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LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
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Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
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LE TEMPS PASSE...
Chers Amies, Chers Amis,
C'est toujours avec le même plaisir que je monte le numéro mensuel de la Seybouse. Aujourd'hui j'entame la 24éme année de cette Gazette qui est née le 1er novembre 2001.
La Seybouse a évolué dans son contenu et dans son volume, même si elle est restée dans un format simple et lisible pour tous, gratuite, sans fioriture et publicité commerciale pour en polluer la lecture.
Je profite pour remercier tous les contributeurs qui se sont succéder en saluant leur mémoire qu'ils soient décédés, malades ou devenus âgés. MERCI à TOUS.
(Vous pouvez lire l'édito du N° 100 pour en savoir plus)
Le 1er novembre a été un terrible réveil en 1954, avec le début officiel de la guerre civile d'Algérie qui a mené à son indépendance. Je dis début officiel car depuis les émeutes du 8 mai 1945, l'Algérie était plongée dans une guerre larvée comme l'appelaient les officiels avec des « incidents, des meurtres, des violences... des événements ». Peu de monde s'nquiétait de ce qui allait arriver par la suite. Ceux qui avaient ouvert les yeux, soit ils partaient, soit ils se manifestaient et on les appelait déjà « les activistes d'extrême droite. » La suite était l'Exil...
Tout ceci doit nous interpeller avec ce qui se passe actuellement en France...
Le triste spectacle que nous offrent actuellement certains hommes et femmes politiques à l'Assemblée Nationale comme devant les médias complaisants, ce spectacle est affligeant et n'augure rien de bon. Au contraire, la guerre civile larvée que nous connaissons depuis quelques années, va se transformer en véritable guerre avec de lourdes conséquences. J'espère ne pas le voir et revivre des cauchemars que j'ai réussi à enfouir sans les oublier. Mais nos petits enfants vont en subir les méfaits, ils devront se battre pour éviter un exil ou une soumission.
Ce 254ème Numéro ne doit pas faire oublier que nous sommes à la veille de la commémoration de tous nos morts et surtout de ceux resté au bled. Ayons une pensée très forte pour eux.
Je vous souhaite un bon mois et de bons moments à lire ce numéro.
Jean Pierre Bartolini
Diobône,
A tchao.
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Premier Novembre
Par Louis PORTALES
Echo de L'ORANIE N° 271
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Demain sera jour de Toussaint,
Pourtant déjà ce matin même,
Pour la plus part des citadins,
Ont acheté leurs chrysanthèmes.
Ils ont denudé les jardins,
Ils ont envahi les fleuristes,
Rien n'est assez beau, c'est certain
Pour ce grand jour, pourtant si triste.
Triste pour ceux, qui comme moi,
Ont laissé dans un cimetière,
De l'Oranais, de l'Algérois,
Un frère, un enfant ou un père.
Oui ! Bien triste sera demain.
Quand entre deux larmes qui tombent,
Ils verront amis et voisins
Fleurir avec entrain leurs tombes.
Combien seront, ceux qui en pleurs
Chez eux, se souviendront peut-être,
Des temps où ils portaient leurs fleurs
Sur le tombeau de quelqu'ancêtre?
Combien d'autres en commun
Iront prier dans une église
Pour un de leur parent défunt
Que leur amour immortalise.
Combien seront, ceux qui comme eux ;
Auront cœur lourd et âme en peine
Combien seront ? ces malheureux,
Sans aucun doute, des centaines !
Mais qui parmi les pèlerins ?
Mais qui parmi les indigènes ?
Pensera que ces êtres humains
Ont leurs morts en terre africaine!
Louis PORTALES
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….CAUSERIE ....
AU COIN D'UN JEU DE DAMES !
Envoyé par M. Georges Barbara
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- »O Ninette, attends arrête un peu de jouer y faut qu’j’te dis quèque chose….pourquoi te sais là à quoi j’ suis entrain d’penser tout d’un coup ?
- » Et Zeke, et oila y te rocommence,,,,, j’te ‘ois venir, o Tchoutche te t’la sens encore oujourd’hui à 90 ans ? A moi te vas m’la faire ? Mais par Saint Augustin les hommes vous avez qu’ça dans la tête diokiks ? .... Mais c’est pas possible ! C’est pire que le vers que les moutons y z’ont dans les cornes, adebon dis ça te démange ? Mamamille….Dieu préserve ! Te ‘ois pas le ciléma que ça serait pour te romettre tout ton magasin en route Diocane ?
- » Et non o la misère de tes osses, c’est pas ça qu’tu penses…Moi je pensais à note jeunesse, te sais quand on allait à la kermesse du basket d’l’ASB le sam’di soir?
- » A ouais et ben ?
- » Et ben arapelle toi quand te venais a’c cette grande djadour de ta cousine Lulu, que elle a commençait tout juste à te mettre les tétés !
- » Te ‘ois j’te disais te rotombes toujours t’sur la même chose ! Agas de mettre ta bouche au point mort et d’aller te faire soigner... va t’la piliancoule va !! Et pis parle un peu plus bas qu’les pt’tis enfants qu’y sont dans la chambre à coté y vont nous entendre !
- » Et non, ou catse y vont nous entendre, pour l’âme de tes morts, laisse moi qu’je continue belle… Et pis aousqu’il est le mal dans les paroles que j’te dis ?.
Te sais, je m’le ‘ois comme si c’était hier que y’avait l’orchestre de « Salvati-Istres » qui te jouait sans arrêt « Ya Moustafa, ya Moustafa ! »
- » Ah ouais ouais, je m’arappelle c‘est vrai, que tout l’monde y t’la chantait c’te chanson, « Cherie je t ‘aimeeeee, cherie je t’adoreeeee » Entre nous pour les chéris je t’aime et je t’adore qué connerie j’ai fait de te sortir a’c toi, quand te m’avais dit ça ! Enfin ouais c’est vrai, comme a l’était belle cette chanson Juju ! Et même qu’y z’avaient fait courir le bruit à Bône que c’était une chanson des arabes et qu’elle venait d’l’Egypte...te t’rends compte toi ? Y t’aramassent tout ceusse la. Y se croivent pas des fois non ? ….Ou c’est qu’y te connaissent la musique ces daindalons ! Y sont aussi capabes de dire que c’est eusses qu’y z’ont inventé les Kaldis au fromage non ? C’était une chanson à nouzote c’est sur !
- » Ouais mais eusses y z’avaient vite fait ...Alors que c’était un Tcha Tcha Tcha de chez nous que même que ça venait de Oran!...Enfin bon, Mais ça qu’je veux te dire c’est juste pour le soir où j’t’avais demandé de venir danser et que t’y étais attablée avec ton père et ta mère. . Et alors je t’le rovois encore comme si c’était hier , cet ugnorant de ton père y m’avait jété les yeux dessur diocane, y m’avait rogardé de travers, et y m’avait dit : « Just’ une danse o p’tit ...just’ une danse, et après agas que tu vas passer l’été où c’est que t’ya passé l’hiver ! Parce que pour les abonnements, ma Fi a l’est pas murte encore, hein ! Envales toi ça o fils !
»Même que moi j’étais resté axe et que j’savais plus quoi dire te t’arrapelles…. Je l’ai encore endevant mes yeux…..c’est comme si c’était oujourd’hui, j’avais les jambes qu’elles me tremblaient, com’ les carreaux d’ma salle à manger quand y te passe les calèches dans la rue t’sur les pavés ! Et que j’étais devenu rouge comme une galinette, ma pauvre !
- » Ah ouais, mais mon père c’était normal, ça c’était un père d’avant qu’y faisait entention à leurs enfants, il était com’ça ! A lui te sais, celui qui voulait lui mettre ya rhasra, et ben y fallait qu’’y se lève de bon matin ! A preusant t’ya qu’a ‘oir le bordel que c’est devenu ! T’ya pas vu, tous les oualiounes du quartier d’la colonne et ben y se mettent à la colle avant d’se marier...Y z’ont pas z’honte ? Et arreusent même que la Fi a l’a le ballon y z’ont le courage a’c le voile blanc de te passer à l’église, a’c la bénédiction du curé aussi par dessur le marché ! Et eusses ces curés de main’nan ces falsos, qu’y s’habillent même plus en curé….pour quate sous y te donneraient le bon dieu sans confection c’est sur !
- » A debon, c’est vrai que tes parents, michkines, après quand y vivaient a’c nous y z’etaient super diocane ! Et même je m’arapelle que ton père, quand ta pauvre mère a l’est morte, a’c sa p’t’ite retraite y se contentait de rien, et y nous glissait qu’à même du fade de temps en temps à la fin du mois ! Et pis ça qu’y me rovient, c’est le pt’tit jardin qu’y l’était à coté d’la place Marchis quand te rentres à la colonne. Je m’arrapelle à côté d’la porte y’avait toujours le photographe qui te demandait de faire une photo ! A nous y nous disait toujours « attation le p’tit oiseau y va sortir ! » Manadge lui et son p’tit oiseau. Encore te le cherche !
- « Et comment même que c’est là que je t’avais rogardé dans les yeux et qu’on s’était parlé pour la promière fois. Je l’avais dit à ma cousine Lulu : te sais cuila y pas des kilomètres qu’y me tourne darrière ! Et je m’étais pas trompée !
- » Ouais mais entre nous c’st pas tout’suite que te m’as parlé,
- » Te ‘ois, et ben c’était ça avant. Pas comme main’nan qu’y zont les internètes et les Face de boucs, alors quand on étaient timides comme moi c’était pas facile c’est sur.
- » Et dans le P’tit jardin o Fi, enttention que tu marches pas en desur l’herbe qu’y avait en d’sous les estatues ! Pourquoi y avait le gardien Meussieu Muscat, te sais çui là qu’y l’avait même perdu une jambe à la guerre, et qu’y l’a même plus rotrouvée. Com’y pouvait pas courir, le batard...y te jetait sa canne dessur pour te faire sauver !
- » Ah oui c’est vrai mais y courait pas vite le tsope et qu’y cats y l’aurait pu nous z’attraper ? Mais de ce temps moi j’avais pas comme main’nan des jambes à la six quate deux que je suis obligée de marcher a’c la canne diomadone ! Adebon je deviens vieux, et que j’ai quand je sorts la honte qu’y me monte à la fugure te sais !
- » Bah quest’ce que te racontes, t’es bien capabe pour aller te faire la causette le soir ac cette bande de falsos qu’y sont bons qu’à critiquer ton monde, là t’ya le feu au cul non ?
- » Et pis arrapelle toi au fond du p’tit jardin, y’avait un p’tit manège, que te pouvais monter dessur aouffe a’c les bons points qu’on te donnait à l’école sadi carnot quand te travaillais bien !
- » Arépette moi ça qu’tu viens de dire ? Quand te travailles bien à l’école ? Et zotche, alors t’ya pas du en faire beaucoup toi des tours de manège, que t’ya même pas ton cerfiticat d’étude !
- » Ouais mais ça fait rien à cause que le gardien du manège c’était le cousin germain d’la sœur de mon père, alors quand y’avait personne y me laissait monter dessur pour faire un tour….te ‘ois !
- » Je ‘ois ouais, je ‘ois que toute ta vie t’ya été un aoufiste. Et là main’nan te me sorts tes histoires du p’tit jardin, pourquoi te ‘ois que tu es entrain de perdre au jeu de dames ….Atso si te crois que j’suis une boujadi moi, et ben tu te mets le doigt dans l’oeil jusqu’à l’oreille ! Te me prends pas pour une tcheugade des fois non ? Va faire des cages c’est mieux, va. Et je te jure t’sur les osses de mes morts, que ce jeu de dames je vais te l‘enfermer, et pis ce soir quand te voudras te rechauffer tes pieds froids t’sur les miens, te pourras ap‘ler le gardien du manège du p’tit jardin que c’est le cousin germain d’la sœur a ton père….
- » C’est bon Ninette mais ça qu’je ‘ois c’est que même à prés de soixante dix ans de mariage...Le temps y t’a pas arrangée ! Alors toi et le jeu de dames que je t’avais fait cadeau pour tes quatre vingt sept ans vous pouvez vous le mettre à medze y gamba ….si vous voulez!
Georges Barbara, le 07 septemebre 2024
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Chronique du Bastion de France.
Envoyé par Jean-Claude PUGLISI.
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Histoires Anciennes d'un autre Temps.
Le TEMPS
« Le temps fait oublier, les douleurs, éteint les vengeances,
apaise la colère et étouffe la haine ;
alors le passé est comme s'il n'eût jamais existé. »
AVICENNE, De la connaissance.
1- L'infortuné bébé et ses deux mégères
C'était, il y a bien longtemps à La Calle et nous étions en hiver. La nature avait pris un air de deuil et le village somnolait dans l'attente de la venue du printemps. Le temps passa sans faire d'histoire, mais, celle que je vais vous raconter, dépasse l'entendement et ne manquera pas de venir scandaliser le petit peuple Callois, qui, n'avait jamais pu assister à des faits aussi graves, lesquels, relèvent de l'horreur et de la stupéfaction, qui, ont plongé toute la population, dans la surprise d'abord, puis, dans la colère.
C'était une après-midi pluvieuse et bien triste et cependant ce jour-là, du côté de la grande plage, déserte en cette période de l'année, vaquait un petit berger arabe qui gardait des chèvres. Il s'était assis confortablement à l'abri du vent, qui soufflait à ce moment-là et il laissait aller ses pensées juvéniles vers d'autres cieux.
Au bout d'un moment, son attention fut attirée, par l'arrivée de deux femmes européennes pas très loin de lui. L'une portait dans ses bras, quelque chose qui faisait un bruit étrange, alors que l'autre, s'était mise à creuser un trou avec une pelle. Le petit berger regardait discrètement du côté de ces deux femmes, qui, manifestement, paraissaient inquiètes et avaient sûrement hâte de terminer une tâche singulière, ce qui finit par intriguer de plus en plus le jeune garçon.
Puis, tout d'un coup, elles installèrent le petit paquet vagissant dans le trou et le recouvrirent de terre. Leur tâche étant terminée, elles devaient s'empresser de prendre la fuite, sans regarder derrière elles. Après un moment d'hésitation et poussé par la curiosité, le jeune garçon se rendit sur les lieux et se mit à déblayer la terre qui recouvrait le trou et là, sa surprise fut immense, car, il devait retirer, un bébé qui était en train de mourir.
Abandonnant ses chèvres, il devait se rendre à la gendarmerie de La Calle, emportant le bébé dans ses bras, pour s'en aller tout raconter aux gendarmes.
Les indications données par le petit berger, ont permis d'arrêter et d'incarcérer les deux femmes. Quant au bébé, il devait succomber à une asphyxie, qu'il a subi un moment dans le trou recouvert de terre.
La justice condamna l'une des femmes à la prison, l'autre fut relaxée ce qui devait à juste titre scandaliser les Callois. L'enquête révéla que la jeune-fille de la principale coupable, avait eu des relations intimes avec un jeune militaire et s'étant retrouvée enceinte, sa mère a attendu qu'elle accouche en secret, pour ensuite monter un projet machiavélique avec sa soeur, celui, d'aller enterrer le pauvre bébé, dans un endroit qu'elles pensaient isolé et où personne ne pouvait les voir à l'oeuvre.
Mais, le petit berger était là, un peu comme Cain qui regardait dans la tombe.
Par charité chrétienne, je ne révèlerai pas les noms de ces assassins, qui, depuis longtemps déjà, ont quitté ce monde et j'espère qu'ils ont dû recevoir du bon Dieu l'accueil qui leur convenait
2- Un vagissement dans la nuit
C'était un vilain soir d'hiver et le village était plongé dans le noir. Il tombait une petite pluie fine et régulière et le vent qui s'était levé n'arrêtait pas de souffler Tout était calme dans les quartiers, mis à part, le bruit de la mer en furie, qui se brisait avec fracas dans les rochers du Lion. Comme toutes les nuits, deux de nos agents police locaux étaient de service et avaient entamé leur tournée d'inspection nocturne, par les rues bien sombres de La Calle. A cette époque, rien n'était à déplorer et le village accusait une absolue tranquillité.
Nos deux agents, après avoir rendu comme de coutume, l'habituelle visite aux boulangers du village et consommer en passant, du pain tout chaud sorti du four, prirent du souci en s'en allant tranquillement, arpenter les rues et quartiers de la cité. Ils étaient chaudement vêtus et le village calme et tranquille, aussi, cette tournée d'inspection, était pour eux une promenade nocturne où, chemin faisant, chacun se racontait des histoires personnelles et parlait des racontars et qu'en dira-t-on de la cité.
Alors qu'ils étaient arrivés près de la balustrade ouest du cours Barris, tout à coup, ils s'arrêtèrent, interdits, car, un bruit bizarre, qui venait du côté petit plage devait les appréhender. Recherchant d'où pouvait venir ce bruit, qu'il identifièrent enfin comme le vagissement d'un bébé, ils se précipitèrent au bas du parapet où, ils devait découvrir un pauvre bébé tout nu, avec encore le cordon ombilical qui pendait. Pendant que l'un des agents, gardait le bébé au chaud contre lui, l'autre était aller chercher du secours.
Le bébé fut confié à l'hôpital communal, mais, hélas ! Il ne devait pas survivre, car, combien de temps, était-il resté là tout nu et en plein froid ?
Une enquête officielle eue lieue, mais elle ne donna aucun résultat, cependant, dans le quartier les langues se délièrent et on incrimina dans les chaumières, la fille aînée de la voisine du 2°, qui était de petite taille et très grosse, au point qu'elle aurait pu cacher une grossesse, ce qui ne fut jamais prouvé, ce qui me laisse bien rêveur aujourd'hui.
3- C'était une dénommée Nana bien particulière
Qui n'a pas connu - une Nana dite la folle ? Naturellement, je me garderai bien d'indiquer son nom et adresse Calloise, même, si aujourd'hui, Nana et les siens sont partis vers le Seigneur.
Mais, pourquoi évoquer Nana la folle, me direz-vous avec juste raison d'ailleurs. Tout simplement pour vous conter « les exploits » de cette personne, qui fit souvent parler d'elle dans notre cité.
Elle habitait au 2ème étage d'un immeuble, sis, la rue de Corailleurs et qu'on me permet d'être discret et de ne pas en dire davantage. Cette Nana faisait partie d'une fratrie de 3 enfants, dont, deux filles et un garçon où, elle occupait la deuxième place. Son père Vincent, était un ancien marin-pêcheur à la retraite et sa mère Angeline s'occupait du foyer. Célibataire, elle vivait chez ses parents, alors que sa soeur aînée était partie habiter Constantine après son mariage, elle fut rejointe rapidement par son frère Lolo. On ne les reverra jamais plus à La Calle, tant ils avaient honte du comportement de Nana et de ses parents.
Nana devait avoir autour de 22 / 25 ans en 1945, lorsqu'elle commença à se faire remarquer par les gens du village. Pendant la guerre, elle annonça dans la maison à qui voulait l'entendre, qu'une distribution de boules de pain avait lieue, au marché couvert par les alliés, notamment les noirs Américains. Pétronille ma grand-mère Sicilienne, se rendit un jour au marché pour essayer de récupérer un peu de pain et chemin faisant, elle aperçut alors Nana qui tapie dans un coin du marché, s'embrassait à pleine bouche avec les Américains noirs.
C'est la honte au visage, que Pétronille quitta précipitamment les lieux, ayant compris le manège qu'utilisait Nana pour récupérer du pain.
Puis, la guerre terminée, Nana commença à batifoler avec un dénommé Mokhtar, un sympathique commerçant du village. Manifestement, elle était devenue sa maîtresse, moyennant quelques marchandises qu'il lui offrait généreusement. Quelque temps après, Nana devait mettre au monde, une petite fille à l'hôpital communal. Elle abandonna cet enfant dés sa naissance et sans honte et sans rien, rentra chez ses parents, le coeur léger et l'âme pure, comme si rien ne s'était passé. Puis, elle continua de plus belle à fréquenter Mokhtar, qui se la « carambolait » dans l'arrière-boutique de son magasin.
Cependant, Mokhtar devait un jour en avoir assez, de fréquenter, une femme laide qui était grosse au possible et de petite taille. Il tenta alors de l'éloigner, mais, c'était mal connaître Nana, qui, régulièrement, allait lui faire honte par des scènes violentes, en présence de tous ses clients. Mais, ce qui devait arriver, arriva, car, un matin Nana se présenta au magasin et recommença à l'insulter vivement, comme elle avait coutume de le faire. Cette fois-là, Mokhtar vit rouge et se saisit d'une lourde "Dabouze" et poursuivit Nana qui s'était vite enfuie, pour aller se réfugier dans la boutique des frères Pépé. Mokhtar devait la pister jusque dans une chambre où, elle s'était réfugiée pensant être à l'abri et là ! le bal devait commencer à la Dabouze, laquelle, dans le feu de l'action devait massacrer Nana, mais, également causer des dégâts dans toute la pièce. C'est ensanglantée qu'elle fut admise à l'hôpital où, Angèle l'infirmière lui donna ses soins. Dans les jours qui suivirent au sein de la maison, lorsque Nana descendait de chez elle, accoutrée de tous ses pansements, on riait sous cape en disant que - s'était le papa noël qui passait.
Dans cette famille, il se faisait un malin plaisir, d'importuner les voisins en particulier mes parents. Chaque fois qu'ils en avaient l'occasion c'était de nous faire scandale, soit, devant notre porte, que l'on trouvait le matin envahi de gros sel, qui, manifestement, avait été répandu dans le but de nous porter malheur, alors que c'était tout le contraire - nous disait Mme Raïs notre voisine - soit, des invectives, qui étaient lancées de leur fenêtre, qui donnait directement dans la cour. Combien de temps ce manège devait continuer ? Je ne m'en souviens pas, mais, sûrement assez longtemps...
Un beau jour, je me souviens, nous devions être au printemps et ma mère comme de coutume, avait sorti de ses placards le linge et les couvertures, afin de les battre pour les dépoussiérer. Elle avait installé sur le palier un cordeau pour les pendre et à l'aide d'un manche à balai, elle s'était mise consciencieusement à les battre. Soudain, Nana arriva et comme nous habitions au 1°, elle fut contrainte de passer près de ma mère. Alors, mal intentionnée, elle s'arrêta et commença par l'insulter. Il faut dire que ma mère, était une femme paisible qui ne voulait pas d'histoire. Cependant, ce jour-là, ses chromosomes Siciliens firent le reste et la mirent dans un état d'énervement extrême. Elle coinça Nana dans un coin et la roua à coups de manche à balai. Elle frappait sans ne jamais s'arrêter et Nana criait à révolutionner la maison. Ma grand-mère qui venait de laver son parterre, sortie le seau rempli d'eau sale avec son chiffon de parterre et s'en alla coiffer Nana avec. A ce moment-là, la mère en entendant les cris de sa fille descendit rapidement, mais, Pétronille l'attendait de pied ferme, avec dans une main un parapluie et de l'autre un nerf de boeuf et elle se mit à lui donner une sacrée correction, dont, elle se souviendra, puisque, à la suite de cet incident ils cessèrent d'importuner mes parents...
Mais, Nana et les siens, n'avaient pas encore rendu les armes, car, rapidement, ils se mirent en demeure, d'aller chercher des noises à la famille Sultana, qui logeait juste en dessous de chez-eux. Un beau jour excédés par les insultes, Henriette, la fille aînée, furieuse monta au 2° étage pour régler leur compte. Nana et sa mère, s'étaient renfermées à double tour, mais, Henriette furieuse, fit sauter un panneau de leur porte, par lequel apparaissait un frottoir qui était sensé défendre la place. En bas, M. Sultana, criait à sa femme de lui donner son revolver, décidément, la chose était en train de très mal tourner pour Nana et sa mère. Enfin, lorsque revint le calme, à partir de ce jour les Sultana ne furent plus ennuyés.
On n'entendit plus parler de cette famille, cependant, il arrivait lors d'une matinée ensoleillée, qu'on entende chanter Nana à gorge déployée, près de sa fenêtre grande ouverte. Peut-être voulait-elle séduire, Jeannot Aquilina, dont les fenêtres étaient mitoyennes ? Je me souviens de l'une de ses chansons, qui disait : « Dans un tango, mystérieux, dans un tango, tango d'adieu. Je veux te voir et te serrer contre mon corps. Dans un tango mystérieux.»
J'ai eu un jour la surprise, d'entendre cette chanson à la radio, ce qui m'a fait penser à Nana la folle.
Mais, Nana, n'avait pas encore fini de faire des siennes. Un beau jour, le juge du village eu la mauvaise idée, de l'employer comme femme de ménage. Rapidement, Nana fit courir le bruit, que M. le Juge était son amant, à tel point, que son père Vincent, lorsqu'il était assis sur le Cours Barris face à la mairie, il claironnait haut et fort et en Italien à qui voulait l'entendre, en désignant du doigt l'appartement situé au-dessus du tribunal : « ça, c'est le palace de ma fille ! » Apparemment, il se voyait déjà le beau-père de M. le Juge... Tout cela se termina par le licenciement de Nana, laquelle, pour se venger, se mit à chercher querelle à l'épouse du Juge, qui n'était autre que la fille de l'Administrateur. C'est alors que Nana fut condamner à la prison ferme, mais, à ce moment là, les choses se passaient paisiblement et Nana qui évitait de sortir de chez-elle et ne fut pas importunée.
Cependant, par un début d'après-midi ensoleillé, Nana et sa mère décidèrent d'aller faire un petit tour. Ce qui n'échappa pas à Pétronille ma grand-mère, qui couru au Commissariat signaler que Nana était sortie et qu'il fallait l'arrêter, afin qu'elle puisse purger sa peine de prison. Deux gendarmes dont Yen-Yen Cardenti, devait l'interpeller et l'emmener à la prison de La Calle où, elle purgea sa peine.
A partir de ce jour, Nana et sa mère se firent discrètes. De temps à autre on entendait des éclats de voix venant de l'étage où, une autre Nana Costanzo, qui ne se laissait pas faire, ruait dans les brancards et les remettait à leur place.
Nana et sa famille ? que sont-ils devenus à l'indépendance. J'ai su par José Buongiono l'un de leur neveu et cousin, qu'ils s'étaient rapatriés à Sète où, ils devaient finir leur vie.
Voilà l'histoire bien compliquée de Nana et de sa mère. Quant au père, il était également bien malfaisant et donnait toujours raison à sa fille. Une fois, alors qu'il s'expliquait vertement avec le Commissaire Guignard, il s'emporta et lui donna un violent coup de poing sur son képi, qui devait proprement s'aplatir comme une galette. Mais, là encore une fois, on lui donna l'absolution.
C'était cela La Calle à la belle époque.
4- Cap'tain Gennaro le marin
Je voudrais évoquer aujourd'hui, un personnage particulier qui à illuminé toute ma jeunesse Calloise, mais, aussi, que j'ai toujours considéré, qu'à lui tout seul il représentait - La Calle avec ses murs et tout son peuple.
