amestris. Xerxès, son mari, porte à mille boeufs l'holocauste qu'il offrit à Minerve d'Ilion au début de la guerre contre les grecs, comme sacrifice d'heureux présage; il égorgea aussi des chevaux blancs sur les bords du Strymon, et dans l'endroit appelé les Neuf Voies il fait enterrer vifs neuf jeunes garçons et neuf jeunes vierges de la contrée.
Bien des fois je m'étais demandé comment et dans quelles conditions était établi l'appareil de sacrifice correspondant à l'importance de pareilles hosties. L'histoire archéologique ne mentionne que le rogus fait de troncs d'arbres non façonnés sur lequel le corps de Patrocle aurait été consumé. Il y avait encore le cippus, comme celui du Virgile du Vatican, découvert sous les ruines de Pompeïa. Etait-ce bien sur des autels de ce genre qu'on pouvait sacrifier et consumer huit cent trente quintaux de viande, l'un étant à peine suffisant pour le sacrifice d'Abraham, l'autre pour l'immolation l'un coq à Esculape ? Non, certes ! On ne peut considérer ceux-ci que comme d'infimes réductions destinées â des sacrifices particuliers. Le premier caractériserait une époque ou un peuple privé d'artistes, le second une période de décadence religieuse, alors que les pontifes païens se plaignaient de la pénurie des victimes et de la dépréciation des sacrifices.
Des archéologues sérieux, versés dans la connaissance de l'antiquité, ont signalé dans nos montagnes, particulièrement à Ksar-el-Achour, des tables sacrifices sur lesquelles un homme ou un boeuf pouvait être commodément égorgé. C'est l'autel, disent-ils, sur lequel les Numides immolaient des esclaves. Il y a quinze ans que je les recherche, et je ne suis point encore parvenu à les découvrir.
C'est donc ailleurs qu'il faut chercher le thousiastérion, dont nous avons besoin, cet autel de sacrifices que les peuples, entraînés vers l'immensité par l'idée religieuse, ont dû élever pour des cérémonies grandioses et l'oblation de si nombreuses victimes. La profession de grand-prêtre ou sacrificateur était devenue progressivement une industrie organisée, munie d'une installation spéciale.
Nous le reconnaissons à trois caractères particuliers : le temple, qui, à l'époque dont nous parlons, consistait simplement en un carré délimité et sans murs d'élévation ; puis la bible, area, et enfin le focus. Telles ont été les trois parties constitutives de l'autel des sacrifices : telles sont précisément les dispositions du Madrazen. Honneur et gloire à M. le colonel Brunon (14) pour avoir le premier, après deux mille ans peut-être, imprimé le pas d'un homme dans l'intérieur de ce précieux monument, et mis à jour, d'un .style net et précis, les documents sur lesquels je m'appuie pour les revendiquer au bénéfice du dieu Soleil.
(14) Mémoire sur les fouilles exécutées au Madras'en par le colonel Brunon.
Du sommet de ce gigantesque édifice, on est tout à coup saisi d'étonnement. Après avoir admiré une plaine unie, découpée en rubans, parant la base de montagnes peu élevé qui ressemblent à des peaux de panthères par l'effet des genévriers croissant çà et là sur leur flancs ; puis, à cinq kilomètres vers l'orient, un lac (15), vu comme par l'ouverture d'une porte dont les montants seraient formes par des montagnes tumuliformes. L'imagination rêve. du songe de Jacob sur la terre de Haran ; elle se figure que là doit être la cour des dieux ; elle entend la voix du Créateur parlant à ses oeuvres qu'il vient de trouver belles et bien faites: Astres d'en haut que j'ai jetés dans le firmament comme une poignée de poussière pendant des milliers d'année, c'est-à-dire dans l'espace d'une seconde escomptée sur mon éternité, je vous laisse ici jouir de ce qui m'appartient : du culte divin et de l'adoration. Ces montagnes disposées par groupes, par constellation, comme vous dans l'espace, vous seront attribuées comme demeure ; elles vous seront consacrées pour autels. Un jour viendra que le peuple de ces lieux vous prendra pour les hôtes d'un Panthéon.
(15) Le lac Chemora ou sebkra Djendeli.
Ainsi va la pensée, tant ces lieux et l'assiette du Madrazen se prêtent au développement et aux pratiques des croyances idolâtriques.
Mais faisons taire l'imagination pour examiner avec calme et sans préjuges cette autre montagne artistique qui a fait l'objet de notre visite.
