N° 48
Février

http://piednoir.net

Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Février 2006
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Les dix derniers Numéros :
EDITO

LA PAIX DE NOTRE MOI…

    Nous sommes des milliers à désirer retourner voir notre pays de naissance ; revoir nos cimetières ; nos lieux d'enfance, de mémoire, des amis ; visiter aussi ce que notre exil nous a empêcher de connaître.
    Tout cela n'est-ce pas légitime, naturel chez des êtres normalement constitués ? Des êtres faits de chair, de sang, de sensibilité, d'amour, capables de penser, d'analyser les situations d'hier et d'aujourd'hui.

    Je réponds OUI. Mais, alors pourquoi une meute d'énergumènes ne respecte pas ces besoins que d'autres ont pour leur pays, pour eux même. Des besoins de revivre des instants de bonheur ; des besoins de retrouver une sérénité étouffée par l'exil ; besoin de retrouver le sommeil qui leur fait défaut car les rêves même éveillés les empêchent de trouver ce sommeil.

    Pourquoi ceux qui veulent revivre, peut-être pour la dernière fois de leur vie des moments espérés depuis des décennies, n'auraient pas ce droit personnel? Cette liberté de soi et d'en disposer pour soi et non pas pour la communauté ? Oui pourquoi les énervés du bocal leur cassent du sucre sur le dos et les vilipendent ?
    Parce qu'ils ont leurs raisons et qu'ils s'arrogent le droit de les imposer aux autres!
    Voici quelques raisons qui pourraient être comprises mais pas forcément acceptées.
        1) Des souvenirs douloureux qui se respectent mais les empêchent d'avoir le recul nécessaire pour avoir une sereine réflexion. Nous aussi nous avons des souvenirs douloureux, ils seront toujours présents.
        2) Une haine farouche qui se comprend contre les ignobles assassins, mais n'a aucune raison d'être envers les autres, ceux qui ont été comme nous les dindons des farces étrangères et surtout françaises avec le summum de la trahison gaulliste. Une trahison toujours d'actualité et dont certains exilés font toujours le lit ou lèchent les pompes.
        3) Leur incapacité à comprendre que nos principaux et plus féroces ennemis étaient des métropolitains. Qu'ils soient gaullistes ou communistes, ils sont à mettre dans le même sac de la trahison, de la forfaiture et de l'horreur. La principale et véritable responsable de nos malheur est la France, c'est à elle de nous demander pardon et de réparer.
        4) Leur refus d'admettre aussi que chez les P.N., il y avait des traîtres, des gens qui ne pensaient qu'à eux.
        5) Leur refus d'accepter que ces retours ne sont pas des oublis, des affronts fait à nos ancêtres, des repentances, des amans. NON c'est tout le contraire. Ce sont des hommages rendus à nos ancêtres qui ont fait ce pays avec l'aide de ce que la France appelait les " indigènes " dont j'entends très souvent dire nos frères. OUI, il faut le dire, l'administration française était raciste envers tout ce qu'elle ne considérait pas français. Nous aussi, nous en sommes toujours les victimes. Il suffit simplement de consulter les registres d'état civil et voir les annotations en marge : indigène, israélite, musulman, italien, maltais, espagnol, européen. Dés la naissance nous étions marqués du seau de l'injustice, de la discrimination. Nous portons cela comme un symbole étoilé qui se nomme aujourd'hui DZA ou ZZD et autres marques.
        6) Leur refus de voir que la guerre est finie pour nous en Algérie. Qu'il n'y aura plus d'Algérie Française. Bien sur qu'il nous reste des regrets de notre présence " européenne " en Algérie. Là-bas ils ont les mêmes. Regardons les choses en face : si au lieu de vouloir rester à tout prix dans le giron de la France qui nous a trahi, nous avions fait depuis 1945, une Algérie devancière de l'Afrique du Sud, Notre Destin n'aurait pas été le même. OUI, la guerre a été terrible et inutile pour nous tous, les natifs de l'Algérie. Eux, le peuple en Algérie, ils le savent et le regrettent.
    Bien sur on pourrait invoquer d'autres raisons plus mercantiles, mais laissons les à leurs auteurs, nous ne les partageons pas.

    Mesdames et messieurs les juges de nos raisons, qui par votre méconnaissance de la nature humaine ; votre haine viscérale pour ce qui n'est pas vos idées ; votre incompréhension et votre intolérance :
        - Arrêtez de nous insulter. Nous ne sommes pas des traîtres mais de vrais patriotes car nous ne renions pas notre pays de naissance, nous l'aimons.
        - Arrêtez de nous diviser. Ne vous étonnez pas que la très grande majorité ne veuille plus vous suivre dans les associations.
        - Arrêtez de crier sur tous les toits que vous étiez comme des frères avec nos amis restés sur place ; qu'il n'y avait pas de haine ; que nous n'étions pas racistes, ni des colonialistes au terme impropre et déformé par les équarisseurs de l'Algérie et de la France.
        - Ne criez plus, démontrez-le. Faites plutôt la nique à tous ceux qui disent le contraire, ces historiens manipulés par des idéologies félonnes à la France et qui ont fait tuer les nôtres.
        - Arrêtez de vouloir nous inculquer votre manière de vivre et de penser.
        - Laissez vos compatriotes agir selon leurs désirs. Laissez les en paix, Laissez nous tranquilles. La paix de notre moi ne vous concerne pas. Gardez vos rancœurs pour vos ennemis, nos ennemis.

    J'entends déjà les hurlements, les critiques qui me fustigent, les insultes qui vont pleuvoir sur ma tête. Tous les auteurs, ces loups, ils ont sévis, ils séviront encore en disant que je suis intransigeant et intolérable. Je m'en contrefous.
    Cette intolérance qu'ils me reprochent sera toujours très, très inférieure à leur propre intolérance.
    J'accepte certaines insultes, les contradictions, les incompréhensions de certains et pour preuve, vous lirez en fin de gazette la lettre d'un Ami.
    Les insanités teintées de haine ou les menaces n'ont plus de prises sur moi, mais blessent certains de nos compatriotes qui ne les comprennent pas.

    Mesdames et Messieurs les censeurs, rassemblez votre énergie pour vous battre utilement à faire l'unité chez les exilés. Utilisez vos rancœurs contre ceux qui nous bafouent publiquement, y compris les compatriotes qui sont à la solde des pouvoirs.
    Là, nous vous suivrons.

Merci à tous                                   Jean Pierre Bartolini                         

        Diobône,
        A tchao.

    Mon Adresse est : jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr


Aprés votre visite,
(---n'oubliez pas de Cliquer --- )
Pétition contre un traité d'amitié Franco-Algérien baclé.
La pétition est ouverte à tout le monde Pieds-Noirs

VOYAGE A BÔNE/ANNABA
DU 16 au 27 avril 2006

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Par personne pour 12 jours / 11 nuits
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C'est le retour vers notre mémoire, vers nos souvenirs.
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Mon Adresse est : jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
Pour tous renseignements.


MOUSOURI !
N° 2 de Février 1950
de M. D. GIOVACCHINI
Envoyé par sa fille

         Un échappé de la brocante, et un illuminé du racisme, métamorphosé en "émancipé", c'est à dire en niveleur, avec pour mesure la bêtise et la haine !
         Un vulgaire produit du Messalisme, de l'Abbassisme et autres succédanés anti-français
         Il eut son quart d'heure de célébrité le Mousouri ! Pensez donc !
         Alors que le maire de Bône demandait l'approbation du vote d'un secours aux sinistrés des Landes, le MOUSOURI protesta !
         Au nom de qui ! Au nom de quoi !
         Pas au nom de Mahomet ! Mais au nom de tous ces lascars qui voudraient gouverner au lieu et place de la France, afin d'assouvir leur soif d'honneurs et d'argent !
         Le Maire, en l'espèce M. P. désirant se refaire une virginité, protesta contre les paroles de l'envoyé spécial de B. !

         Mais où donc était ce dernier ? L'homme à éclipses s'était absenté habilement ! Tout comme à la salle Borg, en laissant à des comparses le soin de jouer le rôle de figurants.
         Indigènes, amis sincères de la France, ne vous laissez pas leurrer par des diversions!
         MOUSOURI n'est pas un responsable. Ne prenez pas comme cibles, des moulins - à - vent...
         Les coupables ne sont que les chefs de l'U.D.M.A. et du P.P.A. Les vrais coupables sont seulement les gouvernants qui ne prennent pas leurs responsabilités immédiates.
         Et les plus grands punissables sont les Français qui décrochent des mandats électoraux avec leur complicité !
         Nous reparlerons des amis de B. et du Manifeste.
         Il faudra que la vérité éclate aux yeux des plus bornés et des plus indifférents.



Ça qu'on vous a pas dit … !         N° 33
Christian AGIUS
le Maltais de la route de Bugeaud,
y ramasse dans les poubelles de luxe…
ma, tombe de ses morts, c'est la franche vérité !!!


A se taper le cul par terre !
Galouzeau il a décrété l'état d'urgence, après les baroufas d'la banlieue ! Ma, il avait repris tel quel le texte de…….1955, celui qu'il avait été adopté pour………..l'Algérie !
Total : il aurait pu envoyer des C.R.S. dans………l'Aurès !!!
Des fois que le copain Jacques Bouteflika il en aurait eu besoin…


Le secrétaire général des cheminots C.G.T., Didier Le Reste, il est permanent du syndicat depuis 1980, après avoir été contrôleur en dedans les trains.
Zeb ! Considéré comme " personnel roulant ", y peut prendre sa retraite à……..51 ans !


Le pognon des caisses d'épargne il est géré par la Caisse des Dépôts et Consignations.
Celle-la elle finance en ce moment la construction des mosquées……..
Tu conclus ça que tu veux…


Dedans un devoir d'histoire et géographie aux élèves du collège Marthin Luther King dedans les Yvelines :
- Qui a gagné le tour cycliste du Burkina Fasso ?
Diocane, c'est en effet vachement important pour la culture…


Le maire d'une petite ville du Chili, Biritiba-Mirim, il a pondu un arrêté municipal pourquoi les gens y devaient plus mourir, pourquoi le cimitière il était complet…
Ac un additif dessur l'hygiène, la bonne alimentation, etc..
Zotche ! Reusement qu'il était pas à Bône, ce tanoute, aussinon Taddo il aurait fait le chômage !


En 2004, les astronomes y zont repéré un météorite qui se fonçait dessur la terre pour se l'engantcher en 2020 !!!
Zeb !
Comme dix mille bombes d'Hiroshima !
Ma, les calculs y zont été affinés : c'est repoussé à 2036… On respire, diocane !


Le journal " Liberté " il avoue que l'état algérien n'a jamais été aussi riche : 55 milliards de dollars de réserve !!!
Jacques Bouteflika y devrait prêter à son copain Abd el Aziz Chirac pour renflouer un tout petit peu la dette de l'état français des 2000 milliards avoués !!!


Attrape bien tes bretelles : en 2004, 6990 infractions relevées par les machines à sous au bord des routes elles zont pas été sanctionnées !
Dessur ces 6990, 2590 elles zont été faites par des personnels d'ambassades, et 4400 par des flics, des gendarmes, des fonctionnaires de préfecture, de Matignon et de l'Elysée…
Les calamars : comptez-vous !


La conversion de Saint-Paul : Dominique Voynet elle vient de s'enscrire au groupe d'étude " chasse et pêche " au sénat !!!
Une conversion tardive à la fréquentation des tanoutes et des gatarelles…


Un gamin il avait craché dessur la gueule à Sarközy en août 2004, à Aurillac.
La cour d'appel de Riom elle l'a finalement condamné qu'à……….10 zorros d'amende !
Diocanamadone, ça va donner des idées !


Le ministre des transports Dominique Perben, celui de l'injustice Pascal Clément et celui de la défense Michèle Alliot-Marie y zont des jeux de plaques d'immatriculation différents pour leurs bagnoles !
Essaye le coup, et tu verras le reste…


Les hôpitaux colonialistes y sont pluss meilleurs que les hôpitaux des opprimés : y a pas que Jacques Bouteflika qui s'est fait soigné au Val de Grâce.
Son ministre de l'intérieur, Yazid Zehrouni, y s'y est fait greffer un rein…


Azouz Begag, le ministe à Chirac, cui-là qu'il a écrit dedans son livre " le gone du chaaba " …alors on s'encule comme des grands…je sors ma zénana……..etc.. il va se présenter à la mairie de Lyon !
Herriot, réveille-toi…


Les enseignants, presque tous socialo-communistes, y sont quand même pas si tchoutches que ça !...
Le département de Seine-Saint-Denis, le fameux 93 qu'il a fait la baroufa des voitures brûlées en novembre 2005, il est champion des demandes de sorties : 2475 contre…4 en Corse du Sud !…
20% d'illettrés en 6ème, ma…… lucides !

La suite au prochain numéro :
te fais pas de mauvais sang,
J'en ai encore des tas en dedans les tiroirs….

LE PLUSSE DES KAOULADES BÔNOISES (34)
La "Ribrique" de Rachid HABBACHI
Purée de baouèle,
oilà main'nan qu'à raciste, je viens

       L'aut' jour, j'te dis pas quan, j'ai quitté sans oir, comme un aveugue, dare la ville de Dijon en Patosie à cause le froid que diocamadone, avec toute la neige qu'elle est tombée en tapette que nous z'aut' polis, on dit que c'est une bafoune, y m'a venu, ce froid, jusqu'en dedans les osses que moi, comme tout l'monde y sait, j'les z'ai fragines depuis en haut la tête jusqu'en bas les pieds.
       Purée de sa race affoguée, je parle bien sûr d'la race du froid, moi je m'l'aime pas, lui et tous les z'aut' froids qu'y nous viennent des z'aut' pays, surtout ceux-là là du nord et rien que pour ça, j'ai décidé comme ça, tout seul, de me monter avec ceux-là là qu'y veulent, un parti d'estrême chaleur pour mette le froid déhors not' pays d'abord et le reste du monde après, le froid ousqu'y se trouve, même chez Azrine là-bas en enfer et entention les z'oeils, en dedans de ce parti, on va pas s'accepter n'importe qui, surtout pas les gens froids et encore moins Diane, tu sais, celle-là là qu'y en a qu'y s'l'appellent la chesseresse pasque, dedans ce parti, on va qu'à même s'accepter la pluie qu'elle est obligégatoire pasqu'elle doit bessif nous remplir les nappes frénétiques comme ça, on a pas soif l'été.
       On va se combatte et reconduire aux frontières du monde tous les froids sans esception sauf bien sûr les froids bônois que nous z'aut' on s'les fait avec le créponnet et le cornet-sky dessur le Cours que ces froids, diocane, y te calment vite fait bien fait, la plus terribe des fièves intestinanes quan c'est que tu l'as et même quan c'est que tu l'as pas. Ce parti que j'te parle,, il est ouvert à tout l'monde mais oilà, y a une cotisation à payer en été et en été seulement et cette cotisation què c'est ? C'est juste un créponnet à payer à Bône, dessur le Cours et surtout n'as pas peur de venir pasque c'est moi que j'le paye.
       Mes parents les pauv' qu'y sont main'nan à côté le bon dieu et qu'y sont, pour ceux-là là qu'y le savent pas encore, mon père et ma mère, y m'ont donné ça qu'on appelle la bonne inducation ousqu'y faut que j'apprécie à sa juste valeur tout l'monde sans esception et areusement qu'y z'ont jamais parlé du froid, au contraire, y m'ont parlé de chaleur et de respect envers l'aut' que l'aut', c'est pas toi, c'est celui qu'il est en face, y m'ont parlé d'Amour mais entention, pas n'importe laquelle, l'Amour avec une grande " A " dedans son sens le plusse lobne, pas dedans l'interdit comme çui-là là du code de la route, y m'ont parlé aussi d'la différence, celle-là là qu'y a à faire et celle-là là à pas faire et moi, la différence, je m'la fais, entre le chaud et le froid j'ai fais mon choix et diocamadone, je jure dessur la tête du bon dieu qu'à raciste, j'ai venu et pas qu'un peu, que le bon dieu y me lève la vue des z'yeux et depuis quèques jours, on a, avec nous z'aut', le pire ennemi du froid, çui-là là que, gentiment, entre nous, on s'l'appelle le sauvage central.

Rachid HABBACHI

ELLES SONT BIEN BÔNE
Par M. Fernand Bussutil dit OTTO BUS
Envoyé Par Jean Louis Ventura               N°18
ELLES SONT BIEN BÔNE
FERNAND BUS

A tous mes Amis bônois, si douloureusement éprouvés par les événements d'Algérie et dispersés dans tous les coins de France et du Monde, avec mes affectueuses pensées.

F.B.

" FUGIT IRREPARIBILE TEMPUS " (Virgile)
LA DÊCLARATION AMOUREUSE
Au théâtre ce soir

Moi                     - Appelle-là
Augu - (à voix basse)
                     Philomène, 0 Philomène.
Moi                     - (ramassant quelques cailloux, que je jette dans les vitres)
                     Attends ! Quelques cailloux
Philomène               - (ouvrant la funêtre)
                     ma, qui m'appelle ?
Augu                    - Moi, Augu
Philomène               - (élevant la voix)
                     Va-t-en de là, ô fugure d'anchois
                     Ou j'appelle à mon père, je te donne le choix
Augu (auquel je souffle les mots)
                     Je t'en prie Philomène, aspette il faut rester
                     Mets ta bouche au point mort, si c'est pour m'ansulter
                     Le silence il est grand, calme elle est la nature
                     On entend dans la rue, manqu'un bruit de oiture
                     Les vers qui me viendront, je te les donne aouf
                     Pourquoi j'a gros le cœur, le secret y m'étouffe
                     Piqué de toi je suis, ô Philomène en or
                     Descend de la funêtre, ô mon petit trésor.
Philomène - Jamais te m'as parlé, Ô gatarelle en sucre,
Augu - Ton nom dans mon p'tit cœur y sonne comme un grelot
                     Tout le temps y remue, j'en plus et c'est trop.
                     De toi je me rappelle, c'était le premier Mai
                     Tout d'suite que je t'a vu, tout d'suite je t'a aimé
                     Te sortais le matin d'un salon de coiffure,
                     T'y avais un soleil d'or dans ta belle chevelure.
Philomène - Tarrêtes pas, vas-y et fais comme le nègre
                     Ta voix elle est plus douce et c'est plus du vinaigre
Augu - Oui, je me suis pris mon courage à deux mains
                     Je veux un gros baiser, trop tard s'ra demain.
Philomène - Assez ! J'a la tête qu'elle me tourne.
Augu - Atso ! Qu'est c'est un baiser: c'est une confidence
                     Qu'au lieu de te la dire pendant qu'on s'fait une danse
                     Qu'au lieu de te la dire pendant qu'on s'fait une
                     Je me la fais ici sans faire de façons.
                     Je suis un grand timide, ma pas p'tit polisson
                     C'est un secret qu'il prend ta p'tite bouche pour l'oreille
                     Un moment de plaisir, qui s'fait un bruit d'abeille
                     Une cerise que te cueilles, qu'elle a un goût de fleur.
                     C'est si bon que te crois qu'on se respire le cœur.
Philomène - Je tiens plus tsur mes jambes, j'a les pieds nickelés
                     Attends un p'tit moment, que je te jette la clé.
                     (Elle entre brusquement et revient armée d'un vase de nuit dont elle vide le contenu sur la tête d'Augu)
                     Comme je suis une femme, j'sais pas m'servir des poings,
                     Je te fais ce cadeau en guise de shampoing.

