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LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD se trouve dans la page: La Seybouse,
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Cet Ecusson de Bône a été généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
Les dix derniers Numéros :
85, 86,
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91, 92,
93, ,
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EDITO
LES RETRAITES EFFONDREES….
Chers Amis
Ce n'est plus facile de pondre des lois et de les faire appliquer dans l'imbroglio politique du Pays et de l'Europe.
En France, ce n'est jamais le bon moment car il y a toujours une échéance électorale en point de mire et depuis quelques années la peur du politiquement incorrect ou des soit disants antinationalisme et antiracisme qui pourrissent la vie du pays.
A force de fermer les yeux sur les réalités journalières qui sont autant de signaux d'alerte, les plus hauts élus ont conduit le pays dans la voie de la Guerre Civile avec l'effondrement de son mode de vie, de ses traditions, de ses valeurs ancestrales cimentées dans les tablettes des lois grâce à des révolutions et guerres au prix de millions de morts, et l'augmentation de la pauvreté.
Cet effondrement qui vient de loin car engendré par l'avènement d'un homme que les " français aveugles" ont surnommé " le plus grand d'entre eux " alors qu'il a été l'un des plus grands criminels de l'histoire.
Ce lent effondrement s'est poursuivi grâce aux descendants spirituels du " grand homme " et à leur incurie. Il était prévisible et son pronostic ressassé par ceux qui avaient les yeux bien ouverts et l'esprit en alerte permanente.
A force de flotter sur cette mer de l'incurie nationale, le rafiot France plonge inexorablement dans l'abîme que seule la Guerre Civile pourrait l'en ressortir.
Les " Docteurs de la loi " et du politiquement correct connaissent les véritables problèmes, avec leurs origines et leurs aboutissements, qui sont :
- L'insécurité galopante,
- L'incivilité permanente,
- Les actes de terrorisme urbain qui se traduisent par des " Evénements de quartier ",
- Une culture, venue d'ailleurs, qui impose sa loi contre la laïcité et le respect de l'humain à vivre libre sans contrainte religieuse ou sectaire.
- Par de l'assistance à outrance à des personnes qui ridiculisent le pays et les véritables pauvres qui eux, sans masque, se cachent par honte de ce qu'ils sont devenus.
- Par des lois qui touchent sans arrêt le portefeuille des petites gens et des restrictions sur les libertés individuelles.
Ces " Docteurs de la loi " ne savent répondre que par " Travaillez plus pour nous payer plus d'impôts direct ou indirects "
Il y a aussi les Docteurs " C'est rien " qui disent qu'il n'y a pas le feu chez la Mère patrie, que les vacances approchent et que l'annonce du terrible naufrage perturberait peu les " Veaux " se dorant le corps sur les plages avant d'aller lentement à l'abattoir perdre leur tête ou faire comme les " Alouettes " en participant aux beuveries de " face de bouc " dans des villes incontrôlables.
C'est ainsi, depuis des décennies, que l'on cloue le bec du peuple. Par indolence et illusion, tout devient de plus en plus compliqué et très inquiétant. Et si certains " Lucides " prévoient une immense défaite pacifique de la civilisation occidentale forgée par des siècles d'histoire, il y a des spasmes qui annoncent une " Guerre Civile " inhumaine, ethnique et religieuse qui fera des millions de morts.
C'est peut-être la solution que recherchent les successeurs du " gRAND hOMME " dans la poursuite du génocide organisé depuis 1945 pour régler le Problème des Retraites.
Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt ?
Jean Pierre Bartolini
Diobône,
A tchao.
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A la mémoire des Agriculteurs de la plaine de Bône
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Chapitre VI
LES SOCIÉTÉS POSSÉDANT
DE GRANDS DOMAINES
LA SOCIÉTÉ DES FERMES FRANÇAISES
DE TUNISIE ET D'ALGÉRIE
En 1898, un enseignant, Jules Saurin, arrivé en Afrique du Nord en 1887, passionné par les questions africaines, fondait la société agricole "Jules Saurin et Cie" en Tunisie, société en commandite par actions.
Son capital ne représentait alors qu'un domaine de 450 ha, évalués à 238.000 fr.
Sa seule idée était de renforcer la grandeur de la France en implantant de nombreux paysans français.
Après avoir quitté l'enseignement Jules avait réuni sous sa direction, quelques 1500 ha de terres labourables représentées par les domaines de Munchar (650 ha) acheté en échange d'actions, et deux autres domaines à St-Cyprien.
Après des résultats d'exploitation médiocres en 1906, il transforma la société en Société Anonyme ce qui lui permit en modifiant les statuts de se lancer dans des actions immobilières, (achats de terrains urbains et suburbains) ce qui attira de nombreux actionnaires métropolitains.
Ainsi dés 1908 les comptes furent épurés et les déficits amortis. En 1914 la nouvelle société acheta les domaines de Mabtouba (St-Victor) et les domaines d'Henriville et de Saadia sous l'appellation d'El Alem en tout 16000 ha.
En 1917, la société se tournait vers l'Algérie, constituant un important vignoble par l'acquisition dans la plaine de Bône de plusieurs domaines.
La Société des Fermes Françaises d’Algérie
(Récit et document de Jean-Pierre Brucker)
Marcel Brucker, mon père, jeune ingénieur agronome, était venu faire un stage en Algérie en 1936. Le pays et la rencontre de son épouse l'avaient retenu.
Après avoir été gérant du domaine de Chandon, puis de Beugin, il fut le dernier président-directeur général de la Société des Fermes Françaises d'Algérie dont le siège se trouvait en face de la clinique du Champ-de-Mars à Bône, jusqu'à la nationalisation par l'État algérien le 6 avril 1963.
Cette société anonyme, se composait des domaines de : Saint-Vincent, Bordj Sammar, Darhoussa, Réïoua (St-Louis) de 770 ha et Beugin prés de Randon, puis Magrane (St-Yves) de 4100 ha, sur la commune de Penthièvre, propice à l'élevage.
Les domaines de Réïoua, Zemmouria et Parc aux boeufs, étaient donnés en gérance.
>Le Domaine Saint Vincent, première acquisition de la société, acheté en 1916, s'étendait sur 600 ha, en formant un carré entre la RN 44 et le chemin communal 29. Planté essentiellement en vigne, il possédait une cave de stockage de 20.000 hI, une école primaire, une cantine, des logements pour la direction et le gérant.
Le Domaine de Bordj Sammar, acheté en 1918 s'étendait sur 990 ha, mitoyen du domaine St-Vincent était planté de 450 ha de vigne, placés au-dessus d'une nappe d'eau douce. Les plantations avaient été faites en lignes espacées de 2m75 mises sur fil de fer favorisant plusieurs cultures intercalaires, tel que le tabac et 100 ha de céréales.
Le Domaine Darhoussa (La Maison de la
Noce, en arabe), créé en 1913 fut acheté en 1922. Situé près de Mondovi, il
était d'une superficie de 1135 hectares et s'étendait sur la rive droite de la
rivière Seybouse. Ses terres alluvionnaires assuraient une grande perméabilité
du sol, profitant aux 575 hectares de vigne, 60 hectares d'orangers,
tabac, céréales et fourrage.
Plusieurs bâtiments étaient construits autour de
sa gare sur la voie du Bône-Randon avec un embranchement vers la cave de 28.000
hl de cuves en ciment armé. Ce domaine agrandi par l'échange du domaine
Duzerville en 1923 avec celui mitoyen du Paradou comprenait 33 ha d'orangers,
et 125 ha de terres d'alluvions sur les bords de la Seybouse, mises en cultures maraîchères et arboricoles.
Le Domaine Beugin était d'une superficie de 170 hectares, situés entre Mondovi et Randon, il traitait 30 à 40.000 quintaux d'agrumes.
La Société des Fermes
Algériennes
Le siège social de cette filiale des Fermes
Françaises comprenant les domaines de Bouarioua et Chandon, prés
d'Ain Mokra, se situait 1, rue de Champagne, à Bône.
AUTRES DOMAINES EN SOCIETE
LA SOCIETE DES VIGNOBLES ALGERIENS
Domaine Gazan, situé à St-Paul prés de Mondovi, Tel: 0.04.
LA COMPAGNIE DES
VIGNOBLES DE LA MÉDITERRANÉE
(Récit
de Monsieur Yves Perreimond)
La compagnie était une Société Anonyme cotée en bourse qui comprenait plusieurs domaines viticoles très importants, domaine Monville
à Saint Paul et le domaine Oued Seybouse à Duzerville.
Les propriétés La Lorraine, Sainte Marie et El Arza de Duzerville, appartenaient et étaient dirigées par Monsieur Albert Tucci qui n'eut pas d'héritiers en dehors de sa seconde épouse aujourd'hui décédée.
Société Anonyme du Domaine du Chapeau de Gendarme
(Récit et documents de Marcel Castelbou et son fils Christian, documentaliste de l'Amicale des enfants du Chapeau de Gendarme)
Monsieur Castelbou (86 ans), ancien responsable administratif et financier de la Société nous fait le grand honneur d'évoquer pour nous : "Quelques souvenirs de sa vie au domaine "
Le domaine du Chapeau de Gendarme était situé en Algérie prés de Bône, son PDG M. Arnaud Henri et son directeur administratif M. Bonnet se trouvaient à son siège social, 2 rue Arago à Alger.
L'exploitation dirigée par M. Maurice Giacobi s'étendait sur 1.105 ha dont 667 de vignes et 145 ha d'agrumes. Le domaine divisé en deux sur la commune de Mondovi et celle de Randon comprenait entre 850 et 1000 ouvriers, complétés par 250 détenus qui accomplissaient une peine de plusieurs années sous contrôle de l'administration pénitentiaire. Les populations européennes et musulmanes vivant des revenus salariaux du domaine représentaient 4500 à 5000 personnes, ce qui nécessitait un économat pour le ravitaillement, avec une alimentation générale, boulangerie et un restaurant pour cadres et célibataires stagiaires européens.
Le domaine nationalisé le 5 avril 1963 prit le nom de Fédaoui Salha ancien ouvrier et (martyr de la révolution).
Recruté le 1e' Juin 1949, J'ai exercé mon activité jusqu'au 4 Juillet 1962, date de l'indépendance de l'Algérie, où j'ai dû quitter ce pays avec un pincement au coeur pour me retirer en France comme tous les collaborateurs européens du domaine.
Mais quelques mois après ce départ, Monsieur Giacobi, me conseilla de revenir car le poste que j'occupais était toujours vacant, j'ai de suite accepté ne pouvant m'habituer au pays de mes ancêtres que j'avais connu pour la première fois lors du débarquement de Cavalaire le 15 Août 1944, jour de mes 24 ans, après avoir participé aux campagnes de Tunisie et d'Italie avec la 1ere division des Français Libres.
J'ai donc repris mon poste dans des conditions de travail très difficiles par suite du départ de tous mes collaborateurs européens.
Pendant les nombreuses années passées au domaine, où j'assurais le fonctionnement de cet important poste administratif, j'eus beaucoup d'estime et d'admiration pour tous les artisans qualifiés à qui je rendais service avec plaisir dans leurs ateliers où ils accomplissaient leur tâche pénible avec dévouement sans jamais se plaindre.
A la nationalisation du domaine, j'ai continué à travailler au titre de la coopération jusqu'au 31 décembre 1971, date à laquelle j'ai définitivement quitté l'Algérie pour m'installer en France.
Ma pensée va toujours vers ce pays qui m'a vu naître et où reposent mes défunts parents.
Le personnel du domaine était assimilable à une grande famille, dont le père Maurice Giacobi avait la confiance et le respect de tous.
Il avait toujours cherché à faire notre bonheur en partageant joies et peines, personnel musulman compris.
De cette longue période où je fus son premier collaborateur, je garde de lui avec grande émotion, un profond et respectueux souvenir, avec toute ma sympathie pour ses enfants.
Société Anonyme, composée surtout d'actionnaires
métropolitains, cotée à la bourse de Paris. Tel: 20.05 Bône.
Les centaines
d'ouvriers permanents, entretenaient tel un jardin, vignes et arbres fruitiers
ainsi que tout le matériel nécessaire à leur bonne rentabilité.
A SUIVRE
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LE MUTILE N° 188, 10 Avril 1921
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Prisonniers français en Allemagne
Y a-t-il encore des prisonniers français en Allemagne. Cette question se pose. Un soldat du 26e territorial d'infanterie : Joseph Blin, disparu depuis le 26 août 1914 et que sa famille croyait mort, vient de rentrer à Marolles les Brault (Sarthe).
Blin affirme avoir été remis en liberté le 26 novembre dernier seulement, sur les instances du général. Dupont. Il dit avoir été blessé, fait prisonnier par les Allemands et condamné pour refus de travail à plusieurs années d'emprisonnement
Joseph Blin ajoute que son cas n'est pas isolé et il cite d'autres soldats français encore incarcérés, selon lui aux frontières du duché de Bade et dans l'impossibilité d'écrire à leurs familles. L'autorité militaire, avisée de la rentrée de ce disparu, va faire vérifier ses allégations.
Les déclarations de ce malheureux paraissent douteuses à l'autorité militaire. Quel intérêt aurait-il à mentir ? On se décide maintenant à aller voir ce qui se passe dans les prisons boches. N'a-t-on pas le droit ? On le prend !... Sommes-nous peut-être les vaincus ?... C'est à y croire l...
Il y a encore des malheureux qui s'étiolent et meurent dans les froides forteresses de Prusse.
Hâtez-vous de les libérer, il sera bientôt trop tard !...
P.G..
EST-ce que ce texte ne vous rappelle pas du vécu ?
L'année 1962 a été la répétition de 1918 et de 1945. Après une guerre, l'ingrate France ne se soucie pas de ceux qui l'ont défendu au prix de leur vie ou de leur emprisonnement.
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ANECDOTE
Envoyé par M. Georges Jory
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DANIELLE DARRIEUX
LES ALGERIENNES ET LE CINEMA
Paris-Alger - magazine. Revue mensuelle de la femme
NOVEMBRE 1935 -- ARTISTES ALGERIENNES
Puisque les Algériennes aiment la musique, il était naturel qu'elles fussent attirées vers le cinéma.
Il semble, en effet, que le cinéma soit l'art complet où un tempérament d'artiste peut se réaliser totalement.
Et l'Algérienne, qui est de nature si vibrante, devait aller à lui pour apaiser sa soif de sensations et son besoin multiple d'exprimer ses états d'âme.
Le film muet n'extériorisait pas assez ses troubles intérieurs, la musique n'avait pas la précision qui intensifie l'action. Mais le film parlant répondit à tous ses désirs tendus vers une forme absolue d'expression où l'attitude, la mimique, la voix, la musique, dans un émouvant synchronisme, expriment toute la gamme des émotions depuis les plus vives jusqu'aux plus furtives...
Et les Algériennes sont allées à la conquête de l'écran. Nous ne retiendrons aujourd'hui que l'étonnante fortune de Danielle Darrieux.
Danielle Darrieux est une Algérienne. Sa mère est née à Bône et sa famille a longtemps habité Alger.
Quelle curieuse destinée! C'était encore l'époque où la famille bourgeoise, empêtrée de préjugés, regardait sans indulgence s'éveiller une vocation artistique.
Qu'importe! La future maman de la jeune étoile cueille d'abondants lauriers au Conservatoire d'Alger. Elle récidive au Conservatoire de Bordeaux.
Enfin la voici, à Paris, à la Scola Cantorum, une des élèves les plus aimées et les mieux douées du maître Vincent Dindy.
Certes, le théâtre la tentait. Mais ne portait-elle pas, inconsciemment, le boulet des préventions? Elle se tourna vers le professorat, qu'elle n'allait pas tarder à abandonner pour se marier.
Et la petite Danielle fut élevée entre un père - que la guerre ne devait lui rendre que pour peu de temps, et qui était un érudit de la musique - et une mère qui avait penché ses rêves sur tous les claviers.
Ces deux êtres d'élite lui façonnèrent une âme d'artiste.
En elle, frissonnèrent tons les rêves qui n'avaient pas été entièrement réalisés, toutes les aspirations dont les préjugés stupides avaient détourné le cours.
Elle entre au Conservatoire et c'est d'abord à son violoncelle qu'elle confie les premiers frémissements de son âme. Les ailes poussent.
Et un jour, dans le noir d'une salle, elle se sent invinciblement attirée vers ce carré de lumière qui, pareil au rais de soleil dont parle le poète, confère la gloire à tous ceux qui y peuvent tenir un instant.
Et le lendemain, en effet, une étoile nouvelle, timide encore, mais si fraîche, si candidement lumineuse, se détachant avec tant d'originale netteté sur les satellites et les nébuleuses, brillait au ciel du cinéma français.
Danielle Darrieux était entrée dans la gloire.
Vous l'avez toutes suivie dans ses créations où elle affirma l'originalité d'un talent riche en nuance et gardant dans ses manifestations cette mesure qui est toute la noblesse du talent de chez nous.
Danielle Darrieux, qui vient de se marier avec Henri Decoin, auteur dramatique, tourne en ce moment Mademoiselle Mozart et Mayerling, avec Charles Boyer.
Et l'existence - qui n'en est encore qu'à son prologue - de Danielle Darrieux, nous fait regretter que notre école des Beaux-Arts d'Alger n'ait pas une classe de cinéma. Bien de vibrantes Algériennes, qui vivent déjà chez nous dans des " extérieurs " de romans et d'aventures, pourraient venir y mesurer la force de leur aile.
Je sais bien qu'il y aurait des déceptions et que, parmi beaucoup d'appelées, la Critique, la foule et les auteurs sacreraient peu d'élues.
Mais la difficulté de la tâche nous donne-t-elle le droit de ne pas l'entreprendre?
Les chercheurs d'or hésitent-ils à faire passer des rivières entières dans leur " berceau " de fer et de toile, dans le seul espoir de recueillir quelques paillettes ?
ALFRED KLEPPING.
Document envoyé par M. Georges Jory
Sources :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56559845.hl.r=darrieux.f36.pagination.langFR.textePage
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L'ENFER !
Envoyé Par Thérése-Marie
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Un type meurt sur la frontière franco-allemande.
Quand il arrive au ciel pour le jugement dernier, Saint Pierre lui dit:
- Bon ! votre vie sur terre, pas terrible, quelques adultères, pas souvent à la messe, des blasphèmes, etc etc.... Je ne peux pas vous faire entrer au paradis, mais comme vous n'avez rien commis de grave, et que vous êtes mort sur la frontière, je vous laisse le choix entre l'enfer allemand et l'enfer français.
- Mais Saint Pierre, je ne connais ni l'un ni l'autre, pourriez vous m'en dire un peu plus, SVP ?
-Eh bien, dans l'enfer allemand, on vous met dans une grande marmite pleine de purin, des petits gnomes très très vilains qui sentent mauvais mettent des bûches sous la marmite, un dragon vient allumer les bûches , et vous cuisez toute la journée. Et c'est tous les jours pareil !
- Et l'enfer français ?
- Et bien, dans l'enfer français, on vous met dans une grande marmite pleine de purin, des petits gnomes très très vilains qui sentent mauvais mettent des bûches sous la marmite, un dragon vient allumer les bûches, et vous cuisez toute la journée.Et c'est tous les jours pareil ! Mais, si vous voulez un bon conseil, je serais vous, je choisirais l'enfer français !!!
- Mais, Saint Pierre c'est exactement la même chose !!!!!!!
- Non non, pas du tout !... Car, dans l'enfer français,
un jour les gnomes sont en grève,
un jour on n'a pas livré les bûches,
un jour le dragon est en RTT,
un jour il est en congé maladie
un jour il ne trouve plus la marmite,
un jour on n'a pas commandé le purin .
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MŒURS ET COUTUMES DE L'ALGÉRIE
1853 Par LE GÉNÉRAL DAUMAS N° 18
Conseiller d'Etat, Directeur des affaires de l'Algérie
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TELL - KABYLIE-SAHARA
AVANT-PROPOS.
Appeler l'intérêt sur un pays auquel la France est attachée par les plus nobles et les plus précieux liens, faire connaître un peuple dont les moeurs disparaîtront, peut-être un jour, au milieu des nôtres, mais en laissant, dans notre mémoire, de vifs et profonds souvenirs, voilà ce que j'ai entrepris. Je ne me flatte pas d'avoir les forces nécessaires pour accomplir cette tâche, à laquelle ne suffirait pas d'ailleurs la vie d'un seul homme; je souhaite seulement que des documents réunis, avec peine, par des interrogations patientes, dans le courant d'une existence active et laborieuse, deviennent, entre des mains plus habiles que les miennes, les matériaux d'un édifice élevé à notre grandeur nationale.
Général E. Daumas
LE SAHARA.
V.
Une tribu de marabouts.
Il existe dans le Sahara quelques tribus de marabouts, en regard des tribus de Djouad qui foraient la majorité. L'origine et l'illustration de celles-ci sont guerrières. C'est à leur origine religieuse que ces tribus de marabouts doivent le respect et la vénération dont elles sont entourées.
Au nombre, je pourrais dire en tête, des plus importantes, figure la tribu des Ouled-Sidi-Chïkh.
Elle se divise en Sidi Chïkh Cheraga (de l'est), et Sidi-Chïkh-Garaba (de l'ouest).
Les Ouled-Sidi-Chïkh-Cheraga campent ordinairement sur le territoire compris entre l'Oued-Zergoun au sud, Stiten au nord, Bou Aâlam à l'est, et les Arbaouat à l'ouest.
Les Ouled-Sidi-Chïkh-Garaba campent sur le pays compris entre El Biod-Ghrarbi à l'est, Figuig à l'ouest, et leurs montagnes au nord.
Leurs tentes, de couleur noire, sont toutes surmontées de bouquets de plumes d'autruche plus ou moins gros, selon la qualité du personnage ou la fortune de la famille ; comme presque tous sont marabouts, c'est là, disent-ils, un signe qui les distingue des tribus vulgaires.
Ils sont riches en chameaux, chevaux, moutons, chèvres et ânes; mais ils n'ont point de boeufs et très peu de mulets.
Les soins à donner aux troupeaux ne les occupent point exclusivement; ils sont, par goût et par instinct, comme tous les Arabes, trafiquants autant que pasteurs; on les compte en grand nombre sur les marchés des Beni-Mzab, de Metlili, de Figuig et de Timimoun dans le pays de Gourara.