Je m'aperçois tout d'abord que le Madrazen est revêtu des caractères spéciaux que l'antiquité appliquait à ses monuments latreutique. En le comparant aux temples israélites, particulièrement à celui que voulait réaliser Ézéchiel et dont il dressa le plan pendant son exil à Babylone, on reconnaîtra que le prophète ne tient pas tous ses détails d'une inspiration divine, et que dans ce plan il entre de l'archéologie puisée sur les lieux dans la contemplation des édifices babyloniens. Tous deux sont situés sur des hauteurs; tous deux sont orientés suivant les quatre points cardinaux, munis de portes factices dans ces directions, et, dans l'un et l'autre, l'entrée réelle, celle qui donnait accès dans l'intérieur, est exactement disposée vers le soleil levant.
Le temple d'Ezéchiel devait être surmonté d'un dôme portant le nom d'Ariel, ou mons Dei. C'en est la partie principalement caractéristique, comme aussi ce n'est plus qu'un symbole rappelant le souvenir d'une période antérieure pendant laquelle des populations d'une foi, allant jusqu'au scrupule, tel le peuple de Dieu avant Moïse, ne voulaient pour édifices divins que des montagnes, des collines, des rochers. Le Madrazen, plus ancien peut-être, mais à coup sûr plus conforme à la tradition, conserve dans son ensemble toute la forme d'une montagne. La flèche, principale emblème du dieu Soleil, y fait défaut pour une bonne raison ; mais il en est largement dédommagé par d'autres symboles également consacré à ce dieu. Considérez d'abord les colonnes, obélisques perfectionnés. Hermutius, cité par Tertullien, en a parlé, et a dit : Obelisci enormitas Suli prostituia. Voulait-il parler des pyramides sous le nom générique d'obélisque ? C'est possible. Mesphrès lui en consacra deux. Pline nous apprend qu'elle servaient à représenter les rayons du soleil. Au lieu de deux, les fondateurs du Madrazen lui en ont élevé cent soixante-neuf. Elles sont prodigieuses, enormitas obelisci prostituia ; elles rayonnent autour de l'édifice, radiorum ejus argumtum in effigie est.
Et le cercle ? Les anciens indiquaient par cette figure que la divinité se répand, roule et circule dans le monde céleste, et étoilé. Ainsi fait le soleil, et c'était précisément à cet astre que symbole était exclusivement attribué. Voyez le Madrazen. Ce qui frappe, c'est de voir qu'à l'extérieur il n'est qu'un assemblage de cercles depuis les fondations jusqu'à la plateforme. Le soubassement est un cercle ; les colonnes sont disposées en cercle ; la corniche aussi forme cercle, et ce n'est pas la partie la moins gracieuse du monument. Les gradins eux même au nombre de vingt-quatre, dont les pierres, sont autant de cercles superposés.
Que dire ensuite du triangle inscrit découvert par M. Bauchetet, confirmé par la commission qui en dernier lieu a fouillé le monument ? N'est-ce pas le signe sacramentel d'une dédicace? D'après 1'interprétation de cette figure géométrique donnée par les anciens, peut-on dénier au dieu Soleil la dédicace du Madrazen?
Par les dimensions données à ces vingt-quatre degrés, je remarque qu'on a sacrifié la facilité de I'ascension à l'utilité de la station. Ils ont 60 centimètres de hauteur et un mètre de largeur. Rappelons-nous que la place des adorateurs était sur l'autel. Moins élevés, les assistants se fussent masquer la vue du soleil levant ; moins larges, les adorateurs eussent été gênés dans les évolutions commandées pour la célébration d'un office solennel. Tels qu'ils sont établis, cinq mille personnes pouvaient environner l'autel, se prosterner, circuler. Si j'ajoute que les anciens priaient à la manière des Arabes, par des prostrations intercalées dans l'office, jugez du tableau, de l'effet que devait produire cette multitude fléchissant les genoux avec ensemble, courbant le dos, frappant le front contre terre !
Il n'est pas absurde de présumer que ce triple mouvement, ravissant si le coeur dirige le corps, vienne des anciens, après avoir traversé sans modification la période chrétienne. Incontestablement c'était celui de nos coreligionnaires africains au cinquième siècle encore, car saint Augustin, donnant à ses ouailles des leçons de liturgie, recommande expressément ces trois attitudes : Genua flectere, dorsum incurvare, cervicem humiliare.
En de nombreux endroits sur les marches, on remarque des trous assemblés symétriquement par douze, neuf, cinq et même trois, qui peuvent avoir une certaine importance, mais qui ne sont peut-être aussi que des jeux auxquels se livraient les bergers ou les gens habitant la contrée. Qu'ils aient servi à quelques jeux, c'est ma conviction ; mais ils sont anciens, très anciens. S'ils ont été établis théoriquement, ne peut-on pas supposer qu'ils ont également servi aux divertissements dont les cérémonies étaient suivies sur l'autel même ? J'incline à croire qu'ils ont servi de récipient aux offrandes liquides faites à des constellations sidérales arbitraires représentées par le nombre des cavités. Nous voyons la même chose dans les anciens cimetières et sur une tablette placée horizontalement devant chaque stèle. Le nombre des cuvettes est toujours égal aux personnages représentés sur le monument inscrits sur le titulus. Il n'y pas à s'y méprendre, ces cavités se rattachaient au culte.