LA CONDUITE D'EAU
LE QUARTIER DES CHÈVRES
BÔNE son Histoire, ses Histoires
Par Louis ARNAUD

          Les deux grandes artères du faubourg ont toujours été la rue Sadi-Carnot et l'avenue Garibaldi.
          La rue Sadi-Carnot n'est autre, on vient de le voir, que le commencement du chemin ouvert en 1842 par le Général Randon à travers la forêt de l'Edough pour mieux veiller sur les tribus indigènes et permettre aussi l'exploitation forestière du massif montagneux afin de procurer du bois à l'industrie locale.
          L'avenue Garibaldi c'était la nouvelle dénomination, depuis 1896, de la plus ancienne artère du faubourg, la rue de la Fontaine, dont le nom n'a jamais rien dû au souvenir de notre grand fabuliste.
          Cette vieille rue devait ce nom à la présence, à son début, d'une imposante construction de maçonnerie affectant la forme d'une fontaine, d'où coulait une eau fraîche et limpide.
          Juste en face de cette fontaine, il y avait le café Portelli ou " Café de la Fontaine " dont la vaste salle servait fréquemment à des bals et des réunions qui rassemblaient généralement toute la population du faubourg.
          C'est de chaque côté du café Portelli que se trouvaient les deux bancs taillés dans le granit d'Herbillon que l'on voit aujourd'hui au milieu du square de l'Hôtel de Ville.
          Un seul côté de cette rue était bordé de maisons. L'autre côté était constitué par des haies de cactus limitant les terrains vagues qui la séparaient de la conduite d'eau.
          Par la rue de la Fontaine, on accédait directement au chemin de l'Orphelinat qui en était pour ainsi dire la continuation normale.
          La promenade de l'Orphelinat, le " Tour de l'Orphelinat ", comme il était convenu de l'appeler, commençait toujours par la rue de la Fontaine.

          L'avenue Célestin Bourgoin qu'on appelait alors " La Conduite d'eau ", n'était -pas ouverte aux véhicules. N'étant pas carrossable cette voie n'était nullement passante ; elle était moins une rue, qu'une promenade.
          On y était donc en plein silence et dans une reposante solitude.
          Quel contraste agréable avec sa voisine toute proche la rue de la Fontaine populeuse et bruyante.
          C'était un chemin, à peine empierré, au sol mou sous lequel passait la conduite qui amenait au Château d'eau de la rue d'Armandy, les eaux captées pour l'alimentation de la ville dans le massif de l'Edough.
          Cent soixante-seize sources soigneusement entretenues apportaient leur tribut d'eau fraîche et limpide à une conduite faite de tuyaux de fonte qui dévalait le long du flanc de la montagne jusqu'à l'Oued Forcha d'où partait ensuite la canalisation vers le Château d'eau de la haute ville.
          Les eaux de l'Edough suffisaient à la population de la Ville lorsqu'elle ne dépassait pas trente mille âmes et que les industries locales et le ravitaillement des navires n'avaient que de modestes besoins. Mais lorsque la Ville s'accrut et que le port fut plus fréquenté, il fallut recourir à d'autres sources et aller jusqu'à cinquante-six kilomètres, vers La Calle, pour capter les eaux des sources de Bou-Glès et Bouredine qui assurent actuellement largement les besoins de la Ville.
          Dès lors, la conduite de l'Edough ne fut plus d'une grande utilité.
          Elle fut quelque peu délaissée et les deux tiers des cent soixante-seize sources que l'on avait toujours si jalousement conservées, se perdirent faute des soins habituels, et il ne resta plus qu'une quantité à peine suffisante pour alimenter les besoins du port.
          Car l'eau de l'Edough, qui n'est pas séléniteuse, et, par conséquent, ne détériore pas les tubulures des chaudières, est très recherchée par les navires qui font escale dans notre rade.
          Et, conséquence fatale, on en vint aussi à se désintéresser de la belle et tranquille " Conduite d'eau " Si aimée des vieux Bônois.

          La " Conduite d'eau " commençait tout près du carrefour des rues des Prés-Salés et de la Fontaine pour se terminer tout au pied de la montagne, après avoir traversé, au Pont-Blanc, le chemin de l'Orphelinat.
          Chacune des extrémités de la promenade était fermée par deux longues barres de bois, laissant un passage en chicane.
          Il était impossible à un véhicule ou à un cavalier d'y pénétrer.
          Le chemin était bordé par de beaux et grands arbres qui avaient dû pousser, autrefois, librement, sans ordre, et sans jamais avoir été taillés ou seulement émondés.
          Les espaces qui séparaient les sujets que l'on avait conservés, en abattant les autres, étaient loin d'être symétriques.
          Toutes les essences de la région étaient entremêlées dans cette bordure improvisée.
          Ce beau désordre, s'il n'était pas un effet de l'art, donnait aux lieux un aspect un peu sauvage qui ne manquait pas d'agrément, ni d'une certaine beauté. II avait, au surplus, le mérite de ne pas imposer aux promeneurs l'ennui d'une lassante uniformité dans la couleur des feuillages et l'alignement des troncs.
          Des micocouliers et des frênes voisinaient avec quelques jujubiers aux troncs tordus. Des caroubiers verts sombre, côtoyaient de hauts eucalyptus, enfin des oliviers sauvages tenaient compagnie à des ormes fiers et hautains, sous lesquels plus d'un amoureux devaient avoir attendu en vain.
          Il y avait, sous ces feuillages, plus ou moins denses, des bancs, car la promenade était longue, et ne pouvait être parcourue qu'à pied.
          Aucune maison ne s'élevait le long de la Conduite d'eau. A l'endroit où elle rejoignait le Chemin de Ceinture au Pont-Blanc, se trouvaient seulement les bâtiments d'un moulin à huile et la maison d'habitation de M. Célestin Bourgoin.
          Mais l'entrée du moulin Bourgoin était en dehors de la Conduite d'eau, sur un petit chemin qui porte encore le nom de " Chemin de Mûriers ".
          Célestin Bourgoin fut Maire de Bône pendant huit années, de 1870 à 1878.
          Il ressemblait, étonnamment, au point de vue physique à l'Empereur Napoléon, et il était Républicain, mais peut-être, à la façon de Thiers.
          La presque totalité des terres que traversait la promenade, jusqu'au pied de l'Edough, lui appartenait. Il fit don de la surface nécessaire à la construction de l'hospice Coll, et ses héritiers, bien plus tard, après sa mort, offrirent gratuitement l'emplacement actuellement occupé par l'Eglise du Faubourg et la place qui l'entoure.
          Après le moulin Bourgoin, la " Conduite d'eau " re-prenait de l'autre côté du Pont-Blanc pour aboutir à la maison fontainière, près de laquelle commençaient les " Cinq cents escaliers " créés pour la surveillance et l'entretien de la conduite en fonte et qui, par conséquent, suivaient son trajet d'aussi près que possible contre le flanc de la montagne.
          Les " Cinq cents escaliers " qui sont plus de mille en réalité, constituent le plus grand raccourci pour aller de Bône à Bugeaud.

          C'est tout près du point de départ de ce raccourci qu'est situé l'Hospice, autrefois réservé aux seuls vieillards et incurables, et qui a été transformé en Hôpital civil après les bombardements de 1942-43.
          L'endroit était vraiment idéal pour un hospice de vieillards. Tout était réuni là, pour une telle destination, la nature, le grand air revivifiant, et la fraîcheur de l'atmosphère en été.
          Il avait pu être édifié grâce à la générosité de Célestin Bourgoin qui fit don du terrain nécessaire, et à la munificence d'un certain Salvator Coll, gros propriétaire terrien de la région, dont le nom a servi à désigner cet asile de vieillards.
          La Municipalité, pour marquer à ce bienfaiteur sa reconnaissance, a donné son nom à une rue de la Ville.

          Qui donc était ce Salvator Coll, mécène généreux et grand bienfaiteur de Bône?
          Peu de gens pourraient répondre à cette question.
          On sait, seulement, de façon certaine, que cet homme n'était ni Français, ni Bônois, et qu'il n'était venu se fixer qu'accidentellement, et sans prédilection particulière, dans le pays.
          Arrivé sans but et sans raison apparents, il avait eu l'occasion et les moyens d'acquérir d'immenses étendues de terre dans la région du lac Fetzara et il s'était fixé dans notre ville.
          Il y demeura très longtemps, se mêlant à la vie locale et s'associant, comme on vient de le voir, à son évolution progressive.
          Les œuvres charitables et l'aide à son prochain retenaient surtout son attention.
          Etait-ce la manifestation naturelle d'une inclinaison de son âme, ou bien celle d'un rachat d'une erreur passée ?
          On disait tant de choses sur ce sujet.
          - Avait-il était Colonel de l'armée Carliste ?
          - Avait-il été obligé de fuir à l'étranger ?
          - Nul ne l'a jamais su exactement.
          En tout cas, un beau jour, Salvator Coll a repris sans bruit, le chemin de Majorque, son île natale, et n'a presque jamais plus reparu à Bône, où il avait si longtemps vécu, où il était révéré pour les bienfaits qu'il avait répandus autour de lui pendant son long séjour dans cette ville.
          L'interdiction de rentrer en Espagne avait-elle été levée ?

          Ce qui troublait, dans les mille suppositions que l'on put faire alors, c'était cette arrivée à Bône, brutale, inexpliquée et, après de longues années, ce départ sans retour.
          Salvator Coll est mort dans son pays, sans laisser de descendance directe et indiscutable. Les vicissitudes de son existence l'avaient, paraît-il, contraint à modifier, plus ou moins son identité réelle.
          Sa succession fut l'objet de longs procès devant le Tribunal civil de Bône, ce qui permit aux humoristes d'appeler ces différends : " Les procès des Coll et des faux-Coll "...
          La " Conduite d'eau ", déserte et silencieuse, autrefois si recherchée pour sa tranquille ambiance, et ses frais ombrages, est devenue " l'Avenue Célestin Bourgoin ", pour rappeler le souvenir de l'ancien maire de Bône qui demeurait sur son parcours.


La conduite d'eau
Le chemin des vieillards

          A l'angle que venait former la longue rue du Faubourg avec le Chemin de Ceinture, se trouvait l'huilerie Manuelli, dont le propriétaire, brave et honorable commerçant maltais, faisait partie du Conseil municipal.
          C'était vers la fin du siècle dernier ; les becs de gaz, qui venaient à peine de supplanter les anciens réverbères, avaient été parcimonieusement répartis dans la Ville, et leur clarté falote et vacillante ne parvenait qu'à grand' peine à vaincre l'obscurité, pourtant peu épaisse, de nos nuits bleues.
          L'endroit où était situé le moulin Manuelli était particulièrement désert, et le chemin de ceinture marquait alors la limite de la zone banlieusarde habitée. On y pouvait, le soir venu, facilement faire de fâcheuses rencontres, et il manquait d'éclairage.
          Aussi, le Conseiller municipal du quartier, attentif aux besoins de ceux qui vivaient autour de lui avait-il cru bon, au cours d'une séance du Conseil, d'attirer l'attention de la Municipalité sur cette situation, et de demander l'installation, en cet endroit, d'un " bec de gaz " dont il s'offrait à fournir gratuitement l'huile.
          Le Quartier des Chèvres commençait donc au moulin Manuelli ; et se terminait un peu avant le Pont-Blanc. On appelait ainsi ce petit pont de pierres blanches qui passe sur l'oued Forcha, allant des pentes de l'Edough au Ruisseau d'Or.
          Il y avait là, tout le long de cette partie du Chemin de Ceinture, une véritable cité de baraques en bois, toutes pareilles, élevées d'un étage, que séparaient de tout petits jardins soigneusement entretenus où, seuls, n'étaient cultivés que les légumes strictement nécessaires à la cuisine.
          L'agréable, c'est-à-dire les fleurs, n'était pas joint à l'utile, ce qui suffisait à démontrer la simplicité élémentaire de ceux qui demeuraient là et leur frugalité alimentaire.
          Dans ces baraques placées perpendiculairement au Chemin de Ceinture, et dont la façade principale se tournait vers le jardinet propret, vivaient des familles de Chevriers maltais.
          Au premier étage, auquel on accédait par un escalier, ou plutôt par une échelle extérieure, étaient les chambres, une galerie qui faisait suite à l'escalier courait tout le long de la façade.
          Il était vraiment plaisant de voir, l'après-midi en passant sur la route, les dames de la maison, assises sur cette galerie de bois, occupées aux travaux de couture ou de ravaudage, tandis qu'au dessous, les hommes et les enfants soignaient les chèvres, dont l'étable était formée par le rez-de-chaussée, et ratissaient ou sarclaient le petit potager.
          Tout le monde travaillait dans la maisonnée.
          Ce qui frappait surtout le passant, en dehors de l'originalité de ce village de planches badigeonnées de rose et de bleu pale, c'était l'aspect de propreté et d'ordre qu'offrait tout ce qui pouvait se voir de l'extérieur.
          C'était bien là, la caractéristique des familles maltaises qui s'étaient groupées à l'écart de la Ville et de ses bruits. Ces insulaires méditerranéens étaient heureux d'avoir pu se créer, dans leur exil forcé, une ambiance qui leur rappelait quelque coin de leur île natale.
          Malte ; dont le nom vient du mot grec " melites " qui signifie ; " doux comme le miel ", jouit d'un climat idéal. C'est certainement ce qui lui a valu d'être ainsi dénommée par les anciens navigateurs grecs qui en avaient fait une de leurs escales, habituelles d'abord, puis obligatoire, à cause des établissements qu'ils y avaient créés et des éléments 4mportants, d'origine hellénique, dont était constituée sa population.
          On retrouve, en effet, de forts nombreux exemples de cette pénétration, dans la formation des noms de famille et, bien souvent aussi, dans les traces du type grec que l'on retrouve chez les hommes et surtout chez les femmes de cette île qui atteignent parfois à la beauté parfaite.
          La population de Bône doit énormément à l'apport maltais.
          Dès les premiers jours de l'occupation française, qui assurait la sécurité à tous les habitants de la région, les insulaires Maltais débarquèrent nombreux, sur cette partie du rivage Algérien.
          Ils s'y fixèrent aussitôt et devinrent partie intégrante des premiers habitants de Bône. Chaque année leur nombre s'accrut ; dans la seule année 1846, une statistique parue dans le journal de Bône, " La Seybouse " du 14 février 1847, nous apprend que sur 1.016 arrivées d'Anglo-Maltais, on n'avait compté que 670 départs ce qui démontre que 346 des leurs s'étaient mêlés à la population de la Ville, laquelle à cette même époque ne comptait, eux compris, que 6.004 Européens. Dans ce nombre figurait déjà une forte proportion de Maltais dont quelques-uns même étaient arrivés, dans ce pays, bien avant l'occupation française.
          Les Maltais ainsi venus à Bône, se sont définitivement fondus dans la population française de ce pays. Ils s'y sont intégrés d'eux-mêmes, spontanément, sans doute un peu par obligation, car l'exiguïté du territoire de leur petite Patrie ne leur permettait pas d'y demeurer, mais aussi, par affection pour la France, leur Patrie d'adoption, pour laquelle ils ont toujours eu une prédilection naturelle.
          Ils auraient tout aussi bien pu, en effet, diriger leur exode vers d'autres pays voisins, comme l'Italie ou l'Espagne, ou lointains, mais accueillants, comme l'Amérique Latine ou l'Amérique du Nord. Mais ils ont choisi la France qui avait besoin de peupler son nouveau territoire Africain par des apports d'hommes énergiques, laborieux et opiniâtres.
          En venant ici, les Maltais ont apporté toutes les qualités de leur race et surtout leur âpre ténacité dans la lutte contre la farouche nature. Car, si leur île natale possède le plus doux des climats, elle ne leur a jamais offert qu'un sol aride et rocheux.
          Et cependant, à force de prodiges et d'ingéniosité, ils avaient appris à vivre sur ce sol ingrat qu'ils savaient cultiver assez pour lui prendre au moins l'indispensable de ce qui leur était nécessaire pour vivre.
          Ces petits jardinets qui ne contenaient que des oignons, des salades, des carottes et quelques autres légumes culinaires, ces chèvres qui se nourrissaient d'un rien, de quelques rares touffes d'herbe poussées entre des rochers et qui leur donnaient un lait abondant, suffisaient à la nourriture et à l'entretien de toute la famille.
          Tout était réuni autour de ces maisons de planches qui s'élevaient triomphantes au milieu d'une végétation rare et sans attrait, comme pour marquer le triomphe de l'effort et de la volonté sur une nature ingrate et rebelle.
          Le champ qui s'étendait à l'arrière de ces habitations légères était vraiment des moins prolifères en herbage, et le dernier contrefort de la montagne toute proche avait même été largement éventré pour permettre l'exploitation de carrières de pierres à bâtir. C'est assez dire que la nature se montrait bien parcimonieuse pour la nourriture des petits troupeaux de chèvres, lesquels, à leur tour, pourtant, devaient contribuer à l'existence de familles souvent nombreuses.
          Il fallait voir ces petits quadrupèdes, cornus et capricieux, s'en aller vers la Ville, dès les premières lueurs de l'aube, en toutes saisons, et par tous les temps. Ils allaient, sautant et trottinant, et leurs clochettes tintinnabulaient sans répit, réveillant les habitants encore endormis à cette heure.
          En ville, le troupeau se divisait en petits groupes de cinq ou six chèvres, qui allait chacun occuper un coin de rue, toujours le même, dans différents quartiers.
          Les clients habituels venaient avec leur récipient chercher leur deux ou trois sous de lait que l'on trayait sous leurs yeux, dans leur pot même, ce qui était bien la réalisation du fameux slogan commercial inventé bien plus tard : " Du producteur au consommateur ".
          L'acheteur, au surplus, avait la certitude que l'on n'avait pas mis de l'eau dans son lait.
          Puis, lorsque les pis étaient vidés, vers huit heures, les chèvres se rassemblaient et reprenaient allègrement la direction de leur si pittoresque quartier.
          Elles repassaient par les mêmes rues de la Ville et du Faubourg, sautillantes et légères, ce qui faisait agiter davantage et tinter plus fort leurs grelots sonores et monocordes auxquels se mêlaient leurs joyeux bêlements.
          Dans leur " Quartier des Chèvres ", les Maltais se retrouvaient avec bonheur dans une ambiance qui leur rappelait leur île natale.
          La rusticité du lieu, le langage guttural et rauque de leur terroir et l'absence de tout ce qui pouvait être étranger à leur race et leurs coutumes, formaient un ensemble qui leur permettait de se croire tout à fait chez eux.
          C'était, sans doute, pour cela, afin de demeurer eux-mêmes, et entre eux, qu'ils s'étaient ainsi groupés loin de l'agitation populeuse de la Ville, à l'extrémité la plus isolée du Faubourg.
          Cette agglomération de ces Bônois d'origine maltaise formait bien une communauté apparemment indépendante du reste de la population.

          Elle eut même son chef qu'on appelait à Bône, " le Maire du Pont-Blanc ", grand gaillard, solide, brun de peau et noir de poils, véritable type de la race, mais plus débrouillard que les autres, et mieux au courant qu'eux des procédés électoraux en vogue qui se chargeait de faire parvenir aux pouvoirs locaux toutes les doléances des habitants du quartier, et... de mener ces derniers aux urnes.
          Le Quartier des Chèvres a disparu, du moins il n'est plus composé par des maisons de planches, et les promeneurs ne voient plus les ménagères diligentes et propres, s'affairer sur les galeries en bois.
          Les chèvres depuis longtemps, ne viennent plus aux coins des rues et des places, attendre les gens qui aimaient leur lait, et elles ne troublent plus la tranquillité des matins clairs ou brumeux, par leurs bêlements et tintements de leurs grelots.
          Le lait, lui-même, se vend en poudre chez les épiciers et les pharmaciens.



BÔNE MILITAIRE
du CAPITAINE MAITROT
                              Envoyé par M. Rachid Habbachi                      N° 13

Bône Militaire                                                   44 SIÈCLES DE LUTTES
du XXIVème avant  au XXème Siècle après notre ère
Médaille de Bronze à l'Exposition Coloniale de Marseille 1906
Médaille d'Argent de la société de Géographie d'Alger 1908

Deuxième Partie
BÔNE FRANÇAISE

CHAPITRE XIII
Le Capitaine d'ARMANDY, Commandant Supérieur
Arrivée du général d'Uzer
Départ de la " Béarnaise "
du 8 Avril au 21 Juillet 1832

Le plus beau fait d'armes du siècle
(Maréchal Soult).


