N° 192
Mars

http://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Mars 2019
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
http://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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EDITO
   PRINTEMPS de la MEMOIRE    

         Le printemps approche à grands pas avec le rallongement des jours et où le moral reprend du tonus après un temps hivernal morose. C'est le moment de penser à nous faire plaisir et quel merveilleux plaisir qu'est la mémoire.
         On dit que l'activité physique est primordiale pour préserver la bonne santé de son cœur et de son corps.
         Mais l'on peut dire aussi que l'activité mémorielle est aussi primordiale et essentielle pour préserver nos neurones, la mémoire et la bonne santé confraternelle de notre communauté.

         Après des années où une grande partie de la communauté a délaissé le coté mémoire pour privilégier le coté adaptation et réinstallation suite à notre douloureux exil. La dernière génération de Pieds-noirs née en Algérie avant 1962, arrive à un âge où les problèmes matériels ont été " résolus " et s'aperçoit qu'il est temps de renouer avec des souvenirs laissés dans un coin du cerveau. De plus avec ce que la France subit depuis quelques années, cela ravive des moments douloureux.
         Donc maintenant que la réadaptation physique est accomplie même si ici ou là il y a encore du racisme contre les Pieds-Noirs, la réadaptation mémorielle est affaire de responsabilité, un droit et une dernière chance de sauvegarder par la mémoire ce qu'ont réalisé nos ancêtres sur cette belle terre d'Algérie.
         Cela permet une meilleure hygiène de vie cérébrale, de dédramatisation, de s'ouvrir au monde extérieur et finalement d'améliorer notre qualité de vie communautaire.
         Les associations sont hélas en fin de vie, faute de n'avoir pas su transmettre aux plus jeunes le témoin et le soutien nécessaire à leur compréhension, leur sérénité en leur donnant un temps d'adaptation à cette mémoire et cela sans matraquage et en y mettant les formes.

         Heureusement que quelques pionniers d'Internet ont entamé un travail de mémoire depuis presque 20 ans avec leurs sites sur les villes d'Algérie et cela porte ses fruits.
         Quel que soit votre âge, votre condition physique, que vos conjoints soient ou non de la communauté, soyez le bienvenue sur les sites Pieds-Noirs. Il existe au moins un site P.N. pour chacun d'entre-vous en ce qui concerne votre ville ou votre région. A vous aussi de continuer à faire vivre ces sites en leur fournissant tout ce vous trouverez à la suite du décès d'un proche.
         Amicalement votre.
Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         A tchao.


LE MUTILE N° 58 du 04/08/1918 (Gallica)
TOUJOURS LA CARTOUCHERIE
        
        À cette époque, où les économies, même les plus infimes peuvent concourir à nous permettre de tenir, car il ne s'agit pas moins que d'une guerre d'usure, il importe, que ceux qui assument des : responsabilités, qui dirigent des administrations, voir, même et surtout : des usines de guerre, donnent des ordres prescrivant l'économie par tous les moyens.
        C'est ce qui ne se produit pas, car pendant, partout, par incurie, insouciance, à moins que cela ne soit pas par bas calcul car il est des hypothèses qui sont admissibles si nous en croyons ce qui nous est révélé.
        A, la cartoucherie d'Alger, il existe une infirmerie crée pour le cas où l'un des nombreux ouvriers ou ouvrières se trouveraient subitement malade ou atteint d'un accident de travail que nul ne peut prévoir ni empêcher.
        Pour le service de cette infirmerie dont on comprendra l'urgente nécessité, il faut des médicaments, des accessoires, des pansements que l'on ne peut se procurer que dans une pharmacie.
        II est évident que le budget accordé a cette infirmerie ne se chiffre pas par des milles et des cents, mais si infime soit-il, il existe. Il n'est pas de jour, en effet où un accident fortuit de travail, surtout dans le nombreux personnel féminin ne se produise et par conséquent où l'intervention de l'infirmerie ne soit nécessaire.
        Il arrive aussi parfois que l'on n'a pas sous la main les médicaments utiles et on a alors recours immédiatement au pharmacien pour y suppléer.
        Pour traiter des cas pathologiques qui nécessitent tout au moins, au pis aller, un concours pharmaceutique en attendant l'homme de l'art, il serait prudent d'avoir recours à la première officine à portée de manière à éviter tout au moins l'aggravation d'un mal que les profanes ignorent et qui peut mettre en danger la vie de celui qui en est atteint.
        C'est cependant ce qui ne se produit pas. Il existe à quelques vingt mètres de la cartoucherie, un pharmacien qui fait une remise de 40 pour cent en faveur de la cartoucherie. Vous allez nous dire, mais, aussi bien pour la proximité de son officine que pour la réduction consentie dans l'intérêt des malades même cette pharmacie doit être honorée des commandes de la Direction.
        Vous, vous trompez cependant, puisque c'est un pharmacien établi à Alger qui en bénéficie.
        Nous n'ayons pas l'intention ni de faire profiter le premier de la réclame gratuite que nous lui faisons, ni de nuire au second qui est un de nos bons amis et qui ne fait en sorte que livrer moyennement finance des produits qui lui sont demandés, mais il n'échappera à la perspicacité de personne qu'il y a pour cette préférence une raison primordiale et la voici toute nette : Il est des pharmaciens comme de tous les fournisseurs ; celui qui graisse la patte au Monsieur qui vient prendre les commandes, à sa petite commission. Or il appert que le premier ne veut pas consentir à vaseliner là dextre du Monsieur préposé à ce service tandis que son confrère y consent.
        C'est là une manière adroite de commercer, à laquelle nous ne trouverions rien à dire si les employés de la cartoucherie n'en pâtissaient pas, comme nos finances du reste, car il y a un fait monstrueux à révéler encore : tandis que le pharmacien à proximité de la cartoucherie, consent le 40 pour cent, celui qui est à Alger, a trois kilomètres fait le 20 pour cent de remise.
        Alors, il se produit ce fait que si le budget de la cartoucherie se gêne, le gousset du préposé à l'infirmerie s'arrondit tout au moins de la commission d'usage.
        Il est à présumer que M. le Directeur de la cartoucherie ignore ce trafic et que devant nos révélations il va y mettre le holà !
        C'est du moins ce que nous espérons, aussi bien, pour la punition du trafiqueur que dans l'intérêt de nos finances avec lesquelles nul ne saurait jouer impunément.
Paul BONPOUR                 

Un été l'orange a susurré
ECHO D'ORANIE - N°215

        " Les oranges ne mûrissent qu'en hiver car si elles mûrissaient l'été nous en mangerions trop et nous serions malades, et puis il n'en aurait pas assez pour nous désaltérer tous " disait Mémé Nénette

        Ici en plein Juillet, il m'en reste une seule
        Petite orange rescapée d'un autre hiver... le vrai
        Elle n'a pas poussé d'artifices en serre
        Elle vient de mon enfance
        Doucement mûrie au temps des sucres d'orge et piroulis
        Orange de nos jardins tranquilles, jardins d'antant
        Tant pis pour le possessif, je demeure d'Algérie même au présent
        Ma bouche à jamais assoiffée d'autres parfums
        Ceux qui inondent plus suave plus forts les rives bleues du passe...

                La belle se tend au fruit miroir
                Qui joue flash-back dans la mémoire
                La maison blanche sieste dans les vignes
                Au grand soleil d'après-midi ses yeux clignent
                Persiennes entrouvertes sur un temps arrêté
                Sous l'ombrage fragile des caroubiers
                La fillette dorée joue aux osselets
                Fatima grille les piments, ensommeillée
                Les mains cuivrées fatiguées s'alourdissent
                Dans le Canoun le feu s'épuise
                L'odeur flotte encore et puis s'endort
                L'abreuvoir en pleins feux se tiédit
                La fillette moite s'y coule, s'ensevelit
                Elle, elle ne peut dormir, juste s'engourdit
                Et préfère vivre comme une éternité
                Le temps que la chaleur suspend
                L'été qui donne au pays tout entier
                La démesure d'un océan silence.

        Ici l'été percute le plaisir
                 L'été chahute
                         L'été grouille
                                 L'été grimace de toutes parts
        Ce n'est même plus l'été et je mange l'orange.
Marie-Josée et Marie-Noëlle GRIMALDI         


  L'olivier : symbole
des français d' Algérie.
Envoyé par Mme Jocelyne MAS, Cannes
              J'aime les arbres comme j'aime tous les êtres vivants. Il y a près de la maison de mon fils un énorme olivier, il faut six personnes étendant leurs bras pour faire le tour de son tronc et capter son énergie. Il a un tronc noueux, torturé, signe de sa résistance et sa longévité face aux agressions qu'il a subies par le passé. Son écorce est rugueuse mais on ne peut s'empêcher de la caresser et ses branches s'élancent vers le ciel. Il ressemble à un géant à qui on peut confier tous ses secrets.
              Il porte ses rameaux et ses fruits à bras tendus, et offre ce mélange de grâce et de majesté propre aux arbres qui ont le tronc large et la feuille petite.
              L'olivier plonge ses énormes racines noueuses dans cette terre vierge et aride, elles sont la preuve de sa volonté farouche de s'accrocher à la terre et à la vie malgré tout.
              Comme tous les arbres, il reste debout et digne créant un lien constant entre la terre par ses racines et le ciel par son feuillage. Enfin il est le symbole de la vie par ses fruits. L'olivier est un arbre sacré, pourvoyeur de l'or liquide. J'aime la beauté tourmentée de leurs troncs, il est le bonheur des traditions d'antan où on vivait au rythme des saisons : ramassage, pressurage, floraison, taille.

  Le français d'Algérie
ressemble à l'olivier.

              Malgré son départ de sa terre natale, il ne peut oublier son passé et ses racines qui lui apparaissent d'autant plus fortes et noueuses.
              Toutes les souffrances et violences dont il a été l'objet l'ont fait ployer mais il est resté debout malgré tout, en l'honneur du travail et du courage des aïeux qui reposent là-bas sur cette terre qui l'a vu naître. Ils avaient l'âme fière et savaient se battre contre les cieux lorsqu'ils se déchaînaient, pour faire vivre leur famille.
              Le français d'Algérie a aimé sa terre avec passion, il a lutté, allant au bout de ses forces pour faire sortir de ce désert cette terre rouge et fertile. Sur plusieurs générations, ces pionniers ont travaillé, souvent à mains nues, épierrant leur lopin de terre, creusant profond pour trouver cette eau si précieuse. Beaucoup ont abandonné et laissé leur terre.
              Les autres, obstinés, sont restés, ils ont planté des oliviers, des arbres fruitiers, de la vigne, du blé. Ils se sentaient arbres et leurs pieds s'enracinaient.
              Lorsqu'il a fallu partir, tout abandonner, ils étaient comme ces arbres que l'on déracine. Les déraciner : c'était les tuer. Beaucoup n'ont pas eu le courage de survivre, d'autres sont partis vers d'autres rivages, sur des terres plus accueillantes.
              D'autres encore se sont ré-enracinés sur le sol de la mère patrie qu'ils vénéraient mais celle-ci ne les a pas accueilli comme ses enfants. Alors, ils ont travaillé encore et encore, n'hésitant pas à changer de métier, parcourant la France à la recherche d'un travail et ils ont rebondi. Ils ont réussi pour leurs enfants, pour montrer à la France qu'ils pouvaient s'en sortir seuls, sans assistance, ni aide psychologique, par la force de leur Foi en l'homme et par leur travail.
              Ils savaient qu'on n'a rien sans efforts. Ils ont élevé leurs enfants dans l'amour de leur terre natale, l'amour des enfants, le respect des femmes et des vieux parents.
              Travailler pour réussir voilà leur devise. Ils sont à la fois nostalgiques de leur passé mais ils ont les bras ouverts à l'avenir, et le regard tourné vers l'horizon.

L'olivier ici en terre de France

Et là-bas sur cette terre française dont la France ne voulait plus.


Jocelyne MAS
Ecrivain
Site Internet : http://www.jocelynemas.com



Partie II - La guerre d'Algérie :
un bras de fer idéologique
Envoyé par M. piedineri
Partisans de l'Algérie française
versus partisans du FLN
" Moi non plus, ce n'est pas la paix dont je ne veux pas, mais je redoute une guerre déguisée sous le nom de paix. C'est pourquoi, si nous voulons jouir de la paix, il faut faire la guerre ; si nous renonçons à la guerre, nous ne jouirons jamais de la paix. " (" Nec ego pacem nolo, sed pacis nomine bellum inuolutum reformido. Qua re si pace frui uolumus, bellum gerendum est ; si bellum omittimus, pace numquam fruemur. ")
Cicéron, Philippiques (Ier siècle avant J.-C.)
" Contrairement à ce que croient les partisans métropolitains du FLN, la capitulation de la France devant le terrorisme assurerait peut-être une courte trêve, mais elle n'apporterait pas la paix "
Jacques Soustelle (XXème siècle après J.-C.)

                Etant entendu que la guerre d'Algérie fut en bonne partie une guerre idéologique pour ne pas dire psychologique, à une époque, le XXème siècle, où les guerres se gagnaient tout autant sur le terrain des idées que sur le champ de bataille, faisons une liste comparative entre l'idéologie des partisans de l'Algérie française, des plus modérés aux plus " ultras ", et celle de leurs adversaires gauchistes, " libéraux ", gaullistes ou chrétiens " progressistes ", plus ou moins partisans du FLN. Une liste qui nous montrera à quel point la pensée de ces " partisans de l'Algérie française ", qu'ils aient été de droite ou de gauche, constitue l'antithèse de l'idéologie dominante actuelle. C'est pourquoi cette liste comparative sera aussi l'occasion d'imaginer dans quel sens aurait pu évoluer la société française, si le camp de l'Algérie française, ou, plus précisément, le camp de la solidarité nationale (envers les Français d'Algérie) l'avait emporté en 1962.

                Puisque Marcel-Edmond Naegelen expliquait, à la veille des accords d'Evian, que " ni par l'" Affaire " [Dreyfus], ni à aucun autre moment de l'histoire mouvementée de la République, depuis 1875, la France n'a été aussi profondément coupée en deux camps ", où " presque dans chaque famille se heurtent les partisans de la politique algérienne du général de Gaulle aux défenseurs de la minorité européenne et des Musulmans français d'Algérie "(1) , nous allons voir ensemble de quel bois étaient faits ces deux camps.
                Voici, dans l'ordre, les thèmes de notre étude (dans ce numéro nous publierons les cinq premiers) :
                1. Chrétienté, islam et dhimmitude
                2. Mythe d'al-Andalus et de la " tolérance " islamique
                3. Israël et antisionisme
                4. Réécriture de l'Histoire de France
                5. Repentance
                6. " Antiracisme " et victimisation
                7. La question du racisme anti-Blanc
                8. Fatalisme démographique
                9. Croyance au sens de l'Histoire
                10. Intégration/assimilation (de l'Algérie française à la " France algérienne ")
                11. Justification intellectuelle du nettoyage ethnique des Français d'Algérie, et ses suites
                12. Immigration
                Conclusion : Que faire ?

1. Chrétienté, islam et dhimmitude

                D'un point de vue idéologique on peut dire que le FLN, en France, eut, hormis le gaullisme, trois alliés principaux. De gauche à droite :
                1. La gauche marxiste et ses porteurs de valises, islamo-gauchistes purs et durs.
                2. Un certain nombre de centristes autoproclamés " progressistes ", dont beaucoup se retrouvaient dans ce qu'on a appelé les " chrétiens de gauche ".
                3. Une certaine " droite du fric " dont Raymond Aron fut l'archétype, qui appelait à larguer l'Algérie et ses habitants au nom du capitalisme et de la modernité économique. L'Algérie, d'après ce dernier n'était pas assez " rentable ". Il fallait se débarrasser au plus vite de ce " boulet ".

                Attardons-nous sur la deuxième de ces catégories, les fameux " chrétiens progressistes ", ou " chrétiens de gauche ".
                La guerre d'Algérie restera en effet ce moment où l'on vit des hommes d'Eglise, prêtres, évêques, abbés, aider matériellement et moralement des combattants du FLN, organisation terroriste et djihadiste qui égorgeait quotidiennement leurs coreligionnaires. La figure emblématique de ces chrétiens d'un nouveau genre, étant bien sûr Monseigneur Duval, archevêque d'Alger qui n'a cessé, pendant toute la durée de la guerre, de prendre parti pour le FLN contre les siens, allant jusqu'à adopter, à l'indépendance, la nationalité algérienne.

                Sur l'attitude du monde chrétien pendant la guerre d'Algérie, Jacques Soustelle a écrit :
                " On a vu des prêtres catholiques abriter chez eux des assassins […], des pasteurs servir de protecteurs et de passeurs à des agents du F.L.N. Après Témoignage chrétien, le quotidien La Croix a épousé toutes les thèses antifrançaises sur l'Algérie. On a vu des bulletins paroissiaux, on a entendu des prêcheurs du haut de la chaire faire l'apologie de l'abandon. Même le fait pourtant évident que la déjà faible tête de pont chrétienne en Algérie était condamnée à disparaître en cas de victoire des rebelles ne semble pas avoir ému un instant ces singuliers chrétiens. " (2)

                Oh que oui, ce fait était évident, mais, l'esprit de soumission, de dhimmitude, était bien trop puissant chez ces " singuliers chrétiens " pour leur faire entendre raison. C'est un véritable fanatisme qui en réalité, animait ces hommes et ces femmes. Le fanatisme de la soumission. Le fanatisme du " dos courbé ". Fanatisme, au sens où rien ne pouvait les faire fléchir. Comme le montre si bien une conversation, à la fin de la guerre d'Algérie, entre Robert Barrat et Jean Daniel :
                En 1960, le journaliste Jean Daniel, favorable à l'indépendance de l'Algérie, discute avec deux hauts responsables du FLN. Jean Daniel leur demandant, naïvement, si les juifs et les chrétiens auront une place dans une Algérie indépendante aux mains du FLN, ces derniers lui répondent par la négative, avant d'ajouter que " la vengeance [sera] longue, violente et […] [exclut] tout avenir pour les non-musulmans ". Le but d'une telle " vengeance " ? " Redonner à l'islam sa place ", précisaient-ils. Jean Daniel, qui semble découvrir la volonté purificatrice de ses amis du FLN, tombe des nues. Relatant cet entretien quelques décennies plus tard il écrit : " Cet entretien a un terrible effet sur moi. Je me sens le devoir d'en informer à Paris deux proches de la fédération de France du FLN ". Parmi eux le chrétien " progressiste " Robert Barrat, célèbre journaliste à Témoignage chrétien : " Quand je lui rapporte ces propos il ne réagit pas, mais son destin n'est pas de vivre en Algérie après "(3) , explique Jean Daniel.
                Voilà donc un homme, Robert Barrat, qui se dit chrétien, à qui l'on apprend que près d'un million de ses coreligionnaires ont vocation à être demain massacrés et chassés de leur foyers au nom de l'islam, et qui " ne réagit pas "…

                C'est également de dhimmitude dont était empreint le général de Gaulle, lorsqu'il invitait les Pieds-Noirs à bien se tenir et à se " débrouiller " avec leurs nouveaux maîtres fellagha, et lorsqu'il reprochera à l'OAS d'être responsable de leur exode. " Pour de Gaulle, les pieds-noirs sont responsables de leur sort. Ils sont coupables de la guerre elle-même. Ils ne méritent aucune indulgence " (4), expliquait Dominique Venner. De Gaulle qui, après avoir reçu en 1964 son homologue algérien Ben Bella déclarait : " Ben Bella ne m'a pas fait mauvaise impression. Il a de l'assurance, mais sans jactance. […] Il déborde d'éloges à l'égard des coopérants et notamment des instituteurs. Ah, si tous les colons s'étaient comportés ainsi au lieu de faire suer le burnous ! ". De Gaulle sous-entend donc que les Pieds-Noirs seraient responsables de leur malheur pour avoir fait " suer le burnous " ! Qu'est-ce d'autre qu'un réflexe de dhimmi, d'attribuer à la victime d'un acte de djihad la responsabilité de son malheur ? Rappelons que Jacques Soustelle, au même moment, montrait du doigt les " fanatiques du panarabisme et du panislamisme comme Ben Bella ", haïssant " la France et l'Occident "… Qui de de Gaulle ou de Soustelle fut le plus lucide sur la personnalité de Ben Bella ? A vous de juger.
                Mais ce que cet homme - de Gaulle -, adepte du " sens de l'Histoire ", n'a jamais voulu comprendre, c'est que, comme l'a écrit Jean-Claude Pérez que nous rejoignons sur ce point, " l'histoire est avant tout " mouvement " ", et que " l'évacuation du christianisme d'Algérie par le " fer " c'est-à-dire par la force, allait faire naître tout logiquement un courant d'imprégnation islamiste orienté dans le sens de l'évacuation du christianisme, c'est-à-dire du sud vers le nord. " (5)

                C'est encore l'exemple de la dhimmitude que le général de Gaulle a donné en s'appuyant, dans les derniers temps de la guerre d'Algérie et dans les premières années de " l'Algérie indépendante ", sur l'action de ces " chrétiens progressistes ", dont beaucoup figureront parmi les " pieds-rouges " qui rejoindront le pays comme coopérants(6) . Le cas de l'islamo-gauchiste Hervé Bourges, futur président du CSA, de RFI, de Radio Monte-Carlo, de TF1 et de France Télévisions (avoir collaboré avec le FLN ouvre en France de nombreuses portes), est exemplaire de cette collusion entre gaullisme et militants chrétiens pro-FLN. Jeune journaliste à Témoignage chrétien partisan de l'indépendance, Hervé Bourges entre ensuite au cabinet du grand gaulliste Edmond Michelet, ministre de la Justice du Général, pour devenir, à l'indépendance de l'Algérie, conseiller du président Ben Bella… Ne parlons même pas de l'Association France-Algérie, symbole parfait de cette alliance nouée entre le gaullisme des années 1960, le FLN et la gauche " anticolonialiste ". Association créée à l'initiative de de Gaulle et Ben Bella, et qui rassemblera un grand nombre de ces chrétiens progressistes.

                La politique algérienne du général de Gaulle, et ses alliances contre nature, ont ainsi automatiquement favorisé la puissance médiatique de ces chrétiens pro-FLN, au détriment des chrétiens solidaires des Européens d'Algérie, qui se refusaient à ce que leurs coreligionnaires du Sud de la Méditerranée deviennent demain, au mieux les otages d'un Etat musulman, au pire, victimes d'expulsions de masse ou de pogroms. Aussi ces chrétiens restés solidaires des Européens d'Algérie, pour avoir refusé de se soumettre idéologiquement à la guerre sainte du FLN, se feront, comme il se doit, traités de " fachos " et de " réactionnaires ". Des fachos n'ayant, évidemment, rien compris au " sens de l'Histoire ".
                Curieux " sens de l'Histoire ", n'est-ce pas, qui conduit en deux temps trois mouvements à l'éradication quasi-totale du christianisme d'Afrique du Nord ? Les chrétiens dits " progressistes ", se sont-ils posés un jour cette question ?
                C'est donc, au mieux, à une affreuse dhimmitude à laquelle chrétiens et juifs d'Algérie se voyaient condamnés en 1962. Il leur fallait vivre sous la loi de la charia. Devenir des " Coptes ". Se pose alors cette question : Au nom de quoi, dès lors que l'on consent et que l'on applaudit à la dhimmitude d'un million de ses compatriotes, n'accepterait-on pas, par la suite, la dhimmitude pour sa propre personne ? Et c'est là que la célèbre déclaration faite par le colonel Bastien-Thiry à son procès en 1963 prend tout son sens :
                " Une opinion publique [à laquelle le chef de l'Etat] a peu à peu enlevé le sens de l'honneur et de la fierté nationale, le sens de la solidarité et de la conservation nationale, ne pourra plus, à propos de n'importe quel autre problème, à propos de n'importe quel autre péril extérieur ou intérieur, retrouver ce sens national qui n'est que la transposition, sur le plan personnel, de l'instinct de conservation. Ayant participé au suicide du patrimoine français en Algérie, on voit mal comment les Français pourraient ne pas se laisser aller, à propos de la première épreuve venue, au suicide national. "

                Les accords d'Evian, ont ainsi largement contribué à créer les conditions de la future dhimmitude de nombreux Européens, à laquelle un homme d'Eglise comme l'archevêque d'Alger Mgr Duval a montré la marche à suivre. Voilà ce qui est aussi à comprendre.
                L'attitude de ces progressistes chrétiens, rappelle d'ailleurs à plus d'un titre le phénomène historique qui vit, suite aux conquêtes arabes du Moyen-Âge, des communautés entières de chrétiens d'Orient et d'Occident se soumettre à l'islam par imprégnation, sous la pression de la violence, de la fatalité, et dans l'espoir illusoire d'obtenir " la paix ". C'est la paix de l'islam qui a remplacé la paix française en Algérie. C'est la paix de l'islam que promettait le FLN aux Français d'Algérie et plus tard, si affinités, aux Français de France. Ce qu'a bien compris Monseigneur Duval, que le journal algérien Alger-Républicain, le 2 février 1965, remerciait pour son " soutien actif " apporté à " notre djihad pour conquérir la liberté de notre Patrie et notre dignité "…
                Monseigneur Duval, ou le premier dhimmi français.

                Et qui d'autres que les défenseurs des Français d'Algérie, qu'ils fussent laïques ou catholiques, luttaient, à l'époque, contre l'esprit de dhimmitude ? Ce sont eux en vérité, les précurseurs de cette lutte contre l'esprit de dhimmitude qui a toutes les chances de s'intensifier dans l'Europe de demain. Pour étayer cette affirmation, nous nous contenterons de citer Georges Bidault, homme politique de centre-droit, catholique fervent, successeur de Jean Moulin à la tête de la Résistance intérieure, qui deviendra plus tard l'un des chefs de file des partisans de l'Algérie française. Georges Bidault, en 1965, déplorait à travers les récents évènements d'Algérie l'esprit de soumission d'un nombre de plus en plus grand de chrétiens face à l'islam :
                " L'Eglise, de son côté, a toujours marqué en face de l'expansion islamique, facile parce que c'est une religion peu exigeante et, à la vérité, plus un parti qu'une religion, une réserve pour ne pas dire une timidité qui s'expliquait naguère par les multiples obstacles rencontrés. Comment, en effet, faire entendre à ceux qui n'ont qu'un seul livre pour la foi et pour la loi qu'un Etat qui sépare la loi de la foi ne prend pas parti contre la foi. Dans les temps récents, cette timidité s'est accentuée jusqu'à se nuancer d'une révérence difficilement explicable. Un cardinal français m'a dit un jour, à moi, pas à un autre, au début de la rébellion : " Surtout, pas de prosélytisme ". Il y avait des travailleurs musulmans dans son diocèse. […] Ce retour aux catacombes avant tout témoignage, cette humilité de l'apostolat qui peut aller jusqu'à la renonciation, ce repli sur la politique et sur le conformisme temporel devant le mouvement supposé de l'histoire et la volonté supposée des masses, c'est ce que nous avons sous les yeux, à notre effroi et à notre scandale. Pourtant il ne manque pas d'évêques français (sans parler des autres) qui paraissent trouver qu'on ne va pas assez loin dans cette sorte d'effacement. "

                " Cette humilité de l'apostolat qui peut aller jusqu'à la renonciation ", " cette sorte d'effacement ", disait-il. Voici décrit en quelques mots le principe même de la dhimmitude : l'humilité. L'humilité devant l'islam. (7)
                Bidault qui s'en prenait aussi avec vigueur à ces chrétiens de gauche et ces pieds-rouges se soumettant de leur plein gré à l'islam, traitant, par exemple, Hervé Bourges de " renégat " (8). Dénonçant le fait que " les cathédrales ", en Algérie, " ont été transformées en mosquées "(9) , Bidault écrivait : " J'ai sous les yeux la liste d'une dizaine d'églises transformées en mosquées, en cinémas, en latrines. Et il y en a certainement beaucoup d'autres. Les cloches ont été enlevées, des tabernacles ont été profanés. " " Cependant il y a des gens qui sont très contents "(10) , concluait-il, montrant du doigt les chrétiens applaudissant à la livraison de l'Algérie au FLN.
                Georges Bidault, qui dans son livre D'une Résistance à l'autre relatait, avec une grande amertume, cette anecdote révélatrice des nouveaux rapports de force entre christianisme et islam, allant jusqu'à faire référence à la notion de Croisade :
                " Mais en cette pénible affaire, le seul scandale n'a pas été la précipitation à déguerpir. Il y a eu un supplément affreux et misérable. […] Dans la cathédrale [d'Alger], on a oublié, au moment où elle était remise si prestement pour être transformée en mosquée, les tombes du premier évêque et du premier archevêque d'Alger. Ces deux prédécesseurs de Mgr Duval, les évêques de papa sans doute, ont assisté dans leur cercueil aux prières de l'Islam, à la victoire de Mahomet sur Saint-Augustin, pour parler le langage de ces grands musulmans, MM. Ben Bella et Bourguiba, qui sont l'un et l'autre de parfaits mécréants en dépit des discours. On peut assurément repousser comme anachronique et funeste l'idée d'une Croisade, mais de là à laisser en otages à la République populaire islamique les dépouilles mortelles de deux successeurs des apôtres, il y a plus qu'un pas " . (11)

                Voilà pour les partisans " classiques ", " institutionnels ", d'une Algérie française. Mais n'oublions pas l'OAS, qui, s'adressant au monde chrétien affirmait que " nous n'avons pas le droit d'accepter le départ de la chrétienté " d'Algérie. Et d'ajouter :
                " A nous tous, d'élever notre prière […] pour […] ceux qui luttent pour une Algérie fraternelle dans la France, où le chrétien demeurera pour toujours le levain dans la pâte. […] Il ne s'agit pas […] d'être ces personnes apeurées que deviennent les chrétiens d'aujourd'hui, savamment avilis par un subtil progressisme. " (12)

                Ces quelques éléments suffisent à montrer que les défenseurs de l'Algérie française étaient tout sauf naïfs vis-à-vis de l'islam, au contraire de leurs adversaires. L'attitude des uns et des autres face au mythe de la " tolérance " islamique et de " l'âge d'or " d'al-Andalus, l'Espagne musulmane, va nous le confirmer.

2. Mythe d'al-Andalus et de la " tolérance " islamique

                La fin de l'Algérie française, la repentance coloniale, se sont en effet accompagnées d'un corollaire : la célébration à outrance de l'Espagne musulmane.
                On assiste ainsi depuis plusieurs décennies à la mise en mouvement d'une véritable bombe à retardement psychologique pour les peuples Européens : le mythe de la " tolérance " de l'islam et de " l'âge d'or " d'al-Andalus (nom arabe de l'Espagne musulmane). Une Espagne où, nous dit-on, grâce au savoir-vivre de la civilisation islamique, les " trois religions " du Livre auraient eu l'occasion unique de vivre en paix, voire en symbiose… Une grande période de " tolérance " et de " lumière ", où les Arabes auraient " civilisé " les " barbares " d'Europe…

                C'est pourquoi ceux qui osent se moquer des rares " nostalgiques de l'Algérie française ", devraient aussi se moquer des musulmans nostalgiques de la colonisation arabe de l'Europe, parce qu'ils sont légion ! A tel point qu'Alexandre Del Valle, dans son dernier livre La stratégie de l'intimidation, voit dans ce " thème de l'âge d'or de l'" islam andalou " et de la " supériorité " de la " science arabo-islamique " sur l'Occident chrétien ", le " mythe fondateur du suprémacisme islamique moderne " :
                " Ce mythe commun aux milieux tiers-mondistes, aux multiculturalistes et aux islamistes conquérants […] est au cœur même de la propagande islamiste, ajoute-t-il. Non seulement celle des groupes jihadistes mais aussi celle des pôles " modérés " ou " institutionnels " de l'islam mondial. Tous deux adhèrent à la vision néo-impériale visant à conquérir et islamiser l'Europe par l'évocation continuelle d'un âge d'or islamique européen indépassable dont le cœur aurait été l'Espagne arabo-musulmane, aux côtés de la Sicile islamique et des Balkans ottomans. Ces " territoires perdus " de l'islam et des califats passés, pleurés d'Islamabad à Rabat en passant par l'Arabie saoudite ou la Turquie, sont mobilisés par tous les propagandistes islamistes. Les discours dithyrambiques des islamistes et des multiculturalistes islamophiles - qui vantent la merveille des empires musulmans ayant dominé l'Europe, alors qu'ils ne cessent de dénoncer les croisades et la colonisation européennes - font ainsi écho aux discours irrédentistes des jihadistes d'al-Qaïda, de Daech ou d'autres qui annoncent constamment que l'un de leurs buts de guerre est la " récupération " d'Al-Andalus, de la Sicile, des Balkans ottomans et de tout territoire qui fut jadis dominé par le califat. " (13)

                Del Valle qui conclut :
                " Ces simples constats d'un dialogue asymétrique entre la partie islamique qui se vante d'avoir conquis l'Europe et la partie occidentale " chrétienne " qui s'excuse d'avoir dominé le monde musulman en disent long sur l'état des relations islam-Occident et l'avenir de l'impérialisme islamique. " (14)

                La nostalgie du passé, décidément, apporte beaucoup de choses !... Elle risque même d'apporter demain l'Europe à l'islam sur un plateau.
                Comme on le voit, le monde islamique n'a jamais renoncé, tandis que les Européens, non seulement ne sont nostalgiques de rien, mais, pire, se vautrent dans la repentance. Ce vide spirituel, Georges Bidault en avait perçu très tôt les prémisses. Comparant l'abandon de l'Algérie à la perte de l'Alsace-Lorraine, ce dernier, dès 1965, déplorait le fait que " l'Alsace-Lorraine, cette fois, n'a pas été perdue. Elle a été donnée. Défense de porter le deuil. "(15)
                Les historiens du futur souriront en étudiant ce pays, la France, qui est passé en quelques décennies de la célébration de l'Algérie française à celle de l'Espagne musulmane… Mais cette célébration de l'Espagne musulmane par les Européens, ne ressemble à rien d'autre qu'au prélude de leur future soumission. La soumission, est dans les esprits avant de l'être dans les faits.

                Nous l'avons dit plus haut, les partisans de l'Algérie française étaient tout sauf naïfs vis-à-vis de l'islam. On ne peut pas en dire autant, loin de là, des sympathisants Français du FLN. Ce sont en effet les intellectuels les plus engagés en faveur du FLN, qui se feront par la suite les promoteurs les plus enflammés du mythe al-Andalus. Parmi eux l'anthropologue Jacques Berque (1910-1995), grand spécialiste de l'islam et du monde arabe qui, bien que Français d'Algérie soutiendra la cause du FLN avant de prendre parti pour les Palestiniens dans leur lutte contre Israël. Jacques Berque, qui dans sa leçon de clôture au Collège de France appelait " à des Andalousies toujours recommencées ", restera comme l'un des principaux promoteurs du mythe al-Andalus en France. Le chercheur au CNRS Ahmed Moatassime, explique ainsi que ce dernier, " à propos de la France en particulier, élargit la perspective franco-maghrébine à la nécessité d'y intégrer la dimension islamo-méditerranéenne "(16) . Voilà, certes, tout un programme.
                Jacques Berque, qui souhaitait incarner le " dialogue " entre les deux rives de la Méditerranée, prônait le multiculturalisme et, dans les années 1980, voyait dans l'immigration maghrébine une chance pour la France. Quoi de plus logique, après tout, que cet homme qui prit parti pour l'Algérie arabe du FLN, mais également pour la Palestine arabe, soutienne ensuite l'idée de la France arabe ?