Circumdabo altare. C'est un bon renseignement archéologique que David nous fournit. Les adorateurs versaient à profusion .autour de l'autel des offrandes liquides et l'environnaient d'une fumée odorante. Ces excavations étaient destinées à recevoir le vin offert aux dieux, le lait, le miel, le nectar .peut-être. Voilà l'importance que .j'y attache.
La religion païenne, sincèrement pratiquée dès le principe par la généralité des masses, est devenue magique au point de faire dire un jour à Cicéron : " Je ne crois pas que deux augures puissent en face l'un de l'autre se regarder sans rire. " Saint Augustin, qui trouve moyen de tout convertir au christianisme, a fait un assez long traité sur la cabalistique des nombres. Entre autre choses, il dit du quinius qu'il représentait les cinq cailloux que David mit dans sa musette pour aller à la rencontre de Goliath ; ce qui indique que la science augurale était profondément enracinée dans les mœurs africaines. C'est ce qui donne encore lieu de conjecturer que ces sortes de godets ont servi à ces opérations désignées par les auteurs modernes sous le nom de science occulte.
Sur le pourtour de l'entrecolonnement il est facile de voir encore les traces de .nombreuses inscriptions en caractères libyques. On y distingue aussi assez bien un lion, un chameau, deux lièvres et deux lévriers.
Je ne me permettrai pas de donner l'interprétation de ces inscriptions libyques, en effet très nombreuses. En ce qui concerne les animaux, j'y vois la consécration faite à Adonis, ou le soleil, des animaux domestiques en sa qualité de berger, et de ceux de la faune africaine en sa qualité de chasseur. Il fut, l'un et l'autre, personne ne l'ignore. Il devint même grand propriétaire de troupeaux parqués aux abords des temples qui lui étaient dédiés. Hérodote nous apprend que son gardien, personnage distingué, eut les yeux crevés en punition d'un vol commis dans le parc divin pendant qu'il dormait.
Au Madrazen, le parc divin pouvait fort bien être délimité par ces murs d'enceinte, représentant le chaminin des Hébreux (16), le pyreus des Grecs, qui s'entendent à travers les montagnes voisines. La proximité du lac Djendeli offrait un abreuvage facile et abondant.
(16) Le dieu Baal était adoré dans des enclos découverts nommés chaminin en hébreu, et en grec pyreus. C'étaient des lieux fermés et entourés de murailles dans l'enceinte desquelles on érigeait des statues et des autels, et où l'on conservait un feu éternel. Histoires ecclésiastiques.
En se rapprochant du monument vers le nord, la commission recouvra aussi les restes d'une voie empierrée parfaitement conservée, celle, sans doute, qui a servi à sa construction. On a retrouvé sa continuation sur soixante-dix mètres de longueur, se tournant vers l'est, puis sur cent trente-six mètres. Elle semble se diriger sur le lac Djendeli. Mais, à partir de ce point, on n'en trouve plus aucun vestige, le terrain ayant été bouleversé depuis longtemps par les laboureurs.
Sur ces données acquises à la commission de Constantine, nous sommes contraints d'admettre que cette voie créait un service intermédiaire entre le monument et le lac, mais un autre service que l'approvisionnement des matériaux de construction. De l'eau, il n'en fallait pas, puisque le monuments est construit, croyons-nous, de libages et de pierres sèches, elle eût été dirigée vers les montagnes où devait se trouver la carrière, au lieu de suivre la plaine.
D'après notre système, ce ne peut être que la voie sacrée, suivie par les prêtres, les victimes et les assistants à la cérémonie des amburbiales hostiœ et à celle des ablutions générales. Cette voie pavée conduisant au lac pouvait encore servir aux expiations solennelles par purification.
Il est constaté dans le rapport de la commission que, dans l'avant-corps qui précède le monument et qui mesure vingt-trois mètres sur dix-neuf, il n'y a point eu de colonnes, à moins qu'elles n'aient été enlevées ; mais il n'est guère admissible que de riches habitants de Constantine soient venus les prendre à cent kilomètres de distance. Après l'examen de cet avant-corps, je crois pouvoir avancer qu'il n'y a pas eu non plus de murailles; car où sont les libages, les moellons, les restes enfin des murs élevés en hauteur? Les quelques pierres éparses çà et là ne les font aucunement présumer. Qui donc est venu les enlever jusqu'à rendre le sol aussi nu qu'il apparaît de prime abord vers l'est et le nord?