C'était Gennaro le marin !
Marin pêcheur de son état, il entra dés l'âge de 14 ans en qualité de mousse, dans ce beau métier qu'il affectionna toute sa vie. Mais son ambition et ses capacités, le firent monter jusqu'au sommet de la profession, puisqu'il devint Capitaine de Chalutiers au cours des années qui suivirent.
De taille modeste, avec une peau basanée par le soleil. Il présentait un corps musclé et bien harmonieux taillé sur mesure. C'était, dirons-nous, un bel homme dans toute la splendeur de sa jeunesse. Mais, ce que je voudrais surtout mettre en valeur, c'est son caractère particulier et très appréciable par tous ceux qui l'entouraient Il était rigolard et prêt à participer, à tout ce qui était organisé dans la cité. Il ne pouvait pas se passer une seule manifestation, une seule fête, un seul rassemblement, un seul bal... Sans qu'il ne soit de la partie. C'était, dirons-nous, un sacré boute en train, toujours entouré d'amis et de relations, avec qui il entretenait des rapports très cordiaux et amicaux.
C'était il faut le dire, « un vrai petit Callois » dans toute sa splendeur.
Mais évoquons un instant, quelques-unes des anecdotes qui s'attachent à Gennaro.
Lorsqu'il était jeune mousse embarqué à bord d'un chalutier, il est arrivé en jour lors de la rentrée des bateaux, que l'interphone reliant la cabine de pilotage avec les machines tombe en panne. Le navire rentrant au port, on se posait la question de savoir, comment communiquer avec le mécanicien ? Le Capitaine pensa alors à son petit mousse et le fit installer au niveau de l'ouverture des machines, ce qui permettait au Capitaine de donner des ordres à la machine, par l'intermédiaire du petit mousse, qui répétait comme un perroquet les mots du Capitaine. Oui, mais, voilà ! Gennaro était bègue de naissance, ce qui ne l'handicapait nullement. Mais, dans le rôle de relais, qui, lui avait été attribué, pour transmettre les ordres du Capitaine, les choses ne devaient pas se passer de la meilleure des façons : arrivé à quai, le Capitaine cria, « en avant doucement » et Gennaro bien attentif, répéta en bégayant : « en - en - en avant doucement !», puis, un nouvel ordre fusa de la cabine de pilotage : « en arrière doucement », ce que devait répété le mousse en bégayant de plus bel. Au bout d'un moment, le mécanicien qui n'arrivait plus à suivre le langage du mousse, fit un « avant doucement » alors qu'il s'agissait plutôt de faire « en arrière doucement » et c'est ainsi que par les bégaiements du jeune garçon, ce jour-là, le chalutier heurta les quais, sans occasionner bien heureusement de dégâts matériels.
Gennaro ayant grandi en âge, donc devenu adulte, il devait tout naturellement grimper dans l'échelle sociale et finir un jour par se retrouver Capitaine de chalutier. Des fonctions qu'il a toujours exercées, avec beaucoup de conscience professionnelle et de talent. A cette époque la pêche était devenue lucrative, contrairement aux temps pas très anciens où, les marins-pêcheurs vivaient presque misérablement. Notre Capitaine avait délaissé ses anciens vêtements qu'il portait autrefois, pour se vêtir d'une façon élégante et raffinée. Il ne s'interdisait rien et s'achetait des chaussures dernier cri à Bône chez Bailly, des vestes et des pantalons de prix, dans la boutique du Mozabite Thalaï...
Puis, un beau jour, il pensa à s'acheter une belle voiture toute neuve, pour jouer au jeune premier et surtout, se faire remarquer par les demoiselles du pays. Il avait les moyens financiers de le faire, mais, cependant, un problème important venait le perturber. Gennaro, n'avait pas de permis de conduire et sans ce permis, impossible de réaliser son rêve d'avoir une voiture à lui. Alors ne sachant que faire, il en parla autour de lui à qui voulait l'entendre. Au moment où, il se désespérait de ne pouvoir acquérir sa voiture, du fait qu'il n'était pas en possession d'un permis de conduire, une voix amie se fit entendre, pour lui proposer d'être son chauffeur, en attendant qu'il puisse passer son permis, ce qu'il accepta avec joie et se précipita immédiatement à Bône, en compagnie de l'ami René Arnaud, pour s'en aller commander son véhicule dans une concession automobile. Monsieur, ne regarda pas à la dépense, car, il devait se payer une superbe voiture, dotée de tous les équipements modernes...
Voilà, comment un beau jour, il fit une entrée triomphale à La Calle, en compagnie de René Arnaud son chauffeur particulier, qui devait fidèlement le servir un bon bout de temps, dans l'attente de l'obtention du permis de conduire par Gennaro.
Comme je l'ai déjà dit, Gennaro était un homme sérieux et travailleur et l'argent qu'il gagnait était bien mérité. Cependant, dés le soir, alors qu'il finissait sa journée, il avait l'habitude de se mettre de propre et se vêtir comme un milord, avant d'aller retrouver sa bande de copains, sur le Cours Barris à la terrasse « des Palmiers » où, il se plaisait de se retrouver un peu en famille. Mais, Gennaro aimait aussi faire la fête et cela sans compter. C'est ainsi, qu'il était présent dans tous les bals, qu'ils soient donnés au Marché, au RCLC des petits quais, sur la place de la mairie, sur le Cours face aux Palmiers... Il était devenu un danseur émérite, à force d'aller traîner ses pieds dans tous les bals de la cité, qui, le plus souvent, tiraient les rideaux très tard, ce qui ne le dérangeait nullement, puisqu'il rentrait chez lui pour se dévêtir et mettre son bleu de chauffe, ainsi, le voilà reparti pour prendre la barre de son chalutier. Un jour il devait me confier, que dés la sortie du port, alors que tout l'équipage dormait, il prenait le cap, puis, sans façon, il se tapait un bon roupillon, pour récupérer les pas de danse qu'il avait fait.
Puisque je parle des bals, je vais vous conter, ce qu'il est arrivé un jour au cours d'un célèbre bal du marché où, les Callois devaient affronter à coups de citron, des hordes de légionnaires enragés. Tout cela à cause d'une belle plante de chez-nous, qui, ne cessait de refuser, de faire une danse avec un brave légionnaire, car, il faut le dire, son coeur était déjà pris par un certain Pierrot + de la presqu'île. A force de refuser de danser avec lui, à moment donné, le légionnaire l'entraîna de force sur la piste de danse et alors qu'elle se débattait son Pierrot vint à son secours, mais, le légionnaire quelque peu énervé, avait la poigne dure et bouscula vigoureusement l'amoureux. Gennaro, se mit au milieu en disant au légionnaire, que mademoiselle était sa fiancée. Mais, devant un robuste soldat, Gennaro s'en alla valdinguer et tomba de sa hauteur sur la piste de danse, ce qui mit le feu aux poudres parmi les Callois présents.
Alors commencèrent les hostilités, les légionnaires en rangs serrés attaquèrent, mais, la riposte ne se fit pas attendre et durant un bon moment catsottes et coups de citron, devaient pleuvoir sur la tête des soldats. L'intervention de la police militaire mit fin aux pugilats, mais, le lendemain, un bal devait de nouveau avoir lieu et manifestement les légionnaires, qui n'avaient pas encore digérés des évènements de la veille, semblaient être prêts à recommencer la bagarre. Ils postèrent dehors quelques hommes, dont un colosse Russe à la mine rébarbative, qui semblait dévisager ceux qui entrait dans le bal. Arriva alors, le coquet Gennaro, nippé comme un prince et alors qu'il n'avait pas encore franchi l'entrée, le grand Russe et ses hommes foncèrent sur lui, avec des intentions plus que malveillantes - mais, pour quelles raisons ?
Et bien je vais vous le dire : la veille au cours de la soirée mouvementée, Gaston +, un Callois de bien mauvais caractère, s'était emparé d'un tabouret et ce faisant, avait proprement assommé bon nombre de légionnaires et ça voyez-vous, les soldats ne l'avaient pas oublié... Mais, pourquoi alors s'en prendre à Gennaro ? Et bien tout simplement, parce que, Gaston l'assommeur des légions, avait la même corpulence, le même aspect que Gennaro, voilà pourquoi le Russe et ses coreligionnaires, voulurent se saisir de lui et le bastonner. Voyant le danger, Gennaro fit marche arrière et fonça en direction de la presqu'île, poursuivi par une meute de soldats. Alors q'ils s'apprêtaient à le rattraper, du côté école des filles il vira à droite, pour aller se réfugier en criant à gorge déployée, dans le couloir de la famille Maïsto, lesquels, pistolets à la main firent déguerpir les légionnaires...
C'était Gennaro, un soir au bal du marché.
Le temps passa et les événement d'Algérie faisaient rage. Mais, bien heureusement, La Calle a toujours été tranquille et la vie devait continuer presque normalement. Pour Gennaro, il continua à vaquer à ses occupations et à jouir de la vie. Les copains de son âge s'étant tous mariés, Gennaro n'eut aucun problème pour les remplacer, car, il dirigea ses pas, vers la génération montante où, il fut accueilli comme un grand frère. Ce fut alors le temps des surprises-parties, qu'il honorait sans discuter et avec un grand plaisir et le temps passa. Un beau jour, il nous annonça qu'il voulait se fiancer avec la jolie petite Irène Russo, qui était bien plus jeune que lui, alors, il ne fit ni une, ni deux, et demanda sa main au père, lequel, lui demanda d'attendre encore un an, car sa fille était bien trop jeune. Alors, il se rangea et ne quitta plus le « José Bar » tenu par Jeannot Russo où, il pouvait côtoyer sa petite Irène tous les soirs. En compagnie de la famille, il l'emmenait danser au bal du marché, mais, toujours sous la surveillance discrète des parents, qui, néanmoins, gardaient un oeil bien ouvert sur le couple. Lorsque enfin une année s'est écoulée, Gennaro convola en justes noces avec Irène et ce jour-là, fut fêté presque par toute La Calle, tant le marié était populaire et très estimé dans la cité.
Puis, ce fut l'indépendance où, Gennaro pensa à quitter son pays - le coeur bien gros... Il devait s'installer à Port-la-Nouvelle, comme la plupart des marins-pêcheurs Callois et je dois dire, qu'il a bien réussi sa vie professionnelle, car, au bout de quelques années, il acquit 3 chalutiers en pleine propriété, avec lesquels il écuma les fonds marins du secteur de la Nouvelle. Au bout de quelques années, il tenta de partir en Afrique afin de réaliser de beaux bénéfices, mais ce projet échoua au bout de 3 ans, car, les autorités locales ne faisaient que lui poser des problèmes. Alors, il prit le chemin du retour pour regagner Port-la-Nouvelle où, il resta jusqu'à sa retraite. Néanmoins, il continua à faire des remplacements de Capitaine, sur les chalutiers du coin et lorsqu'il était parfois sans activité, tous les soirs, il était présent à la rentrée des chalutiers.
Aujourd'hui, il coule une vieillesse que je pense heureuse, bien qu'il ait, hélas ! divorcé avec son épouse Irène. Mais, il a gardé toujours ce tempérament de noceur, aimant la fête, les copains, les bals où, il danse très peu, compte tenu, de problèmes articulaires aux membres inférieurs. Mais, il chante toujours, notamment, sa chanson fétiche, qu'il a lui-même composé, intitulée « Monsieur le Caïd du Lac Oubéïra » !
Ainsi, se termine mon histoire, qui parle d'un personnage haut en couleur, qui pour moi représente La Calle dans toute sa splendeur.
Monsieur Janvier OLIVIERI
Qu'il puisse trouver dans mon récit, le témoignage de toute mon affection fraternelle à son égard.
Maintenant qu'il n'est plus de ce monde, demandons au Seigneur notre Dieu, de lui donner le repos éternel qu'il mérite.
5- Titin aimait la limonade
Qui était Titin ? Imaginez un homme d'âge moyen, mince, grand et pas trop mal de sa personne, qui parlait beaucoup avec les mains, en faisant toujours de grands gestes. Il monopolisait toutes les conversations, en prenant la parole, sans laisser aux autres le temps de dire un mot. On l'aurait presque pris pour un révolutionnaire tant il avait de la verve. Au fond, c'était un brave homme, qui s'imposait certes avec tous ses semblables, mais, lorsqu'il était de retour chez-lui, alors là, il se faisait tout petit et baissait la tête, devant son épouse qui était une maîtresse femme et qui le secouait souvent même s'il ne le méritait pas.
C'était cela Titin, un lion à l'extérieur de chez-lui et un brave couillon à l'intérieur.
Titin, était marin-pêcheur, un métier qu'il avait hérité de ses ancêtres et qu'il exerçait avec passion. Il était d'ailleurs devenu un excellent Capitaine de chalutier, mais, ce qui le caractérisait et amusait son équipage, c'est que Titin craignait la mauvaise mer qui le rendait malade, dés que le temps tournait à la tempête. Ce qui faisait bien rire sous la barbe tout son équipage, lorsqu'ils le voyaient « dégueuler » par-dessus bord, dès les premières vagues. Cependant, c'était un bon et gentil capitaine, qui, assurait les manoeuvres de son navire, avec habileté et une grande compétence. Parmi ses hommes et connaissances, on ne peut dire que Titin avait des ennemies. Bien au contraire, il jouissait d'une parfaite estime de tous les marins-pêcheurs de La Calle.
Que je vous conte une petite anecdote : nous étions en été et les chalutiers sortaient très tôt le matin, pour se rendre sur les lieux de pêche, lesquels, à cette période de l'année se faisait « au large ». Pendant le trajet, les marins se reposaient dans leurs couchette et seul Titin restait bien éveillé à la barre du chalutier, puis, arrivé à destination, le jour s'étant levé tout le monde fut sur le pont, pour jeter les filets à l'eau et vaquer aux occupations habituelles sur le bateau. La matinée était très chaude et ce jour-là, l'un des marins arabe du nom de Youcef Merdacci, avait emmené avec lui une bouteille de limonade, qu'il avait mis à rafraîchir dans la réserve de glace. Ainsi, de temps à autre tenaillé par la soif, il allait boire quelques bonnes gorgées du frais breuvage, puis, il retournait à ses occupations.
Mais, mystérieusement, Merdacci s'aperçut que le niveau de sa bouteille ne faisait que diminuer, alors qu'il faisait tout, pour essayer de faire durer sa limonade. Manifestement, quelqu'un avait repéré la bouteille et allait en catimini se servir. Merdacci se mit à surveiller les allées et venues de l'équipage, lequel, ne s'approchait jamais, de l'endroit où gisait la bouteille de limonade. Après un long moment, il vit Titin, descendre de sa cabine de pilotage et comme si rien n'était, se diriger du côté limonade, pour boire discrètement un bon coup, puis, regagner sans se presser la cabine. Il est arrivé un moment où, Merdacci se rendit compte, que Titin était en train de lui lamper sa bouteille et se promit de lui jouer un mauvais tour. Il restait près de 4 doigts de limonade, qu'il s'empressa de boire et compléta la bouteille avec de l'eau de mer. Au bout d'un moment, Titin, mine de rien, sorti de la cabine de pilotage et se dirigea vers l'endroit où, se trouvait la bonne bouteille de limonade. Un moment il regarda à droite et à gauche, avant de se saisir discrètement de la bouteille et se rua sur le goulot pour en boire une belle rasade, qu'il recracha immédiatement en ronchonnant de plus belle, alors que dans son coin Merdaci le marin, heureux d'avoir jouer un bon tour au capitaine, se tenait le ventre de rire.
Autre petite histoire vécue par mes soins
Un dimanche matin d'été, nous étions avec les frères Alain + et René Arnaud, en train de faire les oursins tout près de la pointe du chacal. L'eau était d'une clarté extraordinaire et on apercevait des bancs de marbrés, qui évoluaient lentement presque sous nos pieds. Alors que nous regrettions, de ne pas avoir emporté nos fusils harpons, qui nous auraient permis de faire une bonne pêche, nous aperçûmes alors un bateau, qui lentement s'approchait de nous. Nous n'avions pas eu de peine, de reconnaître Titin qui nous interpella, pour nous demander s'il y avait du poisson dans le secteur. Nous devions lui dire innocemment, que le fond était rempli de marbrés et alors il nous demanda de l'aider à poser ses filets, ce que nous fîmes consciencieusement durant un bon moment. Les bancs de poissons étant bien entourés par les filets, Titin nous demanda de faire du bruit, afin que les poissons puissent se laisser prendre. C'est ce que nos fîmes, taper des pieds, plonger ça et là, pour les effrayer et les amener jusqu'aux filets.
Pour Titin, ce jour-là, la pêche fut très fructueuse et il devait embarquer, quelques bons kilogrammes de jolis marbrés - sur le pont de son canot. De notre côté on se frottait les mains, en se disant que nous avions notre part dans cette belle pêche, mais, soudain, Titin mis le moteur en marche et s'empressa de se sauver sans même nous dire merci. Aujourd'hui, je me demande pourquoi a-t-il agit ainsi ? Alors que brave et honnête homme, nous n'avions pas compris sa façon de faire. Mais, maintenant, je crois le savoir en partie : Titin avait déjà eu des démêlés avec les services des douanes, lesquels, un jour lui ont saisi ses filets, parce qu'il pêchait trop près des côtes. Ce jour-là, a-t-il craint d'être une fois de plus repéré par les douaniers et se faire une fois de plus retirer ses filets ? Peut-être bien, mais, je pense également, qu'il a voulu garder pour lui tout seul, la pêche que grâce à nous il avait pu faire.
Anecdote racontée par mon ami Claude Desjardins
Titin était le père de 3 enfants = Paul, l'aîné - Roselyne, la cadette et Guylaine, la dernière. Ils étaient tous les trois scolarisés et travaillaient bien à l'école. Paul, avait toujours de très bons résultats scolaires et un jour il passa le Brevet élémentaire.
Un matin, Titin son père, était assis aux petits-quais en train de remailler un filet et Paul devait le rejoindre, pour lui parler de la façon dont s'était déroulé l'examen du Brevet. Il devait se faisant, lui indiquer les différentes questions qui lui furent posées, notamment l'une d'elle où il avait brillé, mais, dont il n'était pas si sûr d'avoir bien répondu. Il dit alors à son père, tu vois papa, c'était un sujet « bateau » et pourtant je ne crois pas l'avoir bien traité !
Titin se mit alors dans une colère noire et disputa son fils en criant, « comment, toi, le fils d'un pêcheur, tu n'as pas bien répondu à la question sur les bateaux, pourtant, moi ton père, j'ai un bateau et ça tu aurais dû bien le savoir.» Le pauvre Paul, devait alors avoir beaucoup de mal, pour faire comprendre à son père ce qu'il entendait par « un sujet bateau ! »
Titin a-t-il enfin compris les explication de Paul son fils ? Qu'il me soit permis d'en douter aujourd'hui.
C'était cela Titin, un grand escogriffe qui parlait beaucoup, mais, qui perdait de sa verve devant sa femme.
C'était, Monsieur Antoine COSTANZO +, alias Titin - un Capitaine du Bastion de France.
Au terme de ces récits, j'ai voulu faire appel, à des souvenirs très anciens et qui ne datent pas seulement d'hier.
J'ai tenté de raconter à ma façon, certains faits qui se sont autrefois déroulés au Bastion de France, sans aucune moquerie et surtout, sans jeter l'opprobre sur qui que ce fut.
J'ai toujours en fin d'article, nommé, tous les intervenants à ces histoires vraies, dans la mesure où, ces personnes, sont parties de ce monde il y a déjà quelques années.
Cependant, je n'ai pas révélé, les identités des deux sinistres femmes, qui ont commis ce crime effroyable, envers un innocent petit nourrisson, car, elles faisaient partie d'une famille bien connue de La Calle.
Que ces quelques lignes, puissent un moment, vous ramener chez-nous à La Calle - c'est ce que je souhaite humblement.
Jean-Claude PUGLISI
de La Calle de France.
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage.
( Fait à Hyères - 83400 -, le 12 Août 2018 )
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LA PROVINCE DE CONSTANTINE
Par Hubert CATALDO
ACEP-ENSEMBLE N° 282
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LES MINES
Le 3 mars 1843, Henri FOURNEL débarque en Algérie avec mission de Gouvernement de prospecter les ressources minières du pays.
Dans la région de BONE, les Algériens exploitaient déjà une mine d'antimoine (Kohl) à usage de fard et les mines de fer d'Aïn Mokra, des Karézas, de la Meboubja et de Bou Hamra.
En 1845, malgré les réticences du Maréchal Bugeaud, Commandant en Chef en Algérie, des concessions sont accordées à Jules TALABOT pour Aïn Mokra, au Marquis de BASSANO. Pour la Meboubja (fer) et pour l'arsenic à Charles GIRARD qui rétrocède ses droits à Léon TALABOT (il semble bien d'ailleurs, que ces hommes soient restés associés de fait un bon moment avant de fonder le Mokta).
MM. de BASSANO et de SOLM forment, devant Me JANIN, Notaire à Paris, fin 1845, une société pour l'exploitation des Mines de la Meboubja et des Hauts-Fourneaux. La publication a lieu dans le journal de LA SEYBOUSE du 24.01.1846.
Le 14 septembre 1849, ces autorisations sont retirées, sauf pour les Karézas. Sur appel, le Conseil d'Etat reconnaît le bien fondé de l'arrêt des travaux, motif du retrait des autorisations et annule, le 28 juillet 1852, la décision de l'Etat.
La concession des Karézas est annulée le 28 mars 1851. Le marquis de BASSANO ne fait pas appel et la concession est mise en adjudication le 30 octobre 1851. La Sté OGIER, de LATERRA et Cie I'emporte et crée la Sté des Hauts-Fourneaux de l'Allélick qui sera liquidée en 1877, après avoir fonctionné quelques années.
Comme je l'ai dit plus haut, il semble bien qu'associés de fait dès le début, PERON, GIRARD, les TALABOT le sont toujours quand la concession du Bou Hamra passe à Jules TALABOT et celle des Karézas au comte CLARY. Ils forment alors, à une date qu'on ne peut déterminer, la Sté Civile des Minières et Hauts-Fourneaux des Karézas qui est remplacée le 9 mars 1864 par la Sté en Commandite simple des Mines de mer du Mokra El Hadid, laquelle, le 20 avril 1879, deviendra la Cie des Mines de Fer Magnétique du Mokta El Hadid.
Entre-temps, à Oum Reboul, le Marseillais NERI découvre une mine de plomb argentifère qu'il met en exploitation avec l'aide du financier ROUX de FRAISSINET. En profondeur, le minerai de plomb est remplacé par du minerai de cuivre argentifère et aurifère, avec des traces de blende (zinc) et de pyrite de fer. Le minerai, amené par une voie ferrée à la plage Messida, était chargé sur des balancelles, à la sortie du canal du lac Tonga. (Garaa el Hour). La concession avait été accordée le 24 juillet 1849.
Pour en revenir au Mokta, en 1847 les exportations atteignent 20.000 tonnes (comme tout le monde, je dis Mokta, bien que la société n'ait été crée qu’en 1864, tellement Ies séparations entre exploitants sont fictives). Le minerai est riche 60 à 65 % de fer, de bonne qualité, comparable à celui de Suède. Il est envoyé par chariots jusqu’au quai de la Seybouse pour y être embarqué.
En 1852, les exportations sont de 200.000 tonnes.
En 1857 est découvert le gisement de Bou Khadra, minerai de fer magnétique, inexploitable, à l'époque, en raison des distances. Néanmoins Jules Talabot s’y intéresse.
En 1860 commence I'exploitation de la mine d'Aïn Mokra, la plus importante. On peut encore voir le lac qui s'est formé dans l'excavation.
Le port devient trop petit car le tonnage extrait augmente. En 1858, la 1ère ligne de chemin de fer d'Afrique avait été ouverte, sur 11 km, pour amener le minerai jusqu'au quai et, en 1861, son prolongement jusqu’à Aïn Mokra est déclaré d'Utilité Publique par arrêté Gubernatorial du 17 mars 1861.
Cette même année, le 1er mai, une concession pour I'exploitation d’une mine de mercure à Ras el Ma est accordée.
Chemin de Fer
Nous avons vu, au chapitre MINES, que la première voie ferrée d’Afrique avait été construite en 1858. Longue de 11 km, elle arrivait aux quais de la Seybouse.
Elle devait être prolongée jusqu’à Ain Mokra, (déclaration d’Utilité Publique du 17 mars 1861). Terminée en 1863, dans sa portion quais Seybouse/Mokta, elle arrivait Jusqu'au quai de la petite Darse en 1867. Sa longueur totale est alors de 40 Km. Réservée d’abord au seul trafic du minerai, elle est ouverte rapidement au public vers 1865.
Prévoyant la fin de l’exploitation des Mines, la Sté du Mokta demande, en 1895 l’autorisation de prolonger la ligne jusqu’à St-Charles pour rejoindre la voie Philippeville / Constantine.
Ce nouveau tronçon est terminé en 1905 et la voie est alors longue de 99 km.
Le Directeur de BÔNE/MOKTA/SAINT-CHARLES (sigle B.M.S.C.) est alors Philippe de CERNER, dernier Directeur des mines du Mokta El Hadid. Il traduisait ainsi le sigle de compagnie : BIEN MARCHER SANS COURIR, en raison de la lenteur des convois. La ligne resta voie étroite jusqu'à la fin des années 40. Avec ses vieux wagons sans couloir, ses locomotives style Far-West, elle justifiait encore la devise de Philippe de CERNER.
Un autorail poussif empruntait la ligne en 1942 et, lors d'un déplacement du CNB à Philippeville pour les championnats Départementaux de Natation, les copains avaient dû pousser le convoi dans une côte.
Elle est mise à écartement normal en 1952.
En septembre 1903, la ligne dite Tramway BONE/LA CALLE, est inaugurée. Elle était longue de 87,700 kms.
Il fallait 4 h 30 pour arriver au Terminus et le billet coûtait de 4,85 F. à 6,60 F. selon la classe.
En 1874, le décret du 7 mai, rend applicable à l'Algérie la loi du 12 juillet 1865 sur les Chemins de Fer secondaires. Le même jour, le BONE/GUELMA est déclaré d'utilité publique et les conventions signées le 13 septembre 1872 et le 4 mars 1874 entre le Département de Constantine et la Sté des Batignolles pour la construction et l'exploitation de la ligne de 88 km sont approuvées. La ligne sera ouverte en 1871.
La gare est alors située route de La Calle. Les Bônois la connaissent sous le nom de Vieille Gare, en face de celle du Bône/La Calle.
En 1877, la même société des Batignolles signe avec le Gouvernement Général une convention pour 2 nouvelles lignes : Duvivier/Souk-Ahras et Guelma/Le Khroub. On prévoit, déjà, un prolongement de Souk-Ahras vers Sidi El Hemessi, à la frontière Tunisienne.