        Voici à la suite de quelles circonstances, la Surprise était arrivée à Bône. La Casauba, comme on le sait, était partie sur Alger emportant les dépêches du capitaine d'Armandy.
        En arrivant dans la rade d'Alger, elle croisa le brick, la Surprise qui en sortait. Le pilote Nicaise eut l'idée de faire des signaux de détresse qui furent aperçus du brick, celui-ci laissa porter sur la Casauba. A la demande du pilote, le capitaine Garnier prit sur lui de virer de bord.
        Le duc de Rovigo, après lecture de la lettre du capitaine d'Armandy, ordonna au capitaine Garnier de prendre à son bord une compagnie du premier bataillon du 4ème de ligne, soit 120 hommes sous les ordres du capitaine Hufty, du lieutenant Labbé et du sous-lieutenant Boulanger, puis il lui remit une lettre destinée au commandement de la Casbah. (1).

        Le 9 avril, à huit heures du matin, le débarquement commenta. La compagnie fut revue à terre par l'élève de première classe de Cornulier-Lucinière, monté sur l'un des chevaux pris aux Sen-Hadja. Ella entra à la Casbah sous une pluie battante et se forma en bataille; face aux marins ; Yusuf arriva avec ses Turcs et la connaissance se fit avec force poignées de main.
        Les grenadiers furent installés à la Casbah, Bône restant aux Turcs.

        Le 10 avril, après avoir salué la terre de 21 coups de canon, la Surprise leva l'ancre, au moment où arrivaient les gabares la Truite et l'Astrobale, le chébec le Bédouin et la Casauba amenant des fractions du premier bataillon du 4ème de ligne ; le 13, la frégate la Bellone amena le reste du bataillon.
        L'effectif était porté à 700 hommes sous les ordres du commandant Davois. De plus, venaient d'arriver un officier du génie, un médecin, des officiers d'administration des hôpitaux et des subsistances avec des approvisionnements de toutes sortes.

        La baronne d'Armandy se trouvait à bord de la Truite.
        Les troupes furent louées en ville. Le capitaine D'Armandy fut nommé commandant supérieur en attendant l'arrivée d'un officier général.

        Le 18, les marins évacuèrent la Casbah et regagnèrent, tambour en tête, leur bâtiment orné du grand pavois ; ils emportaient comme trophées, la tabatière d'Ibrahim qui est restée entre les mains du général de Cornulier-Lucinière, fils aîné de l'élève de première' classe et le bouquet doré qui surmontait la fameuse glace de Venise. Ce bouquet fut cloué, par ordre du capitaine Fréart, sur le tableau d'arrière de la goélette.
        Les deux capitaines d'Armandy et Yusuf se logèrent dans la ville, laissant la Casbah à la compagnie Hufty.
        On fit remise à l'artillerie de 13 canons en batterie dans la Casbah, dont 17 en fonte et 16 en bronze, 2 mortiers. 23 pièces en fonte non montées, 30.000 kilos de poudre et 150 canons en bronze placés sur les murs de la ville.
        Les services furent ensuite organisés dans la ville.
        L'officier du génie capitaine Ballard, fit aménager le logement des soldats, déblayer les rues et ouvrir des voies de communication de dix mètres de largeur. Une place centrale s'appela place Rovigo ; elle coupait en deux une rue qui reçut les noms d'un côté de la Béarnaise, de l'autre du 4ème de ligne ; il v eut aussi les rues d'Armandy, Yusuf, du Couëdic, de Cornulier, Huder.
        Le médecin organisa un hôpital dans la mosquée de Sidi Mérouan.
        L'officier d'administration des subsistances installa ses magasins près de la porte de la Marine, à l'endroit où se trouvent les magasins actuels et se mit en relations avec les indigènes ; mais les marchands affluèrent tellement qu'ils devinrent un danger pour la ville et le commandant supérieur fut obligé de prendre un arrêté défendant l'entrée dans Bône.
        Il établit un marché du côté de la route de Constantine, avec un poste d'un peloton du 4ème qui ne devait pas permettre aux bergers indigènes de sortir du terrain battu par le canon.
        Pendant ce temps, le capitaine de la Béarnaise, de concert avec les Turcs et Yusuf, fit une reconnaissance sur la Seybouse, sans être trop inquiété.

        Le 21 avril, des cavaliers arabes se répandirent dans la plaine. Yusuf alla à leur rencontre avec ses Turcs et envoya en avant, comme parlementaire, Caïd Omar, nommé bachaouch.
        Le Turc, monté sur un cheval alezan enlevé aux Sen-Hadja, à bouche très dure, partit au galop, se fit emmener et alla donner dans le goum des Sen-Hadja, où un cavalier reconnaissant le cheval de son frère tué 22 jours auparavant, dans l'affaire du 31 mars, lui déchargea deux coups de pistolet, violant ainsi le droit sacré des parlementaires.
        Furieux, les Turcs se portèrent en avant, par leurs décharges répétées, mirent en fuite les cavaliers et purent reprendre le corps intact de leur Bachaouch, pendant que les canons du Bédouin balayaient la plaine de leur feu.
        Les obsèques eurent lieu le même jour, à trois heures de l'après-midi, elles furent aussi solennelles qu'il convenait pour un guerrier ami de la France, tué à son service ; la Casbah tira trois coups de canon au moment de la levée du corps.
        Le soir, les Sen-Hadja envoyèrent leurs excuses; mais comme ils ne pouvaient livrer le meurtrier qui s'était enfui, disaient-ils, ils furent éconduits avec des menaces. Ils se retirèrent à vingt-six lieues de Bône.
        L'auteur du guet-apens était un nommé Ben Masseur ben Yacoub, intendant des fermes de l'Etat du bey Ahmed et chef de la tribu des Dreïds.
        Yusuf vengea son subordonné ravageant complètement un douar des Dreïds surpris pendant la nuit.

        Le 7 mai, les bergers s'avancèrent du côté de la plaine pour faire paître leurs troupeaux.
        Les Arabes leur enlevèrent 150 bêtes et se retirèrent du côté du lac Fetzara, mais l'un d'eux, resté blessé sur le terrain, apprit que les voleurs appartenaient à la tribu des Karézas dont les campements se trouvaient à trois lieues de la ville.
        A minuit, Yusuf sortit à la tête de ses Turcs, de quelques volontaires français et de Bônois à qui on avait distribué des fusils ; ils étaient 180 au total ; et il marcha sur le douar.
        Il arriva, vers trois heures et demie, dans les environs des tentes.
        A quatre heures, les chiens arabes donnèrent de la voix. Les Turcs firent le tour des tentes et commencèrent le feu pendant que l'un d'eux sonnait dans une corne de buffle.
        Une vieille femme s'écria :
        " Ah je vous l'avais bien dit que ces bestiaux nous porteraient malheur.
        " - - Non, bonne mère, rassurez-vous, répondit Yusuf, je vous les avais prêtés et je viens les rechercher aujourd'hui avec leurs petits ".
        Les Karézas, affolés, essayèrent de fuir mais allèrent donner dans les rangs des Turcs qui les massacrèrent de sang froid.
        La razzia fut magnifique, de nombreuses têtes, 20 chevaux et mulets, 600 boeufs et 4.000 moutons. Mais dans la retraite, beaucoup de bêtes s'échappèrent ; toutefois, 30O bœufs furent amenée à Bône.

        Nous avions perdu un homme tué et plusieurs blessés. Tous furent rapportés par leurs camarades.
        Aux approches de la ville, les Turcs, serrés par les goums, furent dégagés par deux compagnies du 4ème.
        Quelques jours plus tard, des boeufs s'échappèrent du côté du fort Génôis ; les Turcs et quelques marins partirent à leur recherche et rapportèrent encore quelques têtes.
        Pendant ce temps, le commandant supérieur aidé du comte de Brivazac, chargé de la police générale de la province, juge royal de la province et Maire de Bône et de M. Raimbert, ancien agent de la Compagnie d'Afrique, s'occupait il repeupler la ville.
        M. Raimbert fit venir les corailleurs de Tabarka et réalisa ainsi, au profit du Trésor français, une économie d'un million versé annuellement.
        M. de Brivazac, le 31 avril, reçut d'Alger, un arrêté réglementant la pêche dans les eaux françaises.

        Le même personnage avait écrit, le 21 avril, à propos des Turcs de Yusuf.
        " L'abondance et le bien être dont nous jouissons sont dus en partie aux Turcs. Vous savez en effet que pour couper les communications et entraver le commerce, il suffit de quelques misérables qui arrêtent et dépouillent les habitants paisibles.
        " Deux fois déjà, nous nous sommes trouvés dans cette position, mais les Turcs commandés par le capitaine Yusuf sont allés surprendre les voleurs et dès le lendemain tout est rentré clans l'ordre ".

        C'est le plus grand éloge que l'on pouvait faire des irréguliers, surtout au moment où, par suite des proclamations d'Hussein Dey, le gouvernement voulait les expédier en Asie Mineure, mesure qui ne fut pas mise à exécution sur les instances du capitaine d'Armandy et de M. de Brivazac.

        Le capitaine écrivit à ce sujet au général en chef s'inspirant d'ailleurs de la lettre ci-dessus citée de M. de Brivazac.
        Depuis le jour où nous perdions, par une indigne trahison, un des meilleurs Turcs qui soient à notre service (mort du Caïd Omar), nous n'avons plus aperçu un seul groupe d'Arabes qui pût nous donner le moindre soupçon ou la moindre inquiétude. Ceux qui viennent à nous, sont de paisibles habitants qui nous amènent ce dont nous avons besoin, comme bestiaux, beurre, volailles, etc. ; peu chasseurs ordinairement, les Bédouins le sont même devenus pour nous apporter du gibier qui se vend à bon marché comme tout le t'este. Enfin, nous sommes plus heureux qu'il nous était permis d'espérer.
        Les Turcs, en cela, nous sont fort utiles, car c'est à eux, en partie du moins que nous devons le bien-être et l'abondance dont nous jouissons.
        Vous savez, est effet, que pour couper les communications et entraver tout le commerce d'un pays, il suffit de quelques misérables qui arrêtent et détroussent les habitants paisibles qui désirent le faire.
        Deux fois déjà, nous nous sommes trouvés dans celle positions mais les Turcs, commandés par Yusuf, sont allés surprendre les voleurs, ont coupe quelques têtes dès le lendemain, nos marchés ont été approvisionnés comme auparavant: Il y il a donc du sang entre les Turcs et les Arabes qui peuvent être nos ennemis et vous savez que, parmi ces barbares, le sang demande du sang et que ces haines finissent difficilement.
        " D'un autre côté, ces Turcs, presque tous fixés dans la province de Constantine depuis un grand nombre d'années, quelques-uns y ayant fait une grande fortune, ont été chassés de leurs maisons, séparés de leurs femmes et de leurs enfants, dépouillés de leur fortune, poursuivis, traqués comme des bêtes fauves par Ahmed Bey contre lequel ils sont exaspérés et contre lequel ils désirent marcher à la tête de l'armée française, car la vengeance est douce aux peuples à demi-civilisés.
        " De ce côté-là, nous n'avons pas à redouter de trahison et, peut-être, devrions-nous les craindre davantage si nous traitions avec le bey de Constantine.
        " Quant aux projets d'Hussein Pacha, ils pourront nécessiter le renvoi de nos auxiliaires si jamais ce souverain détrôné mettait le pied sur le sol algérien, où il commande. Cependant, si je dois ajouter foi à tout ce que j'entends, à ce que j'ai entendu jadis de la bouche de Ben Aïssa, Hussein Dey a perdu toute son influence et toute sa considération ; s'il était transporté, me dit le général, de Constantine, au milieu de notre pays, on ne ferait pas plus attention à lui qu'à tout autre individu, à moins que, connue Turc, il fût massacré, car nous sommes bien décidés à ne plus courber nos têtes sous le joug d'une nation dégénérée et que nous ne connaissons que par le mal qu'elle nous a fait. Voilà ce que me disait Ben Aïssa.
        " Cependant, il serait possible à Hussein, avec beaucoup d'argent, de se former un parti ; mais nous en serions toujours instruits avant qu'il puisse devenir redoutable et, alors, nous serions encore à temps de nous débarrasser de nos Turcs. Jusque-là, ne soyons point ingrats envers des gens gui ont rendu de bons et de loyaux services, surtout si l'on a toujours le projet d'aller à Constantine.

        Voilà, mon général, quelles sont les raisons qui me font retarder l'exécution de la mesure que vous commandiez.
        " Nos soldats sont toujours placés dans la ville et la citadelle, j'ai fait défense expresse de s'éloigner de l'une ou de l'autre et je tiens la main à ce que personne ne s'écarte de cette consigne ; ce n'est pas que je crois qu'il y ait rien à craindre mais la prudence est le premier devoir dans un pays comme celui-ci. Quand trous sommes renfermés dans l'enceinte de nos murailles, nous pouvons braver tes attaques de tos les Arabes de la Barbarie ; ils ne nous en chasseront pas, ils ne viendront pas même nous en attaquer, parce qu'ils n'ont point d'artillerie et d'autres moyens de siège. Ils pourraient peut-être tenter de nous surprendre, s'ils avaient des intelligences en ville, mais il y a trop peu d'habitants rentrés, pour que la surveillance qu'exerce M. de l3rivazae, secondé par des hommes surs que j'ai mis à sa disposition, ne nous avertisse pas de tout le danger qu'il pourrait y avoir ; de ce côté, nous sommes donc parfaitement tranquilles, quoique nous veillons comme s'il y avait quelque chose à craindre. Vous pouvez donc être assuré que Bône ne sortira plus (le nos [[nains; il ne s'agit plus que de profiter des avantages de l'occupation.
        Une superbe plaine, fermée par des collines peu élevées, s'étend à environ deux lieues autour de la ville ; des mamelons, disposés à souhait pour la défense, permettraient de cultiver tout ce terrain sans craindre les courses des Arabes. Trois mille hommes de troupe suffiraient pour couvrir six à huit mille colons, qui trouveraient aisément à vivre parmi eux, à faire vivre leurs défenseurs, et même à exporter du superflu, sur cette terre fertile qui est inhabitée dans ce moment et qui ne parait pas avoir jamais été cultivée comme elle le mérite de l'être.
        " Dés que les troupes que nous attendons de France seront arrivées, nous pourrons pousser des avant-postes sur les hauteurs qui commandent cette plaine, les Turcs rendront alors de bons services en éclairant les routes comme des sentinelles perdues, et, si l'on veut aller à Constantine, placés à l'avant-garde, ils nous guideront par des chemins que leur habitude du pays doit leur faire parfaitement connaître.
        "Beaucoup de tribus sont bien disposées en notre faveur. La conduite d'Ahmed Bey ou celle de son général, les a presque toutes portées à se rapprocher de nous. Les seuls Sen-Hadja et Beni-Yacoub nous sont encore contraires ; il y a du sang entre nous et la première, et le chef de la seconde est en faveur d'Ahmed, dont les troupeaux sont son intendance, place considérable chez un peuple pasteur. Mais, si ces deux tribus nous sont ennemies, les Merdés, les Oulad-Akahl, les Beni-Urgine, les Beni-Salah, ne demandent que la paix et la tranquillité qu'ils en peuvent attendre loin d'un prince aussi avide cet ambitieux que pouvait l'être le bey de Constantine. Ces tribus, dont nous tirons des provisions, tous les jours, nous assurent qu'elles se réuniront ouvertement à nous, dès qu'elles verront dans ce pays une force assez considérable, pour ne pas leur faire craindre que nous le quittions une troisième fois, abandonnant nos amis ou les forçant à s'expatrier à notre suite. A tous ces motifs, qui devraient engager à pousser l'expédition de Constantine, se joint celui de la saison favorable ; les céréales vont mûrir bientôt et les récoltes commencer.
        " C'est alors le moment d'attaquer les Arabes qui, par la farce des armes ou la crainte de perdre le fruit de leurs peines, se soumettraient et seraient forcés de nous donner des garanties de leur bonite foi ; d'ailleurs, dans cette saison, il devient bien plus aisé de fournir à tous les besoins d'une armée.

        Le générai Monk d'Uzer qui, en 1830, avait commandé une brigade de l'armée du maréchal de Bourmont, arriva prendre le commandement de la place, le 15 mai.

        Le commandant supérieur avait été prévenu par une lettre du duc de Dalmatie, ministre de la guerre, en date du 19 avril (2).

        Le baron d'Armandy fut maintenu à Bône, comme employé à la place et faisant fonctions de sous-intendant.

        Le général d'Uzer partit de Toulon, le 8 mai, à bord de la frégate la Calypso, avec le colonel Chadabet, du 55ème et deux compagnies d'élite du 1er bataillon. II était accompagné du la frégate la Didon. portant le commandant Laire et cinq compagnies du centre du régiment ; le reste arriva le 24 mai à bord du vaisseau le Suffren, ce qui portait le régiment à 1.600 hommes en deux bataillons.
        Le général publia, le 16 mai, l'ordre suivant :
        " Mes chers camarades,
        " La plage où nous abordons, était, il y a quelques jours, inhospitalière ; aujourd'hui, nous y sommes reçus en amis, grâce à une poignée de braves qui, par un fait d'armes des plus brillants, se sont emparés de la Casbah. Honneur ! Honneur aux braves capitaines d'Armandy, Yusuf, Fréart, au lieutenant de frégate du Couëdic, à l'élève de première classe de Cornulier Lucinière, et à leurs intrépides compagnons de la Béarnaise: que le drapeau français s'incline devant ces braves, par reconnaissance pour le fleuron de gloire qu'ils viennent d'y ajouter.
        " Notre mission est toute honorable ; nous apportons aux Africains de Bône la civilisation ; faisons-leur apprécier, eu respectant leurs propriétés, leurs usages, leurs moeurs et leur religion ; ne nous contentons pas de leur prouver que nous sommes les plus forts, soyons encore toujours justes.
        " Par ces moyens réunis, ils respecteront et aimeront le nom français ".

        Les navires français étaient entrés dans le' port salués par plusieurs navires marchands, 200 bateaux corailleurs, la Béarnaise et le brick de guerre le Loiret, qui faisait de l'Hydrographie depuis deux ans, sous les ordres du lieutenant de vaisseau Bréard.
        Reçue par des héros, dans un port aussi fréquenté, l'expédition s'annonçait bien. Toutefois, une chose tourmentait le général d'Uzer : la fidélité problématique du bataillon turc. Peu de jours, en effet, après l'arrivée du général, il se mutina contre son capitaine, voulant être traité comme les troupes françaises. Yusuf envoya six hommes aux fers, sur la Béarnaise. Les Turcs implorèrent le pardon de leurs camarades. Yusuf se rendit à bord et fit délivrer les prisonniers mais envoya le chef du complot devant le Conseil de guerre. Ahmed, le séide dévouée, dit alors : " Allez donc, canailles ! Votre chef est mille fois trop bon de vous pardonner, mais je vous jure, par ma barbe, que si vous ne devenez pas absolument souples et dociles, sans lui en demander la permission, je vous tuerai comme des chiens. "
        Le général rendit compte de ces faits au ministre, en demandant ce qu'il fallait faire des Turcs. Le maréchal écrivit de sa main, en marge de la lettre : " S'en servir, les bien traiter, augmenter leur nombre et s'en méfier. "
        Mais les Turcs, mauvaises têtes et braves coeurs, allaient réduire cette méfiance à néant.

        Le 17 mai, Yusuf saisit deux espions de Ben Yacoub, qu'il fit mettre aux fers, et il prévint le général.
        A onze heures du soir, le capitaine Yusuf sortit avec ses Turcs, suivi par quatre compagnies du 55ème, sous les ordres du commandant Laire.
        A deux heures du matin, le général sortit à son tour avec le reste du régiment, 1er de ligne et les compagnies de débarquement du Suffren, de la Didon et des autres navires ; il avait avec lui quatre pièces de montagne de la marine. Les canots, armés en guerre, remontèrent la Seybouse pendant trois kilomètres.
        A la pointe du jour, 1000 têtes de bétail furent enlevée mais les Beni-Yacoub vinrent à merci et furent pardonnés. Aussi, leur audace revenue, harcelèrent-ils la colonne à son retour et décapitèrent huit hommes restés en arrière : on rentra à sept heures du soir.