                Certains sympathisants du FLN sont allés jusqu'à la conversion à l'islam. C'est le cas de l'un des plus grands promoteurs du mythe al-Andalus, Roger Garaudy. C'est le cas également de Vincent Monteil, qui, à l'instar de Garaudy suivra le cursus islamo-gauchiste " jusqu'au bout " : soutien au FLN/antisionisme/glorification intellectuelle de la civilisation islamique et de sa prétendue tolérance/conversion à l'islam. Où l'on en revient également à l'axe rouge/brun/vert (extrême-gauche/extrême-droite/islamisme), puisque, trop de gens l'ignorent, la glorification de la colonisation arabe de l'Europe médiévale est, aussi, une idée d'ultra-droite. Comme l'a écrit Alexandre Del Valle, " la nostalgie d'Al-Andalus n'est pas l'apanage des seuls multiculturalistes partisans du " dialogue des civilisations ", il convient de rappeler que le thème de la " supériorité de la civilisation arabo-musulmane " a été élaboré et diffusé avec des efforts particuliers non seulement par tout un courant islamophile et tiers-mondiste de gauche et d'extrême gauche, mais aussi par " d'importants intellectuels raciologues nationaux-socialistes. " (17) Les mêmes héritiers de cette fraction de l'extrême droite néo-nazie, anti-chrétienne et anti-juive, qui pendant la guerre d'Algérie soutenait le FLN.
                La fascination pour l'islam, en France, est d'ailleurs assez ancienne. Le mouvement orientaliste y est pour beaucoup, et l'écrivain Louis Bertrand (1866-1941), farouche adversaire de l'orientalisme, dénonçait déjà, il y a bientôt cent ans, le fait qu'il y ait " particulièrement en France un préjugé pro-islamique, pro-oriental, qui date des origines du romantisme, et qui est défendu autant par la routine et l'autosuggestion littéraire que par un fanatisme sectaire " (18). Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que de nos jours, l'historien multiculturaliste Benjamin Stora appelle régulièrement à remettre l'orientalisme au goût du jour.

                Inversement, on peut affirmer que les défenseurs de l'Algérie française, de leur côté, étaient largement vaccinés contre le mythe de l'Espagne musulmane et de l'islam " religion de paix ". Ainsi Georges Bidault, antithèse de Jacques Berque, déplorant le fait que l'archevêque d'Alger Mgr Duval ait offert sa cathédrale aux nouvelles autorités de l'Algérie indépendante, écrivait :
                " Je ne crois pas que, même sous couleur d'œcuménisme, cette sorte d'indifférentisme en matière de foi ou de syncrétisme à la Massignon du Christianisme et de l'Islamisme puisse être jugé compatible avec la doctrine inébranlable et millénaire de l'Eglise romaine " (19).

                Le général Salan non plus ne se faisait guère d'illusions sur la " tolérance " islamique. Le futur chef de l'OAS, se rendant au Caire (Egypte) à la fin des années 1930 en tant qu'agent secret, et visitant à cette occasion la célèbre mosquée Al-Azhar, expliquera :
                " Je suis frappé, me promenant à travers les salles, par le regard brillant des jeunes gens qui, accroupis à terre sur de simples nattes, étudient le Coran. Ils sont l'image de l'ardeur fanatique. Je sortirai de là éclairé et note tout de suite dans mon carnet : " L'Islam, religion de combat. " " (20)

                Venons-en à Jacques Soustelle, autre chef de file des partisans de l'Algérie française. Comparant dans un chapitre de son livre Sur une route nouvelle (1964) le communisme à l'islam, appelant à " barrer la route au nouvel Islam " représenté selon lui par le communisme, l'ethnologue qu'il était développait :
                " Le communisme soviétique rappelle par plus d'un trait l'Islam : conquérant comme lui, convertissant " par le sabre ", bessif, les peuples qu'il subjugue […]. Communautaires l'un et l'autre, les deux systèmes sont à la fois temporels et spirituels ; de leur doctrine découlent également, pour les croyants, le droit et la science, les règles de la vie personnelle et celles de l'organisation collective. […] Le musulman sait que les chrétiens et les Israélites sont comme lui des " gens du Livre ", que Moïse, Jésus et Marie appartiennent aux trois grandes religions monothéistes, et en même temps il nous tient pour des infidèles fondamentalement plongés dans l'erreur. […] Les Occidentaux feraient bien de se rendre compte qu'aux yeux d'un communiste, qu'il soit russe ou chinois, ils demeurent et demeureront l'ennemi, comme le chrétien et le juif sont demeurés les infidèles aux yeux des musulmans, qu'ils fussent d'Afrique ou d'Espagne. "(21)

                Soustelle, s'il admettait que " l'Islam, dans sa fantastique expansion depuis le désert arabe jusqu'à l'Espagne, construisit une culture nouvelle en y mêlant des traits de la civilisation et la pensée byzantines " (22), s'il manifestait un profond respect pour la culture arabe et les adeptes de l'islam, n'en restait pas moins lucide. Comparant les invasions arabes du Moyen-Âge avec la colonisation française de l'Algérie, ce dernier écrivait par exemple qu'
                " on ne saurait mettre sur le même plan […] la destruction de l'Algérie par les Hillali au XIe siècle et sa reconstruction par les Français au XIXe. Il y a, certes, plusieurs manières de civiliser une contrée […] ; mais la démolition n'est pas un style " . (23)

                Que nous dit ce texte de Jacques Soustelle ? Exactement l'inverse de ce que nous rabâchent les islamo-gauchistes, multiculturalistes et plus généralement la pensée dominante actuelle, nous expliquant que la colonisation française est le mal absolu, tout en nous vantant en permanence la colonisation arabo-musulmane de l'Europe médiévale.
                Jacques Hermone, qui dans un livre paru en 1970 prenait régulièrement la défense des Pieds-Noirs, expliquait à son tour que " le mythe d'un monde arabe accueillant et tolérant est en train de devenir le pieux mensonge du siècle. " (24) Nous n'en sommes toujours pas sortis, de ce mensonge.

                Que pensent maintenant ceux que l'on a appelé les " ultras " de l'Algérie française du mythe al-Andalus ? Le Dr Jean-Claude Pérez, ancien haut dirigeant de l'OAS, dans son livre L'islamisme dans la guerre d'Algérie y voit une
                " volonté anti-occidentale qui a besoin de la légende flatteuse des invasions passées pour applaudir aujourd'hui, avec enthousiasme, à leur continuité historique contemporaine. Continuité qui s'exprime à notre époque par l'envahissement culturel et spirituel qu'est en train de subir ce même Occident. La relation laudative persistante de ces invasions, que nous devons aux ennemis modernes de l'Occident, leur permet une mise en valeur constante de la " belle " civilisation arabe. Celle-ci, grâce à ses glorieuses conquêtes a pu s'épanouir en Espagne, soutiennent-ils. Elle s'est tout particulièrement développée en Andalousie, donnant naissance à ce merveilleux style hispano-mauresque que nous admirons tous ! Voilà ce qu'ils sortent du tiroir-caisse de leur perpétuelle argumentation. Voilà ce qui nourrit leur thèse. […] On a voulu nous faire admettre que la cavalerie arabe transportait derrière elle, dans ses fourgons, une civilisation avancée. Une civilisation supérieure, qui allait favoriser l'épanouissement des pays conquis. On célébrait ainsi la victoire remportée par l'intelligence contre l'obscurantisme. Celui-ci était illustré par l'inculture alléguée de l'Occident chrétien moyenâgeux, qui tentait, disait-on, de survivre sur les décombres de l'empire romain. Voilà la thèse soutenue par les anti-occidentaux modernes qui éprouvent, aujourd'hui encore, la nécessité jouissive d'applaudir aux défaites subies par le monde chrétien du VIIIe siècle. " (25)
                Voilà pour le mythe al-Andalus, qui comme nous pensons l'avoir montré, est aussi et surtout le mythe des anciens sympathisants du FLN et de leurs héritiers.

3. Israël et antisionisme

                Nous pourrions aussi parler de l'antisionisme et de l'hostilité à Israël, consubstantielle à l'islamo-gauchisme et à l'axe rouge/brun/vert. Le fait est que la plupart des sympathisants Français du FLN se signaleront ensuite par leur hostilité à Israël (de Gaulle le premier), certains, allant même jusqu'à soutenir le terrorisme palestinien. Et c'est bien, en effet, la même idéologie pro-arabiste, tiers-mondiste, antioccidentale et " anti-impérialiste ", en un mot " islamo-gauchiste ", que l'on retrouve chez les amis du FLN comme chez ceux des Palestiniens. Inversement, la plupart des grands défenseurs des Pieds-Noirs et d'une présence française en Algérie, qu'ils fussent de droite ou de gauche, étaient de grands partisans d'Israël, d'Albert Camus à Jacques Soustelle, en passant par Pierre Sergent, Pascal Arrighi, Georges Bidault, le général Challe, le radical Bourgès-Maunoury ainsi que les socialistes Marcel-Edmond Naegelen et Max Lejeune. Les deux chefs de l'OAS eux-mêmes, les généraux Salan et Jouhaud, étaient des amis d'Israël.(26)

                Mais ce qui est essentiel à savoir, c'est que les partisans d'une présence française en Algérie avaient compris, mieux que quiconque, que le destin de l'Algérie et celui d'Israël étaient directement liés. " L'Algérie française et Israël étaient l'une et l'autre les deux môles sur lesquels devaient se briser la vague totalitaire dont Nasser est l'expression. […] La défense de l'Algérie et celle d'Israël formaient, pour qui sait voir, un tout, et nos adversaires clairvoyants ne s'y sont pas trompés "(27) , soutenait Jacques Soustelle en 1964. Un autre farouche partisan d'Israël et de l'Algérie française, Georges Bidault, expliquait pareillement, pendant la guerre d'Algérie, qu'" il ne s'agit pas seulement, de notre part, d'une solidarité de fait, encore qu'elle soit visible, entre la condition d'Israël et l'assaut mené contre la France [par la frénésie panarabe]. Il s'agit […] de discerner là où se trouve présentement la défense de la liberté, là où est l'espoir de stabilité et là aussi où règnent le désordre et les desseins injustes "(28). Venons-en aux " ultras " avec Jean-Claude Pérez, Pied-Noir et ancien de l'OAS qui, retraçant l'histoire des préparatifs de la guerre d'Algérie par le fanatisme arabo-musulman des années 1930, écrivait récemment : " Le combat contre la France est devenu solidaire, ou plutôt complémentaire, du combat contre la naissance de l'Etat d'Israël "(29). " Ainsi, le cadre de la lutte est bien tracé. On va combattre en même temps les Juifs de Palestine et les Français en Afrique du nord, tout particulièrement en Algérie […]. L'anti-France se doit de nourrir l'anti-sionisme et l'anti-sionisme se doit de nourrir à son tour l'anti-France. "(30)

                Le règlement de la guerre d'Algérie par de Gaulle n'aura pas permis aux Français et aux Occidentaux en général de discerner là où se trouve, comme disait Georges Bidault, " la défense de la liberté " de " là où règnent le désordre et les desseins injustes ". Brouillant les cartes comme jamais, il a ainsi largement déterminé l'orientation pro-arabe d'une bonne partie de la société française. C'est aussi par ce biais qu'il faut comprendre les conséquences désastreuses de la défaite des défenseurs des Français d'Algérie.
                Le " progressiste " Jean Daniel, s'en prenant à ce qu'il appelle les " lâchetés de la vieille SFIO de Robert Lacoste et Guy Mollet " - car pro-sioniste et anti-FLN -, a parlé de " l'orientation proarabe d'une " nouvelle gauche " que le PSU allait cristalliser ", " parti dont les jeunes générations, formées à l'anticolonialisme pendant la guerre d'Algérie, étendaient à tous les Arabes, quels qu'ils fussent, la solidarité qu'ils avaient manifestée à l'égard des résistants algériens. "(31) Jean Daniel confirme ici notre idée principale : les accords d'Evian ont bien offert un tremplin majeur, pour ne pas dire inespéré, à l'islamo-gauchisme.

                Le lâchage des Européens d'Algérie en 1962, suivi du lâchage d'Israël, toujours par de Gaulle, pendant la guerre des Six-Jours de 1967, véritables tournants de notre politique intérieure comme extérieure, vont ainsi faire naître une sorte de conjonction entre l'islamo-gauchisme d'un Jean-Paul Sartre et ce que nous avons appelé - avec des guillemets - l'" islamo-droitisme " d'une certaine droite pro-arabe héritière de Napoléon III, Lyautey et de Gaulle. Ce que Jacques Tarnéro a nommé " la rencontre d'un discours souverainiste de droite avec le tiers-mondisme de gauche "(32). Pire, c'est toute l'Europe que la France gaulliste a fini par entraîner dans ses illusions pro-arabes : " A partir du tournant de 1967 et de la détérioration rapide des relations franco-israéliennes, Jérusalem se tourne résolument vers Washington, tandis que, sous l'impulsion de la France, des relations se développent entre la Communauté européenne et le monde arabe. […] les divergences diplomatiques entre Bruxelles et Jérusalem s'accumulent à partir des années 1970 "(33), expliquent les spécialistes en géopolitique Frédéric Encel et François Thual.
                Mais au-delà même d'Israël, la pulsion ethnocidaire du gaullisme, après s'être exercée sur les Pieds-Noirs va également se reporter sur les chrétiens Maronites du Liban, menacés dans les années 1980 par l'intégrisme islamique : " le comportement français a évolué avec la décolonisation, et la communauté maronite a souvent reproché aux gaullistes de la considérer comme la communauté des pieds-noirs en Algérie : vouée à la disparition telles la lampe à huile et la marine à voile ", pouvait-on lire, en 1986, dans Le Nouvel Observateur.

                En revanche, quelle différence entre le général Salan, général républicain et patriote qui, en 1944, lutte contre la barbarie nazie, puis, à la tête de l'OAS en 1962, combat le communisme, le fanatisme arabo-musulman et lutte pour la survie du peuple Français d'Algérie, et le général Salan qui cinq ans plus tard, au lendemain de la guerre des Six-Jours, se félicite des victoires décisives remportées par Israël sur les armées arabes en ces termes : " J'ai suivi avec beaucoup d'attention la campagne d'Israël, brillante à tous points de vue. Elle marquera à notre époque où le courage semble s'évaporer. […] J'ai été joyeux des succès d'Israël "(34). Quelle différence entre le jeune Georges Bidault qui dans l'entre-deux-guerres s'oppose aux ligues de l'extrême droite fasciste et antisémite, avant de succéder, en 1943, à Jean Moulin à la tête de la Résistance, et le Georges Bidault de la guerre d'Algérie appelant à résister à l'impérialisme fanatique du FLN et du panarabisme ? Quelle différence enfin entre le Jacques Soustelle qui dans les années 1930 s'oppose au fascisme et aux accords de Munich, le Jacques Soustelle de la guerre d'Algérie mettant en cause des " milieux qui, soutenant la politique actuelle du pouvoir et travaillant activement à l'abandon de l'Algérie au F.L.N., se font par là les auxiliaires d'une entreprise totalitaire et raciste […], des admirateurs ou des complices de la clique raciste qui a fait ses preuves sanglantes par les massacres d'El-Alia et qui, de Ben Khedda à Nasser, à la Ligue arabe et au grand mufti El Husseïni, se relie au pire antisémitisme et au nazisme "(35), et le Jacques Soustelle qui dans les années 1980 dénonce le multiculturalisme, le nouvel antisémitisme des banlieues et les liens entretenus, par exemple, entre une organisation comme SOS Racisme et les terroristes Palestiniens de l'OLP :
                " On assiste à d'étranges collusions écrivait-il. Comment comprendre qu'un stand de l'O.L.P. de Yasser Arafat, organisation terroriste responsable d'innombrables assassinats de juifs, ait été admis à la soirée - subventionnée par le ministère de la Culture - de S.O.S. Racisme à la Concorde en juin 1985 ? […] Palestiniens de l'OLP [ayant] aussi derrière eux une tradition incarnée naguère dans l'ancien grand mufti El Hadj Amine el-Husseïni, admirateur et collaborateur d'Hitler et d'Eichmann pendant la Seconde Guerre mondiale. Or ils jouissent de sympathies et d'appuis dans les milieux de gauche en France. " (36)

                Il n'y a pas de différences. Ce sont les mêmes hommes luttant contre le même genre d'islamo-gauchistes qui s'expriment. Ce sont les mêmes défenseurs acharnés de l'Occident et de la liberté contre les tiers-mondistes et extrémistes de tous bords, qui s'expriment.
                Que disaient leurs ennemis au sujet d'Israël ? Contentons-nous de citer le chef FLN Ben Bella, idole de la gauche " anticolonialiste " dans les années 1960, qui plaidait pour la destruction pure et simple de ce pays :
                " Nous n'accepterons jamais ce corps étranger dans notre région. Israël est un véritable cancer greffé sur le monde arabe, déclarait-t-il en 1982 dans la revue Politique internationale. […] La population arabe y croit sans cesse. […] Le mur des technologies va bientôt s'écrouler. […] A plus ou moins long terme, ils auront leur bombe atomique, c'est inévitable. Nous pèserons alors si lourd que les Israéliens ne pourront résister. Ils n'ont aucune chance […] et s'il n'y a pas d'autre solution, alors que cette guerre nucléaire ait lieu et qu'on en finisse une fois pour toutes. […] Ce que nous voulons, nous autres Arabes, c'est être et nous ne pouvons être que si l'autre n'est pas. " (37)

                " De petits sous-Hitler arabes "(38) : c'est ainsi que Jacques Soustelle, leader des hommes politiques Algérie française, décrira Ben Bella et ses comparses du FLN. N'était-il pas lucide ?
                Voilà avec quel genre de personnages Charles de Gaulle a choisi de s'allier, contre les siens, en 1962.

                Pour rester dans le domaine de la géopolitique, il faut savoir que les intellectuels et hommes politiques " Algérie française ", ont également été les premiers à mettre en garde sur les dangers à long terme de la stratégie américaine de soutien à divers mouvements nationalistes religieux musulmans tel que le FLN, sous couvert de droit des peuples et d'anticolonialisme. Déplorant l'attitude de l'Amérique au lendemain de la crise de Suez, lors de laquelle ce pays, d'accord pour une fois avec l'URSS, vola au secours de l'Egyptien Nasser et de la Ligue arabe contre la France et l'Angleterre, Georges Bidault expliquait que " la politique [que les Etats-Unis] font ou esquissent […] déconcerte ceux qui cherchent à la comprendre et à en discerner au moins le sens "(39), avant de conclure :
                " La politique que l'anticolonialisme américain et le clan arabophile du State Department avaient considérée comme sage, bienfaisante et à longue portée s'est révélée, ainsi qu'il n'était pas sorcier de le prévoir, folle et désastreuse dès ses premiers pas. "

                " On ne s'émeut pas que le fanatisme se fasse champion de l'affranchissement "(40), s'étonnait-il encore à propos de " l'opinion américaine ", évoquant le " fanatisme religieux " et les appels à " la guerre sainte " du régime nassérien.
                Et Bidault d'insister ensuite, tel un prophète, sur le risque que cette politique américaine ne se retourne un jour contre ses propres auteurs :
                " Si une correction décisive n'est pas apportée sur-le-champ à une politique si rapide et si efficace à procurer des désastres, nous en verrons qui atteindront non seulement leurs auteurs mais la cause même dont ceux-ci ont témérairement entrepris et aussitôt compromis la défense. […] Si la persévérance dans les erreurs commises survit à tous les démentis qui s'accumulent, il y aura de nouveaux malheurs, de nouvelles victimes. Là où l'on avait cru favoriser la libération des peuples, un immense asservissement est en marche. " (41)
                Et ce sera le 11 septembre 2001.

                Le chapitre dans lequel Georges Bidault écrivait ces lignes, compris dans un livre consacré à la guerre d'Algérie paru en 1958, s'intitulait L'Amérique contre l'Occident …et contre elle-même. Un titre de chapitre finalement très proche du titre d'un livre d'Alexandre Del Valle paru à l'aube des années 2000, Islamisme et Etats-Unis, Une alliance contre l'Europe, dans lequel cet auteur dénonçait le fait que " des guérillas islamo-nationalistes " soient " encouragées par Washington à chasser " l'occupant infidèle " ", " au nom d'un " droit d'ingérence " masqué derrière le " droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ", invoqué uniquement lorsqu'il correspond aux intérêts pétroliers des Etats-Unis. " Faisant référence aux attentats du 11 septembre, Del Valle, dans un langage très similaire à celui de Georges Bidault hier, y voyait le moment où " la bombe du " fascisme vert " explose dans les mains de son cynique et maladroit artificier états-unien ".

4. Réécriture de l'Histoire de France

                Sur ce sujet là encore, les partisans de l'Algérie française, que l'on pourrait appeler dans notre langage d'aujourd'hui des " lanceurs d'alerte ", avaient prévenu. Vous ne me croyez pas ? Dans ce cas lisez ce petit texte de Georges Bidault, qui écrivait en pleine guerre d'Algérie :
                " Il y a toute une révision de l'histoire de France qui se prépare, à moins qu'on y prenne garde à temps, mais pour le moment nous sommes sur la route. Clovis, Charles Martel, Charlemagne, Saint-Louis qui eut le tort de mourir sous les murs de Tunis et tous les autres, de Jules Ferry à Lavigerie, réconciliés par les amis du progrès dans un égal oubli, ne seront plus des éléments recommandables, parce qu'ils n'ont pas su comprendre le sens de l'histoire tel que l'ont bien saisi désormais les amis des fellaga. " (42)

                Remercions encore une fois Charles de Gaulle et ses accords d'Evian d'avoir fait triomphé " les amis des fellaga "…
                Car que voit-on aujourd'hui ? La réalisation de tout ce qu'avait prévu Georges Bidault, tout simplement. Ainsi Alexandre Del Valle expliquait récemment qu'" en Europe, l'adaptation des manuels scolaires européens [a été élevé] au stade de priorité, notamment au sein du Dialogue euro-arabe (DEA) initié par l'Union Européenne. "(43) On lit par exemple, sur le site Internet de la fondation européenne Anna Lindh, fondation co-financée par l'Union européenne et la Ligue arabe : " Les auteurs de manuels d'histoire utilisés dans les écoles européennes devraient respecter cette présence musulmane, en produisant des cours donnant un plus grand espace à l'histoire du monde musulman. "(44) La fondation invitant aussi, cela va sans dire, ces mêmes manuels d'Histoire à enseigner la gloire de l'Espagne musulmane, et à ne pas négliger " le rôle important de la culture arabo-islamique comme agent clé du développement de l'Europe ".
                àCette réécriture des manuels et des programmes d'Histoire dans le sens du respect de la " diversité ", la France vient récemment d'en faire les frais.
                Inutile de parler également de l'ostracisme dont est actuellement victime la figure historique de Jules Ferry, passé en quelques décennies du symbole de la France républicaine et égalitaire, au symbole honni de la France " raciste " et " colonialiste ". Il n'y aurait d'ailleurs rien d'étonnant à ce que demain, l'on se mette à débaptiser des écoles Jules Ferry pour se conformer à l'air du temps et à quelques lobbies islamo-gauchistes, ainsi que l'avait prévu Georges Bidault. Il y a bien une école maternelle Maurice Audin au Blanc-Mesnil, du nom d'un complice communiste du FLN. Nous sommes sur la bonne voie !
                Sur ce sujet - la réécriture de l'Histoire de France - comme sur beaucoup d'autres, les partisans de l'Algérie française furent donc des visionnaires. Abordons maintenant la repentance.

5. Repentance

                Cet aspect est capital. On l'oublie aujourd'hui, les questions liées à la repentance et au complexe de culpabilité de l'Occident ont constitué le nerf de la guerre d'Algérie.
                Inutile de dire que les partisans de l'Algérie française (des plus modérés aux plus ultras), là encore étaient totalement vaccinés contre ce phénomène. " Tout paraît en fait être mis en œuvre pour démoraliser le pays, et lui donner une mauvaise conscience "(45), alertait lors d'une célèbre conférence de presse le général Salan, futur chef de l'OAS, en octobre 1960. Salan, qui contrairement à de Gaulle avait parfaitement compris la dimension essentiellement psychologique de la guerre d'Algérie, précisait ainsi sa pensée :
                " Mettre la nation en état de résister à cette forme de guerre, puis de battre l'ennemi sur son propre terrain me paraît être une des responsabilités majeures de l'Etat. Sauvegarder l'unité et le moral du pays, s'opposer franchement aux propagandes antinationales, et à toutes les formes les plus insidieuses de l'action adverse, sont sans aucun doute des tâches immenses, mais qui ne peuvent être éludées. " (46)

                " Notre maladie nationale, en cette deuxième moitié du XXe siècle, c'est la mauvaise conscience "(47), déplorait à son tour Jacques Soustelle. Trente ans plus tard ce dernier écrivait encore :
                " Une fois terminée la guerre mondiale, une nouvelle guerre a commencé et n'a pas cessé depuis lors : c'est la guerre psychologique, dont l'arme favorite est la " désinformation " et le but la démoralisation de l'Occident. L'idéal n'est pas d'abattre l'adversaire à coups de canon - procédé coûteux et dangereux - mais de l'amener à douter de lui-même, à se renier, à se rendre sans combat. […] Or le message le plus insistant, la campagne permanente de désinformation menée contre l'Occident, l'arme essentielle de la guerre psychologique ont pour objet d'inoculer à l'Occident le virus de la culpabilité et de l'écraser sous le poids du remords. " (48)

                Pour en revenir à la guerre d'Algérie, " il est bon qu'une nation soit assez forte de tradition et d'honneur pour trouver le courage de dénoncer ses propres erreurs. Mais elle ne doit pas oublier les raisons qu'elle peut avoir encore de s'estimer elle-même " , prévenait Albert Camus, tandis que Georges Bidault regrettait " une sorte de consentement fébrile au déclin, une disposition permanente à nous mettre en accusation nous-mêmes " . Alfred Fabre-Luce, qui n'était même pas un partisan de l'Algérie française proprement dite, mais qui défendait l'idée de la partition, a également très bien résumé l'état d'esprit suicidaire de l'époque. Fabre-Luce écrivait en 1958 :
                 "En France, beaucoup d'esprits distingués pensent […] que la civilisation blanche a fait son temps et doit passer le flambeau. Cette résignation les mène constamment à raisonner sur des données ou dans des cadres fournis par l'adversaire. Ils n'envisagent pas, par exemple, l'application du droit de libre disposition des peuples au profit, mais seulement au détriment des Français d'Algérie. La volonté de nos compatriotes de rester libres sur la terre qu'ils ont fécondée est pourtant au moins aussi respectable que la volonté rebelle de les en déloger. "

                Il suffit en effet de lire quelques textes d'" anticolonialistes " et autres opposants à la guerre d'Algérie, qu'ils fussent le fait de chrétiens, de progressistes ou de gauchistes, pour comprendre à quel point la haine de soi et de leur civilisation imprégnait les esprits de ces gens, au lendemain de la découverte des crimes nazis. Pas de doute, la guerre d'Algérie, la décolonisation, fut bien un moment charnière de l'Histoire de l'Occident, qui vit s'affronter les tenants d'une volonté de vivre contre les tenants du suicide.
                Le phénomène de la repentance est donc intimement lié à la solution apportée à la guerre d'Algérie, et il est à peu près certain que si de Gaulle n'avait pas capitulé devant le FLN, jamais un tel état d'esprit n'aurait été si répandu en France ainsi qu'en Occident. Souvenons-nous de ces mots de Marcel-Edmond Naegelen, pour qui " lâcher totalement l'Algérie " coûterait infiniment à la France en termes de " force morale ".
Marius Piedineri, février 2019
La suite dans le prochain numéro de La Seybouse

1 Marcel-Edmond Naegelen, Mission en Algérie, Flammarion, 1962, p. 279.
2 Jacques Soustelle, Sur une route nouvelle, Editions du fuseau, 1964, p. 50.
3 Jean Daniel, Cet étranger qui me ressemble, Grasset, 2004, p. 172.
4 Dominique Venner, De Gaulle, La grandeur et le néant, Editions du Rocher, 2010 (1ère éd. 2004), p. 245.
5 Dr Jean-Claude Pérez, " Etude50/42, A propos du cinquantenaire " Le putsch des généraux ", 22-26 avril 1961 " (nice.algerianiste.free.fr) ; Dr Jean-Claude Pérez, Attaques et contre-attaques, Dualpha Editions, 2008, p. 263.
6 Voir René Guitton, En quête de vérité, Le martyre des moines de Tibhirine, Calmann-Lévy, 2011.
7 Georges Bidault, D'une résistance à l'autre, Les Presses du Siècle, 1965, p. 259-261.
8 Ibid., p. 366.
9 Ibid., p. 258.
10 Ibid., p. 366.
11 Ibid., p. 260.
12 Pierre Méallier, La guerre d'Algérie à travers les tracts de l'O.A.S., Mon Petit Editeur, 2012, p. 93-94.
13 Alexandre Del Valle, La stratégie de l'intimidation, Du terrorisme jihadiste à l'islamiquement correct, L'artilleur, 2018, p. 56.
14 Ibid., p. 76.
15 Georges Bidault, D'une résistance à l'autre, Les Presses du Siècle, 1965, p. 237.
16 Oumma.com, Hommage à Jacques Berque, 23 juin 2000.
17 Alexandre Del Valle, La stratégie de l'intimidation, Du terrorisme jihadiste à l'islamiquement correct, L'artilleur, 2018, p. 469.
18 Louis Bertrand, Devant l'Islam, Paris, Plon, 1926, p. 56. Cité par Franck Laurent dans Le voyage en Algérie, Anthologie des voyageurs français dans l'Algérie coloniale, 1830-1930, coll. Bouquins, Robert Laffont, 2008, p. 805.
19 Georges Bidault, D'une résistance à l'autre, Les Presses du Siècle, 1965, p. 260.
20 Raoul Salan, Mémoires, Fin d'un Empire, " Le sens d'un engagement ", juin 1899 - septembre 1946, Presses de la Cité, Paris, 1970, p. 68.
21 Jacques Soustelle, Sur une route nouvelle, Editions du fuseau, Paris, 1964, p. 236-237.
22 Ibid., p. 121.
23 Ibid., p. 121.
24 Jacques Hermone, La gauche, Israël et les Juifs, Editions de La Table Ronde, 1970, p. 247.
25 Dr Jean-Claude Pérez, L'islamisme dans la guerre d'Algérie, Editions Dualpha, 2004, p. 306-307.
26 Raoul Salan, Lettres de prison réunies et présentées par André Figueras, Editions de la Table Ronde, 1969, p. 173 et p. 190 ; Sylvia K. Crosbie, A tacit Alliance, France and Israel from Suez to the Six Day War, Princeton University Press, 1974, p. 125 ; Benjamin Beit-Hallahmi, The Israeli connection, Whom Israel arms and why, I.B. Tauris & Co, London, 1987 ; Roland Lombardi, Israël au secours de l'Algérie française, L'Etat hébreu et la guerre d'Algérie (1954-1962), Editions Prolégomènes, 2009.
27 Jacques Soustelle, Sur une route nouvelle, Editions du fuseau, 1964, p. 13-14.
28 Georges Bidault, Algérie, l'oiseau aux ailes coupées, Editions de la Table Ronde, 1958, p. 93 et p. 182.
29 Dr Jean-Claude Pérez, L'assassinat de l'Algérie française, terreau de la conquête islamiste actuelle, Editions Dualpha, 2012, p. 240.
30 Dr Jean-Claude Pérez, L'islamisme dans la guerre d'Algérie, Editions Dualpha, 2004, p. 412 et p. 414.
31 Jean Daniel, La Guerre et la Paix, Israël-Palestine (Chroniques 1956-2003), Odile Jacob, 2003.
32 Jacques Tarnéro, Le nom de trop, Israël illégitime ?, Armand Colin, Paris, 2012, p. 109.
33 Frédéric Encel, François Thual, Géopolitique d'Israël, Editions du Seuil, 2011, p. 147.
34 Raoul Salan, Lettres de prison réunies et présentées par André Figueras, Editions de la Table Ronde, 1969, p. 173.
35 Combat du 23 octobre 1961. Cité dans Jacques Soustelle, Vingt-huit ans de gaullisme, La Table Ronde, 1968, p. 254-255.
36 Jacques Soustelle, " Racisme, antiracisme : mythes et réalités ", in Revue des Deux Mondes, mars 1986, p. 556-574. Article en ligne, à lire sur le site jacques-soustelle.blogpost.fr.
37 Jacques Tarnéro, Le nom de trop, Israël illégitime ?, Armand Colin, Paris, 2012, p. 164.
38 Jacques Soustelle, Sur une route nouvelle, Editions du fuseau, 1964, p. 15.
39 Georges Bidault, Algérie, l'oiseau aux ailes coupées, Editions de la Table Ronde, 1958, p. 65.
40 Ibid., p. 68.
41 Ibid., p. 86-87.
42 Georges Bidault, Algérie, l'oiseau aux ailes coupées, Editions de la Table Ronde, 1958, p. 25.
43 Alexandre Del Valle, La stratégie de l'intimidation, Du terrorisme jihadiste à l'islamiquement correct, L'artilleur, 2018, p. 157.
44 Ibid., p. 159.
45 André Figueras, SALAN Raoul, ex-général..., La Table ronde, Paris, 1965, p. 196.
46 Ibid., p. 202.
47 Jacques Soustelle, Le drame algérien et la décadence française, Réponse à Raymond Aron, Plon, 1957, p. 46.
48 Jacques Soustelle, " L'Occident en désarroi ", in Revue des Deux Mondes, février 1988, p. 31-34. A lire sur jacques-soustelle.blogpost.com.
49 Albert Camus, Chroniques algériennes, 1939-1958, Actuelles III, Editions Gallimard, 1958, p. 22-23.
50 Georges Bidault, Algérie, l'oiseau aux ailes coupées, Editions de la Table Ronde, 1958, p. 7.
51 Alfred Fabre-Luce, Demain en Algérie, Plon, 1958, p. 48.


PHOTOS DE BÔNE
Envoi de plusieurs internautes

La Seybouse (M. Ventura)




La Seybouse (M. Ciantar)





La Seybouse (M. Ciantar)




Le Pont sur La Seybouse (M. Ciantar)





Les bords de La Seybouse (M. Ciantar)




La Corniche (M. Ciantar)





Pêcheurs et le Pont sur La Seybouse (M. Ciantar)




Cinéma l'Olympia (M. Ventura)





Statue de Thiers (M. Ciantar)




Bâteau EL Djézaïr à Bône pour l'exode de 1962
(M. Ventura)






Voici un panoramique du port de Bône que j’ai fait de trois photos prises par un Anglais de la Royal Navy le 30 novembre ou le 1er décembre 1942. On voit des navires de transport de troupes et de matériel qui préparaient l’offensive contre Rommel en Tunisie. Les Allemands sont venus bombarder le lendemain, je crois que c’est là que le silo à blé a été atteint.
On voit le Pont de la Tranchée entre les deux gros bateaux au centre.



La Colonne Randon à la Légion Etrangère d'Aubagne
( M. Ventura)





Les amulettes et talismans
Envoyé par M. Christian Graille

                 Le mauvais œil ou l'œil envieux, accuse de toutes les maladies, de tous les évènements fâcheux qui surviennent, c'est la croyance de tout Oriental. Ce sont les marabouts qui font et donnent les talismans nommés telsem auxquels est reconnu le pouvoir préservateur. Il y en a de beaucoup de sortes, doués de vertus particulières, servant de moyens curatifs en grande réputation.

               Un médecin arabe contente son client en lui remettant un morceau de papier, un fragment de parchemin sur lequel sont inscrits les noms de Dieu, des prophètes, certains versets du Coran. C'est tout une pharmacopée talismanique, en pierres plus ou moins précieuses, tantôt chargées d'inscriptions, tantôt non gravées mais toujours infaillibles. Le Maure regarde la topaze comme un spécifique souverain contre la jaunisse et les affections bileuses.