Ces travaux sont déclarés d'utilité publique par la loi du 26 mars 1877 qui incorpore la ligne BONE/GUELMA dans Ie Réseau d'intérêt Général. La ligne Guelma/Le Kroub est ouverte le 29 juin 1879, celle de Duvivier/Souk-Ahras le 30 juin 1881 (2)
La Gare, rénovée et agrandie, est inaugurée le 7 novembre 1879.
Le 26 juillet 1875, par convention, le Gouverneur Général Chanzy accorde à M. JORET la ligne Constantine/Sétif.
En 1879, la loi du 18 juillet classe les lignes Algériennes en 3 catégories :
1 - Lignes Stratégiques
2 - Lignes reliant les principaux Ports du Littoral aux Réseaux intérieurs.
3 - Lignes de pénétration vers le Sud.
Le 30 juin 1880 est signée une convention entre le Gouverneur Général Grévy et M. Joret pour la construction de la ligne El Guerrah/Batna qui est ouverte le 1er novembre 1882, sur 80 kilomètres. Cette ligne sera prolongée sur Biskra (121 km) par une convention du 5 juin 1883, confirmée par la loi du 21 juillet 1884. Elle est inaugurée Ie 1er juillet 1888.
La ligne Ouled Rahmoun/Aïn Beïda est ouverte le 11 juillet 1889 (93 km), convention du 20 juin 1883 et loi du 7 août 1885.
En 1875, la Sté Anonyme du BONE/GUELMA prend le relais de la Sté des Batignolles. Formée le 24 mars 1875, définitivement constituée le 2 avril suivant, son capital est de 12 millions répartis en 24.000 actions de 500 Francs, au porteur, émises au pair, 23.000 sont souscrites par le Comptoir National d'Escompte.
Le capital est porté à 30 millions en 1877 par création de 36.000 actions nouvelles de 250 Francs. La Banque de Paris et des Pays-Bas et la Sté des Batignolles les souscrivent à raison de 50 % chacune. Elles sont remboursables à 600 Francs de 1878 à 1968.
Elle signe une convention, le 9 janvier 1882, qui lui accorde la concession de la ligne Souk-Ahras/Sidi el Hemessi (frontière tunisienne). Déclarée d'utilité publique, le 20 avril 1882, celte voie de 55 km est inauguré e le 29 septembre 1884. La convention du 23 mai 1885 et la loi du 28 juillet suivant, lui concèdent également l'embranchement Souk-Ahras/Tébessa. Ligne ouverte sur 128 km le 27 mai 1888.
De son côté, la Cie de l'Est Algérien, par une convention du 12 0ctobre 1875, remaniée en 1899, obtient du Département de Constantine, la construction et l'exploitation de la ligne d'intérêt Local Aïn Beïda/Khenchela (54 km), ouverte le 10 juin 1905. Des difficultés surgissent avec cette Compagnie et I'Etat autorise le rachat de son réseau par la Colonie par décret du 25 août 1907. La remise effective a lieu le 12 mai 1908.
L'accroissement du trafic des pondéreux Tébessa/Bône rend nécessaire la révision de la ligne. La Cie du Bône/Guelma et prolongement, tire argument de sa situation financière qui ne lui permettrait pas de faire face aux dépenses exigées, pour demander la révision du contrat la liant à la Colonie. Ses exigences ayant paru trop élevées, Ie Gouvernement Général demande aux Délégations Financières, dans leur session de mai/juin 1910, le rachat du Réseau. Le vote est acquis en juin. La réalisation est subordonnée à la décision du Conseil d'Etat.
Les différentes lignes d'Algérie appartenaient à plusieurs Compagnies, avec tous les inconvénients que cela pourrait entraîner.
En 1900, la Cie P.L.M. (loi du 12.12.1900) avait été autorisée à racheter les lignes de la Cie Franco-Algérienne.
Elle essaie de racheter les autres réseaux entre 1905 et 1906, mais n'y parvient pas. De son côté l'Algérie était devenue propriétaire de lignes. Aussi crée-t-elle, par décret du 27 septembre 1912, une administration autonome chargée de i'ensemble des Chemins de Fer rachetés par la Colonie.
Mais revenons au BONE/GUELMA. Le Conseil d'Etat ayant donné son feu vert et les crédits étant dégagés, la Colonie rachète la Compagnie, c'est-à-dire les lignes Bône/Le Khroub et Bône/Tébessa (décret du 9 juin 1914).
La ligne Tébessa/Le Kouif sera également rachetée (loi du 22.7.1930 approuvant la convention du 2.5.1927). La prise de possession effective a lieu le 15 septembre 1930.
En 1924, il avait fallu modifier le tracé de la ligne de l'Ouenza et la mettre à la voie normale. En effet, la production, en constante augmentation de l'Ouenza, ne pouvait plus être absorbée par l'ancienne ligne.
La ligne est électrifiée en 1932 et, ainsi, sur 180 km, les fameuses motrices BB peuvent tracter des trains de 1.000 tonnes de port en lourd. Il faut noter que, dès 1904, l'Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées de Bône, M. Coudeyre, ayant envisagé cette possibilité, les convois descendants restituant de l'énergie qui pouvait être utilisée par les convois montants.
Enfin, en 1961, la ligne Tébessa/Bir el Ater est achevée, permettant I'exploitation du Djebel Onk, dont le phosphate devait être traité à Bône (enrichissement à 75%).
Le service voyageurs est supprimé, par décret, le 25 août 1937, puis il est décidé, en 1947, d'adjoindre une voiture de 3ème classe au train, entre le 1er octobre et le 20 novembre chaque année, pendant la campagne de Tabac.
Tarif 1908 : BONE/TEBESSA : 235 km, durée 9 h 30 à 11 heures, 1ère classe : 26,35F. – 2ème classe: 20F. – 3ème classe: 14,10 F.
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A GUILLAUME II
Au sujet de sa guerre sous-marine
Ainsi, tu l'as voulu !... Sur les mers, par le monde,
Tes pirates maudits vont semer la terreur !..
Tu vas recommencer, tes pratiques immondes,
Roi bientôt détrôné, sanguinaire empereur !...
Le bruit-de nos canons a fait trembler ton trône,
Guillaume. ! D'assiégeant tu deviens assiégé !
C'est la fin ! Tu le sens !... Tu crains pour ta couronne
C'est pourquoi lâchement tu tiens à la venger.
Accumule toujours les crimes, les bassesses,
Va, toujours grossissant le nombre des forfaits !...
Tes coups traîtres, sournois, nous montrent ta faiblesse,
Et que tes régiments kolossaux sont défaits.
Tes cuirassés puissants, tes croiseurs magnifiques,
Dont ton peuple orgueilleux veut se glorifier,
Ont fui honteusement l'escadre Britannique,
Apprenant chèrement qu'il faut s'en méfier.
Alors tes sous-marins recommencent leurs crimes,.
Ils vont laissant partout un sillage d'horreur ! ...
Et semblent ne vouloir qu'une seule victime :
Le navire impuissant à calmer leur fureur !
Va!.... Tu peux torpiller les vapeurs sans défense.
Tu peux noyer toujours de pauvres innocents !... :
Bientôt viendra pour nous l'heure de délivrance,
Tu connaîtras alors le prix de notre sang.
Ecoute ! sur le Front, enfin, nos-chants de Gloire,
Retentissent vibrants dans le bruit des canons,
Vois ! Nos fiers régiments volent vers la Victoire,
C'est bien l'assaut final que sonnent nos clairons !
L'Heure du châtiment arrive impitoyable !
Tremble ! Tes sous-marins ne peuvent l'arrêter !
Ils peuvent nous braver. Nos soldats admirables,.
T'imposeront les lois de notre humanité !
Alors tu sombreras à ton tour ! Dans l'Histoire,
Ton nom GUILLAUME II ,,
ne sera plus qu'un mot Sale, qualifiant les choses les plus noires,
Les esprits les plus vils, les plus terribles maux.
Maurice VAN GHÈLE
Blessé d'Orient.
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PHOTOS de BÔNE
Envoi de M. Robert LEON
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À nos amis Pieds-Noirs
Par M. Marc Macquin
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Entre la mer et le djebel, une Algérie....
Celle de votre berceau, votre paradis;
Vous, enfants de Bône et du Constantinois,
Et vous, natifs de l'Oranais, de l'Algérois,
Victimes innocentes d'un conflit sans fin
Qui scellera dans le malheur votre destin.
Vos souffrances se dilueront dans le chagrin
D'une Métropole endeuillée pleurant les siens.
L'accueil fut distant par vos hôtes en France,
Moins par antipathie que par ignorance,
Tant il est vrai que pour une partie d'entre eux,
Avec ce soleil brûlant et cette mer si bleue,
Vous aviez forcément tous gagné le gros lot;
Alors que meurtris, vous débarquiez en sanglots,
Valises à la main, sur les quais de Marseille,
Pour beaucoup, sans famille et sans oseille.
Vos aïeux, vos souvenirs sont restés là-bas,
Vers Philippeville, La Calle, Tébessa,
Sétif, Alger, Oran ou Sidi Bel Abbès,
Enterrés avec les projets de votre jeunesse.
Si des pensées tristes vous assaillent parfois
En songeant aux victimes d'odieux attentats,
C'est que le souvenir de leurs cris, leurs larmes
Sont pour toujours liés au fracas des armes.
La terre des parents où vous avez vécu,
Vos enfants, hélas, ne l'auront jamais connue.
Aujourd'hui, bien installés dans la société,
Soyez heureux et fiers de l'héritage légué:
Vous nous avez fait connaître et apprécier
Le méchoui, le couscous et l'anisette glacée,
Les merguez et tajines, les kémias et mounas,
Le plaisir miellé des makrouts et des zlabias;
Révélé des futures stars du show-business,
Macias, Bedos, Bruel, la famille Hernandez;
Enrichi le patrimoine populaire
De vos histoires sortant de l'ordinaire,
Racontées avec l'esprit et l'accent natals
Qui sont votre passeport international.
Nos sauteries sont pour tous autant d'occasions
D'enjoliver la vie au rythme des flonflons
D'une valse à mille temps de l'Amitié,
L'antidote, dans ce monde de cruauté.
Marc Macquin 10 mars 2013
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LES VEILLÉES FUNÈBRES
par Jean Claude PUGLISI,
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LA FETE DES MORTS EST LA, PENSONS A EUX
Lequel d'entre nous n'a pas vécu une veillée funèbre, au moins une fois dans son existence Calloise, que ce soit pour un membre de sa famille, ou pour un proche ? C'était toujours une ambiance de tristesse, de prière et de recueillement.
À La Calle, l'annonce d'une mort était véhiculée par "le bouche à oreilles", le glas de Saint-Cyprien, et l'arrivée d'un cercueil flambant neuf, bien perché sur le toit de l'autobus de l'AAT arrivant de Bône. Tous ces signes avaient pour conséquence de mettre la population en ébullition, et d'attirer du monde au domicile du défunt, pour une visite de condoléances à la famille, et dire un dernier adieu au trépassé, après l'avoir aspergé d'eau bénite. Mais, la nuit venue, alors que le défilé ininterrompu, de tous ces gens attristés allait petit à petit en s'amenuisant, commençait ce que nous appelions " la veillée funèbre " qui, par tradition, voulait que le défunt ne restât pas seul pour sa dernière nuit dans le monde des vivants. Amis, voisins et connaissances, se joignaient alors à la famille, pour s'installer tout autour du cercueil, dans lequel gisait le défunt, bien vêtu, un chapelet enroulé entre ses mains croisées en prière. Dans la pièce contiguë, on pouvait apercevoir quelques personnes qui échangeaient consciencieusement des paroles ; parfois, un éclat de rire, se faisait entendre dans le calme de la maison. Cela ne choquait apparemment personne car, comme chacun le sait, malgré la tristesse de la mort, il est des moments où parfois arrive le rire.
Près du défunt et dans la pénombre de la pièce, régnait un silence curieusement apaisant où, l'on pouvait parfois entendre, ça et là, réciter quelques pieuses litanies, surtout de la part des femmes, toujours habillées en noir. Puis, venait le moment des habituelles évocations en souvenir du mort : sa vie, les choses qu'il avait accompli, des anecdotes le concernant, ses ultimes paroles, etc... Plusieurs fois au cours de la nuit de veille, la famille servait généreusement une tasse de café noir pour réconforter l'assistance. En cette occasion funèbre, même le logis prenait le deuil. Ainsi, toutes les glaces et miroirs de la maison, étaient entièrement recouverts d'un grand drap.
C'est au point du jour, lorsque tous les coqs de la ville saluaient le lever du soleil, que chacun prenait cérémonieusement congé de la famille et retournait à ses occupations habituelles.
Ces sentiments profonds de ces veillées mortuaires d'antan, qui restent gravés en nous, peuvent difficilement s'accommoder des moeurs de l'époque actuelle où, hélas, le défunt passe sa dernière nuit tout seul dans l'obscurité d'une église, d'une morgue, ou d'un funérarium aussi luxueux soit-il !!
Les Enterrements
Le déroulement des enterrements Callois était immuable. La population en était informée par le glas égrené du clocher de l'église, ou bien, par un carillon mélodieux, lorsqu'il s'agissait d'un enfant en bas âge, considéré comme un ange du seigneur.
Avant la cérémonie, le prêtre et les enfants de choeur se rendaient au domicile du défunt pour bénir le corps, puis, croix en tête, le cortège se dirigeait vers l'église. Après la cérémonie, simple bénédiction ou messe intégrale de requiem, la sortie de l'église vers le grand air et la mer était solennelle. Le cortège, accompagné du glas, remontait la place de l'église pour emprunter la rue de Verdun et se diriger vers le cimetière. Le nombre des suivants était grossi par les impénitents ( principalement des hommes ), qui attendaient dehors, assis sur la balustrade du cours Barris, et qui venaient se placer en queue de la file. Les femmes occupaient traditionnellement les premiers rangs, derrière la famille, dont les femmes étaient toujours par tradition, souvent absentes de cette cérémonie funèbre.
Un profond recueillement régnait pendant le passage du cortège et, par respect, les commerçants tiraient leurs rideaux. Une fois passé la gendarmerie, la poste, la gare et la douane, le cortège atteignait le cimetière surplombant la mer, après environ un kilomètre de marche. À cette époque, il n'était pas besoin d'un service de Pompes funèbres, car un véhicule était prêté gracieusement aux familles et les porteurs étaient des bénévoles recrutés parmi l'assistance.
Devant le portail grand ouvert, attendait Pascalin, le gardien, qui d'un pas claudicant, conduisait la procession vers la tombe béante, autour de laquelle, la foule silencieuse et recueillie se regroupait pour un dernier adieu. Le retour vers la ville se faisait dans un ordre dispersé et une ambiance plus détendue.
Docteur Jean-Claude PUGLISI,
de La Calle de France -
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage
Giens en Presqu'île - HYERES ( Var ) le 08.10.2023..
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Algérie catholique N°1, 1937
Bibliothèque Gallica
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Le Séminaire de Saint-Eugène
Depuis l'application en Algérie de la loi de séparation, le diocèse d'Alger était privé de séminaires. Kouba qui avait formé tant de bons prêtres, et Saint-Eugène avaient disparu dans la tourmente. Les quelques séminaristes qu'on pouvait recueillir allaient faire leurs études soit à Oran, soit à Tunis, soit même en France. L'œuvre des vocations sacerdotales était extrêmement languissante et cette situation menaçait le diocèse des plus terribles conséquences s'il n'y était apporté un prompt remède.
C'est alors que la Providence plaça sur le siège des Pavy et des Lavigerie, un évêque qui devait reprendre l’œuvre de ses prédécesseurs, œuvre de reconstruction des édifices matériels et de reconstruction morale qu'il pourrait mener à terme pendant de longues années.
Elu à l'épiscopat le 24 décembre 1916, sacré archevêque d'Alger le 6 mars 1917, intronisé quelques jours suivants, Mgr Leynaud qui avait reçu lui-même l'ordination sacerdotale à Kouba le 24 juin 1888, comprit que la première œuvre, celle dont toute la vie spirituelle de son diocèse dépendait, était de former de bons prêtres qui seraient ses collaborateurs, et, dès les premiers jours, on pourrait dire, dès les premières heures, il entreprit pour cela la restauration du Grand et du Petit Séminaire.
Ce n'était pas chose facile : on était en pleine guerre : les hommes, les ressources étaient rares.
La première question qu'il fallait trancher et qui de fait retint l'attention du nouvel archevêque d'Alger fut celle du choix des maîtres.
Mgr Leynaud rappela pour former le nouveau clergé algérois les frères de ceux qui avaient été ses maîtres à Kouba et dont les noms sont connus de tous : le P. Girard, MM. Dazincourt et Valette.
C'est ainsi que M. Payen Pierre fut nommé Supérieur du Séminaire où il devait rester neuf ans ; ouvrier de la première heure n'est-il pas juste de citer ici son nom.
Après les maîtres, restait à trouver un local. Après bien des démarches on loua enfin à Saint-Eugène, derrière l'église, 55, rue Salvandy, une maison entourée d'un grand jardin, et le 15 novembre 1917, l'Ecole de Théologie ouvrait ses portes avec 3 élèves pour le Grand Séminaire et 11 pour le Petit
Le 21 novembre suivant Monseigneur l'Archevêque venait lui-même y célébrer au milieu de ses enfants et de leurs maîtres, premières pierres d'un nouvel édifice, cette fête de la Présentation qu'on célèbre depuis avec tant de ferveur et de solennité dans un séminaire considérablement agrandi.
Le Séminaire, en effet, devait rester peu de temps à la rue Salvandy ; — les recrues arrivaient nombreuses, les conditions matérielles laissaient à désirer ; — au mois de septembre 1920 Mgr Leynaud avait la très grande joie d'installer ses petits et grands séminaristes dans le vaste et magnifique établissement de la Vallée des Consuls, sur les hauteurs qui dominent Saint-Eugène, où Mgr Pavy, il y a près de 90 ans, jetait les bases de son séminaire.
C'est là que depuis dix-sept ans, se forment les futurs prêtres du diocèse d'Alger, sous le regard paternel et attentif de Mgr l'Archevêque, sous la direction de maîtres dévoués, dans un site incomparable, accroché à la montagne, face à la mer, tout près de Notre-Dame d'Afrique.
Au mois d'octobre 1936, ils étaient au nombre de 40 au Grand Séminaire et de 75 au Petit.
Le Séminaire ! Il faut reconnaître que si l'on en parle beaucoup et pas seulement dans les Revues religieuses, peu de gens, même parmi les bons chrétiens, savent exactement ce que ce mot représente de vitalité, d'entrain, de travail, de gaieté !
C'est une éducation en pleine vie, que reçoivent à Saint-Eugène les futurs prêtres, en pleine vie naturelle, humaine dans toute la force du terme et surtout en pleine vie surnaturelle, vie joyeuse, vie laborieuse, vie épanouie — et tous ceux qui l'ont goûtée savent que ce n'est pas là formule creuse, — au bon soleil de la nature et au soleil de la grâce.
Suivant les prescriptions du Droit Canonique, le Séminaire de Saint-Eugène, comprend plus exactement deux Séminaires, qui ont le même esprit, mais dont les méthodes et les règlements sont différents : le Petit Séminaire et le Grand Séminaire.
Le Petit Séminaire est une école secondaire, préparatoire au Grand Séminaire, et comprend les classes de cet enseignement, de la 7ème à la 11ème ; ce n'est pas cependant une école comme les autres ; si les programmes d'enseignement sont ceux des lycées et collèges qui préparent au baccalauréat latin-grec, n'y sont admis que des enfants qui offrent de sérieuses garanties, qui présentent ce que l'on appelle des signes sérieux de vocation, en un mot qui veulent loyalement être prêtre un jour.
Evidemment on ne saurait demander à un enfant de 10 ans la même volonté, la même conscience que l'on demande à un adolescent et à un jeune homme ; — jusqu'au jour du sous-diaconat et donc jusqu'à ce qu'il ait plus de 21 ans, il demeure pleinement libre de se retirer en tout honneur, — du moins faut-il qu'il manifeste de quelque façon, non pas un attrait sensible, mais cette intention droite jointe à un ensemble de qualités physiques, intellectuelles, morales, comme le rappelait, il y a un an le Souverain Pontife.
De là, une sélection soigneuse s'impose ; aussi ne vise-t-on pas à Saint-Eugène, au nombre ; la qualité elle-même engendre la quantité ; cela permet de donner aux petits séminaristes une forte éducation physique, morale, intellectuelle.
L'éducation physique y est en honneur, et Mgr Leynaud, devançant l'application des lois en préparation au Parlement, sur ce point, a-t-il voulu qu'elle figurât au programme : tous les jours de 10 h. 15 à 10 h. 45, les élèves se plient au grand air aux méthodes de Hébert auxquelles les initient des maîtres compétents et dévoués.
Certes moins que partout ailleurs, on ne cherche à faire du sport pour le sport, — le sport est l'ennemi de l'éducation physique a écrit Hébert ; — par contre on cherche à mettre les enfants dans des conditions naturelles de santé, particulièrement favorables à leur développement physique... et moral.
Point n'est besoin d'ajouter, en effet, que l'accent est mis sur le côté moral, religieux, dans l'éducation donnée à Saint-Eugène : les enfants y vivent dans le monde surnaturel, y vivent, c'est peu dire, s'y épanouissent, grâce à l'atmosphère dans laquelle ils sont plongés, grâce à l'esprit de la maison, aux fêtes liturgiques auxquelles on donne une grande place dans la vie de la maison
Tout cela s'applique, toutes proportions gardées, au Grand Séminaire, qui groupe actuellement quarante séminaristes.
Les études y durent six ans, dont deux ans consacrés à la Philosophie, quatre à la Théologie.
Les cours comprennent, en outre, l'Histoire Ecclésiastique (deux heures par semaine), l'Ecriture Sainte (trois heures par semaine), le Droit Canonique, la Liturgie, le Chant, la Prédication, la Sociologie, la Théologie pastorale.
Comme on le voit, les grands séminaristes n'y demeurent pas oisifs : ils éditent, en outre, une petite revue mensuelle, « Sint Unum » qui sert d'agent de liaison avec les anciens et les séminaristes soldats et d'organe à leur Cercle Saint-Augustin, cercle d'études où les séminaristes étudient eux-mêmes les questions d'apostolat, questions sociales, etc...
Le règlement est le même que celui des Grands Séminaires de France, où tous les articles ont en vue la formation, mais cette fois d'une manière plus immédiate, du prêtre de demain.
Quand on monte à Saint-Eugène par Notre-Dame d'Afrique, on est frappé du contraste qu'offre le Séminaire avec la grande ville que l'on vient de quitter : en bas c'est le bruit, l'agitation, la foule dans les rues, les hautes maisons, les magasins bruyants ; même à Notre-Dame d'Afrique, on sent la ville toute proche ; mais passé le Collège, on s'enfonce dans la Vallée des Consuls, sous les oliviers centenaires que malheureusement déciment chaque année les tempêtes, c'est une impression de silence, de recueillement, de paix délicieuse qui vous envahit ; se détachant sur le bleu de la mer et du ciel pointe le clocher du Séminaire et l'on comprend alors que nul cadre ne pouvait être mieux approprié à cette formation de futurs prêtres ; n'est-ce pas dans la solitude que se préparent les grandes œuvres.
On se tromperait grandement tout de même si solitude signifiait somnolence, rêverie, isolement.
Les grands séminaristes vivent d'abord très près des réalités surnaturelles que, prêtres un jour, ils auront charge d'entretenir dans le monde.
Levés à 5 heures, ils se préparent par une demi-heure d'oraison au pied du tabernacle à leur journée ; puis à 6 heures c'est la messe dans la vaste et blanche chapelle où les rejoignent alors les petits séminaristes.
La journée se déroule ensuite, journée d'études coupée par les repas et les récréations, prises sous les grands caroubiers où les amateurs de sport se livrent au basket-ball pendant que les autres jardinent ou philosophent en se promenant face à la grande bleue.
Deux fois par semaine les promenades dans la montagne ou sur les bords de la mer, l'une et l'autre toute proches, permettent à ces jeunes de faire quelques marches qui reposent l'esprit en entretenant les forces du corps, puis vient le dimanche, consacrée tout spécialement aux offices de la liturgie.
C'est surtout lors des fêtes que la Liturgie y déploie toute sa magnificence : ces fêtes y sont nombreuses, pourquoi ne pas le dire, à tel point qu'à Saint-Eugène il semble que toute l'année soit en fête.
Ne sont-elles pas, suivant l'expression d'un incomparable éducateur de jeunes et de séminaristes, Mgr Dupanloup le cœur même et le foyer de la vive et solide piété, l'un des moyens d'éducation les plus touchants, les plus persuasifs, les plus pénétrants.»
A ces fêtes les séminaristes n'assistent pas comme de simples spectateurs : ils y jouent eux-même un rôle principal, par la part qu'ils prennent et au chant et aux cérémonies, et tous ceux qui y assistent gardent le souvenir de ces enfants vêtus de bure blanche mêlant leurs voix cristallines aux voix plus graves de leurs aînés qui portent déjà l'austère soutane noire et assistent le prêtre à l'autel.
Parmi ces fêtes, il en est de plus touchantes encore et plus attendues : ce sont les jours où quelques grands séminaristes reçoivent l'ordination qui les fait prêtres pour l'éternité.
L'année scolaire se termine par une ordination générale le 29 juin, et cette année Monseigneur l'Archevêque aura la joie d'ordonner prêtres huit de ses enfants.
Au cours de l'année scolaire, d'autres ordinations sont célébrées, moins importantes par le nombre des ordinands qui y participent ; c'est ainsi que le samedi des IV Temps de l'Avent, le 19 décembre dernier, Mgr Leynaud procédait aux cérémonies de l'ordination dans la basilique de Notre-Dame d'Afrique, ordination comprenant deux prêtres, quatre diacres, un sous-diacre, cinq minorés.
Et maintenant si l'on demande comment peut subsister cette œuvre magnifique ; car enfin ces beaux enfants et adolescents au visage hâlé par le grand soleil et l'air du large, ces jeunes clercs plus graves, ne vivent pas que de bon air, mais encore de bon pain ; comment malgré la crise cette œuvre d'éducation peut-elle être conduite dans des conditions exceptionnellement heureuses ; il faut répondre que c'est presque uniquement grâce à la charité intelligente et inépuisable des catholiques algérois, stimulés, éclairés, sans cesse alertés par l'animateur de l'œuvre des Séminaires, le précieux auxiliaire de Monseigneur l'Archevêque, Mgr Dauzon.