        Le 21 juin, la frégate la Didon revint de France, rapportant des récompenses pour les héros de la Casbah.
        Les capitaines d'Armandy et Yusuf, les lieutenants de frégate du Couëdic et Retailleau, l'élève de première classe de Cornulier-Lucinière, le second maître de canonnage Benoit, le second-maître voilier Le Tac, le second-maître armurier Daumac, le quartier-maître de timonerie Olivaud, les matelots Siat et Legras, le chirurgien Mauduit, furent nommés chevaliers de la Légion d'honneur.
        Le capitaine Fréat reçut la rosette.
        Les marins non décorés furent avancés d'une classe et ceux de première classe furent promus au grade supérieur.
        Les maréchaux des logis Charry et Colomb furent nommés gardes d'artillerie et décorés.
        On lit de plus dans un ouvrage du temps :
        " II existe au ministère de la guerre un projet qu'on annonce devoir être bientôt exécuté. Les terres vagues des environs de Bône seraient partagées entre les héros de la Casbah ; chacun aurait sa propriété de quelques centaines d'hectares suivant son grade et, au milieu de la colonie, s'élèverait un sillage qui conserverait à jamais le nom et le souvenir de la Béarnaise "
        Les honneurs ne firent pas perdre la tète aux nouveaux chevaliers.

        Le 27 juin, une sortie eut lieu contre les Ben Yacoub, le bataillon turc perdit cinq hommes tués.

        Le 28, nouvelle sortie qui mérita les éloges du générai, le bataillon perdit un caporal français, le nommé Biville.

        Le 12 juillet, le brick le Zèbre arriva dans la rade pour relever la Béarnaise.
        Celle-ci appareilla, le 15 juillet, après que les officiers de la garnison eurent fait leurs adieux à leurs camardes de la marine, la goélette fut saluée à son départ par quinze coups de canon.
        Le capitaine d'Armandy accompagna le bâtiment jusqu'en pleine mer et, en le quittant, embrassa tous les matelots ; quand il fut descendu dans le canot de la Casauba pour rentrer à Bône, ceux-ci montèrent dans les vergues et le saluèrent de trois hourrah).
        La Béarnaise emmenait à son bord le beau-frère d'Ibrahim Bey, nommé Ben Karali, envoyé par le duc de Rovigo pour engager Ibrahim à faire sa soumission ; le générai d'Uzer ne l'avait pas laissé descendre à terre.
        Ce joli monsieur, le type de l'indolence orientale, avait, pour le servir, un esclave maure et quatre juifs : l'un était cuisinier, deux musiciens, le quatrième soignait ses pipes et s'occupait du chasse-mouches. II resta couché tout le temps de la traversée sur le rouf, étendu sur des coussins, à côté du raïs Mohammed qui était chargé de le surveiller.

        Le 21 juillet, la Béarnaise entra dans la rade d'Alger et fut reçue d'après le cérémonial prescrit par un ordre du jour fort élogieux pour les héros de la Casbah. (3)
        Après avoir croisé sur les côtes d'Alger, la Béarnaise arriva à Toulon le 27 septembre. Mise sur chantier, on s'aperçut qu'elle était pourrie depuis l'étambot jusqu'au maître ban. On la refit complètement. Elle fut démolie six ans après à la Martinique.
        Le capitaine Fréart trouva, en arrivant à Toulon, sa nomination de capitaine de corvette.
        Au mois de décembre 1905, le général Niox, directeur du musée de l'armée, accepta pour le musée, un portrait du général Buisson d'Armandy et il fut décidé que ce portrait prendrait place parmi ceux des plus illustres héros de notre histoire militaire.
        On écrivit sur le cadre les noms des compagnons du chef qui dirigea la prise de la Casbah.

(1) Je vous avais envoyé la Surprise avec une réponse votre lettre du 24 mars. Ce bâtiment était sous voile, lorsque la Casauba m'apporta la nouvelle de ce qui est survenu à Bône, depuis le départ du Pélican. On ne pouvait mieux faire que vous avez fait. Vous avez justifié le proverbe : " aux grande, situations, il faut de grands courages "
Fasse la fortune que vous réussissiez.
Je fais rentrer la Surprise pour prendre 100 soldats que je vous envoie. Demain, la Truite partira avec 200 autres et la Casauba chargée de vivres.
Soyez prudent autant que vous avez été brave et ne compromettez rien. Recevez mon compliment avec l'assurance de mon admiration.
Alger le 4 avril 1832.
Duc DE ROVIGO,

(2) J'ai reçu. Monsieur, la lettre que vous m'avez écrite de la Casbah de Bône, le 14 de ce mois. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le rapport circonstanciel qu'elle contient sur les événements qui nous ont rendus maîtres de ce château ainsi que de la ville de Bône.
J'applaudis à la hardiesse avec laquelle, aidé du capitaine algérien Yusuf et d'un petit nombre de marins, vous vous êtes décidé à vous jeter dans la Casbah, au moment où Ibrahim venait de l'abandonner.
Vous, vous êtes montré dans cette circonstance homme de coeur et d'honneur : je n'applaudis pas moins aux dispositions que vous avez prises pour conserver ce poste important jusqu'à l'arrivée du renfort d'Alger.
J'ai fait connaître au ministre de la Marine ma satisfaction de la conduite des officiers de marine et des marins qui vous ont aidé dans cette entreprise.
Une expédition commandée par M. le général Monk d'Uzer va partir ou est déjà partie de Toulon pour Bône. Vous verrez donc, en recevant cette lettre qui arrivera probablement avec la première partie de cette expédition, que dès que le gouvernement a su la situation de Bône, il s'est empressé de prendre des mesures pour y porter remède et rendre irrévocable l'occupation de cette ville.
Vous y resterez sous les ordres du général d'Uzer qui est autorisé à vous y retenir, ainsi que Yusuf, aussi longtemps que votre présence lui sera nécessaire. M. le duc de Rovigo est prévenu de cette disposition.

(3) Ordre du leur du Général en chef le l'armée d'Afrique
Le général en chef s'est empressé de porter à la connaissance de l'armée la brillante conduite des officiers et de l'équipage de la goélette de guerre la Béarnaise et des capitaines d'Armande et Yusuf. Cette goélette devant arriver prochainement, le général en chef ordonne ce qui suit :
Lorsque la goélette la Béarnaise entrera dans la rade d'Alger, elle sera saluée par les batteries de quinze coups de canon et une députation, composée du chef d'état-major général, d'un officier supérieur et deux officiers par régiment, se rendra à bord pour présenter au capitaine ainsi qu'à ses officiers et à son équipage, la satisfaction de l'armée.
Un tel honneur est dû à ces braves marins ; animés d'un ardent désir de gloire, ils ont fait recouvrer à la France une forteresse que, sans leur généreux dévouement, il aurait fallu reconquérir au prix de beaucoup de sang.
Honneur soit rendu à leur courage, que leur exemple soit toujours devant les yeux des jeunes qui remplissent les rangs de l'armée et la fortune de guerre leur fera trouver aussi des occasions à se distinguer !
Alger. 23 Avril 1832.
LE Duc DE ROVIGO,
Général en chef de l'armée.

A SUIVRE       

Souviens-toi !
Envoyé par M. Pierre Rio

Je le dis du bout des lèvres
Je le vie au cours qui s'achève
Je suis, j'en meurt, j'en crève
J'écris dans le vent du djebel
Les mots de notre accent
A fleur d'oreille
Oasis de rêve,
Flot d'encre de mer
Agitant le bleu océan,
Echo de vague en ressac !

Frère Bidaoui et autre
Notre sang fuse encore
Dans nos veines
A travers nos vaisseaux,
Dans nos peines
Traverant nos sanglots,
Arrête toi un instant
Dans la pénombre,
Souviens-toi, qu'il fut une foi
Un pays épicurien et grivois
Ou le seul fait d'être au soleil
Emplissait ton coeur de joie !

Frémissement et murmur
Te voilà comme un pinsson !
Souviens-toi,quand tu descendais
Les marches quatres à quatres
Pour qui, pour quoi !
Pour une brune aux yeux d'agate
Pour une blonde au regard de chatte
Pour une rouquine tout feu tout flamme
A qui tu promettais les jardins d'Allah;
Un tour de manège, une barbe à papa
Qui sait, peut-être, la bague au doigt;
C'était hier à la lumière du chez-soit !

De ta fenêtre, claironnaient ces voix :
D'un vieux Juif achetant n'importe-quoi
Un vendeur de journeaux quotidien
" La vigie ! Le petit Marocain "
Du matin jusqu'au soir, cette litanie Orientale
Proffilant les archades !
Cette terre, qui a pesée de son poids
Alaitant ainsi tes joies, comme il se doit
L'accent qui couvrait nos terrasses;
Rien que pour tout cela, " Souviens-toi "

Le 22 10 2005 Rio pierre


COLONISATION de L'ALGERIE
  1843                           Par ENFANTIN                      N° 9 
1ère PARTIE
CONSTITUTION DE LA PROPRIÉTÉ.

1er Chapitre : État ancien de la propriété en Algérie.
2ème Chapitre : État actuel de la propriété en France.
3ème Chapitre : État de la propriété pour l'Algérie française.

CHAPITRE II.

ÉTAT ACTUEL DE LA PROPRIÉTÉ EN FRANCE.

        XIX. - En France, le souverain n'est pas, il est vrai, comme chez les Turcs, un homme; c'est le gouvernement, l'autorité publique, l'État, la loi et les hommes qui sont chargés de la faire exécuter, depuis le garde-champêtre jusqu'au Roi lui-même.
        Or, il existe encore en France, fort heureusement, malgré la grande passion d'indépendance qui nous a fait rompre les liens de l'ancienne constitution française, une part très sensible de droit sur la propriété, attribuée au souverain, à l'autorité publique, à la loi.

        XX. - L'État possède lui même des biens considérables, les communes en possèdent aussi; et, sous ce rapport, l'État et les communes, considérés comme mineurs, ne peuvent aliéner le fond que par autorisation d'une loi spéciale qui permette cette aliénation; de même aussi, les établissements de bienfaisance, quelques congrégations religieuses, et, comme nous l'avons déjà dit, les sociétés anonymes, sont soumis, dans la gestion, l'administration, la disposition de leurs propriétés, à des obligations que la loi où des ordonnances, ou des arrêtés leur imposent, et qui certainement privent ces propriétés du caractère d'indépendance.
        Mais, même pour la propriété foncière individuelle, où la liberté a fait tant d'efforts pour s'affranchir de ses anciens liens avec l'État, il en existe encore de fort puissants. Ainsi, la loi des successions contraint la volonté du testateur; il ne peut disposer de ses biens que dans des proportions qui lui sont imposées, et d'après un principe d'ordre public qui peut fort bien contrarier ses intentions particulières, sa liberté. La loi d'expropriation pour cause d'utilité publique dépossède, bon gré, mal gré, le propriétaire; et des règlements de police ou des arrêtés administratifs autorisent ou défendent l'usage, la forme, l'exploitation de certaines propriétés, en vue de l'hygiène, de la sécurité et de la Moralité publiques.
        Enfin, même pour la propriété mobilière, qui est vraiment le domaine de la liberté, l'État n'a pas été dépossédé, il s'en faut, de toute influence; et, par exemple, les douanes prohibent, permettent ou bien imposent, ou au contraire encouragent par des primes, tels ou tels produits du travail. L'État, sous ce rapport, est donc, en partie, directeur du travail industriel, commercial, agricole. Il l'est plus particulièrement encore pour les eaux et forêts, pour la pêche fluviale ou maritime, et pour les mines; l'État peut même s'attribuer (bien entendu avec le secours de la loi) beaucoup de, monopoles, tels que ceux des poudres, du tabac, du sel, de la poste, de la fabrication des monnaies, de la confection des routes, des canaux, etc.; et remarquons que, pour toutes ces diverses attributions de l'autorité publique, il y a des corps spéciaux d'employés publics (ponts et chaussées, mines, poudres, tabacs, douanes, postes. manufactures royales. eaux et forêts, haras. etc.) qui sont, sans qu'il y paraisse, mais il est bon de le dire, de belles et bonnes corporations, où l'on n'entre qu'après apprentissage, après capacité reconnue par les maîtres, dans lesquelles une hiérarchie forte est établie, et qui assurent une honorable retraite au travail de l'employé.
        Enfin, la police des marchés, les privilèges des officiers publics préposés à une foule de services qui intéressent les transactions de la richesse privée (notaires, huissiers, commissaires priseurs, agents de change, courtiers, etc. ; ceux de certaines professions industrielles dans, les villes (bouchers, boulangers, porte faix, porteurs d'eau et de charbon, cochers, etc.); et les octrois municipaux, sont de nombreuses dérogations au principe du laissez faire.
        On voit donc que le principe de liberté n'a pas, eu un succès complet dans le régime de la propriété, même à l'égard de la propriété mobilière; et c'est fort heureux, quoique, ces dérogations au principe de liberté ne soient certainement pas toutes aussi favorables que possible à l'ordre et surtout au progrès. Toutefois, si je voulais faire le tableau inverse, des circonstances où l'autorité n'intervient pas du tout dans la direction et l'usage de la richesse, il me serait facile, de les trouver nombreuses et déplorables par l'anarchie qui y règne, anarchie dont souffre surtout la classe la plus nombreuse et la plus pauvre, l'ouvrier, le peuple, pour qui cependant les partisans sincères de la liberté croient travailler.
        Mais il me suffit de constater que l'autorité publique n'est pas aussi dépourvue qu'on pourrait le croire de pouvoir actif et d'influence sur la direction et l'administration de la propriété, et qu'elle peut même, assez facilement, accroître sa part d'influence légale et effective, toutes les fois que l'administration, démontre à la législature un besoin réel d'ordre à satisfaire.

        XXI. - Or, il est évident qu'en Algérie, comme dans tous les lieux où l'on veut fonder quelque chose, c'est surtout d'ordre qu'il doit être, question; c'est un plan qu'il faut trouver et des bases qu'il faut creuser et, établir; les fantaisies et les ornements viendront plus tard, et la Jouissance plus tard encore.
        Il est donc nécessaire que, là, ce soit le pouvoir de l'architecte qui ait beaucoup de liberté, et que l'ouvrier, obéisse à une hiérarchie puissante ; qu'il y ait, en un mot, ce que les militaires seuls, de nos jours, connaissent et respectent encore, un ordre.

        Je viens de dire les militaires, et ce grand nom, qui paraît étranger à la question qui m'occupe en ce moment étranger à la propriété, à la direction et à l'administration du travail productif de la richesse, s'y rattache cependant d'une manière très positive, surtout quand il s'agit de l'Algérie, pour laquelle il a été déjà si souvent question de colonies militaires.

        XXII. - Eh bien! Tous les ans, la France dit à soixante mille jeunes hommes vigoureux : laissez là votre charrue, quittez l'atelier, prenez un fusil; pendant huit années vous ne travaillerez pas à la terre, vous ne travaillerez pas à votre métier, vous me défendrez, vous me protégerez, vous donnerez votre sang, votre vie pour moi, pour moi votre mère, et je vous nourrirai. Enlever tous les ans quatre vingt mille ouvriers au travail, certes c'est bien là intervenir dans l'exploitation de la richesse, et cependant, les plus enthousiastes amants de la liberté trouvent la chose légitime autant que nécessaire, et même leur nature belliqueuse et leurs habitudes de lutte, de, combat, les rendent plus généreux que d'autres, lorsqu'il est question d'augmenter ce nombre d'hommes enlevés au travail; et cependant encore, chose merveilleuse! Cette grande corporation de quatre cent mille Français, plus nombreuse, plus forte que ne l'a jamais été la plus nombreuse et la plus forte congrégation religieuse du passé, cette corporation de célibataires, dont la discipline est plus autocratique que celle des jésuites, où l'obéissance, l'obéissance passive, est le plus saint des devoirs, où l'homme, sans hésiter, fusille son camarade condamné, par ses chefs; cette corporation, l'alliée naturelle, du pouvoir, qui l'organise et la dirige et dont elle est l'arme, non seulement est restée debout sur nos ruines, mais elle a grandi prodigieusement, sous le rapport de l'ordre, en substituant en elle, jusqu'au dernier rang, le droit du mérite à celui de la naissance.
        Voici donc quatre cent mille hommes que la France organise pour la guerre et qu'elle enlève au travail, sans réclamation sensible.
        Lui serait-il permis d'en organiser, d'en discipliner, d'en diriger quatre, cent mille pour le travail? C'est douteux, mais ce n'est pas impossible; car il est clair que cela peut, un jour, ne pas paraître déraisonnable et même sembler utile.

        XXIII. - Remarquons en effet qu'une idée intermédiaire et préparatoire s'est fait jour depuis quelques années ; une idée mixte, et pour ainsi dire un peu bâtarde, celle de l'application de l'armée aux travaux publics, dont la colonisation militaire de l'Algérie n'est, à vrai dire, qu'une, conséquence. Sans doute cette idée n'est qu'une transition entre deux autres idées très distinctes, qui se traduiraient fort clairement en langage politique, en donnant au ministre des travaux publics une armée de travailleurs, comme le ministre de la guerre et celui de la marine ont une armée de soldats et de matelots; mais elle achemine, l'opinion et les faits vers un pareil résultat.
        L'exécution du réseau des chemins de fer en France, et l'organisation du réseau colonial en Algérie, sont deux belles occasions.

        XXIV. - Et maintenant que j'ai dit la constitution ancienne de l'Algérie et la constitution actuelle de la France, sous le rapport de la propriété, je puis rechercher ce qu'il nous est possible de faire dans l'Algérie française, pour constituer la propriété et le travail, dans les villes et dans les campagnes, c'est à dire pour poser les bases matérielles de l'organisation politique et civile des indigènes, et des colons européens, gouvernés par l'autorité française.
        Avant de passer à ce troisième, chapitre, je désire finir celui-ci comme je l'ai commencé, par une citation d'un grand maître en pareille matière, citation qui résumera ce que j'ai dit sur la propriété arabe et sur la propriété française.
        M. Dupin aîné, dans une, petite brochure intitulée, Excursion dans la Nièvre, raconte, qu'il a retrouvé encore florissante une de ces communautés agricoles, nombreuses autrefois parmi les laboureurs du Nivernais. Les statuts réglementaires, de cette communauté de familles remontent à l'an 1500, et ont survécu à tous les orages qui ont bouleversé la France depuis cette époque. Voici ce que dit M. Dupin de cette communauté de Jault.
        " Le régime de cette maîtrise est fort doux, et le commandement y est presque nul. Chacun, disait Claude Le Jault, connaît son ouvrage, et il le fait. Cette réunion de familles exerce en commun, très largement, la charité, et ses habitudes morales sont telles qu'il est sans exemple qu'aucun de ses membres ait été condamné pour un délit quelconque.
        " On s'étonne qu'un régime si extraordinaire et si exorbitant du droit commun actuel, ait pu résister aux lois de 1789 et de 1790, à celles de l'an II sur les successions, et à l'esprit de partage égalitaire jusqu'au dernier degré de morcellement. Et cependant, telle est la force des moeurs, quand elles sont bonnes, que cette association s'est maintenue par la seule force de l'esprit de famille(1), malgré toutes les suggestions des praticiens amoureux de partages et de licitations. "
        Dans le reste de son voyage, M. Dupin vit la contrepartie. Il s'informa de ce qu'était devenue, dans le village de Préporché, la communauté des Garriots, autrefois célèbre et fort considérable; elle avait prospéré jusqu'à la Révolution. A cette époque on voulut partager. Le dénuement de chaque individu ne tarda pas à .succéder à la richesse collective de tous. " A Jault, dit M. Dupin, c'était l'aisance, la gaîté, la santé; aux Garriots c'était la misère, la tristesse et la maladie. "

(1) Si ces bonnes moeurs ont maintenu l'association, cette association n'aurait elle pas contribué elle même, pour beaucoup, au maintien des bonnes moeurs?
Selon M. Dupin, l'esprit de famille pousse donc à l'association et non aux licitations et au morcellement, comme beaucoup de praticiens et non praticiens le pensent.