               La cornaline (quartz) ou sardoine, la gemme rouge que les Arabes nomment had-jar-ed-dam, pierre du sang, est excellente contre le flux du sang et l'hémorragie. Les nourrices manqueraient à tous leurs devoirs si elles ne portaient pas de bagues dont les chatons sont des turquoises qui augmentent la qualité nutritive de leur lait. Le rubis fortifie le cœur, éloigne la foudre et la peste ; il apaise la soif etc. L'émeraude :
               - guérit la piqûre des vipères ou toute autre blessure venimeuse.
               - Elle aveugle même les serpents auxquels on la présente ;
               - elle chasse les démons et les mauvais esprits ;
               - c'est un spécifique contre l'épilepsie,
               - les douleurs d'estomac,
               - les maux d'yeux.

               Le diamant (elmâs) n'est pas moins utile et a des vertus analogues.
               La cornaline a encore d'autres qualités que celles signalées plus haut :
               - elle calme la colère,
               - guérit les maux de dents,
               - préserve de la mauvaise fortune,
               - est un gage de bonheur constant et
               - prolongation de la vie.

               - L'hématite (espèce minérale composée d'oxyde de fer) (maghnâttys) :
               - calme les douleurs de la goutte,
               - facilite l'accouchement,
               - détruit l'action des poisons.

               Le jade (yechm) garantit de la foudre et des mauvais rêves ;

               Enfin la gemme appelée œil-de-chat (ayn-el-hor) préserve de l'influence des mauvais regards et met à l'abri des coups du sort ; Bien plus, dans un combat elle rend celui qui la porte invisible aux yeux de son adversaire, etc.
               Les précieuses recettes sont consignées par un écrivain arabe nommé Teyfâchy dont le manuscrit est conservé à la Bibliothèque Nationale de Paris.
               Cette étrange pharmacopée occupe l'ouvrage entier ; tous les spécifiques y sont indiqués :
               - contre la gale,
               - la peste,
               - la fièvre et même
               - contre les chutes de cheval et
               - les blessures de toute espèce.

Voyage à travers l'Algérie :
notes et croquis par Georges Robert (1891)

Cafés et bains
Envoyé par M. Christian Graille

                 En dehors des demeures où il cache jalousement sa vie privée, mais aime à recevoir ses amis et ses hôtes, l'indigène nord-africain fréquente quelques lieux de réunion, le café et le bain public :
                 " Le café maure " est quelque chose de fort différent de nos estaminets français. On y consomme très peu et on y joue assez rarement. C'est avant tout un lieu de conversation, de paresse et de repos, un endroit frais et ombragé pour la fumerie ou le rêve.
                 - On y fait la sieste,
                 - on y dort,
                 - on y accomplit même ses dévotions.

                 L'indigène, une fois accroupi sur ses talons, empaqueté dans son burnous, se considère là comme chez lui. Immobile et taciturne, il regarde couler les heures avec indifférence et béatitude.

                 Le café où je suis entré a été aménagé tant bien que mal au rez-de-chaussée d'une maison bâtie à l'européenne. C'est une grande salle nue badigeonnée de chaux et dont le sol inégal n'a même pas été recouvert de terre battue. Il n'y a d'africain dans la disposition de la pièce que la haute cheminée lambrissée de faïences émaillées où le kaouadji (Employé qui prépare le café) surveille ses petites burettes de fer blanc. Des bancs de bois assez larges circulent tout le long des plinthes.
                 L'unique ornement est une boîte à horloge monumentale, toute peinturlurée de fleurs rouges et jaunes, telle qu'on en rencontre encore dans les cuisines de nos fermes.
                 Au milieu, sur une table à trois pieds, une botte de roses trempe dans une grosse cruche de cuivre qui sert à porter l'eau.

                 La salle est à peu près vide. Quelques individus sommeillent, allongés sur les bancs. Je gagne la cour contiguë, dont l'éclairage un peu cru fait paraître plus sombre les demi-ténèbress où est plongé le café. Une lampe à pétrole est suspendue au treillage qui s'étend d'un mur à l'autre, en matière de plafond et qui est complètement tapissé par des lianes violettes de bougainvilliers. C'est un véritable berceau de verdure où règne un peu de fraîcheur, grâce à la fontaine encastrée dans le mur et dont la vasque est pleine jusqu'au bord.

                 Je m'assieds à l'écart, sur la natte, et, après avoir commandé ma tasse de kaouadji, je regarde autour de moi … La cour n'est guère plus animée que la salle. Deux hommes assis sur leurs talons jouent bravement aux échecs.
                 Le damier est placé par terre, dans le cercle rougeâtre de la lampe, et je vois les mains brunes et sèches des joueurs qui poussent les figurines de buis sur les cases blanches et noires. Un nègre, accroupi à côté d'eux, leur jette de temps en temps un regard discret, en dilatant les gros globes laiteux de ses prunelles. Enfin j'ai pour unique voisin un grand vieillard maigre qui a l'air comme effondré dans les plis d'un burnous immaculé.

                 Une barbe de patriarche allonge encore son visage osseux et émacié, plus pâle que les mousselines de son turban. D'un doigt soigneux, il tourne lentement les pages d'un magnifique et très ancien manuscrit, dont le vélin jauni est enluminé d'or, de vermillon et d'azur.
                 - Il lit avec un clapotement continu des lèvres, comme un enfant qui épelle, puis il s'interrompt,
                 - ferme le livre précieux et, les yeux fixes, enfiévrés et luisants d'extase,
                 - il marmotte une prière,
                 - se dresse de toute sa hauteur sur ses genoux,
                 - s'abat brusquement dans une totale prostration et
                 - se relève, le front noirci de poussière.

                 Personne ne prend garde à la gesticulation du dévot personnage. Pas une parole ne s'échange entre les quatre hommes qui sont là. Je ne perçois que le bruit ténu du filet d'eau qui s'égoutte dans la vasque de la fontaine, le murmure de la prière sur les lèvres du vieux, et, parfois, le claquement des sandales du kaouadji qui vient enlever les burettes vides, éparses autour des joueurs. Plus que le café parfumé qui se dépose au fond de ma tasse, je savoure ce calme et ce recueillement, je jouis du spectacle qui m'environne, ces hommes impassibles et beaux sous leurs draperies blanches, cette cour rafraîchie d'eau vive, ce rideau de fleurs violettes qui la recouvre toute, comme un riche vélum sur la cella d'un temple … "

                 Quant au bain maure, pénétrons-y avec le meilleur des guides :
                 " J'y entrai, un soir, vers onze heures, car les bains ne sont ouverts aux hommes que la nuit. Je soulevai le carré d'étoffe qui masquait la porte, au fond du vestibule, et je me trouvai dans un assez vaste patio dont l'atmosphère un peu lourde m'oppressa d'abord.
                 A la lueur de lampes à huile, je ne distinguai qu'un amas de blancheur, puis mes yeux s'étant accoutumés à la pénombre, je précisai les silhouettes des gens qui étaient là et l'architecture du local. C'était un patio tout en marbre blanc.

                 Au centre, au milieu de l'impluvium (Bassin creusé au milieu de l'atrium pour recueillir les eaux de pluie, dans la maison romaine.), où l'on descend par quelques marches, se déploie un bassin circulaire, surmonté d'une vasque où s'égouttait un jet d'eau. Des linges mouillés pendaient tout le long de la margelle. A côté un individu, nu jusqu'à la ceinture, les reins entourés d'une espèce de pagne, foulait d'autres linges qu'il piétinait en cadence, comme un vendangeur dans une cuve.
                 Très exhaussée, au-dessus du bassin, une galerie à colonnes torses encadre tout le patio. Des indigènes couchés y dormaient ; d'autres jouaient aux dames ou fumaient des cigarettes en buvant du thé ou du café dans de petites tasses peintes de couleurs crues.

                 Le foulon, (Homme qui foule de ses pieds des tissus pour les attendrir.) interrompant sa besogne, me conduisit dans la galerie, m'assigna une natte et me convia à me déshabiller. Les pas du foulon s'amortissaient sur le marbre onctueux. Il glissait comme une ombre. Aucun bruit dans le patio, sinon, de temps en temps, une rumeur de paroles échangées à voix basse. On se serait cru dans une mosquée, à l'heure de la prière nocturne.
                 Je me dévêtis, un peu gêné par la présence de tous ces Africains. Quand je fus prêt, le foulon me noua une serviette autour des hanches, puis il alla quérir le baigneur, un adolescent pâle et mince comme un cierge de cire, et plus trempé, plus ruisselant qu'une naïade. Le torse nu, la peau bronzée et distendue par les côtes saillantes, un simple torchon ficelé à la taille, l'esclave s'agenouilla, m'attacha aux pieds des sandales de bois blanc, et, me soutenant par les aisselles (car je risquais de tomber à chaque pas sur les dalles du patio toutes grasses d'eau savonneuse), il m'entraîna vers l'étuve, dont la porte de chêne retomba lourdement sur nous.

                 Une chaleur humide, suffocante, me coupa la respiration. Je me sentais défaillir, un flot de sueur m'inonda soudain de la tête aux pieds. Mais d'un mouvement brusque, mon guide me renversa, m'étendit sur une plate-forme rectangulaire recouverte d'une plaque de marbre noir ; elle était chauffée à l'intérieur. Il me sembla qu'elle me brûlait. Je me relevai vivement, mais le baigneur me força à me recoucher, pesa sur tout mon corps de façon à ce que le contact fût complet entre le marbre et ma chair. " Reste là ! Me commanda-t-il, ne bouge pas avant que je vienne !… " Je ne bougeais plus. J'étais comme anéanti. Je me liquéfiais par tous mes pores. La sueur de mon front m'emplissait les orbites et m'aveuglait. Quand la plaque me brûlait, ma peau adhérait à la pierre rendue visqueuse par toutes les graisses humaines qui s'étaient figées là.

                 Puis, peu à peu, je m'habituai à ce supplice. Je goûtai une sorte d'évanouissement voluptueux. Ma conscience divaguait :
                 Où étais-je ? Les sensations que j'éprouvais étaient si nouvelles ! Elles entraînaient mon imagination vers des époques et des choses si lointaines ! …
                 A travers les buées tièdes qui remplissaient l'étuve, je promenais mes regards autour de moi. Dans le fond tremblait le halo d'une lampe et je distinguais le sautillement rythmé de l'esclave qui, aidé d'un compagnon, foulait un paquet de linges. Je les voyais obliquement, car je ne remuais pas ma tête et mes yeux revenaient toujours avec lassitude vers les ténèbres de la voûte, où ils se perdaient dans le noir. De temps en temps, une goutte froide, qui s'en détachait, tombait sur ma joue et me forçait à fermer les paupières. Une invincible torpeur m'envahissait …

                 Tout à coup les deux esclaves, ayant fini leur besogne, m'empoignèrent, l'un par les épaules, l'autre par les jambes, et, sans la moindre douceur, ils me déposèrent dans un coin de l'étuve, au bord d'une rigole, où coulaient un robinet d'eau chaude et un robinet d'eau froide. Ils me firent coucher à plat ventre, le nez contre le pavé, puis, saisissant une poignée d'étoupes qu'ils trempèrent dans du savon liquide, ils se mirent à me frotter si vigoureusement que j'en criais.

                 Ils s'interrompaient pour me jeter des gobelets d'eau tiède sur tout le corps, et ils recommençaient leur friction frénétique. Après cela, ils me donnèrent trois petites claques sur les omoplates, et avec la paume de leurs mains en guise de strigile (Racloir pour nettoyer et frictionner le corps), ils entreprirent de me racler l'épiderme.
                 On me nettoya, on me retourna dans tous les sens. Parfois le grand maigre s'arrêtait et il agitait au-dessus de ma tête ses mains savonneuses.
                 - Regarde comme tu étais sale ! … Regarde ta peau, ta sale peau ! …
                 Je ne m'offensais nullement de ces familiarités, sachant que c'était un simple artifice pour obtenir un salaire plus élevé.
                 Quand ils se furent fatigués à ce jeu, ils m'arrosèrent d'eau froide répandue à pleins gobelets, et ce me fut une sensation délicieuse qui me ranima un peu.
                 Alors :
                 - ils s'attelèrent tous les deux à mes bras et à mes jambes,
                 - ils me les tirèrent,
                 - ils m'écartelèrent.
                 - Ils me firent craquer chaque articulation, et, me tenaillant les muscles entre leurs doigts serrés, comme des étaux,
                 - ils me les tordirent,
                 - ils en exprimèrent les dernières gouttes de sueur.
                 Enfin :
                 - on me rinça à l'eau froide,
                 - on me remit sur pieds,
                 - on m'essuya,
                 - on m'attacha une serviette autour des reins, une autre sur la tête, et, me soutenant par les aisselles, les deux esclaves m'emportèrent vers le patio.

                 Je ne pouvais plus me traîner, j'étais exténué. Ainsi enveloppé dans mes linges, inerte et les membres raidis, j'étais comme un mort qu'on va mettre au cercueil après la toilette funèbre.
                 Sous la galerie du patio, un matelas recouvert d'un drap m'avait été préparé par le foulon. Il m'engagea à m'y reposer jusqu'à l'aube, m'apporta des cigarettes, une tasse de thé et s'en alla.
                 Une fois étendu sur les draps frais du matelas, je goûtai un bien-être inexprimable, quelque chose comme le réveil de la vie, au début d'une convalescence.

                 Mon corps était brisé mais je constatais, en moi,
                 - une lucidité d'esprit extraordinaire,
                 - une agilité,
                 - une acuité surprenante des sens, cette espèce de libération de la matière qu'on éprouve dans les rêves.
                 C'était un état voluptueux et candide. J'habitais un monde étrange et silencieux. Le murmure du jet d'eau dans la vasque, la respiration des dormeurs couchés à côté de moi ne faisaient que rythmer ce silence.
                 La blanche clarté des veilleuses, et, tout le long des murs, les corps disséminés formaient des tassements plus sombres.

                 La blanche clarté des veilleuses, et, tout le long des murs, les corps disséminés formaient des tassements plus sombres.
                 Des apparences fantomales se levaient par instants, semblaient flotter sous les arcades. Et l'air tiède était tout chargé de parfums : odeurs de cigarettes musquées, de cumin, de santal et de girofle… "

Cahiers du Centenaire de l'Algérie.
La vie et les mœurs en Algérie par M. Pierre Deloncle.
Ancien élève diplômé de l'Ecole des Chartes.
Membre du Comité National du Centenaire.

Le Koheul
Envoyé par M. Christian Graille

                 Personne n'ignore que les femmes arabes ont l'habitude de se teindre le bord des paupières. Les hommes et même les jeunes négresses suivent leur exemple ; la manière qu'on emploie et qui produit une couleur d'un noir bleuâtre se nomme koheul.

                 Les blancs ont deux raisons pour user du koheul : d'abord il donne aux yeux plus d'éclat en les encadrant dans un liseré noir ou bleu, et cette raison est surtout appréciée par les femmes ; ensuite il préserve des ophtalmies, arrête l'écoulement des larmes et donne à la vue plus d'assurance et de limpidité. Tous les médecins arabes ont recommandé l'usage du koheul et notre seigneur Mohamed le prescrit.

                 Le koheul (sulfure d'antimoine) dont on a donné le nom a la préparation composée qui sert à teindre les paupières parce qu'il en est la base est un présent de Dieu.
                 Ce fut une femme du pays de Yamana dans le Yémen qui la première fit l'usage du koheul pour dissimuler une inflammation habituelle qu'elle avait aux paupières, et l'on raconte qu'en peu de temps elle acquit une vue si perçante que ses yeux distinguaient un homme d'une femme à deux journées de marche.

                 Pour obtenir la préparation complète, on combine en proportions égales
                 - du koheul,
                 - du toutïa (sulfure de cuivre)
                 - du cheubb (alun calciné)
                 - du zendjar (carbonate de cuivre) et
                 - quelques clous de girofle, le tout réduit dans un mortier à l'état de fine poussière.

                 On passe au tamis fin cette première préparation pour en former un mélange intime que l'on enferme dans une petite fiole (mekhralel) en plomb, en argent, en vermeil et même en or car pour les riches et surtout pour les femmes, le mekbralel est un meuble de luxe.
                 Pour user du koheul on plonge dans le mekhralel une petite baguette en bois effilée, polie ou même une épine de porc-épic. Elle en ressort poudreuse ; on l'applique avec précaution dans sa longueur sur la paupière inférieure ; on la presse entre les deux paupières en la faisant glisser légèrement du grand angle de l'œil à l'autre angle et sur son passage elle colore en noir la partie nue qui donne naissance aux cils. Dans certains pays on ajoute d'autres substances qui, par la volonté de Dieu, sont douées de vertus merveilleuses :
                 - du corail mâle ou des perles pulvérisées qui font disparaître les taches blanches
                 - de la cornée lucide,
                 - du musc, qui arrête l'écoulement des larmes,
                 - du safran et
                 - du djaoui (benjoin) qui rendent la vue plus active.

                 Les nègres pauvres usent tout simplement du koheul pur sans même le colorer avec du noir de fumée ; il donne alors une teinte bleuâtre qui va particulièrement bien aux jeunes femmes. Leurs grands yeux noirs, ainsi parés et dessinés sur leur peau dorée, brillent d'un éclat lumineux comme une source d'eau vive au milieu des sables.
                 Les mekhralel du Soudan sont de petites fioles en peau de mouton à poil, moulés sur un moule d'argile et très artistiquement travaillées.
                 On obtient par le même procédé de fabrication une infinité d'autres vases également en peau propres à contenir l'huile, la graisse, le lait, le beurre.

                 On retrouve l'usage chez tous les peuples musulmans,
                 - arabes,
                 - indiens,
                 - persans,
                 - turcs,
                 - nègres ;
                 - chez tous ceux enfin qui sont exposés aux rayons éclatants du soleil et à la réverbération de la lumière sur le sable.

                 La tradition universelle affirme que c'est pour son peuple égaré dans le désert que le Seigneur a changé le djebel el Thour en koheul.
                 Le koheul est l'une des dix prescriptions relatives au corps dont cinq sont obligatoire et cinq facultatives. Les premières imposent :
                 - De se couper les ongles,
                 - de s'arracher les poils des aisselles,
                 - de se raser toutes autres partie que la nature a voilées,
                 - de pratiquer la circoncision,
                 - de se couper les moustaches à hauteur de la lèvre supérieure.

                 Les autres sont :
                 - L'usage du koheul,
                 - du henné,
                 - du souak, (bâtonnet pour se laver les dents) et
                 - l'oudou el kébir, la grande ablution de l'homme et de la femme.
                 Le henné comme le koheul est souvent chanté par les poètes.
                 - c'est un arbuste qui a quelque rapport avec le cédrat,
                 - on en broie les feuilles desséchées,
                 - on en fait une pâte qui pendant quelques heures appliquée sur les ongles, le bout des doigts et quelquefois les mains jusqu'au poignet et les pieds jusqu'à la cheville sont teints d'un rouge orange.
                 La femme dont le mari est mort ou qui a été répudiée doit, en signe de deuil, s'abstenir pendant quatre mois et dix jours du koheul, du henné et du souak.
Mœurs et coutumes de l'Algérie par le général Daumas,
Conseiller d'État, Directeur des affaires de l'Algérie (1853)



Costumes et occupations des indigènes
Envoyé par M. Christian Graille

         L'Européen qui débarque pour la première fois dans une ville d'Algérie n'est frappé au premier abord que de l'étrangeté des costumes indigènes. A la vue de cette population dont les usages diffèrent des nôtres, il éprouve une sorte d'éblouissement qui l'empêche de reconnaître les signes caractéristiques propres aux diverses classes de cette société devenue française par la conquête, demeurée étrangère par ses habitudes.
         Il prend le Juif pour le Maure, le Maure pour le Turc ; quelquefois il confond le Maure et le Turc avec l'Arabe et le Berbère.
         Cette première révélation du monde musulman ne laisse dans l'esprit que des impressions confuses. Cependant toutes les classes de la population algérienne observent dans la forme et la couleur de leurs vêtements certains usages particuliers qui permettent de les reconnaître.
         Le Maure et le Turc sont deux types similaires ; aussi diffèrent-ils entre eux beaucoup moins par la taille de l'habit que par la manière de le porter.
         Leur coiffure consiste dans la calotte rouge dite chéchia, autour de laquelle s'enroule un turban de couleur claire. Une double veste couvre le haut du corps ; l'une se ferme sur la poitrine, l'autre reste ouverte ; le saroual, culotte bouffante, descend jusqu'aux genoux ; il est maintenu sur les hanches par une ceinture de laine rouge et laisse ordinairement découverte la partie inférieure des jambes.


         Sous ce costume commun aux deux classes citadines de la population musulmane, le Turc se reconnaît à la fierté de la démarche, à l'arrogance du maintien. Jusque dans le fond d'une boutique il conserve sa prestance militaire tandis que le Maure reste bourgeois, même sous les armes.
         Ils diffèrent aussi par la manière de placer le turban : sur la tête du Maure il couvre également les deux côtés de la tête ; sur la tête du Turc il incline un peu à droite laissant à découvert le dessus de la tempe gauche, qui, par suite de cet usage, est recommandé tout particulièrement aux soins du haffaf ou barbier. Il existe encore entre les deux types quelques différences de détail.

         Ainsi l'usage des bas est plus répandu parmi les Turcs que parmi les Maures.
         Mais c'est surtout dans le jeu de la physionomie, dans l'ensemble du maintien que les deux natures se dessinent.
         Deux formes locales expriment le caractère et les rapports de l'une et de l'autre. Le Maure définit ses anciens maîtres par quatre mots turcs : Fantasia tchok, para iok, " beaucoup d'orgueil et pas d'argent ". Le Turc désigne le produit de son alliance avec les Maures par deux mots non moins expressifs : Khaloughli, " enfant d'esclave ".

         Veut-on rapprocher le Maure et le Turc de l'Algérie à deux des types les plus populaires de l'Europe ? Qu'on se représente, affublés de même costume, Sancho Pansa et Don Quichotte.

         Le costume des Juifs ne diffère pas par sa forme de celui des Turcs et des Maures, il en diffère seulement par la couleur. La chéchia violette, le turban noir, la veste et le pantalon de couleur terne ou sombre distinguent la famille israélite de toutes les autres races indigènes. Les Juifs m'ont paru encore se faire remarquer par la blancheur générale de leur teint : malgré l'influence du climat on rencontre parmi eux très peu de peaux brunes ; aussi forment-ils avec les Nègres un double contraste.

         Tandis que l'Israélite porte sur sa peau blanche un vêtement de couleur sombre, le Nègre, cet autre ilote, montre une prédilection marquée pour les couleurs claires. Il porte presque invariablement le turban et le saroual blancs et presque toujours aussi une veste blanche. Jusque dans les industries qui le font vivre, il semble rechercher des oppositions à la couleur de jais luisant dont la nature l'a couvert. Il se fait marchand de chaux et sa compagne marchande de farine. Dans presque toutes les villes il exerce la profession spéciale de badigeonneur. On le voit promener son pinceau à long manche sur la coupole des mosquées, sur les flèches des minarets, sur les façades et les terrasses de tous les édifices. C'est à ses mains noires qu'Alger doit le voile blanc qui l'enveloppe et qui dessine de loin sa forme triangulaire encadrée dans la verdure de ses coteaux et de ses campagnes.

Tel est l'extérieur des classes citadines

         Il nous reste à parler du peuple des campagnes, du peuple des tribus réparti en deux classes bien autrement importantes, bien autrement nombreuses qui, soit sous le tissu de laine de la tente, soit sous la toiture de chaume ou de tuiles, représentent la plus grande partie de la population algérienne. Il s'agit des Arabes et des Berbères.

         Quelques échantillons de ces communautés se rencontrent même au sein des villes. Les uns viennent y vendre les produits de la campagne et y acheter des cotonnades et des merceries ; les autres viennent y chercher du travail et consentent à subir pendant plusieurs années la dure loi de l'expatriation, dans l'espoir d'amasser un petit pécule et d'acheter, du produit de leurs économies, une maisonnette et un jardin, soit dans l'oasis, soit dans la montagne natale ; c'est cet espoir qui fait accepter au Berbère de la Kabylie, à l'Arabe du Sahara, la résidence temporaire de nos villes.


         Le Kabyle, dans la plus grande simplicité de son costume national, porte pour coiffure la calotte rouge commune à toutes les classes indigènes, pour vêtement un derbal ou chemise de laine serrée au corps par une ceinture de même substance et un tablier de cuir ; pour chaussures la torbaga, sandale grossière que la neige et les rochers rendent nécessaire dans la montagne, mais qui laisse à découvert les formes musculeuses de la jambe. A cet accoutrement il ajoute un manteau à capuchon appelé bernous, pièce principale du costume africain, que la conquête de l'Algérie a popularisé en France.
         Le bernous du Kabyle sort des Béni-Abbès ou des Beni-Ourtilan, deux tribus industrieuses situées dans les montagnes.

         La coiffure de l'Arabe se compose de deux ou trois chéchias superposées qui, en voyage, lui servent de porte-feuille. Lui donne-t-on des dépêches à apporter au loin, il les place entre ces deux calottes de laine et ne s'en inquiète plus jusqu'au terme de sa mission ; il est sûr de ne pas les perdre car sa coiffure ne le quitte jamais, ni le jour ni la nuit. Sur la chéchia extérieure, qui est rouge, s'applique une longue pièce d'étoffe de laine légère, fixée par une corde en poil de chèvre et de chameau qui s'enroule plusieurs fois autour de la tête où elle s'étend en spirale. La pièce d'étoffe s'appelle haïk et se fabrique surtout dans le Djérid, oasis tunisienne. La corde de chameau s'appelle khéit ou brima suivant qu'elle est ronde ou plate. Une gandoura couvre le corps et les épaules ; c'est une autre chemise de laine, plus longue que le derbal du Kabyle et sur laquelle descendent les plis du haïk. Enfin l'habillement se complète par l'inévitable bernous qui est pour l'Arabe une seconde peau.

         Les deux derniers types qui viennent d'être définis par leur costume appartiennent au peuple des tribus ; elles forment la grande masse de la population indigène. La principale différence qui existe entre eux est celle du langage. Quant à leur origine, il doit s'être introduit beaucoup de sang berbère, même chez les peuples qui font exclusivement usage de la langue arabe ; on ne doit donc voir dans les tribus, soit arabes, soit même berbères que des mélanges à dose variable du peuple conquérant et du peuple conquis. Les tribus arabes sont celles où le sang et la langue des vainqueurs et les tribus berbères celles où le sang et la langue des vaincus l'ont emporté.

         A ce point de vue l'examen des mœurs indigènes fournit des rapprochements et des contrastes dignes d'intérêt. La race berbère habite surtout les montagnes, la race arabe habite surtout les plaines. La première porte deux noms différents ; elle s'appelle Kabyle dans le massif méditerranéen et Chaouia dans le massif intérieur. La seconde porte partout le même nom qui est celui des fondateurs de l'islamisme ; mais les habitudes et les instincts se partagent aussi en deux catégories : l'Arabe du Tell et l'Arabe du Sahara.
         Les groupes les plus remarquables formés par l'élément berbère sont dans le massif intérieur, les montagnes de l'Aurès et dans le massif méditerranéen.
         La race arabe et la race berbère ont des habitudes et des inclinaisons tellement différentes, qu'en quelque point qu'on les observe, on les trouve séparées partout : l'une a fini par absorber ou repousser l'autre.

         L'éloignement que le Berbère et l'Arabe éprouvent l'un pour l'autre tient en grande partie des différences organiques que le temps et la civilisation affaiblissent l'Algérie possède en dehors de la Kabylie, c'est lui qui les a élevées : Alger, lui-même, ce gracieux spécimen de l'art mauresque, est sorti de ses mains. Ce sont les usines kabyles qui fabriquent les plus belles armes indigènes et particulièrement les sabres longs et pointus, appelés fliça.
         Le Kabyle a les défauts qui correspondent à ses qualités. Comme tous les hommes dont l'intelligence se concentre dans les ouvrages matériels, il est âpre, entêté, hargneux ; après la pioche, la scie et le marteau, il ne connaît plus rien que le fusil. Il a le don de l'imitation ; c'est encore une qualité qui accompagne presque toujours des instincts industriels. D'artisan laborieux il n'attend pour devenir mécanicien habile que des maîtres et des modèles.

         L'Arabe a un caractère plus sociable, l'esprit plus élevé, l'imagination plus vive. Il anime son langage d'expressions pittoresques ; il aime à revêtir la pensée de formes allégoriques ; il montre enfin vers la poésie une tendance naturelle, qui ne demande qu'un peu d'éducation pour se développer. A travers l'ignorance commune à tous ces peuples, on remarque dans l'Arabe quelques aspirations vers la lumière, quelques vagues désirs de culture intellectuelle ; une propension instinctive le porte surtout vers deux sciences, l'astronomie et la géographie. Rien n'a le don de le captiver comme les récits de voyages et les mouvements des corps célestes. Mais ce portrait s'applique exclusivement à l'Arabe du Sahara ; car, pour le paysan du Tell, il ne connaît que la route de sa tribu au marché voisin, là s'arrête son instruction géographique. Il tond ses moutons et en porte la laine à l'habitant du Sahara qui la transforme en tissus ; là s'arrêtent ses facultés industrielles. Les tentes elles-mêmes, ces demeures flottantes où il abrite sa famille, c'est aux nomades du Sahara qu'il les achète. Enfin l'arabe du Sahara, malgré ses instincts poétiques, aime le travail comme le Kabyle, et vient le chercher à plus de cent lieues de distance de nos villes du littoral.
         C'est lui qui dans le port d'Alger nous tendait la main pour débarquer durant les premières années de la conquête ; c'est lui qui transporte nos marchandises et nos bagages.

         Le Biskri (ce nom comprend tous les travailleurs sahariens) est aussi intelligent, aussi actif et adroit que le Kabyle. Le paysan arabe du Tell, au contraire, ne rêve que de repos.
         Reconnaissons toutefois l'importance du rôle assigné par la nature à ces trois catégories d'habitants dans le mouvement d'échange et de production qui anime et nourrit l'Algérie indigène.

         Le Berbère est surtout artisan, l'Arabe du Sahara pasteur et voyageur, l'Arabe du Tell laboureur. Mais à la spécificité qui lui est propre, chaque classe en ajoute une autre qui lui crée de nouvelles ressources. Au fond de ses montagnes, l'artisan berbère cultive l'olivier sur une large échelle ; à côté de ses landes vouées au parcours, le pasteur saharien possède des forêts de dattiers ; dans les plaines monotones qu'il cultive le laboureur arabe du Tell élève encore d'immenses troupeaux.

         Ainsi chacun de ces trois types, envisagé au point de vue de sa participation à l'entretien des autres, représente une double aptitude, une double industrie.
         Le Berbère cumule les professions d'artisan et de jardinier,
         l'Arabe du Tell celles de laboureur et de pasteur,
         l'Arabe du Sahara celles de pasteur et de jardinier.

L'ALGERIE par MM les capitaines du génie Roset et Carette
Edition 1850



Des mœurs et des coutumes des Algériens
Envoyé par M. Christian Graille

                 Tous les peuples qui habitent le royaume d'Alger ont en général des mœurs déréglées, beaucoup de hauteurs et de brutalités à l'égard des étrangers. Il faut en excepter quelques anciens officiers du gouvernement, quelques marchands qui voyagent, et ceux qui ont été esclaves des chrétiens. L'ignorance et la mauvaise éducation causent leur dérèglement.
                 Les Algériens accoutumés dès leur bas âge à voir dans leurs maisons des esclaves de toutes les nations, se persuadent aisément que les autres peuples ne sont nés que pour être soumis ; ce qui leur inspire un mépris extrême pour tous les étrangers. Ils haïssent surtout les Espagnols et les Portugais, qu'ils regardent comme des usurpateurs des royaumes et des pays qui ont appartenu à leurs ancêtres.

                 Les soldats qui composent la milice et qui sortent ordinairement de la lie du peuple du Levant, fiers de se voir les maîtres d'un grand royaume, et habiles à parvenir à leur tour, ou par cabale, aux plus hautes dignités, sont d'une insolence insupportable à l'égard des Maures et des Arabes auxquels ils font durement sentir leur supériorité.
                 Ils sont regardés comme les hauts et puissants seigneurs. On leur donne le nom d'effendi qui signifie seigneur, au lieu que les Arabes ou Maures, quelques puissants qu'ils soient par leur naissance ou par leurs richesses, n'ont que le nom de sidi, qui signifie Sieur ou Monsieur.

                 Le dey est appelé effendi par les soldats et les consuls étrangers ; mais les Arabes et les Maures l'appellent Sultan ou simplement Maître ou Grand Maître. Tous les étrangers qui ont affaire à lui, et qui ne sont point caractérisés, lui font plaisir de lui donner le titre de sultan.
                 Ce qui inspire de la modération aux grands, c'est qu'on s'en prend à eux lorsque les affaires ne tournent pas avantageusement et qu'ils sont déposés ou étranglés ; de sorte que la crainte des mauvais évènements leur inspire de la douceur et de la prudence.
                 Les marchands du pays qui voyagent sont fort traitables, parce qu'ils ont affaire à toutes sortes de nations et ils guérissent par-là des préjugés de leur éducation.

                 Les Turcs et les Maures qui ont été esclaves sont plus raisonnables. Lorsqu'ils sont chez les chrétiens, ils se désabusent de l'opinion qu'ils ont de la force et de la grandeur de leur pays. Ils voient les forces des chrétiens, leurs grandeurs, leurs richesses, leur éclat et éprouvent les bienfaits de quelques-uns.
                 Ce sont ordinairement ceux qui font le plus de bien aux esclaves chrétiens, ayant éprouvé le même sort, et craignant pour eux ou pour leurs enfants de retomber dans l'esclavage. Alors ils demandent aux consuls des nations étrangères des certificats du bien qu'ils ont fait aux esclaves chrétiens.
                 Tous les étrangers qui arrivent dans la ville d'Alger sont conduits, dès qu'ils ont débarqué, devant le dey par le capitaine du port ou un de ses officiers.
                 Le Dey leur donne la main à baiser et leur demande en langue franque d'où ils viennent, et des nouvelles de leur lieu de départ et de la route qu'ils doivent suivre ; après quoi ils sont renvoyés.

                 Ordinairement le truchement de leur nation est avec eux, pour servir de guide et d'interprète.
                 Les étrangers ne doivent point porter l'épée dans les villes du royaume, principalement à Alger. Les consuls et les officiers des princes étrangers n'en portent point, quoiqu'il leur soit permis de le faire. Mais les rues sont si étroites qu'une épée embarrasse les passants et peut donner lieu à des querelles avec les janissaires, ce qu'il faut absolument éviter.
                 Lorsqu'un Turc passe, il faut se ranger le mieux que l'on peut et lui faire place si l'on ne veut essuyer des paroles injurieuses. On va rarement dans les rues sans en recevoir des jeunes Turcs et des Maures ; mais c'est à quoi il faut fermer les oreilles et ne pas répondre, de peur que la canaille ne s'attroupe et qu'il n'arrive un plus grand mal. On ne saurait agir avec trop de circonspection et de patience.
                 Ce n'est qu'en se plaignant au Dey, qu'on obtient une bonne et prompte justice, comme il est arrivé à M. Thomas Thompson, consul anglais, il y a peu d'années. Mais quelque fois le remède est pire que le mal et pour un coupable qu'on fait châtier, on se fait un nombre d'ennemis dont il faut se méfier continuellement.