Ils y portent :
Du beurre. Du fromage. Du blé. De l'orge. Des laines. Des moutons. Des tapis nommés frach. Des nattes. Des cordes en palmier. Des chapeaux de palmier ornés de plumes d'autruche.
Ils rapportent des Beni-Mzab :
Des fusils. Des pistolets. De la poudre. Des balles. Des pierres à fusil. Des burnous. Des haïks d'hommes et de femmes. Des chemises en laine. Des chaussures - brodequins. Des babouches de femmes. Du calicot. Des épiceries. De la coutellerie. Du fer. De l'acier. Des fers à cheval. Des feutres pour selles. Des laines filées et teintes. Des teintures.
Ils rapportent de Timimoun<
Des esclaves nègres et négresses. Des dattes. Des vêtements de laine. Du henné. De la poudre. Du tabac. Des peaux tannées appelées filali. Des saies (pièces d'étoffes noires venues du pays des nègres; elles n'ont que six pouces de largeur. Les femmes en font des ornements de tête).
Ils rapportent de Figuig les mêmes objets et beaucoup d'autres qui sont tirés de Fàs (Fez). Les chefs des deus grandes fractions de la tribu sont chérifs, et prétendent descendre du premier khalifah du Prophète, Sidi-Bou-Beker-Seddik, pour qui Mahomet aurait fait ce voeu :
Allah' idja'l rekoubek sas,
Que Dieu fasse que ta famille monte toujours à cheval,
Ou rekebtek tenebas,
Que ton genou soit toujours baisé,
Ou derritek tetdcha,
Que ta postérité mange,
Ou derriti tebka belach !
Quand la mienne aura faim !
Malgré cette communauté d'origine, chefs et fractions ont été souvent divisés; mais depuis quelques années ils vivent en bonne intelligence.
La sainteté des Sidi-Chïkh et l'influence de leur qualité vénérée, non seulement n'est point contestée, mais, de temps immémorial, elle leur a attaché un grand nombre de tribus qui se sont déclarées leurs kheddam (serviteurs), et qui se font orgueil de ce titre. Dans le principe, disent les Arabes, quand Dieu eut consacré un homme par un prodige, cet homme fut reconnu marabout. Les tribus voisines d'abord, puis, et à mesure que sa réputation s'étendait, des tribus plus éloignées vinrent le visiter et demander des miracles à ses prières, de la pluie ou du beau temps, des récoltes abondantes, des voeux pour les nouveau-nés, pour les femmes stériles, pour les troupeaux malades. C'est l'histoire de tous nos saints, avec la différence que, dans la religion mahométane, le titre de marabout est héréditaire, et, avec lui, la puissance de cette aristocratie théocratique qui, de père en fils, rayonne sur un plus grand nombre d'individus.
Les kheddam (serviteurs) d'un marabout sont obligés d'aller, une fois l'an, visiter le tombeau où repose le premier saint, chef de sa famille, et chaque pèlerin, suivant sa fortune, y laisse des cadeaux appelés zïara.
A son tour, le marabout, ou quelqu'un de ses parents, va visiter les kheddam, et ce voyage est encore l'occasion d'une ample récolte de présents qui, cette fois, prend le nom de el ouada.
Le marabout impose à ses fidèles telle ou telle prière, ordinairement très courte, de quelques mots seulement, mais qui doit être dite, à heure indiquée, souvent des milliers de fois, que l’on compte sur un chapelet ; cette action s'appelle deker. Cependant une condition exigée, c'est de changer souvent de prière et de laisser chaque fois, au patron, qui seul peut vous en indiquer une nouvelle, une petite redevance.
A l'aide de ces obligations pieuses, les marabouts se sont si bien emparés de l'esprit des populations que beaucoup d'entre eux, comme certains abbés de notre moyen âge, se sont faits, dans un cercle plus ou moins étendu, plus puissants que leur sultan lui-même, qui les tient toujours en grande vénération, forcé qu'il est de se ménager leur intervention; il ne l'obtient souvent qu'au prix d'une riche ouada. Ils sont d'ailleurs affranchis de toute espèce de corvées et d'impôts.
Tous les Arabes ont un grand respect pour les Ouled-Sidi-Chïkh; mais leurs kheddam particulièrement dévoués de père en fils sont :
Les Châmba. Les gens de Ouargla. El Mekhadma. Hhal-el-Touat. El Arouat'-Ksal. La moitié des A'rba. Ouled-Khelif. Ouled-Chaïb. Zenakha. Djebel-Amour. La moitié des Harar. Hhal-Engad. El Hassessena. Beni-Aûmer. Hamïan. Doui-Menia. Djafra. Ouled-Aïad.
On comprend facilement qu'avec autant de moyens d'action, cette tribu, qui par elle-mème est peu de chose, soit cependant une véritable puissance. Kheddam et tribu ne reconnaissent, en réalité, de seigneur et maître que leur marabout, et lui obéissent passivement; le sultan ne vient qu'après; «car, disent-ils, si un sultan peut nous faire du mal, Dieu peut nous en faire bien davantage. »
Une révolte s'élève-t-elle dans la tribu? Il suffit au marabout d'une menace : « Que Dieu vous maudisse ! Qu’il rende vos femmes, ou vos palmiers, ou vos chamelles stériles ! » Pour que tous viennent lui baiser les pieds. II en est de même pour les kheddam : « Ainsi, nous disait un Arabe, les Ouled-Sidi-Chïkh n'auraient que vingt chevaux, ils ordonneraient à la puissante tribu des Hamïan, qui en a deux mille : elle obéirait dans la crainte de Dieu.
Il faut l'avouer, au reste, les Ouled-Sidi-Chïkh semblent n'user de ce pouvoir que pour faire le bien; généreux et hospitaliers, si leurs zaouïas s'emplissent par les riches, qui y apportent :
Des moutons. Des dattes. Du blé. Des fruits. Du beurre. Du benjoin. Des bougies. Des vêtements de laine. De l'argent. Et même des chameaux.
Elles se vident par les pauvres, que les besoins d'un voyage ou qu'une intention pieuse y appellent en foule tous les ans, et par les malades, les estropiés et les aveugles qui viennent y demander un miracle.
Apprennent-ils qu'il y a parmi leurs fidèles contestation de tribu à tribu, de fraction à fraction, de douar à douar, et mémé d'individu à individu? Ils se portent intermédiaires, et s'ils ne peuvent, de chez eux, arranger la querelle, si elle s'envenime, un des chefs monte à cheval et se rend sur les lieux; là, assis sous la tente la plus vaste ou en plein air, entouré d'une foule attentive, il se fait amener les parties adverses qui ne manquent jamais à l'appel, et, par tous les moyens, cherche à les concilier.
« J'ai assisté à une de ces scènes, nous racontait un Arabe, et voici ce qui se passa : Après s'être fait expliquer l'affaire, après avoir entendu les témoins pour et contre, le marabout dit à tous : « Que Dieu maudisse le démon, car le prophète a dit : La dispute est comme le feu ; que Dieu maudisse celui qui l'a allumé, et qu'il accorde sa miséricorde à celui qui l'éteint ! Le bien vaut mieux que le mal ; du bien sortent le repos, l'agriculture, la joie, le bonheur, les enfants ; du mal, la douleur, les pleurs, les cris, la famine, la destruction, les perturbations, l'insomnie. Dieu m'a envoyé pour apaiser les querelles ; je n'y ai aucun intérêt personnel, je ne vous demande pas d'argent ; ce que je fais, c'est pour l'amour de Dieu ; vous dites, n'est-ce pas, que vous êtes mes serviteurs, et que vos ancêtres étaient les serviteurs de mes ancêtres ; eh bien ! Accordez-vous pour l'amour de Dieu, de vos ancêtres et des miens.
« Il exposa alors ce qui était juste, et il reprit : Je vous ai montré le bien et le mal : choisissez. Si vous voulez le bien, il est là ; si vous voulez le mal, vous vous en repentirez. »
Les parties intéressées s'étant entendues pour faire la paix, il prit un chapelet qui lui vient de son père, le passa au cou de chacun des assistants, et appela sur eux, sur leurs biens et sur leurs familles, les bénédictions de Dieu, par des prières appelées fatha. Tous les assistants levèrent alors les bras à hauteur de la poitrine, et ouvrirent leurs mains comme il est prescrit par le rite musulman, c'est-à-dire la paume tournée vers le ciel, et le marabout continua :
« 0 mes enfants, je me suis réjoui de vous, en vous voyant m'appeler au milieu de vous : que Dieu vous en sache gré, que Dieu vous protège; que Dieu vous accorde ce que vous pouvez désirer dans vos familles, et qu'il vous rende comme l'abeille ; en l'air, elle dit : 0 le protecteur! Et sur la terre : 0 le généreux!...»
Toute l'assemblée avait les larmes aux yeux, et tous ayant demandé au saint marabout sa bénédiction, il leur dit :
« Celui qui a quelque chose dans le coeur,
Que Dieu l'accomplisse !
Qu'il l'accomplisse promptement !
Par la bénédiction de la Mecque et de tout ce qui l'entoure;
Par celle de lalla (dame) Fatima et de son père;
Par celle de ce lieu et de celui à qui il appartient. »
« Les pleurs et les cris redoublant, il imposa silence de la main, et il termina par cette bénédiction :
« Que Dieu vous fasse téter à tous le téton de sa miséricorde ! »
Grâce à l'intervention paternelle de leurs chefs, il est rare qu'une contestation entre Kheddam des Sidi-Chïkh dégénère en querelle, et plus rare surtout qu'ils en viennent aux mains. Un moment cependant la tribu même a été fortement divisée,
l'un de ses chefs, Sidi-Hamza, étant au plus mal avec Abd-el-Kader, depuis la mort du Chïkh des Engad, El Gomari, qui était son ami, et que l'émir avait fait tuer, tandis que Ben-Taïeb, au contraire, avait non seulement reconnu l'émir, mais lui payait des contributions. Ces symptômes de mauvaise intelligence se sont peu à peu effacés, à mesure que la puissance d'Abd-el-Kader s'est elle‑même annihilée.
Les Ouled-Sidi-Chïkh ne s'allient qu'entre eux ; ces nobles de la tente croiraient déroger en donnant leurs filles à des étrangers, à moins qu'ils ne soient, eux aussi, marabouts de grande famille, et telle est la vénération générale dont ils sont entourés, même en dehors de leur territoire, que l'empereur du Maroc, Moula-Abd-er-Rahman, a épousé récemment la soeur de Sidi-Hamza, nommée El Iakout (le rubis). Il ne faudrait pas en inférer, toutefois, que ce mariage unisse les deux beaux-frères par des liens très étroits ; les sultans du Gharb (de l'ouest) sont dans l'habitude de se laisser aller facilement, et sans pour cela s'engager en rien, à contracter de ces mariages avec les filles des familles distinguées, que l'opinion publique cite pour leur beauté. Ils les gardent plus ou moins longtemps : un mois, six mois, un an ; le divorce les en débarrasse quand le caprice est passé, mais sans que la femme y perde en considération; c'est, au contraire, un honneur très envié des plus nobles que celui de la réépouser au sortir du harem impérial.
Les Ouled-Sidi-Chïkh sont renommés pour leur beauté ; ils ont d'ailleurs tous les goûts de nos anciens gentilshommes. Ils aiment les beaux vêtements, les armes riches, les brillants équipages de guerre et de chasse ; ils ont des meutes de lévriers, qu'ils font porter sur des chameaux jusqu'au lieu désigné, où ils courent l'autruche et la gazelle. Dans le désert même, ils passent pour d'excellents cavaliers, et leurs chevaux sont superbes. Ceci ne s'entend évidemment que des plus riches ; mais tourie la tribu se distingue néanmoins par ses allures aristocratiques.
Leur nourriture habituelle est le lait, les dattes, le kouscouçou, la chair de mouton et celle de chameau.
On assure qu'au printemps ils abreuvent leurs chevaux avec le lait de leurs chamelles, et que ce régime les engraisse d'une manière étonnante, mais de l'encolure et de la croupe seulement, sans leur donner de ventre. Nous avons entendu dire la même chose de plusieurs autres tribus du désert.
A SUIVRE
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Avez-vous la foi ?
Envoyé Par Annie
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> Un Allemand, un Anglais et un Français mangent dans un restaurant. Le type qui mange en face d'eux ressemble terriblement à Jésus
A la fin, l'Allemand veut en avoir le cœur net, il se lève et va voir le type: - Vous savez que vous ressemblez beaucoup à Jésus ?
- Je suis Jésus.
- Ah quelle chance ! Je suis un fervent catholique et justement, j'ai un terrible mal de tête…Jésus tend la main, touche son front et guérit son mal de tête.L'Allemand revient à sa table et raconte ce qui s'est passé.
L'Anglais se lève à son tour et va voir Jésus : - Je crois en vous et j'ai un horrible mal au bras.Jésus tend la main, touche son bras et guérit son rhumatisme.L'Anglais revient à sa table et raconte ce qui s'est passé.
Le Français ne bouge pas.
Au bout d'un moment, Jésus se pose des questions. Il se lève à son tour et s'approche. - Et vous, dit-il au Français, vous n'avez mal nulle part ?
- Surtout, ne me touchez pas ! Je suis en arrêt maladie.......
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" L'AFRIQUE DU NORD MUSULMANE"
2ème Edition 1954/1955
Envoyé par M. Daniel Dardenne N°14
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Textes et Annexes de A. BENSIMON et F. CHARAVEL : Instituteurs à Alger.
Documentation photographiques et réalisation Technique de
H. BENAIM - G. DOMECQ - E. DURIN - R. PERIAND - Instituteur à Alger.
Illustration et Cartes de F GIROUIN - Instituteur à Alger.
Réalisé sous l'égide de la Section d'Alger du Syndicat National des Instituteurs.
COMMENTAIRES DES GRAVURES
18 - SOUQ DES ETOFFES ET DES PARFUMS A TUNIS -
" Le soûq est la rue des marchands oui ont da ns la ville même leur demeure. On sait que chacune de ces rues, généralement abritée et bordée de boutiques semblables entre elles, est consacrée à la vente d'une seule denrée, affectée à un seul genre de commerce.
Tunis conserve encore un ou deux soûqs voisins de la Grande Mosquée, qui datent du XIIIe ou XIVe siècle, notamment le soûq des parfumeurs et le soûq des étoffes. La tradition l'affirme et un détail le prouve. A l'entrée du soûq des étoffes, deux chapiteaux permettent de fixer la fondation à l'époque hafside et attestent une fois de plus, l'influence maghrébine et andalouse en Ifrîqiya. Ce soûq est formé de trois allées ; une allée centrale large, bordée de deux allées latérales très étroites, sur lesquelles s'ouvrent les boutiques. Toutes trois sont couvertes de berceaux longitudinaux en briques, portés par deux rangées de colonnes de pierre. Des trous quadrangulaires, perçant la voûte du centre, éclairent la rue d'un jour discret. Les boutiques sont couvertes de berceaux perpendiculaires à ceux de la rue et éclairés de même ". (G. MARÇAIS). Manuel d'Art Musulman. - PICARD Editeur.
19 - UN PALAIS : L'ALHAMBRA DE GRENADE
Si rien ne nous est parvenu des Palais almoravides et almohades, du moins l'Alhambra, quoique postérieur, nous donne-t-il une idée exacte de ce qu'était un palais musulman au XIV' siècle. Il nous aide aussi à imaginer l'opulence des Naçrides et " cristallise toute l'élégance et toute la fantaisie de l'Art musulman d'Espagne ".
" A la fois forteresse et résidence des Sultans, l'Alhambra était en fait une sorte de ville royale dominant, sur un plateau allongé, la cité populaire qui s'étendait en demi-cercle à ses pieds. On y trouvait des casernements, des magasins et des citernes permettant d'y soutenir un siège, des salles d'apparat, les chambres d'un harem, des bains, des oratoires et une grande mosquée. Le peu qui nous en reste, atteste que nul plan préétabli ne dirigea la croissance de cet ensemble.
Son nom d'EL HAMRA, la Rouge, qui semble bien exprimer la couleur de ses remparts de pisé, apparaît incidemment à la fin du IXe siècle, sous les Omeiyades ". (G. MARÇAIS).
On retrouve dans ce palais, la disposition habituelle des demeures méditerranéennes, où les pièces sont distribuées autour d'une cour centrale ou patio. Il en existe plusieurs dans l'Alhambra. " La patio fameux appelé Cour des Lions, doit son nom aux douze lions de marbre qui ornent la buse de la fontaine centrale. Il comportait, semble-t-1, quatre parterres séparés entre eux par le pavage d'allées en croix, quatre bassins de verdure, comme ceux dont le Maroc a gardé la charmante tradition. Des galeries l'encadrent de toutes parts. Leurs arcs en plein cintre finement dentelés sur les bords et surmontés de tympans ajourés reposent sur de sveltes colonnes... Les eaux vives ajoutaient, leur fraîcheur aux séductions des parterres et du décor des arceaux. Elles étaient partout ici, elles jaillissaient sous les portiques et sous les pavillons... couraient dans les canaux qui entaillent les pavages de marbrer sortaient de la gueule des lions et ruisselaient des deux vasques étagées. " (G. MARÇAIS). Manuel d'Art Musulman. - PICARD Editeur.
Remarques :
1) Sur la gravure, on aperçoit, entre les colonnes, les lions de marbre de la fontaine.
2) Sur la droite de la gravure, on remarquera dans un cartouche vertical la devise fameuse des. Naçrides de Grenade " Lâ ghâlib illa 'llah ". (Il n'y a de vainqueur que Dieu).
Cette formule tonnait encore de nos jours, une curieuse fortune architecturale. On la retrouve sur les plâtres modernes de style hispano-mauresque qui ornent certain édifice public comme la Grande Poste d'Alger et même sur les tympans des kiosques à journaux.
20 - UN ART D'INSPIRATION RELIGIEUSE17
Le Prophète a dit : " Les anges n'entreront pas dans une maison où il y a des images... Celui qui a fait une image sera mis en demeure, au jour de la Résurrection, de lui insuffler une âme, mais il ne pourra le faire... En ce jour, les hommes qui éprouveront de la part d'Allah les plus terribles châtiments, seront les peintres... Gardez-vous donc de représenter soit le Seigneur, soit l'homme et ne peignez que des arbres, des fleurs et des objets inanimés ".
Cet impératif religieux a orienté l'art musulman vers la décoration des surfaces au moyen de l'arabesque dont les lignes apparemment capricieuses " sont régies par un sens géométrique subtil ". (RICARD).
Les principales sources d'inspiration de l'arabesque sont :
- La flore (feuille, palmettes, pommes de pin) ;
- la polygonie aux variations infinies (étoiles octogonales, entrelacs polygonaux, etc...) ;
- l'épigraphie qui utilise différents types d'écriture : coufique, rigide d'aspect carré ; cursive, aux formes arrondies.
" En ce qui concerne plus particulièrement le décor floral tel que l'art musulman l'a conçu, il se décompose en deux éléments qui se sont développés presque indépendamment l'un de l'autre : d'une part un élément végétal proprement dit, la feuille, à laquelle il conviendra de joindre le fruit et très rarement la fleur et, d'autre part, le support de la feuille, la tige, le rameau qui fait plutôt figure d'élément géométrique.
" Ces involutions de la tige constitueront l'élément essentiel de l'entrelacs qui doit être capable à lui seul de garnir le panneau et dont la feuille n'a plus qu'à remplir les intervalles ". (G. MARÇAIS). Manuel d'Art Musulman - PICARD Editeur.
" Mais prenons-y garde, ce n'est peut-être pas là simple virtuosité linéaire. La ligne a sans doute, sa symbolique. N'engendre-t-elle pas un polygone et ce polygone ne se résout-il pas en une nouvelle ligne ? Ce thème ne serait-il pas celui de la pensée qui, venue de Dieu, revient toujours se fondre en lui ? l'épure géométrique musulmane est plus que décorative, elle est métaphysique. Elle donne par l'indéfini de ses combinaisons, la sensation de l'infini. Elle exprime aussi les chaudes torpeurs de l'Orient. L'ornement arabe fuit dans les courbes d'une rosace, comme dans les méandres d'un songe. Il supprime le relief, le détail trop fouillé qui brutalement dissiperait le rêve ".
(BERQUE. L'Algérie, terre d'Art et d'Histoire).
21 - L'ART DE SEDRATA - ELEMENTS DU DECOR
Les ruines de Sedrâta près d'OUARGLA ont encore été fouillées en 1953 par Mlle VAN BERCHEM. Elles sont enfouies sous plusieurs mètres de sable accumulé par le vent. Une photo de vestiges le plus souvent fort abîmés par les siècles n'aurait présenté que peu d'intérêt pour nos élèves. Au contraire la restitution due à M. le Professeur MARÇAIS est directement utilisable et présente l'avantage de grouper les principaux thèmes du décor.
Le décor de SEDRATA est entièrement sculpté dans le plâtre... Ce qui le caractérise et contribue à lui donner un aspect très primitif, c'est l'absence complète de toute mouluration, et presque de tout modelé. La forme semble silhouettée dans le plâtre encore frais avec un outil de bois ou de fer. Les bords du relief, sont perpendiculaires au fond, ou largement taillés en biseau, comme le sont les ornements géométriques sculptés au couteau dans le bois par les montagnards kabyles. Cette facture et le genre de décor qu'elle traduit ont été signalés à maintes reprises dans les basiliques africaines des IVème et Vème siècles, à Tigzirt comme à Tébessa ou dans la région de l'Aurès. Plusieurs de nos décors de Sedrâta se rattachent visiblement à cette ornementation chrétienne...
" La géométrie est des plus simples presque toutes les figures dérivent du carré ou du cercle. Les rosaces y jouent un rôle important ; elles sont inscrites dans des circonférences, qu'entoure parfois un feston, ou dans des formes quadrilobées. L'artiste ne sait qu'entrelacer ces cercles par deux ou par quatre, ou les unir au moyen de galon.