A SUIVRE

On partage tout..
Envoyé par Mme Michèle Raphanel

    Un vieux couple entre lentement chez MacDo, par une froide soirée d'hiver.
    Ils se retrouvent attablés parmi un groupe de jeunes familles et de jeunes Couples.
    Plusieurs clients les regardent avec admiration, se disant : "Quelle belle image. Ce vieux couple a dû passer à travers bien des épreuves, ça doit faire au moins 60 ans qu'ils sont ensemble."
    Le vieux Monsieur se rend directement à la caisse, commande sans hésitation et paie le repas. Le vieux couple choisit alors une table et le vieux Monsieur pose son plateau sur la table.
    Sur le plateau se trouvent un hamburger, un paquet de frites et un Coca-Cola.
    Le Monsieur déballe le hamburger et le coupe précisément en deux.
    Il en place une moitié devant son épouse, ensuite il compte soigneusement les frites et en fait deux piles égales et en place une devant sa femme.
    Il prend une gorgée de Coca-Cola, sa femme en fait autant. Il place ensuite le Coca-Cola entre les deux.
    Quand l'homme commence à manger sa partie de hamburger, les autres clients se disent :
    "Les pauvres, ils ne peuvent acheter qu'un seul repas pour eux deux."
    Puis le vieux Monsieur commence à manger les frites, et un jeune homme se lève alors et s'approche de leur table.
    Un peu gêné, il leur offre poliment de leur acheter un autre repas.
    Le Monsieur lui dit que tout va bien et qu'ils sont habitués à tout partager. Puis les gens s'aperçoivent que la vieille dame n'a encore rien mangé.
    Elle reste assise, regardant son mari manger sa part en sirotant de temps à Autre une gorgée de Coca-Cola.
    Encore une fois le jeune homme les supplie de le laisser leur acheter un autre repas.
    Cette fois c'est la vieille dame qui lui explique que ce n'est pas nécessaire, qu'ils sont habitués à tout partager.
    Comme le vieux Monsieur finit de manger et s'essuie la bouche, le jeune homme n'en peut plus. Il s'approche de leur table pour leur offrir encore une fois de la nourriture.
    Après qu'ils aient une fois de plus poliment refusé il demande à la vieille dame:
    Madame, pourquoi ne mangez-vous pas ? Vous dites que vous partagez tout...Qu'attendez-vous ?
    - J'attends les dents!

ASPECTS ET REALITES
DE L'ALGERIE AGRICOLE
Envoyé par M. Philippe Maréchal                    N° 17


Par cette Brochure qui sera diffusée par épisode au cours des Numéros suivants, nous allons faire découvrir des aspects et des réalités qui ont été déformées par les fossoyeurs de l'Algérie Française et dont les conséquences se poursuivent et dureront encore plusieurs décénies.
             

Les Techniciens
De l'Agriculture Algérienne
Vous présentent
ASPECTS ET REALITES
DE
L'ALGERIE AGRICOLE

" Quand je débarquai à Alger pour la première fois, il y a une vingtaine d'années, j'éprouvai une impression à laquelle, j'imagine, un Français n'échappait guère. J'arrivais dans un des rares coins du monde où nous pouvions nous présenter avec orgueil. "

Jérôme et Jean Tharaud.       

III - TEMOIGNAGES
B. -ALGÉROIS
Histoire d'une petite propriété
du Sahel Algérois

PAR
Par Louis LEBEAU (1)

      Il s'agit d'une exploitation de 30 hectares qui, de 1830 à nos jours, a vu sa mise en valeur jalonnée par quatre grandes périodes :

1° Avant 1837 : ELEVAGE. EXTENSIF.
      A cette époque, les terres en question constituaient l'extrémité d'un grand domaine d'un millier d'hectares de terres du Sahel en broussailles et de terres de plaine marécageuses. Aucune culture sérieuse n'était possible, sauf sur quelques rares parcelles. On se contentait, en conséquence, de l'élevage d'un petit nombre de bœufs et de moutons. Elevage très extensif. Revenu insignifiant.

2° De 1837 à 1895: CÉRÉALES ET FOURRAGES.
      Pendant environ soixante ans, on n'a tiré du domaine que des céréales et du fourrage ; fourrage poussant naturellement sans frais avant l'invasion de l'Oxalis (mauvaise herbe vivace).
      La formule classique d'assolement, à cette époque, est bisannuelle :
- première année : 12 hectares de blé, 4 hectares d'orge ;
- deuxième année : 13 hectares de fourrage naturel avec des rendements moyens respectifs de 10, 12 et, pour l'orge, 25 è 30 quintaux à l'hectare.
      Les recettes totales annuelles (en francs actuels) s'élèvent à 800.000 francs en chiffres ronds.

3° De 1895 à 1939 : PRÉDOMINANCE DE LA VIGNE.
      Pendant environ quarante-cinq ans, la vigne est devenue la culture principale, ramenant céréales et fourrages au second' plan.
      II y a sur la propriété 17 hectares de vignes et 12 hectares de céréales ou de fourrages.
      On obtient, en moyenne, des recettes totales annuelles de l'ordre de 2,5 millions.

4° De 1939 à 1954: EXTENSION PROGRESSIVE DES CULTURES FRUITIERES ET MARAICHERES.
      Mais, A partir du moulent où le statut viticole interdit les nouvelles plantations de vigne (vers 1934), une évolution apparaît dans le pays vers une extension des cultures fruitières et maraîchères. Dès 1939, le domaine entre dans cette voie et, en 1954, la vigne a cessé d'être la principale culture, cédant le pas aux cultures fruitières et maraîchères. On trouve aujourd'hui trois branches d'exploitation :
- cultures fruitières ;
- vignes ;
- cultures maraîchères.
      Les améliorations réalisées depuis 1939 ont principalement porté sur des aménagements eaux souterraines, sur les nivellements préalables indispensables, l'introduction de la culture maraîchère, la plantation des arbres fruitiers et la reconstitution du vignoble. Les recettes totales annuelles passent à 8 millions.
      Il reste à achever la reconstitution du vignoble en arrachant, en 1955, 2 hectares de vieille vigne et en plantant 4 hectares de jeune vigne pour retrouver une surface totale entière de 17 hectares. On peut espérer obtenir sur ces 17 hectares, un rendement moyen de 70 hectolitres à l'hectare.
      Il est nécessaire, en outre, de planter 1,5 hectare d'orangeraie et d'attendre que la plantation tout entière, 7 hectares, soit en plein rapport, ce qui se produira vers 1965. Les récoltes d'oranges seront alors d'environ 2.000 quintaux.
      Des progrès du même ordre seront obtenus d'ici là dans le rayon néfliers et autres arbres.
      On peut donc espérer, qu'en 1965, la production moyenne totale sera de l'ordre de 12 millions, soit un nouveau progrès d'environ 50 %.


Type de ferme du Sahel Algérois, (Saoula)
Cultures maraîchères et fruitières
près de l'Habitation principale, une pordherie

      Ainsi, d'un revenu insignifiant, un 1837, on est passé progressivement à 800.000 francs en 1895, au triple en 1939, enfin à 8 millions, soit le décuple, en 1951. D'ici une dizaine d'années, il sera possible d'atteindre 12 millions.
      Cet exemple montre, en outre, que la substitution des cultures riches aux cultures vivrières a permis indirectement de faire vivre une population de plus en plus nombreuse :
- Les 30 hectares de broussailles de l'époque turque nourrissaient péniblement une seule famille ;
- au cours de la période suivante (céréales et fourrages), on peut estimer que l'exploitation occupait, en moyenne, 3 ou 4 ouvriers ; avec la vigne, ce chiffre a triplé ou quadruplé se situant entre 10 et 15 ouvriers vivant, avec leurs familles, des salaires payés ;
- En l'élut actuel, les travaux de culture des trois branches d'exploitation (orangeraie, vigne, cultures maraîchères) exigent, en moyenne, d'un bout de l'année à l'autre, des chantiers de 35 à 40 ouvriers. Les salaires payés annuellement sont de plusieurs millions. Il est permis d'espérer que l'achèvement de la mise en valeur, au cours de la prochaine décade, permettra de porter aux environs de 50 le nombre des salariés vivant avec leurs familles sur une telle exploitation.

      Tels sont les résultats que permettent, grâce évidemment à l'activité particulièrement éclairée de l'exploitant actuel, l'application des divers moyens et techniques préconisés par nos chercheurs, l'intervention du crédit, la mise en oeuvre des moyens de défense. On comprend mieux la portée du slogan très en cours outre-Atlantique : " L'agriculture transformée par la science.
      Il n'est pas, hélas, toujours possible de parvenir à de tels résultats. Dans ce cas particulier, l'exploitant s'est trouvé dans une région riche et privilégiée, à la limite du Sahel algérois et de la plaine de la Mitidja. Il s'en faut évidemment de beaucoup que cela soit possible dans toutes les terres d'Algérie.

(1) - Extrait de " L'Agriculture Algérienne ", Alger, 1901,


A SUIVRE       

QUAND L'ORAGE PASSA
par M. Robert Antoine                  N°19
DIVAGATIONS

LES ENFANTS DU BIAFRA

      L'HORREUR a une image, celle des enfants biafrais.

      Mais reprenons le cours de l'histoire.
      Nous sommes le 26 novembre 1968, et je viens de me marier civilement avec la plus adorable des épouses. Un mariage d'une simplicité des plus dépouillée, avec uniquement 2 témoins. Quelques agapes avec des amis, au restaurant des Trois horloges, tenu à l'époque par " MIMI" de Guyotville.

      Le lendemain, je décollai du Bourget à 4 heures du matin, à bord d'un Bréguet 2 ponts dont j'étais le seul passager...Courte nuit de noces !

      Le gros avion, chargé de caisses, mit trois jours pour arriver à Libreville, capitale du Gabon, après avoir passé une journée et une nuit à Bamako, capitale du Mali.
      Dès que les moteurs se turent, sur le tarmac de Libreville, l'équipage me désigna le hall de l'aérogare, pour enregistrer mon arrivée au Gabon. II était 10 heures, heure zoulou. Je me présentai à un policier, qui regarda mon passeport avec attention, et me mit illico en prison, sans autre forme de procès. Je n'ai jamais su pourquoi.
      Je demandai à téléphoner à mon ambassade et, après un temps certain, car en Afrique rien n'est urgent, j'obtins d'un fonctionnaire la promesse de me faire libérer.
      Vers 18 heures, un commissaire gabonais se présenta, me fit délivrer de ma geôle avec des mots quelque peu outranciers mais que je n'oublierai jamais: " Ouvrez lui, il vient sauver le Gabon. Je remerciai ce bon fonctionnaire, lui demandai pourquoi j'avais été directement mis en prison. Pour réponse, il partit dans des explications bien trop confuses pour que j'en saisisse le sens. J'arrêtai là sa diatribe, en lui demandant où se trouvait l'Hôpital militaire. La réponse fut intéressante puisque l'hôpital était implanté à 10 kms de la ville.
      Le moyen d'y aller : le taxi.
      Quelque peu énervé par ma réception, mais content de quitter l'Aéroport, je pris donc la vieille Peugeot qui servait de taxi et me fis conduire à l'Hôpital militaire.
      Encore un choc, une autre déception.
      Au milieu de la brousse, un grand carré, avec des tentes bien alignées, mais pas un seul bâtiment en dur, à l'exception d'un petit réduit de 5 mètres sur 5, fermé à clef et dont on reparlera.
      Ce qui surprend, est la sensation olfactive d'éther. Ici les odeurs sont étranges, putrides, on sent la mort. L'expliquer m'est difficile, c'est un mélange de décomposition avancée et de moisi.
      Une envie de vomir vous prend à la gorge dès que vous passez la porte de cet étrange lieu et, aussitôt, un désir pressant d'en repartir vous assaille.

      Je me présentai au Médecin chef qui avait sa tente administrative à quelques pas de l'entrée. Son accueil fut plus chaleureux que celui de l'Aéroport et, sans plus attendre, il me fit visiter son camp.
      Je déambulais dans les allées, côtoyant la misère la plus abjecte, la plus sordide que j'ai jamais vu. Ce qui rendait la visite plus pathétique encore, c'est que cet hôpital ne recevait que des enfants. On se sent mal dans notre peau de Blanc, honteux d'être bien nourris, rassasiés. Nos petits problèmes deviennent inconséquents et on relativise. Aider, porter secours, mais comment être efficace ?
      Tant de fois, les bonnes âmes ont été trompées, tant de fois les dons n'ont pas suivi leur destination qu'une certaine méfiance me retient.
      En voilà un exemple, peut être plus crapuleux que les autres, mais dont je n'ai eu connaissance que très tardivement.
      La rébellion biafraise n'avait pas d'organisme humanitaire ni de CROIX ROUGE mais, après la publication des photos sur cette guerre, un immense élan de sympathie secoua la France et les dons affluèrent dans la bourse du représentant de la" CROIX ROUGE biafraise" à Paris.
      ... Ces fonds servirent à payer armes et mercenaires... La France le savait, ou tout au moins M. FOCCART laissait faire.
      Blousés, comptez-vous.

      Mais revenons à nos premières amours.
      Le Médecin-chef me fit comprendre que j'étais là pour témoigner de cette détresse, et il fallait que la France et le Monde sachent où la bêtise peut conduire.
      La FAIM a des conséquences cliniques très variées. Elle peut rendre fou, provoquer une cirrhose du foie, gonfler le corps d'eau comme une outre et donner l'apparence d'obèse. Plus couramment, la peau colle aux os, et l'on peut voir des squelettes vivants déambuler. Sur des adultes, ce n'est pas très joli, sur des enfants, c'est insoutenable.
      Ce sont là mes premières impressions, mais je vais vivre trois semaines avec eux et le constat sera encore plus atroce.
      Les petites filles biafraises d'une politesse excessive, à l'anglaise, vous quittent en vous faisant la révérence. Pourtant elles sont pratiquement condamnées.
      A leur arrivée à l'hôpital, ces enfants ont tous peur de manquer de nourriture et sous les matelas, sous les oreillers, l'on trouve des boulettes de riz cachées : une réserve pour l'avenir.

      Le personnel soignant est admirable, je rends là hommage aux infirmiers et infirmières qui apitoyés par la détresse de ces enfants, créent une ambiance, une chaleur humaine rare dans ce monde pitoyable. Pourtant, les conditions pour ces jeunes femmes ne sont pas des plus favorables. Ainsi, par deux fois, on a forcé la porte de leur chambre, et l'une d'elles a failli être violée. C'est l'Afrique, avec ses outrances et sa démesure naïve.

      Une idée de l'ambiance qui régnait à Libreville, à cette époque : La tombe de l'ancien Président de la République Gabonaise, était gardée la nuit par des parachutistes Français, car plusieurs fois ont avait voulu exercer des actes de cannibalisme sur les restes de l'illustre défunt.

      Notre capitaine pharmacien eut quelques problèmes avec le sorcier du coin car il avait appris qu'il détenait dans son frigo du sang humain. Notre potard était censé le boire à la régalade, la nuit, pour se fortifier....

      Que dire de la pancarte sur une des boîtes de nuit de la capitale gabonaise où il était inscrit en grosses lettres "INTERDIT AUX CHIENS & AUX BLANCS" et la dernière, écoutée à la radio locale annonçant un discours du pape Paul vé un ( Paul VI).

      Mais au delà de ce plongeon dans l'absurde, il y a l'Afrique attachante, l'Afrique qui séduit, qui envoûte.

      Je reste très fier de l'œuvre française dans ce continent, aucun pays n'a mieux fait que nous, même si nos erreurs sont lourdes et inexcusables. J'ai visité, à l'époque, l'Hôpital de Lambaréné où notre prix Nobel, le Dr SCHWEITZER avait fondé une des premières oeuvres humanitaires d'envergure en Afrique noire. Mais pourquoi laissait-t il pourrir dans des caisses, un hôpital tout neuf, envoyé par les Américains? On me dit que les Noirs ne pouvaient pas s'habituer au modernisme, et préféraient leurs cases.

      C'est curieux; en peu de temps, ils se sont adaptés à des hôpitaux modernes.

      Ces quelques anecdotes ont un but, celui de vous faire comprendre un continent en décalage avec le nôtre. J'espère, quand vous me lirez, que ce décalage aura disparu, mais peut- être, nous-mêmes, en France, serons nous à la merci d'un sorcier ou d'un gourou.

      Je logeais dans les petites maisons affectées aux médecins. Elles se trouvaient à 1,5 kms de l'Hôpital. Je pus ainsi converser en toute liberté avec eux, puisque je ne prenais pas sur leur temps de travail. Ils étaient jeunes, dynamiques, quelques uns déjà broussards, et souvent désargentés. Ils avaient embrassé la carrière militaire, plus par nécessité que par goût mais ne s'en plaignaient pas. Ils découvraient une humanité nouvelle, une tache immense mais, sur la question de fond, restaient très évasifs... de là à comprendre ... .

      Au cours d'une de ces conversations, l'un d'eux me dit " Mais pourquoi ne pas venir avec nous, nous attendons ce soir un nouvel arrivage d'enfants biafrais".

      Le DC 3 se posa, on ouvrit les portes, et ce fut la nausée.

      Odeur insoutenable de ces petits corps allongés à même la carlingue, sans une couverture, sans matelas, et dans un état sanitaire lamentable.

      Je sortis et allai vomir.

      Le lendemain, je vis le Médecin-chef et lui demandai de faire un aller retour au Biafra. Ce fut le refus mais, comme j'insistais, il en parlera ce soir à l'Ambassadeur; pour l'instant, il me remit dans les mains du Chirurgien.

      Le Chirurgien - commandant, était l'adjoint du Médecin - chef, il m'invita aussitôt à le suivre dans la petite pièce en dur, celle qui était toujours fermée à clé.

      Nous passons des blouses vertes et, avec deux de ses assistants, nous entrons. Trois cadavres nous attendent, trois cadavres d'enfants, de ceux que nous avons reçus hier soir.. . Quelques coups de scalpel, puis le sécateur pour couper la cage thoracique et atteindre le coeur souvent en bon état. Le foie est beaucoup plus touché, on prélève quelques morceaux que l'on place dans des pots à confiture fermant hermétiquement.

      Jusque là, abrité derrière mon appareil photo, je tenais le coup.

      C'est à partir du moment où le chirurgien attaqua la boîte crânienne à la scie à métaux que je tournai de l'oeil et il fallut me sortir de ce cagibi.

      Plus blanc que blanc, je mis un temps certain à reprendre mes esprits, aidé par le pharmacien qui avait un très bon whisky et, comble de luxe, des glaçons. II était le seul à posséder un frigo.

      Le même jour, au mess où tout le personnel soignant se retrouve, du lapin est servi au menu. J'avoue ne pas avoir grand faim, je laisse ma part.

      L'appétit fut complètement coupé quand le Chirurgien leva de son assiette un beau thorax de lapin et, m'interpellant, me dit "Ca ne vous rappelle rien?".
      Je sortis de table sous les rires un peu forcés des convives.

      Suis-je trop sensible, il semble que oui, la suite m'endurcira un peu plus.

      Deux jours après, je reçus l'autorisation d'accompagner l'équipage du DC 3. Deux heures et demie de vol, un atterrissage de nuit sur une route goudronnée qui sert de piste d'atterrissage. Déchargement de caisses qui ne sont pas essentiellement des médicaments et, en suivant, chargement des enfants.

      Disposés les uns à coté des autres, 60 à 70 petits corps, qui n'ont même pas la force de gémir, sont embarqués pour ce qui est pour eux l'espoir d'un mieux vivre. Les soldats et infirmiers biafrais n'ont pas la maigreur de nos passagers, quelques uns sont même gras et joufflus. C'est la population civile qui supporte le poids de cette guerre et, bien sûr, les enfants plus que les adultes.
      Très tôt, à la pique du jour, nous décollons vers le Gabon. Je vois sur le bord des routes des cadavres qui, couverts de charognards, donnent à la mort un plus triste visage....