                 En 1716, le Sir Thomas Thompson, consul anglais, allant à la loge où s'assemblent les capitaines de vaisseaux, rencontra sur le môle un jeune Maure, qui selon ce qu'on a cru était ivre.
                 Le môle est fort étroit et comme d'ailleurs il avait beaucoup plu, le passage n'était guère commode. Le Maure disputa le terrain au consul et le poussa même. Le consul lui demanda s'il voulait le faire sauter en bas du môle, et lui dit qu'il le trouvait bien plaisant de lui disputer le pas. Le Maure répondit en colère que c'était bien à un chrétien à vouloir la préférence sur lui et en même temps sauta sur le consul, lui donna un soufflet et un croc en jambe, le jeta à terre et lui mit un genou dans l'estomac.
                 Le capitaine du port ayant vu de loin ce manège s'avança et menaça de loin le Maure, qui ne jugea pas à propos de l'attendre et s'enfuit ; l'autre conduisit le consul à l'assemblée des officiers de marine pour le consoler et réparer son désordre.

                 L'amiral lui témoigna le chagrin qu'il avait de ce qui était arrivé. Il lui dit qu'il allait en informer le Dey et que ce Maure recevrait bientôt le châtiment de son crime. L'amiral avait beaucoup de considération pour la famille de ce jeune homme, dont le père était un honnête marchand de ses amis.
                 Ainsi dès qu'il eut rapporté l'affaire au Dey dans toutes ses circonstances, il le pria de ne pas faire mourir le coupable, comme il le méritait, parce qu'il appartenait à d'honnêtes gens, et que d'ailleurs des libertins l'ayant fait boire, l'ivresse l'avait conduit à cette mauvaise action.
                 Le Dey répondit à l'amiral que cette action méritait la corde et qu'à sa considération, il voulait bien lui en faire grâce. Mais comme il fallait pour l'exemple et la satisfaction du consul outragé, châtier cet insolent, le Dey demanda à l'amiral de s'expliquer sur le châtiment qui devait être ordonné. L'amiral conclut à la bastonnade et alors le roi lui dit :
                 " A ta considération je lui fais grâce de la corde. "
                 Le consul arriva un peu après. Le Dey l'apercevant lui dit :
                 " Consul, je fais ce que tu veux. Je suis fâché de ton accident mais tu auras justice : reste là. "

                 Il ordonna en même temps au bachaoux (Chef porteur de tous les ordres du Dey) maure de faire chercher le criminel et de l'amener devant lui. Comme il ne s'était point caché, il fut bientôt trouvé et amené devant le Dey, qui lui dit fort en colère.
                 Malheureux qu'as-tu fait ? Le Maure sans beaucoup s'émouvoir répondit : " Eh seigneur qu'ai-je fait ? J'ai battu un chrétien, un chien qui voulait être plus que moi et qui m'a dit des injures. "
                 Le Dey, outré de son arrogance, lui dit :
                 - Est-il vrai que tu as traité le consul anglais de la manière que l'on m'a dit ?
                 - Oui, dit-il, seigneur. Cela vaut-il la peine de m'envoyer chercher ?


                 Alors le Dey, comme furieux s'écria : " C'est assez ! " et prononça sa sentence qui fut deux mille deux cent coups de bâton.
                 Elle fut exécutée sur-le-champ, en présence du consul. On mit le criminel à la Falaque et on lui appliqua 1.000 coups de bâtons sous la plante des pieds.
                 Comme il ne pouvait pas en supporter davantage sans mourir, le Dey ordonna que le criminel fût conduit en prison, afin qu'il se remit un peu.

                 Le lendemain à neuf heures du matin, le Dey envoya chercher le consul anglais, et ensuite le criminel auquel on appliqua pour l'entière exécution de la sentence les 1.200 coups de bâtons restants sur les fesses, qu'on lui emporta aussi. Il perdit la parole et la respiration ; mais comme il n'était pas mort, le Dey ordonna de le conduire en prison, de l'y enfermer et de l'y laisser seul et sans secours. Cet ordre fut exécuté : et on laissa mourir ce malheureux de douleur, de faim et de soif.

                 Le Gouvernement d'Alger se fait un principe de religion de laisser exercer à chacun la sienne en toute liberté ; et mieux on observe sa religion, plus on est estimé et protégé.
                 Les Algériens aiment beaucoup mieux les esclaves de la religion catholique romaine que tout autre à cause de la confession qui les rend quelquefois plus fidèles. De sorte que les maîtres souhaiteraient qu'ils se confessassent chaque semaine. Plusieurs vont avertir les confesseurs des mauvaises actions de leurs esclaves et les conduisent eux-mêmes aux églises aux fêtes solennelles de Noël, de Pâques et autres et s'informent exactement s'ils se sont confessés.

                 Il faut que les Chrétiens et les Juifs se donnent bien de garde de parler contre la loi de Mahomet ; en ce cas ils y sont punis très sévèrement. Les banqueroutiers sont punis de mort à Alger.
                 - Les Turcs coupables de banqueroute sont étranglés,
                 - les Maures pendus,
                 - les Juifs brûlés, et à l'égard des Chrétiens, leur Consul ou la Nation sont forcés de payer pour eux.

                 On appelle banqueroutiers ceux qui se sauvent sans payer. Ceux qui ne peuvent pas satisfaire à leurs créanciers doivent s'abandonner à leur discrétion avec tout ce qu'ils ont, pour ne pas se rendre coupables.
                 Il faut observer de ne faire aucun présent ou don aux Turcs ou Maures par pure libéralité, de peur que cela ne passe en usage qui a force de loi dans ce pays-là, lorsqu'il leur est avantageux, de même que dans tout le Levant. De là vient que les Consuls sont obligés de faire continuellement à ceux qui gouvernent, des présents que leurs prédécesseurs n'avaient faits que par générosité et pour faire leur cour.

                 Si un étranger, dans quelque occasion particulière, offre un présent à un Turc ou à un Maure, il le demande toutes les fois que la même occasion se présente, et après ses successeurs en font de même, surtout si ce sont des gens dans l'emploi.
                 Lorsque les Algériens se font visite, après s'être fait annoncer par un esclave, ils restent dans une petite cour ou parloir fait pour cela.
                 Le maître du logis vient à ce parloir et fait apporter du tabac, des pipes et du café.
                 S'il juge à propos de faire monter ceux qui le demandent, il en fait avertir les femmes et les filles afin qu'aucune ne se trouve dans l'appartement ou dans la chambre où ils doivent aller. De sorte que s'il se rencontre quelqu'un sur l'escalier d'une maison, ou dans quelque autre endroit, sans être conduit par le maître, il est réputé pour un voleur, arrêté sur-le-champ et dénoncé.

                 On fait faire des informations sur ses vies et mœurs ; s'il est convaincu de quelque larcin, il est puni de mort, sinon on se contente de lui faire infliger une peine pécuniaire ou corporelle, s'il n'a pas de quoi payer.
                 On présume qu'un homme qui pénètre dans une maison, sans se faire annoncer, y va pour voler ou pour déshonorer les femmes.

                 Si ce sont des femmes qui visitent la maîtresse du logis on fait avertir le mari, afin qu'il ne paraisse point tant que la visite durera. Ces sortes de visites donnent lieu à une grande débauche avec les esclaves chrétiens qui se trouvent en sécurité, parce qu'ils sont regardés sans conséquence et comme des animaux domestiques. Le mari n'oserait entrer dans l'appartement des femmes tant qu'il y a des étrangers dans la maison.
                 Lorsque les Chrétiens vont visiter les Algériens dans leur maison, ils sont reçus comme des gens du pays au parloir. Il y en a même qui ne font pas de difficulté de leur faire voir leurs femmes et leurs filles et qui regardent tous les Chrétiens libres sans conséquence. Mais les Chrétiens ne font guère de ces visites qui sont hors d'usage, parce que les Algériens qui ont des emplois dans le gouvernement ou des métiers, ont tous leurs lieux de rendez-vous où on les trouve toujours.

                 La loi défend aux femmes, comme dans tous les pays mahométans, de se laisser voir à d'autres qu'à leurs maris. On y marie les filles sans que les époux les puissent voir, avant l'engagement devant le Cadi. De cette manière, ils ne peuvent connaître les défauts personnels l'un de l'autre. Tout ce qu'ils peuvent faire, quoique cela soit aussi défendu par la loi, c'est de se faire informer de ce qui concerne les filles qu'ils veulent épouser par des parentes qui vont leur faire visite à dessein pour les examiner.
                 Les Algériens, soit Turcs, Maures ou Arabes, qui veulent être réputés gens de bien, mènent une vie simple et laborieuse et n'ont aucun de ces amusements agréables qu'on a dans les autres pays.

                 Leur usage est de se lever au point du jour pour se purifier et faire leur première prière nommée Caban. Ils dînent à dix ou onze heures, pour avoir le loisir de faire leur ablution avant la seconde prière du midi, nommée Dohor. Ils se retirent le soir chez eux avant la troisième prière, appelée Lazero, qui se fait toujours avant la nuit, en quelque saison que l'on soit.
                 Après ce temps-là on ne voit dans les rues que des libertins ou des gens qui ont des affaires bien pressantes. Ils observent aussi religieusement de se lever pour la quatrième et cinquième prière, qui se font toujours pendant la nuit et qu'on nomme Magarepa et Latumar.

                 Ils n'ont ni jeux, ni spectacles publics ou particuliers. Ils passent plus de la moitié de leur vie à boire du café et à fumer, sans autre compagnie de femmes que celles des leurs, de leurs concubines et de leurs esclaves.
                 Tous les jeux leur sont défendus, exceptés ceux des échecs et des dames ; encore ne leur est-il pas permis de jouer de l'argent. Ils jouent pour quelques prises de café, pour du tabac, du sorbet ou autre chose semblable.
                 Leur lune de Ramadan, ou leur carême, est une espèce de carnaval pour la jeunesse libertine, mais plus modéré que celui des Chrétiens, dont ils méprisent fort les mascarades et les bals.

                 Ils appellent le carnaval, le temps où tous les chrétiens deviennent fous. Comme ils passent tout le jour sans manger ni boire, dès que le soleil est couché, les jeunes gens courent par la ville avec des guitares et des tambours, en criant et chantant, et vont de temps en temps manger et boire ; mais les personnes de bonnes mœurs qui veulent ménager leur réputation se gardent bien de faire semblables choses et restent chez eux comme à l'ordinaire.
                 Les habitants du royaume d'Alger sont naturellement fort avares, et ils ne font pas difficulté de se reconnaître tels. Ils disent communément que lorsque les Chrétiens veulent peindre un Algérien ils représentent un homme à qui on bouche un œil avec une piastre pendant qu'on lui crève l'autre avec un couteau.
                 Ils sont fort sobres et vivent avec presque rien. Mais c'est un ancien usage, que chaque père de famille, ou chaque chef de maison, ait un trésor enterré.

                 La plupart des Chrétiens s'imaginent que c'est à cause qu'ils croient en la métempsycose ou qu'ils pensent jouir de cet argent dans l'autre monde.
                 Mais m'en étant informé de plusieurs personnes sensées dans le pays, elles m'ont assuré que ce n'était pas là leur motif.
                 La véritable raison de cette conduite, c'est que personne ne veut passer pour riche ; car dans les besoins pressants de l'État, vrais ou supposés, le Dey prend de l'argent comptant partout où il en trouve et il n'y a aucun exemple qu'on l'ait rendu.

                 D'ailleurs Alger étant sujet à des révolutions fréquentes, un habitant persécuté par ceux qui gouvernent et contraint de se sauver pour éviter la mort, espère de conserver son trésor, s'il n'a pu l'emporter, en l'indiquant à quelqu'un de ses enfants, à un bon parent ou à un fidèle ami.
                 C'est aussi l'unique moyen de conserver de quoi vivre aux enfants, en cas de malheur ; car lorsque l'homme est étranglé, tous ses biens sont confisqués par ordre du Gouvernement, ce qui arrive souvent. Dans de semblables occasions le Pitremelgi, ou receveur des revenus casuels, fait fouiller la terre dans les maisons des fugitifs ou des criminels exécutés et bouleverser le terrain qui leur appartient à la campagne.

                 Les meubles dans ce pays-là consistent en fort peu de chose, chez les personnes même les plus riches. On n'y connaît :
                 - ni tapisseries,
                 - ni fauteuils,
                 - ni chaises,
                 - ni armoires,
                 - ni choses semblables.

                 Les murailles seulement y sont bien blanches.
                 Dans la chambre la plus propre il y a un tapis de pied ou une natte de joncs ou de palmiers ; les gens du pays quittent leurs babouches à la porte avant d'entrer, les rues étant en toutes saisons malpropres.
                 Au milieu de la chambre contre un mur, il y a un enfoncement et une marche élevée d'un pied, couverte d'un tapis avec des coussins qui sert pour s'asseoir pendant le jour et pour dormir la nuit, en y mettant de petits matelas que l'on ôte le matin.
                 A un bout de la chambre, qui est ordinairement fort longue, on fait une séparation avec un rideau de toile sans tringle, et seulement attaché d'une muraille à l'autre par un cordon.

                 Cet endroit sert à enfermer les matelas, les coussins et les couvertures inutiles pendant le jour, que l'on met sur un reposoir fait de planches. Il y a dans cet endroit une caisse de bois peint où sont les hardes et nippes. Celles dont on se sert journellement sont pendues à des chevilles à la muraille.
                 On a des rideaux aux fenêtres et aux portes, de toile fort claire avec des rubans de soie de couleur entre deux lés. Ces rideaux sont aussi sans tringle, et tiennent avec un clou ou cheville de chaque côté.
                 Près des fenêtres il y a de petites niches dans le mur, qui servent d'armoires où l'on enferme les ustensiles de table et autres bagatelles de peu de considération.

                 On n'y voit presque point d'argenterie ; les cuillers sont de buis, on ne se sert point de fourchettes, la vaisselle est de terre, exceptés quelques grands plats ou bassins en laiton. On mange ordinairement sans table, et l'on met des plats sur une pièce de natte qu'on enlève après avoir mangé.
                 Les plus distingués ont une table basse et ronde, couverte d'une lame de laiton façonnée autour et en plusieurs endroits.
                 On sert à manger sans nappe, mais une serviette assez longue pour faire le tour de table, sert à tous ceux qui y sont. Quelques-uns ont des fourchettes d'argent, mais il s'en trouve très peu, et ils ne savent pas même s'en servir commodément.

                 C'est assez l'usage des femmes, qui veulent passer pour belles, de se frotter le bout des doigts avec une herbe nommée Gueva qui les teint en bleu, et de se noircir les cheveux et les paupières avec de l'antimoine brûlé. C'est là tout leur plus beau fard.
                 Or y en a qui pour exciter leurs maris ou leurs amants au plaisir de l'amour, leur font prendre de la poudre d'une racine, appelée en arabe Surnag, laquelle a une vertu toute particulière pour cela. Elle se trouve en plusieurs endroits du mont Atlas du côté de l'Ouest et les Arabes assurent que c'est assez qu'une fille y urine dessus pour perdre sa virginité.

                 On apprend aux enfants à lire et à écrire en même temps comme dans les pays du Levant. Les maîtres crayonnent leurs leçons dans le commencement, et les écoliers suivent les lettres crayonnées avec la plume, dont on leur apprend en même temps le son, jusqu'à ce que la main soit ferme et accoutumée à donner le tour aux lettres.
                 Le châtiment des enfants, lorsqu'ils manquent à leur devoir est la bastonnade.
                 Comme ils sont toujours assis sur des nattes, les jambes croisées et nues, le maître leur prend les jambes qu'il passe et joint ensemble dans une falaque, instrument fait exprès, qui les tient saisies, et tenant ou faisant tenir les pieds élevés il leur donne sur la plante un nombre de coups, suivant la faute commise avec une règle ou une baguette.

                 Ils condamnent l'usage de fesser les enfants comme très indécent, scandaleux et abominable : ils en font même un grand crime.
                 La raison en est, qu'étant très portés à ce que nos poètes appellent l'amour socratique, ils trouvent en cela un grand sujet de tentation. Tellement que si un maître d'école s'avisait de le faire, on le punirait très rigoureusement.

                 C'est un usage assez reçu parmi les mahométans, mais particulièrement à Alger, de taxer les denrées comme le pain, le vin, les légumes et généralement les autres choses nécessaires à la vie, qui se vendent au détail. Aucun marchand n'oserait outrepasser le prix de peur de s'exposer à de rudes peines. Ce prix est augmenté ou diminué, selon l'abondance ou la disette, les saisons ou les conjonctures.
                 Cette taxe est regardée comme un article essentiel de la religion ; et c'est par où commence un Dey nouvellement élu.
                 Ibrahim dey surnommé le Fou, élu au mois de mai 1710, voulut faire, quelques jours après son élection, un acte de justice, pour se faire craindre des mauvais et aimer des bons.

                 Un matin il prit l'habit d'un esclave hambourgeois, qui était de sa taille et sortit de chez lui à la pointe du jour avec un autre esclave qui lui servait de camarade. Il le fit entrer dans une boutique où l'on vendait en détail toute sorte de denrées et dont il soupçonnait le maître de mauvaise foi.
                 Cet esclave dit au marchand que leur maître les envoyait à la campagne pour travailler et que comme ils n'y faisaient pas bonne chère, ils venaient acheter du riz et des raisins pour faire un mets à la mode de leur pays qu'ils allaient faire cuire à la taverne avant que de partir, mais qu'il le priait de ne pas le dire à leur patron parce qu'il était fort brutal et qu'il ne manquerait pas de les châtier s'il savait qu'ils eussent resté si tard en ville.

                 Ce marchand leur promit tout ce qu'ils voulurent et leur vendit, pour le secret, le riz et les raisins secs beaucoup au-delà de la taxe qui venait d'être publiée, parce que c'était pour les esclaves, à ce qu'il pensait, et que cela ne tirerait à aucune conséquence.
                 Le Dey revenu à son palais prit ses habits et se mit sur son siège ordinaire. L'esclave qui était avec lui, vint lui porter plainte publiquement peu de temps après, contre le marchand maure, qui lui avait vendu le riz et les raisins secs beaucoup au-delà de la taxe.
                 Le Dey envoya un chiaoux pour amener ce maure, qui étant devant lui nia le fait comme une imposture de l'esclave qui apparemment voulait avoir sa marchandise et l'argent.

                 Le Dey, sans vouloir dire qu'il était avec l'esclave lors de l'achat du riz et des raisins, le garda auprès de lui et envoya un crieur ordinaire publier dans la ville, que si quelque Turc, Maure, Chrétien ou Juif avait des plaintes à faire contre tel marchand il eut à aller incessamment à la maison du roi, et qu'on ne serait plus reçu après la seconde prière. Plusieurs personnes s'y rendirent et accusèrent le marchand de concussion, dont il fut plus que suffisamment convaincu.
                 Le Dey prononça en attendant la sentence définitive qu'il lui serait donné par provision 500 coups de bâton sous les pieds, et qu'il payerait 500 piastres d'amende, lesquelles seraient mises dans le trésor de l'État et ce à cause qu'il avait menti au Dey.
                 La pluralité des voix le condamna à être pendu pour l'exemple, étant le premier prévaricateur depuis la régence d'Ibrahim Dey, ce qui fut exécuté sur-le-champ.

                 On s'était toujours piqué dans le royaume d'Alger, de ne prendre aucune précaution pour prévenir la peste, ou pour en empêcher le cours. On aurait cru s'opposer aux décrets éternels de Dieu et au dogme de la prédestination absolue si on avait fait autrement. J'ai vu même en 1718, arriver un navire anglais, qui avait chargé à Alexandrie où la peste était violente.
                 Le capitaine de ce bâtiment en était mort en route, de même que quelques marchands mahométans. Nonobstant les représentations qui furent faites au Dey par les Consuls, l'équipage, les soies et les cotons furent embarqués le même jour de son arrivée, sans qu'il survînt aucun incident.
                 Cependant (chose étonnante) la peste qui ravageait la Provence en 1720 avait répandu une telle terreur partout, qu'à Alger on y oublia la prédestination, et Mehmed dey renvoya non seulement les bâtiments qui venaient de Marseille, mais il refusa même la permission de recevoir les lettres qui étaient sur ces bâtiments.

                 Il n'y a aucun médecin à Alger, ni dans aucun endroit du royaume. On en condamne l'usage ; et les personnes qui veulent être réputées vertueuses disent que c'est tenter Dieu que de vouloir prendre des remèdes au hasard pour des maladies internes. J'ai vu mourir Baba Ali Dey d'une violente fièvre, sans vouloir prendre aucun remède, quoiqu'il eût un chirurgien français pour son esclave, qui était habile homme et qui lui promettait de rétablir sa santé.
                 Mais il le rejetait en disant que le nombre de ses jours était marqué de toute l'éternité. Les Algériens approuvent seulement les remèdes extérieurs, et chaque famille a ses petits remèdes particuliers en cas d'accident.
                 Il y a peu de malades ; les gens y vieillissent et y sont forts et robustes ; ce qu'on doit attribuer à la sobriété, à l'usage des viandes les plus simples et à l'exercice du corps dès le bas âge.

Histoire du royaume d'Alger
par M. Laugier de Tassy, commissaire de la Marine
pour Sa Majesté très chrétienne
en Hollande Edition 1725

A tous mes amis jeunes
Envoyé par M. Jean Pierre Ferrer
Auteur Inconnu
À tous les jeunes qu'on a connus, avant

         Et qui sont des vieillards... maintenant !
         À toutes ces filles jadis coquettes
         Maintenant en maison de retraite,
         Pour nous souvenir, prenons un instant
         Tant qu'il est vraiment encore temps!

         À tous ces garçons hier charmants
         Et qui, aujourd'hui, sont grisonnants,

         À toutes ces filles en mini-jupettes
         Ridées désormais comme des fruits blets,
         J'envoie ce message important
         Pour nous moquer un peu de nos tourments.

         On vieillit, on vieillit,
         On est de plus en plus raplatie, raplati.
         On a la mémoire comme une passette,
         On a du mal pour mettre nos chaussettes.
         On est tout rabougri, déjà amorti,
         On oublie même parfois ses anciens amis.

         À tous mes virtuels correspondants
         Qui sont chaque jour devant leur écran,
         À tous mes amis qui, par Internet,
         M'envoient souvent des "blagounettes",
         Je souhaite qu'encore longtemps
         Nos échanges soient récurrents.
         Amitiés à tous

         Ceux qui se plaignent de vieillir doivent se rappeler que c'est un privilège refusé à plusieurs !



Le bain maure de la rue de Mascara
Envoyé par M. Christian Graille


                 Tous les journaux de la colonie ont publié ces jours derniers la nomenclature des monuments anciens que possède l'Algérie. Un intérêt national se rattachant à leur conservation, un décret en date du 31 mars 1887 en ordonne le classement.
                 La ville de Tlemcen, à elle seule, renferme plus de richesses archéologiques que toutes les autres villes de l'Algérie réunies.
                 Nous sommes fiers de constater ce fait qui ne pourra manquer, une fois la ligne ferrée achevée, d'attirer dans notre belle région une foule de visiteurs étrangers.
                 Parmi les monuments classés déjà par le Ministère des Beaux-Arts, un bain maure, situé rue de Mascara et dont la construction remonte à plus de 700 ans, présente le plus grand intérêt.

                 La salle principale est surtout remarquable. C'est une vaste pièce, d'une régularité parfaite au milieu de laquelle se trouve un jet d'eau qui retombe dans un gracieux bassin en pierre d'une seule pièce. Une fine colonne de plus de un mètre de hauteur la sépare du sol, ce qui lui donne tout à fait l'aspect d'une tulipe gigantesque.
                 Autour de la salle, et à quelque distance des murs, douze colonnes à chapiteaux, style roman, finement travaillées, soutiennent un dôme ogival d'une grande hardiesse : ce dôme, par les nombreuses sculptures qu'il contient, rappelle les plus belles pièces de ce genre.

                 Une légende fort originale se rattache à la construction de ce monument. Nous la racontons dans toute son intégralité, telle que les Arabes nous l'ont transmise de génération en génération :
                 " A l'époque où Tlemcen était la capitale du royaume, le monarque avait une fille unique qu'il chérissait. Cette princesse fut atteinte d'une maladie de la peau, la lèpre sans doute.
                 Les médecins lui ordonnèrent comme traitement, l'usage journalier de bains de vapeur.
                 Au bout de quelque temps, la jeune fille se plaignit à son père de ce qu'elle était l'objet de la répulsion générale.

                 En effet, lorsqu'elle entrait dans la salle d'étuve, les autres femmes, à la vue de ce corps couvert de plaies et d'ulcères, s'empressaient de fuir, et la plupart, pour ne plus avoir sous leurs yeux un spectacle si repoussant, préféraient se priver de prendre leur bain habituel : grand sacrifice pour elles car, encore aujourd'hui, le bain est la seule distraction de la femme arabe.
                 En cette occurrence, le sultan convoqua ses ministres, et, leur ayant communiqué les plaintes de sa fille, il leur demanda conseil. Après une mûre délibération, il fut arrêté que l'on construirait, aux frais de la cassette royale, un bain pour l'usage spécial de la princesse.
                 Les travaux marchèrent rapidement sous la direction d'un architecte renommé qu'on avait fait venir tout exprès de l'Andalousie.
                 La construction terminée, on choisit, pour sa consécration, un vieux Derviche ou marabout dont la réputation de sainteté était universelle dans le monde musulman.

                 Après les cérémonies d'usage, ce derviche, nommé Sid Hamed Bel Lhassen, s'enferma dans la salle d'étuve, y pris lui-même un bain suivi d'ablutions et céda sa place à la princesse accompagnée de ses femmes. Ces dernières lavèrent le corps de leur maîtresse avec l'eau qui avait servi aux ablutions du derviche. Leur stupéfaction fut grande lorsqu'elles s'aperçurent que les plaies disparaissaient de toutes les parties du corps au fur et à mesure que l'eau y avait passé. "
                 En souvenir d'une guérison si miraculeuse, et, pour honorer la mémoire de celui qui l'avait opérée, le Sultan donna au monument le nom du derviche, nom qui a été également donné à la Grande Mosquée.
                 Ces deux belles pièces d'architecture ont été constituées " hobous ", legs religieux.

V. Barthe.
La Tafna (13-04-1887)

 La mort
Envoyé par M. Christian Graille

                 Un proverbe arabe dit : L'amour dure sept secondes, la fantasia sept minutes et la misère toute la vie. Après avoir aimé, avoir brillé à la chasse ou dans les combats, après avoir gagné sa vie par un labeur un autre, le plus souvent après avoir vécu pauvrement dans un pays où les mesquines (les pauvres) sont plus nombreux que les riches, la destinée conduit l'Arabe, au chant d'un iman et de ses amis (ces mélopées funéraires sont souvent très belles), à la petite tombe où il est basculé d'une civière dans son linceul.
               Du haut de la tour des Oudayas, à Rabat, qui domine le plus émouvant des cimetières musulmans, celui près duquel la mer se lamente à jamais, celui que recouvre, comme d'un tapis de velours vert usé, une herbe folle, toute pâlie de sel, ou à Tlemcen sous les hautes allées de cyprès noirs, j'ai vu des enterrements de pauvres gens.

               Certes dans nos églises, avec nos déchirantes liturgies et la grandeur des prières latines, la mort est enveloppée de grandeur et de respect. Mais que dire de ces convois à travers nos villes trépidantes dont la fièvre supporte mal, avec une indifférence polie mais impatiente, le lent passage !
               Que dire de ces prétendus amis, vêtus de noir, mais qui parlent de leurs affaires en suivant un cercueil !
               Comme je comprends la volonté de Dinet (Peintre orientaliste) de reposer à Bou Saada, loin de cette terre parisienne où ne plane jamais le silence et où les pauvres morts n'ont pas pour être bercés dans leur sommeil les vagues de l'Océan, comme à Rabat ou comme à Tlemcen le chant des oiseaux qui viennent boire sur leur tombe, après avoir chanté la vie dans la lumière d'un matin parfumé d'iris !

               Les tombes arabes sont très simples, même les plus opulentes et se ressemblent toutes, ce qui, philosophiquement, est d'un grand goût.
               C'est un bloc en maçonnerie, d'un carré long, peu élevé au-dessus du sol, portant à ses deux extrémités soit un turban grossièrement sculpté sur un petit fût de colonne, et rappelant assez exactement la forme d'un champignon de couche sur sa tige, soit un morceau d'ardoise triangulaire posé debout comme le style d'un méridien. La dalle de pierre ou de marbre est couverte de quelques inscriptions arabes : nom du mort et préceptes du Coran. Quelquefois cette dalle est taillée en forme d'auge et remplie de terre végétale.

               On y voit alors un peu de gazon et quelques fleurs, soit qu'on les y ait plantées, soit que le vent lui-même en ait apporté les semences. Quelquefois encore on prend soin de creuser aux deux extrémités de la pierre deux petits trous, en forme de coupe ou de godet, où la pluie se dépose et fait un réservoir d'eau.
               D'après une coutume des Maures, on a creusé au milieu de cette pierre un léger enfoncement avec le ciseau. L'eau de la pluie se rassemble au fond de cette coupe funèbre, et sert, dans un climat brûlant, à désaltérer l'oiseau du ciel. Je n'ai pas vu d'oiseau voler vers ces tombes arides, ni boire aux coupes taries.
               Dans les pays musulmans les cimetières deviennent le vendredi le lieu de réunion des femmes. Cette coutume est générale en Afrique du Nord, tout comme à Stamboul ( Istanbul l'ancienne Constantinople) dans les cimetières que Loti a décrits :
               " Il y a un jour par semaine, ce doit être le vendredi, où, sous prétexte de rendre hommage aux morts, les femmes d'Alger se font conduire en foule au cimetière, à peu près comme à Constantinople on se réunit aux Eaux-Douces. C'est tout simplement un rendez-vous de plaisir, une partie de campagne autorisée par les maris pour celles qui sont mariées, et j'ai des raisons de croire que c'est le plus petit nombre.

               D'ailleurs ce rendez-vous se renouvelle à peu près tous les jours, et il est rare que, dans l'après-midi, le champ de Sid-Abd-El-Kader ne soit pas égayé, autant qu'il peut l'être, par les conversations et les rires.
               On fait plus que d'y converser ; on y mange. On s'installe sur les tombes ; on y étend des haïks en guise de nappe ; la pierre tumulaire sert à la fois de siège et de table à manger, et l'on s'y régale, par petits groupes, de pâtisserie et d'œufs au sucre et au safran.

               Les grands voiles, qui sont de trop quand nul indiscret ne se montre dans le voisinage, flottent suspendus aux cactus ; on laisse voir les toilettes de dessous fort brillantes, quelques-unes splendides, car c'est une occasion de :
               - vider ses coffres,
               - de faire faste de ses parures,
               - de se couvrir de bijoux,
               - de s'en mettre au cou, aux bras, aux doigts, aux pieds, au corsage, à la ceinture, à la tête, et
               - se peindre avec des couleurs plus vives les sourcils et le bord des yeux,
               - et de s'inonder des odeurs les plus violentes.

               Qui pourrait dire, mon ami, ce qui se passe alors pendant ces quelques heures d'indépendance entre toutes ces femmes échappées aux sévérités du logis fermé ? Qui sait ce qu'elles racontent :
               - de médisances,
               - d'histoires de quartier,
               - de commérages,
               - d'indiscrétions domestiques,
               - d'intrigues et
               - de petits complots ?

               Plus libres ici qu'elles ne le sont au bain, elles n'ont pour confidents et pour témoins que des gens fort discrets, ceux qui dorment sous leurs pieds.
               J'assiste assez souvent à ce spectacle d'un peu loin, caché dans un observatoire ombreux que j'ai choisi exprès.

               Je vois tout mais n'entends rien qu'un chuchotement général mêlé de notes gutturales ou suraiguës, une sorte de ramage comparable à celui d'une grande troupe d'oiseaux bavards.
               Les rangs s'éclaircissent à mesure que le soir approche.
               Des omnibus qui stationnent à peu de distance du cimetière, comme nos fiacres à la porte des lieux de plaisir, emportent par charretées ces dévotes mondaines vers Alger. Et les morts n'ont de repos que lorsque la nuit est de nouveau descendue sur eux." (Eugène Fromentin 1820-1876. Une année dans le Sahel. Paris. Edition Plon. 1925 )

Cahiers du Centenaire de l'Algérie.
La vie et les mœurs en Algérie par M. Pierre Deloncle.
Ancien élève diplômé de l'école des Chartes.
Membre du Comité National du Centenaire.


Jean Brune, homme de Cœur et de passion
Envoyé par M. Christian Graille


                 Les écrivains Pieds Noirs, grâce à la qualité de leur plume et de la connaissance du milieu dans lequel ils évoluaient, ont su, mieux que d'autres, mettre en exergue :
                  - les peurs, les angoisses, blessures, - les déchirures, les douleurs de leur communauté et les cruautés que l'Histoire lui a infligées.
                  Ils ont méticuleusement :
                  - étudié, analysé, du mensonge, du mépris et de la calomnie dont elle fut injustement victime.

                  Parmi eux, Jean Brune, né à Aïn-Bessem, dans le Constantinois le 12 mars 1912, fut, sa vie durant, un amoureux éperdu de cette Algérie qui l'avait vu naître. La passion qui l'anima, sa grande connaissance des mondes arabo-musulmans et sa proximité avec les Berbères ont fait de lui l'un des écrivains majeurs de ce pays.
                  Au lycée Bugeaud d'Alger où il fit ses études secondaires il côtoya Albert Camus.
                  Avec l'armée d'Afrique, il participa à la libération de la France durant la seconde guerre mondiale dans une unité de chars.

                  Grand journaliste à " la Dépêche quotidienne d'Alger ", Jean Brune partit en 1955 en reportage dans les Aurès. Il décrivit, dans " La bataille de la peur " ces obsessions, ces anxiétés et ces angoisses qui saisissaient les esprits et troublaient les âmes. Dans un climat de peur la mort rôdait et attendait sournoisement, patiemment mais inexorablement le moment de frapper.
                  Il analysa, avec rigueur et finesse, la dramatique situation de ces femmes et de ces hommes qui avaient, pour beaucoup, oublié de vivre ensemble, innocentes victimes d'une guerre atroce. Le désir de paix, de quiétude, de sérénité, s'était brusquement envolé abandonnant les populations otages de cette guerre qui refusait de dire son nom.

                  En juin 1954 il écrivait déjà, dans ce même journal :
                  " Si le rideau tombait demain sur le théâtre de la guerre d'Indochine, il faudrait craindre qu'il ne se relevât très vite sur celui infiniment plus grave pour la France de la guerre nord-africaine ! … ".
                  " Quand on le sait, on s'aperçoit que ce qui est le plus urgent c'est d'abord de tenter d'arracher les masses encore neutres à ce complexe de la peur pour arrêter le recrutement du maquis, fixer les effectifs et préparer l'avenir ".

                  (Algérie 1955. La bataille de la peur)
                  Sombre présage mais juste prémonition.

                  Il est vrai qu'il existait des différences fondamentales entre les peuples d'Algérie, la meilleure preuve en est la conception des rapports entre l'État et la religion : pour les Européens modernes, ce sont des domaines séparés mais pour les Musulmans ils sont liés car le chef politique est avant tout le chef religieux de la communauté, la religion musulmane fondée sur le Coran dirigeant tous les domaines de la vie, sans exception.