" L'ornement floral, le plus employé, ignore l'entrelacs, Le rinceau véritable est lui-même absent de ce décor. La tige, quand elle se développe, n'affecte que la forme ondulée ; les feuilles se logent dans les courbes concaves. L'élément proprement végétal est pauvre. Une grande fleur, une sorte de marguerite, s'étale en rosace... Outre cette fleur... deux feuilles constituent le fond du répertoire végétal : une feuille asymétrique à deux lobes et une feuille symétrique à trois lobes (voir bandes verticales à droite et à gauche de la gravure). L'un1e et l'autre se rattachent à la tige par un pédoncule large perforé d'un trou circulaire. Il semble bien que ce soit encore la feuille de vigne étalée ou pliée qui ait engendré ces deux silhouettes. Le pédoncule perforé représente le lobe inférieur qui, après s'être recourbé en crochet, s'est refermé en anneau. Les décors coptes sur bois et sur pierre... nous donnent la clef de cette transformation..."
Et en conclusion, l'auteur examine le rapprochement qui a été fait entre l'art romain et l'art de Sedrâta à propos duquel on a noté " la ressemblance frappante qu'offrent ces sculptures berbères, oubliées au Sahara depuis neuf siècles, avec les fragments de même époque conservés à Brescia, à Milan, à Vérone, ou ceux qui proviennent de Saint-Samson-sur-Risle et de l'abbaye de Jouarre " et énumère les influences diverses desquelles " un art nouveau est né, art composite et déjà fortement individualisé, art à demi barbare et qui cependant s'impose à notre admiration ".
(G. MARÇAIS - Manuel d'Art Musulman - P. 88-94 ; Edit. PICARD, PARIS)
22 - MIHRAB DE SIDI BEL-HASAN
DETAIL DE L'ORNEMENTATION
C'est dans la décoration des monuments plutôt que dans l'architecture elle-même que l'art de 1'Islâm a donné toute sa mesure. Pour le décor des grands pans de murs, des vastes surfaces, il a employé toutes les ressources des figures géométriques, de la flore et de l'épigraphie.
Un magnifique exemple en est fourni par le Mihrâb de Sidi bel-Hasan (Tlemcen), chef-d'oeuvre de l'art musulman d'occident au XIIIème siècle, dont la gravure N° 17 donne une vue d'ensemble tandis que la gravure N° 22 révèle le détail de l'ornementation d'après un dessin de M. G. MARÇAIS. (1)
Cette gravure, qui doit être regardée dans le sens de la largeur, montre la retombée droite de l'arc brisé du mihrâb avec la base des bandes rectangulaires qui l'encadrent.
On notera l'importance de l'épigraphie dans la décoration : deux inscriptions en caractères coufiques bordent le cintre intérieurement et extérieurement. Les claveaux (segments qui rayonnent autour de l'arc) portent, de deux en deux, le mot ALLAH comme fondu dans l'arabesque du décor. La grande bande d'encadrement, et les bandes plus étroites qui la bordent, portent également des inscriptions qui sont des citations coraniques. Enfin les cartouches du panneau carré (en bas à droite) à entrelacs rectilignes sont remplis par la profession de foi musulmane. C'est qu'en effet :
" Jamais un art ne fit un usage aussi systématique de l'épigraphie décorative ; et de cela encore, le dogme musulman peut rendre compte. Un de ses articles affirme la véracité et l'excellence des livres révélés et, plus que tout autre, du Coran, le dernier en date et désormais le seul nécessaire aux hommes. Le Coran est la parole de Dieu. Le texte a par lui-même une vertu propitiatoire. On ne saurait trop en multiplier les copies. Non seulement des versets, des chapitres entiers seront reproduits sur les murs des mosquées, mais on décorera de formules coraniques l'intérieur du palais ou des demeures privées et les objets dont on se sert ".
(G. MARÇAIS : L'Art de l'Islâm - Larousse Edit)
Quant à l'élément floral, il présente " des palmes à un ou deux lobes allongés et inégaux. Le limbe est lisse ou meublé de décors plus ou moins conventionnels... On remarquera le rôle que jouent les coquilles et les boutons à côtes en spirales, seuls reliefs vigoureux de cette ornementation méplate (voir gravure 17). On notera également la distribution des défoncements profonds alternant avec les champs d'un léger retrait. La couleur augmentait l'effet obtenu ; elle était, semble-t-il, rouge pour les premiers et bleue pour les seconds ". (G. MARÇAIS).
Avec son encadrement délicat et somptueux le mihrâb de Sidi Bel-Hasan, constitue un de ces ensembles " d'une élégance de composition, d'un équilibre de proportions, qui leur contèrent la valeur d'oeuvres classiques ".
1) G. MARÇAIS - Album de pierre, plâtre et bois sculpté - Alger - Jourdan 1916.
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A SUIVRE
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PHOTOS DE VIE BÔNOISE
Envoyé par Mme. Nicole Marquet
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CONTE EN SABIR
Par Kaddour
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LI CORDONNIER ET LI VIO JOUIF
(FABLE IMITÉE DE LA FONTAINE)
On
cordonnier qui son fir di sabatte(1)Tojor il y content.
Y n'en a pas l'arjan, y mangi di patate
Ça fi rian mon zenfant,
Tojor y son chanti, li matin comme la noui
Jami ti po trover, blouss content comme loui.
Son
voisan, on gros jouif, ça
ni pas la mime soge
Yana l'arjan bocoup.
Bon galitte, on gros ventre afic
la figoure roge.
Ç'oui
là jami y dor ;
Y son pensi tojor, son commirce, son l'arjan,
Son billets y son zor ;
Jami y rigoli ; y son trembli to l'tan ;
Y pensi cit bian bon,
Si ji po fir achti, comme j'achite di moton,
Por do sous di dormir ;
Ji chitra por
cent sous, por ji fir mon blisir.
On jor y fir monti,
Li cordonnier chi Joui, y Joui dit : « Si DjeIloul »
Ti mi fir li calcoul,
Combien ti gagne por jor. - << Combien ji gagne, sidi.
Ji Si ppas, akarbi (2)
On jor ji gagne bocoup, douman ji gani rian,
Jami ji soui compté, tojor ji soui contan.
>Ji sarche por mangi, li soir comme li matin.
Y tojor mon zami, j'en a gani mon pain. !
Ji dimandi por toi, combian ti gani por jor!
Jami ji po compter, ji jour paror d'honor
On joryana beaucoup !
Ma to si : li mon Diou, y son fir di gran fite,
Tojor li marabout,
Y barli por nos ôtres (vos ites israélite,
Toi ti couni pas),
Qui faut fir ramadan, bor fir contan Allah.
Yana l'Aïd Kébir (3),
Aussi l'Aïd Srir (4)
Alors ji fir finian, ji brornine la route
Apri quand son fini, j'en a tojor cascroute.
Li
Jouif y son bansi, cit homme cit on coillon,
Tian qui dit : mon zami,
Ji voir por vot
fiigoure, qui vos ites bon garçon.
Ji ti conni ji crois,
Dijà plouss di dix ans ;
ji ti fir
aujourd'hui,
Riche comme one Soltan ;
Prend cit sac de douros, y borte lo chi toi,
Por fir quisqui
ti veux, li jor qui ti bisouan.
Li cordonnier son fou
Y pensibor avoir cit sac plein de douros
Bisoan ramasser tot l'arjan di motchou (5)
Pendant plous di cent zans.
Y corre à son mison, y mit lo dans l'silos
Li sac afic l'arjan
Quand y va porcouchi, y ni po pas dormir
A son douro y pense.
Son fini bor chanti, son fini bor blisir ;
Matenan y >vo pas, por fir dipense,
Y son por fic la noui, qui di volor y vianne
Si li jor il acoute qui son crier son chianne
Tot souite y pensi, qui prend son douro,
On jor qui trembli trop,
Y pensi bor son tite : « Cit Jouif y ma touiller.»
Y va dans li silos, y prend son l'arjan
Y marche chi cit Jouif, y va loui rapporter :
Tian, voilà vot douro
Ispice di finian
Ti lisse lo moi tranquil, bogre di saligo.
Rendi moi mon dormir,
Y lisse moi qui ji chante, jusqu'à c'qui ji morir.
MORALE
Pas bisoan di douro, bor qui ti soui contan,
Millor bian mangi, bian boire, bian dormir.
Quisqui fir bor cit Jouif, son zor, son l'arjan ?
Rian du tout mon zami, quand mime y son soffrir.
Millor ji soui misquine (6)
y ji soui bian contan
Qui si j'en a l'arjan y ji m'embite to l'tan.
1) Souliers
2) Parole d'honneur.
3) Grande fête.
4) Petite fête.
5) Mozabite.
6) pauvre.
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BULLETIN N°8
DE L'ACADÉMIE D'HIPPONE
SOCIÉTÉ DE RECHERCHES SCIENTIFIQUES
ET D'ACCLIMATATION
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ITINERAIRE DE RUSICADA A HIPPONE
Par M. HENRI TAUXIER
Sous-lieutenant au 74e régiment d'infanterie de ligne.
V. - Des rapports d'Hippone avec les rois indigènes.
Hippone s'éleva probablement de la même façon que Carthage : quelques commerçants traitèrent d'abord avec les indigènes du droit de fonder un comptoir sur la côte. Ce comptoir s'augmenta et se fortifia peu à peu ; les tribus s'émurent et réclamèrent ; on n'en tint pas compte; elles prirent les armes, on les battit et on leur imposa un nouveau traité ; une ville se fonda, et petit à petit s'empara d'une zone de champs autour de ses murs. Les indigènes la lui disputèrent d'abord et finirent de guerre lasse par la lui abandonner, pour profiter des avantages commerciaux qu'ils retiraient du voisinage d'une ville.
Quant à ces indigènes eux-mêmes, on ne sait trop quel était leur état politique; peut-être comptaient-ils parmi les vassaux semi indépendants des rois de Cirta ; peut-être étaient-ils indépendants tout à fait et comptaient-ils parmi ces alliés des Carthaginois qui n'étaient soumis ni à Syphax, ni à Massinissa. A voir leur indifférence quand ce dernier traversa leur pays pour visiter Lælius, on croirait volontiers qu'ils ne se souciaient ni de Syphax, ni de Carthage, et qu'ils prétendaient rester neutres dans la lutte de ceux-ci avec les Romains. Si pourtant on voulait les compter parmi les vassaux d'un roi quelconque, il est sûr que ce n'est pas de Massinissa qu'ils relevaient, puisque celui-ci, parlant à Lælius dans le pays même, avouait qu'il était chassé de son royaume, ce qui montre bien que les environs d'Hippone n'en faisaient pas partie : ce royaume était, comme je l'ai dit plus haut, au sud de Carthage.
A la suite de la deuxième guerre punique, Massinissa recouvra ses Etats et obtint de plus Cirta et les autres villes et campagnes du royaume de Syphax, dont les Romains s'étaient emparées pendant la lutte. " Cette phrase montre qu'Hippone, ville phénicienne, et non pas ville du royaume de Syphax, resta indépendante du roi massylien : celui-ci n'eut d'autorité que sur les tribus environnantes. On ne sait trop quelles furent les nouvelles limites des Massyliens et des Massésyliens. Polybe, il est vrai, dans le récit que nous avons démêlé plus haut, les plaçait à un cap; mais on ne sait quel est ce cap, dont Strabon a omis de nous donner le nom. Du reste, ces limites semblent avoir varié bientôt.
A la fin de la troisième guerre punique, après la ruine de Carthage, des commissaires envoyés de Rome pour l'organisation du pays vaincu, décrétèrent :
1° que Carthage serait rasée complètement ;
2° que les villes qui avaient combattu jusqu'au bout avec les ennemis seraient détruites;
3° que celles qui avaient porté secours aux Romains auraient chacune une part du pays conquis, et qu'avant tout Utique aurait tout le canton qui s'étendait jusqu'à Carthage d'une part et jusqu'à Hippone de l'autre;
4° quant au reste, qu'il leur serait imposé un tribut, tant sur les corps que sur les biens , tant sur les hommes que sur les femmes, et qu'il leur serait envoyé chaque année un prêteur de Rome pour les gouverner.
Cette Hippone dont il est parlé ici n'est pas la nôtre, mais bien Hippone Zarite, qui avait opposé en effet une grande résistance aux Romains. Ou voit par Pline que cette ville fut en effet détruite en vertu du décret précité, puisqu'elle conservait encore, plusieurs siècles après, le nom d'Hippone la Détruite (Hippo Dirutus).
Quant à notre Hippone, si l'on s'en tient au texte du décret, on en tirera cette conclusion qu'elle devint tributaire de Rome; si l'on a foi, au contraire, au sens strict du nom Hippo-Regius et aux assertions de Strabon et de Silius Italicus, on croira qu'elle lui donnée par les Romains aux rois massyliens qui en firent une de leurs résidences. Il y a bien des raisons pour que la première de ces déductions soit adoptée de préférence à l'autre ; voici pourquoi :
D'abord, le nom de la ville se disait indifféremment Hippo-Regius et Hippo-Regia, de même que l'autre Hippo s'appelait également Hippo-Zaritus où Hippo-Libera; il se peut donc que les indications de Strabon el de Silius soient une fausse traduction où un commentaire erroné de ce mot regia, qui est, en latin, soit le féminin de l'adjectif regius (royal), soit le substantif féminin regia (palais).
Ensuite Strabon est si peu croyable dans le cas présent, qu'il nous dit que l'autre Hippone était aussi une résidence royale.
Et puis les mois regius ou regia ajoutés au nom d'Hippo n'indiquent pas pour cela que celle ville était une résidence royale; sans cela, Cirta, qui fut bien authentiquement la résidence d'un grand nombre de rois, devrait surtout porter celle épithète ; au lieu qu'on ne la trouve accolée qu'à certains noms de villes y pour indiquer qu'elles étaient enclavées dans les Etats royaux, et les distinguer d'autres villes du même nom enclavées dans la province romaine: Ainsi, Bulla-Regia est ainsi nommée par opposition à Bulla-Minsa ; de même que Zama-Regia, pour la distinguer de la Zania où fut battu Hannibal. Il y avait aussi deux Cirta; mais comme toutes deux étaient dans les Etals royaux, aucune d'elles ne portait l'épithète de Regia.
Quoi qu'il en soit de cette question au moins douteuse, notre Hippone si elle appartint aux rois, ne leur appartint pas longtemps. A la mort de Juba 1er, le pays environnant fut réduit en province romaine. C'est à ce moment qu'Hippone reparaît pour la troisième fois dans l'histoire.
Après la bataille de Thapsus où César détruisit l'armée de Scipion et de Juba, celui-ci s'enfuit dans son royaume où il se tua. Scipion avec sa cavalerie se dirigea sur Utique, gardée par Caton, autre chef du même parti. Là il prit la mer avec sa flotte pour se réfugier en Espagne ; mais, battu par la tempête, il fut rejeté par les vents dans la rade d'Hippone royale et y tomba au milieu de la flotte de Sittius.
Cet aventurier, dont nous avons déjà parlé, avait trempé dans la conspiration de Catilina; il allait passer en jugement quand il quitta Rome et se réfugia en Afrique où il forma une bande d'aventuriers, et se mit à prêter aux princes du pays son épée et celles de ses compagnons. A la longue, devenu puissant, il avait fini par armer une flotte et par faire sur terre et sur mer la guerre pour son compte.
Quand César vint en Afrique, l'ancien complice de Catilina prit tout naturellement parti pour César et envahit, de concert avec Bogud, roi des Maures, les Etats de Juba. Celle diversion, opérée dans un moment opportun, sauva César. En même temps, la flotte de Sittius s'était emparée de la rade d'Hippone, et s'y trouvait quand la tempête y jeta Scipion. Attaqué dès qu'il fut reconnu, Scipion se défendit avec énergie et intelligence ; mais ses vaisseaux, qui étaient plus petits que ceux de l'ennemi, furent tous coulés à fond. Craignant alors de tomber vivant dans les mains de César, Scipion se perça de son épée et se précipita dans les flots. On reprocha plus lard à César d'avoir fait figurer dans son triomphe un tableau représentant la défaite et la mort de Scipion.
Hippone s'éleva probablement de la même façon que Carthage : quelques commerçants traitèrent d'abord avec les indigènes du droit de fonder un comptoir sur la côte. Ce comptoir s'augmenta et se fortifia peu à peu ; les tribus s'émurent et réclamèrent ; on n'en tint pas compte; elles prirent les armes, on les battit et on leur imposa un nouveau traité ; une ville se fonda, et petit à petit s'empara d'une zone de champs autour de ses murs. Les indigènes la lui disputèrent d'abord et finirent de guerre lasse par la lui abandonner, pour profiter des avantages commerciaux qu'ils retiraient du voisinage d'une ville.
Quant à ces indigènes eux-mêmes, on ne sait trop quel était leur état politique; peut-être comptaient-ils parmi les vassaux semi indépendants des rois de Cirta ; peut-être étaient-ils indépendants tout à fait et comptaient-ils parmi ces alliés des Carthaginois qui n'étaient soumis ni à Syphax, ni à Massinissa. A voir leur indifférence quand ce dernier traversa leur pays pour visiter Lælius, on croirait volontiers qu'ils ne se souciaient ni de Syphax, ni de Carthage, et qu'ils prétendaient rester neutres dans la lutte de ceux-ci avec les Romains. Si pourtant on voulait les compter parmi les vassaux d'un roi quelconque, il est sûr que ce n'est pas de Massinissa qu'ils relevaient, puisque celui-ci, parlant à Lælius dans le pays même, avouait qu'il était chassé de son royaume, ce qui montre bien que les environs d'Hippone n'en faisaient pas partie : ce royaume était, comme je l'ai dit plus haut, au sud de Carthage.
A la suite de la deuxième guerre punique, Massinissa recouvra ses Etats et obtint de plus Cirta et les autres villes et campagnes du royaume de Syphax, dont les Romains s'étaient emparées pendant la lutte. " Cette phrase montre qu'Hippone, ville phénicienne, et non pas ville du royaume de Syphax, resta indépendante du roi massylien : celui-ci n'eut d'autorité que sur les tribus environnantes. On ne sait trop quelles furent les nouvelles limites des Massyliens et des Massésyliens. Polybe, il est vrai, dans le récit que nous avons démêlé plus haut, les plaçait à un cap; mais on ne sait quel est ce cap, dont Strabon a omis de nous donner le nom. Du reste, ces limites semblent avoir varié bientôt.
A la fin de la troisième guerre punique, après la ruine de Carthage, des commissaires envoyés de Rome pour l'organisation du pays vaincu, décrétèrent :
1° que Carthage serait rasée complètement ;
2° que les villes qui avaient combattu jusqu'au bout avec les ennemis seraient détruites;
3° que celles qui avaient porté secours aux Romains auraient chacune une part du pays conquis, et qu'avant tout Utique aurait tout le canton qui s'étendait jusqu'à Carthage d'une part et jusqu'à Hippone de l'autre;
4° quant au reste, qu'il leur serait imposé un tribut, tant sur les corps que sur les biens , tant sur les hommes que sur les femmes, et qu'il leur serait envoyé chaque année un prêteur de Rome pour les gouverner.
Cette Hippone dont il est parlé ici n'est pas la nôtre, mais bien Hippone Zarite, qui avait opposé en effet une grande résistance aux Romains. Ou voit par Pline que cette ville fut en effet détruite en vertu du décret précité, puisqu'elle conservait encore, plusieurs siècles après, le nom d'Hippone la Détruite (Hippo Dirutus).
Quant à notre Hippone, si l'on s'en tient au texte du décret, on en tirera cette conclusion qu'elle devint tributaire de Rome; si l'on a foi, au contraire, au sens strict du nom Hippo-Regius et aux assertions de Strabon et de Silius Italicus, on croira qu'elle lui donnée par les Romains aux rois massyliens qui en firent une de leurs résidences. Il y a bien des raisons pour que la première de ces déductions soit adoptée de préférence à l'autre ; voici pourquoi :
D'abord, le nom de la ville se disait indifféremment Hippo-Regius et Hippo-Regia, de même que l'autre Hippo s'appelait également Hippo-Zaritus où Hippo-Libera; il se peut donc que les indications de Strabon el de Silius soient une fausse traduction où un commentaire erroné de ce mot regia, qui est, en latin, soit le féminin de l'adjectif regius (royal), soit le substantif féminin regia (palais).
Ensuite Strabon est si peu croyable dans le cas présent, qu'il nous dit que l'autre Hippone était aussi une résidence royale.
Et puis les mois regius ou regia ajoutés au nom d'Hippo n'indiquent pas pour cela que celle ville était une résidence royale; sans cela, Cirta, qui fut bien authentiquement la résidence d'un grand nombre de rois, devrait surtout porter celle épithète ; au lieu qu'on ne la trouve accolée qu'à certains noms de villes y pour indiquer qu'elles étaient enclavées dans les Etats royaux, et les distinguer d'autres villes du même nom enclavées dans la province romaine: Ainsi, Bulla-Regia est ainsi nommée par opposition à Bulla-Minsa ; de même que Zama-Regia, pour la distinguer de la Zania où fut battu Hannibal. Il y avait aussi deux Cirta; mais comme toutes deux étaient dans les Etals royaux, aucune d'elles ne portait l'épithète de Regia.
Quoi qu'il en soit de cette question au moins douteuse, notre Hippone si elle appartint aux rois, ne leur appartint pas longtemps. A la mort de Juba 1er, le pays environnant fut réduit en province romaine. C'est à ce moment qu'Hippone reparaît pour la troisième fois dans l'histoire.
Après la bataille de Thapsus où César détruisit l'armée de Scipion et de Juba, celui-ci s'enfuit dans son royaume où il se tua. Scipion avec sa cavalerie se dirigea sur Utique, gardée par Caton, autre chef du même parti. Là il prit la mer avec sa flotte pour se réfugier en Espagne ; mais, battu par la tempête, il fut rejeté par les vents dans la rade d'Hippone royale et y tomba au milieu de la flotte de Sittius.
Cet aventurier, dont nous avons déjà parlé, avait trempé dans la conspiration de Catilina; il allait passer en jugement quand il quitta Rome et se réfugia en Afrique où il forma une bande d'aventuriers, et se mit à prêter aux princes du pays son épée et celles de ses compagnons. A la longue, devenu puissant, il avait fini par armer une flotte et par faire sur terre et sur mer la guerre pour son compte.