Dr. Kouchner

      Le retour est silencieux, l'équipage est muet, il n'y a pas d'infirmiers à bord, il faut faire vite si l'on veut sauver quelques âmes.
      Mon séjour se termine mais j'ai le temps de voir arriver un gros colis de "Terre des Hommes" avec, bien sûr, beaucoup de vêtements mais aussi des jouets, et une petite poupée de couleur noire que ma fille avait donnée. Elle fut attribuée à une jeune biafraise qui ne s'en sépara plus. Une douceur au coeur, dans un Univers que je ne comprends pas.

      L'avion à réaction qui m'emporte vers Paris ne mettra que 4 heures pour se poser à Orly. Le retour est brutal.
      Le Biafra pour les Français est encore une énigme. La télé n'y est pas encore allée. On n'a rien vu, on ne sait rien ...
      Mes photos sont difficiles à regarder, d'autan plus qu'elles sont les premières.
      Elles iront se faire voir au plus haut de l'Etat, et par la suite, plusieurs équipes de presse, de cinéastes, iront vérifier ce que j'avais vu et rendront compte selon leur sensibilité. Le Dr Kouchner n'était pas aussi illustre qu'aujourd'hui, mais la détresse du Biafra l'a incité avec d'autres, à créer " Médecins sans frontière", oeuvre humanitaire qui n'avait pas de précédent.
      Bien plus tard, à Paris, je rencontrai mon ami Berges, un reporter Photographe indépendant, parti après moi pour le Biafra. II y avait séjourné longuement et avait rapporté des photos poignantes, entre autres celle d'un vautour en vol, avec dans son bec un crâne. Elle faisait penser à un insigne que portaient les S.S. Aucun journal n'a voulu la publier.
      Je pense que je n'aurais pas eu le courage de la faire. Trop sensible, avez vous dit, certainement ....
      De retour auprès de mon épouse, je fus longtemps habité par des cauchemars, je restai pendant 15 jours au régime végétarien sans vouloir toucher un morceau de viande. J'ai aussi longtemps hésité à lui montrer toutes les photos que j'avais prises.

BIAFRA : AVANT PROPOS
Extraits de " Foccart parle" Editions Fayard 01/1995

Donc, de Gaulle souhaite la victoire d'Ojukwu. Et quand dit que la France ne devra pas intervenir, il sous-entend : " ouvertement " ?

Pas si vite. Bien entendu, puisque le Général souhaite la victoire du Biafra, il est logique que la France y contribue. Mais il y a un autre impératif, celui de ne pas heurter de front l'Angleterre, qui soutient Lagos. Il s'ensuit une certaine expectative, et la pression d'Houphouët sera décisive pour faire pencher la balance. Par la suite, l'engagement français serait resté plus modéré si le président de la République de Côte d'Ivoire n'avait pas pesé constamment.
Le point de départ est l'audience du 27 septembre 1967. Ce jour-là, Houphouët demande au Général qu'Elf verse au Biafra les redevances dues au Nigeria pour I'extraction de pétrole dans la province sécessionniste, que la compagnie a gelées, et sachant qu'Ojukwu utilisera cet argent pour acheter des armes au Portugal. Il obtient partiellement satisfaction. Les semaines suivantes, il revient à la charge et propose un mécanisme. Il comprend, dit-il, que la France ne peut pas aider ouvertement, donc directement, le Biafra. La solution est qu'elle aide la Côte d'ivoire à aider le Biafra. Il demande de l'argent et des armes. Le Général est très réticent. Il finit quand même par autoriser une opération qui doit rester secrète. Elle consiste à laisser filer vers la Côte d'Ivoire des armes récupérées sur l'ennemi pendant la Guerre mondiale, apte en avoir effacé les matricules.

Le Biafra a donc deux avocats auprès du Général : Félix Houphouët-Boigny et Jacques Foccart?

Je ne suis pas un avocat du Biafra. Je contribue, à mon niveau, à l'exécution d'une politique définie par le Général.

Avec zèle...
Qui organise la formidable campagne de presse en faveur du Biafra?
Je crois qu'elle est spontanée. Les journalistes ont découvert la grande misère des Biafrais. C'est un bon sujet. L'opinion s'émeut et le public en demande toujours plus. Nous facilitons, bien entendu, le transport des reporters et des équipes de télévision par des avions militaires jusqu'à Libreville et, de là, par les réseaux qui desservent le Biafra.


RETROVISION

      Ce texte n'est pas une variante des histoires de la comtesse de Ségur,
      Ce n'est pas non plus un traité scientifique : c'est un témoignage.
      Un témoignage oculaire, écrit par un témoin privilégié, mais dont on peut contester les dires, sans pour cela qu'il soit jugé comme faux témoin.
      Ce qui est vrai aujourd'hui sera faux demain.
      Que la Science, la Technologie, dépassent celles de ma génération, c'est la normalité, mais mon plus cher désir serait que mes écrits soient annotés, gribouillés, commentés afin que je puisse encore m'instruire, discuter, avec ceux dont le savoir est neuf, l'expérience récente. J'aimerais que mes petits enfants corrigent leur grand père, lui tiennent la main qu'il aura tendue, pour l'aiguiller vers ce qui sera leur avenir.
      Si je n'ai plus de main à tendre, qu'ils ne renoncent pas à griffonner ces vieux écrits, j'aurai l'impression, d'où je suis, de revivre en participant à la conversation.
      Tout le monde a un vécu, toute vie a son intérêt, encore faut-il le courage de l'écrire, de se prêter à la critique, et de dénuder en public ses sentiments.
      Ce strip-tease de mon ego demande un effort. Je l'ai fait.
      Qu'importe ! Les Egyptiens cherchaient l'immortalité dans leurs Pyramides, moi, ce que j'espère, c'est une continuité.
      Ce serait une histoire racontée par un membre de notre famille à travers les âges. Peut-être à travers les étoiles ...
      Le Boulou, le 1er septembre 2002
FIN de la 2ème PARTIE --- A SUIVRE
Histoire écrite en l'an 2001 par Robert ANTOINE
Photographies de l'auteur

A ma femme, à mes filles
A M. et Mme Roger Fauthoux
A ceux qui m'ont aidé à retrouver
une documentation perdue

M. ANTOINE nous fait l'honneur de la diffusion, par épisodes sur notre site, de ce livre de souvenirs. Pour ceux qui voudraient posseder ce livre, il est vendu par l'auteur au prix de 25 Euros (hors frais d'envoi).
Adresse de courriel, cliquez ICI --> : M. Robert Antoine


NOTRE QUARTIER

                Nous sommes tous nés dans ce quartier
                Des espadrilles, pas de souliers,
                Autour d'une table, un verre d'anis
                Nous étions gais entre vrais amis
                Nous n'avions pas beaucoup d'argent
                La bonne humeur régnait pourtant
                Nous partagions notre allégresse
                Surtout les jours de grande détresse
                A Bab-El-oued nous sommes nés
                Avons passé de belles années
                Les juifs, les arabes, les chrétiens
                Marchaient, sans peur, main dans la main
                Dans ce quartier nous sommes nés
                Des Trois Horloges à la rue Verdier,
                D'la Basseta à la Placette
                Nous aimions tous faire la fête.
                Grandes avenues, connaissions pas
                Des grands galas ne faisions pas
                La fraternité nous unissait
                Nous aimions cette Liberté.
                Nous avions tous le verbe haut
                Le rire aussi, mais bien plus haut,
                Des gens très simples nous étions
                Heureux de vivre en réunion.
                Hélas pour nous tout s'est divisé
                Il a fallu quitter le quartier,
                Saint Joseph est devenue Mosquée
                Le bar des Sports vend des effets.
                Dans ce quartier nous étions nés
                Il est maintenant tout dégradé
                Les ordures encombrent les rues
                Les arbres aussi ont disparus
                Que reste-t-il de notre présence
                Des regrets, des désespérances,
                La folie d'une drôle de guerre
                A eu pour effet secondaire
                D'apporter au peuple d'Algérie
                La fin d'une idéologie.
                Des pieds-noirs ils demandent le retour
                Afin que renaissent les beaux jours.
Christian ROEHRIG       

LETTRES A UN METROPOLITAIN
Envoyé par Mme Anne Marie Berger/Gallo
Par le CERCLE D'ÉTUDES ALGERIENNES
ÉDITIONS REGIREX (1960)

L'homme le plus parfait est celui qui est le plus utile à ses frères.
      
 
LETTRE N° 8

       Après l'aspect économique et social du problème algérien, que nous avons examiné dans notre lettre précédente, il nous reste à envisager l'aspect politique de ce même problème.
       Précisons dès l'abord qu'il s'agit de la politique interne, de celle qui, le mot étant pris dans son sens étymologique, concerne la vie en commun des habitants de la cité. Car il existe aussi un problème de politique ex-terne dont nous aurons l'occasion de reparler.
       Aux termes de nos lettres n 5 et 6, nous avons décrit les deux grandes communautés d'Algérie, nous avons fait l'historique de leurs rapports sans essayer de dissimuler les difficultés auxquelles ils avaient donné lieu, ni les fautes commises de part et d'autre.
       Pour nous résumer, disons qu'une partie de la communauté musulmane, parvenue à un certain stade d'évolution, a eu soif de promotion sociale et d'égalité politique et qu'elle a, parfois, manifesté son impatience avec un manque de mesure qui a heurté les Européens lesquels, de leur côté, n'ont pas fait preuve de toute la compréhension nécessaire.
       Tout ceci est du passé, un passé qui ne saurait renaître, depuis le 13 mai 1958 dont le Général de Gaulle, alors chef du Gouvernement et parlant en tant que tel, a lui-même tiré les conséquences aux termes de déclarations solennelles (il ne s'agit pas de conversations privées ou de bavardages de popote) faites à Alger et à Mostaganem les 4 et 6 juin 1958 :
              " Français à part entière, dans un même collège (électoral), nous allons le montrer pas plus tard que dans trois mois, dans l'occasion solennelle où tous les Français, y compris dix millions de Français d'Algérie, auront à décider de leur propre destin..." ; " ...de cette consultation nationale (1) naîtront des institutions nouvelles à l'intérieur desquelles l'Algérie aura, comme les autres Français, ses représentants et c'est avec ces représentants que l'on verra ce qu'il y a à faire pour qu'il n'y ait plus ici que dix millions de Français de la même sorte..."
              (Alger, 4 juin 1958).
              " Il n'y a plus ici, je le proclame au nom de la France et je vous en donne ma parole, que des Français à part entière, des compatriotes, des concitoyens, des frères, qui marchent désormais dans la vie en se tenant par la main " (Mostaganem, 6 juin 1958).
       Tel est le principe, officiellement proclamé, qui met un point final à cette " querelle de famille" : tous les habitants d'Algérie et de Métropole sont Français, égaux devant la loi avec les mêmes droits et les mêmes devoirs.
       Ainsi se trouve satisfait ce désir que les musulmans portaient au fond de leur coeur : celui d'avoir la France comme patrie. Plus encore peut être que le souci d'améliorer leur condition matérielle, leurs aspirations, leur seule aspiration, allait vers leur admission au sein de la France. Ils ont besoin de pain, mais ils ont besoin de le manger à la table familiale, de s'asseoir à ce foyer que la France a toujours ouvert avec générosité, sinon avec discernement, et qu'elle ne pouvait refuser à des hommes qui au cours de trois guerres l'avaient servie sans ménager leurs souffrances et leur sang.

       Le fond du problème politique algérien c'est sans doute Ferhat Abbas (2) qui l'a découvert quand il déclarait en 1936 :

       "Les hommes morts pour l'idéal patriotique sont journellement honorés et respectés. Ma vie ne vaut pas plus que la leur, et cependant je ne mourrais pas pour la patrie algérienne parce que cette patrie n'existe pas. Je ne l'ai pas découverte. J'ai interrogé l'histoire, j'ai interrogé les vivants et les morts, j'ai visité les cimetières : personne ne m'en a parlé.

       "Sans doute ai-je trouvé " l'Empire Arabe ", "l'Empire Musulman " qui honorent l'Islam et notre race. Mais ces empires se sont éteints. Ils correspondraient à l'Empire latin et au Saint Empire Romain Germanique de l'époque médiévale. Ils sont nés pour une époque et une humanité qui ne sont plus les nôtres. Un Algérien songerait-il sérieusement à bâtir sérieusement l'avenir avec ces poussières du passé ? Les Don Quichotte ne sont plus de notre siècle.

       "La France c'est moi parce que je suis le nombre, je suis le soldat, je suis l'ouvrier, je suis l'artisan, je suis le consommateur. Ecarter ma collaboration, mon bien-être et mon tribut à l'oeuvre commune est une hérésie grossière. Les intérêts de la France sont les nôtres dès l'instant où nos intérêts deviennent ceux de la France ".

       Et comme disait le poète :
       On ne peut pas vivre sans pain.
       On ne peut pas non plus vivre sans la patrie. (Victor Hugo : Les Châtiments.)

       Le principe est donc que les habitants d'Algérie, de confession musulmane, sont comme les autres habitants des autres provinces françaises, des Français " avec les mêmes droits et les mêmes devoirs ". Mais il convient de se garder d'une erreur, trop commune, qui consiste à vouloir tirer d'un principe d'ailleurs excellent, immédiatement toutes ses conséquences. Nous ne sommes pas dans le domaine abstrait de la mathématique, mais dans celui, concret et humain, de la politique. Une chose est de poser une règle, autre chose est d'en définir les modalités d'application. Le but d'une loi, surtout lorsqu'elle touche à une matière fondamentale, est de fixer un objectif et de tracer un axe de marche. Ensuite, le rôle de l'Administration ou des juridictions, selon le cas, est de faire coller le principe à la réalité, laquelle est nécessairement mouvante. C'est pourquoi il existe, en droit privé comme en droit administratif, une jurisprudence ; pourquoi la plupart des textes administratifs comportent des " dispositions transitoires " et renvoient à un autre texte, de degré inférieur, le soin de fixer " les conditions d'application des présentes dispositions ".
       Il s'agit, en effet, de tenir compte de la disparité des faits et de leur évolution. Il faut en quelque sorte, enrouler la réalité, avec tout ce qu'elle comporte de changeant et de divers, autour de l'axe rigide que constitue le principe légal.
       Prétendre appliquer à tous les habitants d'Algérie le principe de l'égalité des droits et des devoirs serait, dans l'état actuel des choses, un non sens absolu. Et contrairement à ce que l'on pense, c'est moins l'égalité des droits que celle des devoirs qui serait irréalisable.
       Ainsi que nous l'avons déjà exposé, une partie très importante de la population musulmane, et il ne s'agit pas seulement des ruraux, en est encore à un degré d'évolution très différent de celui qu'ont atteint les Européens et ceux des musulmans qui se sont " européanisés ". Non seulement ils sont illettrés, mais généralement ils ne savent pas parler le français. Ils ont conservé leurs coutumes, leurs modes de vie ; leur manque de maturité politique est évident.

       Aussi longtemps que, par le jeu d'une évolution qu'il appartient à la France de contrôler, cette fraction de la population ne se sera pas alignée sur l'autre, il sera indispensable de maintenir, en sa faveur, un certain nombre de mesures destinées à la guider et à la protéger.
       Lui appliquer brutalement une prétendue égalité re-viendrait à l'abandonner aux difficultés et aux embûches d'une civilisation compliquée qu'elle n'est pas encore, matériellement et moralement, préparée à affronter.

       En d'autres termes, le principe de l'égalité étant posé en droit, il convient de prévoir, pour une période dont il est naturellement impossible de fixer la durée, une série de mesures transitoires dans le cadre desquelles la plus grande partie de la population d'Algérie pourra évoluer, c'est-à-dire se transformer progressivement et passer de l'état actuel à cet état futur où l'égalité pourra être réalisé en fait.

       On observera que cette politique est très exactement celle qui, tout au long de l'ancien régime, fut appliquée aux provinces nouvellement rattachées : proclamation du rattachement juridique, mais respect des particularismes locaux ; attente patiente que ceux-ci s'estompent progressivement au rythme de l'évolution des moeurs.

       Que doivent être ces mesures transitoires ? Elles correspondront, bien entendu, aux particularités que présente actuellement l'Algérie et ces particularités, que l'évolution effacera progressivement, nous les avons déjà signalées au cours de nos lettres précédentes.
       La première correspond à l'état d'évolution différent où se trouve encore une grande partie de la population musulmane. II n'est pas question de revenir sur le principe de l'égalité politique, mais il faut concevoir que cette population exige, en raison même de son état, d'être guidée et conseillée. Elle a besoin de faire son éducation politique en commençant par l'échelon initial, c'est-à-dire la commune : c'est dire qu'il convient de maintenir les Sections Administratives Spécialisées (S.A.S.) dont l'action a sans doute été déterminante pour le salut de l'Algérie. On nous permettra à cette occasion de nous départir de notre objectivité systématique, pour adresser une pensée reconnaissante à tous ceux, officiers, sous-officiers, mokhaznis et civils du Corps des Affaires Algériennes, qui sont4ombés dans l'accomplissement de leur périlleuse et exaltante mission.
       Plus encore que les hommes, les femmes, qui " tiennent l'Algérie de demain sur leurs genoux ", ont besoin d'être guidées dans leur évolution. Il sera donc nécessaire de laisser à leur tâche et même de multiplier les Mouvements d'action féminine et particulièrement les admirables Equipes Médico-sociales Itinérantes (E.M.S.I.).
       La seconde particularité vient du fait que la population musulmane possède une natalité anormalement élevée, qui non seulement la menace elle-même, mais dont les conséquences mathématiques alarment la Métropole. On a parlé, avec quelque pessimisme sans doute, d'une " algérianisation " de la France se substituant à la francisation de l'Algérie. II convient néanmoins de se prémunir contre ce risque et, sans préjudice des mesures propres à freiner la natalité, de prendre certaines dispositions à l'égard de ce déséquilibre démographique : régime des allocations familiales, régime électoral destiné à protéger la Métropole contre les éventuel-les conséquences de l'accroissement démographique.
       Un troisième problème est posé par l'application de certaines règles du Coran, dont nous avons déjà dit qu'il était à la fois un Code Civil et un Code religieux. Il s'agit principalement du mariage et du droit successoral, les Kabyles suivant d'ailleurs à cet égard des règles coutumières qui leur sont propres. Sur le plan religieux, rien ne s'opposerait à ce que le Code Civil soit substitué à ces dispositions, mais il faut comprendre qu'elles ont la force de coutumes auxquelles la population musulmane, celle des campagnes notamment, est fortement attachée. Là encore il faut attendre, pour sanctionner juridiquement la transformation, que l'évolution des moeurs, sous l'influence des femmes notamment, se soit produite. A titre transitoire, il convient donc de laisser aux musulmans la possibilité de conserver leur " statut personnel " jusqu'au moment où celui-ci ne répondra plus aux structures nouvelles et à l'esprit nouveau.

(1) Il s'agissait du référendum portant sur le texte de la nouvelle Constitution et qui eut lieu le 29 septembre 1958.
(2) On sait que Ferhat Abbas est aujourd'hui président du soi-disant "Gouvernement provisoire de la République Algérienne ".


Dessine-moi un menteur….
Saint-Exupéry, victime des mensonges gaullistes
Par le Docteur Pierre CATTIN
(Parue dans la Lettre de VERITAS N° 84
http://comite.veritas.online.fr
 
Peut on être patriote sans avoir été gaulliste ?

 
       Lorsque Antoine de Saint-Exupéry arrive aux États-Unis à la fin de la sombre année de 1940, ce n'est pas un inconnu. II y a déjà fait trois séjours, et non seulement sa notoriété de pionnier de l'aviation commerciale, aux temps héroïques où elle constituait un exploit périlleux, (Mermoz y avait trouvé la mort en 1936), mais aussi le succès de ses livres, l'avaient rendu populaire. Après " Courrier Sud ", puis " Vol de nuit " (prix Femina de 1931), c'est surtout " Terre des Hommes " (prix de l'Académie Française de 1939) qui a connu un prodigieux succès. Traduit sous le titre de " Wind sand and stars ", il va bientôt recevoir le National Book Award, le prix national du livre aux États-Unis, qui sera remis à son auteur au cours d'une cérémonie réunissant 1.500 personnes à New York le 15 janvier 1941.