Sans doute quelques élèves payent leur pension entière ; de presque tous on exige une contribution, proportionnée à la situation de leur famille ; mais en fait ce n'est là qu'une très petite partie des recettes : tout le reste est fourni par la charité. Mgr Dauzon a eu d'abord le grand mérite de mettre sur pied cette œuvre originale du pain et du vin du Séminaire : grâce à lui, ce sont nos colons algérois du Sersou, de la Mitidja, des autres parties du diocèse qui fournissent le blé et le vin nécessaires à nos séminaristes ; c'est encore Mgr Dauzon qui organise chaque année cette fameuse Kermesse qui permet de boucler le budget du Séminaire. En cela, il n'est que juste de reconnaître qu'il trouve partout des concours empressés. Dans la chapelle des Pères Blancs, à Maison-Carrée, on voit au-dessus du maître-autel une fresque magnifique représentant le Grand Cardinal offrant à Dieu la Société naissante qui déjà comptait des martyrs.
Il n'est pas exagéré de dire que si la postérité veut faire un jour l'histoire de l'épiscopat de Celui qui se réclame à tant de titres de son illustre prédécesseur, elle devra le représenter tenant entre ses mains Saint Eugène et l'offrant à Dieu.
Saint Eugène restera, en effet, la grande œuvre — entre bien d'autres, — de S. Ex. Mgr Leynaud, son œuvre par les bâtiments renouvelés, par l'esprit qui l'anime, par les prêtres qui en sont sortis, 78 à l'heure actuelle.
Sur la même fresque il ne sera que juste de représenter la foule anonyme, nous pourrions dire la foule innombrable de catholiques qui ont compris, soutenu cet œuvre avec tant d'amour.
Saint-Eugène, en effet, est aimé par nos algérois ; ils en sont fiers ; nous en connaissons qui lors de la dernière Kermesse n'ont pas craint de faire deux cents kilomètres sous la tempête pour apporter leur contribution à cette œuvre... puisse-t-elle malgré tes difficultés de l'heure présente, non simplement continuer à vivre, mais encore grandir et se développer, car ce sont là les lois de la vie surtout quand il s'agit d'une semblable entreprise. «Au grand soleil de notre Afrique, au grand soleil de Dieu et de la charité catholique. »
LA KERMESSE
Elle est, en effet, une des grandes entreprises annuelles du Directeur des Œuvres diocésaines ! De sa réussite ou de son échec dépend de beaucoup la vie du Séminaire. Mais, faut-il dire toute l'intelligence et tout le dévouement que réclame pareille organisation ?
La Kermesse est diocésaine : c'est donc tout le diocèse qui est alerté et surtout appelé à collaborer à l'œuvre capitale de la relève sacerdotale. Il s'agit de donner et... de vendre.
Dans toutes les paroisses, plusieurs mois à l'avance, M. le Curé fait appel à la générosité des fidèles, en leur recommandant en particulier les dons en nature.
Les premiers jours de décembre approchent et déjà la réponse est donnée. Les lots affluent de tous côtés, des grands comme des petits, et ceci par tous les moyens de locomotion : train, autobus, poste, autos particulières... Qui n'a vu le Boulevard Baudin, la veille ou le matin même de la Kermesse, au moment où se présentent tout à la fois au milieu des légumes, des fleurs et des fruits, les arrivages de gibier, de bonneterie, de vins, d'objet de tout genre les plus divers et les plus variés ? C'est alors qu'il faut des bras actifs et entreprenants pour accueillir, répartir et donner rapidement à toute chose sa destination.
Mais tout n'est pas fini ! Ce n'est que le début. Il s'agit d'occuper les comptoirs et de les tenir en vie : les dames directrices sont là ! Avec une intelligence prévoyante, elles ont évalué depuis longtemps le flux et le reflux de la foule aux moments de plein rendement, c'est pourquoi de nombreuses dames et demoiselles, chacune à sa place, entrent en activité. «Vous désirez » - «Et voici ». Il fallait de l'attrait, de la joie, de la beauté, de la présentation ! C'est atteint. Tout le hall est devenu un beau champ de Foire.
De son côté la presse a appelé, elle annonce même encore et renouvelle ses invitations. « Venez, c'est le 9 et 10 décembre».
On y trouve, en effet, l'objet de tous les désirs, vieillards, ménagères, jeunes gens, enfants, sont tous attendus ; il faut s'y rendre pour connaître les charmes d'une Kermesse bien organisée et bien tenue.
La vente fait son chemin ! avec la grâce de Dieu certes, mais aussi avec le dévouement et la collaboration de ces dames, demoiselles et messieurs qui, dans l'oubli des obligations privées sont tout à l'œuvre diocésaine. La fatigue est à l'épreuve ; mais il est entendu qu'on en reparlera plus tard car la lutte est engagée, il faut tenir le parapet !
Mais, admirons un instant l'ordre du comptoir des timbres : présentation 1936 ! Voyez l'ardeur du Noël devant les jeux où se rassemblent les enfants. Ici, il y a de l'angoisse ! : vingt personnes attendent que le lapin se détermine sur la feuille de choux qui sera de son choix ! Plus loin les objets d'art sont regardés, puis sollicités ; la papeterie et les tabacs ont leur monde choisi ! A la chaumière l'accueil est au-dessus de tout éloge ! Quant à l'alimentation c'est le comptoir de résistance, Dieu sait quels assauts il doit soutenir !
Tout le monde a visité la Kermesse !... jusqu'à la pluie et le beau temps ! aussi elle s'est terminée, je crois, en beauté ; le Directeur des Œuvres paraissait assez serein le lendemain matin.
Reconnaissance ! c'est le mot de la fin. Reconnaissance à la divine Providence qui assure toujours la pâture jusqu'au plus petit des oiseaux.
Reconnaissance aux âmes pieuses et charitables qui, loin d'Alger comme à la ville, ont compris le bienfait du sacerdoce.
Reconnaissance aux énergies qui, pendant quarante-huit heures surtout ont répondu à tous les désirs des visiteurs.
L'avenir sera maintenant plus beau! Quand on songe à édifier et à construire, on réalise, en effet, ce véritable et total humanisme dont la mission est de faire rayonner la lumière et l'amour infini, qui après nous avoir créés, nous appelle à une splendide récompense divine.
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Les horreurs que nous avons vues
Bonjour N° 132 du 2 septembre 1934 journal satyrique bônois.
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L'ASSASSINAT DANS
LA MAISON ATTALI
Dans un Mouvement d'indignation et encore tout chaud de notre premier voyage, nous avons promis à nos lecteurs de leur narrer les visites funéraires que nous avions faites sur les lieux même où se perpétrèrent les assassinats les plus odieux que l'on puisse enregistrer.
Nous regrettons presque cette promesse.
L'enquêteur doit conserver son sang-froid jusqu'au bout afin de juger plus impartialement et plus objectivement. Cependant, pour la même raison qui a poussé
«La Dépêche de Constantine » a publié les photographies des malheureuses victimes affreusement égorgées et mutilées, nous estimons que le public doit connaître certains récits.
Nous serons brefs.
« La Dépêche de Constantine » vient de donner hier, un récit, fait par les assassins eux-mêmes du meurtre de Mlle Ausélia Attali. Nous n'y insisterons pas. Les confidences que nous avons reçues de M.Attali dont on a égorgé la fille sous ses yeux, nous avaient donné une impression à peu près semblable. Le reste est effroyable.
Il est exact que Mlle Attali se soit offerte en holocauste pour sauver les siens puisque voyant son sacrifice inutile elle a entamé un combat héroïque et dérisoire - contre la horde : Grande, brave et forte, elle a combattu avec une énergie inouïe. Un des assassins à qui l'on demandait pourquoi il l'avait frappée à coups de boussaadi, a fait cette réponse stupéfiante : « Elle tenait un de mes camarades à la gorge » Il parait que la courageuse jeune fille n'avait pas le droit de prendre à la gorge un des ignobles individus qui avaient envahi sa maison et qui assassinaient les siens !
On a dit que les Juifs avaient tiré des coups de revolver et on prétend leur en faire grief. C'est insensé ! Les Juifs ont-ils tiré contre de paisibles promeneurs ou bien contre les hordes qui assaillaient leurs maisons. Le droit de légitime défense leur serait-il interdit parce qu'ils sont Juifs ? C'est simplement odieux !
En particulier, on a prétendu que M. Attali avait tiré de son balcon des coups de revolver. Pour des raisons personnelles que l'on voudra bien respecter, nous nous inscrivons en faux contre cette insinuation.
Si M. Attali l’avait fait, nous l'approuverions entièrement. Mais nous avons assisté, fortuitement, à une discussion qui a eu lieu entre M. Attali et ses fils
Ceux-ci disaient courtoisement mais nettement : « Vous voyez, père, vous nous aviez toujours inter dit l'achat d'un revolver ! »
Questionné par nous M. Raymond Attali nous a répondu: « Mon père s'est toujours opposé à ce qu'il y ait une arme quelconque à la maison à cause des enfants en bas âge qui s'y sont succédés.»
D'autre part, M. Attali père que nous avons vu, la première fois, sur son lit de blessé à l'Hôpital, nous a déclaré : « Sur le corps de ma fille chérie, sur mes pauvres morts, je jure que personne chez moi n'a tiré des coups de revolver et qu'il n'y a jamais eu un seul revolver dans ma maison »
M. Attali est un des hommes les plus respectés de Constantine. Il faut croire que les autorités, et aussi les Arabes, lui accordent une confiance assez rare.
En effet, M. Attali est l'imprimeur- du « Républicain » le journal de M. Morinaud. Il est aussi l'imprimeur de «La Voix Indigène » le journal de MM. Bendjelloul et Zenali et encore l'imprimeur d'une autre édition arabe. Et ces deux dernières informations tout l'étonnement du lecteur.
Outre cela, nous voulons rappeler ici, et malgré M. Attali, le rôle magnifique qu'il a rempli pendant la grande guerre. A ses frais, il a parcouru l'Afrique du Nord tout entière de Tunis à Casablanca. Il a fait partout des conférences publiques à ses coreligionnaires dont il exaltait le patriotisme et il a recueilli au bénéfice du gouvernement, des souscriptions fort importantes. Voici donc un Français qui ne doit pas être traité comme n'importe qui.
D’ailleurs, le seul témoin qui ait accusé M. Attali d'avoir tiré est un zouave, parait-il. Lorsque l'on demande le nom de ce zouave aux autorités, elles demeurent muettes. Le zouave accusateur a disparu !..
S'il a existé ailleurs que dans l'imagination de certains antisémites, il aurait bien dû, ce zouave, se précipiter dans cette maison où l'on assassinait des vieillards, des femmes et des enfants. Il aurait fait œuvre de soldat. Nous préférons ne pas insister et nous croyons savoir, ce qui renforce notre thèse, que l'Administration ne retient pas l'accusation imbécile formulée, on ne sait par qui, contre M. Attali.
Nous n'irons pas plus loin afin de ne pas attrister davantage M. Attali, dans les yeux duquel on voit encore le reflet de l'épouvantable carnage commis contre les siens.
L'ASSASSINAT
DE LA FAMILLE HALIMI
Accompagné par M. Miquel, Commissaire central, j'ai visité l'immeuble Halimi. Pendant la guerre, j'ai vu du sang et des ruines. Jamais je n'ai été pris d horreur et d'épouvante comme cet autre mercredi.
La horde avait enfoncé le battant gauche de la porte mais les bras n'étaient pas assez longs pour atteindre le verrou. On avait enfoncé alors le battant de droite. Je donne ce détail pour essayer de convaincre le lecteur de l'état d'esprit dans lequel devaient se trouver les huit personnes qui entendaient les coups contre cette porte.
Oui, huit personnes, un homme seulement et le reste des femmes et des enfants !. Pas à pas, en montant cet escalier dont chaque marche porte des filets de sang qui se sont égouttés en forme de larmes, j'ai suivi le calvaire des huit massacrés.
Dans les pièces principales, c'est un désordre inouï. Là, le clavier d'un piano dont la caisse est à plusieurs mètres, béante. Ailleurs, des meubles brisés avec minutie, la salle de bain ne conserve que les robinets, la cuisine est un amas d'instruments mis en miettes. On marche sur des monceaux de débris, il ne reste pas une vitre intacte.
Le cuivre des lits est tordu comme par des éclatements d'obus. Quels instruments avaient donc les assassins ?
On ne fait pas de pareilles ruines avec les mains même si elles sont armées de matraques ?
Terribles ironies : sur le sol, piétinée, une assez grande photographie. Elle représente, sur une voilure campagnarde attelée d'un vigoureux mulet, M. Halimi, sa femme et ses enfants en toilette d'été et, derrière, ont lit les lignes suivantes : « Souvenir de La Bourboule, 28 Août 1928. »
Six ans après, au même mois et, presque, jour pour jour, cette famille tombait tout entière sous les couteaux. Plus loin, en équilibre sur le pied d'une table brisée et renversée, un disque de phonographe, intact. Titre : «Les yeux clairs! »
Depuis ce 5 Août, tous ces yeux sont fermés !..
Trois étages. Trois étages que les victimes affolées ont gravi poursuivies par les assassins, tout en haut, sur une terrasse claire, une soupente.
Brusquement, M.Miquel m'arrêta par le bras : «C'est là ! » me dit-il d'une voix toute changée.
Je suis entré en me courbant et puis. j'ai crié !
Oui ! j'ai - crié mon horreur, mon effroyable dégoût. Le sang, sur le sol formait des tas coagulés, le sang des femmes, des pauvres petits enfants égorgés. J'entendais leurs cris hallucinants, je voyais les petits bras esquisser des défenses, de leurs gorges ouvertes, de leurs poitrines crevées, le sang bouillonnait en torrents et les égorgeurs frappaient toujours. L'enquête a établi que tous les corps avaient été criblés de coups de couteau. Certes, oui, j'ai crié mon indignation que je n'aie pu retenir. Sur cette terrasse gaie et spacieuse, sous le beau soleil du 5 Août, le ciel seul avait été témoin de cet effroyable égorgement. En bas, dans la rue, des hommes passaient, entendaient, écoutaient et se sauvaient.
Qui ? On voudrait des noms pour les écraser de mépris.
Le Commissaire Central et un confrère constantinois qui m'accompagnaient avaient déjà vu le spectacle, ils étaient aussi blêmes que moi et aucun d'eux ne trouva une parole.
Alerté, le Capitaine de gendarmerie de Bône, M. Boulant, se précipita le premier et seul – nous avons déjà dit que certains officiers étaient sans troupes. Nous le prenons comme témoin que nous n'inventons rien de ce que nous prétendons avoir vu.
Des souvenirs comme ceux-là demeureront, implacables, dans la mémoire du journaliste. Il manifeste, une fois de plus, son écœurement de ce que des actes semblables aient pu être perpétrés après cent ans de civilisation française et presque sous les yeux de voisins apeurés et incapables d'un geste généreux.
Il adresse aux victimes mortes et à celles qui restent l'expression sincère de son immense pitié.
Pierre Marauton
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POINCARÉ
Effort Algérien N°52, du 28 avril 1928
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Son prestige domine la consultation électorale. Ce prestige sert à la fois et gêne tous les partis, menu tous les partis d'opposition révolutionnaire. Bien souvent, on accusa l'influence de certains présidents du Conseil de dissoudre les partis par le dedans. Le prestige de M. Poincaré les éteint par le dehors, en les faisant apparaître comme presque inutiles,
A l'Etranger, les chefs de gouvernement restent les hommes d'un parti, les représentants d'une majorité fixe ou d'une coalition dont les éléments sont officiellement proportionnés et classés. En France, au contraire, au fur et à mesure que les hommes d'Etat affirment leur aptitude gouvernementale et sont consacrés par l'expérience, ils se trouvent, pour ainsi dire, détachés des partis.
Ils deviennent comme des fonctionnaires nationaux, jugés sur leur caractère et leur savoir-faire, non plus sur leur étiquette.
Dans chaque législature, les vicissitudes changent, le rythme profond ne change pas : il y a des phases où les partis essaient de prendre tout le pouvoir et de le garder contrevents et marées, mais inéluctablement, après quelque temps, le pouvoir revient, par son propre poids, à ceux des hommes d'Etat qui font figure de fonctionnaires nationaux.
Et singularité également bien française : un tel rythme, qui semble assurer la prédominance et la permanence aux influences personnelles, exclut le pouvoir personnel, car le pouvoir personnel ne vivrait et ne durerait qu'en s'appuyant sur un parti ; or, la position même des hommes d'Etat à prestige personnel écarte de tout parti. Ils échangent avec les partis des assurances négatives, mais non point de contrat positif.
Au fond de tout cela, on n'aurait pas de peine à découvrir une sorte d'incompatibilité entre la vie spéciale des partis français et la gestation gouvernementale. Plus au fond encore, on découvrirait, dans la psychologie du peuple français, un mélange paradoxal d'attachement à des formules de politique abstraite et de scepticisme sur la portée pratique de ces formules.
Pour rien au monde, le peuple français ne consentirait que les formules les plus imprudentes, les plus passionnées ou les plus utopiques disparussent de son répertoire politique.
Mais, pour rien au monde, il ne permettrait que telle ou telle de ces formules, mise en application, troublât longtemps le cours régulier de ses affaires.
C'est ce qui explique le caractère à la fois passionné et artificiel des luttes politiques dans notre pays.
C'est ce qui explique aussi qu'en France tout finisse par se résoudre, mais avec une extrême lenteur, et que le progrès y soit plus lent qu'ailleurs.
Aujourd'hui, la réussite financière et monétaire de M, Poincaré lui procure un crédit personnel d'un tel éclat qu'il ne laisse aucun brillant aux programmes électoraux des divers partis. On peut prévoir que, quel que soit le classement nominal des élus, les élections des 22-29 avril comporteront la plus faible signification politique qui ait jamais été enregistrée dans l'histoire électorale de la Troisième République.
Ce ne sont donc pas les élections qui vont fixer la politique de l'avenir. Ce sont les événements ou les incidents de la prochaine législature qui, peu à peu, détermineront le regroupement des partis.
Ainsi, pour être moins voyante que son œuvre financière, l'influence du Gouvernement Poincaré sur l'évolution politique ne sera pas moins marquée.
Lucien ROMIER
(Le Redressement Français)
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Les calculettes corses !
Envoyé par Elyette
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Un corse en voiture est arrêté à la douane
– Avez-vous quelque chose à déclarer ?
– Non, rien.
– Qu’avez-vous dans le coffre ?
– Des calculettes uniquement.
– Quelle idée de mettre des calculettes dans un coffre de voiture ! Vous en avez beaucoup ?
– Quatre ou cinq.
– Ouvrez votre coffre, je veux voir ça, c’est curieux de mettre des calculettes dans un coffre.
Le corse ouvre et là… la surprise :
1 revolver, 1 fusil de chasse, 1 pistolet mitrailleur, 1 lance roquette…Le douanier lui dit :
– Vous appelez ça des «calculettes» vous ?
- Oui, c’est avec ça que je règle mes comptes !
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Une page d'histoire
Par MAURICE VILLARD
ACEP-ENSEMBLE N°284
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L’HISTOIRE DE L’AURES
Dans l'histoire de la conquête de l'Algérie, l'Aurès est un chapitre tout à fait à part.
La campagne de l'Aurès, commencé contre Ahmet, l'ancien bey de Constantine, et Mohamed Seghir, l'ancien lieutenant d'Abd-el-Kader, par le duc d'Aumale, puis continuée par Bugeaud et terminée par Camrobert, qui fit brûler Naro, comme Troie avait été livrée aux flammes.
L'Aurès est de massif montagneux qui se dresse au Sud de la province de Constantine, entre les Hauts Plateaux et le désert. Les populations qui habitent cette région remontent à la plus haute antiquité. Sous les romains ce pays prit un puissant développement. Les villes y rivalisaient de luxe et de richesses, l'agriculture y était florissante. Les colons soldats de Rome, vétérans ayant reçu un lot de terre pour prix de leur service, ou citoyens envoyés par la Métropole ( coloni ab urbe missi), s'y livraient à l'élevage du bétail et à la culture de l'olivier et y faisait fortune. Des voies stratégiques reliaient les places fortes, qui constituaient aussi les centres de commerce, Zambèze, Timgad, Kenchela, Baghai, Tébessa, Biskra, Thouda, Négine, Ghadamès datent, sous des noms latins maintenant plus ou moins modernisés, de cette époque lointaine.
Cette prospérité subsista jusqu'à la chute de l'empire romain d'occident.
Alors Rome vit ses provinces d'Afrique, greniers d'abondances, envahies par les Vandales qui s'emparèrent de Carthage et y occupèrent les palais des proconsuls. Justinien, après l'écrasement de la faction des verts à Byzance, conçut la pensée reconquérir I'Afrique et chargea Bélisaire de vaincre le roi des Vandales, Gélimer. Tâche facile au demeurant puisque les Africains étaient divisés entre eux. En effet, l'autorité de Gélimer ne s'étendait que sur les grandes plaines du littoral. Les montagnards et ceux de l'Aurès surtout, ne reconnaissaient sa suzeraineté que nominalement. En outre une scission profonde les armaient les uns contre les autres. Dans le Nord, avoisinant la Numidie, les tribus indépendantes avaient pour cheltbdas ; dans le Sud, sur les confins du désert, elles obéissaient à Orthalas. Ce dernier se tourna vers Byzance. Les 15.000 hommes qui débarquèrent, dans ces conditions, en Afrique, avec Bélisaire, n'y eurent qu'à infliger deux défaites successives aux Vandales pour mettre fin à la puissance de Gélimer, fait prisonnier, emmené à Constantinople où il orna le triomphe des vainqueurs.
La soumission des Africains, et principalement de ceux du mont Aurès, n'était pas sincère. A peine le général de Justinien parti, une insurrection éclate. Elle ne fut réprimée qu'en apparence. Salomon, qui avait succédé à Bélisaire, ne fit que refouler les rebelles dans la montagne, où ils se dérobèrent à la poursuite, et plusieurs années s'écoulèrent avant que les Byzantins en guerre incessante avec Iabdas, eussent remporté des avantages réels. Iabdas se sauva en Maurétanie, où il regroupa ses partisans. Il savait combien I'armée qui I'avait vaincu était indisciplinée, vénale et peu redoutable, avec de l'or on pouvait la corrompre.
Aventuriers et mercenaires, ramassis de toutes les nations barbares, commandés par des généraux prêts à toutes les trahisons, ces soldats offraient leur bras à qui les payaient le mieux. Iabdas n'eut pas grand mal à se faire réintégrer par eux dans ses Etats.
Mais d'autres ennemis allaient paraître. Les Arabes, qui n'avaient fait d'abord qu'opérer quelques razzias, se montrèrent plus menaçant lorsque, vers la fin du VIIème siècle de notre ère, ils formèrent le dessein de subjuguer tout le Maghreb. La bataille livrée près d'Erba fut le point de départ de la domination musulmane sur les indigènes de l'Aurès. Okba-ben-Naà traînant à sa suite leur chef Koceila, son captif, promena l'armée arabe de victoire en victoire jusqu'à l'océan, seul capable de l'arrêter.
Les vaincus s'humilièrent devant lui mais ils attendirent I'heure de la revanche. Elle sonna bientôt. Okba-ben-Nafa ayant eu, dans sa présomption, la témérité de pénétrer dans les monts Aurès avec une poignée d'hommes, et croyant ni trouver aucune hostilité, fut tout à coup assailli par les montagnards, sous la conduite de Koceila, qui s'était évadé du camp Musulman - on montre encore son tombeau dans l'oasis qui porte son nom, à peu de distance de Biskra. Les Arabes, malgré des prodiges de valeur, succombèrent au nombre, et Okba-ben-Nafa périt avec tous ses compagnons.
Koceila sut mettre son succès à profit. Il délivra l'Afrique du joug de l'Islam par la prise de Kairouan, et fonda son règne sur la paix et la justice ; mais il ne put endiguer le nouveau flot de I'invasion arabe qui s'épandit sur son pays. Il trouva la mort dans la bataille de Mema, près de Shiba. Les Berbères – nom donné à tous les peuples indigènes de cette région, - n'étaient toutefois pas domptés.
Koceila mort, Sihia ou Samia, qui gouvernait la tribu zénatienne des Djeraoua, fut mis à la tête de la confédération berbère. De religion juive, comme la tribu à laquelle elle appartenait, elle portait le surnom de Kahéna ( ou plutôt féminin du mot hébreu Kahen, qui veut dire prêtre - la prêtresse - que ses ennemis les arabes avalent traduit par « la sorcière ».
Pour certains historiens, la Kahena était juive. Selon l'historien Ibn Kladoum, à la veille de la conquête musulmane du Maghreb, plusieurs tribus Berbères pratiquaient le judaïsme
Les légendes nationales ont entouré sa jeunesse de récits merveilleux. Douée d'une grande beauté, elle était recherchée en mariage par les chefs les plus puissants. Elle repoussa les offres d'un jeune homme que son caractère cruel et que ses habitudes de débauche lui rendaient particulièrement odieux. Son père chef suprême de la tribu, était mort, ce fut ce prétendant évincé qui lui succéda.
Il fit peser sur ses sujets la plus insupportable tyrannie. La Kahéna forma le projet de délivrer son peuple du monstre qui l'opprimai. Nouvelle Judith, elle lui plongea un poignard dans son sein. La libératrice fut immédiatement nommée reine par ses compatriotes reconnaissants. Mais le patriotisme de la Kahéna ne se trouva pas satisfait d'avoir rendu la liberté à sa tribu. Il fallait maintenant la conduire au combat contre I'envahisseur musulman. Elle prit une part active au soulèvement qui coûta la vie à Okba, et, après la mort de Koceila ce fut vers elle que se tournèrent toutes les tribus berbères, qu'elle parvint à réunir en un faisceau. Le général arabe Hassan, qui venait de détruire une dernière fois Carthage (693), se dirigeait avec une armée vers I'Aurès.
La Kahéna marcha à sa rencontre. Ce fut dans la grande plaine qui s'étend au Nord des montagnes que la bataille eut lieu, sur les bords de l'Oued Nini, à quelques kilomètres de I'endroit où s'élève aujourd'hui la ville d'Aïn-Béida.
Les berbères électrisés par le courage de la jeune reine, remportèrent une éclatante victoire et forcèrent les Arabes à s'enfuirent en Tripolitaine.
La Kahéna instruite par l'expérience du passé comprit que les arabes vaincus, reviendraient en plus grand nombre, aussi longtemps qu'ils trouveraient en Afrique de quoi satisfaire leur passion pour le pillage. Elle résolut de rendre leur retour inutile en ruinant toutes les villes dont les richesses pouvaient tenter leur cupidité, et elle donna l'ordre de tout détruire dans la plaine et ainsi entourer la montagne d'un désert, qui serait la barrière la plus efficace à opposer aux envahisseurs. Malheureusement pour l'Afrique, cette exaltation sublime du patriotisme ne fut pas comprise par les Berbères, qui ne parvinrent jamais à s'élever jusqu'à la notion d'une nationalité commune réunissant toutes les tribus établies sur le même sol. Ils ne virent que le dommage momentané que leurs causaient les ordres de la Kahéna, et dès lors se détachèrent en grand nombre de sa cause. Les Arabes furent bientôt instruits de la situation du Maghreb. Un jeune musulman, Khâleb, fait prisonnier dans un combat, et que la Kahéna avait adopté, comblé de bienfaits et élevé avec ses propres fils, faisait passer à ses compatriotes des avis secrets.