Quand César vint en Afrique, l'ancien complice de Catilina prit tout naturellement parti pour César et envahit, de concert avec Bogud, roi des Maures, les Etats de Juba. Celle diversion, opérée dans un moment opportun, sauva César. En même temps, la flotte de Sittius s'était emparée de la rade d'Hippone, et s'y trouvait quand la tempête y jeta Scipion. Attaqué dès qu'il fut reconnu, Scipion se défendit avec énergie et intelligence ; mais ses vaisseaux, qui étaient plus petits que ceux de l'ennemi, furent tous coulés à fond. Craignant alors de tomber vivant dans les mains de César, Scipion se perça de son épée et se précipita dans les flots. On reprocha plus lard à César d'avoir fait figurer dans son triomphe un tableau représentant la défaite et la mort de Scipion.
VI. - Du Périple de Skylax.
Le Périple de Skylax ne parle pas de notre Hippone, mais comme il a décrit la côte nord de l'Afrique, et que, d'ailleurs, il a peut-être désigné Rusicada, il mérite à ce titre que nous en parlions ici.
On sait que le Périple qui porte le nom de Skylax n'est pas l'œuvre du vrai Skylax de Caryande, amiral de Darius qui fit un voyage de reconnaissance dans l'Océan indien. Ce Périple fui composé sous le règne de Philippe de Macédoine, père d'Alexandre le Grand, par un Grec inconnu, qui mit son ouvrage sous le patronage menteur du célèbre Caryandien; ce n'est d'ailleurs que la réunion en un seul ouvrage de plusieurs routiers d'origines et d'époques diverses.
Le routier même de la Libye occidentale n'est pas une oeuvre pure de tout mélange, et nous verrons tout à l'heure qu'il est la combinaison d'une liste d'étapes fort incomplète que l'auteur s'était procurée et de quelques renseignements pris dans les cartes du temps. Pour en donner la preuve, il faut d'abord mettre sous les yeux du lecteur le texte même du Périple, texte qui est peu précis et qui n'a pas toujours été bien compris par ses traducteurs, d'autant que ceux-ci se sont souvent permis de l'altérer quand il embarrassait leurs systèmes. J'en donnerai ensuite la traduction la plus exacte que je pourrai. Ce texte est ainsi conçu :
Autant qu'on peut l'assurer, d'après cette série confuse de mots, il est dit dans ce morceau que:
" D'Utique au cap du Cheval, on rencontre la ville du Cheval. Auprès de cette ville est un lac ; dans ce lac il y a beaucoup d'îles, et autour du lac les villes que voici:
Psegas, ville, et en face d'elle les îles Naxiques, la plupart remplies de singes, puis un port de l'autre côté de ces îles;
Ensuite une île, et dans l'île la ville d'Eubœa Thapsa;
Puis une ville et un port ;
Kaukakis, ville et port ;
Sida, ville;
Iouliou, cap, ville et port (ou le cap de Julius, ville et port);
Une septième ville et un port... "
La première preuve d'un, travail de remaniement opéré sur le routier primitif par l'auteur du Périple consiste dans l'exagération relative au lac d'Hippone, auquel il donne un immense développement, puisqu'il y place des îles nombreuses et compte au moins sept villes sur ses bords. Je sais qu'on a voulu dissimuler parfois dans les traductions cette étrange exagération ; mais l'indication : les villes que voici, la mention d'une septième ville ne laissent aucun doute sur le sens de la description. Il ressort de celle exagération énorme, que n'a pu commettre un témoin oculaire, que la liste donnée par ce témoin oculaire a subi les remaniements d'un arrangeur.
L'auteur fait aussi deux localités différentes de la ville d'Hippou et d'Hippon-Acra; c'est encore là une méprise évidente, car c'est un fait bien certain que cette Hippon-Acra (Il ne s'agit pas ici de notre Hippone, mais de l'autre Hippone Zarite) n'était pas un cap, mais une ville. Cela résulte d'indications très précises, provenant :
1° De l'historien d'Agathocle, lequel s'exprimait ainsi: "Agathocle campa auprès d'une ville nommée le Cap du Cheval, fortifiée naturellement par le lac qui la touche (Diodore, XX : Les Grecs avaient même fini par dire que c'était
Agathocle qui avait créé la citadelle, les ports et les arsenaux de cette ville). - Eumachus prit une ville nommée le Cap du Cheval comme celle dont Agathocle s'était emparée... "
2° De Polybe, qui la nomme tantôt Hippone, tantôt la ville des Hippacrites ;
3° D'Appieu, qui l'appelle aussi Hippone et Hippagrète ;
4° Enfin, d'Etienne de Byzance, qui la nomme Hippon-Acra, et ses habitants Hipponacrites ;
Si donc le Périple fait un cap de cette ville, ou même s'il la distingue de la ville d'Hippone, cela ne peut provenir non plus d'un témoin oculaire, et il faut bien qu'un géographe soit venu ensuite insérer dans le routier primitif la mention d'Hippone tirée d'un autre document.
Quel est maintenant cet autre document qui a servi à remanier le Périple? Sûrement, c'était un de ces traités grecs, une de ces cartes où l'on voyait figurer à l'ouest de Carthage l'immense bassin de l'imaginaire Triton, lac que l'arrangeur aura cru retrouver dans le lac d'Hippone du routier primitif. Ce traité, cette carte portait sans doute aussi la mention de la ville du Cheval, située à l'ouest d'Utique, celle d'une ville de Chalca, dont a parlé aussi Polybe un peu plus tard (1), et aussi d'une ville des Esclaves (Doulôn polis), citée bien avant Skylax par Ephore (2), et un peu après par le faux Hécatée (3).
Tout cela nous montre que l'on aurait tort d'attacher trop d'importance aux énonciations du Périple, puisque le seul mérite qu'on pouvait lui attribuer, c'est-à-dire l'exactitude, lui manque tout à fait.
Rétablissons pourtant le routier primitif sous sa forme première, supprimons la mention d'Hippon-Polis, supprimons l'indication qui place tant de villes sur ce lac, supposons, ce qui est d'ailleurs évident, qu'on doit les rechercher sur la mer Méditerranée, et voyons si ce morceau nous apprend quelque chose de précis.
Les îles Naxiques ne sont pas difficiles à retrouver; comme, à partir de Bizerte, il n'y a pas d'autre groupe d'îles sur la côte que les Fratelli, c'est à elles qu'on doit les assimiler. Psegas entre Hippon-Acra et ces îlots sera donc indifféremment une des criques sans nom de ce rivage.
De l'autre côté de ces îles vient un port, puis une île, et dans cette île une ville nommée Euboea-Thapsa. Le premier îlot qu'on rencontre sur la côte est celui de Tabarka, et ensuite, mais à cent lieues de là, le rocher de Srigina, près de Stora ; l'îlot de Tabarka est mieux disposé pour un établissement ; c'est donc là qu'il faudrait placer, à mon avis, l'île et la ville d'Euboea-Thapsa. Quant à placer cette ville à Rusicada, cela ne se peut, le texte de Skylax plaçant cette ville sur une île et non sur le continent. L'hypothèse basée sur l'existence d'un fleuve Thapsus, auprès de Rusicada, ne peut tenir contre la précision du Périple.
Si l'on veut absolument rattacher ce passage à celui de Vibius Sequester, il faut supposer que les Phéniciens établirent d'abord leur entrepôt sur le rocher de Srigina, quoiqu'il fût inhabitable faute de place et faute d'eau, mais parce qu'il rachetait ces inconvénients par sa position insulaire qui le rendait inattaquable aux indigènes, et que c'était là l'Euboea-Thapsa de Skylax; que plus lard, devenus plus forts, les Phéniciens se transportent sur la côte à Rusicada, en gardant à leur nouvel établissement le nom de l'ancien, et que ce fut alors que cet établissement, après avoir communiqué son nom au ruisseau voisin, ne tarda pas à le perdre lui-même pour prendre le nom d'Uzicath ou Rusicada, qu'il portait du temps de Polybe. Tout cela est fort possible ; mais que d'hypothèses pour arriver à ce mince résultat !
VII. - Itinéraire de Polybe..
Après la prise de Carthage à laquelle il assista, Scipion Emilien confia, au dire de Pline, une flotte à Polybe l'historien, pour faire un voyage de découvertes autour de l'Afrique. Celle assertion de Pline ne me paraît pas bien exacte : Polybe a navigué sur celle flotte, mais certainement il ne la commandait et ne la dirigeait même pas ; ce n'était pas comme allié des Romains que Polybe se trouvait auprès de Scipion, mais comme exilé de sa patrie par ordre des Romains. La mission de cette flotte n'était sans doute pas purement géographique non plus, et certainement le général romain qui la commandait avait l'ordre d'imposer aux comptoirs phéniciens des côtes la domination de la république, d'en tirer de l'argent et de mettre la main sûr les biens des Carthaginois.
Polybe avait laissé sinon une relation de ce voyage, au moins une description des pays qu'il avait visités. Cette description s'est malheureusement perdue, et il n'en reste plus qu'un extrait défiguré qui n'est parvenue à Pline que de troisième ou quatrième main ; encore cet extrait n'est-il relatif qu'aux côtes de l'Océan.
Tel qu'il est cependant, il suffit de le comparer aux listes de Ptolémée pour reconnaître que ce dernier géographe a possédé de la relation de Polybe un extrait plus complet que celui de Pline, d'où ressort naturellement cette déduction que Ptolémée s'est servi de son extrait non seulement pour décrire les côtes de l'Océan, mais aussi pour décrire celles de la Méditerranée. Celte supposition est rendue certaine par ce fait que la liste de Ptolémée contient un grand nombre de noms à terminaison phénicienne; or, de qui Ptolémée aurait-il pu connaître ces finales, si ce n'est par Polybe, puisque ces finales ne se rencontrent plus depuis la prise de Carthage dans les récits, ni dans les itinéraires?
Je crois donc qu'on peut hardiment tirer de la liste de Ptolémée tous ces noms phéniciens et les regarder comme ayant figuré dans la description de Polybe. Ces noms sont, pour la région comprise entre Saldæ et Hippoue:
1° Le fleuve Nasabath ;
2° Chobath ;
3° Iarsalh ;
4° Le fleuve Gui (ce n'est pas certain) ;
5° Asisarath ;
6° Le grand Collops ;
7° Uzicath ;
8° Le golfe Olcachites (j'expliquerai, à propos de Ptolémée, pourquoi je l'ai compris dans celte liste);
9° Le petit, Collops;
10° Le port Siur,
11° Et Hippon-Acra.
Essayons maintenant de déterminer ces points.
- Le Nasabath est le fleuve de Bougie. Ce nom est la forme phénicienne du nom Sava on Saba, qu'il portait encore lors de la domination romaine. Sava lui-même est l'Acif kabyle de nos jours, qui rappelle le sémitique Souf, couler.
- Chobath est la forme phénicienne de Choba, ville dont la position est fixée à Ziana par les itinéraires et une inscription découverte sur ce point.
- Iarsath est plus difficile à déterminer ; ce peut avoir été le nom phénicien d'Igilgili.
- Si la mention du fleuve Gui est bien de Polybe, il représenterait assez bien le ruisseau qui tombe à l'est de celte ville, et qui vient d'un point nommé encore Kolla.
- Le nom d'Asisarath, dépouillé de sa terminaison phénicienne, nous livre le mot Ssar ou Sisar, qui avait aussi dans l'ancienne langue libyenne le sens d'eau courante, et dont viennent les noms des Isser d'Algérie. Du reste, Ptolémée, d'après un autre renseignement, le nomme aussi fleuve Sisaris. Comme Polybe ne semble pas avoir nommé l'Ampsaga, c'est probablement ce fleuve, nommé aujourd'hui Oued-el-Kebir, qu'il nommait Asisarath.
- Le grand Collops est reconnaissable dans Collo.
- Uzicath est le même nom que Rus-Zicade, dépouillé du substantif sémitique Rus, cap.
- Le golfe Olcachites se trouve par suite être le golfe de Bône. On a voulu de nos jours trouver à ce mot une étymologie grecque rapportée aux mots " navire de transport ", et " froment " ; mais non seulement ces deux mots ne peuvent en se combinant former Olcachites, mais même ce dernier mot résiste à toute tentative de décomposition par le grec. C'était donc probablement un mot phénicien ou libyen; il rappelle, bien que vaguement, la ville Kaukakis de Skylax.
- Le petit Collops est évidemment le Cullucitani (petit Collo) des itinéraires, dont nous fixerons plus tard la position.
- Quant au port de Siur, on doit l'assimiler au port de Tacatua des itinéraires, aujourd'hui Tekouch, le seul qui mérite d'être mentionné sur celle côte.
- Enfin, Hippon-Acra est le nom phénicien de notre Hippone, comme cela est constaté par l'historien d'Agathocle.
VIII. - Description de Pline.
Nous passerons vite sur Strabon qui est inexact, et sur Mêla qui est incomplet. Le premier s'exprime ainsi : Là, dit-il, se trouvent Cirta et les deux Hippone, l'une proche d'Utique, l'autre plus en deçà et plutôt vers le cap Trélon, toutes deux résidences royales. "
Quant au second, son texte est ainsi conçu : " In ea (Africa) sunl oppida Hippo-Regius, et Rusicade, et Tabraca. " Ou voit qu'il place Hippo-Regius à l'ouest de Rusicade.
Pline est plus exact : " Oppida: Gullu, Rusicade, et ab ea XLVII m. p. in Mediterraneo colonia Cirta, Sillianorum cognomine, et alia inlus Sicca liberumque oppidum Bulla-Regia. At in ora Tacatua, Hippo-Regius, flumen Armua, oppidum Tabracha cjyium romanorum, Tusca fluvius, Numidiæ finis. "
Nous n'avons à mentionner, en ce qui concerne notre travail, que Cullu, Rusicade, Tacatua et Hippo-Regius, que les inscriptions et les itinéraires placent à Collo, Philippeville, Tekouch et Bône.
IX. - Carte de Ptolémée..
Quand on essaie d'appliquer telle qu'elle est à la côte d'Afrique la carte de Ptolémée, on s'aperçoit vite que c'est là une tâche impossible : l'ordre des positions y est bouleversé, les noms se reproduisent sous des formes diverses, et l'on dirait que l'auteur s'est fait un jeu de commettre des inexactitudes. C'est qu'on suppose que cette carte a été composée de toutes pièces d'après un seul document. C'est là une supposition gratuite, et, j'ajouterai, fort téméraire. Qu'on réfléchisse comment se font encore de nos jours les cartes des pays peu connus, traversés de loin en loin par quelques voyageurs qui laissent des relations conçues dans l'esprit le plus différent, qu'on se rappelle combien un nouveau voyage fait reconnaître d'erreurs sur les cartes composées d'après les relations antérieures, et l'on se rendra compte que Ptolémée ne pouvait guère commettre moins de méprises qu'il n'en a commises.
Quand on examine Ptolémée dans cet esprit, on reconnaît qu'il n'a eu que peu de matériaux et d'époques bien diverses, et que ces matériaux eux-mêmes laissaient à désirer pour la précision et l'exactitude ; du reste, il ne connaissait pas même l'itinéraire d'Antonin, qui aurait pu lui servir de guide.
Toutes les erreurs de Ptolémée ne doivent pourtant pas nous faire renoncer à nous servir de ses cartes; il convient seulement, pour en tirer de bons renseignements, de refaire de notre mieux, en sens inverse, l'opération qu'il a exécutée, et de répartir entre les divers documents qu'il a consultés les divers détails qui appartiennent à chacun d'eux. Chacun de ces documents ainsi rétablis, nous n'aurons plus qu'à l'étudier isolément.
Ce travail, nous l'avons déjà fait pour Polybe. La liste des villes qui reste ensuite se partage elle-même naturellement en deux séries, dont l'une comprendra les noms cités par Pline, que Ptolémée a évidemment consulté, et d'autres divers noms grecs qui ne se rencontrent chez aucun autre auteur. Il résulte de ceci que la liste de Ptolémée peut être décomposée de la façon suivante :
Nous avons déterminé plus haut quelles sont les localités actuelles qui répondent ou paraissent répondre aux noms des deux premières listes. Quant à la troisième, cela sera moins facile.
Si, en effet, la position du Babor actuel et des anciens Bavares nous indique qu'il faut rechercher le Vabar de Ptolémée à l'est et non à l'ouest de Saldae, elle ne nous dit pas d'une façon précise en quel endroit on doit le retrouver.
Le fleuve Sisaris ne peut guère être autre chose que l'Asisarath de Ptolémée, et sera par conséquent l'Oued-el-Kebir.
Le promontoire Aud, qu'on cherchait d'après la carte ptoléméenne à l'ouest de l'Ampsaga, doit donc être recherché à l'est, et se trouve être dès lors le cap Seba-Rous. Cette solution était d'ailleurs indiquée par Ptolémée lui-même sans qu'il s'en doutât. S'il mettait en effet le cap Aud à l'ouest de l'Ampsaga, il plaçait en revanche le mont Aud à l'est de cette rivière. Ce mont Aud paraît avoir été la chaîne qui s'étend au nord de Constantine et de Guelma (4), et dont le massif de Collo est le principal contrefort septentrional. On y trouve encore une tribu qui porte le nom d'Aonat.
Le fleuve Aud, qui vient du mont Aud, peut être soit l'Oued-Guebli, qui vient de chez ces Aouat, ou plutôt l'Oued-Safsaf, qui vient des montagnes au nord de Constantine. Cependant, si l'on maintenait le fleuve Gui dans celte liste, ce serait lui qu'il faudrait assimiler à l'Oued-Safsaf. Ce Safsaf est aussi le Thapsus de Vibius Sequester.
Le fond du golfe de Numidie se retrouve un peu au delà de cette rivière et du mont Filfila, auprès de certaines ruines nommées aujourd'hui Benian-mta-Amségé. On ne peut s'empêcher de remarquer ce nom Amségé, donné à un ruisseau qui n'est pourtant pas l'ancien Ampsaga. Qui sait si ce ruisseau ne figurait pas sous ce nom sur la liste grecque, et si ce n'est pas pour cela que Ptolémée a placé l'Ampsaga de Pline dans le golfe de Numidie?
Ce golfe de Numidie, d'ailleurs, ne peut être que le golfe de Stora. Si on l'assimilait au golfe de Bougie, il ne serait plus en Numidie, et quand même on le placerait entre Djidjelli et le Seba-Rous où il n'y a pas de golfe, il n'y serait qu'à moitié.
Le cap Tréton (Troué) qui ferme ce golfe à l'est est donc le cap de Fer.
Ce serait à la suite de ce golfe qu'il faudrait placer le golfe Olcachites, si on le maintenait dans la liste grecque ; mais bien loin qu'il s'y trouve un golfe, la côte est presque partout convexe.
Le cap Stoborron, qui vient après le cap Tréton, est le cap de Garde.
Quant à Àphrodision-Colonia, il n'y avait de ce côté en fait de colonie qu'Hippone, et bien plus loin Tabraca, entre lesquelles il faut absolument choisir Aphrodision. Quant à ce nom lui-même, il peut tout aussi, bien se rapporter à l'une qu'à l'autre. Astarté, déesse nationale des villes phéniciennes, assimilée par les Grecs à leur Aphrodite, par les Romains à leur Vénus, devait avoir aussi bien son culte à Tabraca qu'à Hippone, les deux villes ayant la même origine. Je crois pourtant que c'est d'Hippone qu'il s'agit ici, parce qu'elle est plus proche des autres points dénommés plus haut, et parce qu'on a pu lui donner le nom d'Aphrodision pour faire tomber en désuétude le nom d'Hippone qui prêtait à des confusions avec l'Hippo-Zaritus de l'est.
S'il n'est pas trop difficile de présenter des hypothèses raisonnables sur les procédés employés par Ptolémée pour fixer l'ordre des villes et des lieux sur la côte, il a été jusqu'à présent impossible de retrouver la méthode d'après laquelle il a déterminé leur position sur la carte. La comparaison de cette carte avec les renseignements donnés par Pline sur l'Océan m'a démontré, il est vrai, que Ptolémée attribuait au degré de latitude la valeur de soixante milles romains, mais je n'ai pu trouver encore quelle valeur il donnait au degré de longitude sous le parallèle où il place la côte de Numidie. Ce qui est bien certain, c'est qu'il n'a adopté pour sa carte ni les chiffres d'Eratosthènes et de Polybe, ni ceux d'Artémidore, ni ceux de Strabon, ni ceux de Pline, et encore moins ceux de l'Itinéraire d'Antonin, dont il n'a pas eu connaissance.
X. - L'itinéraire d'Antonin et la carte de Peutinger.
Bien qu'il soit généralement admis que la notice des grandes routes militaires de l'Empire, connue sous le nom d'Itinéraire de l'empereur Antonin, remonte par sa première rédaction au temps de Jules-César, on a le droit de s'étonner que ni Méla, ni Strabon, ni Pline, ni Ptolémée n'aient pas pensé à s'en servir ; je penche donc à croire qu'elle fut, comme le porte son nom, rendue publique sous le règne et par les ordres d'Antonin. Quoi qu'il en soit, elle nous a été léguée dans son état actuel par le dernier âge de la Rome impériale. " Cet Itinéraire, dit M. d'Avezac, fut compilé par l'Istriote Ethicus, vers 375, c'est-à-dire après la mort de Valentinien 1er.
Outre ce document, il nous reste de l'antiquité une carte routière de l'Empire, qui porte le nom de l'Allemand Peutinger, auquel elle a appartenu. Celle carte n'a pas de prétentions géographiques, et nous donne seulement le réseau défiguré des routes et des chemins du monde romain. On n'est pas d'accord sur la date de ce routier; les uns le croient contemporain d'Alexandre-Sévère; d'autres pensent qu'il fut rédigé l'année même de la mort de Constantin (La première opinion est celle de Mannert, la deuxième celle de M. d'Avezac.) La copie qui nous l'a fait connaître est du moyen âge.
Ces deux documents, si humbles qu'ils paraissent, ont été plus utiles à la géographie comparée, que les plus pompeux traités géographiques, parce qu'ils donnent les distances entre les divers points qu'ils nomment.