       Ce qui frappe Saint-Exupéry, d'emblée, c'est la désunion qui existe dans les milieux français d'Amérique, c'est la grave dissension qui oppose les partisans de Pétain et de l'Armistice et ceux de De Gaulle. Pourquoi ce dernier prétend-il avoir l'exclusivité du patriotisme, représenter à lui seul la France, ce qui lui fait jeter l'anathème contre tous ceux qui ne l'ont pas rejoint ? Son hostilité sur les ondes de la BBC est dirigée beaucoup plus contre les " gens de Vichy " que contre les Nazis.

       Sollicité à plusieurs reprises pour adhérer au gaullisme, Saint-Exupéry refuse à cause du sectarisme de ce dernier, et réfute le slogan " armistice égale trahison ". Combattant jusqu'au dernier jour dans son escadrille, décimée aux 2/3, il a vu du haut du ciel l'ampleur et la rapidité de la déroute, la marée inimaginable des 6 à 7 millions de réfugiés fuyant vers le sud du pays, qui va s'entremêler, depuis l'entrée en guerre de l'Italie, avec d'autres réfugiés qui fuient la Côte d'Azur en sens inverse, embouteillant toutes les voies de communications et rendant impraticable l'embarquement de 500 000 hommes vers l'Afrique du Nord que De Gaulle préconisait, comme alternative à l'Armistice... Saint-Exupéry a vu ensuite en Afrique du Nord une impréparation militaire totale, l'Armée de terre privée de 150 000 hommes envoyés en métropole, les meilleures troupes, le dénuement des unités restantes privées de blindés, d'antichars et de DCA, un parc automobile fantôme, la grande misère de l'aviation récupérée de métropole, privée de munitions, l'état archaïque des aérodromes, sans radar ni DCA efficace.
       Enfin l'Afrique du Nord est totalement dépourvue d'usines d'armement, d'industries automobiles, de ressources énergétiques, n'ayant ni pétrole ni charbon. Refuser l'Armistice ? " On avait compris qu'il n'aurait servi à rien de continuer à se battre, on aurait eu deux millions de morts ou de prisonniers de plus, voilà tout ", confiait Saint-Exupéry au journaliste français Roussy de Sales, ancien correspondant de " Paris-Soir " à New York, (François Gerber " Saint-Exupéry " Denoêl - 2000 - page 155).

       Une démonstration aussi convaincante, par un combattant et un écrivain aussi populaire en Amérique, va attirer à son auteur l'hostilité du parti gaulliste, qui va devenir " un ennemi borné, irréductible qui ne reculera pas devant la plus méprisable des vengeances " (Maurice Migeo " Saint-Exupéry" Flammarion 1958 page 230). " Quand l'Amérique entrera en guerre, on vous fera mettre dans un camp de concentration ", lui répliquent les gaullistes par la bouche de Léon Wencelius, professeur de philosophie détaché au Swathmore Collège ...

       Heureusement Saint-Exupéry rencontre aussi des Français qui entendent son langage : l'académicien André Maurois, l'écrivain Jules Romains, Alexis Léger, dit Saint John Perse, futur prix Nobel de littérature, tous qualifiés de traîtres par le parti gaulliste. Méprisant ces calomnies, profitant de son immense popularité, Saint-Exupéry va entreprendre un cycle de conférences à travers les États-Unis pour combattre l'isolationnisme qui reste encore très puissant, groupé au sein de l'association América First, menée par le Colonel Lindberg, célèbre aviateur, le vainqueur de l'Atlantique. En février 1942 la publication de son livre "Pilote de Guerre ", qui, traduit sous le titre de " Flight to Arras ", connaît un succès encore plus grand que " Terre des Hommes ", donne lieu à des commentaires enthousiastes de la presse américaine et canadienne, et va constituer le meilleur plaidoyer populaire pour l'entrée en guerre des États-Unis. " Avec La Lettre à un Otage " qui va suivre, les livres de Saint-Exupéry constituent, avec les discours de Churchill, les meilleures réponses que les démocraties aient trouvées depuis 20 ans à opposer aux théories de la violence du Mein Kampf d'Hitler " écrit le chroniqueur Edward Week dans la revue Atlantis (Curtis Cate " Saint-Exupéry ", Grasset 1972 page 437). Les livres de l'écrivain français constituent aussi des réquisitoires contre l'idéologie nazie et tout particulièrement contre son antisémitisme.

       De nouveau sollicité par le parti gaulliste, Saint-Exupéry refuse toute adhésion. L'attaque de Dakar, de la Syrie par la France Combattante, plus de 1000 morts français dit " vichystes ", le révolte maintenant davantage. De Gaulle n'hésite pas à provoquer des combats fratricides pour essayer de se constituer des territoires dits libérés pour consolider son mouvement qui reste embryonnaire, malgré certains aspects héroïques, tels ceux de Leclerc au Fezzan et de Koenig à Bir Hakeim.

       Mais Saint-Exupéry a démasqué chez les gaullistes une faction politique, avide de pouvoir, préoccupée surtout de s'approprier les places, les postes de commande. Ils prétendent tirer bénéfice d'un sacrifice : " Il n'est de sacrifice vrai que sans bénéfice " (lettre à son ami Pierre Chevrier " Lettre à un ami " Gallimard, 1950 - page 250). Chaque combattant a le droit de se dire " de France " mais non de se dire " la France" : c'est tout autre chose. La nation française, notre héritage spirituel à tous, ne peut être la propriété d'un clan. " Nous ne fondons pas la France, nous ne pouvons que la servir ", écrit Saint-Exupéry dans sa " Lettre à un otage ". " Nous n'aurons droit à aucune reconnaissance. Il n'y a aucune commune mesure entre le combat libre et l'écrasement dans la nuit, entre le métier de soldat et celui des otages. Vous êtes les Saints ". (François Gerber, op. cit. page 207).

       Le débarquement allié en Afrique du Nord le 8 novembre 1942 inspire à Saint-Exupéry un appel pathétique à l'union des Français dans le combat; " Nos litiges valent-ils nos haines? Qui peut prétendre avoir absolument raison ? Le champ visuel de l'homme est minuscule et le langage de l'homme un instrument imparfait... l'occupation allemande de tout le territoire a résolu nos conflits et doit apaiser nos drames de conscience. Français voulez vous enfin vous réconcilier ? Abandonnons tout esprit de parti ... les seules places à prendre sont celles des soldats au combat ou les places tranquilles dans quelques cimetières en Afrique. Je ne me reconnais aucune vocation de juge, de justicier. Je refuse le parti unique, car la France n'est ni un parti ni une secte, et nous sommes tous de France. Français réconcilions-nous pour servir. " Cet appel sera publié dans le New York Time Magazine, dans " Canada" le journal de Montréal le 29 novembre, et largement diffusé dans la presse d'Afrique du Nord.

       Saint-Exupéry voit dans les événements qui s'y passent la suprême justification de l'armistice de 1940, qui avait pour but de maintenir cette partie de l'Empire en dehors de la mainmise de l'ennemi. Les alliés peuvent s'y installer en force maintenant, comme base de départ pour la libération, alors qu'ils en étaient incapables, deux ans auparavant. C'était l'opinion du Général Weygand, qui avait reçu une lettre de Roosevelt en date du 27 décembre 1941, le félicitant chaleureusement d'avoir défendu l'Afrique du Nord contre l'ennemi (J. Weygand " Weygand mon père " Flammarion 1970). A Londres, De Gaulle fulmine. Son porte-parole François Quilici écrit dans la Marseillaise, journal français de Londres : " L'occupation par les Américains d'une terre française frappe notre pays plus sévèrement que l'occupation par les Allemands des départements de métropole. (L'Allemagne vient d'envahir la zone libre). C'est une atteinte à notre honneur ". Ainsi le premier pas décisif des alliées vers la libération de la France est condamné par De Gaulle parce qu'il n'y participe pas, lui (Curtis Cate op. cit. page 454).

       Mais la roue tourne : De Gaulle a passé un accord avec Giraud, il est dans la place.

       Après avoir vaincu de nombreux obstacles et entraves, le Commandant de Saint-Exupéry va reprendre sa place dans une escadrille. Il découvre à Alger une atmosphère d'intrigues politiques, de courses aux places, la veulerie endimanchée de patriotisme, " la haine, tout est sous le signe de la haine ". Les gaullistes veulent leur revanche partout. Heureusement l'auteur de " Pilote de guerre " sympathise avec le général Giraud. Tous deux ont comme devise " La France d'abord, le seul ennemi c'est l'occupant nazi ". " Malgré les pires tragédies - proclame Giraud le 14 juin - la flamme que chaque Français porte en lui est restée vivante et vingt siècles d'histoire nous poussent en avant ... Nous ne sommes pas ici pour édifier des carrières politiques personnelles. Le soldat ne doit songer qu'à un seul but la libération de la France. " (Écho d'Alger du 15 juin 1943). Giraud et Saint-Exupéry sont animés du même patriotisme le plus pur: celui qui est totalement désintéressé. Ils le prouveront tous deux, le premier par l'abnégation totale dont il fera preuve en se retirant dans l'ombre pour mettre fin à la discorde, et le second par le sacrifice de sa vie librement consenti.

       Mais De Gaulle étant bientôt seul maître du jeu, l'heure de la vengeance sera terrible.

       Tous les hauts fonctionnaires civils et militaires en poste sont révoqués, plusieurs jetés en prison ; les généraux Odic, Bergeret, Noguès, les gouverneurs Peyrouton, Pierre Boisson, Yves Catel. Leur crime : avoir été nommés par Pétain ou Weygand. Peu importe la rigueur de leur patriotisme dans le maintien de l'Empire hors de la mainmise de l'ennemi. C'est l'ostracisme total : pas de réconciliation entre Français! Saint-Exupéry est indigné. Il ne saura jamais que Boisson, Bergeret et Chatel mourront dans la misère, d'épuisement physique et le chagrin, plusieurs années après, sans avoir été jugés, car aucun juge ne pourra dresser un acte accusation valable contre ces victimes de la vengeance. Ces mises à mort silencieuses et programmées évoquent la guillotine sèche d'après Thermidor. Que va-t-il se passer lors de la libération de la France ? " Le salut de la France ne réside pas dans une épuration sanglante par les fanatiques du parti unique " écrit Saint-Exupéry le 16 juin dans une lettre à Robert Murphy (M. Migeo, op. cit. page 236). " Il ne faudra pas fusiller trop avant de savoir qui fusiller... On n'évitera pas la terreur. Et cette terreur fusillera au nom d'un Coran informulé, le pire de tous " (François Gerber " Le Coran de la vengeance " op. cit. Page 238): Joseph Kessel, vieil ami, rend visite à Saint-Exupéry : il est passé au gaullisme, cela se voit tout de suite dans ses propos : " Il faudra un bain de sang (français bien sûr) cela est inévitable cela a toujours été " (op. cit. page 238)... A la libération le gaullisme va-t-il réveiller les vieux antagonismes entre Français, leur appétit de massacre ?

       L'aviateur va reprendre enfin le combat, loin de ces intrigues du Comité de Libération d'Alger. " Voici l'heure du danger, alors on s'épaule l'un l'autre. On découvre que l'on appartient à une communauté. On grandit par la découverte d'autres consciences. On est semblable à un prisonnier délivré qui s'émerveille de l'immensité de la mer... Le risque du combat fait tomber le culte de la chair. L'homme ne s'intéresse plus à soi. Il ne se retranche pas s'il meurt, il ne se perd pas, il se retrouve. Et la mort au combat devient échange suprême, dernier don d'une vie accomplie à une vie qui continue ".Voilà l'homme dont De Gaulle disait de lui " il ne sait faire que des tours de carte ". Car, pendant qu'il combat, les gaullistes ne l'épargnent pas. Les épithètes de fasciste et même de nazi ne lui seront pas épargnées. On contestera sa Croix de Guerre car elle fut donnée par Pétain (comme pour tous les combattants de mai et Juin 1940 qui avaient mérité cette décoration !). On l'accusera d'avoir choisi la francisque du Maréchal comme emblème de son escadrille, alors que cet insigne de la hache, surnom de la même unité, datait de la Grande Guerre. Plus grave, De Gaulle va faire interdire l'édition et la vente de tous les livres de Saint-Exupéry en Afrique du Nord, et il rayera de sa main le nom de l'écrivain de la liste des Écrivains Combattants, lors d'une exposition à Alger. Tandis que, dans le même temps, les Allemands interdisaient aussi les écrits de Saint-Exupéry en France occupée ! Cette haine le tuera, prévoyait son ami fidèle, Jean Amrouche. Lors de sa disparition, le 31 juillet 1944, les gaullistes répéteront et écriront que Saint-Exupéry avait déserté pour rejoindre Pétain à Vichy. (Alain Virecondel et " Saint-Exupéry " Julliard 1994-page 129).


La poignée de main de Judas
De Gaulle a déjà décidé d'éliminer Giraud.

       Comme le redoutait Saint-Exupéry, les lendemains de la libération seront sanglants avec l'Epuration : ce mot lui répugnait, il rappelait Robespierre, Saint Just, la Terreur, la loi des suspects. On verra la sacralisation d'une justice de classe par les communistes, jointe à celle de la vengeance politique par les gaullistes. Les études de Robert Aron, de Henri Amouroux, préciseront des chiffres : 15.000 exécutions extrajudiciaires, ce qui veut dire ASSASSINATS (beaucoup plus, affirmeront Adrien Tixier et P.H. Teigten, pourtant gaullistes et résistants authentiques) 150.000 arrestations dans les trois derniers mois de 1944, dont les 2/3 maintenues sans jugement pendant des mois dans les pires conditions, souvent dans les mêmes camps où les Nazis détenaient les déportés, avant que ces nouvelles victimes de l'épuration ne soient relaxées. Fruits de dénonciations, règlements de compte personnels, le plus souvent. 50.000 sanctions " d'indignité nationale " appliquées par des Chambres Civiques instaurées par le décret du 26 août 1944. Mort civile et professionnelle pour les victimes, ce qui faisait, avec les familles, plus de 200 000 personnes retranchées de la vie sociale, réduites à la honte et à la misère... L'exposé des motifs: " Nécessité de purifier la patrie en punissant des hommes et des femmes qui, SANS ENFREINDRE UNE LOI PENALE EXISTANTE, se sont livrés à une activité antinationale caractérisée... ", c'est-à-dire, en fait, laissée imprécise, de façon à donner toute licence et libre cours à toutes les vengeances. Toutes les règles juridiques d'un état de droit écrit étaient bafouées, comme dans un Etat totalitaire, c'était l'intrusion cynique et brutale du politique dans le judiciaire rappelant les méthodes staliniennes.

       Le procès de ces violences légalisées fut fait par un résistant authentique de la première heure et gaulliste historique, le Colonel REMY qui dénonça publiquement en mars 1950 " CES CONDAMNATIONS PRONONCEES PAR DES TRIBUNAUX DE FORTUNE, DANS UN CLIMAT DE HAINE ET DE RANCUNE. CES FOULES D'EXECUTIONS SOMMAIRES SOUVENT COMMISES DANS D'ATROCES CONDITIONS... QUI ONT ENSANGLANTE ET SOUILLE LA LIBERATION " (Rémy " Dix ans avec De Gaulle ", Presse de la Cité 1972, page 327). Ces tribunaux avaient été instaurés par De Gaulle, avec membres des jurys sélectionnés et jugement sans appel ! Pour avoir dit la vérité, le Colonel Rémy sera exclu du RPF dont il était membre du comité directeur.

       Le gaullisme aurait pu être une héroïque aventure d'une poignée d'hommes d'élite, qui auraient été des exemples, des éléments fédérateurs pour la réunification de la France dans son retour au combat à partir de Novembre 1942. L'entreprendre plus tôt aurait été suicidaire. Mais très vite l'ambition démesurée d'un homme va défigurer la noblesse de ce combat précurseur dans une lutte acharnée pour le pouvoir, qui engendrera une cascade de luttes fratricides, dans le désarroi des consciences et la désunion des coeurs. Jusqu'à sa mort Saint-Exupéry oeuvra pour rétablir la concorde entre Français. Tristement lucide sur le triomphe prévisible, à la libération, du parti de la haine, impulsé par De Gaulle, il choisit, lui, de demeurer fidèle à l'humanisme généreux qui avait inspiré " Pilote de guerre ". " IL FAUT COMMENCER PAR LE SACRIFICE POUR FONDER L'AMOUR ENTRE LES HOMMES ". L'aspect hideux de ce gaullisme vengeur, qui endeuillera la Libération et les suites du drame algérien, les épigones de De Gaulle ne peuvent toujours pas, encore aujourd'hui, pardonner à un homme de haute valeur morale, à un grand écrivain, de l'avoir, dès l'origine, si magistralement démasqué.

Docteur Pierre CATTIN           

COMPLAINTE ALGERIENNE

               Ils ont fait la guerre d'Algérie,
               Il Fallait tuer tout ces Roumis
               Venus apporter la souffrance
               A un peuple en pleine opulence.
               Voilà ce que raconte l'Imam
               A ces analphabètes de l'Islam.
               Les Roumis venus de France
               Donnèrent au peuple l'espérance,
               Colonisèrent cette belle terre
               En apportant leur savoir faire.
               Eradiquèrent les épidémies
               Fertilisèrent le sol stérile.
               Asséchèrent les marécages
               Pour en faire des pâturages,
               Construisirent écoles et hôpitaux
               Plantèrent la vigne sur les coteaux.
               De belles villes sortirent de terre
               Dont la France en était fière.
               Ils ont fait la guerre d'Algérie
               Pour avoir une autre vie.
               Pour soi-disant leur délivrance,
               Ont fait la guerre à la France
               Ils ont chassé tous les pieds-noirs
               Les poursuivants de leur rasoir.
               Les colonisateurs ont disparus,
               La grande misère est revenue
               La saleté est dans les rues
               La pauvreté est toute nue.
               Quarante années ont passé
               La vie s'est grandement dégradée
               Plus de travail, plus de savoir
               Ne reste plus qu'le désespoir.
               Avoir tué tant d'innocents,
               Du p'tit bébé jusqu'aux plus grands
               Pour arriver à ce constat
               L'absurdité de ce combat.
               Viens à moi mon frère pieds-noirs
               Enlève moi cette vie noire
               Délivre moi de la souffrance
               Donne moi la joie de mon enfance.
Christian ROEHRIG       

Même le cochon pour les laïcs, est proscrit !
Envoyé par diverses sources


        Depuis quelques semaines, des soupes traditionnelles à base de porc sont distribuées dans diverses villes de France par des associations désireuses d'aider et de nourrir leurs compatriotes dans la misère.

        Ces Soupes populaires qui ne coûtent pas un sou aux pouvoirs publics ont été interdites car elles contenaient du porc, et cela est interdit dans certaines religions. Parce que des SDF appartenant à ces religions refusent d'accepter des repas chaud en ces temps de froideurs climatique et humaine, nous devons laisser mourir de faim les autres SDF qui eux voudraient bien manger ce qui leur est offert gratuitement et généreusement.

        La viande de porc fait partie intégrante de notre nourriture et cela depuis des temps immémoriaux. Il fait parti de nos traditions culinaires.
        C'est aussi la viande des pauvres, celle que les associations non subventionnées peuvent acheter avec des dons.
        Est-ce que la faim est un critère de discrimination ? Peu importe qu'une soupe soit cascher, soit agrémentée avec du cochon ou du mouton, l'essentiel c'est de manger et de ne pas crever de faim.

        Hier le voile, aujourd'hui le cochon, demain l'alcool. Le vin chaud pour les pauvres devra être proscrit. Après demain, il faudra leur lever la cigarette qui leur procure un peu de chaleur.
        La France marche sur la tête.