En l'an 703, le général Hassan, à la tête d'une armée nombreuse tenta de nouveau la conquête de l'Aurès. Il se dirigea en ligne directe vers la montagne par Gabès et Gafsa, et y pénétra probablement par le versant méridional. A la nouvelle de son approche, la Kahéna appela les Berbères aux armes. Cette fois, sa voix ne fut pas écoutée, De rares contingents répondirent seuls à ses appels désespérés. L'héroïne comprit alors que s'en était fait de l’indépendance de son pays. On l'engageait à prendre la fuite ; elle repoussa ces lâches conseils, et, réunissant ses derniers fidèles elle se prépara à périr dignement.
Toutes les amertumes lui étaient réservées ; après avoir vu le peuple berbère l'abandonner au moment de la lutte suprême, elle eut la douleur de voir son fils adoptif la trahir au dernier instant.
Khâleb eut l’ingratitude de passer à l'ennemi et de guider lui-même l'armée musulmane à la rencontre de sa bienfaitrice. Les fils de la Kahéna, désespérant de la victoire avant la bataille et embrassèrent l’islamisme. La Kahéna attendit l'armée musulmane au centre de ses montagnes, dans l'Amphithéâtre d'El Jem où elle avait concentré tous ses moyens de défense. Le combat fut longtemps indécis, mais la supériorité du nombre donna la victoire aux arabes.
La Kahéna tomba glorieusement les armes à la main, Hassan eut la barbarie de décapiter son cadavre en 704 au lieu dit Bir el Khahina et d'envoyer sa tête au Khadji Abd-al-Mallk de Bagdad. Avec cette femme héroïque succomba l'indépendance berbère (Ernest Fallot : par delà la Méditerranée.)
Une tribu cantonnée dans l'Aurès porte, encore aujourd'hui, le nom de Beni-Barbar ( fils de Barbares ou Berbères) Après la Kahéna, les monts de l'Aurès n'entendirent plus aucun écho de sa voix. L'indépendance de leurs habitants ,jadis si vaillants de changea en servilisme. Les conversions à I'islamisme se multiplièrent, et la loi du Prophète ne compta plus que des fidèles tremblants agenouillés ou prosternés sous le cimeterre.. Quelque uns moins oublieux du passé, eurent pendant deux siècles qui suivirent encore quelque velléité d'autonomie, mais que pouvaient-ils contre les maîtres du Maghreb ? Puis le silence se fit dans les cœurs.
Pas tout à fait pourtant car il y eut encore, le feu couvant sous la cendre, des éclairs d'incendie à certaines époques.
On vit sous la dynastie des Fatimides, un réveil de montagnards de I'Aurès, quand rangés sous les ordres du fanatique Aben-Sezid ( l'homme à l'âne) ainsi appelé à cause se sa monture, ils se ruèrent sur la plaine avec les Zeisatas, ses prosélytes, et firent un carnage de leurs adversaires religieux et de leurs dominateurs musulmans. Ce ne fut qu'une courte période de résurrection d'une cause à laquelle il aurait fallut un apôtre plus entendu à l'art de la guerre et des partisans plus disciplinés L'homme à l'âne eut le sort des autres libérateurs de l'Aurès. Après cinq années de guerre, il paya son audace de son sang.
Ces Zeisatas, héritiers des traditions héroïques, les perdirent de vue pour aller fonder des royaumes à Tlemcen et à Fez, en établissant des colonies à I'occident de leurs montagnes. Leur émigration permis à des tribus inconnues auparavant, les Ouled-Abdi, les Ouled-Daoud et les Chaouia, de se fixer dans l’Aurès tandis qu'eux-mêmes, mêlés aux révolutions et aux guerres de I'Afrique du Nord, s'épuisaient progressivement.
Alors, à travers les siècles, les montagnards s'affranchirent des Turcs en leur payant un tribu insignifiant, s’enfermèrent dans leurs gorges et défilés comme des ouvrages de défense inexpugnables et se dérobent autant qu'ils le peuvent, au contact avec le reste de la civilisation. II n'est plus question d'eux dans I'histoire algérienne, jusqu'au moment où Abd-el-Kader se présente aux Berbères et à tous les groupes épars des indigènes comme le « Maître de l'Heure », prophète et capitaine alliant le génie de la guerre à celui de la diplomatie.
C'est au lendemain du traité de la Tafna que les populations belliqueuses de I'Aurès qui avaient donné asile au bey Ahmed, ennemi de la France, rentrent en scène et pendant plusieurs années, elles opposent une résistance énergique à nos meilleurs généraux. Le soulèvement cesse lorsqu'en 1848, Ahmet est capturé avec sa smala sur les bords de l'Oued Abiod.
Mais il reprend en 1848, aussitôt que Ben-Zian prêche dans toutes les oasis du Sahara la guerre sainte. Ben-Zian, retranché dans Zaatcha, tient pendant dix jours les Français en échec. La ville prise, il est fusillé. Mais son exécution ne désarme pas les habitants de l’Aurès. Canrobert ne vient à bout d'eux que par des actions très sévères.
Ce n'était pas la dernière des insurrections. En 1871, les montagnards embrassent la cause d’El Mokrani, l"insurrection de 1871 voir Villard Maurice ).
Une colonne envoyée contre eux les réduits à I'impuissance. En 1879, nouvelle tentative d'indépendance qui a pour résultat les mesures coercitives d’El Hammam. Tant il est vrai que la pacification de ces tribus remuantes n’a jamais été que factice. Les préjugés et les haines de races, obstacles à la confiance librement accordés, y ont sans cesse maintenu, et si l’ordre et la tranquillité y règnent c'est que la puissance française l’impose.
Aussi la civilisation française n’a t-elle guère pénétré parmi ces populations turbulentes qui ont gardé leurs mœurs primitives, n'ont fait que très peu de progrès.. peut-être auraient-ils, grâce aux nouvelles institutions et a l'action de celles-ci quoiqu'ils en soient inconscients, senti peu à peu que le nouvel état de choses était plus propre à favoriser leur bien-être matériel en supprimant les guerres continuelles qui ensanglantent leurs montagnes, si les fautes commises dans I'organisation politique de l’Aurès et le rôle mal entendu des bureaux arabes, l’impopularité des caïds et surtout la facilité laissait aux marabouts de faire une œuvre subversive de prédication.
Abandonné à la vie pastorale et agricole, les derniers berbères ne voient pas la mission civilisatrice de la France à leur égard. Ils ne comprennent pas que leurs troupeaux ne sont plus razzies comme autrefois par leurs voisins, s’ils peuvent les laisser paître dans les vallées sans être obligés de se tenir eux-mêmes constamment sur le qui vive pour repousser les voleurs, si la protection qui les défend est efficace et leur permet de donner du développement aux ressources naturelles de leur pays ; ils doivent en définitive tous ces avantages aux Roumis.
La France aurait-elle du mieux faire pour cette région ? « Quand on songe, disait- il y a peu d'années, un membre influent du parlement, à ce que la France à concentré d’efforts sur sa colonie algérienne de puis soixante ans, quand on repasse en mémoire les hommes qu'elle y a dépensé, les millions qu'elle y a enfoui ; quand on pense que chaque année la France a levé la dîme de son trop-plein de population, la dîme de son budget, la dîme de ses forces militaires et administratives, afin de fonder de l'autre côté de la Méditerranée dans une situation unique au monde, une colonie, et qu'après tous ses efforts on voit reparaître cet éternel doute ».
Cette page d'histoire se termine par la dernière insurrection qui embrasa l'Algérie entière et mena à l’indépendance de l'Algérie :
Le 1er novembre 1954, une embuscade fut tendue dans les gorges de Tighanimine à seule fin d'éliminer le caïd Hadj Sadock, fidèle partisan de la France qui était un, obstacle majeur pour la rébellion
Le couple d'instituteurs n’étaient pas visés, hélas le mari fut tué, son épouse grièvement blessée survécu à ses blessures.
A SUIVRE
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MOSTAGANEM
De Monsieur Alain ALGUDO
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BORDJ-MENAÏEL, LE FORT BLEUTE
J.M. L.
PNHA N°190 - Novembre 2010
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Depuis que le monde est monde, Bordj-Menaïel a toujours été Bordj-Menaïel.
Cette petite ville prospère était connue pour ses minoteries sa vigne et surtout son tabac.
On y accédait par une route accidentée, émaillée de viaducs qui après la traversée de l'oued Djemaa, faisait place à une trouée.
La localité avait été édifiée selon les normes d'urbanisme de l'époque, une grande rue un square, des îlots d'habitation en damier et pour les bâtiments officiels tout le faste du second Empire.
Le nom
Bordj-Menaïel a pour signification ou origine : I'verj Imenayen en kabyle (le fort des cavaliers), vous diront beaucoup d'habitants non sans une bonne dose de revendications sur ce rempart de la Kabylie.
D'autres soutiennent plutôt que cela dérive de Bordj Oum Naïel avançant La légende selon laquelle une sainte de la Hodna, du nom de Bella Aïcha, dont le souvenir est perpétué par le cimetière de la ville qui porte son nom, Lalla Aïcha.
Une troisième version soutient que cette nomination tire son origine de L'Bordj Lemniyel (Le fort peint ou bleu ?).
Histoire
Son nom est tiré de la période turque car durant l’invasion romaine, Bordj-Menaïel portait le nom de Vasara, allusion faite à l'ancienne Hippodium romain.
On retrouve toujours ce bordj d'avant l'époque turque devenu un hôpital durant la colonisation française.
Des vestiges d'une cité romaine, dont reste une sorte de moitié de mur sur laquelle une maison fut construite. Il y avait aussi un tunnel souterrain assez long, Une fontaine romaine, où l'eau coule toujours.
Mais durant la période turque, dés 1515, ces derniers ne se contentèrent pas d'une installation territoriale mais ils construisirent une forteresse qui servait de camp militaire afin d'assurer maintien de l'ordre et la sécurité dans toute la région jusqu'au littoral de Rocher-Noir, Courbet marine, Dellys et Tigzirt.
Les Turcs ont aménagé en 1515 un fortin à Bordj-Menaïel qui appartenait auparavant à un chef de la grande famille des Issers, qui lui donna le nom de Bordj «Oum Naïl» (Fort de la vierge Naïl). Ce fort était le seul palace habitable avec quelques gourbis alentours.
De toutes les invasions étrangères, c'est incontestablement l'Islam, apporté par les Turcs, qui a le plus profondément imprégné la population de cette région.
Ainsi, c'est à partir de cette forteresse surnommée Bordj-Menaïel, «le fort bleuté», que les Turcs étendaient leur domination sur les populations, l'appellation du mot Ménaïel est une définition provenant de la période turque car la lettre I porte deux points qui équivaut à l'alphabet employé dans la langue de la Turquie, manière de faire la phonétique. Aussi, il ne peut être question d'un mot français car la langue de Molière utilise le «y». Bordj veut dire «le fort », Ménaïel signifiant la couleur bleu étant donné que la forteresse avait toujours été peinte avec la couleur utilisée de la «Nila », allusion faite à la chanson chaâbi qui dit «dhak stah e aali li masbough ba nila».
La France en fait un Centre de colonisation créé dans le département Alger - arrondissement de Tizi-Ouzou, érigé en commune de plein exercice par arrêté préfectoral du 8 novembre 1870, confirmé par décret.
Elle est reliée par une route (actuellement autoroute) de grand trafic allant de Ménerville à Fort National et est situé à 70 km d'Alger, 25 km de Rocher Noir et 30 km de Tizi-Ouzou, elle a toujours offert aux passants une vue très agréable. La France a agrandi la ville en 1863 qui fut détruite pendant l’insurrection de 1871 puis reconstruite la même année et élargie en 1872.
Construction de l'Église, la Justice de paix et d'une prison civile en 1872, d'un hôpital auxiliaire avec des locaux administratifs, puis de la mairie en 1930, d'une gendarmerie et d'un hôtel des postes en 1932, d'un commissariat de police en 1956, d'un hôtel des finances en 1953. qui regroupe l'ensemble des services financiers, d'un marché couvert quotidien.
Elle a toujours été considérée comme un relais routier où de nombreuses écuries d'élevage de chevaux s'y trouvaient.
L'arrondissement de Bordj-Ménaïel comprenait 13 localités : Abbo-Afir - Bordj-Menaïel - Camp-du-Maréchal - Les Issers- Chabet-el- Ameur Dellys - Enza-Haussonvillers - Horace Vernet - Isserville Rebeval-Rouaffa.
Jusqu'à un passé récent des écuries recevant des chevaux, mulets et autres baudets ont existé. Lors de la présence française, la ville était surnommée la ville des Coquelicots.
Lors du tremblement de terre du 21 mai 2003, de nombreuses constructions furent détruites, notamment la mosquée, l'une des plus grandes d'Algérie.
Aujourd'hui
« La ville de Bordj-Ménaiel, dépendant territorialement de Rocher Noir, s'est réveillée, le 22 septembre 2010, dans la terreur. Un engin explosif dissimulé dans un sachet en plastique et placé à proximité du bureau de poste de la ville a tonné au passage des deux policiers. Ils sont morts sur le coup. La bombe a fait également trois victimes parmi les passants, qui ont été transportés dans le centre hospitalier de la ville. L'engin a été actionné à distance selon des sources dignes de foi.
La terreur reprend ainsi ses droits après une période d'accalmie relative, alors que les services de sécurité poursuivent leur lutte. Mais l'insécurité dans la région est chronique. Le centre du pays vit une période des plus critiques depuis l'accession de l'Algérie à l'indépendance.
En plus du terrorisme, le grand banditisme apporte, chaque jour, à la région son lot de malheur. Régulièrement des citoyens sont délestés de leurs voitures ou agressés à l'arme blanche. Des voyous et psychopathes dressent de faux barrages et raflent tous ceux qui empruntent les routes de certaines localités environnantes.
Même si l'étau se resserre de plus en plus sur les groupes armés affiliés à la nébuleuse Al-Qaïda au Maghreb (AQMI), des actions sporadiques se produisent à chaque baisse de vigilance. Le début du mois de septembre en a été émaillé. Ainsi, le 1er septembre, un kamikaze à bord d'un véhicule s'est jeté contre un convoi militaire à Zemmouri, une commune relevant territorialement de Bordj-Ménaiel, causant la mort de deux soldats et des blessures à cinq autres. Cet attentat intervenait quelques semaines seulement après la mise hors d'état de nuire de l'émir Hodeïfa El Assimi et de deux acolytes » (extrait d'Afrik.com)
Où sont la paix et la prospérité française ?
J-M L
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Comparaison entre l'Algérie des années 1990 et la France d'aujourd'hui
(Rappel de Mme A. Bouhier)
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Remarquable analyse d'un auteur algérien. Quelle finesse!! Aucun journaliste ou politique français n'est capable d'écrire cela.
Pour ma part, je complèterai seulement par la citation d'un bon auteur et Maître : Jérémie
"Ils ont des yeux et ne voient point, ils ont des oreilles et n'entendent point".
Prions pour que les yeux et les oreilles s'ouvrent vite...
Auteur : Karim Akouche est poète, romancier et dramaturge.
Publié le 11 janvier 2016 à 10:59 /
Article toujours d’actualité
Après les horreurs du vendredi 13, la France de demain ne sera plus comme avant. Elle ne sera plus la France d’hier. Elle sera semblable, à quelque chose près, à l’Algérie des années 90 : Paris sera Alger. Toulouse, Blida ou Média. Lyon, Ain Defla. La Kabylie, la Bretagne.
Ce n’est pas difficile à prédire. C’est même une évidence pour celui qui, comme moi, a vécu la guerre civile algérienne, côtoyé la violence aveugle des fous de Dieu, marché sur des flaques de sang et des morceaux de chair.
Ça a débuté comme ça : en bruit de pantoufles avant que ne retentissent les kalachnikovs et les bombes.
On pensait que c’était un jeu. Comme ces pétards que les enfants faisaient exploser lors de l’aïd et de l’anniversaire de la naissance du Prophète.
On riait des qamis et des barbes hirsutes des intégristes. C’étaient nos "pères Noël". Ils n’apportaient pas de cadeaux, ne distribuaient pas de bonbons, mais ils aimaient nous raconter des histoires obscures sur l’enfer et le jugement dernier.
On trouvait leur façon de s’habiller exotique. Car, à la fin des années 80, rares étaient ceux qui portaient ces accoutrements importés d’Afghanistan et d’Iran.
Puis ça a continué comme ça : par l’intimidation. Avec des mots qui, certes, étaient trop violents pour mes oreilles d’enfant, mais c’était de simples mots. Les islamistes harcelaient les femmes libres, les démocrates et les laïques. Ils traitaient les progressistes de dépravés, de suppôts des croisés.
Parfois, ils donnaient des coups de poing, de simples coups de poing. Puis ça a progressé. Ils utilisaient des objets, de simples objets : des galets, des cordes, des seringues d’acide, des couteaux, des haches…
Ensuite ça a basculé : les islamistes ont embarqué le peuple dans un bateau ivre, pour un long voyage au bout de la nuit…
Sans crier gare, ils ont sorti les armes à feu, les fusils à canon scié, les bonbonnes de gaz et tout leur attirail de guerriers.
Ce n’était plus un jeu. C’était sérieux mais c’était la folie...
Les barbus tuaient les poètes, les fonctionnaires, les enseignants, les médecins… puis les gens ordinaires, le « petit » peuple.
Les journalistes rasaient les murs, ils étaient devenus des nécrologues. Ils n’écrivaient plus d’articles, ils comptabilisaient les morts. Les cafés et les trottoirs se vidaient, les gens se donnaient rendez-vous aux cimetières et parfois on enterrait à la pelleteuse.
Grisé par le sang, l’islamiste a redoublé de violence. On l’a vu éventrer les femmes enceintes, jeter des bébés dans des micro-ondes, égorger des villages entiers : Bentalha, Beni-Messous, Larbaa, Raïs… des toponymes qui donnent encore froid dans le dos.
L’islamiste est partout le même. Il carbure à la haine. Son vocabulaire est pauvre. Il ne maîtrise que quelques verbes, souvent équivalents : tuer, exécuter, massacrer, violer, brûler, détruire… Il ne lit qu’un seul livre, le Coran. Il n’obéit qu’aux seules lois d’Allah et de son Prophète. Il dort avec un seul mot dans la bouche : vengeance. Il ne se réveille qu’avec un seul désir : éliminer un maximum de mécréants.
L’islamiste joue au sourd et au muet. Toute tentative de dialogue avec lui est vouée à l’échec. Il préfère le monologue. Il refuse le débat d’idées. Il préfère le terrain de la menace. Gare à celui qui le contredit.
L’islamiste n’a pas d’arguments mais il a des versets. Il n’a pas de cœur. Il ne connaît pas la peur. Si les balles tombent sur lui, il les affrontera avec le sourire. Sa devise : la vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la mort.
Pour lui, la mort, c’est l’éternel bonheur : il s’y abreuvera aux rivières de vin (breuvage interdit sur terre !) et à la tendre chair des houris.
L’islamiste n’est pas un animal de compagnie. On ne doit pas le caresser dans le sens de la barbe, ni lui faire confiance. Il a le cerveau malade. Les crocs acérés. La gâchette facile. Son entreprise s’appelle la terreur.
L’islamiste ne réfléchit pas, ne recule pas, il fonce. Il ne rafistole pas, il achève. Son objectif : soumettre l’humanité à la Oumma, la nation islamique mondiale. Son droit chemin lui a été tracé par Allah et Mahomet. Les autres voies lui sont impénétrables.
Jouer avec lui, c’est comme badiner avec un serpent. Il glisse. Il mord. On ne peut pas le dompter, il tue. En voulant l’instrumentaliser dans leur stratégie contre leurs démocrates, les dirigeants algériens l’ont payé cher lors de la décennie noire. Le serpent leur a échappé des mains. Bilan : plus de 200 000 morts.
L’islamiste est perfide. Il affectionne la ruse. Il brouille les pistes. Il peut être un loup solitaire, mais il chasse souvent en meute. Il n’aime pas la démocratie, mais il s’en sert. Il déteste la liberté, mais il en abuse pour propager son idéologie. Il n’aime pas les technologies, mais sait remarquablement s'en servir afin de faire avancer sa cause.
L’islamiste a repéré les failles des démocraties occidentales. Il sait qu’il est un bourreau, mais il joue à la victime. S’il brandit le spectre de l’islamophobie, c’est pour culpabiliser le démocrate et le pousser à céder du terrain où il sèmera ses graines.
L’islamiste gagne chaque jour des batailles contre l’Occident. Il a réussi à restreindre la liberté de pensée, à séparer les femmes des hommes dans certaines piscines, à halaliser les menus scolaires et même les rations militaires, à fragiliser la laïcité, à ouvrir des mosquées dans les universités, à gagner des procès contre des États, à verrouiller plusieurs institutions internationales…
L’islamiste a deviné le gouffre spirituel dans lequel est plongé l’Occident. Il compte le combler. Il sait que le capitalisme sauvage crée des solitudes et que celles-ci tuent dans les villes. Il a trouvé un remède au stress et à l’ennui : son prosélytisme dynamique et le mirage de sa fraternité.
L’Occident est en train de perdre sa guerre contre l’islamisme.
Sans courage ni lucidité, il perdra aussi son âme.
La France, quant à elle, risque de devenir très vite l’Algérie des années 90.
Karim Akouche
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Source Gallica - N° 35. 10 Janvier 1925.
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LE PUNCH DE L'INTERNAT
En ce temps là, Hippôcortès fut jugé le plus digne et, drapé de velours rouge parsemé de caducés d'or reçut en grande pompe les adeptes de l'Ecole.
Or le plus jeune avait convié ceux qu'il faut honorer et leur avait dit en substance : « Venez mêler vos chants à nos louanges, venez vider les amphores, et l'hydromel divin calmera vos gosiers secs et réveillera vos cerveaux endormis car disaient nos pères :
Il vaut mieux boire et dégu....
Que de n'pas boire et d's'emm....
Et ceux de la Judée lointaine, et ceux d'Hippone et ceux d'Ibère, avaient quitté leurs occupations, et venaient.
Car les dessins de l'Internat sont inédits. Et vers l'époque de la pleine lune ils furent tous rendus. Par les marches de marbre blanc, les vierges passèrent d'abord. Et le marbre resta blanc, tant leur cœur était pur et leurs pieds légers.
Puis vinrent les hommes de la cité et ceux des campagnes, et le marbre fut sali — tant leur cœur était méchant et leurs pieds poussiéreux. Car ils avaient beaucoup marché. Et Quotidianus vint aussi, qui proclame au peuple les victoires, et les défaites, et ce que le peuple ne sait pas, et ce qu'il sait déjà — Mais il but trop et, au soleil suivant, ne sut pas chanter comme il sied, les louanges de ceux qui l'avaient fait boire.
Or tous ceux qui étaient venus ayant pris place au banquet, Hippôcortès qui était le meilleur au milieu des bons, leur dit : « Mes frères, car nous sommes tous frères en notre art, je vous aime comme vous m'aimiez et nous nous aimerons toujours ainsi, si vous le voulez bien. » Et nul écho ne se fit à ces paroles sages.
On vit même Perfldius boire aux coupes de ses amis qui ne regardaient pas. Car les élèves de l'Ecole ne veulent pas s'aimer. Alors avec des larmes, Hippôcortès se tut.
Et celui qui venait d'Ibère dit : Nous vous donnons l'aqua dite simplex, et le ricinus et le santalol album. Nous vous donnons l'herbe que vous faites brûler et qui guérit ceux qui réclament vos soins. Et vous ne faites pas que nous soyons des vôtres à l'Hospicus ! » Alors, avec des larmes, celui qui venait d'Ibère se tut.
Et les adeptes pleurèrent quoiqu'ils n'aient rien compris car il avait parlé comme on parle en Ibérie.
Or, l'heure était venue de boire. Et lorsqu'ils eurent bu, leurs yeux s'ouvrirent et leur cœur s'épanouit et ils devenaient bons.
Et ils rirent lorsque Parresius et sa compagnie célébrèrent le rite en chantant les chants de la malice. Car le rite veut que ceux de l'Ecole rient de ceux qu'ils honorent. Enfin l'aréopage entonna les chants d'adieu et comme ils avaient bien bu, tous s'en furent contents.
R. M.
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Les Spartiates d’Eckmühl
Pieds -Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui N° 190 - Novembre 2010
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On ne peut parler du basket-ball et du hand-ball nord-africain sans évoquer les fameux Spartiates d'Oran, club fondé en 1929 sous I'impulsion du regretté R.P. BAILLY.
Cette société succédait à la Joyeuse Union Sportive. François NAVARRO, qui était président du Cercle Don BOSCO, en fut le premier président. Notre excellent ami François TERRES devait succéder en 1934 à François NAVARRO démissionnaire.
Cheville ouvrière du club depuis sa création, TERRES était bien secondé par Jean GARDEISEN, secrétaire, et CARRINO Frédéric, I'inoubliable manager.
Antoine RAYGAL à la demande de son ami TERRES, prenait place en 1944 dans le fauteuil présidentiel. Pour des raisons de santé, I'ami RAYGAL décidait de se retirer en 1948. François TERRES, qui demeurait l'animateur n°1 du club, reprenait la présidence jusqu'en 1962.
Les Spartiates, dont la principale activité était, à I'origine, le football, devaient abandonner cette discipline pour ne s'intéresser qu'au basket-ball.
Cette section était animée par Raphaël ONTENIENTE, retour du régiment, qui s'était déjà distingué dans l'équipe champion du Maroc. Frédéric CARRINO eut le mérite de former tous les Spartiates jusqu'en 1952. François GARRIDO, orfèvre en la matière, devait prendre le relais.
" Les Spartiates," était sans doute I'un des clubs les mieux organisés d'Afrique du Nord. Le «Patro » d'Eckmühl avait d'ailleurs de nombreux atouts pour réussir, des dirigeants compétents et des installations modernes qui faisaient I'envie des grands clubs visiteurs. Les dirigeants poussaient au maximum le recrutement des jeunes dans ce populeux faubourg d'Eckmühl, riche en éléments de valeur. Les Spartiates fournissaient chaque année, dans les différentes sélections de cadets, juniors, espoirs et équipes oraniennes et nord-africaines. Des joueurs cotés.
En basket d'abord, pendant seize ans, personne ne leur contestera la première place parmi les grandes formations d'A.F.N. Son palmarès est inégalable.