De Rusicade à Hippo-Regius, ces itinéraires marquent deux routes, dont l'une, fort longue et fort difficile, suivait la côte en contournant ou franchissant par le nord les derniers escarpements de l'Edough ; l'autre route prenait par l'intérieur des terres et contournait ce massif par le sud, en passant par les bas-fonds que couvre aujourd'hui le lac Fetzara.
La première est mentionnée par la Table de Peutinger et l'Itinéraire d'Antonin ; la seconde, par l'Itinéraire seulement.
.A. - Route de la côte.
De Rusicade, la route allait à Paratianis en 25 milles, selon la double assertion des deux routiers, et de là à Cullucitani en 10 ou, 18 milles (Je me suis servi, pour les déterminations de cet Itinéraire, de la carte du dépôt de la guerre : Environs de Bône, de 1851), ce qui fait en tout 41 ou 43 milles. La première pensée est que cette route suivait la côte; mais on est forcé de renoncer à celle opinion, par cette raison que le développement d'une route suivant la côte jusqu'à Sidi-bou-Merouan ? (Cullucitani) n'aurait pas 30 milles de long. D'autre part, la concordance des deux routiers exclut toute pensée d'une erreur de chiffre provenant des copistes. Il est très probable néanmoins qu'il y avait sur la côte un sentier omis par les itinéraires. Ce sentier allait passer au pied méridional du Filfila, et aboutissait, à 15 milles du point de départ, aux ruines de Benian-mta-Amségé. De là on pouvait suivre la côte jusqu'à l'embouchure de l'oued Sanhadja. On ne trouve à 10 milles en tout sens, à partir des ruines d'Amségé, aucune trace de ville ancienne pouvant s'assimiler à Paratianis.
Un autre chemin plus méridional, au lieu d'aborder par le travers le massif de Filfila, le prenait à revers, en franchissant le mont Térrben à Kef-el-Ham. Cette route se dirigeait à l'est en formant une courbe vers l'oued Sanhadja. Un mille environ avant de l'atteindre, cette route passait par une bourgade, dont les ruines sont nommées aujourd'hui Djenen-Dib (les Jardins du Chacal). Ces ruines, en suivant le sentier marqué sur la carte, sont juste à 26 milles de Rusicade ; il est donc fort probable qu'elles représentent Paratianis.
De là, une route courant vers l'est et se confondant bientôt avec la route de l'intérieur, allait droit à Hippone. Cette route n'est pas marquée par les itinéraires anciens ; mais comme elle est jalonnée à 9 milles de Djenen-Dib par une ruine nommée aujourd'hui El-Ksour, il n'est pas douteux que celle route, qui est la plus directe de Rusicade à Hippone, existât dans l'antiquité.
A Paratianis, la route marquée par les itinéraires, au lieu de se continuer vers l'est; après Djenen-Dib, tournait au nord pour rejoindre la côte. En 13 milles elle gagnait par la plaine une bourgade nommée aujourd'hui Sidi-Medoud, qui est sur les bords de l'oued Sanhadja, à une demi lieue de son embouchure ; de là, en 4 ou 5 milles, se dirigeait obliquement vers la mer, qu'on atteignait à Sidi-bou-Merouan, ruines qu'on peut assimiler à Cullucitani. Ce Cullucitani s'assimile naturellement au petit Collops de Ptolémée, et doit, suivant les indications de ce géographe, être recherché sur le rivage. Si, au lieu dépasser par Sidi-Medoud, ce qui donné les 18 milles de trajet indiqués par l'Itinéraire d'Antonin, on se dirigeait droit de Djenen-Dib à Sidi-bou-Merouan, ou gagnait 2 milles, et on faisait les 15 milles marqués par la Table de Peutinger.
Bien qu'on n'ait rien retrouvé à Sidi-bou-Merouan qui prouve avec certitude que ce point ait été Cullucitani, on ne peut guère douter que ce ne soit cette ancienne ville, attendu que les distances qui séparent mutuellement cette ruine, la baie du cap de Fer, Sidi-Akeche et Tekouch, sont tout justement celles qui séparaient Cullucitani, Zaca, Muharur et Tacatua. Ces distances ne sont indiquées que par la Table de Peutinger ; mais elles sont confirmées par l'Itinéraire, qui donne entre Cullucitani et Tacatua la distance de 22 milles, somme des distances données par l'autre document.
Zaca, à 7 milles de Sidi-bou-Merouan, est donc la crique voisine du cap de Fer. Les cartes n'y marquent pas de ruines ; mais le nom de Kef-Kallah que porte la cime voisine, montre qu'il s'y trouvait une bourgade fortifiée.
A 8 milles de distance de Zaca, la Table de Peutinger place Muharur, ce qui place cette localité à Sidi-Akeche, le point le plus voisin de la côte qui possède un abri pour les bateaux.
Il y avait 7 milles entre Muharur et Tacatua. Cette dernière ville a conservé son nom sous la forme Tekouch. Il faut que c'ait été un point important, pour que Pline ait pris la peine de le mentionner.
La carte du dépôt ne marque pas de ruines à Tekouch; mais M. de la Primaudaye assure qu'il s'y en trouve beaucoup. Il nous apprend, en outre, que de chaque côté de ce promontoire existent deux petites baies pouvant servir d'abri aux caboteurs.
Après Tacatua, les falaises empêchent de suivre la côte ; la route s'en écartait donc un peu. Cette route, d'ailleurs, n'était elle-même qu'un sentier ardu qui gagnait péniblement en 22 milles la petite baie que l'Itinéraire d'Antonin nomme Sulluco, et la Table de Peutinger Sublucu. Ce nom paraît signifier que le village se trouvait au pied d'un bois touffu (sub lucu). Ce village, dont les ruines subsistent, se trouvait à l'embouchure d'un petit ruisseau nommé sur les cartes actuelles Oued-el-Gueb.
De Sublucu il y avait aussi 22 milles jusqu'à Hippone-Royale, soit qu'on suivît la côte en contournant le cap de Garde, soit qu'on gagnât la crête de l'Edough. La route qui passe au village de Bugeaud représente assez bien la voie romaine; celle-ci traversait l'emplacement où s'élève aujourd'hui Bône, franchissait la Boudjima et entrait ensuite dans la ville de saint Augustin.
B. - Route de l'intérieur..
Le chemin que nous venons de suivre n'était pas la véritable route, c'était le chemin de communication desservant les bourgades de la côte. La vraie route reliant Rusicade à Hippone suivait à peu près la même trace que la voie carrossable ouverte par les Français.
Celte route remontait l'oued Safsaf, puis l'oued Addarat, son affluent, d'où l'on gagnait par le col peu élevé d'EI-Akout le cours de l'oued Fendek. Là se trouvait, une demi lieue avant notre Jemmapes, un centre de population dont le nom ancien ne nous est pas connu; ses ruines portent aujourd'hui le nom de Guermoucha. La route gagnait par l'oued Emchekel le cours de l'oued Sanhadja, le descendait pendant un mille et y rencontrait une bourgade dont les ruines subsistent encore au confluent, de cette rivière et du ruisseau d'Esma. Cette bourgade se nommait Nedes (ablatif Nedibus), et se trouvait à 43 milles de Rusicade. Elle se trouvait aussi à 10 milles au sud de Djenen-Dib (Paratianis).
De Nedibus, la route du sud courait à l'est-nord-est pour gagner la rive nord du lac Fetzara, et se poursuivait jusqu'à Plumbaria. Ce village, que la Table place à 7 milles de Nedibus et 15 milles d'Hippone-Royale, occupait le fond actuel du lac Fetzara, où l'on en retrouve des ruines. Ce lac n'existait pas encore lors de l'invasion des Vandales, car saint Augustin n'en parle pas; c'est El-Bekri qui l'a mentionné le premier.
De Plumbaria, la route ancienne gagnait Hippone en 15 milles.
(1)
(1) Etienne de Byzance, Diction, géog., au mot Chalkeià : i Chalkeià, ville de Libye, selon Alexandre Polyhistor dans son troisième livre des Libyques, où il cite Démosthène.- Mais, dit Polybe ; Démosthène ici s'est grandement trompé au sujet de Chalkeià : ce n'est- pas une ville, mais un endroit où se fabrique du cuivre. "
(2) Etienne de Byzance, au mot Doulôn polis. Le manuscrit de Skylax qui nous est parvenu, porte Arulôn; mais: l'on sait combien les caractères grecs qui servent à former les mots Doulôn et Arulôn peuvent être facilement confondus.
(3) Etienne de Byzance, au même mot.
(4) Ptolémée dit : " Au sud des Cirtésiens et de la Numidie habitent, sous le mont Aud, les Misulames, au-dessous les Nasaboutes, ensuite les Nisibes. " Une inscription, Revue africaine, année 1856, p. 60, place ces Nasabutes, comme les nomme Pline, à Omm-Guerriche, au sud-ouest de Guelma, ce qui place les Misulames entre Guelma et Constantine, et par conséquent le mont Aud au nord de ces deux villes.
Bône, le 8 janvier 1870
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PHOTOS D'ECOLE
Envoyé par M. Gilbert JOVINELLI
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Lycée Saint Augustin de Bône
Année 1958/1959
Merci pour la"Seybouse" n°93. Aprés nos retrouvailles au Lycée Saint Augustin au cours du voyage 2009 à Bône, je te fais parvenir une photo du Lycée St Augustin, classe de 3° où apparaissent Nicolas Duchene et Henri Lunardelli avec moi. (Nous étions jeunes, beaux et....insouciants dès fois.)
De haut en bas :
Nicolas Duchene: 4°rang......4° à partir de la droite
Gilbert Jovinelli: 3° rang......3° à partir de la gauche
Henri Lunardelli: 1°rang ...2° à partir de la droite
Est-ce que d'autres copains se reconnaîtront-ils ?
Merci Gilbert.
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L'ŒUVRE DE F.-C. MAILLOT
N° 2
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ANCIEN PRÉSIDENT
DU CONSEIL DE SANTÉ DES ARMÉES
Deuxième Edition
PARIS 1894
OCTAVE DOIN, ÉDITEUR
8, PLACE DE L'ODEON |
MAILLOT François-Clément, né à BRIEY (Moselle) le 13 Février 1804. Ancien Président du Conseil de Santé des Armées, Commandeur de la Légion d’Honneur, récompense nationale attribuée par la loi du 25 juillet 1888. Ancien médecin en chef de l’hôpital militaire de Bône 1834-1836. |
TRIBUT DE RECONNAISSANCE DU COMITÉ
D'ÉTUDES MÉDICALES DE L'ALGERIE
II. - RECHERCHES
SUR LES FIÈVRES INTERMITTENTES
DU NORD DE L'AFRIQUE (1)
AVANT-PROPOS
L'indulgence avec laquelle l'Académie royale de médecine a bien voulu entendre la lecture de ce mémoire, conçu à la hâte et rédigé pour ainsi dire sous la tente, me fait regretter vivement que des motifs particuliers ne me permettent pas, pour le publier, d'attendre que le rapport en ait été fait à cette société savante.
Parmi les propositions que renferme ce travail, on en trouvera quelques-unes qui ont la plus grande analogie avec celles que je rencontre dans un ouvrage fort remarquable, que je ne connais que depuis quelques jours, je veux parler du Traité sur les fièvres rémittentes et intermittentes, par M. Nepple.
Je ne chercherai pas cependant à prouver que je n'ai pas puisé dans cette excellente monographie, qui date de 1835, les idées que j'émets sur la manière dont les fièvres intermittentes, dans les pays chauds et marécageux, deviennent rémittentes, puis continues, pour repasser ensuite de cette continuité acquise à la rémittence ou à l'intermittence.
Pour me mettre à l'abri de tout soupçon, je me contenterai de renvoyer à un article écrit en juillet 1834 et inséré, quelques mois après, dans le Journal hebdomadaire des Progrès des Sciences et Institutions médicales.
Nous nous sommes rencontrés sur plusieurs points, M. Nepple et moi, parce que nous avons raconté franchement ce que nous avons vu ; et, comme le dit lui-même ce médecin distingué, cette concurrence d'idées est si naturelle à ceux qui travaillent sur le même sujet qu'elle ne saurait provoquer aucune récrimination.
Ce résultat auquel nous sommes arrivés tous deux, dans des conditions si diverses et dans des localités bien différentes quoique analogues, ce résultat, dis-je, donne à nos observations une valeur que, prises isolément, elles n'auraient pas eue. En effet, lorsque dans la recherche d'une maladie inconnue, sans se consulter, sans idées préconçues, et dépouillant le vieil homme, on arrive par l'analyse aux mêmes données, il est certain que l'on est en voie de résoudre le problème.
Nous sommes loin néanmoins d'être d'accord sur toutes les questions que nous abordons; et cette divergence d'opinions tient, sans doute, à la diversité des localités où nous avons recueilli nos matériaux.
C'est ainsi que je considère la fièvre intermittente soporeuse comme étant toujours le résultat d'une violente congestion cérébrale, tandis que M. Nepple la regarde comme annonçant ordinairement une asthénie profonde du cerveau.
C'est ainsi encore que, relativement à la nature de la fièvre rémittente, je suis bien de son opinion, lorsqu'il dit (page 295) : " La fièvre rémittente doit sa forme à un composé d'irritation fixe et d'irritation mobile ; c'est une maladie complexe; pour qu'elle puisse avoir lieu, il faut que l'irritation phlegmasique permanente ne soit pas trop intense. "
Mais je ne partage plus son avis lorsqu'il ajoute : " Car, lorsqu'elle existe à un certain degré, la réaction considérable et continuelle qui en résulte s'oppose à une concentration nouvelle. "
Je crois, au contraire, que, dans les fièvres intermittentes passées à l'état continu, cette concentration périodique s'opère encore et qu'elle n'est que masquée par la violence des symptômes inflammatoires. S'il en était autrement, comment agirait alors le sulfate de quinine, qui dans les cas de cette nature produit, malgré la croyance générale, de si heureux résultats?
Il n'y a ici de différence, selon moi, que du plus au moins, et, de même que M. Nepple réunit à peu près les intermittentes et les rémittentes, je rattache, moi, aux fièvres intermittentes les affections continues dont il s'agit; et je veux que le traitement des unes soit celui des autres. En cela, je suis allé beaucoup plus loin que ce judicieux observateur ; et personne, que je sache, n'a aussi formellement exprimé cette opinion.
C'est dans la thérapeutique de ces affections surtout que je me suis jeté violemment en dehors des règles communes. Je devais le faire du moment où, en présence d'accidents terribles et inconnus en France, je pouvais soupçonner que ces fièvres continues n'étaient réellement que des fièvres intermittentes; du moment aussi, il faut bien le dire, où je connaissais les revers réservés au traitement antiphlogistique pur.
Sans doute, il m'a fallu combattre avant de répudier mes croyances médicales, avant de me décider à tenter une voie aussi hardie et à courir des chances aussi périlleuses. Mais du résultat de cette lutte et de ces efforts, il restera démontré que, contrairement à l'opinion générale, le sulfate de quinine peut toujours et doit souvent être administré dans toutes les périodes des fièvres intermittentes et rémittentes; et que, s'il est préférable, dans les climats tempérés et dans les saisons froides, de prescrire ce médicament pendant l'intermittence et la rémittence, ce précepte (qui n'est jamais de rigueur) devient dangereux dans les pays chauds et doit être rejeté, lorsque par suite d'une forte réaction vasculaire la rémittence cesse d'être distincte.
J'ai la conviction que, adoptées dans les localités marécageuses de la France et sagement appliquées, les modifications que je signale obtiendront les plus heureux résultats. Sous leur influence, les fièvres continues y diminueront de nombre, les rémittentes seront moins graves ; les accès et les paroxysmes étant de suite enrayés, les accidents consécutifs cesseront de miner lentement les organes et de traîner misérablement au tombeau des populations entières. C'est aux médecins de ces contrées, c'est surtout à ceux d'entre eux qui sont placés dans les hôpitaux, qu'il appartient de vérifier ce que j'avance et d'approfondir ce point important de médecine pratique.
La ville de Bône, l'un des points les plus importants de la Régence d'Alger, est occupée par les Français depuis le mois d'avril 1832. La force de la garnison varie de 3,000 à 5,000 hommes, en se rapprochant cependant plus souvent du premier que du dernier de ces chiffres.
Du 16 avril 1832 au 16 mars 1835, il y a eu dans les hôpitaux de Bône 22,330 entrants ; 19,612 sortants ; 2,513 morts; ce qui indique que toute la garnison passe dans les hôpitaux plusieurs fois dans l'année ; ce qui donne 1 mort sur 8 sortants environ.
Les 22,330 malades et les 2,513 morts ont été répartis, suivant les années, dans les proportions suivantes (2) :
En 1832 : 4,033 entrants ; 3,132 sortants ; 449 morts ; 1 mort sur 7 sortants.
En 1833 : 6,704 entrants ; 5,299 sortants ; 1,526 morts ; 1 mort sur 3 1/2.
En 1834 et jusqu'en 1836 : 11,593 entrants ; 11,181 sortants ; 538 morts ; 1 mort sur 20.
Ainsi, du 1er janvier 1834 au 16 mars 1835, on a reçu à l'hôpital de Bône 856 malades en plus que pendant les deux années précédentes réunies, et l'on a eu 1,437 morts en moins.
Rien n'avait été publié sur les épidémies si meurtrières de 1832 et 1833 lorsque, au mois de janvier 1834, je fus détaché d'Alger pour aller prendre la direction du service médical de l'hôpital militaire de Bône. C'était donc à l'observation de m'apprendre quelle était la nature des maladies de ce pays. Y avait-il analogie entre ces affections et celles que je venais d'observer en Corse et à Alger?
Y avait-il identité? Y avait-il opposition? Tels étaient les points principaux qu'il fallait décider, et je n'avais d'autres moyens de le faire, je le répète, que l'observation au lit des malades.
C'était en consultant mes souvenirs et mes notes de clinique; c'était en rapprochant ces souvenirs et ces notes de ce que j'allais observer, que je pouvais arriver par induction à une connaissance plus ou moins exacte des maladies de Bône.
J'attachais une haute importance à la solution de ces diverses questions, parce que de cette solution dépendait le choix du traitement que j'adopterais.
J'avais, en effet, une opinion bien arrêtée sur la thérapeutique spéciale des maladies de la Corse et d'Alger, et j'étais décidé à l'admettre dans toute son extension, si la moindre analogie des symptômes me mettait sur cette voie.
Heureusement, mon incertitude ne fut pas de longue durée. Me fondant sur la, similitude du climat, sur le voisinage des marais, sur la position des points occupés par nos troupes, je pensais bientôt que, les conditions étant à peu près les mêmes il devait exister la plus grande analogie entre les affections de Bône et celles d'Alger, c'est à dire que, à Bône comme à Alger, l'intermittence devait dominer partout. Mais à Bône, les marais touchant la ville et les postes extérieurs étant placés au centre ou au pourtour de ces terrains marécageux, on devait avoir dès lors, pensais-je, des accidents plus graves, des fièvres pernicieuses en plus grand nombre ; on devait voir, chaque année, se dérouler les scènes que nous avait présentées l'épidémie d'Alger en 1832, au moment où nos troupes venaient de camper dans la Méditja, et occupaient encore la Ferme modèle et la Maison carrée. Il y avait identité de causes, comment donc ne pas s'attendre à une identité de faits? C'est ce qui me faisait dire dans un rapport au médecin en chef de l'armée : " Rapprochez de ces conditions celles que vous trouvez sur quelques points du continent français, celles que vous observez en Corse et dans certaines localités d'Italie, rappelez-vous ensuite la nature des maladies qui règnent dans ces contrées, et vous connaîtrez la nature des épidémies de Bône. "
En théorie, je devais donc m'attendre à voir régner une épidémie de fièvres intermittentes et rémittentes. C'était ensuite aux faits de m'apprendre si la théorie était exacte ; voici ce que les faits m'ont révélé :
Du 9 février 1834 au 21 février 1835, j'ai reçu dans mes salles 3,765 malades ; 3,623 sont sortis ; 135 sont morts; 7 restaient au 17 mars : ce qui donne une moyenne de 1 mort sur 27 sortants environ.
Sur 3,765 malades, 2,354 étaient atteints d'affections franchement intermittentes; 1,332 d'affections continues ; 79 seulement d'affections rémittentes bien tranchées.
Mais, avant d'aller plus loin, afin de prévenir toute erreur, je crois devoir m'expliquer dès maintenant sur la nature des affections continues de ce pays; c'est bien certainement la question la plus épineuse de toutes celles qui se rattachent à l'histoire des maladies du nord de l'Afrique.
Deux thèses sont ici également soutenables ; toutes deux ont leurs partisans ; les faits seuls ont pu décider de quel côté était le vrai.
D'après l'une, les affections intermittentes et les affections continues du nord de l'Afrique sont de deux ordres bien distincts, bien tranchés, bien séparés. Causes, marche, traitement, tout diffère, tout est opposé.
D'après l'autre (et, le premier, je l'ai établi à Bône), loin de signaler des caractères opposés dans ces deux genres d'affections, on y trouve des rapports, des rapprochements, de la filiation, de la consanguinité, si je puis m'exprimer ainsi.
Voici comment j'arrivai, à Bône, à cette manière de voir. Aux fièvres intermittentes simples des mois de février et mars avaient succédé, en avril et mai, des fièvres du même type avec des complications plus ou moins graves; en même temps nous commencions à avoir un assez grand nombre d'affections continues, genre d'affections qui jusque-là avait été très rare.
Je fus cependant moins frappé de l'apparition de ces complications et de ces maladies nouvelles que de là promptitude avec laquelle les fièvres intermittentes de cette époque passaient aux types rémittents ou continus, lorsqu'on n'arrêtait pas les accès.
Je fus bien plus étonné encore de la facilité et de là fréquence non moins grande avec lesquelles les affections continues devenaient rémittentes ou intermittentes, sous l'influence des déplétions sanguines.
Je me demandai si c'était bien là la marche des affections vraiment continues, si c'était bien là la marche des gastro-entérites et des gastro-céphalites du nord de la France ? La réponse fut négative.