                  Pour illustrer les différences existant entre les communautés il est intéressant de citer le rapport fait à son maître, le Sultan de Constantinople, par un ambassadeur turc invité à la cour de Louis XIV et que Jean Brune nous rapporte :
                  " Les Français diffèrent des Musulmans dans tous les détails de leur vie :
                  - Ils se rasent le visage et gardent leurs cheveux.
                  - Les Musulmans rasent leur tête et gardent leur barbe.
                  - Quand les Français rentrent dans un lieu saint ils conservent leurs chaussures et enlèvent leur chapeau.
                  - Les Musulmans gardent leurs coiffures mais ils se déchaussent.
                  - les Français mettent les tapis sur les murs (il faisait allusion aux tapisseries).
                  - les Musulmans les disposent par terre.
                  - Les Français écrivent de gauche à droite.
                  - Les Musulmans de droite à gauche.
                  En somme concluait ce spirituel ambassadeur, prenez un musulman, mettez-le à l'endroit, vous obtiendrez un Français ! … ."

                  (Algérie 1955, La bataille de la peur).

                  Jean Brune analysa de façon claire, précise et concise tous les maux qui étouffaient la contrée :
                  " Ce n'est pas pour la France une source de revenus, elle est une lourde charge.
                  Ce n'est pas une corne d'abondance, c'est un tonneau des Danaïdes. La tragédie est que l'Algérie est un pays pauvre ; les surfaces cultivables en Métropole atteignent 88% de la surface totale du pays, elles ne dépassent pas 10% ici. En d'autres termes l'Algérie habitable est grande comme 35 départements mais elle ne dispose que d'une surface cultivable à peine égale à 10 départements ".

                  Implacable démonstration et remarquable réalisme.

                  Dans le domaine de l'éducation scolaire, l'analyse et la critique ne peuvent que difficilement prêter à contestation :
                  " Nous avons souvent confié l'éducation de ceux dont nous voulons nous faire aimer à ceux qui nous détestent. La France s'obstine à confondre les résultats pour les causes et refuse d'admettre les résultats des idées qu'elle répand, ne voulant pas endosser les conséquences des doctrines qu'elle diffuse ".
                  Pour Jean Brune nous avons voulu former des élites musulmanes que nous avons isolées ; sur ce terreau d'incompréhension naquit une frustration qui, irrémédiablement, conduisit à l'hostilité d'un certain nombre.
                  En outre le pays est resté figé dans un cadre administratif et politique totalement sclérosé et désuet. Ce jugement peut paraître brutal mais il s'est révélé d'une grande justesse.

                  Jean Brune évoque aussi le reproche fait à la France par l'un de ses amis Kabyles, professeur de lettres dans une université métropolitaine, qui lui dit un jour :
                  " J'ai été poussé à l'école par vous, formé par vous, admis dans la grande famille des intellectuels. N'ai-je pas le droit de vouloir prendre ma part des affaires de ce que je considère comme notre pays ?
                  Si je me présente aux élections, l'Administration m'opposera un candidat qui a moins de bagage intellectuel.
                  Puis-je admettre d'être représenté par un homme moins évolué et qui n'a pas consenti, à l'éducation que vous dispensez, les mêmes sacrifices que moi ? "

                  Il manquait incontestablement quelque chose pour que cette Algérie puisse devenir plus fraternelle et plus juste.

                  Nous en avons un exemple lorsqu'un homme politique métropolitain demanda un jour à l'écrivain comment il ferait s'il avait à définir ce dont souffraient les Musulmans ; celui-ci répondit sans ambages de la façon la plus nette :
                  " Ils souffrent d'abord et avant tout d'un ardent besoin de considération et je ne sais pas si ce n'est pas là , en définitive le centre du problème ".
                  Et à la question de savoir ce que pensaient les Musulmans de l'œuvre consentie par la France à leur bénéfice :
                  " Ils ne la nient pas mais ils disent que cette œuvre a été faite pour eux et non avec eux. Le drame c'est qu'un Musulman trompé par un Français rejette sur la communauté la faute d'un individu ; il devient anti-Français ".
                  (Algérie 1955, la bataille de la peur.)

                  Dans un ouvrage moins grave et plus souriant, " Bab-el-Oued raconté à Toinet " en 1955, l'auteur brosse avec un évident plaisir un tableau d'une grande fraîcheur empreint d'affection, spectacle de vie des habitants de ce faubourg besogneux et populaire n'ayant nulle part ailleurs son égal, ce quartier où l'on assiste tous les jours au fascinant triomphe de la jeunesse et de la vie.
                  Ici Espagnols, Français, Italiens, Maltais vivaient chaque jour ces multitudes de petits bonheurs simples et sains qui faisaient tout le charme de leur quotidien.
                  Que de souvenirs émouvants que ce rappel de la place Dutertre où trônait le marché du quartier, et de la place Lelièvre, cour de récréation du faubourg !

                  Quel plaisir de découvrir ou de redécouvrir ces savoureux croquis saisis sur le vif par Jean Brune de tous ces petits commerçants et artisans participant avec une complicité certaine au brouhaha incessant mais si agréable à entendre !
                  Les cafés étaient les lieux de rencontre où régnait l'animation la plus intense ; à midi et à sept heures, le soir, ils accueillaient les habitués de longue date pour qui le moment consacré à l'apéritif ressemblait à un rite quasi religieux ; d'ailleurs les cabaretiers ne s'y trompaient guère en les voyant arriver ; ils se réjouissaient, par avance, de l'excellent fonctionnement programmé de leurs tiroirs caisses et remplissaient sans attendre les verres rapidement vidés par des clients trop impatients.

                  L'anisette, potion magique incolore, devenait subitement blanche grâce à l'adjonction de quelques gouttes d'eau savamment dosées. Pour accompagner ce breuvage les cabaretiers rivalisaient d'ingéniosité pour non seulement rejoindre la caste des meilleurs mais aussi pour attirer chez eux le maximum de clients. Une multitude de soucoupes fort odorantes s'étalait tout au long du comptoir ; on y trouvait :
                  - olives vertes et noires pimentées,
                  - cacahuètes,
                  - lupins,
                  - petites seiches et calamars à la sauce tomate relevée,
                  - escargots,
                  - petites fritures de poissons,
                  - fèves,
                  - moules,
                  - sardines grillées,
                  - brochettes, merguez et bien d'autres choses encore.

                  Pour Jean Brune cette kémia faisait partie des choses que le patron donnait au client avec affabilité ; c'était le bonjour silencieux du comptoir.
                  L'auteur n'omet pas de citer et de croquer tous ces personnages qui participaient à la bruyante mais chaleureuse animation de ce si sympathique et agréable quartier :
                  - Les Pocceschi, Solivérès, Ripoll, Paquito, Papalardo dit Popaul, Mercatello, Denis, Devardo, Vicente, Antoine, Ambrosino, les cafetiers,
                  - Monsieur Edgard, le d'Artagnan de la brochette,
                  - Alexandre, roi de la loubia,
                  - Giuseppi, prince des charcutiers,
                  - Embarek, roi des marchands de coquillages,
                  - Mario, roi des beignets italiens,
                  - Marcellin, technicien de la chaussure,
                  - Hadj, doyen des marchands de journaux et bien d'autres figures encore.

                  Ce n'est pas une ville espagnole, ni italienne, ni française … c'est une ville nouvelle … une ville comme il n'en existe nulle part ailleurs. C'est une ville synthèse. C'étaient :
                  - des Napolitains orgueilleux,
                  - des Maltais subtils,
                  - des Corses fiers comme des condottieres,
                  - des Andalous nonchalants,
                  - des Calabrais têtus,
                  - des Catalans tragiques … et
                  - des Français plus susceptibles que toutes les races du monde, "puisqu'ils sont capables de rire même des miracles qu'ils accomplissent ".

                  Pour Jean Brune, Bab-el-Oued fut un excellent lieu d'étude et d'observation. Il put, à loisir, se fondre dans ce petit peuple simple et bien sympathique qu'il comprenait si bien, aimait et respectait.
                  - La rigueur de la réflexion,
                  - la plume sans concession,
                  - l'écriture fine et ciselée,
                  - le style concis et incisif sont le gage d'une grande honnêteté morale et intellectuelle aux accents de sincérité qui, parfois, interpellent le lecteur et le dérangent dans sa quête de vérité sur le pays.

                  Aucune référence n'est faite à des lieux communs, à des idées reçues ou préconçues. Tout incite à la réflexion et à l'interrogation sur la façon dont la France gérait le pays et les méthodes qu'elle appliquait ; car, contrairement à ce que certains ont voulu ériger en unique vérité, ce ne sont pas les Pieds Noirs qui dictaient la politique à mener mais bien la classe politique métropolitaine qui l'élaborait et tentait de la faire appliquer trop souvent dans un immobilisme stupéfiant et une surdité obstinée.
                  Dans son amour intense :
                  - de la France,
                  - de son histoire,
                  - de sa littérature,
                  Furent nombreuses et aussi fortes que les espoirs suscités, pour :
                  - l'écrivain,
                  - le journaliste,
                  - le dessinateur et
                  - le caricaturiste,

                  L'indélébile cicatrice fut si profonde que son divorce avec la mère patrie s'effectua dans une déchirante douleur et un non moins grand désespoir.
                  " On a bâti une théorie du monde où nous n'avons pas de place.
                  Rien n'est jamais acquis. Tout est bataille. On nous le fait bien voir. Nous sommes gênants, on nous efface.
                  On nous verse dans le néant avec nos morts, nos espérances et nos souvenirs ".

                  S'estimant trahi par la France, commença pour lui une douloureuse errance dans un certain nombre de pays d'Europe ; il tenta désespérément de s'installer en Métropole mais le fardeau était trop lourd ; il décida alors de gagner la Nouvelle-Calédonie où il mit ses talents de journaliste au service de ses habitants et de la presse locale.
                  Il s'éteignit à Nouméa le 23 septembre 1973.

                  Son œuvre est : - riche - vivante - passionnante - poignante parfois - sincère - lucide mais ô combien dérangeante.
                  Il poursuivait ce rêve de voir un jour son pays, sa terre natale, se transformer politiquement, économiquement et socialement.
                  Excellent narrateur il put transmettre à ses lecteurs avec fougue, pédagogie et intelligence les sentiments qui l'animaient. Son courage dans les durs combats qu'il mena, son altruisme, son honnêteté morale et intellectuelle lui ont permis d'être un homme non seulement respecté mais également profondément respectable.
                  Toute son œuvre est à redécouvrir.
                  Puisse notre modeste article éveiller, ou réveiller, le désir de la lire et d'en enrichir la compréhension de notre histoire.

                  " J'emporte comme un trésor le souvenir d'une grande aventure de brousse et de vent vécue en Afrique aux côtés d'hommes qui vivaient et mouraient debout.
                  Je m'estimerais comblé si j'étais parvenu à parler de l'Afrique aux Africains en terme d'amour et si j'avais exprimé, avec un peu de leurs rêves secrets, un reflet des envoûtements que prodiguaient pour nous les terres merveilleuses dont nous avons été chassés ".


Bibliographie
- Algérie, la bataille de la peur
- Alger- Bâb-el-Oued
- Bâb-el-Oued raconté à Toinet
- Aventures prodigieuses de Georges Untel en Algérie algérienne
- Lettre à un maudit
- Journal d'exil
- Cette haine qui ressemble à l'amour
- Interdit aux chiens et aux Français
- Les mutins - La guerre de Troie commence demain

Christian Graille

La bonne conscience.
Envoyé par M. Christian Graille


                  Le 21 octobre 1955 dans un article paru dans l'Express et intitulé " La bonne conscience " Albert Camus donnait ainsi son point de vue sur les Français d'Algérie dont la plupart n'étaient pas des colons.

                  " Entre la métropole et les Français d'Algérie le fossé n'a jamais été aussi grand. Pour parler d'abord de la Métropole tout se passe comme si le juste procès fait enfin chez nous à la politique de colonisation avait été étendu à tous les Français qui vivent là-bas ; à lire une certaine presse il semblerait vraiment que l'Algérie soit peuplée d'un million de colons à cravache et cigare, montés sur Cadillac.

                  80% des français d'Algérie ne sont pas des colons mais des salariés ou des commerçants. Le niveau de vie des salariés bien que supérieur à celui des Arabes est inférieur à celui de la Métropole.

                  Deux exemples le montreront : le S.M.I.G (salaire minimum interprofessionnel garanti.) est fixé à un taux nettement plus bas que celui des zones les plus défavorisées de Métropole ; de plus en matière d'avantages sociaux un père de famille de trois enfants perçoit à peu près 7.200 francs contre 19.000 en France.
                  Voilà les profiteurs de la colonisation.

                  Les gouvernements successifs de la Métropole appuyés sur la confortable indifférence de la presse et de l'opinion publique secondée par la complaisance des législateurs sont les premiers vrais responsables du désastre actuel. Ils sont plus coupables en tout cas que ces centaines de milliers de travailleurs français qui ne survivent en Algérie qu'avec des salaires de misère, qui, trois fois en 30 ans, ont pris les armes pour venir au secours de la Métropole et qui se voient récompensés aujourd'hui par le mépris des secourus. Ils sont plus coupables que ces populations juives coincées depuis des années entre l'antisémitisme français et la méfiance arabe et réduites aujourd'hui par l'indifférence de notre opinion à demander refuge à un autre État que le français.

                  Reconnaissons donc une bonne fois que la faute est ici collective ; une grande, une éclatante réparation doit être faite, selon moi, au peuple arabe, mais par la France toute entière et non avec le sang des Français d'Algérie.

                  Qu'on le dise hautement et ceux-ci ne refuseront pas de collaborer par-dessus leurs préjugés à la construction d'une Algérie nouvelle. "

Albert Camus
L'Express 21 octobre 1955


Robert Randau : l'homme, l'écrivain
Envoyé par M. Christian Graille

                 J'avais toujours eu le dessein, depuis le jour où je lus pour la première fois du Robert Randau, de lui rendre ici même un hommage public.

                 Non pas tant en mon nom propre mais en celui de tous les étudiants algériens, car je pense que cela est dû au maître écrivain, à l'homme d'action, au colonial probe et sincère qu'est Robert Randau, et je suis doublement d'avis que cet hommage lui est dû par tous ceux qui en Algérie font en même temps preuve de pensée et d'action, par tous les intellectuels au nombre duquel se trouvent les étudiants. Un numéro spécial, pour de multiples raisons, mais tout d'abord parce que je pensais que seul un Numéro Spécial nous permettrait de montrer à Robert Randau combien nous sommes sensibles au grand encouragement qu'il a bien voulu nous donner, et combien nous savons apprécier cet encouragement.

                  Malheureusement l'Afrique est lointaine et Robert Randau en parfait amant de la brousse ne s'échappe que rarement aux solitudes qu'il a choisies, j'avais donc été obligé de remettre à plus tard " le Numéro Robert Randan " auquel je pensais depuis longtemps.

                 J'avais, le plus qu'il m'avait été possible, lié amitié avec la pensée du maître, espérant un jour qu'il me serait permis de connaître l'homme et c'est cela qui devait se produire après trois ans écoulés.

                 L'homme complète l'œuvre. Cela est à l'origine des portraits d'écrivains, on comprend autrement l'œuvre quand on a vu penser l'auteur. Ceci explique l'engouement connu par toute cette ploïdie littéraire, et tout spécialement René Benjamin dans sa " Vie prodigieuse d'Honoré de Balzac ", qui emploient tout leur génie à faire revivre pour nous, comme ils ont vécu, les auteurs du temps passé. Le lecteur est curieux des mots, des réparties, des anecdotes de tout ce qui compose le parler quotidien de l'auteur dont il lit les ouvrages.

                 Je ne sais plus quel penseur " pour album de jeunes filles " a prétendu que l'auteur perdait de son génie quand on le rapprochait de l'être humain ; c'est là faire des courbettes bien déplacées devant la part de légende et de fiction et déclarer tout bonnement que le génie subsiste seulement dans l'artificiel.

                 La pensée de Randau est toute différente, il ne dit que ce qu'il a vu ou ce qu'il a pensé. C'est écarter toutes les sornettes imaginatives, les équilibres plus ou moins instables entre la femme, le mari, le ou les amants ou amantes. Mais quel merveilleux se dégage du même coup de cette formule. Certes il est impossible maintenant à Randau d'écrire des séries d'ouvrages sur l'adultère, sur les premiers écarts et les derniers amours d'une courtisane. Le microscope à discerner les sentiments erronés, les stupidités béates et les imaginations désordonnées, restera tranquillement dans son étui.
                 Il faut, pour y coller son œil, être à moitié aveugle, poussif, impuissant de toutes les articulations et découvrir l'existence des autres du fond de son sépulcre.

                 Randau, qui est à la fois un penseur et un actif ; Randau, l'explorateur de la brousse africaine a retrempé son âme dans trop de primitive beauté, plus justement dans trop de primitive vérité, pour que les spéculations à courte vue et les envols lourdauds des romanciers Européens ne m'ébahissent.

                 Je conseille, à qui est curieux du monde des Lettres actuel, de lire ce délicieux pamphlet " La vocation de Reine d'Hermine ". Le voyage n'est plus en zigzag, le coin pénètre droit dans l'arbre poussé par trois marteaux vigoureux et fait sauter au passage bien des éclats de snobisme, d'affection, de bluff et tant d'autres.

                 Malgré cela, sans méchanceté, car toute prétention découverte par Randau, après l'avoir fait gronder un moment et montrer les dents, finit en éclats de rire curieux.
                 J'essayerai, tout à l'heure, dans un article intitulé " Une heure de haut goût " de faire vivre l'homme.

P. M
Alger-Etudiants (29-05-1926)


Ah, les enfants !
Envoyé par Eliane
Deux voisins parlent de leurs enfants.

          - J'ai 5 grands enfants : l'aîné est ingénieur chimiste, la 2ème a eu son doctorat en neurosciences,
          la 3ème est chercheur en agro-alimentaire, le 4ème est docteur en philosophie, et le petit dernier est voleur..
          - Mais pourquoi ne le chasses-tu pas ?

           - Jamais de la vie ! C'est le seul à faire rentrer des ronds chez moi.*
          Tous les autres sont au chômage !



Une heure de haut goût
chez Robert Randau
Envoyé par M. Christian Graille

                 Nous y sommes allés, mon ami Hergé et moi, à l'heure où les dactylographes remettent le couvercle sur leur machine à écrire. Il était près de onze heures.

                 Face à la mer, en pleine ville, dans le quartier de l'Agha, une petite maison blanche que l'on est en train d'éclabousser de chaux. C'est bien là. Nous entrons. Quelques marches montées.
                 Nous venons voir Robert Randau. Robert Randau nous attend et nous mène dans son cabinet de travail. Il est en train de ranger ses bouquins. Le milieu aussitôt étonne. Surprend.

                 L'atmosphère est surchargée de pensée humaine, les livres, ces cristallisations d'idées règnent en maîtres dans la petite salle. De chaque côté jusqu'au plafond, comblant les étagères, remplissant des armoires, des secrétaires, les bouquins font, dans cette chambre, la même impression grave qu'ils font dans les vastes bibliothèques. Un classeur déborde de feuillets de toutes sortes, Randau s'en excuse et nous dit : " ce sont mes manuscrits ".
                 Le bureau de Randau n'est pas comme celui de bien des célébrités du monde littéraire, fait pour causer une impression ; aucun souci de tape-à-l'œil, ni de mensonge.

                 On devine bien là l'homme tel qu'il apparaît dans ses livres, faisant peu de concessions à ses contemporains, adorant les livres et de toutes les sortes depuis les mémoires d'un grand missionnaires au Maroc, jusqu'au livre paillard et gaulois de nos vieux auteurs. L'homme a fait ce cadre, parce qu'il lui convenait pleinement, ce logis est empli d'une seule présence : la sienne.
                 On devine avec quel soin jaloux, tout cela doit retomber dans le silence attendant le grand animateur quand il s'en va retrouver " l'ombre de son baobab ". Maintenant en raccourci voici la vue d'ensemble : un bureau simple, face à la mer immense, qui succède à l'étalement et à la vie des quais, c'est là que Robert Randau travaille, face à la vie grouillante des quais et face à la mer.

                 Ces deux caractères se mêlent étroitement dans l'œuvre de Rober Randau, l'action, rude, ciselée, mais puissante et magistrale, et la pensée calme, l'intelligence aiguë, de toutes choses. Je ne pourrais mieux me faire comprendre qu'avec l'aide d'une fable.
                 Votre grand ami, votre maître, marche auprès de vous une frêle badine à la main. Tandis qu'il marche, il retourne l'une après l'autre du bout de sa badine, sans efforts apparents, toutes les dalles du chemin.
                 Amour, gloire, orgueil retournés, décèlent la boue du mensonge.

                 Randau a su magistralement pallier à ce côté destructif de son œuvre. Ce qu'il a cherché à nous montrer c'est qu'il était nécessaire d'avoir beaucoup de franchise avec soi-même, qu'il n'était pas utile d'échafauder trop de constructions morales ou autres qui cadrent mal avec la réalité.

                 Comme la morale convient bien à une existence banale et vide ! Ce qui surpasse toute chose, ce qui domine tout, c'est la vie, omnipotente souveraine. La fiction est toujours une lacune. L'action suffit toujours amplement à ce qu'on attendait d'elle.
                 Nous serions en droit, en effet, de reprocher à Randau trop de clairvoyance, si son ironie portait sur tout et s'il ne substituait rien aux mensonges qui, jusqu'à ce moment, nous faisaient vivre.
                 La réponse est immédiate, sitôt qu'il a mis à bas le vieil édifice il vous montre la maison nouvelle : l'action et la vie en force, je dirai même avec lui, en vérité.

                 " La vie coloniale est tout à fait différente de celle que l'on vous représente ". Tels gens, stériles en France, ont là-bas multitude d'enfants, et bien des grands noms, usés par une richesse précoce, retrouvent de la vigueur et du besoin de vivre, sitôt qu'ils ont franchi la barre.
                 A ce sujet Randau nous conte une anecdote.
                 Un Gouverneur général, en tournée d'inspection, arrive un jour chez un riche industriel.
                 Il félicite notre homme sur la richesse de ses plantations, sur l'essor qu'il a su donner à l'industrie.
                 L'homme remercie.
                 Le Gouverneur poursuit :
                 - Je tiens aussi à vos présenter mes compliments.
                 On m'a dit que vous aviez fondé une famille ; c'est là donner le bon exemple.
                 Le planteur précise.
                 - Vous êtes bien bon, Monsieur le Gouverneur, je viens d'avoir hier un fils.
                 Le Gouverneur général déplore de ne pouvoir être présenté à la dame, probablement encore alitée.
                 Mais l'industriel, à la grande stupéfaction de son hôte précise :
                 - D'ailleurs, j'attends dans deux mois un autre enfant.
                 - Comment vous dîtes que vous en avez eu un hier ?
                 - Ah ! J'oubliais de vous le dire, ce n'est pas avec la même épouse.
                 Le Gouverneur, monogame normal, est stupéfait.
                 - Vous avez donc deux femmes ? Une seule ne vous suffit pas ?
                 - Pensez-vous ? Monsieur le Gouverneur général !
                 Tout compte fait, il en avait trente, tout le village entier logeait ses épouses.
                 Son cœur innombrable et son négoce y trouvaient ensemble leur profit.
                 Ainsi l'heure passe, à l'aide de mots exacts, descriptifs, Randau éveille devant nous un véritable monde.

                 Comme le cabinet de travail a disparu !…. Les murs sont reculés à l'infini….
                 C'est, de tous côtés, la brousse tropicale dont il nous parle excellemment.
                 De tout cela, je voudrai tirer une règle de conduite littéraire.
                 Je la lui demande.
                 Avec un sourire, il me répond :
                 - Ne parlez que de ce que vous savez.
                 Toute sa vie Robert Randau est resté fidèle à ce grand principe. Combien de bévues et de fausses vérités auraient été évitées si chacun avait été fortement imprégné de ce principe, surtout en littérature…

                 Je pense. " Tout ce que vous avez dit, maître, dans " L'homme qui rit jaune " est donc vrai ? ".
                 J'ai pensé tout haut, Randau me répond :
                 - Tout est vrai. C'est une histoire qui est arrivée avec toutes ces péripéties, toutes ces circonstances sont exactes. Je n'ai rien inventé.
                 Alors nous parlons de " L'homme qui rit jaune ". Je lui dis combien j'ai été intéressé, passionné même par les évènements qui se sont déroulés dans le palais sur la colline. Je lui répète un mot que j'ai entendu d'un de mes amis au sujet de cette œuvre :
                 - Voilà un des rares livres vrais que j'ai pu lire, et, si je ne m'illusionne pas, le premier, absolument vrai.

                 Je précise. Combien les scrupules sont vaine intervention de l'âme endormie. Combien tout cela est faux, quand on examine bien, l'essentiel de notre pensée est l'immoralité. Au choc des circonstances, quelle minuscule résistance oppose notre moralité.
                 Je voudrais que la lecture de ce livre soit faite par tous les lecteurs d'Alger étudiants.
                 J'estime que l'on déflore un ouvrage en le racontant, et que la critique d'un livre est une œuvre néfaste, besogne nuisible à l'auteur et au critique qui aurait mille choses à faire de préférence.

                 Lisez ce livre. Le sarcasme et la violence, la vérité et malgré tout la grande beauté de la vie, se mêlent à dosages exacts.
                 Vous finirez par trouver normal un crime. Vous comprendrez que dans ces mêmes circonstances vous n'auriez pas agi autrement et c'est là, le plus grand triomphe du romancier. Surtout lorsque, comme Robert Randau, l'auteur n'a fait que raconter la vie romanesque et rarement vraisemblable.

P. Malaterre
Alger Étudiants (29-05-1926)


Georges Hilbert (1900-1982)
Sculpteur animalier
méconnu ou oublié ?
Envoyé par M. Christian Graille

                  Né le 20 mars 1900 à Nemours, en Algérie, Hilbert a été, dès son enfance, en contact avec les animaux qu'il apprit à connaître et à aimer; c'est grâce à son père ancien élève de l'école de Maison Alfort et médecin-vétérinaire en chef du département d'Oran qu'il leur manifesta un grand intérêt.
                  Le dessin étant l'une de ses passions il entra à l'École des Beaux-Arts d'Oran tout continuant ses études secondaires avant de rejoindre Paris en 1918.
                  Il y poursuivit son apprentissage à l'École des Arts Décoratifs puis aux beaux-Arts ; mais c'est surtout au jardin des plantes près des animaux qu'il continua à parfaire ses connaissances en les copiant puis en ornant les bas- reliefs de la ménagerie.
                  Il s'attira l'attention et la sympathie de quelques-uns uns de ses aînés :
                  - Pompon ( sculpteur) le conseilla,
                  - Matéo Hernandez (sculpteur animalier) lui fit connaître les pierres dures et
                  - c'est avec Joseph Bernard (sculpteur, dessinateur, graveur) qu'il découvrit les secrets de cette technique.
                  Il rencontra Emmanuel de Thubert (poète et critique d'Art, fondateur de la revue " la douce France ") à l'époque de la création du " mouvement de taille directe " et entra dans le groupe de la Revue Française.

                  Il participa à l'élaboration d'une œuvre originale tout à fait remarquable, la Pergola de la douce France (Nous remercions chaleureusement Madame Cécile Rivière du musée de la ville d'Etampes dont le concours nous a été fort précieux.), réalisée à l'occasion de la grande exposition des Arts Décoratifs et industriels modernes organisée en 1925 à Paris où elle remporta le prix international d'architecture : c'est un ensemble de sculptures conçues par des artistes qui souhaitaient remettre au goût du jour la technique consistant à travailler la pierre ou le bois sans préalablement créer de maquette modelée en plâtre ou en terre ; composée de quatre blocs de quatre tonnes dont chacun est un assemblage de quatre bas-reliefs elle a été déplacée en 1935 dans le jardin public de la tour de Guinette à Étampes ; on y trouve notamment des sculptures de :
                  - Zadkine, (dragon),
                  - Pompon (sanglier),
                  - Nicot (cerf),
                  - Saupique (taureau) et d'autres encore.
                  - Quant à Hilbert il sculpta un cheval sauvage.

                  L'ensemble a été classé au titre des monuments historiques en 1998.
                  L'artiste poursuivit sa collaboration avec le groupe de la douce France en 1926,1927 et 1930.

                  Ses œuvres seront présentes dans de nombreux lieux en France mais également à l'étranger.
                  L'obtention du prestigieux prix de la Fondation Blumenthal qui lui fut attribué en 1928 lui ouvrit les portes des musées et collections des États Unis où ses sculptures figurent en bonne place :
                  - tout d'abord à la Arden Gallery
                  - puis au Métropolitan Museum,
                  - à celui d'histoire naturelle,
                  - au Museum de Denver,
                  - à la bibliothèque de Los Angeles.

                  Une série d'expositions le firent connaître à :
                  - Toledo,
                  - Milwaukée,
                  - Madison,
                  - Dayton,
                  - Indianapolis,
                  - Kansas-City,
                  - Saint Louis,
                  - Denver et
                  - Baltimore.

                  En 1930, grâce à la bourse Blumenthal il réalisa enfin l'un de ses vœux les plus chers : un séjour en Egypte qu'il visita et où il y travailla tout en retrouvant la grande tradition de l'art animalier.
                  En 1973 il obtint le grand prix de sculpture au salon des artistes français et la même année il fut élu à l'Académie des Beaux-Arts à la suite du décès de Claude Grange. Dans son discours d'accueil Georges Cheyssial, Président, évoqua notamment " la qualité d'un art fait de sensibilité et d'intelligence, un art dont la démarche droite, sincère, faite de patience et d'amour, permet l'approche de la nature à travers de ce qu'elle a de plus secret en son expression.

                  J'ai vu chez vous les œuvres sculptées au jardin des plantes. Lions et lionnes, ours, tigresse, taurillon, biche, léopard et la belle antilope sont traduits en cette palette sable doré. La forme est ample, établie en grands plans que la lumière anime et module, les profils passent, précis, sensibles, le détail adapté à l'ensemble, tout est simple, clair, harmonieux " et il conclut ainsi l'évocation de la vie de l'artiste :
                  " Il est certaines de vos actions dont vous n'aimez pas parler. La générosité du cœur ne s'exprime pas en paroles mais en actes et je sais que vous n'avez jamais cessé de manifester la vôtre en quelque occasion que ce soit.

                  En 1932 pensant acquitter une dette de reconnaissance envers Georges Blumenthal, vous vous consacrez à votre tour au soutier des jeunes artistes dont le jeune talent vous semble insuffisamment reconnu. Vous êtes de ceux qui rendent avec intérêt, permettez-moi de le souligner. Vous m'avez dit, Monsieur, que vous aviez eu de la chance mais aujourd'hui en vous accueillant parmi nous, c'est nous qui en avons ".


                  Parmi les principales expositions auxquelles il a participé il faut noter :
                  - le salon des Tuileries à partir de 1925,
                  - Liège en 1926 où le musée acquiert l'une de ses réalisations (la buse),
                  - le salon animalier de 1930 à 1958,
                  - celui des Artistes algériens organisées par Jean Alazard ancien Directeur du musée d'Alger de 1930 à 1953,
                  - l'exposition coloniale en 1931 (deux singes en granit),
                  - celles du Petit Palais en 1934 (achat du cerf par la ville de Paris),
                  - l'internationale de Paris en 1937,
                  - de New York et Chicago en 1938,
                  - la biennale de Venise en 1939.

                  L'artiste travailla principalement le bronze, le grès, le marbre blanc, la pierre mais également le plâtre et le bois.
                  Ses ouvres sont nombreuses et variés et parmi elles il convient de citer:
                  - Le fennec (bronze),
                  - le Kangourou (plâtre),
                  - la lionne debout (grès),
                  - la panthère assise (granit),
                  - le taurillon (grès),
                  - le chat (granit),
                  - la panthère (granit),
                  - la panthère mâle (granit noir),
                  - les ours ( grès et granit),
                  - la tigresse couchée avec son petit (bronze),
                  - la tête de bouledogue français (grès),
                  - le poney (marbre blanc, bronze),
                  - la guenon (granit d'Égypte),
                  - l'aigle royal (grès),
                  - le chacal courant (bois),
                  - la tête d'antilope (pierre),
                  - le cobaye (grès),
                  - la loutre de rivière (marbre, bronze),
                  - la panthère assise, bronze),
                  - la lionne et son lionceau (granit),
                  - le chien assis (pierre),
                  - le perroquet (pierre),
                  - la lionne couchée (pierre),
                  - la biche et son faon (pierre),
                  - le poulain (pierre),
                  - le taurillon (pierre),
                  - l'ours couché (pierre, bronze),
                  - la panthère se roulant (pierre),
                  - la lionne assise et son lionceau (pierre),
                  - la buse (calcaire),
                  - la petite lionne couchée (pierre),
                  - le léopard couché (pierre),
                  - le cheval sauvage (pierre).

                  Certaines de ses sculptures ont été acquises par plusieurs musées dont ceux du Petit Palais à Paris, des musées d'Art Modernes de Paris, des colonies de Vincennes, de Mulhouse, d'Autun, de Versailles, d'Oran, d'Alger, de Constantine, de Liège, de Luxembourg, de Prague, du Métropolitan Museum et Museum d'histoire Naturelle de New-York, musée de Denver, Bibliothèque de Los Angelès.
                  Voici brossée, certes ? trop rapidement, la très riche vie artistique de Georges Hilbert, homme discret, généreux, dévoué, estimé, reconnu et attachant.

Christian Graille

Contribution à une étude de l'origine
des sobriquets ethniques
Envoyé par M. Christian Graille

                 Les groupements ethniques nord-africains que nous désignons actuellement sous le nom collectif de Berbères (sobriquet dont l'étude particulière mérite, à elle seule, tout un chapitre) reçoivent communément, en Algérie, et notamment pour les Berbères des départements d'Alger et de Constantine, le nom de Kabyles.
                  C'est bizarrement orthographié, on a écrit aussi Kabaïles, Cabiles, la transcription de l'arabe qbaïl pluriel de Qbila, qui signifie tribu constituée, odjak, ou mekhzen. Un Kabyle se dit, en arabe courant :qbaïli….
                  Familièrement, avec une pointe d'ironie et même de mépris, on désigne un Kabyle sous le nom de aqchiche ou laqchiche. Ce mot en langue berbère veut dire : Garçon, jeune homme
                  Cette appellation est l'équivalent du sobriquet bien connu, même des touristes Yaouled (enfant) qui baptise le jeune indigène, portefaix ou cireur ; unité du curieux petit peuple gavroche des Oulad-Plaça (les enfants de la Place Publique)…

                  Les Berbères du Mzab, Mzabites ou Mozabites, honnis du reste des Musulmans pour être sortis de l'orthodoxie, ont reçu quelques noms curieux. Le Mozabite est appelé khamssi (de la cinquième secte, de la secte hérétique) par les Musulmans détenteurs de la vraie doctrine de Mahomet. Pour tout le monde c'est aussi le Moutchou, de l'espagnol mozo, valet, garçon de bain maure, cette profession très spéciale étant autrefois exclusivement exercée par les Mozabites.
                  Le moutchou qui a une prédilection pour le métier d'épicier est baptisé par les mauvais garnements, batta. Batta veut dire : non en dialecte mozabite. C'est la réponse énergique que fait le Moutchou aux gamins qui le harcèlent, lui demandent : Moutchou, une figue ! Bata ! Moutchou donne-moi une datte, Allez bata ! Bata !

                  Les Juifs ou Israélites, ont leur part dans la distribution des sobriquets populaires.
                  Notons parmi les plus connus : corruption de Salomon, tchaabèbe, Jéroboam, Gaulois, Lyonnais, aviateur, vingt-deux, quarante-quatre, mazoutier etc. etc.