Champion d'Oranie: 1931, 1932, 1933, 1934, 1935, 1936, 1937, 1938, 1939, 1940, 1941, 1946, 1948, 1950, 1951.
Champion d'A.F.N : 1934, 1938, 1939, 1941, 1946, 1948, 1949,1950.
Champion d'Algérie : 1936, 1937, 1938, 1946, 1947,1949.
Coupe d'Oranie: 1942, 1944.
Challenge d'Oranie : 1943, 1944, 1945.
Les Spartiates ne se contentèrent pas de briller en A.F.N. Ils effectuèrent de nombreuses tournées en France, Belgique, Luxembourg. Vainqueurs du Tournoi international de Genève, n'ont-ils pas battu également, en 1949, les champions de France.
Sur le plan international, ils reçurent tour à tour les équipes en renom : SOKOLS de BRNO (Tchécoslovaquie), la Sélection de Belgique, Paris, Mulhouse.
Les Spartiates créèrent en 1951 la section hand-ball sous I'impulsion de Guy MARTY, assisté d'un groupe d'amis.
Les anciens basketteurs du club. captivés par cette nouvelle discipline sportive. eurent tôt fait de s'imposer parmi les meilleurs.
Dans le Jeu à XI, ils remportèrent la Coupe d'Oranie en 1953, 1954 et 1955, ainsi que la Coupe d'Algérie 1953 et 1954.
Et puis il y eut naturellement le jeu à VII particulièrement spectaculaire. Sous la direction de François GARRIDO, les Spartiates firent sensation dans un style offensif «tourbillon », dominant manifestement leurs rivaux.
Ils furent champions d'Oranie 1955, 1956, 1957, 1959, 1960, 1961 et 1962. Les juniors étaient champions d'Algérie 1961, 1962.
Leurs plus beaux titres de gloire : Champions de France division d'Honneur en 1960 ; Champions de France Excellence en 1961.
L'année suivante, ils accédaient une nouvelle fois à la finale du championnat de France à Paris. Ce furent leurs dernières joies avant I'issue fatale : la dissolution.
Les Spartiates, nantis de plusieurs internationaux, se distinguèrent en Coupe latine à Oran.
Véritables "globe-trotters"', ils firent apprécier la valeur du hand-ball nord-africain dans les plus importantes villes de Suède, Danemark et Allemagne (à quatre reprises).
Après leur tournée en Suède, le président TERRES eut le privilège de recevoir une lettre de félicitations de M. I'Ambassadeur de France en Suède, témoignant que les Spartiates, par leur tenue exemplaire sur le terrain et leur comportement dans ce pays, avaient grandement servi la cause de la France.
Les sportifs oranais eurent également la joie d'applaudir les grandes équipes étrangères Goppingen (Allemagne), champions d'Europe ; Kristianstad-Luigi (Suède) ; Sélection Danemark ; Haslogh (Allemagne), etc. Les Spartiates, un grand nom dans l'histoire du sport en A.F.N., a laissé beaucoup de mélancolie au cœur des Oranais.
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MILLE-FEUILLE VANILLE
Par Maurice Villard
ACEP-ENSEMBLE N°284
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Pour 4 personnes ; Préparation : 30 mn - Repos : 2 h - Cuisson : 5 mn.
PREPARATIONINGREDIENTS
Pour le biscuit : 80 g. de beurre
- 2 jaunes d'œufs
- 50 g. de sucre
- 55 g. de farine
- 10 g. de poudre d'amande
- 1 pincée de sel.
Pour la crème : 150 G. de lait
– 2 jaunes d'œufs
– 25 g. de sucre - 1 gousse de vanille
– 15 g. de farine
– 11.5 g. de crème fouettée
– 5 cuil. à soupe de compote d'abricots
– Sucre glace.
PREPARATION
Préparez le biscuit : Mélangez tous les ingrédients un par un pour former une boule de pâte. Réservez-la 2 h au frigo. Etalez-la sur une épaisseur de 3 mm, puis détaillez-la en bandes de 8 cm sur 3 cm. Faites cuire les bandes à 180" C th. O; pendant 5 min jusqu’à l'obtention d'une jolie couleur dorée"
Préparez la crème : Faites chauffer le lait avec la gousse de vanille coupée en deux et laissez infuser. Fouettez les jaunes d'œufs avec le sucre, puis ajoutez la farine et le lait vanillé sans cesser de remuer. Laissez refroidir puis ajoutez la crème fouettée.
Versez la préparation dans une poche à douille. Déposez sur chaque assiette une bande de compote d'abricots de 8,5 à 3,5 cm environ, puis un biscuit croquant.
Garnissez-le de crème légère à la vanille. Répétez cette opération deux fois.
Saupoudrez de sucre glace.
Décorez à votre guise : par exemple, avec une barre de chocolat noir très fine sous le croustillant de confiture d'abricot dans l'assiette ou d'une rondelle d'ananas confit.
Jacques GATT
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Départ des colons
DISCOURS DE M. L'ABBÉ DEGUERRY.
Démocratie pacifique N° 305, 11 novembre 1848
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Nous sommes heureux de pouvoir reproduire l'admirable discours prononcé par M. Deguerry. Voilà bien l'inspiration du Christ, voilà bien la parole sainte qui fait bénir le prêtre et qui rend à l'Eglise la confiance et l'amour du monde :
Chers concitoyens.
Le malentendu qui n'a existé que trop longtemps entre le pays et l'Eglise est à jamais fini. Paris donne de cet-heureux évènement, depuis plusieurs mois, des témoignages successifs, parmi lesquels il faut compter cette religieuse cérémonie qui se renouvelle aujourd'hui pour la neuvième fois.
Comment ce funeste, ce désastreux malentendu aurait-il pu persister, lorsque la France proclamait que désormais sa devise éternelle était Liberté, Egalité, Fraternité ; lorsqu'elle déclarait que les droits et les devoirs que ces trois mots renferment allaient être constitués dans ses lois, et recevoir par diverses institutions leur réalisation pratique et sociale.
En effet d'où nous sont venues la liberté, l'égalité, la fraternité ? n'est-ce pas de cette-montagne où le Christ, en enseignant le monde, le bénissait, et du haut de cette autre cîme sanglante où il lui donnait en mourant pour lui la preuve qu'il l'aimait d'un amour immense.
Sans doute, l'Eglise a eu à lutter contre le paganisme pour établir dans l'univers l'empire de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Il lui a fallu arracher l'homme d'entre les mains de son semblable qui s'était fait son maître, se l'appropriant comme une chose dont il pouvait user à son gré, qu'il pouvait vendre même au besoin. Alors la liberté de l'individu a été proclamée. Il a fallu ensuite à l'Eglise proscrire l'excès des distinctions, condamner tous les privilèges qui n'avaient pas pour raison première le mérite personnel ; alors les diverses classes de la société n'ont plus été étrangères les unes aux autres, ça été l'heure bien heureuse du triomphe et du règne de l'égalité.
Un pas plus difficile encore restait à faire. Il s'agissait d'arriver au terme complet de l'union des hommes entre eux, à la fraternité. L'église travailla tout de suite à la réaliser par l'établissement de l'assistance charitable, dont elle multiplia les ressources et les moyens autant qu'elle le pût.
Ce travail, c'est l'œuvre sociale, qui veut et doit prendre aujourd'hui tout son développement, sans que pour cela ni la famille ni, la propriété ne soient entamées, ce qui serait une ruine au lieu d'un progrès véritable.
Mais il faut être aveugle pour ne pas comprendre qu'il y a impossibilité d'empêcher l'avènement tôt ou tard de la fraternité, dans un pays où la doctrine chrétienne est connue.
Aussi bien cette doctrine, comment se présente-t-elle ? Avec deux faits qui dominent les autres, qui les gouvernent tous : avec le fait de la création et le fait de la rédemption. Or, je voudrais savoir de quelle manière on pourrait s'y prendre pour contester que, par la création, les hommes sont tous frères. Ne le sont-ils pas davantage encore par la rédemption?
Entendez Jésus-Christ : ô hommes, vous êtes tous frères, quels que soient votre pays et votre rang ; vous êtes tous frères, et moi, fils de Dieu, je suis le frère de chacun de vous.
Chers concitoyens, ce que l'on a fait déjà pour vous, les soins dont vous avez été l'objet, ceux qui vous seront prodigués encore, la destinée qu'on vous a préparée, le bien-être qu'on a la confiance de vous faire recueillir avec le temps, voilà des preuves d'une véritable fraternité, voilà un commencement de ses réalisations sociales. C'est par des actes semblables et par d'autres plus grands encore que notre glorieuse et aimée France apparaîtra à l'univers comme une mère tendre qui chérit tous ses enfants, qui s'occupe avec sollicitude de leur intérêt intellectuel, moral et matériel, sans les priver pour cela de leur liberté d'action. Et puisque la France a reçu de Dieu la mission de propager ce qui est vrai et ce qui est juste, les peuples se faisant à son image, les citoyens de chaque pays, à l'exemple des Français, seront tous frères. La fraternité se dilatant encore, marchant à ses conquêtes successivement, l'es barrières qui séparerai les peuples de l'Europe aujourd'hui s'abaisseront; ils s'uniront enfin pour s'entraider, après s'être cherchés si longtemps pour s'entre-détruire ou avoir échangé seulement avec habileté leurs richesses respectives. Un plus beau spectacle encore se montre à mon regard dans l'avenir, ce sont les cinq parties du monde unies par les sentiments et les actes réciproques de la fraternité, s'embrassant avec effusion de joie et de bonheur au milieu de ces acclamations. L'égoïsme individuel et national est terrassé, le règne du Christ sur la terre est enfin advenu. QUE VOTRE RÈGNE VIENNE.
J'entends des voix contradictoires qui vont me crier : Utopie ! Utopie ! Utopie! Mais ces utopies, je les trouve dans l'Evangile, dont je ne fais que vous traduire l'esprit et la parole : Mon Père, disait le Sauveur, que les hommes soient un comme nous sommes un, qu'ils soient consommés dans l'unité de l'amour réciproque et de tous les devoirs que cet amour impose. Utopies ! Ah ! votre mémoire est infidèle, elle ne répète pas bien la leçon de vos aïeux, les païens ; eux, ils répondaient à des apôtres : C'est gens-là sont ivres, c'est une folie. Oui, ivres du désir d'être utiles à leurs frères. Sublime ivresse! Adorable folie qui triompha de ces cruels, les maximes :
Chacun pour soi, chacun chez soi. En vérité, je vous le dis, elle les vaincra encore de plus en p!us.
Chers concitoyens, permettez-moi de vous donner quelques conseils.
Tout sera nouveau pour vous sur la terre de l'Algérie. Il est une reine qui vous gouvernera, c'est l'opinion que l'on a appelé la maîtresse du monde, mais vous allez vous la faire vous-même et vous donner par elle un esprit public; faites la vraie, pure, élevée dans ses jugements.
Il est trois choses qu'il faut glorifier par-dessus toutes les autres, l'amour du travail, le respect de la loi et le dévouement fraternel. C'est par le travail que l'homme s'honore et s'ennoblit ; c'est dans le travail qu'il trouve ses jouissances les plus vraies et les plus vives. Saint Paul a prononcé la sentence que l'homme qui ne travaillait pas n'était pas digne de vivre. Sans doute l'œuvre à laquelle vous vous êtes dévoués volontairement aura ses jours et ses heures de grande fatigue, mais vous n'ignorez pas que l'homme grandit à proportion des efforts qu'il fait et des difficultés qu'il surmonte. Pour vous soutenir, vous ne perdrez pas de vue que vous êtes les seconds conquérants de l'Algérie ; que par vous elle sera définitivement gagnée à l'agriculture, à l'industrie, à la civilisation.
A l'amour du travail, joignez le respect de la loi. Nul succès, nulle prospérité privée et publique ne sont possibles sans l'ordre; mais l’ordre c'est la loi. Il ne nous est plus permis de nous plaindre d'elle, puisque c'est nous qui la faisons. Avant que la République nous eût donné le suffrage universel, l'on pouvait avoir des prétextes contre le respect dû à la loi et les trouver fondés. Mais actuellement elle est notre ouvrage; les législateurs qui la votent sont choisis par chacun de nous. Assurément, la loi n'est pas sans défauts : tout ce qui vient de l'homme participe de l'infirmité ; le temps nous les signalera, et, par l'élection d'hommes qui auront comme nous la conscience de ces défauts, il nous sera facile de les corriger pacifiquement.
« Enfin, que le premier honneur soit toujours décerné parmi vous au dévouement fraternel. Inscrivez sur la pierre, sur le marbre, sur l'airain, le nom de celui qui l'aura pratiqué. Donnez ce nom aux rues, aux places de vos villes. Transmettez-le couver, de bénédictions à vos enfants auxquels vous aurez appris par quels services éminents à l'égard de ses semblables, celui qui le portait s'est rendu à jamais célèbre. Si dans l'ordre de la valeur personnelle le savoir est au-dessus de la fortune, l 'immolation de soi-même à l’intérêt d'autrui, est placée bien au-dessus encore de la science.. Adieu donc, chers concitoyens, bien-aimés frères, adieu.
Fasse le ciel que toutes les nouvelles qui nous arriveront de vous soient bonnes, et bonnes aussi toutes celles que nous vous enverrons ! Puissions-nous apprendre que le climat ne vous a pas été méchant et que la terre vous a largement récompensés de vos travaux ; que vos cités sont bâties et que vous y jouissez de tous les biens que vous aviez espérés en consentant à vous séparer de vos amis et de vos parents ! Puissiez-vous apprendre que notre labeur pour nous constituer dans l'ordre et dans le bien-être s'achève sans secousse et sans violence ; que les regrets même légitimes étant mis de côté, toutes les mauvaises inspirations de la cupidité étant sacrifiées, nous ne songeons pas à restaurer les ruines de formes politiques vieillies et tombées, mais à exercer avec droiture et conscience le pouvoir souverain en nommant aux fonctions qui relèvent immédiatement de lui, les hommes les plus capables et surtout les plus dignes, c'est-à-dire d'un dévouement reconnu et d'un désintéressement éprouvé.
Pour cela, il faut que la patrie et la religion s'unissent étroitement de plus en plus et restent à jamais unies. Car, sans le Christ, point de liberté sage, point d'égalité juste, point de fraternité raisonnable. Aussi nous vous demanderons de déposer à côté du signe de ce Fils de l'Homme, à côté de la croix, ce drapeau que nous allons bénir ; à côté de la croix en présence de laquelle vous formerez vos alliances conjugales, vous ferez baptiser vos enfants ; vers laquelle, vous tournerez vos regards pour reprendre courage dans vos peines et vous consoler dans vos souffrances ; entre les bras de laquelle, enfin, vous rendrez votre dernier soupir avec la certitude pour vous d'un monde meilleur, où du moins nous nous retrouverons, si nous ne devons plus nous revoir ici-bas.
Adieu, une dernière fois !
Ce discours a été interrompu souvent par des acclamations. Il a été couvert d'applaudissements auxquels se mêlaient les cris de vive M. Deguerry !
M. Deguerry, après la bénédiction du drapeau et des bateaux, a remis entre les mains de M. le capitaine du convoi, 400 F pour les plus pauvres des colons..
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VOYAGE A TRAVERS L'ALGERIE
Par Georges Robert, 1897, 2ème partie, pages 223-229
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HISTOIRE DE YOUSSOUF
M. Christian, dans son intéressant ouvrage sur les marins, corsaires et aventuriers, dépeint ainsi la vie de Youssouf jusqu'au jour où nous le trouvons capitaine de chasseurs algériens, envoyé extraordinaire à Bône.
La formation des corps indigènes paraissait au général Clauzel un chef-d'œuvre de génie; il croyait préparer, par cette création, un commencement de fusion entre les deux races arabe et française; mais, au lieu de rallier à nos intérêts quelques tribus puissantes, il se mit à recruter des vagabonds et des maraudeurs dont l'affluence dépassa bientôt l'effectif de deux bataillons. On s'adressa, pour obtenir des renseignements sur le mode d'organisation de ce corps, à un certain Joseph, Youssef ou Jusuph, car on l'écrit de bien des manières, et Joseph, Youssef ou Jusuph, n'en sait pas lui-même l'orthographe.
L'histoire de cet homme était assez curieuse pour que nous en donnions une esquisse, en lui prêtant le nom de Yusuf, sous lequel il est vulgairement connu en France et en Afrique.
Selon les récits plus ou moins apocryphes de M. Genty de Bussy, ancien intendant civil à Alger, Jusuph est né à l’île d'Elbe, où, bien jeune encore, il se rappelle avoir figuré, en 1814, sur les genoux de Napoléon ; mais il n'a, dit-il et dit-on, conservé aucun souvenir de sa famille, et toutes les recherches faites à cet égard seraient restées infructueuses.
En 1814, donc, il pouvait avoir sept ans, et fut embarqué pour Florence, où les personnes qui prenaient soin de lui voulaient le mettre au collège ; mais le navire qui le portait tomba au pouvoir d'un corsaire qui le conduisit à Tunis. Jusuph échut au bey. Placé dans le sérail de ce prince barbaresque, et improvisé musulman, il noua plus tard une intrigue avec l'une des filles du bey, et celle-ci devint enceinte. Suivant le roman historique dû à la plume officielle de M. Genty de Bussy, qui se déclare parfaitement édifié sur cette aventure, Jusuph, découvert dans un de ses rendez-vous par un des eunuques du sérail, prit sur-le-champ l'audacieux parti de le suivre dans les jardins et de l'attirer dans un massif, où il le massacra. Le corps de l'esclave est jeté dans une citerne profonde, Jusuph n'en conserva que la tête, et, le lendemain, pendant que sa maîtresse l'entretenait des vives terreurs auxquelles elle était en proie, il la conduisit dans une chambre voisine, et, dans une des armoires, lui montre la tête de l'eunuque dont il avait arraché les yeux et la langue redoutée. Mais le secret des amoureux n'étant pas assez garanti, Jusuph prépara son évasion. C'était en 1830 ; le brick français l'Adonis se trouvait en rade ; un canot devait y conduire Jusuph. Mais cinq Turcs sont apostés pour s'opposer à sa fuite. Des sentiers détournés qu'il a pris, Jusuph les a vus ; il a remarqué qu'ils ont laissé leurs fusils en faisceaux à quelque distance ; Il s'élance de ce côté jeter les armes à la mer, se débarrasser de deux de ces hommes, mettre les autres en fuite, gagner le canot, c'est pour lui l’affaire d'un moment.
« L'Adonis avait ordre de rallier la flotte française. Peu de jours après, Jusuph débarquait avec nos troupes à Sidi-Ferruch. Pendant la campagne, il resta attaché au service de M. de Bourmont, et fut placé ensuite sous les ordres du commissaire de police d'Alger. » Tel est le narré de M. Genty de Bussy, dans lequel nous ne trouvons qu'un fait dont cet intendant puisse être bien informé, c'est-à-dire l'emploi subalterne de Jusuph dans la police. Le général Berthezène, qui vit de près Jusuph avant M. de Bussy, ne vise pas au roman, et, dans un écrit fort sérieux, pose nettement les faits sans capituler avec les besoins de la phrase et les délicates exigences du langage. « L'histoire de Jusuph, du moins telle qu'il la raconte, dit M. Berthezène, tient beaucoup du roman. Élevé dans le sérail et destiné aux plaisirs des souverains de Tunis (le terme est cru, mais il ne m'appartient pas), Jusuph ou Joseph eut le bonheur de plaire à la fille de son maître.
Un esclave l'ayant surpris dans un rendez-vous amoureux, il le fit venir dans sa chambre et, pour acheter son silence, lui jeta une poignée d'or. Pendant que l'esclave se baissait pour ramasser les quadruples, épars sur le tapis, Jusuph le tua d'un coup de poignard, et, après l'avoir coupé en morceaux et salé, il offrit à sa belle maîtresse une main, un oeil et la langue de ce témoin dangereux.
Ce présent allégorique fut très agréable à la princesse, et redoubla son amour pour un homme qui savait si bien la mettre à l'abri de toute indiscrétion. Une autre fois, un jeune mameluk, camarade de Jusuph, l'offensa ; celui-ci dut dissimuler pour assurer sa vengeance ; bientôt l'occasion se présenta, et, dans une partie de chasse, il sut se défaire de son ennemi assez habilement pour n'être pas soupçonné de meurtre. Cependant, la fortune se lassa de lui être favorable.
Accusé d'avoir volé des diamants pour une somme de quarante mille francs, et n'ayant pu se disculper, il fut obligé de chercher son salut dans la fuite. Il y réussit, et passa à Alger où il fut employé à la police. Soit qu'il voulût rentrer en grâce, soit que l'intrigue fût un besoin pour lui; on assure qu'il rendait des comptes au souverain de Tunis. Le général en chef en fut instruit, le fit arrêter, mettre aux fers à bord d'un vaisseau, et ensuite en prison à Alger pour être jugé par un conseil de guerre comme espion. C'est pendant cette captivité qu'il fut, par hasard, consulté sur l'organisation à donner à un corps d'Arabes à cheval. Ce fut un trait de lumière pour Jusuph, et l'espérance illumina son cachot. Il imagina immédiatement la création d'un escadron de mameluks, uniquement consacré à l'escorte du général en chef, et dont il serait le capitaine. Ce projet sourit à la vanité théâtrale de M. Clauzel. Les fers de Jusuph furent brisés; mais plus tard, le ministre de la guerre refusa les fonds nécessaires à l'entretien de cette troupe, dont il n'approuvait point la formation et l'emploi exceptionnel. Les mameluks furent licenciés, et passèrent, avec Jusuph, aux chasseurs algériens, qui devinrent le noyau de nos quatre régiments de chasseurs d'Afrique. Jusuph manœuvra si bien, que le général Clauzel parvint à lui procurer un brevet régulier de capitaine. Telle fut l'origine de la fortune de cet aventurier. » On peut choisir entre la version de M. Genty de Bussy et celle du général Berthezène.
Quoi qu'il en soit, Youssouf sut, par son courage et son intelligence, faire rapidement son chemin; après le hardi coup de main qui le rendit maître de Bône, il fut nommé chef d'escadron en 1833, puis officier de la Légion d'honneur en 1835.
Après avoir battu Abd-el-Kader pendant l'expédition de Tlemcen, en 1855 Youssouf reçut, en récompense de sa brillante conduite, le titre, qui resta honorifique, de bey de Constantine.
Nommé ensuite commandant de spahis à Oran, puis colonel commandant toute la cavalerie indigène, en 1841, il fut élevé au grade de maréchal de camp hors cadre en 1845. C'est alors qu'il vint à Paris, où il se maria avec la nièce du général Guilleminot après s'être converti à la religion catholique.
Nommé général de brigade en 1851 et inscrit sur les cadres de l'armée régulière, il fit l'année suivante, l'expédition de Laghouat et fut nommé grand-officier de la Légion d'honneur.
Investi du commandement de la division d'Alger en 1855, il reçut le grade de général de division, prit une part brillante à l'expédition de Kabylie, repoussa, en 1860, les bandes marocaines qui avaient envahi le territoire algérien, battit, en 1864, les tribus qui s'étaient soulevées, et reçut leur soumission à Laghouat. A la suite d'un dissentiment avec le gouverneur général de l'Algérie, au sujet, dit-on, du régime à appliquer à notre colonie, le général Youssouf fut appelé à un commandement dans l'intérieur de la France et mourut en 1866.
A SUIVRE
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MAXIME NOIRE
PNHA- N°191 - Décembre 2010
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Un autodidacte Impressionniste de l’Algérie
Maxime Noiré est un peintre orientaliste né à Guinglange (Moselle) le 9 novembre 1861 et mort à Alger le 4 juillet 1927.
Autodidacte, il se rendit en Algérie pour des raisons de santé et s'installa, vers 1882, à Alger, où il commença à acquérir la notoriété comme le premier peintre « impressionniste » de l'Algérie. Voyageant dans le Sud algérien, où il découvrit les oasis et les Aurès et après avoir eu un atelier à Alger au Frais-Vallon, au jardin d'Essai, et près de Bab-El-Oued, il finit par s'installer à Bou-Saâda dont il contribua à la renommée dans le sillage et avec Etienne Dinet.
« Peintre officiel de la Marine et des Colonies », nommé en 1905, il est I'un des fondateurs de la Société des Artistes algériens et orientalistes en 1897, il participa à la création et la promotion du Prix Abd-el-Tif et de la Villa du même nom, et exposa au Salon des artistes français, principalement des paysages d'Algérie dans des formats larges et vastes, aux couleurs grises et mauves dans un premier temps puis dans des tons plus chauds par la suite.
L'ensemble de sa peinture, nous fait découvrir les paysages de l'Algérie. Ses toiles, souvent de formes larges, reflètent par ses tons chauds ainsi qu'un style très impressionniste, l'atmosphère de ces régions.
Maxime Noiré fut un des plus grands peintres paysagistes orientalistes, tout comme Constant Louche et Eugène Deshayes, Isabelle Eberhardt a dédié les Pleurs d'amandiers à Maxime Noiré, « le peintre des horizons en feu et des amandiers en pleurs » (p.266, Isabelle Eberhardt, Notes de routes, Actes sud, réédition 1998).
Œuvres principales
Musée national des Beaux-Arts d'Alger, Musée de Constantine, Musée des Arts africains et océaniens (Paris), Musée Léon-Bonnat de Bayonne, Musée de Narbonne F.N.A.C. dépôt au ministère des Affaires étrangères.
Parmi les œuvres connues de Maxime Noiré, Vue sur la Baie d'Alger depuis la Bouzaréah, Vue du Frais-Vallon près de Bab-el-Oued, Vue de Tipaza et tant de remarquables panoramas gorgés de soleil du Sud de I'Algérie, tels que des vues de Bou-Saada, ou de l'oued Abiod dans les Aurès. Comme Marius de Buzon était dénommé « le chantre de la Kabylie », Maxime Noiré était appelé « le chantre des Aurès ».
Expositions
Alger 1896, Salon de la rue du Marché, Tunis 1897, "Salon Tunisien", Paris 1900 Exposition universelle, Alger 1922 Galerie Charlet, Alger 1930, Salon de l'Union artistique «Rétrospective Maxime Noiré» et également 1941 Alger, rétrospective, ces deux dernières expositions promues par sa fille Annette Noiré, épouse du peintre et sculpteur Paul Jouve.
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MON PANTHÉON DE L'ALGÉRIE FRANÇAISE DE M. Roger BRASIER
Créateur du Musée de l'Algérie Française
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A SUIVRE
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ENSOLEILLEMENT
De Jacques Grieu
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Si « Le soleil a rendez-vous avec la lune »,
Comme chantait Trenet, alors, quelle infortune !
Il est vrai qu’on les voit rarement associés ;
Des gens bien informés disent qu’ils seraient fâchés…
Peut-être le soleil a-t-il été vexé,
En voyant que la lune, un jour, l’a éclipsé ?