Nous sommes sur le temple, temenos, d'un siècle qui n'admettait encore, entre la terre profane et la terre consacrée par l'augure, qu'une rangée de pierres comme ligue de démarcation. Voilà ce que je pense.
Il est heureux pour moi que la commission ait constaté son identité avec l'avant-corps du tombeau d'Auguste, avant-corps qu'il faut également envisager comme le temple proprement dit.
Il y a cette différence que sur celui-ci s'élèvent des colonnes et un fronton. C'est un pas fait par le progrès sur le siècle du Madrazen et un perfectionnement du temple né du lituus sous la forme de quatre lignes droites imaginaires. Notez bien que l'architecte se maintient, à ce sujet, en conformité avec la tradition égyptienne et la loi romaine qui proscrivait le fronton des demeures particulières. La colonne, obélisque perfectionné, et le triangle embelli par les mains de l'artiste, resteront comme symbole ou comme ornement. Encore un pas, et il deviendra le pronaos de Nîmes, pourvu cette fois d'une enceinte close et d'une toiture, sans perdre ni le fronton anguleux, ni les colonnes, dont le nombre et la belle disposition ont fait dire à M. Millin que, dans la construction des temples païens, toutes les beautés architecturales se trouvaient à l'extérieur, et qui nous font dire une fois de plus avec Hermutius : Obelisci enormitas Soli prostituta, ou bien, pour spécifier la période romaine : Obeliscorum multitudo Soli, vel Jovi , prostituta.
A la page 42 du Mémoire de M. Brunon je lis : " Cet avant-corps, qui avait un dallage dont il reste encore des vestiges (5.,5Om de longueur sur 1,50m de largeur), est fait avec de grandes dalles dont la partie supérieure est recouverte d'un enduit de couleur pourpre" ..
La commission ne me parait pas avoir remarqué que cette partie dallée est plus élevée qui le niveau du grand compartiment formé d'une assise de blocs; que sur les côtés se trouvent deux bandes blanches bien tranchées et qui, par leur largeur, mesurent exactement l'épaisseur de certaines pierres taillées que l'on voit éparses dans les environs. J'ai vu un libage remarquable par une bande rouge qu'il porte sur l'une de ses faces. Restituons-le à l'une de ces bandes non colorées qui réclament un surhaussement perdu, rouge contre rouge ; il s'y adapte parfaitement. L'intuition nous guidant pour le reste, nous reconnaîtrons que des pierres formant rebord ont été placées autour d'un carré que j'estime, en tenant compte des dégradations occasionnées par le temps,de six mètres carrés à l'extérieur. L'on obtient ainsi : 1° un bassin, alveus, d'une capacité représentée par 4,5Om de long sur 4.50m de large, et par X de hauteur, quantité indéterminable aujourd'hui; 2° l'indice du niveau atteint par un liquide, et enfin 3° I'assurance que ce massif est un accessoire du grand compartiment dont il reste à déterminer la destination particulière.
C'est ici le cas de rappeler que M. Becker et autres savants ont découvert les indices d'un conduit rouge. N'avant pu le voir dans le peu de temps que j'ai pu consacrer à la visite du Madrazen, je le place entre le massif et le monument, c'est-à-dire dans la direction que le liquide a du suivre en sortant du bassin présumé.
La présence sur ces pierres de cette couleur rouge s'explique, croyons-nous, par le phénomène de la porosité. Près d'une tombe arabe, non loin de l'avant corps, nous avons vu et bien examiné un fragment de pierre taillée, d'un certain volume, provenant sans aucun doute du dallage dont la partie supérieure est recouverte .d'un enduit de couleur pourpre. Le parement est coloré de la même manière, et les veines qui descendent verticalement de cette surface ont reçu les infiltrations rouges du liquide. Le fait est très facile à vérifier.
En restituant à ce parquet surhaussé deux assises de dalles pour le ramener à 5,5Om de surface présumable, on englobe une excavation que M. Brunon dit être un puits peu profond. Son embouchure porterait au niveau du parquet qu'effleure aussi le labrum du bassin.
Faites au sujet de ce puits toutes les hypothèses imaginables, vous n'arriverez pas, en dehors de mon système, à déterminer le but, l'utilité, la raison d'être d'un puits d'une si petite capacité, tandis qu'en l'admettant comme cratère sacré, sa contenance d'abord vous apparaît en rapport avec le sang de trois cents boeufs ; sa situation, ensuite, irrégulière en apparence, vous révèle l'usage auquel il était destiné.
Livré aux victimaires, le boeuf recevait du popa le coup de hache au milieu du temple. De là il pouvait être hissé sans effort sur cette esplanade que nous appelons encore parquet, le cou placé sur le bord du cratère. Le sacrificateur, cultrarius, également monté sur le parquet, avait en face de lui le soleil levant, auquel il pouvait adresser directement à son apparition ses obsécrations préliminaires, et égorger ensuite la victime en sa présence.