        Pourtant, le 14 janvier 2006, à la demande du maire de Strasbourg, le Préfet a interdit cette Soupe dans cette ville, fait intervenir les forces de police pour empêcher sa distribution et fait arrêter la responsable de l'association " Solidarité alsacienne " qui organisait la soupe.

        Heureusement que cette responsable est plus humaine que les autorités qui normalement ont en charge la gestion de la misère humaine. Et qu'en plus elle a de l'humour. Voici la lettre qu'elle a adressé à M. le Préfet.

Lettre ouverte de Chantal Spieler
à Monsieur Jean-Paul Faugère, Préfet du Bas-Rhin

        Monsieur le Préfet,

        Je ne suis pas sujette à la manie de la persécution, mais avouez tout de même qu'avec l'affaire qui nous occupe, je pourrais vite être atteinte par ce travers.

        Mes amis et moi-même serions en effet curieux de connaître les motivations qui sont les vôtres pour déployer un tel acharnement (limite obsessionnel) contre notre petite soupe.

        Confondre une distribution de soupe auprès des sans-abri avec une manifestation de rue relève en effet d'une appréciation pour le moins arbitraire.

        Mes " accompagnements " hebdomadaires au commissariat de police n'entament en rien ma nature guillerette car on y est bien reçu, mais la République a parfois des largesses qui m'échappent : l'envoi systématique d'un fourgon rempli d'une quinzaine de policiers et d'un commissaire à chacune de nos distributions de soupe me paraît en effet un tantinet surdimensionné. Enfin, c'est vous qui voyez !

        Nous ne faisons de mal à personne, c'est tout le contraire, et quelques sdf que nous avons dans nos relations ont très envie de vous le dire de vive voix. C'est pourquoi, je vous propose de venir nous faire une petite visite, à la bonne franquette, pour trinquer avec eux et goûter la soupe qui, dit-on est excellente. Et pour constater tout simplement que notre geste solidaire est très apprécié par nos amis de la rue.

        Ca vous ferait une sortie, et vous pourriez ainsi retenir que l'on peut pratiquer la solidarité en toute sérénité, à condition bien sûr que les agités de l'extrême gauche nous épargnent leurs gesticulations hystériques et autres vociférations devant notre stand. Il faudrait pour cela que vous assuriez votre rôle dans la préservation des libertés publiques.

        A propos de ces agités, je ne voudrais pas vous paraître irrévérencieuse, mais tout de même… il y a dans cette histoire tous les ingrédients de l'arroseur arrosé (l'arroseur, c'est vous). En effet, sans vos interdictions successives contre notre soupette, nous serions tranquilles dans la rue à nous geler les pieds et à servir les démunis. Et vous seriez vous aussi bien plus tranquille, les pieds au chaud dans votre joli bureau doré.

        Seulement voilà, il y a eu gaffe… Car il s'agit bien d'une gaffe, rassurez-moi ! Ne me dites pas que vous êtes à ce point sensible à la propagande totalitaire de la LCR ou aux leçons de morale que voudraient vous dicter Mesdames Keller et Trautmann !

        Une gaffe, disais-je, car vous avez là sauté à pieds joints dans une logique qui risque fort de vous compliquer la vie. Je vous explique :

        En interdisant la distribution de notre soupe au motif qu'elle contient du porc, vous vous fâchez pour de bon avec, dans l'ordre : le monde paysan, la confrérie des artisans charcutiers, et plus largement avec les alsaciens qui, comme vous ne le savez peut-être pas, sont fiers de leur gastronomie à laquelle ils ne sont pas prêts à renoncer, même pour vous être agréables.

        Attardons-nous encore un peu, si vous le voulez bien sur cette logique bizarre, et supputons ensemble : avez-vous pensé aux marchés de Noël ? Le critère religieux auquel ils font référence deviendra t-il demain un problème ? Il se pourrait en effet que d'aucuns se disent offensés par cette fâcheuse habitude que nous avons en France de mêler étroitement traditions populaires et fêtes chrétiennes. Aïe, aïe, aïe !

        J'ai bien peur que sur ce coup-là, vous n'ayez pas eu ce nécessaire sens de l'anticipation qui vous aurait évité bien des soucis.

        Bon, nous ne sommes pas vachards et nos intentions sont pacifiques. Nous sommes donc prêts à oublier cette petite fâcherie si vous êtes d'accord pour nous oublier aussi en nous laissant vaquer à notre guise dans la rue, cette rue qui appartient à tout le monde, y compris à nous !

        Soyez assuré, Monsieur le Préfet, du respect que j'ai pour la fonction que vous occupez.

        Chantal Spieler, responsable du collectif " Solidarité alsacienne "


Mon état d'âme ou…….
…….Qu'en est-il devenu de l'honneur Pieds-Noirs ?


           Depuis presque un demi-siècle notre communauté fait face aux calomnies, aux contre-vérités, aux affabulations propagées par nos détracteurs.
           Depuis un demi-siècle quelques uns de nos vaillants compatriotes se battent pour rétablir la vérité face à une France, à des médias qui continuent à occulter certaines vérités.
           Aujourd'hui nous sommes, nous-mêmes, confrontés à l'amnésie de certains compatriotes qui ont complètement oublié ou occulté les massacres dont a été victime la population européenne d'Algérie.
           
           Ces compatriotes (qui ne méritent pas ce qualificatif) ont oublié le massacre d'El-Halia perpétré par la population musulmane, certes poussée par les gens du FLN, mais poussée également par la haine.
           Ces compatriotes ont oublié la " chasse aux roumis " d'Oran également effectuée par une population musulmane en totale hystérie.
           Ces compatriotes ont oublié les nombreux gérants de ferme assassinés par leurs propres ouvriers.
           En un mot certains " rapatriés " ont oublié tous les méfaits auxquels nous avons été confrontés.
           Voici en quelques mots un préambule qui donnera matière à réflexion à la raison de cet " état d'âme ".

           De nombreuses controverses ont ébranlé notre communauté quant au retour en Algérie de certains de nos compatriotes.
           Moi-même étais un farouche opposant à tout retour dans ce qu'était notre pays car pour moi " je venais d'un pays qui n'existe plus " référence à une célèbre chanson de notre compatriote Jean-Pax Meffret.
           Le temps passant, j'ai quelque peu revu ma position et, j'ai bien admis que tout un chacun était libre de faire ce que bon lui semblait. Je me suis même mis à imaginer que je pourrai également faire un retour sur les lieux de mes origines.
           Certains, donc, de nos compatriotes sont retournés sur notre terre natale et, globalement, ils furent bien reçus.
           C'est sans doute pour cette dernière raison que l'on a pu assister à quelques dérives (tout au moins de mon point de vue).
           - On a d'abord vu certains faire ami-ami avec d'anciens " égorgeurs " et faire campagne pour le rapprochement Pieds-Noirs-Algériens.
           - Puis ce phénomène s'est accentué et lors d'un retour d'une ville d'Algérie, certaine, adressant un message électronique à tous les adhérents de l'association demandait : " le pardon et la réconciliation avec nos frères algériens "
           - L'amitié s'étant renforcée entre certains compatriotes et leurs hôtes, on assiste alors à l'adoption de certains us et coutumes des Algériens, plus particulièrement le déguisement dans la tenue vestimentaire de ces derniers et les danses frénétiques rythmées par la musique arabe.

           C'est ainsi que lors de l'envoi des vœux à tous les adhérents d'une association, on a constaté que l'illustration de cette carte de vœux était la représentation d'un couple (membre du bureau) affublés tous deux en arabe et dansant sur de la musique orientale.
           L'outrage à notre communauté était devenu flagrant et, tout naturellement, par retour j'indiquai aux " irresponsables " ma profonde indignation.
           - A-t-on vu des Juifs se déguiser en SS ?
           - A-t-on vu des Arméniens se déguiser en Turcs ?
           - Se sont-ils seulement interrogés sur les conséquences d'une telle irresponsabilité, sur l'outrage qu'ils portaient à nos morts, sur le déshonneur qu'ils faisaient subir à notre communauté ?

           Demain, que feront-ils ? Epouseront-ils l'Islam ? Feront-ils comme nos détracteurs, à nier les atrocités commises par le FLN ?
           Si une majorité des membres de cette association me fit part de leur soutien ; 3 d'entre eux se singularisèrent :
           - Le premier m'indiqua que c'était un déguisement sans conséquence et que je me trompais de cible !!!!!! qu'il fallait que je m'attaque aux hommes politiques. J'ai compris en cela qu'il ne fallait surtout pas dire à l'un de nos compatriotes qu'il était la honte de notre communauté et que des comportements irresponsables pouvaient encourager et entériner l'idée que l'on se fait de ceux que nous sommes.
           - Le second - professeur de philosophie - " bava " sur ma réaction en tentant de s'exprimer intellectuellement et en proférant des propos totalement hors sujet. Il se garda bien, comme bon philosophe qui se respecte, de signer ses mails.
           - Le troisième qui ne comprit strictement rien au sens de mon intervention, fit en sous-entendu le procès des anciens défenseurs de l'Algérie Française.
           Il est à souligner que ce dernier se voulut l'ardent défenseur d'un de ses amis tués par le FLN.
           Si les morts pouvaient parler ? Que penserait cet ami de son ancien camarade qui, à présent, encense peut-être ses propres assassins ?

           Ces trois réactions et celle, bien entendu, de l'instigateur du problème m'ont fait prendre conscience que, malheureusement, tous les efforts que déploient des hommes valeureux pour unifier notre communauté risquent d'être vains face à de tels comportements.
           Comment imaginer, même avec le recul, même si l'on renoue certains liens avec nos adversaires d'hier, que nous puissions occulter notre passé.
           Honte à ceux qui sont touchés d'amnésie.


Le 19 janvier 2006               
Régis Guillem                  

COMMUNIQUE
Envoyé par M. Régis Guillem

REUNION ANNUELLE 

Les 5,6,7 mai 2006.

           Anciens d’Aïn-Séfra


           La réunion annuelle des anciens d’Aïn-Séfra se déroulera au Pradet (Var) au centre de vacances Arepos les 5,6,7 mai 2006.

           Pour tout renseignement ou inscription s’adresser à Régis Guillem tél. : domicile 04.94.77.00.24 portable 06.61.74.73.38

           La date butoir des inscriptions est fixée au 15 mars 2006.

           Au cours de cette réunion une vidéo retraçant la vie d’Aïn-Séfra sera passée.



La statue de THIERS

Par ces temps froids, voici la statue de THIERS du Cours bertagna, avec moi en toute modestie.
La statue est en bône état à Saint Savin (86) - sur une place un peu à l'écart.
Merci la commune de Saint Savin.

Photo de M. N. Duchene Photo de M. N. Duchene

COMMUNIQUE
Envoyé par M. William Puccio

REUNION ANNUELLE 




Les 26, 27, 28 mai 2006.


    Une grande fête se prépare en mai près de NÎMES une deuxième retrouvaille à la demande de beaucoup d'entre vous ……………
Cette fois nous faisons les choses en grand puisque nous envisageons un long WEEK END de l'ASCENSION

    FRANÇOIS FERSEN est notre correspondant sur place….

    Dés maintenant me dire (sans engagement de votre part bien sûr) si :
1) vous comptez venir
2) combien seriez vous
3) nb de nuits, la grande fête aura lieu le samedi soir et se terminera par un grand pique nique le dimanche


LIEU PRÉCIS et coût de participation CLIQUEZ ICI

Pour me joindre : William Puccio


Les Tournants de Rovigo
De notre ami Hervé Cuesta

Préface de Pierre Dimech.
La vie cosmopolite qui animait les Tournants Rovigo a disparu avec l'Algérie française en 1962.
Ce quartier d'Alger surplombait le port, s'étirait jusqu'au sommet d'une colline et était connu de tous les Algérois. On disait même, en plaisantant à propos d'une ligne sinueuse : " Elle est droite comme les Tournants Rovigo ! ".
En essayant de faire revivre son quartier grâce au site Internet sur les Tournants Rovigo puis par l'intermédiaire de ce livre qui en est le reflet, Hervé Cuesta, aidé par des amis, amoureux-fous, comme lui, de ce quartier pittoresque, veut transmettre cette mémoire fragile pour mieux la conserver. Et puis il veut aussi, certainement, se guérir un peu car en 1962, le soutien psychologique n'existait pas…
Enfin, il souhaite laisser une trace de toute cette vie disparue aux enfants et petits-enfants des descendants de pionniers qui avaient construit ce beau pays. Cet ouvrage constitue, sans nul doute, un geste d'amour.

1961 - Jeunes du CADIX devant " la cave BARDINI" à l'angle de l'avenue Gandillot:

De g. à d., sur la moto "Jawa":
Jean Talbi, Hassene et Tewfik Kellouah, J.P.Ponsetti, Charles Penalba, X, Robert Mascaro sur la moto d'Hassene, Georges Roeckel, Nono Aragonès, Nounès, ...


Contact   Hervé Cuesta

AVIS DE MESSE
envoyé par M. Jean Pierre Rondeau

Sous l'égide de L'Union Nationale des Parachutistes,

Messe d’hommage solennel célébrée
en la cathédrale Saint-Louis-des-Invalides
Le 3 févier 2006, à 11h00

En mémoire du Colonel Pierre CHATEAU-JOBERT dit « CONAN»
décédé le 29 décembre 2005, à l'âge de 93 ans.
Commandeur de la Légion d'honneur
Compagnon de la Libération
Croix de Guerre 1939-1945
Croix de Guerre des TOE
Onze citations dont dix palmes
D.S.O
Plusieurs décorations étrangères.

Jean-Pierre RONDEAU
Vice-président de l'Amicale des Anciens du
9ème Régiment de Chasseurs Parachutistes


COMMUNIQUE
Envoyé par M. Joseph Josse

Plaque Emaillée

    Cette plaque émaillée (et bien rouillée) de 0,45 x 0,45, d'inspiration militaire Nord Africaine, portant l'inscription A.L.M.C. a été trouvée par notre ami Gilbert ROUSSEAU dans une brocante d'Indre et Loire.
    Gilbert ROUSSEAU, Président Honoraire de La Gandoura (Amicale du 1er Spahis) souhaite identification.
    Merci de votre aide. Cordialement. Francis JOSSE

COMMUNIQUE
Envoyé par M. Joseph Josse

Plaque Emaillée

    Cette plaque émaillée (et bien rouillée) de 0,45 x 0,45, d'inspiration militaire Nord Africaine, portant l'inscription A.L.M.C. a été trouvée par notre ami Gilbert ROUSSEAU dans une brocante d'Indre et Loire.
    Gilbert ROUSSEAU, Président Honoraire de La Gandoura (Amicale du 1er Spahis) souhaite identification.
    Merci de votre aide. Cordialement. Francis JOSSE

MESSAGES
S.V.P., lorsqu'une réponse aux messages ci dessous peut, être susceptible de profiter à la Communauté, n'hésitez pas à informer le site. Merci d'avance, J.P. Bartolini

Notre Ami Jean Louis Ventura créateur d'un autre site de Bône a créé une nouvelle rubrique d'ANNONCES et d'AVIS de RECHERCHE qui est liée avec les numéros de la seybouse.
Après avoir pris connaissance des messages ci-dessous,
cliquez ICI pour d'autres messages.
sur le site de notre Ami Jean Louis Ventura

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De Mme Anne Marie Berger
Irène Caduc souhaiterait avoir des nouvelles de ses amies de l'école de Beauséjour à Bône:
Jeanine DABRIN
Fernande BELJOUDI
Geneviève FARINACCI....
Pour contacter Irène qui n'a pas d'ordinateur,laisser un message à Anne-Marie Berger amye.berger@club-internet.fr qui transmettra------------------

De M. Gérard Noto
Je suis bonois né le 15/8/1942, j'habitai route de l'avant port juste en face du chai à vin, mon père travaillai à l'inscription maritime.
j'ai fréquenté l'école Victor Hugo, ensuite l'école des mousse, puis j'ai embarqué à la compagnie schiaffino, ensuite en 1962 aux messageries maritime.
Je suis à la recherche d'une photo du NOTRE DAME D'AFRIQUE navire sur lequel j'ai fait une partie de mon apprentissage maritime.
Si des fois vous pouvez m'aider je vous en remercie d'avance Gérard Noto
Mon adresse : gerard.noto@wanadoo.fr

De M. Marc Arrazat
Je recherche même après plus de 43 ans, GUILLEMAIN NICOLE qui demeurait à Constantine ainsi que des amis d'enfance de Turenne à coté de Tlemcen, Jules et Alfrede DELREY ainsi que leurs 2 cousines Paulette et Jocelyne SANCHEZ.
Merci à tous ceux qui pouraient m'aider à les retrouver.
Bien amicalement, Marc Arrazat
Mon adresse : marc.arrazat@wanadoo.fr

De Mme Michele Didona

Je suis une Bonoise ayant Habitée à Ste THERESE, je recherche tous ceux qui m'ont connu et qui habitaient les quartiers St. CLOUD,la cité AZUR, Ste.THERESE et rue des rosiers à l'ELISA.. J'aimerai rencontrer des gens ayant habités ces quartiers.
Mon nom de jeune fille :TRULLU Yolande
je recherche les amies de ma jeunesse: Anick KERINEC; Jeaninne MARTIN; Françoise DEVERDELAND ; Marie-Therese POGGI
Ainsi que Nicole VALAERT qui habitait la rue Bousaréa à Alger et qui passait ses vacances à BONE. Elle ,était d'Alger.
Merci d'avance.
Adresse : fd.bertheliier@free.fr

DIVERS LIENS VERS LES SITES

Avec mes Amis Gilles Martinez et Jean Roda nous sommes heureux d'accueillir dans notre groupe des Sites Pieds-Noirs des Pyrénées Orientales un nouveau venu.
M. Robert Antoine et son site de STAOUELI qui ne demande qu'à grandir grâce à vous tous.
Son adresse: http://www.piednoir.net/staoueli
Nous vous invitons à le visiter.
Jean Pierre Bartolini

Des nouveautés figurent sur mon site. Photos - " Nouveau avis de recherche . "
Mon adresse: http://perso.wanadoo.fr/gabyroux.bone/accueil.htm
Gaby Roux

C'est le grand départ pour MOSTAGANEM. "Mon voyage 2005" raconté par Bernard Faucher qui vous invite à le visiter.
Une aventure aussi courte mais tellement intense en émotion, en sentiments, en images, ne peut pas se terminer sans que je vous livre mes conclusions.
Mon adresse: http://www.mytripjournal.com/GIW/WebObjects/MyTripJournal.woa/2/wa/website?wosid=9SHWWjKyBfpQloSjKWwZFM&w=bernard
Bernard Faucher

cliquez ICI pour d'autres messages.

LES MILITAIRES...
Envoyé par Jean Louis Ventura

         C'est un militaire en plein exercice de camouflage en forêt.
         Le militaire qui s'était déguisé en tronc d'arbre, a soudainement abandonné son poste à un moment crucial des manœuvres.
         Le sergent l'engueule un bon coup et lui demande pourquoi il a quitté son poste :
- Espèce de tire au flanc !!! Tu te rends compte que tu as mis en danger non seulement ta vie mais aussi celle de tous tes copains de la compagnie. Au combat, l'ennemi nous découvrait tous par ta faute ! As-tu une explication pour ta conduite ?
- Oui sergent : Autant je n'ai pas bougé d'un poil quand un couple de pigeons m'a pris pour cible. Autant je n'ai rien dit et je suis resté immobile quand j'ai vu un serpent ramper à mes pieds... Mais quand ces deux écureuils sont rentrés dans mon pantalon et que j'en ai entendu l'un d'entre eux dire : "Mangeons en une tout de suite et gardons l'autre pour cet hiver", j'ai craqué...


Vous venez de parcourir cette petite gazette, qu'en pensez-vous ?
Avez-vous des suggestions ? si oui, lesquelles ?
En cliquant sur le nom des auteurs en tête de rubrique, vous pouvez leur écrire directement,
c'est une façon de les remercier de leur travail.

D'avance, merci pour vos réponses. ===> ICI


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