D’ailleurs, il n’y a qu’elle capable de le faire
Et qui se moque bien, au soleil, de complaire !
La lune est une coquette qui se montre aux étoiles
Et qui leur fait des mines en se montrant sans voiles .
Si elle cache ses arrières à notre bonne Terre,
Les étoiles par derrière, admirent ses cratères…
Ses cratères, justement, sont-ils des cicatrices ?
D’un sale « coup de soleil » ne serait-ce pas l’indice ?
Impossible, voyons, car quand le soleil luit,
La lune est bien couchée ; ce ne peut être lui !
Il n’y a qu’un soleil, mais neuf chaque matin ;
Même si nul n’est sûr qu’il sera là demain.
Quand le soleil se lève, il se lève pour chacun ;
Il brille pour tout le monde, le pauvre et le rupin.
Il faut croire au soleil ; même s’il ne brille pas.
Même dans la nuit noire, il regarde ici-bas.
Au dessus des nuages, on sait qu’il est bien là :
C’est juste son cendrier que bientôt il videra.
On l’aimerait bien moins sans cette grisaille-là !
Le soleil des dimanches est toujours plus sympa.
Certes, il n’est pas parfait ; même lui a des taches ;
Des taches de vieillesse, cachées sous sa moustache.
Déjà sous Louis XIV, « roi soleil » déclaré,
On se précipitait pour en voir le lever ;
Et si pour le soleil, on admire ses couchers,
On a pour ses aurores un faible particulier.
« Mais la lune n’est pas là et le soleil attend »
Continuait la chanson ; un soleil mécontent
Qui ne voit pas sa lune qui portant est bien là ;
Ses lunettes de soleil, il n’avait sans doute pas ?
Jacques Grieu
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PHOTOS DE BÔNE
Envoi de M. Charles Ciantar
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Vous n'avez pas osé tirer
PAR MANUEL GOMEZ
Envoi de M. Michel
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La France gaulliste n'a aucune leçon à donner à Poutine
Je n’ai aucune sympathie particulière pour Vladimir Poutine. Il aurait donné l’ordre d’assassiner un opposant à sa politique et ce serait donc un criminel ? On suppute, on dénonce, on juge, on condamne, sans aucune preuve. Il est vrai que ce n’est sans doute pas la première victime, en Russie, ni certainement pas la dernière.
Mais quel est le pays, le chef d’Etat, qui n’a pas donné l’ordre d’assassiner un (ou plusieurs) opposant au cours de ces dernières décennies ?
J’entends déjà des voix s’élever : « Pas en France, pas chez nous, et c’est bien vrai que, pour une très grande majorité de Français, le chef d’Etat qui a assassiné des opposants Français, sans aucun remords et sans même avoir à se justifier, est considéré comme un « Héros » et quelquefois même idolâtré. Il s’agit, mais vous l’aviez compris, de Charles De Gaulle et, contrairement à Poutine, en ce qui concerne « ses » crimes « nous en avons la preuve écrite et de la main de son propre ministre de l’Intérieur ».
Le 28 octobre 1969, Christian Fouchet, son ministre de l’Intérieur du 6 avril 1967 au 31 mai 1968, et qui était Haut-commissaire en Algérie à la date du 26 mars 1962, a témoigné :
« J’en ai voulu au général de m’avoir limogé au lendemain de mai 1968. C’était une faute politique. De GAULLE m’a reproché de ne pas avoir maintenu l’ordre en mai 68.
– « Vous n’avez pas osé tirer » m’a-t-il dit.
– J’aurais osé s’il l’avait fallu, lui ai-je répondu. Souvenez-vous de l’Algérie et de la rue d’Isly. Là j’ai osé et je ne le regrette pas parce qu’il fallait montrer que l’armée n’était pas complice de la population algéroise.
(Source : Jean Mauriac « L’Après De Gaulle » – notes confidentielles 1969/1989 – page 41)
Ce même mois de mai 68, De Gaulle lançait à Pompidou une phrase qui résumait toute sa carrière : « Mais, Pompidou, figurez-vous que j’ai passé ma vie à tirer contre des Français ». (Rapporté par Edouard Balladur à Daniel Rondeau, auteur de « Vingt ans et plus – journal 1991/2012)
Non seulement De Gaulle a donné l’ordre d’assassiner une « centaine d’opposants Français totalement désarmés mais, contrairement à la mère de Alexeï Navalny, ces victimes n’ont pas été rendues à leurs familles et leurs corps, entièrement nus, ont été jetés sur le sol de la morgue de l’hôpital de Mustapha ».
Et si ce même De Gaulle n’a pas donné l’ordre de tuer d’autres innocents Français, opposés à sa politique d’abandon, après le 19 mars et jusqu’en juillet 1962, à Oran et dans toute l’Algérie, il a donné l’ordre à l’armée Française « de ne pas intervenir pour tenter de les sauver ».
Sous la foi du serment, le colonel Fourcade a témoigné. Il a assisté, ce 5 juillet 1962 à l’appel du général Katz directement à De Gaulle afin de l’informer que des centaines de civils innocents étaient massacrés dans toutes la ville et la réponse du Chef de l’Etat : « Surtout ne bougez pas » (en deux mots : Laissez-les crever !).
Plus de 3 000 Français massacrés ou disparus, femmes, enfants, vieillards, patriotes et soldats (nos enfants, vos enfants)…
Quand un pays a soutenu, et vénère toujours un président comme De Gaulle, il n’a aucune leçon à donner à un pays comme la Russie qui soutient et vénère toujours un président comme Poutine !
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Jules MIGONNEY (1875-1929)
Pieds -Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui N°190 - Novembre 2010
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Malgré la reconnaissance de ses pères, le doute I'assaille sans cesse. Il se suicide.
Issu d'une famille modeste, il fait de brillantes études dans sa ville natale de Bourg-en-Bresse. Il entre à l'Ecole des Beaux-Arts de Lyon où il se forme auprès de Jean-Baptiste Poncet. Puis il se rend à Paris dans I'atelier de Bonnat mais le quitte rapidement et c'est au Louvre qu'il fréquente assidûment qu'il complète son apprentissage. Il voyage en Italie en 1903. Il obtient en 1909 la bourse de la villa Abd-el-Tif. Il se rend donc en Algérie. Il est encouragé par le mécène Frédéric Lung et Louis Meley. Il s'intéresse aux types d'Afrique du Nord ainsi qu'à ceux de I'Espagne où il a voyagé. Il les dépeint avec un sens profond de la psychologie. Dans les années 1910 il se rend en Kabylie en solitaire, il y mène une vie rude mais stimulante sur le plan artistique. C'est cette période algérienne qui est le point culminant de son art. En 1929, alors que sa santé décline ainsi que ses capacités d'artiste, il préfère se retirer de ce monde et se suicide.
Issu d'une famille de milieu modeste, Jules Migonney poursuit de brillantes études au lycée Lalande de Bourg en Bresse. Après son baccalauréat, il entre en 1893 à l'Ecole des Beaux-Arts de Lyon, où il se lie avec le peintre Jean Puy (1876-t960). En 1898, il se rend à Paris pour suivre les cours de l'Ecole des Beaux-Arts en 1901, il entre à l'académie d'Eugène Carrière (1849-1906) que fréquentent aussi Jean Puy, Henri Matisse, André Derain, Albert Marquet. Si Migonney n'a pas les audaces de ses compagnons « fauves », il suit cependant avec curiosité les mouvements de son époque. Il comprend et apprécie ses contemporains, mais il a pour Cézanne la plus grande admiration. Parmi les « anciens » Migonney se reconnaît dans les toiles du Titien, d'Ingres ou de Courbet.
Pendant la première décennie du XX" siècle, le jeune peintre voyage en Italie et en Espagne où il découvre la peinture de Vélasquez. Il expose alors peu, préférant progresser, plutôt que de montrer prématurément ses œuvres. De cette époque datent surtout des portraits, tel le Portrait du sculpteur Alphonse Muscat (Musée de Brou), et des natures mortes où le peintre montre un métier solide et le souci de peindre « vrai ».
Le choc et l'affirmation de sa personnalité et de son style viendront de sa rencontre avec l'Algérie. En 1909, Migonney obtint une bourse de séjour auprès du Gouvernement Général d'Algérie pour la Villa Abd-El-Tif d'Alger : il y reste jusqu'en 1911. Ce sont là probablement les années les plus belles de sa vie pendant lesquelles il observe, voyage et peint beaucoup « de grandes figures de femmes d'une grâce lumineuse » telle la Femme arabe au narghilé (Musée de Brou). À Alger il est entouré de jeunes artistes « Abd-El-Tif », comme Léon et Ketÿ Carré, Charles Dufresne, Paul Jouÿe ou Léon Cauvy. Il est soutenu par Frédéric Lung et Louis Meley, grands collectionneurs et mécènes algérois.
C'est un Orient réaliste, sincère et sensuel que fait revivre la peinture de Migonney, s'inspirant de la vie quotidienne des populations urbaines ou rurales de l'Algérie : ses scènes de bains et de hammam telles Le bain maure du Musée de Brou ou ses peintures de femmes sont prétextes à de beaux nus sensuels et à de grands portraits. Son orientalisme d'un grand réalisme poétique allié à une approche ethnographique – proche en cela d'Etienne Dinet (1861–1829) s'éloigne de l'orientalisme exotique et clinquant de la fin du XIX" siècle
Après I'interruption de la première guerre mondiale dans la quelle il est engagé, Migonney revient à Paris et travaille essentiellement sur le thème de la nature morte : grandes œuvres exubérantes et luxuriantes, imprégnées du souvenir de l'Orient, où la richesse de la matière picturale donne l'idée de profusion et de luxe, comme on le voit ans la grande Nature morte aux fruits du Musée de Brou. Le peintre revendique cet effet décoratif, proche en cela du mouvement « Art déco » qui marque les années 1920. Migonney participe d'ailleurs activement de 1920 à lg2g aux Salons des Artistes Décorateurs avec notamment des projets de tapisseries. Les années 1922-1924 voient aussi le retour à un thème que l'artiste avait souvent traité dans les années 1904-1905 : le portrait.
Vers 1925, la peinture de Migonney évolue : le peintre tente de s'affranchir de l'anecdote, de l'effet décoratif pour une peinture plus dépouillée. Ses sujets de prédilections sont toujours et de plus en plus le nu féminin et le portrait. Artiste reconnu par ses pairs et la critique, Migonney se sent pourtant envahi par le doute et reste insatisfait de sa peinture : « J'ai tout sacrifié à l'art qui m'échappe maintenant... J'ai beau essayer de lutter, je ne peux et la vie me paraît impossible et sans but. » [Léon Deshairs, Jules Migonney, 193I, p. 19]
Désemparé, souffrant de ne pouvoir surmonter la grande crise morale et artistique qui le mine, Migonney met fin à ses jours en juillet 1929. Il laisse un testament dans lequel il laisse à sa ville natale pour son musée un ensemble important de soixante-cinq peintures, dessins et gravures de son atelier comprenant ses œuvres mais aussi celles de ses amis Jacques-Emile Blanche. Malgré certaines audaces plastiques l'œuvre de Migonney garde son caractère réaliste : « Ce que je voudrais surtout, confiait-il à un ami, c'est peindre des gueules » [Léon Deshairs, Jules Migonney, 1931, p. 13].
Et en effet, les personnages de Migonney ne sont pas idéalisés : le peintre s'en tient à la réalité de ses modèles et de ce qui les entoure, même s’il vise à la simplicité des formes, du modelé et à la valeur expressive de la ligne. Les peintures inspirées par ses séjours en Algérie constituent la part la plus importante et la plus attachante de son œuvre. Il faut aussi signaler de cette même période une série de gravures sur bois - des scènes de hammam ou de nus où la ligne synthétique et les franches oppositions de noirs et des blancs, des pleins et des vides ne sont pas sans rappeler la puissance des gravures de Félix Valloton et Jean Puy.
Comme Louis Jourdan, qui fut son exécuteur testamentaire, Migonney a suivi la voie de la carrière officielle : envois réguliers aux Salons parisiens dès 1901, (Société Nationale des Beaux-Arts, Société des Peintres Orientalistes, Salon des tuileries) et au Salon du Sud-Est à Lyon, expositions de groupe, achat par l'Etat de deux œuvres : le dessin préparatoire pour Le Bain maure (Musée national d'art moderne, déposé au Musée de Brou), et une nature morte datant de 1902 (Musée d'Uzès).
Après sa mort, trois expositions rétrospectives lui sont consacrées à Paris en 1930 à la Société Nationale des Beaux-Arts, à Lyon en 1930 au Salon du Sud-Est, à Paris en 1931 lors de l'Exposition Internationale coloniale. En 1991, le Musée de Brou a présenté une rétrospective de son œuvre, abordant tous les aspects de son travail.
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COUVERTURE
De Jacques Grieu
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Quand le vent s’insinue aux fenêtres fermées,
Ou que le gel sévit au milieu de janvier.
Elle est un doux cocon, une tendre barrière,
Contre le froid cruel des rigueurs de l’hiver.
La bonne couverture nous chauffe et nous protège,
Quelle soit bleue ou rouge ou même grise ou beige...
« Couvrez-vous » ai-je dit à celui qui salue ;
Mais aucune couverture n’apparaît à ma vue.
La couverture d’un fait est, pour un journaliste,
Ce qu’est un grand tableau pour un bon portraitiste.
Ce n’est pas pour autant qu’on dit qu’il est couvreur
Que le temps soit couvert ou bien « ensoleilleur ».
La « couverture nuageuse » de dame météo,
Couvre bien des menaces sous de gentils propos.
La couverture d’un livre donne envie de l’ouvrir ;
Souvent, sa quatrième, incite à s’endormir...
Mon assureur me couvre quand j’ai un accident,
Mais de sa couverture, je ne suis pas content !
La politique, souvent, est une couverture
Mais qui ne peut couvrir tout lit qu’on lui procure.
La couverture chauffante est une belle invention
Mais se glisser dessous en est la condition ;
La couverture à soi, ne faut pas trop tirer ;
Manier la couverture, alors, est un métier !
« Couvrir » est donc un verbe qui couvre plein de choses
Où la « chaude couvrante » n’est pas du tout en cause.
La vanité se couvre souvent de modestie ;
Pour se couvrir de fleurs certains sont fort hardis.
Sous couvert de poète, un peu trop j’en ajoute ;
A écrire trop de vers, je me couvre de… doutes !
Jacques Grieu
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POPULATION INDIGENE ET EUROPEENNE.
Gallica : Revue de l'Orient 1853-2 pages 435-446
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Conditions d'admission des colons étrangers.
L'Algérie est occupée par les peuples les plus divers d'origine, de langue, de culte, de couleur même. La division la plus générale partage ses habitants entre indigènes et européens, qui, les uns et les autres, se subdivisent eux-mêmes en plusieurs grandes classes.
1. LES INDIGÈNES. — Un recensement approximatif, exécuté en 1857 par les bureaux arabe, a constaté les chiffres suivants, pour les indigènes distribués sur tout le pays en dehors des villes et des centres occupés par les Européens.
Quant aux indigènes habitant les territoires occupés par les Européens, le dénombrement nominatif, exécuté en 1852, en porte le nombre à 172,030 âmes.
Le total se résume ainsi
Indigènes des tribus 2,315,865
des- territoires européens 172,030
Total 2,445,885
Pas tout à fait millions et demi d'habitants, au lieu de ces 5 et 6 millions, dont on fit pendant quelques années un épouvantail à la France !
Considérés sous le rapport de leur origine, qui entraîne elle-même une différence radicale de mœurs, cette population indigène se subdivise en six races, qui sont les Kabyles ou Berbères, les Arabes, les Maures, les Koulouglis, les Juifs, les Nègres. Le berbère et l'Arabe sont les deux éléments fondamentaux : les autres sont secondaires.
Le portrait de chacune de ces races a été si souvent fait, qu'il est devenu populaire. En quelques traits, le voici :
A - Les Berbères (Berabe) sont les hommes que nous appelons kabyles, quand ils habitent les montagnes du littoral ; Chaouia, quand ils sont dans la chaîne méridionale de l'Aurès; Mzabites, quand ils viennent de la ceinture d'oasis qui limite l'Algérie au sud (Ouad-R'ir, Temacin, Ouargla, Beni-Mzab) ; enfin Touareg, quand ils viennent du désert proprement dit ; ce sont les mêmes hommes qui sont connus dans le Maroc sous le nom de Amazigh (homme libre), Cheihia, etc., les mêmes qui jadis se sont appelés Libyens dans l'est, Maures dans l'ouest, Numides au centre, Gétules dans le sud et Garamantes dans les sables du désert, et qui représentent pour nous ou la race autochtone, ou la race de première émigration qui a peuplé le pays à des époques sur lesquelles la science discute, et qui a survécu dans toute l'Afrique septentrionale aux révolutions politiques, sociales et religieuses. Nous ne nous occupons ici que du Kabyle proprement dit, principal type de la race berbère, celui qui s'est le mieux conservé. Les invasions successives des peuples conquérants l'ont refoulé dans les lieux de l'accès le plus difficile, sur les hautes montagnes, dans les vallées abruptes, où il avait échappé jusqu'à nos jours à toute domination étrangère. Les Kabyles, chassés des plaines, resserrés sur d'étroites surfaces, ont dut modifier leurs habitudes primitives, nomades comme celles de tous les peuples à leur origine, et se sont industrialisés pour vivre.
La tente s'est convertie en gourbi, cabane construite en pisé ou en pierre, le mapalia des Romains ; et la réunion sur un point de plusieurs gourbis appartenant à une même tribu a constitué le Kebila, d'où est venu le nom de Kabyles donné à l'ensemble des tribus berbères du littoral. Des jardins et des champs cultivés avec soin ont fourni l'alimentation qu'on ne pouvait demander à de vastes espaces ; fixé au sol par la maison, le Kabyle a pu s'y fixer encore par des plantations. De beaux arbres taillés, greffés, souvent même plantés de sa main, achèvent de lui créer une patrie locale, des intérêts, des habitudes, des affections sédentaires, comme aux populations d'Europe. Des villages et des petites villes se sont fondés image exacte, par leur défaut d'alignement, leur saleté, leur incommodité, le type brut de leur architecture, des premiers villages et des premières villes des pays aujourd'hui les plus civilisés. Dans ses étroites limites, pressé par le besoin, le Kabyle est devenu industriel : forgeron, maçon taillandier, armurier, fabricant de monnaie, même de fausse monnaie. Entouré de mines, il a su en tirer parti pour son bien-être. Dans ces habitudes laborieuses, son caractère tout entier s'est empreint d'un cachet spécial ; l'homme est devenu pratique, positif ; mais simple et rada, comme l'artisan sans éducation intellectuelle. Doué , par une tradition héréditaire qui est passée dans le sang et l'esprit de la race, du don de l'imitation et de l'aptitude des doigts et des mains il n'attend pour devenir mécanicien habile - que des maîtres et des modèles. La France, qui a pénétré dans ses montagnes, lui donnera les uns et lei autres, et se fera de lui un habile. auxiliaire. -- Quand la terre natale ne peut suffire pour faire vivre tous ses fils alors en Kabylie comme en tous pays de montagne, quelque enfant de la maison émigre pour une saison, pour des années. Il descend dans la plaine et loue des bras pour la récolte ;
Il pénètre dans les villes et devient manœuvre. Dans cette phase nouvelle, et toujours transitoire, de son existence, il reproduit les mœurs et les qualités dei Auvergnats et des Savoyards, dont il est le type africain. On le trouve dans toutes les villes de l'Algérie, coudoyant son cousin du Maroc et du Sahara, et grossissant, par une sobriété à toute épreuve , par un labeur infatigable, par la plus sévère épargne, par une honnêteté proverbiale, le petit trésor qui lui permettra de revenir un jour au village de ses pères et d'y acheter un fusil, une femme, une maison, un champ ou un jardin. Quant au cheval, il s'en passe. Le Kabyle, fils de la montagne, est fantassin.
2- Fils de la plaine, l'Arabe est cavalier, et ce double fait engendre une toute autre existence, faisant, avec celle du Kabyle, le même contraste que la plaine avec la montagne. Amené en Afrique par la conquête, dès le 7e siècle de l'ère chrétienne, la principale de toutes les invasions, non la seule (d'autres l'avaient préparée et l'ont suivie), l'Arabe est resté maître des vastes et riches plaines au milieu desquelles il s'est installé, et de proche en proche il a gagné le pied des collines et des montagnes, en s'assimilant beaucoup de tribus berbères. Voyageur, pasteur, nomade, dédaignant de s'enchaîner à une maison de boue, il parcourt à cheval ses vastes pâturages, ou promène d'un champ à l'autre sa charrue , sans sortir toutefois d'une circonscription qui constitue le domaine propre de chaque tribu. Dans ces habitudes d'existence au sein dei horizons infinis, son esprit s'est maintenu. plus élevé que celui du kabyle, son imagination plus vive. Il observe le monde extérieur et en reçoit de fortes impressions, qui colorent son langage; il nomme par de pittoresques imagea ses montagnes et ses coteaux ses vallons et ses rivières.
Mais la nature des lieux a introduit des différences entre les divers groupes de la race arabe. L'Arabe du Tell, incliné vers la terre par le labour, se rapproche beaucoup du paysan kabyle, moins l'industrie. L'affinité de yang, l'alliance de race entrent pour une part dans ces ressemblances de l'Arabe du Tell avec le Berbère. L'Arabe des landes du Sahara conserve seul, avec fidélité, le type poétique du caractère national ; ennemi du travail, dont il abandonne aux pauvres la part inévitable ; amoureux des femmes, des chevaux, des courses, des vers des fêtes, de l'éclat, du mouvement, de toutes les joies qui se résument en un seul mot, synonyme du bonheur suprême : la Fantasia !
3° Le Maure est l'habitant des villes, et surtout des villes du littoral. C'est le détritus indéterminé de toutes les races qui se sont succédé dans ces centres de population. Leur nom, déduit de Maghreb (occident), remonte à l'antiquité qui avait appelé Mauritanie toute la partie occidentale de l'Afrique du nord, à partir de la Numidie jusqu'à l'Océan. On ne peut guère admettre, dans les Maures de nos jours, une aussi antique origine, tant se sont renouvelées, sous des formes si diverses, les populations des villes du littoral. Il y a eu tradition de résidence, d'habitudes et d'intérêts, plutôt que tradition de sang. Les Maures de notre temps se livrent au commerce, exercent de petites industries, habitent leurs maisons de ville, possèdent et font cultiver des biens de campagne, vivent de rentes qui vont , d'année en année, diminuant, au contact d'une civilisation qui renchérit tous les éléments de l'existence. Sous les deys turc, ils occupaient quelques emplois, et l'administration française continue à un petit nombre d'entre eux cette marque de confiance. Beaucoup, parmi eux, sont remarquables par la beauté des traits, l'ampleur élégante de leur démarche et de leur costume. Ils ont généralement la peau plus blanche, le visage plus plein, le nez moins aigu, le profil moins anguleux, le poil plus fin, tous les traits de la physionomie moins prononcés que les Arabes, comme les citadins de tous les pays, compares aux campagnards.
4° Les Koulouglis proviennent du mélange des Turcs avec les femmes indigènes. Souverains de la régence d'Alger pendant trois siècles, les Turcs se sont alliés aux races diverses du pays. De là tout un groupe de population, moins remarquable par son importance numérique que par son intelligence et son ralliement sincère aux Français. Leur intérêt les y a conduits. A la chute des Turcs, en 1830, isolés dans le pays, les Koulouglis étaient attaqués à la fois par les Arabes et par les Kabyles, comme fils de maîtres chassés. Ils se jetèrent dans les bras de la France. Depuis cette époque, ils ont fait constamment cause commune avec nous ; beaucoup ont pris du service dans notre infanterie indigène. L'administration française recrute volontiers dans leurs rangs les fonctionnaires musulmans des villes. Quant aux turcs, il en survit à peine quelques individus fort âgés.
5° En Algérie , comme partout, lei Juifs obéissent instinctivement à la loi de leur destinée, qui est le commerce pacifique entre les peuples, les races, les classes, la conservation et la diffusion cosmopolite du capital. Dans toutes les villes du Tell et du Sahara, même au sein des tribus, ils sont, quoique spoliés , opprimés et méprisés, led agents universels des échanges, et, à ce titre, les instruments providentiels du bien-être général, dont ils recueillent la première part. On observe en eux deux types physiques : l'un d'une remarquable beauté, qui rappelle la figure traditionnelle du Christ, l'autre plus que vulgaire d'expression. Quelques-uns, mais en rare exception, manifestent du penchant pour le jardinage et l'agriculture. Un plus grand nombre s'occupe à des travaux de petite industrie, dans de pauvres boutiques. La presque totalité se livre au trafic, sur une échelle proportionnée aux ressources de chacun, depuis le colportage de mercerie dans les rues et l'échoppe en plein vent au marché jusqu'aux grandes fournitures de l'administration française. Les Juifs, qui, en Algérie , comme en tous pays, préfèrent le nom d'Israélites, nom historique glorieux, furent nos premiers médiateurs, et sont restés nos interprètes, grâce à une remarquable aptitude à apprendre toutes les langues, faculté qui est en rapport avec leur mission commerciale. De tous les indigènes, ils ont le plus profité, socialement plus encore que pécuniairement, à la conquête française, qui les a délivrés d'une oppression séculaire et leur a reconnu lei droits de cité ; un conseiller israélite figure à côté du conseiller musulman et des conseillers européens dans les municipalités algériennes. Entraînés par l'esprit moderne , déjà quelques jeunes gens israélites dépouillent le sombre costume que leur avait imposé la tyrannie des Turcs et l'antipathie des Maures, pour revêtir le costume français.
Mais c'est là une grande innovation qui s'accomplit rarement en un jour. La casquette sert ordinairement de transition.
6° Enfin les Nègres, sixième élément de la population indigène. Ce sont pour la plupart d'anciens esclaves, ou fils d'esclaves, émancipés par la France, qui sont resté dans le pays et y ont multiplié difficilement et confusément. Le préjugé de couleur n'existant pas chez les Arabes, grâce à la polygamie légale, et l'esclave faisant d'ailleurs partie de la famille, les Arabes s'allient sans scrupule aux négresses, et les enfants de ces unions héritent du nom, de la position, de la fortune du père. Aussi voit-on souvent, dans les tribus, des mulâtres de toute nuance, même dans les dignités du commandement.
Quant aux noirs pur sang, ils font aujourd'hui dans les campagnes l'office de travailleurs de terre, dans les villes celui de manœuvres pour toute besogne. Par une particularité qu'explique l'amour des contrastes, ils ont un attrait particulier pour les manipulations des couleurs blanches : ils sont les badigeonneurs de toute l'Algérie. Les négresses tiennent, aux portes des villes, un petit étal de pain indigène, de fruits et autres menues friandises â l'usage des pauvres de toutes les classes.