                  Les Musulmans qui sont des étymologistes de haute fantaisie, croient dur comme fer que Juif qu'ils prononcent jouif, ou Djouif, vient du mot arabe djiffa qui signifie bête crevée. A ce propos, il est à remarquer qu'au Maroc les Israélites, à qui sont confiées les plus rudes et les plus répugnantes besognes, ces travaux ayant conservé à beaucoup d'entre eux une force samsonienne, sont chargés du service de l'équarrissage.
                  Il est curieux de voir deux hercules en souquenille noire transporter un âne ou un mulet mort, suspendu au milieu d'une lourde perche pour aller le déposer en dehors de la ville, à proximité d'une porte dénommée Bar-Jiaf, Porte-des-Charognes.

                  Poursuivons, un peu rapidement, cette étude sur les surnoms ethniques en notant, ou rappelant que Derzi, Druze est, dans le langage courant d'Algérie, une expression désignant un mauvais sujet, un homme de rien et dangereux. On sait que les Druzes sont considérés par les bons Musulmans comme des suppôts de Chitane (démon).
                  Le Maltais, Malti en arabe est aussi appelé, par les Indigènes Iessri, l'Assyrien, appellation curieuse démontrant que les Indigènes, même peu soucieux d'histoire et de généalogie, ont une vague souvenance de l'origine sémitique et asiatique des Anglo-Maltais. Le Maltais est appelé aussi Faïno.

                  Citons, à ce propos, feu F. Calléja d'Alger, le philologue méconnu : " Une particularité curieuse, dit F. Calléja, c'est la résurrection pour les Maltais du sobriquet de Faïno.
                  Lorsque les Français firent la conquête de l'Algérie, de nombreux Maltais vinrent s'y établir. Ils étaient :
                  - marins,
                  - pêcheurs,
                  - paysans
                  et s'interpellaient entre eux exactement comme les premiers Phéniciens qui abordèrent le sol de la Grèce : Faïno ! Faïnek !
                  Ces interpellations ont le sens de : oh là ! Eh ! Là-bas !
                  Leur fréquence donna naissance à ce sobriquet dont je fus en butte moi-même de la part de quelques-uns de mes condisciples.
                  De nos jours ce sobriquet qui, dans l'Antiquité avait donné le grec Foino, Puno, Foïnikos et Pount a disparu, car, en Algérie, la colonie maltaise s'est fondue et mélangée aux autres Européens. Tous aujourd'hui parlent le français."

                  Les Espagnols, avec plus ou moins d'ironie ou de malice populaire sont désignés sous le nom d'étourneaux (parce que, vêtus de costumes sombres, ils arrivent en bandes de leur pays natal, pour coloniser), d'escargots ou de caracols (pour se gausser de leur goût pour ce gastéropode) que je ne sais plus quel François Coppée a appelé " l'huître du pauvre ".
                  Les Espagnols de Valence sont appelés pataouètes (parlant le patois), ou pepètes (pépé, diminutif familier du Français). Pépète, dans l'argot des tranchées est devenu péploche (désignant les Algériens en général).
                  Au Maroc l'Espagnol est appelé, avec mépris, par les Musulmans mcherreg esseroual, celui qui a le pantalon déchiré.

                  L'Italien, aux yeux des Berbères, n'a pas la cote. Taliane, en langue courante berbère, signifie mauvais, Sourdi Taliane, un mauvais sou, c'est une monnaie qui ne passe pas.
                  Le Napolitain, dans la langue familière, est baptisé Ouallioune ou Mandgiamagaroune (mange-macaroni).

                  Pour finir, notons que Roumi, dans le langage militaire, indique un officier peu au courant des questions soulevées par les choses et les gens d'Islam, et excusons-nous, auprès de nos fidèles et indulgents lecteurs du décousu de cette fin d'étude qui, nous en avons peur, paraîtra influencée par la douceur caniculaire de cette mémorable journée du 27 juillet 1925 où, sur la place du Gouvernement, il fut possible de faire durcir des œufs à l'ombre… du duc d'Orléans et de son cheval.

Docteur Victor Trenga.
Alger Étudiants (juillet 1925)


Robert Randau
Envoyé par M. Christian Graille

                 Dans un article paru dans " la Grande Revue " en juin 1923, Monsieur Jean Pomier, Président de l'Association des Écrivains Algériens définissait ce qu'était le mouvement littéraire français d'Algérie, et ce qu'il devait être. Il était amené à parler des fondateurs de la littérature algérienne.
               Nous extrayons de cet article quelques passages dans lesquels il indique quels sont les pionniers de la littérature française en Algérie.
               Nous lui cédons la place, et nos lecteurs pourront se rendre compte de la place primordiale qu'occupe Robert Randau dans les lettres françaises puisqu'il est le premier en Algérie.

               Il est certain que la littérature algérienne originale, j'entends par littérature autre que celle destinée à traduire les émerveillements qu'un dépaysé doit beaucoup à Robert Randau.
               L'idée la plus riche de Jean Pomier est d'avoir su tout justement associer les quatre grands noms de :
               - Louis Bertrand,
               - Robert Randau,
               - Stephen Chaseray,
               - Musette.

               Nos lecteurs se rendront compte, parce qu'ils vont lire, de la place algérienne de Randau. Nous voudrions essayer, mais c'est là, tâche au-dessus de ces quelques notes, de vous indiquer la place qu'il occupe dans la littérature en général ; ce numéro qui lui est consacré, vous facilitera, je l'espère, à lire l'œuvre, à connaître les pensées de l'auteur, à l'aimer.
               R. L.

               Il y a des correspondances établies entre :
               - le développement économique et
               - la formation artistique de ce pays. Sans insister à ce sujet, marquons seulement des dates, qui seront les pierres miliaires durables dressées par un pays en marche.

               1894 - Naissance de " Cagayous ", le métèque " dessalé " et railleur, truculent en les banlieues d'Alger, d'Oran ou de Bône.
               1895 - le " sang des races " est analysé par Louis Bertrand.
               1896 - " Rabbin " de R. Randau et Sâadia Lévy.


               Ainsi apparaissent dans divers domaines les signes auguraux de l'avenir :
               - ajustement de formes politiques,
               - évolutions des méthodes administratives,
               - ébranlements populaires,
               - apparitions d'œuvres littéraires spécifiques.

               Avant de caractériser cette période liminaire, notons dès l'abord que les premières œuvres d'une claire algérianité émanent (fait curieux, en apparence, pour des populations à fond essentiellement méridional) de prosateurs et non de poètes.
               Nous disons en apparence : Des quatre grands précurseurs des lettres algériennes, (Musette, Louis Bertrand, Stephen Chaseray et Robert Randau), Musette et Robert Randau seuls sont fils de la terre qu'ils ont auscultée. Encore Randau, malgré ses attaches algéroises, s'est toujours déraciné ou, en tout cas, a étendu l'envergure de sa vision à une vaste africanité.

               Il ne faut donc pas voir là une dérogation à la loi de l'antériorité de la poésie dans la création littéraire. Lorsque la génération de 1905 apparaîtra, celle-ci, presque toute entée sur le rameau nord-africain, prendra, dès l'abord, l'attitude véhémente des lyriques.
               Rien n'importe en art que la création. C'est pourquoi dans ce laps 1895-1896, nous ne retenons que les quatre créateurs que nous venons de citer.
               Sans doute, pourrions-nous dresser dès lors un palmarès abondant des noms intéressants d'œuvres méritoires, d'efforts et de tentatives efflorescents. Mais au somptueux jardin d'art, tout ce qui n'est pas de racines profondes a vite fait de se faner, et le printemps qui suit ne se souvient plus du précédent.

               Seuls perdurent et forcissent davantage avec les saisons les hauts et les puissants végétaux qui minéralisent leurs fibres aux sucs essentiels du tréfonds…
               Jean Pommier après avoir défini l'originalité de ces premiers " Algérianistes " en tant qu'Algérianistes, les rattache à la grande lignée française et humaine. Voilà en quels termes :
               Par bonheur, sur cette ardeur méditerranéenne qui brasille dans la Cina, dans Pépète, dans Cassard, dans Cagayous, est tombée, ne l'oublions pas, la douce rosée de France.
               Sur les étendues telluriennes, depuis les sahels verdoyants jusqu'à l'aridité des ergs, s'est dressée, depuis notre conquête, la haute leçon de travail et d'ordre du terrien de France.
               Vers la passion d'Afrique, cavale indomptée, la France est venue, et elle lui a imposé la règle douce, efficace et prudente de disciplines anciennes mais sûres. Elle a fait valoir à ces races mineures la morale majeure du travail, et d'abord et surtout, du travail agraire.

               Et vous n'avez eu, Chaseray, qu'à écouter la parabole de la terre, pour, dans votre œuvre multiple mais dispersée, évoquer les solides aspects de ceux du bled, paysans opiniâtres, meneurs de charrues ou de tracteurs, dans leur réalisme savoureux et leur attitude goguenarde ou matoise, fleurant bien son coin de Beauce ou des Cévennes.
               Ainsi, l'Algérie, avec sa joie de vivre, son audace, sa passion, son travail, elle est suscitée toute entière et pour la première fois, dans cette vigoureuse tétralogie d'annonciateurs que sont Chaseray et Musette, Bertrand et Randau.

Jean Pomier
Alger-Étudiants (29-05-1926)

Robert Randau, en littérature Randau, né à Alger, le 16 février 1873 a publié :
" Rabbin " et " XI journées en force ". Avec Sâadia Lévy (1896) ;
" Autour des feux de la brousse " (poème) (1900) ;
" Les colons " (1908) ; " Celui qui s'endurcit " (1909)
" Le commandant et les Foulbès " (1910)
" L'aventure sur le Niger " (1913)
" Les terrasses de Tombouctou " (1920)
" Les fantaisies sur l'éternel " (1920) " Cassard, le Berbère " (1921)
" Le chef des porte-plumes " (1922) " A l'ombre de mon baobab "
" la vocation de Reine Termine " " L'homme qui rit jaune " (1925)
Divers travaux sur la politique musulmane et sur l'ethnographie africaine. Robert Randau fait actuellement partie du jury de Littérature Coloniale.

Alger Étudiants (29-05-1926)


Les enquêtes " d'Alger-Etudiants "
sur l'origine du Sabir
Envoyé par M. Christian Graille

                 Alger le 18 décembre 1924

                Monsieur et cher confrère,

                Il me faudrait, je crois, remplir plus de cent feuillets pour répondre à la question que vous me posez, et j'ai lieu de croire qu'il resterait encore beaucoup à dire pour éclairer vos lecteurs.
                Tout d'abord, permettez-moi d'observer que le jargon de Cagayous n'est pas du " sabir " comme on l'entend en Algérie ; il s'apparente évidemment à la langue franque, ce sabir méditerranéen, mais avec prédominance d'un français plus ou moins déformé.

                Lorsqu'il y a trente ans (déjà mon Dieu) la Revue Algérienne, a publié les premiers vagissements de Cagayous, vous vous doutez bien que je n'ai pas improvisé une langue spéciale, une langue de pure fantaisie pour permettre à mon charmant filleul de narrer ces truculents exploits…
                Avant de m'aventurer dans cette rocaille accidentée, j'ai dû, tout d'abord, laborieusement fixer les grandes lignes d'une syntaxe, oui Monsieur, une syntaxe !, assez obscure d'ailleurs, qu'un glossaire tenu à jour dans une mesure possible devait compléter.

                C'est ainsi que j'ai pu me rendre compte que dans le Cagayous algérien, des locutions :
                - napolitaines,
                - siciliennes,
                - valenciennes,
                - mahonnaises,
                - maltaises, fleurissent sur le terreau français, avec des inversions, des altérations curieuses et des idiotismes pleins d'imprévu et de pittoresque.

                Vous ne serez donc pas surpris en apprenant que Cagayous est fort bien compris en Belgique où l'on se souvient de la domination espagnole, et au Canada qui fut français.
                - Dans l'est de l'Algérie, à Bône notamment, le jargon populaire est plus fruité 'italien qu'à Alger ; là-bas le Diocane est encore plus imprégné de sicilien, trop peut-être.
                - Dans l'Oranie, le Cagayous se rapproche du nôtre, avec moins de musique italienne et une touche plus forte de pataouète…

                Souffrez que je termine sur ce léger point d'orgue, mon petit air de flûte.
                Je laisse aux étymologistes de la Colonie le soin de rechercher les origines du grand sabir méditerranéen. Mon vieil ami Marguet qui est un esprit curieux et averti, vous renseignera mieux que je ne saurai le faire à cet égard.
                Mais ce que je puis affirmer ici, véhémentement, c'est que Cagayous est bien un latin d'Afrique, avec le quart colonial en plus.

Musette.
De l'origine du sabir.


                " … Quand on achetait quelque chose dans une boutique, le marchand ne voulait parler ni français, ni sabir. Tu sais l'arabe, disait-il, puisque tu es juif ! … ". Journal Officiel, 25 avril 1875, P 2982, 1er col.

                Il convient d'insister, une fois pour toutes, sur ce qu'est, exactement le " sabir " afin de lui faire sa place nécessaire et suffisante dans l'histoire si curieuse des langages usités en Berbérie, à travers les siècles et de différencier la langue française, langue agonisante, et demain, langue morte, de la langue algérienne, je veux dire la langue française parlée en Algérie, de jour en jour plus vivante et qui, tout en acérant un goût de terroir, restera française dans son essence, avec l'avantage d'avoir incorporé, d'une façon intime, des éléments nouveaux qui rajeunissent la langue-mère sans nuire à sa beauté, à sa force, à sa clarté.

                Contrastant avec la pauvreté réelle du vieux " sabir " Parler sec et commercial, la langue algérienne avec ses riches apports, sans cesse renouvelés, donnera la mesure de la vitalité du peuple néo-latin qui la parlera pendant de longs siècles encore…
                Une des dernières et rares vieilles personnes que j'ai connu employant le " sabir " comme langue sérieuse, si l'on peut dire était ma grand'mère maternelle venue à Alger très jeune, peu d'années après 1830.

                Elle parlait " sabir " dans ses dernières années, il y a environ vingt ans, à sa domestique kabyle, comme elle avait parlé aux indigènes un demi-siècle auparavant.
                " Fasir fougo ! (faire du feu !) Fasir chambra bono ! Fasir Negro ! (fermer les persiennes) ". La Berbère la comprenait à ravir ; et le curieux de la conversation était que ma grand'mère avait l'illusion qu'elle parlait arabe pendant que sa kabyle était persuadée qu'elle lui répondait en français !…
                La grammaire de la langue franque était puérile, sa syntaxe embryonnaire.

                L'expression de la négation et de l'affirmation dominent le mécanisme indigent de ce parler ultra-simplifié.
                Demande : " Ti sabir ? " Réponse : " Mi, no sabir ! " avec la variante moderne : " Moi ou Ana, makache sabir ! "
                D : " Toi vendir ? " R : " Si, si, mi vendir ". Ou : " lala, senior, makache volir vendir ! "
                Cela rappelle le rudimentaire : " Ya bon ! Ya pas bon ! " de nos tirailleurs sénégalais.
                Les verbes uniquement employés à l'infinitif (remarquer que la langue arabe ne possède pas ce mode) ont une terminaison qui ne correspond pas toujours à celle des verbes romans dont ils sont tirés.
                Et, à ce propos, une étude très spéciale serait la recherche des lois phonétiques commandant la déformation des mots de souche latine passés au " sabir ". (Ex : en langue franque, sabir, avec la signification de savoir s'éloigne, comme physionomie, et du mot français correspondant et de l'espagnol saber, et de l'italien sapere, et du provençal sabe. Poudir (pouvoir), fasir (faire), bibir (boire), volir (vouloir), etc…)

                Bien qu'il soit difficile d'apprécier d'une façon complète, même à une époque donnée, la richesse du " sabir " son vocabulaire n'a jamais dû être bien étendu : quelques centaines de mots. A moins d'attribuer au vieux " sabir " les spirituels apports, peut-être trop artificiels, trop littéraires, dus au talent personnel, à l'influence éphémère de certains Algériens cultivés qui eurent, si l'on peut dire, à la fois le génie et le culte du " sabir ", les Alfred Letellier, les Mermet (Kaddour), les Georges Moussat, les Henri Sans.

                Mais où sont les Algériens d'antan ? En dépit du sel et du piquant, poivre rouge dont l'assaisonnèrent magistralement quelques humoristes du cru, " le sabir " ne vaudra plus désormais, que comme délassement fantaisiste et ne sera surtout relevé et goûté que grâce au talent primesautier de quelques auteurs spécialisés et, surtout, de leurs interprètes…

                L'usage plusieurs fois centenaire du " sabir ", jargon farci de mots d'origine latine, n'a certainement pas peu contribué à l'altération de la langue arabe-mère, importée en Berbérie par les conquérants musulmans.
                Cette altération nette surtout dans le parler des habitants des ports, cités cosmopolites, a été signée, dès 1554 par le voyageur, Léon l'Africain (ce Berbère issu d'une famille originaire de Fès, né à Grenade et converti par le pape Léon X).

                D'autre part, comme il n'est pas absurde d'admettre que la langue arabe courante usitée en Algérie et en Tunisie, et appelée " arabe vulgaire " par les arabisants officiels est l'héritière directe des dialectes puniques où étaient entrés, en grand nombre, des mots latins et lybiens (en désignant par langue libyenne, avec Bertholon, le grec parlé dans le Nord de l'Afrique dans l'Antiquité), on ne sera plus étonné que la pureté primitive d'une langue aussi nettement sémitique que l'arabe, littéraire ou parlé, ait été, on peut dire de tous temps, altérée par des apports latins, signes lointains, mais déjà manifestes de la prépondérance européenne dans le bassin de la Méditerranée…

                En somme ce qui fait l'intérêt principal, l'unique intérêt de l'étude du " sabir " c'est qu'il est la marque, timide d'abord, puis de plus en plus raisonnée, volontaire, du génie latin donnant sa note dominante dans des relations entre peuples différents de langue, de mœurs, de mentalité.

                Relations d'abord purement commerciales, économiques, puis sociales et politiques : obligeant peu à peu les peuples de langue turque, arabe, berbère et se familiariser avec une langue qui, plus tard, sera remplacée par une autre langue, plus complète, destinée à être employée par le vaincu et le vainqueur. Et, très curieux trait de psychologie des peuples, on retrouve en maints passages de livres historiques ou anecdotiques une répugnance marquée éprouvée par certains Musulmans à employer, mêmes pour des transactions banales, la langue franque, imposée par les kouffar (infidèles)

                Il semble que ces xénophobes avaient comme l'intuition que le " sabir ", tout informe et imparfait qu'il était devait détruire, par sa dangereuse nouveauté, ce qui constituait l'édifice intangible et sacré des traditions de l'Islam.

                Le " sabir ", considéré comme langue de transition, revêt ainsi un caractère du plus haut intérêt. Le petit-fils du " mercanti " indigène qui refusait de parler " sabir " adopte, avec empressement, la langue du conquérant car il s'est aperçu que cette arme précieuse et nouvelle pouvait être peut-être destinée à lui permettre de concurrencer, sur de nombreux terrains, le petit-fils du Roumi…
                Et c'est justement l'extension de l'emploi de la langue française chez les Musulmans d'Algérie qui a prononcé l'arrêt de la mort du vieux " sabir " devenu suranné, fossile, après avoir fait son temps et rendu les services qu'on en attendait.

                Le lettré indigène, qui s'applique à employer la langue française aussi correctement qu'un Français d'origine, il y parvient, ne peut alors qu'exécrer un jargon hybride qui le ridiculise et fait douter de son aptitude à s'assimiler le génie de la France en même temps que sa langue….
                Ainsi, à mesure que s'évanouit le " sabir ", lequel va rejoindre les vieilles lunes, monte à l'horizon algérien la nouvelle langue, nourrie du suc de la langue-mère, la langue française d'Algérie, soleil jeune et resplendissant….

Docteur V. Trenga.
Alger-Étudiants (12-01-1925) .


Les trois employées
Envoyé par Mme. Annie
Leur patronne a pris l'habitude depuis quelques jours de partir à 15 h pile.

         Les employées elles, partent à 17 h.

         Un jour, la plus hardie des 3 dit aux autres filles :
         "Et pourquoi on partirait pas à 15 h 15 nous autres ? Elle ne revient jamais avant le lendemain, elle ne saura pas".
         Aussitôt dit, aussitôt fait.
         La première arrive chez elle, se jette sur son canapé et se relaxe.
         La deuxième va faire du shopping jusqu'à 17 h.
         La blonde arrive chez elle et entend des bruits étranges provenant de sa chambre à coucher.
         Elle prend son courage à deux mains et s'y dirige, elle entrouvre la porte lentement et surprend sa patronne au lit avec son mari.
         Elle referme la porte aussitôt et disparait sans bruit..

         Le lendemain, la patronne part à 15 h.
         A 15 h 15 , une des filles dit aux autres "OK, on peut y aller aussi".
         Les deux premières quittent leur bureau, mais la blonde travaille toujours.
         Tu ne viens pas ?

         « Non, non pas moi, j’ai failli me faire choper hier !!! »

QUELQUES PAGES D'UN VIEUX CAHIER

Source Gallica

Souvenirs du Général Herbillon (1794 - 1866)
Publiés par son petit-fils

        CHAPITRE XV
       Départ de la colonne. - Arrivée devant Zaatcha le 7 octobre 1849.
- Prise de la Zaouia. - Description du village.
- Assaut infructueux du 20 octobre. - Séjour au camp et départ du prince Pierre Bonaparte (octobre 1849).

        L'effectif des troupes dont je disposais dans la Province n'était point en rapport avec toutes les difficultés du moment. C'est ce dont le général Charron, gouverneur général, ne voulait pas se rendre suffisamment compte. Il m'avait bien prescrit " d'être le plus fort possible pour obtenir à Zaatcha des résultats significatifs en infligeant à ce pays un châtiment exemplaire, seul moyen de faire rentrer les oasis rebelles dans l'ordre ". Pour ce faire, il m'eût fallu une très forte colonne capable de frapper un coup prompt et décisif, mais je n'aurais pu réunir celle-ci qu'en prenant jusqu'au dernier homme de toutes les troupes de la province; or, la situation politique était telle qu'il eût été peu prudent de laisser Constantine et Philippeville surtout sans moyen de protection et de répression.

        Je ne pus donc former qu'une colonne de 3.306 hommes, y compris le 5e bataillon de chasseurs annoncé d'Alger et devant débarquer à Stora du 18 au 20 septembre. Elle devait être renforcée des troupes de Batna et de Biskra et augmentée de celles que commandait le colonel de BarraI, composées de la garnison de Sétif et de 400 zouaves du 1er régiment venu d'Alger.
        J'arrivai le 28 septembre à Batna où les troupes du Constantine étaient arrivées le 24 avec le colonel Dumontel du 43e de ligne et j'étais escorté par tous les caïds, chérifs et grands de toutes les tribus de Tell qui avoisinaient la route.

        A Batna, tous ceux au milieu desquels j'avais vécu jusqu'en 1848, vinrent me témoigner leur gratitude et m'assurer de leur fidélité. Ils furent sincères et pendant tout le cours du siège de Zaatcha répondirent à la confiance que j'avais mise en eux.
        Le 2 octobre, je quittai Batna et atteignis Biskra le 4 octobre. Je pris des mesures pour assurer les mouvements de transports pendant l'opération et installer les ambulances et hôpitaux nécessaires et me remis en route avec une partie de la Légion étrangère, ce qui porta l'effectif de la colonne à 4.493 hommes. Le 7, à 8 heures du matin, nous arrivions devant Zaatcha et le camp fut établi au pied de Condiat-el-Meida.

        Cette colline, en partie couverte de sable, fait face aux oasis de Lichana et de Zaatcha, commande le pays aussi loin que la vue peut porter et est située à 500 mètres de la Zaouia, groupe de maisons que domine un minaret assez élevé.
        Après un examen du pays, reconnaissant l'impossibilité, avec les 4.493 hommes que j'avais, d'investir toute l'oasis dont le périmètre avait plus de 12 kilomètres, je décidai que nos efforts devaient se porter sur un seul point et que le dépôt de tranchée serait à, la Zaouïa dont il convenait de s'emparer immédiatement. A midi, les ordres furent donnés et le soir le drapeau tricolore flottait sur le haut du minaret.

        Zaatcha ressemblait à une petite place du Moyen Age ; des tours carrées s'élevaient de distance en distance, reliées par des maisons percées de petits créneaux triangulaires destinés à faciliter la dessiccation des dattes par l'introduction de l'air extérieur, et les habitants s'en servaient contre nous comme de meurtrières. Un chemin de ronde bordait un fossé plein d'eau de 6 à 8 mètres de largeur sur 80 centimètres à 1 m. 20 de profondeur, qui entourait entièrement le village, dans lequel on entrait du côté de l'ouest par une grande porte, précédée d'un pont en pierres. Les maisons communiquaient entre elles par des terrasses ; l'entrée en était très basse, il fallait se plier en deux pour y pénétrer. Les rues étaient très étroites.

        Les travaux d'approche furent poussés le plus activement possible, mais les circonstances imposèrent de tenter l'assaut avant qu'ils ne fussent suffisamment avancés.
        Sans tenir compte de toutes les difficultés que j'eus à surmonter pour soumettre le village de Zaatcha et les oasis du Dahari, certains reproches me furent faits au sujet de l'assaut du 20 octobre. Ne connaissant nullement la position critique dans laquelle je me trouvais, des militaires éloignés des opérations, et même beaucoup de ceux qui campaient avec moi, ne virent dans cette attaque de vive force qu'imprudence et me jugèrent d'après leurs idées arrêtées, qui ne pouvaient s'étendre au-delà du rayon de leur sphère. C'est ce qui arrive d'ailleurs dans les situations difficiles, c'est alors que les subordonnés deviennent hardis et discoureurs; ils blâment le chef et ont des avis.

        Arrivé le 7 octobre devant l'oasis de Zaatcha, avec la persuasion que les habitants ne résisteraient pas à nos armes, nous fûmes tous frappés de les voir tenaces et persévérants dans la défense et audacieux dans leurs attaques. Pour les vaincre, nous fûmes donc forcés de faire un siège sans avoir les matériaux et même les munitions nécessaires. A compter du 7 au soir, après la prise de la Zaouïa, les travaux commencèrent par l'envahissement de quelques jardins et la construction d'une batterie.
        Nos travaux furent exécutés avec toute l'activité possible, malgré les sorties fréquentes exécutées par les Arabes. Nous étions arrivés au 20 octobre sans qu'on les crût assez avancés pour essayer un assaut ; cependant, deux jours avant cette date, d'après les rapports des officiers du génie et de l'artillerie, on présumait que bientôt je prendrais toutes les dispositions pour en finir.
        Les opérations du siège qui se prolongeaient au-delà de toute prévision, et le fait que Bouzian publiait partout, par le moyen de ses émissaires, que les chrétiens ne rentreraient pas plus dans Zaatcha que dans la Mecque, firent fermenter l'esprit de rébellion parmi les Arabes.

        Ceux de la subdivision de Batna commencèrent à se mettre dans le mouvement insurrectionnel ; Bouçada se révolta et attaqua la faible garnison laissée dans cette place. J'appris en même temps que les Ali-ben-Sabors du caïdat Si-Moctar avaient assassiné cinq bûcherons français.
        Avis m'était donné en même temps par les caïds de Belesma que les nomades étaient dans l'intention de forcer le passage du Tell dans le Sahara, qu'Abd-el-Afid qui, depuis sa défaite à l'Oued Seriana, s'était retiré dans une montagne de l'Aurès, réunissait de nombreux contingents ; enfin le caïd Ben-Chenouf m'apprenait que Hamed-ben-Hadji, ancien khalifat d'Abd-el-Kader, se disposait à rentrer dans le Ziban et que déjà, à Sidi-Okba, son parti intriguait pour lui.

        Tout me faisait donc pressentir l'insurrection entière de la subdivision de Batna, par suite, la route de cette localité à Biskra serait coupée et le transport des vivres et des munitions deviendrait difficile, sinon impossible.
        Je me déterminai donc à tenter l'assaut. A cet effet, je réunis dans le gourbi du major de tranchées, le chef d'État-major, les chefs de corps, le colonel d'artillerie, les deux capitaines du génie chargés des travaux. Après leur avoir expliqué en peu de mots la situation de la province, je demandai au colonel d'artillerie et aux deux officiers du génie s'ils croyaient que les deux brèches faites fussent praticables; ils me répondirent affirmativement. Cependant malgré cette affirmation, je fis observer que le passage du fossé à droite ne me paraissait pas bien sûr. L'officier du génie me donna l'assurance que, le lendemain matin, tout serait disposé pour faciliter ce passage qui me causait une certaine appréhension (la suite prouva que cette inquiétude était bien fondée). Après cette assertion et le désir manifesté par les chefs de corps qui ne doutaient pas du succès, je me décidai à donner mes ordres pour l'assaut.

        Deux colonnes furent formées : celle de gauche, sous le commandement du colonel Carbuccia, celle de droite sous celui du colonel Dumontet. Le commandant Bourbaki, avec son bataillon de tirailleurs indigènes, trois compagnies du 5e chasseurs et le bataillon d'Afrique, fut chargé de faire un envahissement provisoire, c'est-à-dire d'envelopper Zaatcha, d'empêcher toute communication avec Lichana. Le colonel de Mirbeck, avec sa cavalerie, devait parcourir les alentours de l'oasis pour surveiller les gens de Tolga ; le colonel de Barrai, du 38e de ligne, prenait le commandement du camp et avait pour mission de tenir en respect les gens du Zab-Dahari, qui sans doute chercheraient à nous inquiéter.
        Le 20 octobre donc, à 6 heures du matin, l'artillerie augmente l'intensité de son feu et, à 6 h. 30, je fais sonner la charge.

        A ce signal, répété par les deux colonnes, celle de gauche renverse le masque qui couvre le débouché; deux compagnies d'élite du 2e régiment de la Légion étrangère avec le capitaine Padro s'élancent vers la brèche et, malgré un feu très nourri, se précipitent sur les décombres. Mais, une vingtaine d'hommes sont à peine parvenus à s'établir dans un restant de tour, que celle-ci s'écroule, engloutissant la plus grande partie des combattants sous ses débris. Pressées de tous côtés, les deux compagnies reviennent en arrière, poursuivies par l'ennemi qu'une compagnie du 5e chasseurs arrête à la tête de sape.

        Je m'étais placé au cavalier de tranchée pour être à même de surveiller les deux attaques et faciliter l'envoi des ordres, lorsque je vis le colonel Carbuccia venant m'annoncer l'échec de ses deux compagnies. Je me transportai immédiatement dans la tranchée avec le capitaine Lebœuf, mon officier d'ordonnance, et mon chef d'Etat-major Bretizel. Au premier coup d'œil, je vis qu'il n'était pas prudent de pousser un nouvel assaut et je donnai l'ordre de rétablir les sacs à terre ainsi que le masque.
        Pendant ce temps, le brave 43e faisait des efforts inouïs pour franchir le fossé qui avait 8 mètres de large et 1 m. 20 de profondeur. Le capitaine Graillet, du génie, avait organisé une passerelle au moyen d'une charrette; mais celle-ci tourna en descendant dans le fossé et ne fut d'aucune utilité pour le passage.

        Bravement, le capitaine Graillet et le sergent-major Ribes se jettent à l'eau pour chercher un passage guéable; ils le trouvèrent rapidement, et les grenadiers du 43e avec la section du génie, se précipitent dans l'eau, gravissant l'escarpe devenue très glissante, et s'établissent sur une berge de 2 mètres de largeur. Le feu très violent n'arrête pas ces braves gens qui redoublent d'efforts pour passer plus avant. Après avoir mis la gauche à l'abri d'une surprise de la part des Arabes, j'étais venu à l'attaque de droite. Un instant je crus que le 43e allait réussir; mais je me rendis bientôt compte que sa ténacité et sa bravoure s'épuiseraient inutilement devant les obstacles qui se dressaient devant lui. Une compagnie du 1er zouaves vint protéger la retraite de ces hardis soldats qui s'exécuta avec le plus grand calme. Aussitôt que ce mouvement eut été exécuté, je rétablis les troupes dans les lignes.

        Tandis que cela se passait, le commandant Bourbaki avait fait l'investissement provisoire avec beaucoup d'intelligence ; en attaquant les gens de Lichana qui voulaient se porter au secours de Zaatcha, il les mit en déroute. De son côté, le colonel de Mirbeck avait empêché les gens de Tolga d'intervenir.
        Cette affaire était un échec. J'avais eu le tort en particulier, malgré mon idée que la brèche de droite n'était pas praticable, de m'en rapporter beaucoup trop à l'officier du génie qui m'avait persuadé pouvoir franchir le fossé avec des moyens artificiels.

        On m'a reproché aussi plus tard de n'avoir pas employé assez de troupes. Mais, ne connaissant pas les issues de ce bordj, comme le canon n'avait causé de ravages que sur les premières maisons, il n'était pas prudent d'agglomérer une quantité considérable de troupes sur des points de passage très étroits. Leurs masses auraient été exposées de façon trop vulnérable aux coups des Arabes. En outre, j'avais à me protéger des attaques de l'extérieur et je devais garder assez de monde pour y faire face.
        Aussitôt que les troupes furent rentrées, je réunis de nouveau tous les chefs de corps. Je leur dis que je ne m'abusais pas sur les conséquences de cette défaite; je leur fis connaître que les vivres diminuaient et que les munitions allaient nous manquer.

        Je leur démontrais qu'avec le peu de troupes que j'avais je ne pouvais investir entièrement Zaatcha ; que par suite des travaux et des gardes, je me voyais forcé d'abandonner quelques jardins pour resserrer mes lignes ; que, pour diminuer les fatigues, j'avais pensé à établir le camp au milieu des dattiers, mais que j'en avais reconnu l'impossibilité, car le terrain humide, l'encombrement des troupes auraient pour résultat l'accroissement des maladies qui déjà nous atteignaient.
        Tous furent d'avis d'abandonner quelques jardins et de resserrer nos lignes et tous, moins un, partagèrent mon avis de ne pas abandonner le siège de Zaatcha, de demander des vivres et des munitions et de pousser plus que jamais les travaux du siège.

        Le colonel Carbuccia fut le seul d'un avis contraire ; non seulement il m'engagea à lever le siège, mais voyant qu'il ne pouvait obtenir de moi une pareille faiblesse, il chercha à m'influencer par mon officier d'ordonnance.
        La conduite de cet officier supérieur, d'une incontestable bravoure, provenait de sa crainte de me voir réussir là où il avait échoué le 16 juillet. Cette insistance de sa part me dessilla les yeux et je ne pus voir en lui que de mauvaises intentions, d'autant plus que j'appris que, dans un dîner, il n'avait pas craint de se réjouir de mon échec du 20 octobre.

        Comme je le pensais, cet insuccès compliqua ma situation, mais, plus elle devenait difficile, et plus je pris la ferme résolution de vaincre les obstacles; je me décidai à mettre toute la patience et la ténacité qu'exigeaient les opérations aussi compliquées, qui étaient la suite et la conséquence de l'échec subi et de la rébellion des tribus qui étaient sur nos derrières.
        Quelques jours après cet assaut, arriva au camp le prince Pierre Bonaparte. Son court séjour, la conduite qu'il a tenue et son départ précipité sont choses peu connues et qui ont donné lieu à une foule de commentaires. Les uns ont vu une lâcheté dans son désir de rentrer à Paris et dans sa persistance à quitter la colonne expéditionnaire ; d'autres ont considéré sa conduite comme peu réfléchie et peu conforme au grade qu'il avait. On l'a donc jugé sévèrement et M. le ministre d'Hautpoul, en l'interpellant à la tribune, a donné une grande importance à un fait qui, provenait surtout de la situation assez fausse dans laquelle on avait placé ce commandant.