Me rappelant avoir observé déjà des faits, sinon identiques, du moins analogues en Corse et à Alger, je me demandai si, malgré l'apparence de la complète continuité, ce n'était pas le genre d'affections dont Torti a fait sa huitième espèce de fièvres et dont il a signalé les caractères en disant : " De intermittente sensim acutam et malignam migrât. "
Cette question était du nombre de celles que l'expérience seule peut résoudre. Je me déterminai donc à donner avec hardiesse le sulfate de quinine dans tous les cas d'affections continues, sans attendre l'établissement soit d'une rémittence, soit d'une intermittence qui n'étaient qu'instantanées lorsqu'on réussissait à les obtenir.
Dans une note insérée dans le Journal hebdomadaire, j'ai rendu compte de ces premiers essais, émettant quelques propositions hasardées alors, mais qui s'appuient aujourd'hui sur des faits nombreux, sur des observations détaillées, sur des résultats cliniques avantageux et que je vais rappeler en quelques mots.
Sous l'influence de l'élévation de la température, les fièvres intermittentes simples des mois d'hiver font place à des fièvres intermittentes et rémittentes plus graves et à des affections continues, qui commencent seulement à se montrer à cette époque. La coïncidence de cette augmentation dans les fièvres intermittentes compliquées, avec l'apparition d'un assez grand nombre d'affections rémittentes et continues, marque le passage des congestions irritatives, qui accompagnent les décès, aux gastro-entérites, aux gastro-céphalites qui sont si nombreuses pendant la saison des chaleurs.
Bientôt les fièvres rémittentes disparaissent à leur tour ; elles sont remplacées par des fièvres continues, de même qu'elles avaient elles-mêmes remplacé des fièvres intermittentes. Cette transmutation est le résultat de la durée des accès qui, en se prolongeant, en se confondant, donnent naissance à ces gastro-céphalites, lesquelles affectent de plus en plus une marche continue.
Cependant, jusque dans les premiers jours de juin, on parvient encore par de larges déplétions sanguines à établir assez souvent une espèce de rémittence dans ces affections continues. A certaines heures de la journée, et généralement le matin, les malades vont mieux; la réaction circulatoire est moins forte; mais, le soir, les phénomènes morbides reprennent leur intensité de la veille et réclament de nouvelles déplétions sanguines qui, pratiquées, amènent encore une espèce de solution. Comme le précédent, ce mieux n'est et ne peut être que passager; et, le lendemain, à la visite du matin et à celle du soir, se présentent les mêmes symptômes, se présentent les mêmes indications.
Ces alternatives réglées de bien et de mal, de diminution et d'augmentation dans les phénomènes morbides ne pouvant durer longtemps, il arrive de deux choses l'une : ou bien, la réaction circulatoire étant devenue à peu près nulle par suite de déplétions sanguines, la fièvre tombe tout à fait pour ne plus reparaître ou pour se convertir en fièvres intermittentes à accès distincts ; ou bien, la congestion des organes se répétant avec violence, tantôt il survient des paroxysmes pernicieux, et alors les malades sont emportés en quelques heures ; tantôt l'irritation se fixe dans les tissus, et alors on a des fièvres typhoïdes si le cerveau et la muqueuse gastro-intestinale sont les organes phlegmasiés, des fièvres (pseudo continues) délirantes ou comateuses, selon que l'affection des méninges ou celle du cerveau devient prédominante.
Ainsi se balancent ces affections, tour à tour continues et intermittentes sous l'influence du traitement jusqu'à la saison des fortes chaleurs, époque à laquelle on chercherait en vain à Bône la rémittence et la subintrance saisissables encore à Alger et surtout en Corse. Mais à Bône, dès la fin de juin, les affections se divisent en deux grandes sections, les intermittentes et les continues, si l'on s'en rapporte aux symptômes.
Cependant, par une analyse sévère de ces symptômes on peut échapper encore à cette erreur, averti surtout que l'on est par la marche des maladies des mois précédents. On arrive à reconnaître que souvent ces gastro-céphalites, actuellement continues, n'ont pas été telles dès l'origine ; on découvre qu'elles ont été d'abord des fièvres intermittentes et que ce n'est qu'au deuxième ou troisième accès que, la réaction circulatoire ne tombant plus, il n'y a pas eu intermittence ; on ne trouve même plus cette rémittence obscure que, d'après la nature des affections, on pourrait espérer et qu'on observe encore dans les pays où les causes morbides sont moins actives.
Dès les premiers jours de juin, l'occasion de constater la certitude des propositions que j'avance s'était déjà souvent présentée dans nos salles. Dès cette époque aussi, comme pour nous faire saisir les liens qui rattachent entre elles ces affections intermittentes et continues, un grand nombre d'hommes atteints de fièvre tierce nous disait que le premier accès avait été simple, mais que le second s'était accompagné de violents maux de tête, d'envies de vomir, de vomissements, etc., et qu'il avait duré 36 à 40 heures. Ainsi, quelques heures de plus dans la durée de l'accès, et l'on aurait eu une fièvre continue ou rémittente, c'est-à-dire que, dans ce dernier cas, le moins grave des deux, on aurait eu un paroxysme au lieu d'un accès ; c'est-à-dire qu'au lieu d'une période de froid suivie de chaleur et de sueur, séparée d'un même ordre de symptômes par une apyrexie plus ou moins longue, on aurait eu seulement une exaspération périodique des symptômes, avec ou sans frissons précurseurs. Car, il ne faut pas s'y tromper, ces frissons qui annoncent l'invasion des paroxysmes des fièvres rémittentes manquent presque toujours dans ce pays à l'époque des chaleurs ; exiger leur apparition pour caractériser une fièvre rémittente, c'est s'exposer à des erreurs bien graves.
Et que l'on ne croie pas, non plus, que les affections continues, une fois établies, révèlent en rien dans leurs symptômes leur affinité avec les affections intermittentes. Transporté du nord de la France au milieu de nos salles, un médecin verra dans toutes ces gastro-céphalites des affections vraiment continues et les traitera comme telles. Cette erreur est inévitable, parce qu'il n'y a plus de rémittence, plus de subintrance, plus de paroxysmes saisissables.
Si ce que j'avance paraissait hasardé, je renverrais à la lecture de Torti ; je renverrais à la notice de M. Coutanceau sur les fièvres pernicieuses qui ont régné épidémiquement à Bordeaux en 1805. " Dans ces sortes de cas, est-il dit dans cette notice, on pouvait reconnaître quelquefois, dans l'apparition d'un léger frisson ou d'un peu de sueur à des intervalles tantôt réguliers, tantôt irréguliers, les traces obscures d'une intermittence dégénérée ; mais d'autres fois, si l'on n'eût été prévenu à l'avance du caractère intermittent de la maladie, on l'aurait prise pour une fièvre continue ordinaire, avec de simples exacerbations marquées seulement par une augmentation de la fréquence du pouls et la chaleur de la peau. On a vu ces fièvres intermittentes devenir continues, se prolonger un ou deux septénaires sans offrir aucun caractère fâcheux, et se comporter alors comme des fièvres gastriques ordinaires ; mais le plus souvent elles s'accompagnaient très promptement des signes d'une adynamie générale très prononcée ; et, dans ces circonstances fâcheuses, tous les malades qui n'avaient pas été convenablement traités mouraient bientôt avec les symptômes d'une " fièvre putride ou adynamique. " Voilà ce que disait M. Coutanceau en 1809, et la médication convenable dont il veut parler, c'est l'administration immédiate et à hautes doses du quinquina.
Les progrès immenses imprimés à la médecine depuis l'époque où ces lignes ont été écrites faisaient sentir le besoin de soumettre de nouveau à une analyse sévère les faits de cette nature. Eh bien ! La marche qu'ont suivie à Bône les épidémies de 1832 et 1833 a démontré combien ces faits avaient été bien observés ; car, d'une part, les maladies ont eu les mêmes phases ; et, de l'autre, l'analyse est arrivée aux mêmes conséquences. En effet, les hôpitaux ayant été encombrés dès les premiers jours, les malades ne purent plus être admis à temps ; ils arrivaient dans un état toujours fort grave, souvent désespéré. Dans les casernes, dans les hôpitaux, partout on voyait des affections typhoïdes. Il n'était plus possible, au milieu de ce désordre, de saisir les diverses nuances par lesquelles passent les fièvres intermittentes pour devenir des affections continues.
On peut donc dire sous ce rapport que, si la pénurie et l'encombrement des hôpitaux ont, en 1832 et 1833, amené de si déplorables revers, ces malheureuses circonstances n'ont pas été cependant sans utilité, puisqu'elles ont appris ce que deviennent les affections intermittentes du nord de l'Afrique, lorsqu'elles sont abandonnées à elles-mêmes ou combattues par un traitement incomplet.
La lecture de Torti, celle de Baumes, de Gianini, de MM. Coutanceau, Alibert, Bailly, l'expérience des années précédentes que je venais de passer en Corse et à Alger, l'analogie que je trouvais depuis quelque temps entre les affections continues de Bône et celles de ce pays, les renseignements verbaux que j'avais recueillis sur les dernières épidémies, tels étaient les documents sur lesquels je m'appuyais pour dire, dès le mois de juillet : " C'est de l'idée que l'on se formera de ces intermittences, de ces rémittences et de ces fièvres continues, se succédant tour à tour, se remplaçant, se chassant, puis reparaissant, tournant pour ainsi dire dans le cercle annuel ; c'est de la filiation que l'on verra ou non entre ces maladies si diverses en apparences, si identiques pour le fond, que dépendra " le choix d'un traitement vrai ou faux. "
Ainsi, à cet égard, mon opinion était déjà bien arrêtée, au moment où l'épidémie éclata avec toute sa violence, et ce fut, dès lors, par conviction que je fis ce que, dans des circonstances aussi difficiles, on eût été autorisé à tenter comme expériences. Je donnai le sulfate de quinine à haute dose dans tous les cas d'affections continues, excepté dans quelques iléo colites où à tort, je crains, j'ai différé son administration.
Voici l'énumération des affections continues dans lesquelles le sulfate de quinine a été donné pendant le mois de juillet : 98 gastro-céphalites, dont une avec scarlatine, 29 irritations gastro-céphaliques, 7 gastro-entérites aiguës, 5 irritations gastro-intestinales fébriles, 2 gastro-colites, 7 iléo colites folliculeuses (diarrhée), 2 iléo colites hémorragiques (dysenterie), une pneumonie, une pleurite, une bronchite, une congestion pulmonaire, 4 cas de céphalalgie, 21 irritations encéphaliques, enfin 13 encéphalites : en tout, 192 affections aiguës continues.
De tous ces cas, aucun n'a passé à l'état typhoïde ; tous, sauf quelques exceptions fort rares, ont été jugés en quelques jours. Mes cahiers de visites constatent que presque constamment, le troisième ou le quatrième jour au plus tard, les malades ont commencé à manger quelques aliments légers. Bien plus, le régime a dû être brusqué, porté en quelques jours aux trois quarts de la portion.
Pressé par le nombre des malades entrants, restreint dans celui des places que j'avais à leur donner, je faisais marcher le régime par sauts et par bonds.
Cependant, malgré ces circonstances défavorables, aucune des 98 gastro-céphalites du mois de juillet (laissons de côté les affections moins graves), aucune, dis-je, n'est devenue typhoïde ; 5 d'entre elles se sont terminées par la mort. Sur ces 5 morts, deux ont succombé le lendemain de leur entrée à l'hôpital, l'un dans un état algide, l'autre dans un paroxysme comateux; le troisième fut emporté par un accès algide le quatrième jour ; les deux derniers moururent d'une colite chronique, l'un au mois de septembre, l'autre au mois d'octobre. Tous les autres cas ont eu une issue heureuse ; la solution a été instantanée, la convalescence excessivement prompte et franche.
Ces faits décidaient la question ; nous étions dans le vrai ; le choix du traitement n'était plus douteux.
Voici une observation qui fera connaître quel était ce traitement ; j'aurais craint de la présenter avant d'avoir exposé mes résultats cliniques. Je la prends parmi celles que j'ai recueillies au mois d'août, parce qu'alors mon traitement était arrêté d'une manière plus fixe que dans les mois précédents.
PREMIÈRE OBSERVATION. - Un soldat du 59e, âgé de 25 ans, entre pour la première fois à l'hôpital le 8 août, au 2e jour d'une gastro-céphalite aiguë excessivement intense.
Je prescrivis de suite une saignée du bras de 15 onces, 40 sangsues à l'épigastre et 20 sangsues sur le trajet des jugulaires ; diète, limonade. Le 9, à la visite du matin, la réaction n'était pas entièrement tombée; mais l'état du pouls, celui de la peau et tous les autres symptômes dénotaient une rémission que l'on pouvait regarder comme l'indice d'une rémittence ou d'une intermittence prochaines ; c'était, selon moi, une gastro-céphalite continue, qui devenait fièvre intermittente ou rémittente (diète, limonade, 24 grains de sulfate de quinine en potion à prendre de suite, en une seule fois).
Une apyrexie complète s'établit pendant la journée. Le 10, au matin, cette apyrexie durait encore ; je prescris néanmoins une nouvelle potion de 24 grains de sulfate de quinine, dans la crainte que la fièvre, pouvant être tierce, ne revînt dans la matinée même. Mais il n'y eut pas de fièvre non plus ce jour-là, et la convalescence se fit très rapidement.
Le 18, cet homme mangeait les trois quarts de la portion. Voilà un exemple bien remarquable de ces gastro-céphalites à symptômes si violents, qui se terminent en quelques heures ; et cela avec l'administration du sulfate de quinine à haute dose, pendant que la fièvre dure encore.
Telle fut à peu près la médication que j'opposai dans l'année à 295 gastro-céphalites. Plus tard même je donnai le sulfate de quinine immédiatement après la saignée et, dans certaines circonstances, avant toute déplétion sanguine, parce que plusieurs hommes avaient été emportés par des paroxysmes pernicieux quelques heures après l'ouverture de la veine.
Sur les 295 gastro-céphalites traitées de cette manière j'ai eu 12 morts, c'est-à-dire 1 sur 24.
Eh bien !que l'on applique maintenant ce traitement aux gastro-céphalites du nord de la France, obtiendra-t-on les mêmes résultats? Je ne le pense pas. On aura des affections typhoïdes presque constamment mortelles et, si je ne me trompe, la plupart des gastro-céphalites le deviendront. On aura des convalescences longues, difficiles ; loin de pouvoir accorder des aliments dès le troisième jour, on aura presque toujours encore de la fièvre. Jamais on ne pourra, comme je l'ai fait, militariser le régime, s'il est permis de s'exprimer ainsi. Des rechutes viendront à chaque instant contrarier, retarder la convalescence. Ce sera alors une gastro-entérite nouvelle, d'une durée plus ou moins longue, tandis que nos rechutes sont des accès, tantôt sous le type quotidien, tantôt sous le type tierce.
Si donc on peut administrer le sulfate de quinine avec tant de hardiesse sans avoir de fièvres typhoïdes; si donc la solution de la maladie est si prompte, la convalescence si franche ; si les rechutes sont des fièvres intermittentes, que faut-il conclure de tous ces faits? Il faut en conclure, selon moi, que les gastro-céphalites de ce pays ne sont pas des affections vraiment continues, affections dans lesquelles le sulfate de quinine donnerait tant de fièvres typhoïdes ; dans lesquelles, en général, l'apyrexie dure plusieurs jours, malgré les déplétions sanguines les plus larges; dans lesquelles la température ne s'élève que par degrés presque insensibles; dans lesquelles la convalescence exige tant de précautions ; dans lesquelles les rechutes enfin ne sont ni de simples accès, ni des fièvres intermittentes, mais une invasion nouvelle d'une nouvelle gastro-céphalite.
On voit par là de quelle haute importance était la détermination de la nature de ce genre d'affections, et quelle immense influence devait avoir sur les résultats le choix d'un traitement si opposé à celui des affections continues. Mais, malgré l'intérêt que j'attache à cette question, je l'abandonne pour exposer quelques considérations sur des maladies plus faciles à caractériser, sur les fièvres franchement intermittentes.
Sur les 3,765 malades que j'ai reçus dans mes salles, 2,354 (les deux tiers) étaient atteints d'affections intermittentes bien nettement dessinées. Sur ces 2,354 affections intermittentes, j'ai noté 2,338 fièvres des principaux types, le quotidien, le tierce, le quarte. Sous le rapport de la fréquence, les fièvres de ces trois types se sont présentées dans les proportions suivantes : 1,582 quotidiennes, 730 tierces et 26 quartes.
L'immense différence qui existe entre les fièvres quotidiennes et les fièvres tierces est vraiment remarquable: 1,582 quotidiennes pour 730 tierces!
Quant aux fièvres quartes, le nombre en est si minime qu'elles semblent ne figurer que pour mémoire. Ces circonstances se rencontrent également à Alger.
Tous les auteurs qui ont écrit sur les fièvres intermittentes ont attaché une importance plus ou moins grande à déterminer les heures auxquelles reviennent le plus souvent les accès. Plusieurs même ont cherché à fonder une nouvelle théorie de l'intermittence sur ces calculs. J'ai pensé que, établies sur une grande échelle, ces données ne seraient peut-être pas sans utilité ; et, des notes que j'ai prises, il résulte que, sur ces 2,338 fièvres intermittentes, 1,652 avaient leurs accès de minuit à midi, 686 de midi à minuit.
J'ai noté que :
1° Sur les 1,582 quotidiennes, 1,089 revenaient de minuit à midi et 493 de midi à minuit;
2° Sur les 730 fièvres tierces, 550 revenaient de minuit à midi et 180 de midi à minuit;
3° Sur les 26 fièvres quartes, 13 revenaient de minuit à midi et 13 de midi à minuit.
En jetant les yeux sur mon tableau, je vois que c'est de 9 heures du matin à midi que revient l'immense majorité des accès ; à dix heures et à midi pour les fièvres quotidiennes, à neuf heures et à dix heures pour les fièvres tierces. Ainsi, je compte 239 quotidiennes à dix heures du matin et 206 à midi, 86 tierces à neuf heures et 87 à dix heures.
Si quelqu'un voulait appliquer aux fièvres intermittentes la théorie des nombres et lui faire jouer un rôle dans l'histoire de ces affections, j'ai remarqué que, sur les 730 fièvres tierces, 369 revenaient les jours pairs et 361 les jours impairs.
Mais, laissons de côté ce genre d'observations pour aborder des questions d'un plus haut intérêt.
Examinons quelles sont les complications des fièvres intermittentes; déterminons la fréquence, le genre, le degré de ces complications.
Sur 2,338 fièvres intermittentes 658 étaient simples; 1,680 étaient compliquées.
Sous le rapport de l'intensité des lésions viscérales, ces complications se sont présentées 1,123 fois au degré d'irritation, 557 au degré d'inflammation.
En étudiant dans quelles proportions ces complications ont varié suivant les types, j'ai trouvé 1,176 fièvres quotidiennes compliquées et 406 simples ; 488 tierces compliquées et 242 simples ; enfin, sur les 26 quartes, 16 étaient compliquées.
Suivant les types, ces complications sous le rapport du degré se sont offertes : 1° sous des nuances irritatives, 761 fois dans le quotidien ; 350 fois dans le tierce ; 12 fois dans le quarte; 2° sous des nuances inflammatoires, 415 fois dans les fièvres quotidiennes ; 138 fois dans les fièvres tierces ; 4 fois dans les fièvres quartes.
Sous le rapport du genre d'organes lésés :
1° Les voies digestives ont été malades 1,078 fois, savoir: isolément, 343 fois; avec l'encéphale, 686 fois ; avec les poumons, 36 fois ; avec l'encéphale et les poumons, 13 fois ; dans cinq cas enfin, il y avait engorgement chronique des viscères abdominaux. Sur ces 1,078 cas, 698 étaient sous formes irritatives, 380 sous forme inflammatoire.
2° La rate a été malade isolément 25 fois.
3° Le péritoine isolément, une fois.
4° L'encéphale a été malade isolément 466 fois, dont 425 fois sous forme irritative et 41 sous forme inflammatoire.
5° La moelle épinière a été malade isolément une fois.
6° Les poumons 103 fois.
7° La plèvre isolément 5 fois.
8° Enfin, un cas de fièvre tierce s'est offert avec complication d'angine couenneuse, sans lésion d'aucun autre viscère.
Suivant les types, les principales de ces lésions (celles des voies digestives et celles de l'encéphale) se sont montrées dans les proportions suivantes :
1° Dans les fièvres quotidiennes, les voies digestives ont été malades 759 fois : 475 fois sous forme irritative, 284 fois sous forme inflammatoire ; l'encéphale, 320 fois : 286 fois sous forme irritative, 34 fois sous forme inflammatoire.
2° Dans les fièvres tierces, les voies digestives ont été malades 314 fois : 220 fois sous forme irritative, 94 fois sous forme inflammatoire ; l'encéphale, 157 fois : 139 fois sous forme irritative, 7 fois sous forme inflammatoire.
3° Dans le type quarte, les voies digestives ont été malades 5 fois : 3 fois sous forme irritative, 2 fois sous forme inflammatoire ; l'encéphale 9 fois, et dans ces 9 cas sous forme irritative.
Ces complications, sous le rapport de l'intensité, ont été en rapport direct avec l'élévation de la température ; elles ont été constamment influencées d'une manière fâcheuse par le vent du désert.
De l'ensemble de ces faits, c'est-à-dire de la fréquence des types, de la détermination des heures auxquelles reviennent le plus souvent les accès, du genre des complications, de leur degré, de leur fréquence suivant les types et les saisons ; de l'ensemble de ces faits, dis-je, on arrive à des conséquences du plus haut intérêt pour la théorie et la thérapeutique des fièvres intermittentes. Mais, avant d'être formulés, de semblables corollaires exigent de longs développements et des travaux auxquels il est impossible de se livrer aux armées. Cependant, je crois pouvoir sans trop me hasarder établir dès maintenant les propositions suivantes qui ne sont que l'expression des faits :
1° Les fièvres intermittentes sont des lésions du système nerveux en général, et plus spécialement de l'axe cérébro-spinal.
2° Sous le rapport anatomique, comme fait constamment observable en premier lieu, ces lésions sont des hyperémies des grands centres nerveux.
3° Légères et localisées dans le système nerveux, sans irritations viscérales, ces hyperémies constituent toujours, sous le rapport anatomique, les fièvres intermittentes simples.