Si le simpulum servait, dans les sacrifices particuliers, à puiser en petite quantité le vin dans le cratère, dans le nôtre il servait bien aussi à puiser le sang et à le transporter dans l'alveus, près du monument, et à l'y mélanger avec d'aunes substances offertes, telles que vin, lait, etc., pour en composer un breuvage divin (l'ambroisie?).
Groupons tous ces détails : parquet en contre-haut, bassin carré indiqué par deux zones non colorées, niveau et infiltration de liquide, indice d'un conduit signalé par M. Becker, disposition de l'ensemble s'adaptant aux cérémonies d'un sacrifice accompli sur une grande échelle... tous ces détails, dis-je, ne sont que les derniers vestiges d'une table de sacrifices, l'ara, autrement dite mensa sacra. J'oubliais de signaler le puits peu profond, si bien disposé pour sacrifier au dieu supérieur, le Soleil.
En pénétrant dans l'intérieur du monument, en en parcourant la galerie souterraine aussi loin que la lumière du jour me le permettait, j'ai reconnu la justesse des calculs et des observations faites en détail par M. Brunon, mais aussi, je le dis à regret, des motifs de plus en plus plausibles qui me portent à rejeter ses conclusions.
Ce qui m'a frappé tout d'abord, c'est que cette galerie est appareillée de manière à diriger un liquide au coeur du monument ; que ce liquide, toujours coloré, y manifeste son passage, comme au travers les molécules de la pierre déjà examinée, par des empreintes rouges des infiltrations hétéroclites qui réduisent à néant toute hypothèse de peintures décoratives qui, du reste, ne s'expliquent pas, exécutées dans un lieu obscur et pour être foulées aux pieds.
Il est vrai de dire, d'après M. Brunon, que les parois de la galerie ont été stuquées à une certaine hauteur, à 0,15m d'après ce qui en reste ; mais il est vrai d'ajouter aussi que les deux angles en ont été ramenés par l'application du ciment à l'état de gorge ; que malgré cette précaution prise pour faciliter l'écoulement d'un liquide ou en prévenir les fuites, les infiltrations ont eu lieu quand même.
Le parement de la zone stuquées, lisse et poli, n'a pu se saturer que d'une minime quantité de matière colorante, ce qui l'a maintenue plus mate et plus pâle que les autres surfaces planes sur lesquelles se remarque également la couleur rouge. Mais que l'on détache une plaque de ce stuc, au revers elle présentera l'empreinte rouge aussi prononcée que sur le plein-pieds de la galerie et sur le dallage extérieur. Nous produirions au besoin des pièces de conviction.
Des fouilles pratiquées au pied de l'escalier, ont amené des croûtes de ciment, du mortier pulvérisé, également teints de rouge. C'est l'évidence qui parle : un liquide a passé par là; ce liquide était rouge; malgré toutes les précautions, il trouvé des fuites en se rendant au cœur du monument où un bassin était disposé pour le recevoir ; il a laissé des traces qui indiquent, après vingt siècles et plus, les marques de son passage.
Profond mystère que la nature de cette couleur appliquée ou liquide ! Je présume la trace du sang versé dans les sacrifices. La science répondra négativement pour un motif ou pour un autre.
Une petite quantité de cet enduit coloré, soumise à une analyse superficielle, il faut le dire, n'a pas donné de résultat décisif. La matière, traitée par l'acide azotique, s'est dissoute avec effervescence, et la solution s'est colorée instantanément en bleu par l'addition d'une solution de ferrocyanure de potassium. Donc, outre très probablement des carbonates de chaux, il s'y trouve un oxyde de fer. Le chimiste avait dit en commençant l'analyse : C'est de l'ocre.
Les apparences sont tellement favorables à mon système que, avant de l'abandonner, j'attends, malgré la sentence du chimiste, une expérimentation après trois mille ans sur le résidu de 450 litres de sang versé successivement tous les ans par quantités de vingt-deux bordelaises environ pendant une période de cinq siècles, durée présumable pendant laquelle ont eu lieu les sacrifices sur le Madrazen.
Je ne prétends pas cependant, puisque l'histoire nous signale des mélanges, que les libations étaient de sang pur ; l'huile y entrait pour beaucoup. En ajoutant chaque jour l'huile sur la même eau d'une veilleuse, on est tout surpris de remarquer, au bout d'un certain temps, au fond du vase, une couleur délicate rose-violet en décantant le liquide. La couleur pourpre signalée au Madrazen ne serait-elle pas le résultat d'un dépôt séculaire de substances multiples, un précipité galvanoplastique des éléments qui composaient le breuvage divin?