        Certes, on aurait pu éviter tout retentissement en agissant avec modération et en me consultant ; mais, en 1849, la question politique était loin d'être éclaircie, et comme une grande partie de la Chambre était opposée au président Louis Napoléon, il est possible que M. le ministre d'Hautpoul n'ait pas été fâché de frapper sur Pierre Bonaparte que l'opinion avancée, vraie ou fausse, avait placé du côté de la Montagne. Le ministre a, par son apostrophe, jeté le ridicule sur un homme qui, probablement, n'avait pas cru être lié au service au point d'y rester envers et contre tout. Du moins, d'après ce que j'ai pu comprendre, Pierre Bonaparte était venu en Afrique en croyant n'assister qu'à une expédition de quelques jours, et le siège de Zaatcha se prolongeant au-delà de toute prévision, il a pensé que son service n'était pas tel qu'il ne pût le quitter.

        Son arrivée au camp m'avait été annoncée par le Gouverneur, qui me prévenait que Pierre Bonaparte serait placé à la Légion étrangère comme commandant au titre étranger. Le bataillon qui lui était destiné lui fut remis et le colonel Carbuccia fut de suite aux petits soins pour lui. Ce fut un malheur pour le commandant d'avoir pour chef cet homme fort ambitieux, intrigant par caractère et d'une souplesse à toute épreuve. Il ne vit dans Pierre Bonaparte qu'un instrument qui pourrait servir à son avancement et agit en conséquence ; malheureusement, il eut assez d'influence sur lui pour lui faire prendre le parti de quitter le siège avant la fin des opérations.
        A peine installé dans sa tente, le Prince prit son service avec zèle. Dès le lendemain, il fut de tranchée et remplit son devoir avec goût. Ses allures de chasseur, sa ressemblance avec le grand homme, son oncle, lui attirèrent bientôt l'affection de la plus grande partie des officiers de la colonne, et le 25 octobre il prouva par le courage qu'il était digne du grand nom qu'il portait.

        La ténacité, le fanatisme des Arabes, leur défense opiniâtre aidée par les nombreux contingents qu'ils recevaient journellement m'avaient engagé, malgré ma répugnance, à abattre leurs palmiers, persuadé qu'en les prenant par l'intérêt j'arriverais à leur faire demander l'aman. Le 25 octobre, le colonel Carbuccia reçut l'ordre d'abattre des palmiers qui appartenaient à l'oasis de Lichana, dont les habitants nous étaient aussi hostiles que ceux de Zaatcha.
        A 7 heures du matin, 200 hommes de la Légion étrangère et 200 hommes du bataillon d'Afrique partirent de la tranchée avec le commandant Pierre Bonaparte, sous les ordres du colonel Carbuccia, auquel la plus grande prudence avait été recommandée. Cette troupe se rend dans les jardins qui sont à la tête de l'Oued-Ketby afin de protéger les travailleurs qui devaient abattre les arbres.

        Le travail commença sans qu'on fut inquiété, mais peu à peu les Arabes se réunirent, gagnèrent le saillant d'un mur qui s'étend jusqu'à la plaine et qui malheureusement n'avait pas été reconnu. Ils se glissèrent le long de ce mur, débordèrent les travailleurs et les défenseurs, et commencèrent un feu très vif. Surpris par cette attaque imprévue, les hommes de la Légion et du bataillon d'Afrique se retirèrent précipitamment et découvrirent entièrement les travailleurs. Alors, avec 20 grenadiers de la Légion, le commandant Bonaparte arrête le bataillon d'Afrique, rétablit l'ordre, arrache le cadavre d'un soldat des mains des Arabes, tue d'un coup de pistolet le plus audacieux, prend position dans un jardin à 30 mètres du mur occupé et contient l'ennemi.

        Comme le nombre des Arabes grossissait et que le colonel demandait qu'on vînt à son secours, je fis partir le 1er bataillon de zouaves et le bataillon de tirailleurs qui repoussèrent les Arabes et permirent à la troupe en fâcheuse posture, de se retirer en bon ordre.
        Cette affaire fut mal dirigée, car avant de se porter en avant, il eût fallu reconnaître, c'est ce qui ne fut pas fait. Cette négligence fut cause du commencement de déroute qui eut lieu et ne fut arrêtée que par le sang-froid de Pierre Bonaparte.

        Cette affaire lui fit grand honneur et le posa bien dans la colonne expéditionnaire. Mais le colonel Carbuccia ne comprit pas qu'il ne fallait pas exalter outre mesure la conduite de son chef de bataillon et, au lieu de faire ressortir avec tact le mérite de ce fait de guerre, il se mit à crier à haute voix : " Où est le commandant Bonaparte? Savez-vous que c'est un fier lapin ? Il en a tué sept ", et autres paroles semblables qui jetèrent du ridicule sur cet officier supérieur dont la conduite avait été belle et généreuse. Le rapport que fit le colonel fut aussi exagéré que ses paroles, et je dus faire supprimer par mon chef d'Etat-major tout ce qui pouvait prêter à la médisance.
        Après sa rentrée au camp, le commandant Bonaparte était venu me trouver. Il me rendit compte de l'affaire en des termes très modérés, et je le félicitai de sa belle conduite.

        Le soir même, tandis que je me reposais devant ma tente, le colonel Carbuccia vint me trouver pour me dire que Pierre Bonaparte avait un courage bouillant qui l'exposait à chaque instant, que sa mort serait un malheur affreux, et qu'il serait prudent de le renvoyer en France. Soit que je fusse absorbé par tout ce qui se passait autour de moi, soit que j'attachasse peu d'importance à ces dires, je répondis : " Nous verrons, vous m'en parlerez de nouveau. "
        Le 27, je trouvai le commandant dans sa tranchée ; les paroles de Carbuccia me revinrent en mémoire, et j'emmenai Pierre Bonaparte dans le gourbi du major de tranchées. Je lui demandai s'il était dans l'intention de quitter la colonne avant la fin des opérations. Il me répondit affirmativement. Je lui fis quelques observations et l'invitai à venir déjeuner avec moi le lendemain en lui disant : "Réfléchissez. "

        De retour au camp, je fis part à mon chef d'État-Major et au colonel de Barral des intentions du commandant Bonaparte; ils me dirent sans hésiter que ce départ causerait le plus piteux effet, et ne me cachèrent pas que les officiers accusaient le colonel Carbuccia de pousser le Prince à ce départ pour Paris par intérêt personnel.
        Le lendemain, après déjeuner, je fis entrer mon convive dans ma tente. Je lui dis la fâcheuse impression que produirait son départ; je lui offris même de le prendre à mon état-major. Il me répondit que son parti était irrévocablement pris, que sa présence à Paris était de la plus grande nécessité, qu'étant représentant du peuple son devoir était de siéger à la Chambre, qu'on n'avait pas fait à son égard ce qui lui avait été promis, et que d'ailleurs la partie militaire n'était pas la carrière qu'il voulait embrasser. Je l'invitai encore à réfléchir et il me quitta.

        Quelques moments après, il revint chez moi avec un papier à la main et m'assura qu'il ne pouvait en aucune manière rester plus longtemps au camp.
        Voyant que je ne pouvais le persuader, voulant éviter les quolibets et mettre le grand nom de Napoléon à l'abri du ridicule, je pensai que le moyen le plus sûr de conserver au moins les apparences était de donner une mission au commandant Bonaparte. Je lui prescrivis donc de se rendre à Alger près du Gouverneur pour lui faire part de mes embarras, des grandes difficultés que j'avais à surmonter, et le prier de m'envoyer le plus tôt possible des renforts de troupes.
        Il était tellement désireux de partir qu'il voulait se mettre en route le soir même, et ce n'est qu'après mon observation qu'il serait imprudent de voyager sans escorte qu'il se décida a attendre le départ du premier convoi avec lequel il devait gagner Biskra et ensuite Constantine.

        A son arrivée à Philippeville, il m'écrivit, à la date du 6 novembre, la lettre suivante : Philippeville, 6 novembre 1849.
        Mon Général,
        J'ai rencontré en route les renforts que vous envoie M. le Gouverneur général et M. le général de Salles. M. le général de Salles m'a assuré en outre que M. le colonel Canrobert, qui est mis à votre disposition, est allé vous rejoindre avec 3.000 hommes.
        J'ai écrit à M. le Gouverneur général que les opérations devant Zaatcha paraissant devoir se prolonger au delà du terme que j'avais fixé pour ma rentrée à l'Assemblée nationale, j'aurais déjà pris la résolution de retourner à mon poste lorsque vous avez bien voulu me confier une mission pour lui.
        L'objet principal de cette mission étant naturellement rempli par l'envoi des renforts supérieurs au chiffre que vous jugiez indispensable pour réduire Zaatcha par l'investissement, j'ai résolu de retourner directement en France pour éviter une double traversée, et surtout pour être plus tôt à l'Assemblée où la scission de la majorité annonce des complications qui pourraient devenir graves.
        Votre dépêche sera remise à M. le Gouverneur général par l'ordonnance fidèle qu'il avait attaché à ma personne et que j'ai fait partir ce matin pour Alger.
        Je pars après-demain pour Marseille et je regrette qu'une foule de considérations qu'il serait oiseux d'énumérer toutes ne m'aient pas permis de prendre part plus longtemps aux travaux d'une colonne dont j'ai été à même d'apprécier tout le courageux dévouement et que vous commandez si dignement.
        J'aurai l'honneur, mon Général, de vous écrire dès mon arrivée à Paris et de vous donner des nouvelles de votre fils dont je me propose de faire sans retard la connaissance.
        Veuillez agréer, je vous prie, mon Général, l'expression de mes respects et celle de la vive sympathie que vous m'avez inspirée. Vétéran de Waterloo, je m'honorerai toujours d'avoir servi, bien que peu de temps, sous vos ordres et je vous conserverai inviolablement les sentiments les plus dévoués.

        P. N. BONAPARTE,
        Représentant du Peuple.
        Voici les faits dans toute leur simplicité.

        
A SUIVRE


De qui suis-je le serviteur ?
Envoyé par M. Fabien

        Mulla Nasrudin, en faveur auprès du souverain, profite de sa position pour mettre en évidence les méthodes des courtisans.
        Un jour où le roi est particulièrement affamé, on sert des aubergines. C’est un tel délice qu’il ordonne au chef cuisinier d’en servir dorénavant à chaque repas.

        « Nasrudin, ne trouves-tu pas que l’aubergine est le meilleur légume du monde ?
        — Le meilleur, Majesté ! »

        Cinq jours plus tard, alors qu’on lui sert des aubergines pour la dixième fois, le roi explose :
        « Remportez ça ! Je déteste les aubergines !
        — Il n’y a pas pire légume au monde, Majesté, reconnaît Nasrudin.
        — Hier encore tu déclarais que c’était le meilleur !
        — Certes, mais je suis le serviteur du roi, pas celui des aubergines. »


LA CINQUIEME REPUBLIQUE
De Hugues Jolivet

CHARLES DE GAULLE




       O Cinquième République, Marianne sexagénaire,
       Depuis cinquante huit, année de ta naissance,
       Je constate que tu perds ton halo de lumière,
       Que tu portes préjudice à l'aura de la France.

       Car nos Guides suprêmes, que sont nos Présidents,
       Promettent monts et merveilles avant leur élection.
       Après cent jours de règne, à leur corps défendant,
       La crise économique chamboule leurs prévisions !

       Refrain de Claude François : "C'est la même chanson" !
       Après les trente glorieuses, la crise pétrolière !
       Guerres au Moyen Orient, l'Occident sous tension,
       Et la France divisée, à nouveau dans l'ornière !

       Tu as, donc, soixante ans. Enfantée par de Gaulle,
       Appelé à résoudre le conflit algérien
       Car nos chefs du moment, pleurant comme des saules,
       Chaque jour, dépassés, ils n'arrivaient à rien !

       L'appel du dix-huit juin, inscrit dans les mémoires,
       Est : "Je vous ai compris", au Forum d'Alger.
       La ferveur et l'union confirmaient la victoire
       D'une Algérie française qu'on ne peut partager !


       Communautés unies et avides de paix,
       Prêtes à suivre de Gaulle et la voix de la France,
       Ignoraient, ce jour-là, que son manque de respect
       Ruinerait leur avenir, leurs folles espérances !

       "Gouverner, c'est prévoir", la maxime basique
       De tout homme d'Etat. Se faire une vision
       Logique des résultats, bénéfiques ou tragiques,
       Avant de prononcer son ultime décision.

       Le Général se tait. Il pense à l'avenir
       De la France, tout d'abord, de l'Algérie, ensuite :
       Nouvelle Constitution qu'il lui faut établir,
       Afin que la Nation oeuvre pour sa réussite !

       L'objectif est louable, mérite le respect,
       Si la Nation retrouve sa grandeur, sa fierté,
       Si tous ses territoires vivent, enfin, en paix.
       Les vues du Général ne sont pas arrêtées.

       Il craint, dès cinquante neuf, confidences historiques,
       Qu'intégrer "les arabes est une abérration". (1)
       Venant en Métropole en nombre pléthorique,
       Boulverseraient les codes de notre belle nation !

       Cette réflexion de base, personnelle, sans débat,
       Accouche d'un "non-contrat" avec le FLN,
       Qui cèle le destin des Pieds Noirs de "Là-Bas",
       Délaissés, attaqués et victimes de la haine !

(1) Alain Peyrefitte

      

       "Gouverner, c'est prévoir"! Mais, l'exil des "colons"
       Signe la ruine des richesses de cette terre africaine,
       Première du Continent. Elle marche à reculons
       Sans investissement, est mise en quarantaine.

       La gestion défaillante de chefs non instruits
       A la bonne gouvernance d'un Etat nouveau-né,
       Amassant leur magot, vers la France, conduit
       Les pères de famille, à sa porte, sonner !

       Nous sommes en années fastes, les grands chantiers surgissent.
       Tous les emplois de base satisfont la main d'oeuvre
       Issue d'Afrique du Nord. Elle quitte ses oasis,
       Son désert, son soleil, pour devenir "manoeuvres" !

       Et d'année en année, tant que dure la croissance,
       Les hommes, solitaires, affluent vers l'Hexagone.
       La fin des trente glorieuses engendre la souffrance
       Des familles séparées aux revenus "atones" !

       Le Président Giscard et son Premier Ministre,
       Par pur respect humain d'étrangers désunis,
       Accordent le regroupement, dans un esprit simpliste,
       De la femme, des enfants. Que tous soient réunis !


       De Gaulle est un vieil homme, après dix ans de règne.
       Les étudiants bruyants ont ébranlé son socle !
       Et pour restaurer l'ordre, que la "chienlit" s'éteigne,
       Il pense même à l'Armée, à Massu qu'il évoque.

       C'est à Georges Pompidou, alors Premier Ministre,
       Qu'il confie la mission de régler ce conflit.
       Georges est homme de terrain, en virtuose soliste,
       Il guérit le pays de sa tenace chienlit !

       Les Accords de Grenelle calment les syndicats,
       La reprise du travail apaise les esprits,
       Les rues sont libérées, quelques pertes, sans fracas.
       Dissolutions de Groupes , plus rien n'est interdit !

       Le Président dissout l'Assemblée Nationale
       Alimente en sang neuf sa Droite parlementaire,
       Souhaite concrétiser sa réforme régionale
       Par un référendum que, par malheur, il perd !

       Un "NON" à double effet, il l'avait annoncé :
       L'échec de son projet entraîne sa démission !
       Un candidat sérieux s'est vite prononcé,
       Car Georges Pompidou vise sa succession !
Hugues Jolivet         
Le 3 janvier 2015          

A SUIVRE



LE RETOUR DES DJIHADISTES FRANÇAIS
Par M.José CASTANO,


« Qui aime trop l’humanité en général est en grande partie incapable d’aimer l’homme en particulier. Qui plaint trop le malfaiteur est fort souvent incapable de plaindre la victime » (Dostoïevski - « La légende du Grand Inquisiteur »)

       Depuis que les groupes armés de l’Etat Islamique ont été mis à mal en Irak et en Syrie, il est régulièrement question du retour des ressortissants « français » internés dans ces pays… jusqu’à ce que cette annonce soit officialisée avec le rapatriement prochain de quelque 200 hommes, femmes et enfants. Cependant, un critère essentiel semble ne pas retenir l’attention, tant de nos médias que des partisans de ce retour : l’extrême sauvagerie de leurs méfaits.

       Profondément apatrides, ils n’ont eu de cesse de s’enorgueillir en diffusant dans une orgie de clips d’égorgements, décapitations et mutilations multiples, leurs mœurs barbares. Sur ce point, la chaîne d’information BFMTV nous avait livré un aperçu de leur bestialité en diffusant les images de ces « jeunes Français désœuvrés » traînant derrière un pick-up aux cris d’« Allah Akbar ! » des cadavres de soldats de l’armée régulière syrienne. Images glaçantes et terrifiantes.

       Il y a aussi les femmes françaises converties à l’islam, parties se faire sauter –non à l’explosif !- mais par une multitude de djihadistes (il fallait bien les divertir et leur permettre de se reproduire…) Du fruit de « leurs passions », des enfants sont nés… la plupart de pères différents. Alors, dans un épanchement de tendresse infinie, les voici suppliantes, pour que l’on rapatrie au plus vite ces enfants en France. « C’est dur de les voir souffrir ! » s’exclame, l’une d’elles, à Franceinfo en novembre 2017.

       Aujourd’hui, sachant ce qu’ils encourent s’ils étaient jugés sur les lieux de leurs forfaits, tous se souviennent subitement d’« être français » et comptant sur la mansuétude de nos juges, réclament d’être traduits devant une juridiction française.

       Et puis, il y a les autres… tous les autres ! Les islamistes radicaux qui, basés dans notre pays, attendent de fondre sur leurs proies avec, au bout du voyage la mort qu’ils recherchent car il est écrit que « quiconque meurt au cours du djihad entrera au Paradis et deviendra un martyr » et que « les délices du Paradis consistent principalement dans les voluptés sensuelles »… Paradis où « 70 vierges attendent chaque martyr »….

       Pas étonnant que bon nombre de Musulmans veuillent mourir en « martyr » !... Seulement, comme disait Chateaubriand, « on n’apprend pas à mourir en tuant les autres ».

       Alors, que faire ?... Que faire de ces nouveaux « arrivants » shootés à l’islamisme et à la barbarie ?... Quelles sanctions infliger à ces irréductibles ennemis de tout humanisme ?... De toute civilisation ?...

       Les juger ?... Les condamner, sachant qu’ils auront tôt fait de « contaminer » en prison leurs coreligionnaires ? Et après ? Libérés, qu’adviendra-t-il d’eux ?...

       A la lumière des actions criminelles qui ont ensanglanté les principales villes européennes, faute de solution appropriée, on est désormais en droit de se poser la question sur leur sort.

       Que faire face à tant de cruauté… de barbarie… d’inhumanité ?... Et les partisans de la peine capitale, de se faire plus pressants après chaque attentat : « Il faut terroriser les criminels ! Il faut qu’ils sachent qu’en tuant, ils seront tués. C’est la seule solution ! »

       Lors d'une interview, il fut demandé au Général Schwartzkopf, commandant en chef de la coalition de l'opération « Desert Storm » (Tempête du désert) en Irak : « Le pardon est-il envisageable pour ceux qui ont aidé les terroristes ayant perpétré l'attaque contre les États-Unis le 11 septembre 2001 ? »

       Sa réponse :

       « Je crois que c'est le rôle de Dieu de leur pardonner… Notre boulot, c'est d'organiser la rencontre ! ». On ne peut être plus clair !...

       Oui, mais voilà !... En France, c’est le genre de déclaration que refuseraient la « bien-pensance », le « politiquement correct », les « moralistes à la conscience pure », les « humanistes », qui, choqués par cette « inhumanité » que représente la peine de mort, s’élèveraient avec force contre l’organisation d’une telle « rencontre », réconfortés qu’ils sont par cette prise de position du ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, pour qui « ce sont des Français avant d’être des djihadistes ».

       Dès lors, la question revient avec plus d’acuité sur le devenir de ces « Français » : quel sort doit-on leur réserver ?…

       Bon nombre de députés s’élèvent contre leur retour réclamant qu’ils soient jugés en Syrie et en Irak… le député LR Pierre-Henri Dumont appelant même à des « assassinats ciblés » : « Ce sont des éliminations ciblées pratiquées déjà par différents services (de renseignement) en Syrie, en Irak (...) c'est-à-dire tuer des personnes qui ont pris des armes contre la France, la France ne doit jamais les réaccueillir », a-t-il déclaré.

       Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, suggère d’instaurer un « bagne démocratique » aux îles Kerguelen pour les djihadistes condamnés, tandis qu’au RN, on indique : « Ce sont des djihadistes, ils ne devraient donc plus être français »…

       Mais, face à ce tollé qui n’en est qu’à ses prémices, le drame qui caractérise la Justice française réside en ce que nos sociétés vieillottes s’interdisent tout moyen coercitif. Elles ont lentement accumulé pendant une longue procession de siècles, les règles, les précautions et les interdits destinés à protéger l’idée qu’elles se faisaient de la civilisation. Elles ont imaginé couler la sagesse dans des lois… codifier l’indulgence et la mesure, pour défendre l’homme contre lui-même. Préoccupées d’exorciser la violence qui bouillonne toujours confusément dans des instincts mal maîtrisés, elles ont naturellement été conduites à s’interdire la seule forme de violence sur laquelle elles pouvaient peser : la cruelle mais indispensable gamme des châtiments qui prétendent moins punir le crime, que décourager le criminel.

       Négligeant cette suprême mise en garde d’Aristote « Tolérance et apathie sont les dernières vertus d'une société mourante », elles ont inventé un arsenal de répression humain conçu à l’exacte mesure de coupables considérés comme des « égarés » ou des « déséquilibrés ». Or, on ne combat pas des terroristes avec de tels jugements… On doit adopter une riposte appropriée afin de les stopper dans leur folie meurtrière ; agir sans oublier la foi formulée par Engels : « Ne jamais jouer avec l’insurrection armée et, quand on la commence, la mener jusqu’au bout ».

       Dès lors, la France -confrontée à l’un des plus graves périls de son histoire- ne doit pas s’embarrasser de préjugés pour prendre les mesures appropriées afin d’assurer sa propre survie. « Celui qui s’incline devant des règles établies par l’ennemi ne vaincra jamais » soutenait Léon Trotski.

       Mais, empêtrée dans ses règles, ses décrets et ses scrupules, voilà notre civilisation chrétienne paralysée par les dogmes qui la fondent et les lois qui la défendent qu’elle ne peut transgresser sans se renier. Et voici les barbares, forts de cette assurance (en tuant, ils savent qu’ils ne seront pas tués !) qui frappent dans nos villes… les peuples loups qui grondent aux frontières. Pressés de courir à leur tour la grande aventure de la civilisation et exaltés par la présomptueuse conviction qu’ils détiennent des recettes miraculeuses, ils négligent les trésors de l’héritage… Ils veulent tout détruire, tout raser pour tout recommencer sur les décombres d’un passé qu’ils haïssent parce qu’ils ne le comprennent pas. Et ils tentent d’imposer leur loi par l’assassinat et la terreur à des sociétés qui ont su dissiper ces cauchemars depuis si longtemps qu’elles n’en imaginent plus l’éventuel retour. Voici qu’enchaînées par les règles qu’elles ont accumulées pour se prémunir contres les excès de leur propre colère, les sociétés stupéfaites s’abandonnent aux coups que leur portent des colères inconnues…

       Et voici que s’écroule la civilisation parce que les barbares puisent dans son raffinement, ses complications et son indulgence, la seule force qui rend leurs débordements irrésistibles. Ils retrouvent brutalement le plaisir d’égorger sachant combien timide sera la répression. Jamais les passions déchaînées et la haine n’ont fait autant de ravages… semé autant de morts… Jamais on n’a assassiné autant d’hommes au nom du bonheur de l’humanité… Jamais le mot de Malaparte n’a été plus juste : « Jamais on n’a couché autant de Christs dans les charniers du monde ».
José CASTANO       
e-mail : joseph.castano0508@orange.fr
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 L'ISLAMISATION DE L'ÉGLISE !
Envoyé par Mme Leonelli

Témoignage de Mme Bernadette Leonelli, suite à l'article
de M. José Castano " l'islamisation de l'église "
paru sur le N°191 de la Seybouse.

      Cher José,        

       Le rôle de l'Église dans la guerre d'Algérie me touche particulièrement, ayant été dès l'adolescence confrontée à ce douloureux et gravissime problème. Comme à tous ceux qui ont été nourris des préceptes de l'Évangile, du respect et de l'admiration que l'on se devait d'avoir à l'égard des bergers chargés de le diffuser.
      Originaire de Souk-ahras, antique Thagaste cité natale de Saint-Augustin, je garde le souvenir du grand malaise suscité par l'attitude des prêtres, de la révolte, de la tristesse et du grand désarroi des paroissiens.
      Permettez-moi donc, d'ajouter quelques noms à votre triste "palmarès." Ces derniers ayant défrayé la chronique durant de longs mois !

      L'un d'eux, Louis Augros n'eut pas de honte à ajouter le mensonge à la trahison en déclarant dans une revue chrétienne dans les années 80 :
      "Pour avoir prêché qu'il n'y avait pas de race supérieure ou inférieure aux yeux de Dieu.... nous fûmes priés de quitter la ville..."

      Ils composaient la "fameuse équipe de Souk-Ahras" ainsi définie par la presse algérienne. Pour parler de ces prêtres.
      Louis Augros, Pierre Mamet, Jobic Kerlan. Le dernier - et non des moindres : André Aribit !
      "Cette équipe de Moudjahidine, ces Che-Guevara de l'Église ont compris qu'il fallait aider le peuple algérien sous peine de..... trahir : L'Évangile ! " (Toujours selon la presse locale.)

      Trahir l'Évangile.... au cours d'une de ses interviews, Ben-Bella déclara :
      " Plus que le départ de la France, c'est le triomphe de l'islam qui réjouit mon cœur..."

      Il serait bien trop long d'énumérer toutes les activités de ces "fossoyeurs de la foi" qui alimentaient les discussions. Cela allait de la vente des lustres en cristal de l'église dont le produit alla dans les caisses du FLN... A la collecte de vêtements organisée en 1956 au profit de la Hongrie, vêtements qui furent très vite reconnus dans les douars avoisinants... Ne parlons pas des armes, tracts et autre matériel de guerre découverts au presbytère. L'église fut fermée de longs mois pour activités subversives de ses prêtres...
      Cependant, la palme, (selon moi) revient au dernier prêtre en fonction.
      Plus qu'une faute : un sacrilège !
      C'est lui qui brisa à coups de masse le grand crucifix de notre église !
      Souk-Ahras, son église, consacrée basilique en l'honneur de Saint-Augustin au cours de grandioses célébrations.

      Après le départ de tous les chrétiens pour cause "d'exil" il fut décidé de la transformer en mosquée. Les statues, ( la statue de Saint-Augustin a été placée dans un caveau, toutes les démarches pour la récupérer sont restées vaines : propriété de l'état...) le grand crucifix devaient être transférés au cimetière. Un trou avait été creusé au sommet de l'allée centrale pour pouvoir l'y placer. Son descellement fut une dure épreuve tant sur le plan moral que physique. La nuit était tombée, il fut déposé provisoirement dans l'allée centrale. Au petit jour un jeune algérien frappa avec insistance à la porte du responsable des opérations.
      "Viens vite... viens vite... le curé... il est en train de briser votre prophète... celui qui a les bras comme ça..."
      C'était hélas! Vrai ! La présence chrétienne devait selon lui trop s'éterniser ! Qui pourrait expliquer un tel geste ?

      Des décennies de récits ou de films nous ont rapporté témoignages ou images de héros bravant leurs persécuteurs en refusant de souiller une image pieuse, un crucifix, une Torah ..... Que doit-on penser d'un prêtre qui brise un crucifix alors que rien ne l'y oblige ?
      Notre église devint donc une mosquée. Elle ne le restera pas longtemps. Un imposant minaret remplaça le clocher. Fissurée, présentant de dangereuses inclinaisons, émettant de drôles de craquements elle dut être détruite.
      On dit que les maisons ont une âme, à plus forte raison les églises. La nôtre avait été construite pour un seul maître !
      Elle préféra sûrement mourir comme lui : Brisée !

      Ce fameux " père" André reconverti par la suite en pharmacien, fournissait les malades en médicaments, prodiguait des conseils et des soins. D'où lui venaient les fonds nécessaires... qui le fournissait... nul ne le sait.... probablement l'Église de France !
      Après une vieillesse (apparemment) paisible passée à la maison de retraite d'Hippone, Il a rendu son âme à "Allah" le 26 septembre dernier. Les habitants de la ville de Souk-Ahras où il tenait à être enterré ont voulu honorer le dernier "babasse." Le fils de la ville ! Service d'ordre spécial... gerbe de fleurs aux couleurs du FLN, lecture de quelques versets du Coran.... présence d'un prêtre antillais (venu d'on ne sait où) exceptionnellement revêtu d'une aube blanche (les signes religieux étrangers à l'islam ne sont pas permis)

      Un de mes oncles encore à Souk-Ahras après l'indépendance s'était chargé du déménagement de l'église aidé des quelques chrétiens encore présents, et d'algériens embarqués dans la tourmente... Malgré eux, ou n'en comprenant pas le sens!
      Le sujet n'est pas là!
      La plupart des statues furent transportées au cimetière, certaines, expédiées selon les désirs à d'anciens paroissiens, celle de Saint-Augustin, assez convoitée (par la suite) fut déposée dans un caveau (c'est un autre et long chapitre.)
      Le descellement du crucifix qui n'en finissait pas fut une éprouvante opération. Un immense bloc se détacha au moment du descellement, frôla la tête de mon oncle et alla s'encastrer dans le sol laissant toutes les personnes présentes interloquées.
      Nous n'avons pas de mal à imaginer quels souvenirs devaient submerger l'assistance en voyant ce crucifix allongé dans l'allée centrale, quels gestes aussi, peut-être ( sûrement même) une caresse ou un baiser furtif sur ce visage de bronze...?
      Nos parents, nos aînés n'avaient pas la tendresse exubérante, mais elle se traduisait à travers leurs gestes, leurs exemples de vie.
      Triste paradoxe ! En cette ville repose les deux premiers prêtres qui, aux prix de sacrifices et d'ingéniosité replantèrent la Croix d'Augustin ! L'un, nommé curé de paroisse en 1862 eut l'idée originale d'élever des petits lionceaux qu'il revendait à Marseille. En son honneur, deux magnifiques lions trônaient fièrement au bas de l'église. L'autre, n'hésitait pas à parcourir les mers à bord de bateaux de croisières pour récolter les fonds nécessaires à l'embellissement de l'église dont la pièce maîtresse était le grand crucifix.


Le dernier prêtre en fonction le brisa !

      La chevauchée de la dhimmitude au sein de l'Église continue hélas ! Vous évoquerez probablement dans votre prochain article la mascarade des béatifications à Oran, la courageuse et magnifique intervention de notre amie Geneviève Troncy s'interrogeant sur le silence de l'Église concernant tous les prêtres assassinés durant la guerre d'Algérie. Intervention soulignée dans le journal "Présent" sous la plume de Monsieur Sanders.
      L'évocation de tous ces pharisiens des temps modernes que le Christ appellerait encore "sépulcres blanchis" ayant trahi ou continuant de trahir la mission : "d'Aller de par le monde convertir toutes les nations..." Ne doit pas nous faire oublier l'engagement de ceux qui œuvrèrent pour rallumer en Algérie précisément les lumières de la civilisation. Tous ces prêtres martyrisés pour leur foi, isolés ou éloignés pour les même raisons.... Comment ne pas évoquer le parcours du père Avril dont le combat pour la conversion des musulmans, la mise en garde des dangers de l'islam d'hier, d'aujourd'hui et de toujours sont relatés dans son livre:
      " La XIIème Croisade." Véritable ode à l'espérance ! que tout pied-noir devrait avoir lu, et s'il l'a fait, se doit de le faire lire pour expliquer et comprendre hier, et aujourd'hui !

      A l'écoute de ce qui se passe, Certains écrits sur Saint-Augustin semblent se réactualiser.
      "La catastrophe qui s'abattait ne l'épouvantait pas. Elle était douloureuse à son cœur.. Il pleure sur sa ville comme Jésus pleura sur Lazare ou la ruine de Jérusalem, or, Lazare devait ressusciter et Jérusalem devenir la Jérusalem Céleste... Il savait que les crimes des empires comme celui des individus appellent le châtiment... Il voyait au delà des siècles car il connaissait les prophéties: Les temps ne seront révolus que lorsque l'Évangile aura été annoncé à toutes les nations..."
      Gardons l'espoir, restons fermes dans la foi !
      Ceux qui n'ont pas rempli leur mission, ont été comme des tâches sur la vitre de la longue histoire de l'Église, mais les taches sur une vitre n'ont jamais empêché la LUMIÈRE de passer !

      Merci cher José de m'avoir prêté attention, moi aussi, comme mon illustre concitoyen je peux dire que certaines évocations sont douloureuses à mon cœur !
      Aussi, l'émotion ressentie à l'évocation de cet épisode dans des circonstances douloureuses par la suite en terre d'exil me fit faire une promesse:
      Il faut que cela se sache !

Mme Bernadette Leonelli.



Message international à diffuser
Par Anne-Bénédicte Hoffner, La Croix le 26/1/2019 à 06h00
Envoyé par M. J. Villard

              Cher(e)s Ami(e)s,

              Nous travaillons tous les jours et toutes les nuits sans discontinuer et en nous relayant afin que nous puissions enrichir et développer un ensemble de banques de données dans le Monde pour faire passer nos messages.

              Notre objectif est d'atteindre dans les contacts de ces banques de données plus de 400.000 messageries fiables en ligne de responsables sérieux dans tous les domaines de l'activité propres au développement et à la reconnaissance universelle de notre État : La Fédération des Deux Rives.

              La France n'est pas notre axe central d'intérêt. Nous sommes implantés sur les 5 continents.

              Nos compatriotes d'Espagne, d'Argentine, d'Israël, du Canada, d'Afrique du Nord, du Brésil, d'Italie sont en train de nous rejoindre.
              Trois dossiers sont en chantiers prioritaires :

              - Le financement de nos activités mondiales,
              - Notre installation sur notre territoire national et notre développement durable,
              - Notre reconnaissance par l'ONU.

              Notre combat se gagnera par les NTIC et sur le tapis vert.

              Pour ce faire, nous avons besoin de toutes les collaborations dans tous les domaines modernes de communication, de tous les acteurs du monde économique et politique qui croient en notre devenir, de toutes celles et de tous ceux qui pensent encore que le bassin méditerranéen peut jouer un rôle important dans l'installation durable de la Paix, de la Solidarité et du Progrès mais avec une juste répartition des territoires et des richesses.

              Notre État détient désormais tous les attributs d'une souveraineté fonctionnelle à l'exemple de l'Ordre de Malte.

              Pour entrer au sein de l'Organisation des Nations Unies, nous devons pouvoir jouir librement du territoire qui est le nôtre.

              Cet objectif sera celui de notre action en 2019.
              Chacun d'entre vous peut nous y aider.

              Nous sommes prêts à répondre à toutes les questions et à remettre gratuitement tous les documents nécessaires à la bonne compréhension de notre démarche.

              Merci de comprendre que nous sommes un Peuple pacifique qui souhaite simplement s'exprimer dans le monde avec les mêmes atouts que toutes les Nations et la même représentativité que tous les États du Monde.
              Les Pieds-Noirs sont un Peuple, une Nation et un État.
              Ils se sont libérés de la tutelle de la France.
              Les Pieds-Noirs ont pris leur destin en mains dans le cadre de la Déclaration Universelle des Droits des Peuples signée à Alger le 4 juillet 1976.