4° Intenses et portées au plus haut degré, elles constituent les formes principales des fièvres pernicieuses, et, entre autres, les formes comateuse, délirante, algide : la forme comateuse, si la congestion s'isole ou au moins prédomine dans la substance blanche et centrale du cerveau ; la forme délirante, si la congestion s'opère sur les membranes d'enveloppe et sur la substance grise de la périphérie de l'encéphale ; la forme algide, si la congestion s'établit sur la moelle épinière.
5° La mort arrive très souvent par l'une de ces trois formes, sans qu'aucun autre viscère se soit irrité sympathiquement. Tout se passe, tout s'isole dans l'appareil cérébro-spinal.
Interrogez les organes digestifs, interrogez les organes respiratoires ; ils sont muets. Analysez les symptômes de chacune de ces formes, et vous verrez où vous conduit cette analyse. Ouvrez les cadavres des hommes qui succombent, et l'anatomie pathologique viendra confirmer les données fournies par la physiologie. Et de même que pendant les accès la physiologie vous avait révélé constamment le trouble des fonctions confiées à la moelle épinière ou au cerveau, de même à l'autopsie l'anatomie pathologique vous démontrera constamment une altération plus ou moins profonde de la moelle épinière ou du cerveau, depuis le degré le plus simple, depuis le degré où la substance nerveuse est simplement injectée jusqu'à celui où elle est ramollie et désorganisée.
6° Les désordres physiologiques des autres organes, leurs lésions matérielles ne sont que des accidents, que des complications ; seuls, ils ne peuvent donner lieu aux phénomènes fondamentaux dé l'état morbide que l'on décrit sous le nom de fièvre intermittente. J'avance ces propositions parce que, d'une part, on trouve constamment à l'autopsie une altération du centre cérébro-spinal, et que souvent cette altération existe seule ; parce que, d'autre part, les lésions des autres viscères n'existent pas toujours et que, lorsqu'on les rencontre, elles ne sont jamais isolées ; on trouve toujours avec elles celle de l'appareil cérébro-spinal.
7° Ainsi, pour moi, il n'y a pas de gastrite intermittente, de gastro-céphalite intermittente, dans le sens que l'on a attaché à ces expressions. Il n'y a, dans ces faits, que des congestions irritatives périodiques, subordonnées au retour des phénomènes nerveux, de ces phénomènes qui se passent principalement dans l'axe cérébro-spinal.
8° Dans les premiers accès, ces congestions secondaires sont ordinairement très faibles et se dissipent dans l'intervalle d'un accès à l'autre, d'où apyrexie complète, sans désordre fonctionnel des voies digestives ou respiratoires; de même que, dans les fièvres simples, il n'existe ni faiblesse dans les membres, ni céphalalgie lorsque la congestion des centres nerveux se dissipe également.
9° Lorsque les accès se sont répétés plusieurs fois, lorsque surtout ils reviennent sous le type quotidien, chacun d'eux laisse dans les viscères quelques traces anatomiques de congestions. Bientôt les capillaires ne peuvent plus se débarrasser du sang que leur apporte chaque accès; bientôt les tissus ne peuvent plus résister à la congestion sans cesse renaissante qui les fatigue, et il arrive de là que l'irritation fixée enfin anatomiquement se traduit par des symptômes plus ou moins continus, d'où prolongation de la réaction, c'est-à-dire des phénomènes fébriles, c'est-à-dire de la soif, de la rougeur de la langue, de la céphalalgie, de la chaleur de la peau; d'où, en un mot, tous les symptômes d'une gastro-entérite, d'une gastro-céphalite, d'une pneumonie, etc., suivant les organes surirrités.
Voilà comment se déroule cette série d'accidents ; voilà comment, d'une simple congestion pendant les accès, les irritations viscérales arrivent par degrés, et par le fait seul de la répétition des accès, à devenir, sous le rapport anatomique, une inflammation.
J'ai suivi tous ces progrès, j'ai trouvé toutes ces nuances sur les cadavres, depuis les cas nombreux où l'on ne rencontre dans la muqueuse digestive qu'une simple congestion qui se dissipe dans l'eau au bout de quelques minutes, jusqu'à ceux beaucoup plus rares où l'on observe les traces de l'inflammation la moins équivoque, cette rougeur qui résiste à la macération.
10° Il est un fait de la plus haute importance à signaler dans l'histoire des fièvres intermittentes, c'est que les irritations, même celles qui sont assez peu intenses pour ne pas persister dans l'intervalle des accès, donnent lieu à des symptômes aussi tranchés, aussi violents que ceux des gastro-céphalites aiguës.
Je dis que ce fait est de la plus haute importance, parce que, si l'on s'en laisse imposer par les symptômes, on verra des inflammations là où il n'y a qu'une congestion irritative, et l'on craindra d'administrer le sulfate de quinine dans la crainte d'exaspérer la gastro-entérite, tandis que c'est le seul moyen de la prévenir, c'est-à-dire de s'opposer au retour des accès, au renouvellement de la congestion, à sa prolongation, à son implantation dans les tissus.
Si l'anatomie pathologique ne démontrait la vérité de ces propositions, je demanderais comment expliquer autrement le succès du traitement que j'ai opposé à ces affections et dont voici un exemple.
DEUXIÈME OBSERVATION. - Un soldat de la légion étrangère, âgé de vingt-neuf ans, assez bien constitué, entra à l'hôpital le 11 décembre, quatrième jour d'une fièvre quotidienne avec gastro-céphalite, et dont les accès revenaient à midi.
Il était dans l'accès, lorsque je le vis à la visite du soir, peu d'heures après son arrivée ; il présentait les symptômes d'une gastro-céphalite intense. (Diète, limonade, saignée de bras de quinze onces ; trente sangsues à l'épigastre; 24 grains de sulfate de quinine en potion, à prendre en une fois, immédiatement après la saignée).
Le 12 au matin, apyrexie. (Diète, limonade, 24 grains de sulfate de quinine en potion, à prendre en une fois comme la veille.)
Point d'accès, point de céphalalgie dans la journée.
Le 13, le malade est tout à fait bien. (Deux pommes cuites matin et soir, limonade.)
Convalescence rapide; cet homme sort le 23, après avoir mangé les trois quarts de la portion pendant cinq jours.
Ainsi, comme on le voit, j'en étais venu à donner le sulfate de quinine lorsque la réaction était encore dans toute sa force, lorsque les symptômes de gastro-entérite étaient dans toute leur violence.
Eh bien! si l'altération anatomique avait été en rapport avec les symptômes, s'il y avait eu dans les tissus l'altération des gastro-entérites aiguës comme nous en observions les symptômes, loin d'obtenir presque constamment l'apyrexie en quelques heures, n'eussions-nous pas au contraire activé l'inflammation, prolongé la fièvre en déposant le sulfate de quinine sur une membrane enflammée ? N'eussions-nous pas fait d'une congestion passagère intermittente une lésion fixe, permanente, une gastro-entérite aiguë?
Enfin, sur 250 fièvres intermittentes accompagnées de gastro-céphalites et traitées d'après ces principes, j'ai perdu 11 hommes, c'est-à-dire 1 sur 2.
Il est à remarquer que les 11 cas qui se sont terminés par la mort appartiennent tous aux fièvres quotidiennes.
Dans les fièvres pernicieuses, j'ai porté le sulfate de quinine à des doses beaucoup plus élevées encore, comme on peut le voir dans l'observation suivante.
TROISIÈME OBSERVATION. - Un soldat du génie, âgé de 27 ans, fort bien constitué, sorti depuis 15 jours de mon service, où il avait été traité de l'affection endémique, fut apporté dans le coma le plus profond, le 21 janvier, à une heure de l'après-midi, le sixième jour, à ce qu'il nous raconta plus tard, d'une fièvre quotidienne dont les accès, accompagnés de violents maux de tête, revenaient à 11 heures du matin. (Prescription : Diète, limonade, saignée du bras de 15 onces, 20 sangsues au front ; deux vésicatoires aux cuisses, deux sinapismes aux jambes; 40 grains de sulfate de quinine en potion ; 60 grains dans un quart de lavement amylacé opiacé.)
Sous l'influence de cette médication le coma diminua promptement ; dans la soirée, le malade avait les yeux ouverts, mais il ne paraissait pas comprendre encore ce qui se passait autour de lui. (Fomentations froides sur la tête, 24 grains de sulfate de quinine en potion.)
Le 22, à la visite du matin, le coma est entièrement dissipé ; mais les réponses sont lentes, la peau a sa chaleur naturelle. La langue est humide et rosée, le pouls nerveux. (Diète, limonade, 24 grains de sulfate de quinine.)
Point d'accès dans la journée ; le mieux fait des progrès rapides.
Le 23, le malade est tout à fait bien ; cessation du sulfate de quinine ; bouillon le soir.
Le 24, bouillon tout le jour.
Le 25, bouillon et deux pommes cuites.
Le 31, cet homme était à la demi-portion ; il sortit le 16 février, après avoir mangé les trois quarts pendant une dizaine de jours.
Voilà un cas des plus graves dans lequel cependant le malade a pu être remis au bouillon dès le surlendemain de son entrée ; voilà un cas dans lequel 148 grains de sulfate de quinine ont été donnés par la bouche et par le rectum en moins de 20 heures ; voilà un cas dans lequel un homme passe, en quelques heures, d'un état voisin de la mort à une convalescence complète. Pour faire sentir toute la puissance de cette médication, je me contenterai de dire que pendant le seul mois de janvier 8 hommes furent apportés dans mes salles, dans des accès comateux et dans un accès délirant ; que tous furent soumis au même traitement; que tous furent sauvés à l'exception d'un seul; et que, à de légères nuances près, les choses se passèrent comme dans l'observation que je viens de rapporter.
Dans les fièvres algides, j'associai au sulfate de quinine l'éther que je donne quelquefois à la dose de plusieurs gros.
Je ne me dissimule pas ce qu'il y a d'étrange dans cette médication. Je sais avec quelle prévention elle doit être accueillie.
Mais, pour la juger, il faut se rappeler quelle marche ont suivie les épidémies de 1832 et de 1833 ; il faut se rappeler qu'avec ce traitement nous avons prévenu les fièvres typhoïdes, si fréquentes les années précédentes ; il faut se rappeler que, de un mort sur trois et demi, nous avons ramené la moyenne à un sur vingt; et je crois que, dans les questions de cette nature, on peut invoquer les résultats; on peut prendre les chiffres comme le critérium d'un traitement, lorsque surtout ce traitement a été appliqué à des masses et qu'il s'appuie sur l'expérience de plusieurs années.
Un de nos grands maîtres a dit quelque part :
" Rapportez-moi vos histoires quand vous voulez me convaincre de l'utilité d'un moyen que ma raison réprouve. "
Eh bien ! Ce n'est pas une longue série de tâtonnements et d'épreuves ; c'est en luttant sans cesse contre mes opinions médicales; c'est irrésistiblement entraîné par les circonstances et la gravité des maladies ; c'est dominé par une impérieuse nécessité, que je fus amené à cette méthode de traitement que j'étais loin d'employer d'une manière aussi active pendant les premiers mois de mon séjour à Bône.
Mais, au mois de juillet, des morts promptes, rapides, imprévues, succédaient à des accidents peu graves en apparence, lors de l'entrée des malades à l'hôpital; les fièvres les plus simples devenaient promptement pernicieuses.
Je retrouvais bien dans ces redoutables affections les caractères fondamentaux des maladies que j'avais traitées à Alger en 1833 ; j'employais la même médication ; pourquoi donc ces insuccès ? Pourquoi ces morts rapides comme la foudre? Pourquoi ces fièvres pernicieuses en si grand nombre?
Je pensai que ces accidents si graves et si multipliés tenaient à ce que nos malades venaient du centre du foyer d'infection (camps et postes extérieurs); je pensai qu'il fallait pour les prévenir proportionner l'activité de la médication à l'intensité des causes. Ce fut alors que je me décidai à augmenter la dose de sulfate de quinine; je la portai à 24 grains là où auparavant je ne la portais qu'à 16.
Vers cette époque, également frappé de l'affaissement profond qui succédait presque immédiatement aux déplétions sanguines, de la promptitude avec laquelle les symptômes d'algidité se déclaraient chez les hommes auxquels je faisais, comme au mois de juin, pratiquer de larges saignées, je dus modifier ce point de ma thérapeutique. Dès ce moment mes saignées dépassèrent rarement 15 onces; je n'allais au delà que lorsque les principaux viscères étaient congestionnés simultanément.
Après une saignée de 12 à 15 onces, je recourais avec plus de confiance aux applications de sangsues qu'à une seconde ouverture de la veine, que je ne renouvelais plus qu'avec beaucoup de réserves et même avec une espèce de répugnance.
C'est aussi à dater de ce moment que dans presque tous les cas, immédiatement après la saignée du bras, et sans attendre comme auparavant que la réaction circulatoire fût tombée, je fis prendre le sulfate de quinine à la dose de 24 et quelquefois de 40 grains. Plus tard même, il m'arrivait assez souvent de l'administrer avant toute déplétion sanguine, car j'en étais venu au point de craindre une prostration d'autant plus prompte et plus forte que la réaction elle-même était plus prononcée ; ou, si l'on aime mieux, que les symptômes de gastro-céphalite étaient plus intenses.
Sous l'influence de cette médication, les maladies changèrent de face ; les accès et les paroxysmes pernicieux furent de suite et moins nombreux et moins graves; la mortalité, qui m'avait effrayé d'abord, s'arrêta.
Par l'emploi de cette médication, j'ai aussi, je crois, décidé un grand fait : c'est que, loin de déterminer les engorgements des viscères abdominaux, les hydropisies, les diarrhées, etc., le sulfate de quinine les prévient, en s'opposant au retour des accès. C'est, il n'en faut pas douter, la répétition des accès que l'on doit accuser seule de ces accidents consécutifs qui, à la fin des épidémies de fièvres intermittentes, viennent enlever les malades que les accès pernicieux avaient épargnés.
J'affirme que, à part quelques colites développées principalement sous l'influence de la constitution médicale des mois d'automne, ces accidents étaient à peu près inconnus dans mes salles.
Je résume les considérations générales que je viens d'exposer et je dis :
1° Les affections continues du nord de l'Afrique, spécialement celles de Bône, sont des fièvres intermittentes et rémittentes, dont les accès ou les paroxysmes ont cessé d'être distincts.
2° Traitées par l'administration immédiate, et à haute dose, du sulfate de quinine, en même temps que par les saignées, les gastro-céphalites du Nord de l'Afrique s'arrêtent en quelques heures.
3° Traitées parles déplétions sanguines seulement, ces gastro-céphalites passent fréquemment typhoïdes dans les cas les plus heureux, c'est à dire lorsque les malades ne sont pas emportés dès les premiers jours par des paroxysmes pernicieux.
4° A Bône et à Alger les fièvres quotidiennes sont beaucoup plus fréquentes que les fièvres de tout autre type.
5° C'est de 9 heures du matin à midi que revient l'immense majorité des accès. .
6° Les fièvres intermittentes, sous le rapport anatomique, sont des hyperémies des grands centres nerveux.
7° Légères, ces hyperémies constituent les fièvres simples ; portées au summum, elles constituent plusieurs variétés de lièvres pernicieuses.
8° Les irritations et inflammations viscérales qui accompagnent les premiers accès sont de simples congestions; ce n'est que par degrés que ces congestions deviennent des inflammations.
9° Le seul moyen de prévenir le passage de ces congestions actives à l'inflammation, c'est l'administration immédiate et à haute dose du sulfate de quinine, qui agit en s'opposant au retour des accès.
10° Enfin, c'est aussi par cette administration immédiate et à haute dose du sulfate de quinine que l'on prévient les accidents consécutifs, tels que l'engorgement des viscères abdominaux, les hydropisies, les diarrhées.
1) Mémoire lu à l'Académie de médecine le 30 mai 1835.
2) Le 1er janvier 1834, il restait à l'hôpital 33 hommes de l'année précédente; c'est ce qui fait que le chiffre des morts et des sorties réunies dépasse celui des entrées de l'année; il en est de même en 1833 relativement à 1832.
A SUIVRE
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L'IMMORTALITÉ
par Lamartine
Envoyé par Bartolini
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Cette contemplation sur les destinées de l'homme s a été adressée en octobre ou novembre 1817 à Elvire mourante. Le poète, malade lui aussi, médite sur les conditions misérables de la vie, mais espère que la mort ouvre les portes d'un monde meilleur où les âmes se rejoignent par delà le tombeau.
Le soleil de nos jours pâlit dès son aurore;
Sur nos fronts languissants à peine il jette encore
Quelques rayons tremblants qui combattent la nuit :
L'ombre croit, le jour meurt, tout s'efface et tout fuit.
Qu'un autre à cet aspect frissonne et s'attendrisse,
Qu'il recule en tremblant des bords du précipice,
Qu'il ne puisse de loin entendre sans frémir
Le triste chant des morts tout prêt à retentir.
Les soupirs étouffés d'une amante ou d'un frère
Suspendus sur les bords de son lit funéraire,
Ou l'airain gémissant, dont les sons éperdus
Annoncent aux mortels qu'un malheureux n'est plus!
Je te salue, ô Mort! Libérateur céleste,
Tu ne m'apparais point sous cet aspect funeste
Que t'a prêté longtemps l'épouvante ou l'erreur;
Ton bras n'est point armé d'un glaive destructeur,
Ton front n'est point cruel, ton oeil n'est point perfide;
Au secours des douleurs un Dieu clément te guide;
Tu n'anéantis pas, tu délivres! Ta main,
Céleste messager, porte un flambeau divin.
Quand mon oeil fatigué se ferme à la lumière,
Tu viens d'un jour plus pur inonder ma paupière;
Et l'Espoir, près de toi, rêvant sur un tombeau,
Appuyé sur la Foi, m'ouvre un monde plus beau.
Viens donc, viens détacher mes chaînes corporelles!
Viens, ouvre ma prison; viens, prête-moi tes ailes!
Que tardes-tu? Parais; que je m'élance enfin
Vers cet Être inconnu, mon principe et ma fin!
Qui m'en a détaché? Qui suis-je, et que dois-je être?
Je meurs, et ne sais pas ce que c'est que de naître.
Toi qu'en vain j'interroge, esprit, hôte inconnu,
Avant de m'animer, quel ciel habitais-tu?
Quel pouvoir t'a jeté sur ce globe fragile?
Quelle main t'enferma dans ta prison d'argile?
Par quels nœuds étonnants, par quels secrets rapports,
Le corps tient-il à toi comme tu tiens au corps?
Quel jour séparera l'âme de la matière?
Pour quel nouveau palais quitteras-tu la terré?
As-tu tout oublié? Par delà le tombeau,
Vas-tu renaître encor dans un oubli nouveau?
Vas-tu recommencer une semblable vie?
Ou dans le sein de Dieu, ta source et ta patrie,
Affranchi pour jamais de tes liens mortels,
Vas-tu jouir enfin de tes droits éternels?
Oui, tel est mon espoir, ô moitié de ma vie!
C'est par lui que déjà mon âme raffermie
A pu voir sans effroi sur tes traits enchanteurs
Se faner du printemps les brillantes couleurs;
C'est par lui que, percé du trait qui nie déchire,
Jeune encore, en mourant, vous me verrez sourire,
Et que des pleurs de joie, à nos derniers adieux,
A ton dernier regard brilleront dans mes yeux.
" Vain espoir! " s'écriera le troupeau d'Epicure
Et celui dont la main disséquant la nature,
Dans un coin du cerveau nouvellement décrit,
Voit penser la matière et végéter l'esprit.
Insensé, diront-ils, que trop d'orgueil abuse,
Regarde autour de toi : tout commence et tout s'use
Tout marche vers un terme et tout naît pour mourir :
Dans ces prés jaunissants tu vois la fleur languir;
Tu vois dans ces forêts le cèdre au front superbe
Sous le poids de ses ans tomber, ramper sous l'herbe;
Dans leurs lits desséchés tu vois les mers tarir;
Les cieux même, les cieux commencent à pâlir;
Cet astre dont le temps a caché la naissance,
Le soleil, comme nous, marche à sa décadence,
Et dans les cieux déserts les mortels éperdus
Le chercheront un jour et ne le verront plus!
Tu vois autour de toi dans la nature entière
Les siècles entasser poussière sur poussière,
Et le temps, d'un seul pas confondant` ton orgueil,
De tout ce qu'il produit devenir le cercueil.
Et l'homme, et l'homme seul, ô sublime folie!
Au fond de son tombeau croit retrouver la vie,
Et dans le tourbillon au néant emporté,
Abattu par le temps, rêve l'éternité! "
Qu'un autre vous réponde, ô sages de la terre!
Laissez-moi mon erreur; j'aime, il faut que j'espère;
Notre faible raison se trouble et se confond.
Oui, la raison se tait; mais l'instinct vous répond.
Pour moi, quand je verrais dans les célestes plaines
Les astres, s'écartant de leurs routes certaines,
Dans les champs de l'éther l'un par l'autre heurtés,
Parcourir au hasard les cieux épouvantés;
Quand j'entendrais gémir et se briser la terre;
Quand je verrais son globe errant et solitaire,
Flottant loin des soleils, pleurant l'homme détruit,
Se perdre dans les champs de l'éternelle nuit;
Et quand, dernier témoin de ces scènes funèbres,
Entouré du chaos, de la mort, des ténèbres,
Seul je serais debout : seul, malgré mon effroi,
Etre infaillible et bon, j'espérerais eu toi,
Et, certain du retour de l'éternelle aurore,
Sur les mondes détruits je t'attendrais encore!
Souvent, tu t'en souviens, dans cet heureux séjour
Où naquit d'un regard notre immortel amour,
Tantôt sur les sommets de ces rochers antiques,
Tantôt aux bords déserts des lacs mélancoliques,
Sur l'aile du désir, loin du monde emportés,
Je plongeais avec toi dans ces obscurités.
Les ombres; à longs plis descendant des montagnes,
Un moment à nos yeux dérobaient les campagnes;
Mais bientôt, s'avançant sans éclat et sans bruit,
Le choeur mystérieux des astres de la nuit,
Nous rendant les objets voilés à notre vue,
De ses molles lueurs revêtait l'étendue.