Rogus. Dans un thousiastérion, appareil de sacrifice, il faut, avons-nous. dit, un bûcher tout autre que celui qui dut servir au sacrifice d'Abraham, tout autre que celui sur lequel le corps de Patrocle fut consumé, attendu qu'il s'agit de l'immolation de trois cents boeufs en une séance. Il faut même, au besoin, quelque chose qui se rapproche de ces monuments que les voyageurs modernes rencontrent au fond de l'Afrique et dans l'intérieur desquels les habitants de ces contrées entretiennent un feu perpétuel ; car Ià aussi je prétends retrouver des traces de la religion lybico-numide refoulée par la civilisation romaine et par le christianisme.
Cinq cents ans avant Jésus-Christ, un navigateur carthaginois, Hannon, vit avec surprise les montagnes de Numidie resplendissantes de lumières. Solin nous assure que pendant la nuit on voyait Briller des feux sur le mont Atlas, et que tout résonnait des chants des Egipans. C'en est assez pour nous apprendre que le feu entrait pour une grande part dans les cérémonies religieuses des Africains, s'il n'en était l'objet principal (17).
(17) Voir un ouvrage composé par M. Charton, donné en récompense aux instituteurs sous le ministère de M. Duruy. Cet ouvrage traite en partie des colonies carthaginoises.
En s'avançant dans la galerie, M. Brunon y atteignit comme dernière limite un comportement que, d'accord avec la commission qu'il présidait, il reconnut comme la chambre funéraire d'une sépulture princière. Encore que ce splendide apparat de tombeau ne concerne un seul personnage, et à défaut des probabilités qui en font un autel de sacrifices, je rejetterais quand même cette opinion et je dirais : C'est l'adytun d'Adonis, car il est connu en histoire que les fêtes appelées Adonies, célébrées en l'honneur de ce dieu, avaient pour but de rappeler le mort. Elles avaient un caractère essentiellement funèbre; il semble que rien n'y manquait de ce qui se pratiquait dans les funérailles, ni I'onction, ni la toilette du mort, ni son exposition, ni les offrandes, ni les repas en commun. Sa statue le représentait sur un lit de mort.
Par conséquent, il m'est bien plus difficile d'admettre un tombeau dynastique susceptible de modifications à y apporter dans la suite en ouvrant à chaque décès d'autres hypogées, à droite et à gauche, autour du premier réservé au chef de la famille. J'en dis autant du Tombeau de la Chrétienne. Ces deux monuments sont construits dans des conditions telles, que pareilles modifications ne sont pas acceptables. Comment circuler, échanger des matériaux, établir des chantiers dans l'intérieur de ces deux édifices ? Pourquoi, dans cette prévision, les a-t-on construits de manière que la soustraction d'un seul libage entraînerait leur écroulement? Pourquoi, enfin, un provisoire érigé en loi d'architecture, puisqu'il se rencontrerait dans tous les monuments de ce genre, construits à des époques si éloignées, des distances si grandes les unes des autres ? Oui, Messieurs, le Madrazen a été construit dans un but déterminé ; le fini du travail s'y trouve, et la dédicace a visé un personnage plus éminent encore que le chef des Madres (18). Du reste, il est constaté qu'aucun cadavre humain n'y a été déposé.
(18) Colonel Carette, Migrations des principales tribus de l'Algérie.
Ce qui est encore mieux constaté, c'est I'existence d'un brasier énorme. Il a laissé des résidus, il a produit des dégâts qui témoignent de la violence : grès calciné, calcaire pulvérisé, cendres, charbon, etc.
On veut que tout ceci soit le résultat d'un incendie allumé pour détruire le monument. Quoi ! tenter de détruire par le feu un édifice dont les portes mêmes étaient en pierre, une époque où l'on n'avait pas la moindre idée de la science pyrotechnique (19) ! Comment, dans les conditions d'établissement du Madrazen, l'oxygène nécessaire à la combustion ou à la respiration pouvait-il sans cesse se renouveler au fond d'une galerie profonde de trente mètres? Sans parler du chimiste, le chauffeur d'usine, le boulanger, le fumiste surtout, reconnaîtrait la nécessité absolue d'un ventilateur, d'une cheminée, enfin, partant du caveau et aboutissant au centre de la plate-forme ou à tout autre endroit du monument.
(19) Pour les anciens, l'ouverture du temple était un acte solennel, comme on peut en juger par la répétition de ces mots : Attollite portas, principes, vestras, etc. Le verbe attolite exprime exactement l'action de soulever (au moyen d'un levier, s'il le faut) la porte d'entrée (sorte de vanne, Brunon, Mémoire sur le Madracen), comme celles du Madrazen et du Tombeau de la Chrétienne.
Du reste ; on en voit des indices tant à l'intérieur qu'à la partie supérieure de l'édifice. A l'intérieur, c'est la banquette qui a servi de chenet et la galerie qui pouvait servir de ventilateur, de passage pour le chauffeur et pour le sang, pour recevoir l'action directe de l'air froid extérieur agissant par son poids sur l'air raréfié à l'intérieur.