              Ils se sont dotés d'un Gouvernement sans Ministre des Armées mais avec un Ministre de la Paix qui entame depuis deux jours son parcours dans le Monde.

              La capitale de notre État, Sisyphe, sera une "smart city" . https://fr.wikipedia.org/wiki/Ville_intelligente
Jacques Villard
Chef de l'Etat Pied-Noir
Président de la Fédération des Deux Rives
Le contacter : vivaldi.cntic.epn@gmail.com



De 1956 à nos jours
Par M. Jean-Paul Lilienfeld
Envoyé par plusieurs internautes

_Une histoire de 62 ans d'imagination fiscale et de mensonges ..
Document argumenté à lire absolument!!!

Je m'appelle Micheline Sany. Je suis née en 1927 et je vous le dis tout net : à force de tirer sur l'élastique, la corde va péter !

                En 1956, quand Guy Mollet a instauré la vignette pour « fournir un revenu minimum à toutes les personnes âgées de 65 ans et plus », bon... moi j'avais à peine 30 ans et j'étais très fière de pouvoir venir en aide aux anciens.
                En plus, Paul Ramadier, le ministre des Affaires économiques, avait affirmé que ça serait une taxe temporaire...

                Bah, il a duré quarante-quatre ans le temporaire ! Pendant quarante-quatre ans j'ai payé cette vignette ! Alors merci !

                Surtout que les anciens n'en ont presque jamais vu la couleur, vu qu'au bout de trois ans, le Premier ministre, Michel Debré, a annoncé que le produit de la vignette serait finalement « acquis au budget de l'État... », qui le reverserait au Fonds national de solidarité.
                Enfin, en partie... Enfin, en petite partie... Que les vieux se fassent dépouiller comme ça, ça a fait du foin, pendant toutes ces années. Mais ça n'a jamais rien changé.

                Ensuite en 1991, quand ils ont créé la CSG, la contribution sociale généralisée pour financer la branche famille, en remplacement des cotisations patronales d'allocations familiales, bon... sans râler, j'ai payé ! Surtout que ça ne devait durer que cinq ans.
                « Une contribution transitoire » qu'ils disaient... et puis 1,1 %, c'était supportable. Seulement vingt-sept ans plus tard, elle transite toujours la CSG ! Et elle a grimpé à 9,2 % pour les salariés et 8,3 % pour les retraités. Par étapes, bien sûr, c'est moins voyant.

                En 1993, elle est passée de 1,1 à 2,4 %. Pour alimenter en plus le Fonds de solidarité vieillesse. Y'avait pas déjà la vignette pour ça ? Chuuuuut, arrêtez d'être insolents !

                En 1997, elle augmente encore pour financer, en plus, la branche maladie : on en est à 3,4 %.

                En 1998, toujours pour la branche maladie, elle passe à 7,5 %, etc., etc.
                Bref, la protection sociale ne s'est pas redressée, et ce qui devait être temporaire est devenu... un impôt de plus.

                Ah bah oui ! La CSG, ça rapporte plus que l'impôt sur le revenu aujourd'hui. Si on vous demande combien vous payez d'impôts par an, vous savez le dire. Mais si on vous demande combien vous payez de CSG, vous savez ?

                Chez moi on disait : « C'est tout un art de plumer l'oie sans la faire crier. » Alors qu'il y aurait de quoi hurler.

                Et puis en 1996, rebelote avec la CRDS, la « contribution à la réduction de la dette sociale ». J'ai payé. (Mais j'avoue, j'ai râlé.)

                À cette époque, les déficits sociaux s'élevaient à un montant estimé entre 30 et 38 milliards d'euros. Oui, parce que nous, si on se trompe de dix euros dans notre déclaration de revenus, on risque une amende, mais eux, un flou de 8 milliards, ils ont le droit...
                Toujours est-il qu'ils avaient tout bien calculé : en treize ans, tout serait remboursé. La CRDS devait disparaître le 31 janvier 2009.

                Mais voilà-t'y pas qu'en septembre 1997, le gouvernement Jospin annonce 13 milliards d'euros supplémentaires de dettes, qui correspondaient aux déficits sociaux non financés des années 1996 à 1998.
                Alors, ils ont tout bien recalculé, finalement pour tout éponger il fallait prolonger... jusqu'au 31 janvier 2014.

                Mais voilà-t'y pas qu'en 2004, le plan de redressement de la Sécurité sociale concocté par Philippe Douste-Blazy annonce 50 milliards d'euros supplémentaires de dette à rembourser.
                Alors, ils ont tout bien re-recalculé... et ils ont vu que finalement, la Trinité était la meilleure date pour arrêter la CRDS. Donc, on la paye toujours...

                Et puis, en 2004, Raffarin a inventé la « journée de solidarité », vouée à « l'autonomie des personnes âgées ». Moi, ça va, j'étais déjà à la retraite, mais vous, vous avez travaillé... sans être payés !

                Et en 2013, une nouvelle taxe pour les retraités. CASA, ça s'appelle. C'est la « contribution additionnelle de solidarité à l'autonomie », 0,3 % sur les retraites, pensions d'invalidité, allocations de préretraite.
                C'est-à-dire qu'ils font payer les vieux pour que les vieux soient autonomes !
                C'est pas du bon foutage de gueule, ça ?

                Et on continue. En 2013, toujours, M. Jean-Marc Ayrault nous gèle les retraites complémentaires...
                Et comme ça ne s'arrête jamais, maintenant, parce que j'ai 1 247 euros de revenu fiscal par mois, j'ai une augmentation monstrueuse de la CSG : 25 % d'augmentation ! Ah ben oui, on nous a dit 1,7 %, mais c'est pas 1,7 % de ce qu'on payait, c'est le taux qui augmente de 1,7 % ! Bref, nous les vieux, on est passés de 6,6 % à 8,3 % de CSG, ça nous fait 25 % dans les dents qui nous restent.

                Et maintenant, la cerise sur le pompon : on nous annonce que nos retraites vont être revalorisées de 0,3 %. Cinq fois moins que l'augmentation dont on aurait dû bénéficier si le code de la Sécurité sociale avait été simplement respecté, puisqu'il prévoit que les pensions soient revalorisées du montant de l'inflation moyenne sur l'année pour éviter toute dégradation du niveau de vie.
                Et l'inflation prévue d'après l'Insee est de 1,6 %. Et Bruno Le Maire ose dire sur RTL : « Mais ils ne seront pas perdants, leur pension de retraite continuera à être revalorisée. » Il croit qu'on est tous gâteux ou quoi ?

                Je n'ai que mon certificat d'études, mais y'a pas besoin de sortir de Polytechnique pour comprendre qu'une hausse de 0,3 % des pensions, quand les prix augmentent de 1,6 %, revient à une baisse du pouvoir d'achat.

                D'après le baromètre de l'institut Elabe, publié le 6 septembre, 72 % des retraités déclarent ne pas avoir confiance dans le chef de l'État, alors qu'ils étaient 44 % en janvier et 35 % lors de son élection. On se demande vraiment pourquoi. Un type qui pour se faire élire déclarait chez Jean-Jacques Bourdin en décembre 2016 : « L'engagement que je prends ici devant vous, c'est que, avec moi, toutes les petites retraites auront leur pouvoir d'achat protégé. »

                Et sur RMC encore, en février 2017 : « Je ne veux pas, moi, faire d'économies sur le dos ni des retraités, ni de celles et ceux qui sont à quelques années d'aller à la retraite. »
                Et au 20 heures de France 2 en mars 2017 : « Je ne touche pas à la retraite de celles et ceux qui sont aujourd'hui retraités. Leur retraite sera préservée. Il n'y aura pas de perte de pouvoir d'achat, c'est essentiel ! »
                Alors je pose la question : 72 % qui n'ont pas confiance, comment est-ce possible ?

                Comment peut-il se trouver encore 28 % de retraités qui lui fassent confiance ?
                Toute ma vie, j'ai payé pour aider les vieux et maintenant que je suis vieille, il faut que je paye pour aider les jeunes ?
                Et ben, « Feuque », comme ils disent !
Extrait de "Causeur" _ édition abonnés Impôts : ces retraités qu'on abat
Les retraites vont être revalorisées de 0,3 %. Cinq fois moins que l'inflation! par Jean-Paul Lilienfeld


SATAN AU VATICAN
Par Hugues Jolivet

              "Satan n'est pas une chose diffuse, c'est une personne
             Avec laquelle il faut éviter le dialogue !"
             Affirme le Pape François à l'homme qui le questionne.
             Le Diable, le Malin, sort de son catalogue,
             Pour faibles âmes crédules, un devenir radieux
             Qui deviendra Enfer en les privant de Dieu !

             Le successeur de Pierre affronte, cette semaine,
             Des attaques multiples contre le Vatican,
             Dans les "caves" duquel les faiblesses humaines
             Ont conduit quelques clercs à des actes délinquants.
             En violant leur vœu, celui de chasteté,
             Ils ternissent la blancheur, symbole de pureté !

             En France et dans le monde, les attaques se concentrent
             Et sur le peuple Juif et sur le Christianisme.
             "Svastikas" et insultes, actes antisémites,
             Soulèvent l'indignation, engendrent le fanatisme.
             Sacrilèges des églises, fractures des crucifix,
             Des actions sataniques contre Dieu qu'elles défient !

             La lutte pour la survie des juifs et des chrétiens
             Est un élément clé de l'équilibre mondial.
             Les deux communautés comptent sur le soutien
             De la classe politique, fécond et impartial.
             Il est donc inutile, sauf , à titre lucratif,
             De faire du Vatican un haut lieu permissif.

             Ce jeudi, trônera, en vitrine des libraires
             D'une vingtaine de pays, car traduit en huit langues,
             Le pavé "Sodoma", une œuvre arbitraire.
             Auteur et éditeur en espèrent un "big bang" !
             Beaucoup d'énormités pour étayer les thèses
             Et réduire à néant toute la catéchèse !
             "L'excessif est insignifiant", dit Talleyrand.
             Mais, le venin en forte dose est fulgurant !

             L'auteur, lui même gay, s'ingénie à prouver,
             Que Prêtres et Prélats, secrets et hypocrites,
             Sont les homosexuels d'esprit ou dépravés,
             Au cœur du Vatican, premier "Club Sodomite",
             Réponses au célibat et à la continence !
             Une thèse simpliste manquant de pertinence !

             Pamphlet contre l'Eglise, contre sa Tradition.
             Issue des Evangiles et des Dogmes intangibles,
             Condamne la sodomie, donc, interdit l'union
             D'êtres du même sexe : un mariage impossible !

             Introduire le doute dans l'esprit du lecteur,
             Perturbé par des actes de pédophilie,
             Cette œuvre de Satan, par la plume de l'auteur,
             Doit être exorcisée par une sainte homélie.
            

Hugues JOLIVET
21 février 2019



Administrateurs de commune mixte en Algérie
Envoyé Par M. André Brochier

Chers Compatriotes,
              J'ai le plaisir de vous annoncer la parution du Dictionnaire des Administrateurs de commune mixte en Algérie par l'Association des Amis des Archives d'outre-mer (AMAROM).
              Vous trouverez ci-dessous une notice d'information concernant cet ouvrage.
              Merci de bien vouloir en prendre connaissance.
              Cordialement,


              Cet ouvrage se propose d'étudier le corps des administrateurs de commune mixte en Algérie, devenus par la suite administrateurs des services civils. Peu nombreux, ces fonctionnaires ont eu la lourde tâche de gérer la plus grande partie du territoire algérien et de sa population.
              Outre les fonctions de "maire" et d' "adjoints municipaux" de leur commune, ils ont dû également y assurer, selon les périodes, les rôles d'officier de police judiciaire, de juge et d'animateur de leur développement économique, agricole dans un premier temps puis également industriel. Ils furent en outre parfois appelés à servir dans les bureaux du Gouvernement général de l'Algérie ou de l'administration préfectorale ou à assurer la charge d'officier du Ministère public auprès des tribunaux répressifs indigènes.
              Le volume 1 décrit le parcours individuel de chacun d'entre eux dans les divers postes occupés, qu'ils aient appartenu à ce corps ou qu'ils y aient été rattachés, de la nomination du premier administrateur en 1873 au départ du dernier en 1962.
              Le volume 2 reconstitue la succession chronologique, poste par poste, des administrateurs affectés dans chaque commune depuis la création de Palestro, le 26 décembre 1872 à la suppression d'Aïn-Seffra le 31 mars 1959.
    

AMAROM
du moulin de Testas CS 50062
13182 AIX-EN-PROVENCE Cedex 5
and.brochier@gmail.com
             


Le fermier et le jeune homme
Envoyé par Mme Annie

         On ignore si le fermier est équipé d'un gilet jaune ?

         Un fermier surveillait ses animaux dans un pâturage éloigné, quelque part au nord d'Amiens, quand soudain une rutilante BMW s’avança vers lui dans un nuage de poussière.

         Le conducteur, un jeune homme portant un complet Armani, des chaussures Gucci, des lunettes de soleil Ray-Ban et une cravate Yves St-Laurent, s’étira le cou par la fenêtre et demanda au fermier : - "Si je te dis exactement combien de vaches et de veaux il y a dans ton troupeau, me donneras-tu un veau ?"

         Léon regarda l’homme, définitivement un yuppie, puis jeta un regard vers son troupeau en train de brouter tranquillement et répondit avec calme : - "Oui, pourquoi pas..."

         Le yuppie stationne son auto et s’empare de son mini ordinateur Dell, le branche à son cellulaire, et navigue sur Internet vers un site de la NASA, et contacte ensuite un satellite GPS pour obtenir un positionnement exact de l’endroit, puis fournit les coordonnées à un autre satellite de la NASA qui numérise le secteur en une photo ultra haute résolution.

         Le jeune homme accède ensuite au site de photographie digitale Adobe et exporte l’image vers un site d’analyse d’image à Hambourg en Allemagne.

         Quelques secondes après, il reçoit un courriel sur son IPad Air mentionnant que l’image a été analysée et que les données ont été conservées. Il accède ensuite à une base de données MS – SQL via un OBDC connecté à une feuille de calcul Excel avec courriel sur son Blackberry et après quelques minutes, reçoit une réponse.

         Il se tourne vers le fermier et lui dit : - "Tu as exactement 1586 vaches et veaux." - "C’est bien vrai. Ok, tu peux prendre l’un de mes veaux", dit le fermier. Il observa donc le jeune yuppie qui choisissait un des animaux et le regarda amusé pendant que le jeune homme installait l’animal dans le coffre arrière de sa BMW.Alors le fermier dit au jeune homme : - "Hep ! Si je te dis exactement dans quel secteur d’activités tu travailles, me redonneras-tu mon veau ?"Le jeune homme réfléchit un instant et dit : - "Ok, pourquoi pas…"- "T’es membre du gouvernement de Emmanuel Macron", dit le fermier.- "Wow ! C’est exact", dit le Yuppie, - "Mais comment as-tu pu deviner cela ? "- "J’ ai pas eu besoin de deviner’’, dit-il. - "T’es arrivé ici sans que personne ne t’invite, tu veux te faire payer pour une réponse que je connaissais déjà, à une question que je ne me posais pas. Tu t’es servi d’un équipement valant des millions d'euros pour essayer de me prouver que tu es plus intelligent que moi, alors que tu ne connais rien des travailleurs et de ce qu’ils font pour gagner leur vie. Tu ne connais rien aux vaches. Ce que tu as devant toi, c’est un troupeau de moutons !

         Maintenant, redonne-moi mon chien."



LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.

             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens d'ajouter Petit, Clauzel, Gelât Bou Sba, Héliopolis, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.

             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Duvivier, Duzerville, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Penthièvre, Randon, Kellermann et Millesimo, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :

http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers

Annaba

Envoyé par Robert
https://www.liberte-algerie.com/est/le-train-coradia-annaba-souk-ahras-tebessa-mort-ne-309421

Par liberte-algerie.com, publié le 13/02/2019 par A. Allia

Le train Coradia Annaba-Souk-Ahras-Tébessa mort-né

             Endommagé lors des récentes intempéries, le train Coradia ZZE 13, qui assure la ligne Annaba-Tébessa via Souk-Ahras a été suspendu pour une période indéterminée, sur ordre de la direction générale de la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF), apprend-on auprès de la direction des Transports de la wilaya de Annaba.
             Selon cette source, les dommages importants occasionnés au véhicule d’extrémité de tête de ce train prestigieux, suite à un éboulement de terrain, qui en a causé le déraillement au niveau du PK 74, à l’entrée du deuxième tunnel de Tahmamine, est-il précisé.
             Cette décision qui fait suite à la suppression, il y a quelques semaines, du second Coradia affecté à cette ligne a provoqué la colère des cheminots de Annaba et de leurs représentants syndicaux, qui crient à l’arbitraire de leur direction générale, tout en menaçant de saisir le ministère de tutelle.
             “Cette mesure est intempestive et nous sanctionne injustement, nous cheminots, et les nombreux usagers de cet autorail des villes de Bouchegouf, Souk-Ahras qui commençaient à peine de jouir du confort et de la rapidité qu’il offre. Notre hiérarchie a tranché négativement en supprimant ce moyen de transport sans tenir compte du fait que l’accident a été provoqué par un glissement soudain du terrain affecté par de fortes pluies durant les journées des 24 et 25 janvier. Nous espérons que les responsables reconsidéreront le problème et se raviseront”, souhaite l’un des cheminots. Ce dernier regrettera que la direction générale SNTF ait annulé, sans même daigner consulter le partenaire social, le train du même type qui devait être mis en circulation le 20 janvier de l’année écoulée, entre Sétif et Annaba. Un train mort-né qui devait soulager les populations de ces deux grands centres urbains et de celles des villes se trouvant sur cet itinéraire et qui sont obligées de continuer à se rabattre sur les taxis et les autobus pour leurs déplacements quotidiens. Rappelons que le train Coradia Annaba-Tébessa via Souk-Ahras a été inauguré officiellement par le ministre des Travaux publics et des Transports, Abdelghani Zaalene, le 22 décembre 2018. Le ministre s’était alors félicité des efforts déployés par l’État pour la modernisation de la voie ferrée sur la ligne Annaba-Sétif et avait annoncé non sans fierté que son exploitation dès les premiers mois de l’année 2019 sera d’un apport certain pour la croissance et le développement économique de toute la région. Il y a lieu d’indiquer que le projet de modernisation du réseau ferroviaire, tel que préconisé par les pouvoirs publics, devrait atteindre 6 300 km en 2023 et 12 500 km à l’orée 2035.
A. Allia           


L’Algérien est une espèce rare ?

Envoyé par Paul
https://www.liberte-algerie.com/chronique/lalgerien-est-une-espece-rare-443


Liberté-Algérie   l Par M. Amine Zaoui - 16/02/2019

L’Algérien est un habitant de cette terre depuis deux millions et demi d’années, un peu plus ou un peu moins, qu’importe !

        Il est certain que la terre située sous ses chaussures contrefaites est plate ! L’imam de l’Arabie l’a bien démontré, avec des versets et des hadiths à l’appui. Et tout ce qui nous vient de l’Arabie, terre foulée par le Prophète, n’est pas mensonger ! Dans l’imaginaire de l’Algérien, tout musulman est Arabe ! Mais l’Algérien est un Amazigh! L’Algérien est un Amazigh, mais veut être chérifien, c'est-à-dire descendant de l’arbre généalogique prophétique !
        Donc, soit un Sanhadji amazigh est un qoreychite, ou le Prophète qoreychite est un Amazigh!! L’Algérien est un fêtard. Il aime transgresser les péchés, mais pas dans son pays, ni parmi les siens. Chez lui, il est pudique, fils de famille ! Sa ville est faite pour y prier et pour y jeter les poubelles sur les trottoirs. Et les trottoirs sont construits, avec la dalle de sol renouvelée annuellement, pour harceler les jeunes filles et siroter un café-gobelet ! L’Algérien participe à l’édification d’une troisième mosquée dans son village. Et sur le trottoir il rêve d’aller à La Mecque pour prier et partir à Paris pour y vivre.

        L’Algérien est capable de commettre le crime le plus abject contre quelqu’un qui “mange” le ramadan, mais lui aime draguer à quinze heures, le jour de carême, cette jeune femme qui partage avec lui le transport en commun !
        L’Algérien considère la femme qui fume une cigarette comme une pute, une femme facile, parce qu’il y a de la fumée qui lui sort de sa bouche, mais lui se permet de prendre un joint sur le trottoir !
        L’Algérien est convaincu que tout vendeur de vin ou autres boissons alcoolisées est athée. Il remonte les riverains contre le dépositaire de boissons alcoolisées de son quartier. Une fois le magasin fermé, ils partiront, lui et ses riverains, acheter leur vin de chez le dépositaire dans l’autre quartier !
        L’Algérien est fier d’avoir une belle jeune fille en petite copine, mais il n’imaginera jamais qu’un autre algérien peut avoir sa sœur comme petite amie !
        L’Algérien souhaite une épouse, pour la vie et pour la postérité, avec sa virginité intacte, mais lui, dans ses festins de bavardages il se montre fier d’avoir dépucelé la fille du voisin ! Sur le seuil de la mosquée, l’Algérien condamne avec fermeté cette société corrompue et amorale et n’hésite pas à passer la nuit en train de harceler les femmes sur les réseaux sociaux !
        L’Algérien aime sortir avec une jeune fille sans hidjab et se marier avec une femme avec niqab !
        L’Algérien rêve d’offrir une rose à sa copine le jour de la Saint-Valentin, mais il écoute et approuve le prêche d’imam de la mosquée du quartier condamnant cette culture des athées et des occidentalisés.
        L’Algérien déteste De Gaulle et adore la France pour y vivre. Il aime le Prophète mais refuse de vivre en Arabie saoudite !
        L’Algérien observe le carême pendant trente jours, et le deuxième jour de l’Aïd, il pointa au bar pour assouvir sa soif en bière tout en énumérant les bienfaits du mois sacré et de l’Islam !
        L’Algérien se dit prêt à partir mourir pour la Palestine mais il arrive en retard à son travail !
        L’Algérien rêve de voir la chariaa appliquée à la lettre en Algérie, mais préfère partir vivre dans les pays des athées, là où on ne coupe pas les mains ni l’électricité !
        L’Algérien bâtit tout un discours sur la nécessité d’accomplir la prière à la mosquée, que la prière dans une mosquée vaut mille autres prières, mais il n’oublie pas de réclamer à sa femme, à sa sœur, à sa mère, avant de sortir, ses savates de plastique déchirées parce qu’il y a des voleurs de chaussures à la mosquée !
        L’Algérien réclame la démocratie à l’occidental et applaudit l’imam qui prêche le vendredi en disant que la démocratie est haram, un poison français et que la France n’est que notre ancien colonisateur !

        Dans l’imaginaire des Algériens, tout Noir est un nègre. L’Algérien, en vrai musulman, dénonce l’esclavage, mais ce même Algérien n’acceptera jamais voir sa sœur ou sa fille mariée à un Black.
        L’Algérien se dit musulman exemplaire, mais avant de partir accomplir son pèlerinage, il n’hésite pas à acheter l’euro ou le dollar chez le monnayeur contrebandier, au square d’Alger !
        Kafka en connaît quelque chose !
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr           

Le ministre de l’Industrie et des mines à Chlef

Envoyé par Gilles
https://www.liberte-algerie.com/actualite/lalgerie-exportera-15-millions-de-tonnes-de-ciment-dici-a-2020-309711

Liberté-Algérie  Par D.R. - 18-02-2019

“L’Algérie exportera 15 millions de tonnes de ciment d’ici à 2020”

           “Cet objectif est facilement réalisable surtout avec la mise en service prochaine du troisième four de la cimenterie d’Oued-Sly à Chlef”, a estimé M. Yousfi.

           En marge de la visite de travail et d’inspection qu’il a effectuée, hier, dans la wilaya de Chlef, le ministre de l’Industrie et des Mines, Youcef Yousfi, a fait savoir que l’Algérie pourra facilement exporter, d’ici à 2020, 15 millions de tonnes de ciment par an.
           Actuellement, la production des deux fours de cette cimenterie est de 2 millions de tonnes par an. Mais une fois le troisième four opérationnel, et ce, à partir du mois d’octobre prochain, la quantité annuelle de production en ciment passera à 4 millions de tonnes.
           Ce qui nous permettra non seulement de satisfaire le marché local, mais également de participer au quota que notre pays envisage d’exporter d’ici à 2020”, a expliqué le ministre, qui a reconnu que la réalisation du troisième four de cette cimenterie a connu d’énormes retards quant à sa réalisation. “J’ai donné de fermes instructions pour que le projet en question soit définitivement achevé et livré avant le début du mois d’octobre prochain”, a assuré le ministre de l’Industrie et des Mines en présence des responsables de son secteur et des autorités locales. Youcef Yousfi a également parlé de la situation dans laquelle se trouvent les petites et moyennes entreprises locales que compte la wilaya. Selon lui, celles-ci se portent bien et “participent efficacement au développement local, notamment en matière de construction, d’agriculture et surtout d’industrie. C’est le cas de l’entreprise Nover et de l’usine de fabrication de groupes électrogènes que nous venons de visiter aujourd’hui”. Pour ce qui est de cette dernière, Youcef Yousfi s’est dit très satisfait de la qualité des produits fabriqués localement et aussi de la quantité des équipements exportés vers l’étranger, ce qui est parfaitement rentable pour le pays. Sur les lieux, le représentant du gouvernement a insisté sur la formation des cadres de l’entreprise, afin qu’ils puissent assurer eux-mêmes l’entretien et la maintenance de l’ensemble du matériel qu’ils ont la charge de manipuler.
           Pour ce qui est de l’entreprise Nover, le ministre a demandé aux responsables concernés de procéder à l’extension des ateliers existants, et ce, “dans le but de produire plus en assurant qualité et quantité de leur production et de créer ainsi davantage de postes d’emploi”. Et enfin, concernant l’usine de fabrication des produits en céramique de Sidi Akacha, Youcef Yousfi a révélé qu’il s’agit de l’une des meilleures entreprises que compte le continent africain en la matière.
          
D.R.   


Kabylie : Échauffourées entre lycéens et forces de l’ordre

Envoyé par Alain
http://kabyles.net/kabylie-echauffourees-entre-lyceens-et-forces-de-lordre/


par Kabyle.net, 28 février 2014,

La protestation des lycéens et des collégiens prend de l’ampleur à Bejaia.

           Les violents affrontements, qui avaient éclaté hier, ont repris depuis quelques heures. Des collégiens et lycéens affrontent les forces antiémeutes dans les rues et les quartiers situés près de la direction de l’éducation, dans le centre-ville. La police, fortement déployée, utilise des bombes lacrymogènes pour disperser les manifestants qui ripostent par des jets de pierre.

           Les lycéens et les collégiens, notamment les candidats aux examens du BAC et du BEM, expriment ainsi leur refus de sacrifier leurs week-ends et leurs vacances scolaires pour récupérer les cours non dispensés durant la grève qui a duré un mois. Ils exigent le maintien des examens aux dates prévues dont les épreuves ne doivent porter que sur des cours dispensés.
           Les élèves refusent de rejoindre les bancs des écoles.

           Ce matin des bus transportant des lycéens des classes terminales venus des quatre coins du département sont arrivés à Béjaïa.

           Des embouteillages monstres sont constatés depuis ce matin sur les principales artères de la ville, suite à la fermeture du boulevard de la Liberté.

           Les échauffourées de la journée de jeudi ont été émaillées d’actes de vandalisme, de saccage et d’incendie touchant des abribus et le nouveau siège de la direction de l’Éducation nationale.
La rédaction                      


La mosquée «Abou Marouane» bientôt rouverte

Envoyé par Marie
http://www.lestrepublicain.com/index.php/annaba/item/9011099-la-mosquee-abou-marouane-bientot-rouverte


 Est-Républicain.com - Par Zarrougui Abdelhak - 18/02/2019

Complètement restaurée

           Après des années d’attente, d’inquiétude et d’impatience, les habitants de la Vieille-ville en particulier et ceux de Annaba en général se félicitent de l’approche de la réouverture de la Mosquée Abou Marouane, restaurée et rénovée.
           La Direction des affaires religieuses a enfin annoncé la fin des travaux de restauration de ce monument historique et hautement symbolique de la ville et a déclaré que la date de sa réouverture pour la prière sera proche.
           A rappeler que la lenteur des travaux d’aménagement ont fait réagir les riverains ce qui a poussé l’ordonnateur, en l’occurrence la direction des affaires religieuses, à faire pression sur l’entreprise d’exécution pour renforcer l’effectif des travailleurs et améliorer leur équipement.
           Il a fallu également l’intervention de la wilaya pour accélérer le rythme des travaux et permettre une réouverture dans les délais du fait de sa valeur hautement symbolique. La mosquée est un témoin de toute une histoire de la ville. Son concepteur, Abou Leith El Bouni, disposait du fort de Fousala entièrement creusé dans un rocher et qui consistait en l’un de ces fameux ribats s’échelonnant le long du littoral nord-africain.
           Abou Leith a opté pour le surélever d’un masdjid dont le minaret, dans un but stratégique et défensif, devant aussi scruter l’horizon et observer le mouvement lointain des vaisseaux ennemis qui viennent de la mer. C’est en 1947, une fois l’édifice rendu au culte musulman après avoir été inféodé pendant 115 ans aux services sanitaires de l’armée, qu’un autre architecte, Abdel-Baki Derdour, entreprit outre l’adjonction d’une autre salle, désormais au nombre de seize, l’édification de cette porte devenue indispensable pour une masse de fidèles plus importante.

           Vingt années plus tard, exactement le 17 Rajeb 1388 correspondant au 26 octobre 1968, des personnalités du culte venues de tous les pays d’Islam fêtèrent le millénaire hégirien de la mosquée construite en l’an 388. Un an auparavant, à la suite des travaux de consolidation des assises basses de l’édification, antérieurement ébranlées par l’exploitation de 4000 tonnes de bombes à bord d’un navire, on y découvrit un modeste trésor composé de quelque soixante lourdes pièces en or qui furent remises au musée national d’Alger.
Zarrougui Abdelhak                      


DES CENTAINES DE PERSONNES ONT BATTU LE PAVÉ HIER

Envoyé par Josiane
https://www.liberte-algerie.com/actualite/annaba-marche-de-nouveau-contre-le-5e-mandat-309946


 Est-Rpublicain.com - Par - 18/02/2019

Annaba marche de nouveau contre le 5ème mandat
Grandiose manifestation, hier, à Annaba, contre le 5e mandat.

           Reprenant comme un seul homme les slogans “La lil’ouhda lkhamsa !”, “Bouteflika ya l’marouki !”, “Fi Annaba makanche l’kachir !” et “FLN khaouana !”, les participants à ce meeting improvisé ont poursuivi leur manifestation de colère jusqu’à 16h avant de se disperser dans le calme.

           Le candidat Rachid Nekkaz a provoqué l’événement, hier, à Annaba, où il a eu droit à un véritable bain de foule, après avoir été pris à partie par une trentaine d’individus, qui l’ont insulté et brutalisé quelques minutes seulement après son arrivée sur le cours de la révolution. Le candidat à la candidature à la magistrature suprême n’a dû son salut qu’à l’intervention d’un groupe de jeunes, lesquels ont affronté et forcé à la fuite ses agresseurs, selon des témoins de la scène.
           Ces derniers affirment que les individus qui ont malmené Rachid Nekkaz sont des repris de justice notoirement connus à Annaba, dont certains sont proches du député Baha Eddine Tliba et qui ont pu agir à leur guise, allant jusqu’à lui arracher son téléphone portable, en l’absence de policiers à cet endroit.
           Accompagné par les jeunes qui ont volé à son secours, Nekkaz a pu ainsi se diriger vers le siège de l’APC d’Annaba, où un millier de personnes l’attendaient en scandant “Rachid Président !” et “Allahou Akbar Rachid Nekkaz !”. Porté à bout de bras par des sympathisants, l’hôte controversé de la ville côtière a eu droit à un court instant de triomphe.
           Des jeunes qui voient en lui l’homme providentiel, celui par qui le changement pourrait venir, l’ont assailli de questions sur son programme pour redresser la situation en Algérie. Parmi eux, il en est qui demandaient un travail, un logement ou de meilleures conditions de vie à Rachid Nekkaz sans même savoir s’il sera réellement candidat à la prochaine présidentielle.
           L’échange n’aura duré qu’une petite demi-heure en tout et pour tout, avant que la foule ne se désintéresse de lui et décide de profiter de ce rassemblement pour exprimer son rejet du cinquième mandat. Reprenant comme un seul homme les slogans “La lil’ouhda lkhamsa !”, “Bouteflika ya l’marouki !”, “Fi Annaba makanche l’kachir !” et “FLN khaouana !”, les participants à ce meeting improvisé ont poursuivi leur manifestation de colère jusqu’à 16h environ avant de se disperser dans le calme.
           On notera que, cette fois encore, les membres du service d’ordre présents en force sur les lieux, en majorité des policiers en civil, ne sont intervenus à aucun moment. Pas plus qu’ils n’ont eu à le faire, la veille, lors du match de qualification des quarts de finale de Coupe d’Algérie qui a opposé l’équipe locale, l’USM Annaba, à l’ES Sétif. D’aucuns ont, en effet, présagé le pire, de crainte que la vague de contestation de la prochaine élection, déjà exprimée à Annaba dans ce même chaudron, n’enflamme le stade du 19-Mai-1956 et ne soit l’occasion qu’attendent les casseurs pour s’adonner à des actes de vandalisme.
           Le résultat, plutôt avantageux pour les Diables rouges, a heureusement tempéré les ardeurs des supporters qui avaient commencé à reprendre des slogans hostiles au pouvoir et au Président sortant, et ce, dès l’entame de la partie.
A. Allia                      


MESSAGES
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APRÈS UNE TRÈS LONGUE ENQUÊTE, ILS ONT ENFIN TROUVÉ LES COUPABLES...
Envoyé par Bernadette

       L'enquête a été longue et difficile. Mais on a enfin réussi à identifier les odieux profiteurs suspectés de maintenir à peu près leur niveau de vie en période de crise. On les appelle des retraités. En fait, ce sont des paresseux qui, après 42 années d'activité, donnent un mauvais exemple aux jeunes sans emploi en jouant aux boules ou en réchauffant leurs rhumatismes au soleil.
       Il était donc grand temps d'imposer davantage leurs pensions. Ce rabotage de niche fiscale est d'autant plus urgent que, grâce au progrès de la médecine et de la chirurgie, ces séniors prétendent vivre de plus en plus longtemps sans se préoccuper de la santé de leurs caisses de retraites.
       Et puis, au moins est-on certain que, contrairement à d'autres contribuables plus valides et plus fortunés, ils ne battront pas en retraite pour fuir un pays où les technocrates de Bercy seront un jour les derniers actifs!... C'est vrai que la rumeur enfle de toute part : Ces salauds de retraités qui ont travaillé pendant les trente glorieuses, voilà de nouveaux bons boucs émissaires pour cracher au bassinet.
       Voilà une belle réforme pour la « France juste » que les guignols au pouvoir nous concoctent !... Bien fait pour leur pomme, d'avoir travaillé, cotisé et payé des impôts toute leur vie ! Diminuer leur "soi-disant" train de vie servira au moins à payer tous ces pauvres gens venus de l'extérieur pour faire valoir leurs "soi-disant" droits au pays des "droits de l'homme" ! Quel bonheur de vivre en France ....
Philippe BOUVARD



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Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».


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