Telle, en nos temples saints par le jour éclairés,
Quand les rayons du soir pâlissent par degrés,
La lampe, répandant sa pieuse lumière,
D'un jour plus recueilli remplit le sanctuaire.
Dans ton ivresse alors tu ramenais mes yeux
Et des cieux à la terre et de la terre aux cieux :
" Dieu caché, disais-tu, la nature est ton temple!
L'esprit te voit partout quand notre oeil la contemple;
De tes perfections, qu'il cherche à concevoir,
Ce monde est le reflet, l'image, le miroir;
Le jour est ton regard, la beauté ton sourire;
Partout le coeur t'adore et l'âme te respire;
Éternel, infini, tout-puissant et tout bon,
Ces vastes attributs n'achèvent pas ton nom;
Et l'esprit, accablé sous ta sublime essence,
Célèbre ta grandeur jusque dans son silence.
Et cependant, ô Dieu! Par sa sublime loi,
Cet esprit abattu s'élance encore à toi,
Et, sentant que l'amour est la fin de son être,
Impatient d'aimer, brûle de te connaître.
Tu disais; et nos coeurs unissaient leurs soupirs
Vers cet être inconnu qu'attestaient nos désirs :
A genoux devant lui, l'aimant dans ses ouvrages,
Et l'aurore et le soir lui portaient nos hommages,
Et nos yeux enivrés contemplaient tour à tour
La terre notre exil et le ciel son séjour.
Ah! Si dans ces instants où l'âme fugitive
S'élance et veut briser le sein qui la captive,
Ce Dieu, du haut du ciel répondant à nos voeux,
D'un trait libérateur nous eût frappés tous deux,
Nos âmes, d'un seul bond remontant vers leur source,
Ensemble auraient franchi les mondes dans leur course;
A travers l'infini, sur l'aile de l'amour,
Elles auraient monté comme un rayon du jour,
Et, jusqu'à Dieu lui-même arrivant éperdues,
Se seraient dans son sein pour jamais confondues!
Ces voeux nous trompaient-ils? Au néant destinés,
Est-ce pour le néant que nos êtres sont nés?
Partageant le destin du corps qui la recèle,
Dans la nuit du tombeau l'âme s'engloutit-elle?
Tombe-t-elle en poussière? Ou, prête à s'envoler,
Comme un son qui n'est plus va-t-elle s'exhaler?
Après un vain soupir, après l'adieu suprême,
De tout ce qui t'aimait n'est-il plus rien qui t'aime?
Ah! Sur ce grand secret n'interroge que toi!
Vois mourir ce qui t'aime, Elvire, et réponds-moi !
Lamartine - 1817
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NOTES
L'Algérie Agricole, Commerciale et Industrielle
N° 5, mai 1860
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CAUSERIES AGRICOLES ET INDUSTRIELLES
Nous sommes loin du temps où une Princesse royale, entendant le peuple réclamer du pain, pouvait dire de bonne foi et sans cruauté : S'il n'a pas de pain qu'il mange de la brioche; et où plus d'un citadin, même éclairé, prenait volontiers le pain pour une matière première à laquelle il manquait tout au plus un certain degré de coction. Aujourd'hui, grâce à Dieu, il n'en est plus ainsi, le pionnier a fait son oeuvre, les distances qui séparaient l'homme de son berceau ont été supprimées ; et celui-là est désormais en communication directe avec sa mère, qui est toujours, quoiqu'on fasse, l'Agriculture. Aujourd'hui enfin, si le Doge de Venise épousant l'Adriatique représentait pour un peuple ami de la fable un acte d'obédience du chef de l'État à la source d'où devait principalement découler la prospérité pour son pays, nos Empereurs et nos Rois d'aujourd'hui devraient bien épouser la terre, comme la mine inépuisable qui contient, en effet, pour les peuples modernes, tous les éléments de félicité.
Et, à cet endroit, l'union est si complète que la lumière ou les éclipses de la prospérité les nations s'expliquent et se mesurent à la fois par les écarts apportés à ce principe. La preuve en est établie à tous les degrés par l'aspect général de la terre, qui apparaît féconde autour des grands centres de population, même en dehors de toute culture, et qui se laisse voir, au contraire, stérile et nue dans les rayons les plus éloignés de ce centre vivifiant. Si bien enfin que, pour pousser ce principe à ses dernières conséquences, il serait vrai de dire que la consommation engendre la production, et que la faculté de la terre à nourrir les êtres qui la couvrent n'a de bornes que dans l'interruption qui est apportée vis-à-vis d'elle au retour du détritus de ses produits. Ce principe établi, il ne reste pour ainsi dire plus de place dans la discussion que pour un cercle vicieux ; à savoir que si la terre et les animaux manquent à l'homme, c'est que l'homme, à son tour, fait défaut à la terre. Renversez la proposition, et le marais mouillé qui fournit à peine à élaver quelques bestiaux se convertit en pré naturel qui en nourrit vingt; la prairie devient champ, le champ jardin; et, finalement, tout sert à qui a pris soin d'utiliser tous les éléments qui ont été mis en son pouvoir.
A ces termes se réduit le problème posé dans tous les temps aux générations qui se succèdent. Toutes s'en sont préoccupées à leur tour; et aucune plus que la nôtre, grâce à l'initiative de l'Empereur, dont la sollicitude s'étend à tous les intérêts, ne s'est efforcé d'interrompre ce divorce survenu entre la terre et l'homme, au grand dommage de l'un et de l'autre.
Dans cette voie, chacun son système, et l'on peut dire que celui-là seul est mauvais qui n'est pas employé. Le mieux serait sans doute de s'en tenir à la logique rigoureuse qui, devant la nécessité de produire, conseille au moins de ne pas faire abus de ce qui est produit, de façon à ménager, dans cet objet de consommation, et la valeur qu'il représente, et la force reproductive qu'il contient. C'est dans ce sens que quelques économistes ont pu condamner dans la production des bestiaux hâtifs l'appoint insuffisant apporté à la consommation par rapport à la somme d'aliments absorbés et au contingent de travail supprimé. On a compris qu'il s'agit ici des races d'animaux dites en chair, et qui, rebelles au travail, âpres au contraire à la curée, n'en parviennent pas moins, après avoir absorbé une grande quantité de sucs nutritifs, et rendu elles-mêmes un aliment insuffisant, dépourvu d'oxygène, à concilier tous nos suffrages dans les concours institués à cet effet. Combien ne serait-il pas plus logique, prenant pour base les services rendus, de tenir compte à chaque race de ses facultés, et d'en encourager la reproduction, notamment en vue de leur appropriation. J'irai plus loin; et, prenant l'assiette de l'impôt pour le frein nécessaire entre la production qu'il s'agit de guider et la consommation dont il est permis de réprimer les abus, je dirai au travail lui-même qu'il n'est pas sage de se laisser déterminer par un gain actuel supérieur; qu'il convient de prévoir l'avenir, d'aménager ses revenus; et, en définitive, pour s'être privé dans le présent de quelque satisfaction, de se préparer, dans un temps prochain, un véritable bien-être. Pour parler net, me fondant sur ce que tout suffit à tout, je dirai à l'agriculteur qui vend le veau et l'agneau de lait, par le motif que le produit du laitage est à la fois supérieur et immédiat, au lieu que l'élève de ces bestiaux est aléatoire et éloigné : libre à vous d'escompter l'avenir au profit du présent, et de manger, comme on dit, votre bien en herbe; mais attendu, en général, que les viandes de lait sont insapides et incolores, amylacées et purement laxatives: qu'elles ne possèdent enfin aucune propriété quelconque nutritive; qu'il n'est pas un usage auquel elles sont assujetties qui ne puisse être réputé objet de luxe; attendu, dans tous les cas, qu'un pareil usage des produits de la terre annule en germe toute l'utilité qui pourrait en être tirée pour la masse et pour la terre elle-même, condamne ladite vente ou annulation de produits; et, par suite, dit qu'il sera imposé, à l'octroi de chaque ville, un impôt proportionnel inverse de l'âge reconnu du sujet sur lequel il porte, et des services qu'il est présumé avoir rendus. Pour le surplus, renvoie l'agriculture à se pourvoir devant les meilleures méthodes de produire et de tirer parti de ces produits.
Mais nous voilà déjà loin de noire objet, qui est de rendre compte d'un livre publié par M. Hachette, et qui répond à un véritable besoin dans l'agriculture.
Notre but était de démontrer tout d'abord, que cette science méritait d'être traitée comme classique, et M. hachette, déjà connu pour ses publications doctrinaires, devait naturellement y joindre celle-ci.
L'Année Agricole (1), tel est le titre sous lequel M. Heuzé, homme compétent s'il en fût en agriculture, a groupé, sous l'égide de M. hachette, toutes les connaissances primordiales ou secondaires qui intéressent à un si haut degré l'agriculture. Division du temps, unités de poids, de mesures, d'espace ; observations météorologiques, diagnostiques du temps, si je puis m'exprimer ainsi, inductions climatériques, nomenclature des espèces, variétés de culture, tout est dans ce livre à son ordre et à sa place, de façon à constituer un code complet d'agriculture et un Vade-mecum de l'agriculteur.
Hâtons-nous donc de proclamer ce livre comme un service rendu à cette branche si intéressante de l'industrie. Toutefois, comme s'il ne devait y avoir en ce monde rien de parlait, n'hésitons pas davantage à formuler un reproche qu'il mérite et qui atteint au but lui-même qu'il s'est proposé : Un livre didactique a apparemment pour but d'énumérer les systèmes et de se prononcer pour celui que l'expérience a démontré être le meilleur. Autrement à quoi sert l'expérience et que devient l'enseignement ? Or, le livre que nous sommes appelé à examiner relate tous les systèmes, mentionne tous les modes de culture, consigne tous les procédés, sans prendre parti pour aucun. Il est éclectique enfin, ce qui équivaut presque à dire sceptique, et cela est d'autant plus déplorable que ce penchant n'est évidemment pas dans sa pensée. Tel qu'il est, l'ouvrage n'en est pas moins un compendium très substantiel où chacun, agriculteur ou autre, peut puiser de très utiles connaissances. Enfin, n'eût-il d'autre mérite que de constituer un cadre, mobile par essence, et partant, susceptible d'être élargi, modifié, complété, nous croirions pouvoir lui promettre un succès complet. Le seul regret que nous ayons à exprimer en finissant c'est que, suivant une habitude peut-être déplorable de la maison qui l'édite, ce livre ne porte pas l'indication du prix auquel il est vendu, réduit que nous sommes dès lors à nous en rapporter à la déclaration de cette maison, et aux termes de laquelle on devrait croire qu'elle a mis cette publication, comme ses devancières, à la portée de tout le monde.
Félix Sorel.
1) L'Année agricole, almanach illustré des Comices, des propriétaires et des fermiers, ou Revue annuelle des travaux agricoles, des études scientifiques, etc., par G. Heuzé, professeur d'agriculture à l'Ecole Impériale de Grignon. 1ère année (1860); Paris, L. Hachette et Cie, rue Pierre Sarrasin, n° 4.
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Alger, le théâtre des Trois Baudets
MANUEL DU PARFAIT VOYAGEUR DES C.F.R.A.
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-------Le parfait voyageur des C.F.R.A. doit être doué de trois qualités principales qui sont : le courage, la résistance et la compressibilité.
Lorsqu'il estimera réunir les qualités indispensables, le parfait voyageur se postera au bord d'un trottoir longeant la ligne, et ceci de préférence en dehors des arrêts prévus.
Averti de l'arrivée du convoi par un léger bruit (comparable à la chute d'une batterie de cuisine qu'on précipiterait d'un cinquième étage, y compris la cuisinière... et la patronne), le parfait voyageur se met à courir d'un pas vif et décidé, vise l'une des grappes humaines suspendues au flanc de la voiture, saisit au passage ce qui dépasse et bondit sur le marchepied, ainsi nommé parce qu'on vous y marche sur les pieds.
Le parfait voyageur considère qu'un Céféra n'est jamais complet tant qu'il n'y est pas monté lui-même, et s'y cramponnera, coûte que coûte, en vertu de cet admirable principe napoléonien : "Le mot impossible n'est pas français."
Une fois sur le marchepied, le parfait voyageur s'y établira solidement afin d'empêcher les autre voyageurs de monter, et surtout de descendre. S'il parvient â se glisser sur la plate-forme le parfait voyageur refusera énergiquement de passer dans le couloir, prétextant qu'il descend à la prochaine, et ceci de station en station jusqu'au terminus.
Le parfait voyageur ne paie jamais. C'est pourquoi il voyage de préférence sur les tampons, ce qui lui permet d'affirmer bien haut : "Moi, le receveur, je m'en tamponne."
Si le parfait voyageur s'est faufilé à l'intérieur de la voiture, il s'établira à l'avant lorsque le receveur se trouvera coincé à l'arrière, et vice-versa.
Si par hasard un receveur d'une souplesse exceptionnelle parvenait jusqu'à lui, le parfait voyageur feindrait de s'intéresser au paysage, jusqu'au moment où le receveur lui frappe sur l'épaule. A ce moment, il se retourne et dit: "Abonné".
Les poux et les punaises appartenant à l'administration des CF.R.A. doivent être laissés dans les voitures. Tout voyageur surpris à emporter un des animaux est passible d'une amende pouvant aller jusqu'au typhus.
Un parfait voyageur ne s'étonnera ni des pannes, ni des déraillements, ni des collisions, ni des menus incidents qui font le charme d'un trajet.
Car il n'oublie jamais qu'un voyage en C.F.R.A. ne peut constituer qu'un divertissement de haute fantaisie... mais que, lorsqu'on est réellement pressé, on va à pied.
Christian VEBEL
un des "Trois Baudets"
ΘΘΘΘΘΩΩΩΩΩΩΩΩΩΩΘΘΘΘΘ
Un brin d’histoire sur le « CEFERA »
Pendant prés de 60 ans, Alger a eu trois réseaux urbains parfaitement indépendants qui desservait jalousement leur territoire en s’ignorant et en présentant pratiquement les mêmes normes techniques pour leurs matériels roulants : voie à écartement de 1,055 m (et non pas de 1 mètre) et tension de 600 volts : les Chemins de Fer sur Routes de l'Algérie, les Tramways Algériens et les Tramways et Messageries du Sahel.
En 1892 est fondée la Compagnie des Chemins de Fer sur Routes de l'Algérie (CFRA) qui entreprirent la construction de trois réseaux à traction vapeur. Pour les algérois se sera « LE CEFERA ».
En 1892 ou 1898 est créée la Compagnie des Tramways Algériens (TA) afin de constituer un réseau purement urbain dans Alger et une longue ligne fut construite, parallèle aux lignes des CFRA, mais à l'intérieur de la ville.
En 1898, les CFRA décidèrent d'électrifier la partie urbaine de la ligne entre les Deux-Moulins et Maison Carrée.
A la même époque était constituée la Compagnie des Tramways et Messagerie du Sahel (TMS) qui entreprenait la construction d'une unique ligne de tramway qui partait de la place du Gouvernement, grimpait par la rue de la Lyre vers Rovigo, jusqu'à la crête d'El Biar.
En 1905, le développement d'Alger sur les collines poussa les CFRA à construire une nouvelle ligne partant du Champ de Manoeuvre. La ligne se dirigeait vers Mustapha, Belcourt, Le Ruisseau et terminait au bourg de Kouba. La rampe très forte entre Le Ruisseau et Kouba nécessitait l'abandon des remorques au Ruisseau.
En 1937, les CFRA reprirent les TMS et remplacèrent les tramways de la ligne d'El Biar.
En 1935, le parc des TA comportait 40 motrices et 60 remorques de conception ancienne.
En 1937/1938, les TA avait équipé toutes les lignes avec le matériel français le plus moderne. Une motrice articulée à deux caisses, reliées entre elles par une partie suspendue, reposant sur deux châssis à essieux avec quatre moteurs de 45 CV permettant une vitesse maximale de 40 km/h. Les portes automatiques à vantaux, comportaient des marchepieds relevables.
Après la guerre, les TA mirent encore en service une nouvelle ligne de trolleybus entre la Grande Poste et Birmandreis avec 5 nouvelles voitures de type VBD. Elles furent suivies en 1949, par 10 VCR.
Pendant la dernière guerre, les tramways des CFRA avaient particulièrement soufferts et nécessitaient des investissements lourds pour leur remise en état. Il fut décidé de généraliser les trolleybus qui remplacèrent progressivement les tramways entre 1946 et 1955.
Le 1er janvier 1959, les TA et les CFRA furent réunis en une Régie Syndicale des Transports Algérois (RSTA). La nouvelle régie farouchement opposée aux tramways, s'empressa d'engager un programme de suppression. Les événements de la fin de 1959 la devanceront : en décembre, des manifestations provoquèrent la suspension des services par tramways qui ne furent jamais remis en totalité en service et officiellement supprimés en janvier 1960.
Après l'indépendance de l'Algérie, les trolleybus disparurent en partie entre 1962 et 1964, une seule ligne aurait continuée de circuler vers Notre Dame d'Afrique jusqu'à 1974 avec 5 trolleybus Berliet VBH.
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RAPPEL La Saint-Couffin !
A UZES le 20 JUIN 2010
Communiqué de l'A.B.C.T
RETENEZ BIEN CETTE DATE, 20 JUIN 2010 ET RESERVEZ-LA
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ROBERT CASTEL RACONTE BAB EL OUED
Envoyé par M. J.L. Granier
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A Aix en provence.
Ceux qui n'étaient pas à Aix ce jour là ne peuvent pas tout comprendre.
Dans la salle nous étions 1200...tous étreints par une profonde émotion, ce qui pourrait vous faire mieux comprendre certains silences, comprendre que les salves d'applaudissements n'étaient pas toujours présentes, au bon moment....
Ecoutez, écoutez-le bien jusqu’à la fin et seulement vous vous ferez une opinion.
Nombreux sont ceux qui vont découvrir des évènements qui ont fait notre histoire....cet après-midi là leur était destiné...
Castel a bien su nous amener du rire aux larmes.....
Patientez pour l’ouverture de la vidéo, merci.
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COMMUNIQUE
Envoyé par M. Francis et Charles
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Le cimetière de Bône, encore !!!
Où sont les Associations sur ce problème déjà soulevé lors de notre voyage en 2005 ?
J.P.B.
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Pour nos chers Amis Disparus
Nos Sincères condoléances à leur Familles et Amis
Envoi de M. Gilbert GODARD
Décès de Mme Charles GODARD
"Chers(es) amis (es),
Bonjour
Ce mois-ci je n'imprimerai pas votre brochure (La Seybouse) car mon père Mr Charles GODARD, qui la lisait avec délectation, ne la lira pas,
Il est décédés le 8 février dans sa 95éme année.
Il est né à Gastu en juillet 1915 et domicilié à Constantine place Baudin jusqu'en 1962.
Il a rejoint son épouse, née à Bône en 1920 et décédée le 22 mars 2009 au Ban Saint Martin (57)
P.S. : Je vous remercie de tout ce que vous fait, car c'était un rayon de soleil pour lui que de lire Notre Journal.
Bien cordialement.
Gilbert GODARD
La Seybouse et tous ses amis présentent leurs sincères condoléances à la famille et que M. Charles Godard repose en paix.
Jean Pierre Bartolini
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MESSAGES
S.V.P., Lorsqu'une réponse aux messages ci dessous peut, être susceptible de profiter à la Communauté,
n'hésitez pas à informer le site. Merci d'avance, J.P. Bartolini
Notre Ami Jean Louis Ventura créateur d'un autre site de Bône a créé une rubrique d'ANNONCES et d'AVIS de RECHERCHE qui est liée avec les numéros de la seybouse.
Pour prendre connaissance de cette rubrique, cliquez ICI pour d'autres messages.
sur le site de notre Ami Jean Louis Ventura
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De M. Jean-Pierre Laporte
Mon adresse : .fr
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DIVERS LIENS VERS LES SITES
M. Gilles Martinez et son site de GUELMA vous annoncent la mise à jour du site au 1er Mai 2010.
Son adresse: http://www.piednoir.net/guelma
Nous vous invitons à visiter la mise à jour.
Le Guelmois
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Avoir et Être.
Envoyé par Chamalo
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Loin des vieux livres de grammaire,
Écoutez comment un beau soir,
Ma mère m'enseigna les mystères
Du verbe être et du verbe avoir.
Parmi mes meilleurs auxiliaires,
Il est deux verbes originaux.
Avoir et Être étaient deux frères
Que j'ai connus dès le berceau.
Bien qu'opposés de caractère,
On pouvait les croire jumeaux,
Tant leur histoire est singulière.
Mais ces deux frères étaient rivaux.
Ce qu'Avoir aurait voulu être
Être voulait toujours l'avoir.
À ne vouloir ni dieu ni maître,
Le verbe Être s'est fait avoir.
Son frère Avoir était en banque
Et faisait un grand numéro,
Alors qu'Être, toujours en manque
Souffrait beaucoup dans son ego.
Pendant qu'Être apprenait à lire
Et faisait ses humanités,
De son côté sans rien lui dire
Avoir apprenait à compter.
Et il amassait des fortunes
En avoirs, en liquidités,
Pendant qu'Être, un peu dans la lune
S'était laissé déposséder.
Avoir était ostentatoire
Lorsqu'il se montrait généreux,
Être en revanche, et c'est notoire,
Est bien souvent présomptueux.
Avoir voyage en classe Affaires
Il met tous ses titres à l'abri.
Alors qu'Être est plus débonnaire,
Il ne gardera rien pour lui.
Sa richesse est tout intérieure,
Ce sont les choses de l'esprit..
Le verbe Être est tout en pudeur
Et sa noblesse est à ce prix.
Un jour à force de chimères
Pour parvenir à un accord,
Entre verbes ça peut se faire,
Ils conjuguèrent leurs efforts.
Et pour ne pas perdre la face
Au milieu des mots rassemblés,
Ils se sont répartis les tâches
Pour enfin se réconcilier.
Le verbe Avoir a besoin d'Être
Parce qu'être, c'est exister.
Le verbe Être a besoin d'avoirs
Pour enrichir ses bons côtés.
Et de palabres interminables
En arguties alambiquées,
Nos deux frères inséparables
Ont pu être et avoir été.
Joli non ?
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