Quand on examine attentivement la plate-forme du Madrazen, on remarque qu'elle s'est affaissée en s'inclinant de manière à former vers le centre une sorte d'entonnoir très irrégulier, et qu'un des blocs qui la composent s'est affaissé plus que les autres. Cet examen nous conduit à admettre l'instantanéité de sa chute dans un vide préexistant et rejeter l'opinion de ceux qui l'attribuent au fait de quelques chercheurs de trésors. Il y aurait, en effet, témérité à creuser une mine sous cette masse de pierres formant une table de treize mètres, et l'on courrait le risque de se faire écraser par sa chute. D'un autre côté, le peu d'inclinaison, de pente donnée à la paroi extérieure du monument, la largeur (0,98m) de chaque gradin, eussent été plus que suffisantes .pour retenir les déblais autour du point fouillé, et pas une pierre ne s'y trouve.
Une expérience qui aurait sa valeur, c'est qu'en frappant du pied une de ces énormes dalles, elle a rendu un son métallique très clair. Ne serait-ce pas le résultat du contact des flammes vomies par le cratère?
Enfin, une dernière remarque faite à la hâte et que d'autres peuvent éclaircir : les pierres qui formaient la couronne centrale sont taillées à la règle de manière à laisser un vide nécessairement anguleux, quadrilatéral, je présume, au milieu de la plate-forme. Ce vide ne peut être que l'orifice de la cheminée préexistante ou bien il eût été fermé par un large tampon ; mais alors il serait invisible au fond de la cavité ou par côté.
Au surplus, des observations plus prolongées me paraissent superflues ! Nécessairement il y a une vaste cheminée établie sur le prolongement en hauteur des libages doublés de maçonnerie qui forment le compartiment désigné sous le nom de chambre funéraire, à mon avis, le rogus qui complète et qui constitue l'autel des sacrifices, et dont l'importance devait être en rapport avec le nombre des victimes composant l'holocauste.
Le temps ne m'a pas permis d'examiner sur les lieux comment et dans quelles circonstances cette cheminée s'est trouvée bouchée. On peut présumer cependant que sa chute n'est attribuable qu'au temps et aux dégradations occasionnées par la chaleur du foyer. Une première fois, ces dégradations n'eussent été que partielles et opérées d'en haut. Selon les lois de la destruction qui s'accusent sur toutes les ruines de l'Algérie, la pierre sculptée en forme de corniche qui embarrasse un peu les archéologues, se serait détachée du couronnement de la cheminée auquel on peut l'attribuer. Peu gênante et peu facile à faire sortir par la galerie, on a pu la laisser sur place. La galerie, dégradée de son côté, mais étayée comme elle se retrouve, les sacrifices ont continué dans cet état.
Qu'un autre cataclysme soit survenu entraînant en masse la partie supérieure du cratère pendant ou après le sacrifice, voilà l'autel interdit, à une époque de décadence probablement. La population libyenne ou numide, n'ayant aucun moyen de le réparer, l'autel est demeuré tel que nous l'avons. retrouvé, sauf les tentatives faites pour en explorer l'intérieur, ou, comme on dit , pour découvrir un trésor.
Les sacrifices ont-ils cessé immédiatement après ce dernier événement ? Ce n'est pas admissible. Dans ce lointain passé, je revois la ténacité des Africains du Bas-Empire qui, à la suite des désastres occasionnés par les Vandales d'abord, ensuite par les musulmans, sont revenus visiter leurs lieux de prières et enterrer leurs morts sur les ruines de leurs habitations. Tant qu'ont duré l'habitude et la tradition, les peuples ont pu continuer, sur les ruines du Madrazen, la célébration d'un culte dégénéré, en décadence, sauf recourir au rogus élevé en plein air, versant toujours le sang sur la même table, répandant les libations dans le même bassin, malgré l'obstruction du canal, que semblent expliquer le reflux et l'élévation du liquide jusqu'à la onzième marche de l'escalier et le dépôt de la couleur rouge visible sur toutes les parties qui en ont été baignées.
S'il s'agit des dégradations extérieures, incontestablement c'est la main de l'homme qu'il les faut attribuer. Quel était le but du démolisseur en voulant pénétrer dans le monument ? Qu'y cherchait-il ? La science, ou des valeurs matérielles ?
Mais l'escalier, dont l'existence n'est plus que problématique, la table des sacrifices sont plutôt tombés sous les coups d'un profanateur, d'un sacrilège. On peut voir là le résultat d'une vengeance satisfaite à la suite d'un combat. Nous savons par l'histoire que les souverains de l'antiquité, favorisés par la victoire, frappaient les vaincus dans leur partie la plus sensible en commettant toute sorte de ravages et de dépravations dans les saints lieux, et que, dans leurs idées superstitieuses, ils faisaient tomber la responsabilité de leurs actes sur les dieux qu'ils avaient consultés auparavant. Je citerai de nouveau pour exemple Xerxès consultant au début d'une guerre l'oracle du Soleil, et détruisant ses temples et ses autels après la victoire.
Dans l'impossibilité de renverser complètement le Madrazen, on en aurait détruit les parties les plus respectables, les plus nécessaires aux sacrifices, en bouleversant, le temenos, en brisant l'ara, mensa sacra, en démolissant l'escalier, en dégradant la façade et les abords du monument.
NOTE COMPLEMENTAIRE
Nous rencontrons, dans la liste des évêchés d'Afrique rapportée par le docteur Shaw, II, p. 88 des Extraits servant de preuves, un certain nombre d'Églises portant le titre de turris en Numidie :
1° L'Église de la Tour ronde, a Turre rotonda ;
2° Celle des environs des Ammenites, Turris Arnmeniarum;
3° Celle de la Tour concordante, Turris concordiensis.
Présentement, dans cette province, trois tours sont bien connues :
1° Le Madrazen, tour vraiment ronde;
2° Une autre tour au Khroubs, appelée Tombeau, entrée et gradins comme la Précédente ;
3° Une troisième enfin entre Guelma et Jemmapes, visitée par M. Nouffert, docteur médecin à Guelma.
Au sujet du mot Ammeniarum, on peut conjecturer, sans tomber dans l'absurde, qu'il a pu être corrompu par les copistes, et qu'il faut lire Ammonitarum, Tour des partisans ou sectateur d Ammon, " divinité d'origine étrangère, dit Daremberg, sémitique ou égyptienne, que les Grecs et les Romains identifièrent avec Zeus et Jupiter. "
L'existence dans la grande oasis de la Libye d'un oracle, non moins célèbre que ceux de Dodone et de Delphes nous permet actuellement, d'admettre que son culte s'est répandu dans toute l'Afrique civilisée avant de passer en Grèce.
S'il s'agissait de se prononcer, on pourrait dire, sauf à subir les foudres de certains savants, que le monument du Khroubs est cette Tour des Ammonites. A preuve, c'est qu'élevée sur un temenos carré, elle symbolise le " monde élémentaire " (Dr Shaw, Il, p. 132), et qu'elle est conforme aux pyramides, qu'explore en ce moment M. Mariette, et sous lesquelles il rencontre des preuves incontestables que ces sortes de monuments sont des autels divins, et non pas des tombeaux princiers.
A SUIVRE
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MESSAGES
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sur le site de notre Ami Jean Louis Ventura
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De M. Jean Claude Hestin
Bonjour
J'ai déjà eu l'occasion de vous demander de m'aider a retrouver une pièce de théâtre de Monsieur Édouard Blois, BONOIS de naissance : JOSETTE DE VERRIERES ( la première partie était Carmeno Tollo dont j'ai déjà le texte ).
J'arrive après de nombreuses années de recherche a une ultime démarche, faire paraître la liste des noms faisant partie de la famille par alliance de Monsieur E. Blois, dans l'espoir de voir surgir ce livret où ces pages écrites de cette pièce qui représente un peu de notre patrimoine.
Voici les noms des familles alliées a Monsieur Édouard Blois : ÉPARVIER - DUMAS - LAMBERT.
Pour information j'ai retrouvé ces noms sur la tombe de Monsieur Blois au cimetière de Caucade a Nice.
La question est : Qui a le texte de la pièce de JOSETTE DE VERRIERE ?
A communiquer au journal où a moi !
Un grand merci et bonne continuation. Gérard Boutonné.
Mon adresse : Jchestin@aol.com
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DIVERS LIENS VERS LES SITES
M. Gilles Martinez et son site de GUELMA vous annoncent la mise à jour du site au 1er Septembre 2010.
Son adresse: http://www.piednoir.net/guelma
Nous vous invitons à visiter la mise à jour.
Le Guelmois
M. Antoine Martinez vous annonce la mise en service du nouveau site sur l'EXODE de 1962.
Son adresse: http://www.exode1962.fr/
Nous vous invitons à visiter ce site pour se rendre compte ce que fut cet exode.
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Conversation spirituelle...
Envoyé par Marc
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L'homme : Dieu ?
Dieu : Oui ?
L'homme : Je peux te demander quelque chose ?
Dieu : Bien sûr !
L'homme : Que représentent pour toi, un million d'années ?
Dieu : Une seconde !
L'homme : Et un million d'Euros ?
Dieu : Un centime !
L'homme : Peux-tu me donner un centime ?
Dieu : Attends une seconde !
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