Les nègres se montrent en Algérie les plus vaillants travailleurs, et après tes avoir vus à l'œuvre, on ne comprend que par les vices de l'esclavage la réputation de paresse que leur ont faite les colons des Antilles.
Considérés sous le rapport du domicile, les indigènes se divisent entre Bédouins, habitants de la campagne, nomades errant sous latente ; —radars, Beldi, citadins, résidant à demeure dans les villes, -- et Berrani ou forains, qui habitent momentanément dans les villes, avec esprit de retour dans leur pays d'origine. Ces derniers sont organisés en corporations présidées par un amin ou syndic, investi à leur égard, par l'autorité française, d'un pouvoir disciplinaire et judiciaire. Les principales corporations sont : les Kabyles, portefaix, manœuvres, maçons, gâcheurs de mortier, bouchers, journaliers, marchands jardiniers, travailleurs de terre ; -- les Mzabites (de l'oasis des Beni M’Zab), boulanger, bouchers, revendeurs, baigneurs, pâtissiers, rôtisseurs, marchands de charbon, meunier, conducteurs d'ânes ; parmi les Biskri de Biskara ), portefaix, porteurs d'eau, commissionnaires, porteurs de charbon ; — les Nègres, portefaix, blanchisseurs de maison, marchands de chaux et de paniers, domestiques, vidangeur, cafetiers ; -les M'zita (de race kabyle), mesureurs et portefaix au marché aux grains, porteurs de charbon, baigneurs ; —les Leghouatz (de El-Aghouât), mesureurs au marché aux huiles ; - les Beni Abbas, tisserands ; les Marocains, charbonniers, manœuvres, etc.
Considérés sous le rapport de la religion, on distingue les Musulmans, au nombre desquels figurent les Arabes, les Kabyles, les Maures, les Koulouglis ; les Israélites, qui sont les Juifs, et les Nègres, à peine sortis du fétichisme. Les plus intelligents d'entre ces derniers se mêlent, plus ou moins, aux pratiques musulmanes. Mais dans les fêtes nationales des Nègres, même en Algérie, les sacrifices d'animaux, les invocations aux esprits, témoignent de l'empreinte, encore profondément païenne, des superstitions de cette race. Le recensement de 1857 constatait, ainsi qu'il suit, pour les territoires européens, l'importance comparative de ces cultes dans les trois :
Sous le rapport des langues, les indigènes n'en parlent que deux : l'arabe et le berbère. - L'arabe est la langue dominante, familière aux Juifs et aux Nègres comme aux Arabes. Les Kabyles eux-mêmes, obligés comme musulmans d'apprendre le Koran, en relation permanente d'ailleurs avec les Arabes, comprennent tous la langue de ces derniers, et la plupart la parlent, pour peu qu'ils soient sortis de leur village. La langue berbère, qui comprend de nombreux dialectes, n'est pat seulement propre aux Kabyles ; elle est parlée par le Chaouia de l'Aurès, par les habitants des oasis de l'OuadR'ir, Temacin, Ouargla, Beni-Mzab, et sert de lien commun dans toute l'étendue de l'Afrique septentrionale, depuis le Maroc jusqu'à l'Egypte, depuis la Méditerranée jusqu'au désert , où elle est en usage chez les Touareg, qui seuls en ont conservé l'alphabet et l'emploient comme écriture courante, tandis que les Kabyles du Tell se servent des caractères arabes. De récentes et curieuses découvertes ont constaté l'identité de la langue berbère et de l'alphabet touareg avec la langue et l'écriture des Libyens, dont la généalogie historique se trouve ainsi rétablie sans solution. -- L'hébreu se conserve dans lei familles israélites comme langue sacrés, et Bert à tracé les épitaphes de leurs sépultures.
II. POPULATION EUROPÉENNE. — Dans ce pays, déjà si riche en contrastes, la conquête française a installé une population européenne dont la physionomie, les allures, le costume, la langue, la religion, les mœurs forment avec les races indigènes la plus complète opposition.
Au 31 décembre 1852, d'après un dénombrement nominatif, elle comptait 124,401 individus qui se décomposaient ainsi qu'il suit, à divers points dé vue.
Sous le rapport des nationalités
Français. . . 69,980
Espagnols. . . .35,129
Italiens. 7,408
Anglo-Maltais 5,609
Allemands 3,025
Suisses 1323
Belges et Hollandais. . . 526
Anglo-Irlandais. . . . 483
Polonais 238
Portugais. 145
Autres 515
Ou en bloc
Français. , . . 9,980
Etrangers 54,421
Sous le rapport des sexes et des âges
Hommes 29,451 Garçons 40,073
Femmes 28,233 Filles 26,645
Total. . . 57,684 Total. . . 66,718
Sous le rapport des familles
32,826 ménages, habitant 16,215 maisons.
Sous le rapport de la religion
Catholiques, 121,226
Protestants, 2,561
Israélites, 614
Sous le rapport de la résidence et des travaux
Population urbaine. . 80,143
rurale agricole, 30,805 44,258
non agricole. 13,453
Sous le rapport de la distribution par province
Province d'Alger. . . . 120,506
de Constantine. 73,799
d'Oran. 70,126
D'après ces données, la population totale de l'Algérie se compose ainsi qu'il suit
Equivalant à la population de cinq ou six départements français pour un pays grand comme les trois quarte de la France, et partout cultivable et habitable.
Cette proportion est tellement faible , qu'on peut dire le pays pour ainsi dire vide d'habitants. En effet , en calculant sur 3 millions d'âmes, ce qui était l'évaluation commune avant les derniers recensements, évaluation exacte dans les premiers temps de l'occupation, la densité de peuplement était de 7 habitants par 67 kilomètres carrés ou par 100 hectares. On en compte, d'après un calcul fait en 1 847 par M. Canette, membre de la commission scientifique de l'Algérie
En Espagne. 31,18
En Turquie d'Europe. 38,24
En Prusse. 54,60
En France. 64,87
En Hollande. 85,34
En Belgique. 124,04
L'Algérie est donc quatre fois moins peuplés que l'Espagne, cinq fois moins que la Turquie d'Europe, sept fois moins que la Prusse, huit fois et demie moins que la France, onze fois moins que la Hollande, seize fois moins que la Belgique.
On s'inquiète quelquefois de la forte proportion des étrangers dans l'émigration algérienne. Vain souci ! Attachés au sol par la propriété, les étrangers défendront leur patrie d'adoption avec la même ardeur - que les Français ; et leurs enfants élevés dans les écoles françaises, mêlés de bonne heure avec ceux de nos colons, unis par l'amitié et l'amour, ne formeront qu'un seul peuple. Est-ce que les Etat-Unis s'alarment de voir affluer dans leurs cités et leurs campagnes des émigrants d'origine étrangère ? II y a seulement à rechercher pourquoi les Français se portent avec tant de lenteur sur un pays qui sollicite leur activité.
Chacun de ces peuples apporte à l'œuvre commune de la colonisation sa part de qualités utiles. Le Français, l'élan intrépide, la gaieté dans les privations, la sociabilité sympathique, l'esprit alerte, l'intelligence directrice ; l'Espagnol, le Mahonnais et le Génois, leur tempérament acclimaté, leur sobriété merveilleuse, leur ardeur indomptable au travail sous un ciel ardent, leurs vertus de famille, leurs habitudes d'épargne, leur précieuse expérience des cultures maraîchères. Les Maltais ont le génie des petites industries. Les premiers dans la province d'Oran, les seconds dans la province d'Alger, les troisièmes un peu partout ont été, dès les premiers jours, les défricheurs, les pionniers par excellence. Les Suisses et les Italiens se font remarquer surtout par leurs aptitudes industrielles, comme briquetiers, maçons, tailleurs de pierre, charpentiers, menuisiers. Les Allemands représentent ces divers éléments, et les relèvent par une gravité et une persévérance à toute épreuve. A des titres et à des degrés différents les uns et lei autres concourent au résultat final, la mise en valeur dei richesses de la colonie : et de leur fusion ultra une génération nouvelle en qui s'harmoniseront, surtout si elles se complètent par quelques gouttes de sang arabe ces qualités aujourd'hui disparates, et trop souvent impuissantes par leur isolement.
Pour mettre en jeu tous ces précieux agents de production, un seul ressort fait défaut : le capital. Appeler les capitaux, c'est-à-dire les capitalistes, par tous les moyens dont dispose la puissance publique, est la principale mission qui reste à accomplir au gouvernement français gour élever l'Algérie à la hauteur de sa destinée.
Jules Duval.
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Les Chapeaux
Tirailleur Algérien N°511 du 4 novembre 1900
Source Gallica
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— Comment, Anatole est sorti ? Dit Mme Ribollet en entrant en coup de vent dans le bureau de son mari.
Le sous-chef interpellé par elle rougit et pâlit tour à tour.
— Votre mari, madame, doit être chez son supérieur ou chez, l'un de ses collègues, il n'a pas quitté le ministère... Voyez plutôt son chapeau est encore ici.
La petite Mme Ribollet - jolie, maigre, un fin profil de chèvre s'assit sur le rond de cuir conjugal, griffonna sa correspondance, lut le Code, feuilleta les dossiers...
Trois heures s'écoulèrent de la sorte au bout desquelles Ribollet arriva. Il se troubla comme son sous-chef, échangea avec lui un regard d'inquiétude, puis attendit l'averse :
— C'est comme cela que tu fais honneur, à la feuille de présence ?
— Ma bonne amie, j'étais dans les bureaux à la caisse, on faisait queue...
— Le 10 du mois... allons donc !
— Je te le jure. D'ailleurs mon chapeau n'a pas quitté cette table.
— Tu as deux chapeaux, belle malice !
L'un qui reste ici pour tromper tous les gens, excepté ta femme, l'autre que tu mets sur la tête pour aller voir Rosine, ton ancienne maîtresse. Ma tante avait raison de dire que tu la reprendrais après ton mariage..
Lucie Ribollet avait touché juste.
La soirée s'écoula d'une façon lugubre entre les deux époux. Pour donner une solennité d'enterrement à sa douleur, madame avait baissé la mèche de la lampe. Une tristesse d'omnibus funéraire régnait dans le salon. La femme de chambre apporta le journal ; c'était une diversion : les époux sautèrent dessus, et la fouille se déchira en un zigzag pareil à un éclair... madame prit le coté des annonces, monsieur celui de la politique.
— Nous divorcerons ! Fit Lucie d'une voix pointue.
— Tu en parles à ton aise. Et notre villa, comment la partager en deux ? Nous sommes épousés parce que nos terrains étaient voisins. La maison est à califourchon des sus, et l'escalier au milieu du logis. Que faire ?
— On coupera la villa en une ligne horizontale, à toi le rez-de-chaussée, à moi le premier étage ou bien je ferai construire un escalier extérieure.
Peu à peu, les nerfs de madame s'apaisèrent, elle dormit assez bien, tandis que le mari, éveillé, comparait les grâces frêles de cette jolie poupée de vingt-deux ans aux appas charnels de Rosine, son ancienne maîtresse.
Le lendemain, monsieur reprit le chemin du bureau ; madame fouilla dans ses armoires et en tira huit chapeaux, ceux de l'année dernière et ceux de l'année présente plus un béret et une casquette de bains de mer.
Elle étala cette petite exposition un peu partout dans son appartement, et sonnant sa femme de chambre : Anna, je sors dit-elle, vous direz à monsieur que je suis dans le voisinage, et, en voyant tous ces chapeaux, il comprendra.
Elle ne rentra qu'a minuit. En colère, cariante, Anatole lui dit :
— D'où venez-vous ?
— De chez ma tante, fit Lucie d'une voix flûtée. Tu vois mon ami, comme c'est impatientant d'attendre ; mais je t'ai laissé tous mes chapeaux pour te tenir compagnie. A propos... ton secrétaire général est venu chez ma tante. Tu monteras en grade bientôt.
La vérité était que Lucie venait de passer son temps avec le haut fonctionnaire, amoureux d'elle depuis longtemps ; c'était un bel homme de cinquante ans, avec un ventre administratif qui prenait de l’avancement en même temps que son maître, adorateur des femme maigres. L'épouse outragée se vengea abondamment.
Et le ménage ne se sépara pas, ne pouvant diviser ni la villa ni l'escalier. La paix régna. il faut croire que le contrat de mariage est comme un ticket de chemin de fer : le premier coup de canif lui sert de contrôle et le voyage continua...
M.
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HERVE DE BLIGNERES
VERITAS N°76, octobre 2003
Docteur PIERRE CATTIN
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Ou le Courage des Temps Difficiles
Le 17 mai 1940, un détachement de cavalerie du 31ème Dragons se lançait dans une charge héroïque contre la division blindée du général Rommel. Ce dernier, voulant rendre hommage aux survivants de cette action de sacrifice, salua, sur son brancard, le lieutenant Hervé de Blignières, grièvement blessé, qui entrait, ce jour-là, dans l'Histoire militaire.
Issu d'une longue lignée d'officiers et de grands serviteurs de l'Etat, dès l'école de Saint-Cyr, Hervé
De Blignères manifesta non-seulement des qualités intellectuelles exceptionnelles, mais aussi des capacités sportives dans de multiples disciplines, témoignant, chez ce jeune sous-lieutenant, d'une volonté et d'une énergie qui frappèrent tous ses camarades de la Promotion Maréchal Lyautey. « Nom éclatant, plein de sens pour le destin d'Hervé de Blignières, son rang de sortie lui permit de choisir le corps d'Armée d'élite qui, avec la Légion Etrangère, marquera toute sa vie d'officier : la Cavalerie. » (Hugues Kéraly « Blignières » in revue « Itinéraires » de juillet 1990).
Blessé et prisonnier de guerre, dès 1940, Hervé de Blignières va employer toute son énergie dans sept tentatives d'évasion qui lui vaudront d'être envoyé au terrible camp de représailles de l'Oflag C. de Lübeck dont peu sortiront vivants. Le courage, l'abnégation, l'énergie pour survivre et aider ses camarades à survivre, lui gagneront des amitiés indéfectibles durant toute sa vie, venant d'hommes de tous bords. Un militant communiste, devenu plus tard un homme politique influent, lui proposera de prendre la direction de la jeunesse communiste en France en 1945 !
Vient l'inévitable service en Indochine : ses qualités de commandement jointes à sa célèbre énergie, vaudront à Hervé de Blignières, deux fois volontaire, trois citations à l'ordre de l'Armée, la réputation du chef de guerre le plus célèbre du Corps expéditionnaire, la plus haute estime du Commandement. Le 21 janvier 1950, grièvement blessé aux jambes, il est sauvé par le courage exceptionnel d'un de ses sous-officiers, futur lieutenant Roger Degueldre, que De Gaulle fera fusiller au Fort d'Ivry le 6 juillet 1962 ! La réputation d'Hervé de Blignières est telle en Indochine qu'après Dien Bien Phu, il sera réclamé comme instructeur de l'Armée sud vietnamienne.
D'une carrière militaire jusque là brillante mais classique, le drame algérien va faire, pour Hervé de Blignères et sa nombreuse famille, un long chemin de croix. Dans ce long parcours, son épouse, née Aliette de la Casinière, va lui apporter un soutien inlassable, au milieu des pires difficultés matérielles, car le ménage est sans fortune et, pendant les années de détention, il va côtoyer, sans cesse, la plus grande gêne financière.
Pourtant, le service en Algérie avait commencé sous les meilleurs auspices, lorsque, le 15 août 1958, le Lieutenant Colonel de Blignières est nommé, à 45 ans, commandant du 1er Régiment Etranger de Cavalerie, le glorieux R.E.C. auquel est confiée la pacification du Constantinois. Le ton général est à l'optimisme. De Gaulle, revenu au pouvoir en juin, va prononcer quelques semaines plus tard, le 3 octobre 1958, le célèbre discours de Constantine, ceci après le référendum du 28 septembre qui a donné, en Algérie, 90% de "oui", au maintien de l'Algérie dans la France : « Trois millions et demi d'Algériens, hommes, et femmes, sont venus apporter à la France et à moi-même le bulletin de leur confiance... La France et l'Algérie sont unies, désormais, pour toujours... Cela est aussi clair que la lumière du ciel... ».
Grâce à un engagement aussi solennel de la part de la plus Haute Autorité de l'Etat français, la pacification se trouve considérablement facilitée : la masse algérienne, persécutée depuis quatre ans par le terrorisme du F.L.N., reprend confiance : LA FRANCE RESTE !
Les combats dans les Aurès vont être encore rudes, au voisinage du repaire tunisien mais l'efficacité de la ligne Morice permet le ralliement de plus en plus nombreux de la population musulmane dès l'instant que les douars et mechtas sont libérés et repris en main par les S.A.S. qui apportent assistance médicale, ravitaillement, scolarisation, reconstruction des maisons et des conduites d'eau et d'électricité, détruites par les terroristes.
Le premier R.E.C., sous le commandement d'Hervé de Blignières, va se signaler par sa valeur militaire, son habileté à rallier à la France des zones dites, autrefois, impénétrables tel que le vieux bastion rebelle de Beni Melloul.
Pour saluer ce que l'on appellera « la paix Blignières » qui régnait en 1960 dans la ville et dans la région du Constantinois, grâce au 1er R.E.C. et qui se maintiendra jusqu'à la capitulation politique d'Evian, Pierre Messmer, Ministre des Armées, allait décerner au Lieutenant-Colonel de Blignières une des plus belles citations de la guerre d'Algérie.
Une autre preuve, peut-être plus démonstrative du prestige du chef du 2ème R.E.C., sera donnée par le Commandant de la Gendarmerie Mobile de Constantine, au moment crucial des Barricades d'Alger, qui, en janvier 1960 viendra lui dire : « Mon Colonel, nous ferons ce que fera la Légion. » et sa démarche précédait de peu celle du Colonel des C.R.S. qui, lui aussi, témoignera de sa confiance absolue. Quand on connaît l'hostilité violente qui existait, à Alger, entre l'Armée et les gendarmes du Colonel Debrosse qui avaient ouvert le feu sur les manifestants, on mesure mieux tout le prestige et le rayonnement de l'autorité d'Hervé de Blignières au moment où le drame algérien allait se nouer de façon tragique.
C'est sans doute pour cela que Messmer va le rappeler en Métropole, peu après ces événements poignants, avec un certain nombre d'officiers d'élite qui n'étaient pas prêts à sacrifier leur honneur à leur carrière. Les autres ?... La plus grande majorité, hélas, balanceront... Et tout le drame de l'échec du putsch d'avril 1961 va trouver là son origine...
Affecté à l'Etat-Major de la place de Paris, Blignières réalise probablement le premier le sombre dessein de Charles De Gaulle : ouvrir les portes d'Alger au F.L.N. et retourner les armes de la France officielle contre tous ceux qui se réclameront de la France en Algérie. Il n'aura pas la candeur du Général Challe qui, lui, croit en De Gaulle.
Avec une hauteur de vue qu'aucun autre officier n'aura de manière aussi lucide, il comprend que seule une opposition politique en Métropole pourrait faire obstacle à l'abjecte tactique que De Gaulle a secrètement choisie, dès l'affaire Si Salah, en juin 1960. Rien ne serait pire qu'une insurrection militaire isolée d'un soutien politique. Blignières, officier, noble et catholique, a toujours servi fidèlement la République. Il n'a pas une âme de conspirateur. Mais, homme d'une envergure intellectuelle exceptionnelle, il va seulement lui manquer un peu d'ancienneté, le grade de général, pour donner toute sa mesure dans ses négociations avec les milieux politiques d'opposition.
Il va contacter Georges Bidault, Jacques Soustelle, Max Lejeune, son compagnon de captivité en Allemagne, Pascal Arrighi et certains parlementaires d'Algérie. « Le Colonel de Blignières se dépense sans compter- écrit Yves Courrière dans « Les feux du désespoir» - il se livre à un long et délicat travail psychologique, visant l'unification des divers groupes prêts à l'action, s'entretient avec les milieux politiques, industriels, économiques ». Blignières déconseille la démission à ceux des officiers qui refusent d'avance le rôle de traîtres qu'on veut leur faire jouer en Algérie et réconforte les esprits : « Pas de démission, accepter des postes d'attente, s'accrocher là, agir entre camarades, en aucun cas se laisser aller à des mouvements extra-militaires ou clandestins ; » ( Hugues Kéraly o.c.). Blignières a retrouvé Degueldre, son sauveur d'Indochine, mais il s'oppose vigoureusement aux commandos d'action directe prématurés, aux actions anarchiques, aussi courageuses soient-elles. « PAS D'ACTIONS DESORDONNEES - affirme-t-il - ELLES FERAIENT LE JEU D'UN POUVOIR QUI S'APPRETE A TOUT BRADER ».
Car Hervé de Blignières est un des rares militaires à avoir compris L'AMPLEUR DU DETOURNEMENT DE L'OPINION PUBLIQUE PAR L'HABILETE DU VERBE ET LA PERSONNALITE ECRASANTE DE CHARLES DE GAULLE ! La politique gaulliste en Algérie n'a pas eu d'adversaire plus rigoureux ni plus acharné que Blignières qui fut le plus ardent pour plaider la cause d'une solution française... « Si un homme a voulu soulever la France, et même l'Europe, contre la trahison de Charles De Gaulle, c'est bien lui ! » (Hugues Kéraly o.c.).
Mais si un homme a été justement convaincu qu'une action militaire, isolée d'un puissant mouvement organisé de masse de toute la population française d'Algérie et de l'appui d'une forte minorité de l'opposition politique en Métropole, précipiterait le drame en favorisant les sombres desseins de Charles De Gaulle, c'est encore lui et bien lui, Hervé de Blignières !
Loin de nous l'idée de contester ici le courage et l'abnégation des Généraux acteurs du putsch d'avril 1961, mais peut-être leur manqua-t-il la dimension charismatique d'un vrai leader politique pour avoir une réelle chance de succès dans leur entreprise ? Arrêté par les sbires de Roger Frey au soir du 9 septembre 1961 - bien après l'échec du putsch d'Alger - Blignières sera accusé par le ministre d'être le cerveau métropolitain de l'O.A.S. et propagera, dans le même temps, le mensonge éhonté selon lequel le Colonel de Blignières aurait livré spontanément le nom de tous ses complices !
On reconnaît bien, dans cette infamie, le caractère perfide de Roger Frey, Fouché au petit pied dont il avait la bassesse mais non le talent. Hervé de Blignières va porter plainte contre cette cynique calomnie, plainte qui sera déclarée recevable puis sera, ensuite, vite étouffée par les magistrats serviles de l'époque.
Condamné, dégradé, rayé de la Légion d'Honneur, vilipendé par la presse de gauche, Hervé de Blignières va employer, en prison, toute son énergie à des travaux intellectuels, faisant publier sous l'anonymat plusieurs ouvrages militaires et d'inspiration patriotique que des générations d'élèves de Saint Cyr se repasseront, sous le manteau, à la barbe des autorités. Il va entreprendre et réussir brillamment la préparation à l'école des Chefs d'entreprise de la rue Hamelin pour embrasser une seconde carrière à sa libération.
Ayant retrouvé un rang important dans la société civile, Hervé de Blignières n'oubliera jamais la cause sacrée pour laquelle il avait tout sacrifié, lui « le Colonel historique de l'Algérie française » comme le désignera Pierre Sergent dans son célèbre livre « Je ne regrette rien. ». Cet homme généreux va prendre la présidence active de l'Association pour la sauvegarde des familles et enfants des disparus en Algérie envers lesquels les gouvernements gaullistes successifs se montrèrent particulièrement odieux.
Ainsi, preuves et documents à l'appui, Hervé de Blignières révélera qu'un accord secret avait été conclu entre Alger et Paris le 27 août 1964, selon lequel la France abandonnait au F.L.N. tout pouvoir pour détenir à son gré et pratiquement faire disparaître, si bon lui semblait, tout citoyen français détenu en otage.
De rares parlementaires, ayant eu connaissance de cette infamie et de cette trahison sans précédent du Chef de l'Etat français envers ses propres ressortissants, s'en émurent et protestèrent malgré les dénégations embarrassées du Ministre Jean de Broglie.
Mais le Journal Officiel du 17 août 1965 révéla, à mots couverts, la vérité sur cette ignominie en publiant le résumé de cette trahison qui laissait au F.L.N. au pouvoir à Alger les mains libres pour exercer, sans crainte de représailles françaises, sa barbarie sanguinaire sur les Français prisonniers arbitrairement détenus ! Hervé de Blignières exposera cet immonde rebondissement du drame de l'abandon des Français d'Algérie de toutes confessions dans la revue « Itinéraires» de juin 1982.
L'envergure et l'intransigeance d'un tel homme devaient lui valoir la haine d'une certaine France officielle qui se manifesta de façon très basse : le 15 avril 1972, Hervé de Blignières échappa de justesse à un attentat en Espagne, dans une embuscade dressée par d'anciens barbouzes. Un de ses amis de l'O.A.S. avait été enlevé et torturé à mort par ces mêmes sicaires en chômage depuis la fin de l'Algérie française.
L'autre circonstance de la manifestation d'un sectarisme moins dramatique mais tout aussi odieux s'est produit lors des funérailles de notre héros, le 7 janvier 1989. Les deux fils d'Hervé de Blignières, tous deux prêtres (son troisième fils sera ordonné plus tard) demandèrent à l'évêque de Rennes de célébrer un office religieux à l'église paroissiale de Mordelles. Un grand chrétien, ce noble officier ?... Non, un rebelle.
L'évêque, politisé, refusa jusqu'à la dernière minute puis céda finalement (« la mort dans l'âme » déclara-t-il plus tard) sous la pression de deux autres évêques de France et d'un cardinal romain, probablement à la demande du Vatican.
Le gouvernement socialiste de Michel Rocard, moins sectaire que l'évêque gauchiste, avait autorisé l'envoi d'un détachement du 1er R.E.C. pour rendre les honneurs civils et militaires au milieu d'une assistance considérable venue de toute la France et même de l'étranger pour rendre un dernier hommage à ce preux intransigeant qui unissait en lui la bravoure chevaleresque et l'honneur chrétien. « Notre père s'est battu jusqu'au bout. II a donné l'exemple. En tout, il a gardé la foi. » devaient dire ses fils. (Hugues Kéraly in « Itinéraires» de juillet 1990).
« Lorsque j'entrai à Saint Cyr, l'Armée française était pour moi la plus belle chose au monde » écrivait Charles De Gaulle au début de ses « Mémoires de guerre ». Pourtant, à l'occasion du drame algérien, il avait fait dégrader, jeter à la vindicte populaire et emprisonner des hommes de la trempe des Blignières, Saint Marc, Sergent, Degueldre et tant d'autres parmi les meilleurs, pour, en même temps, décorer et promouvoir aux plus hauts grades des médiocres et des carriéristes, tous ceux qui rampent vers les honneurs au détriment de l'Honneur... Cette armée française ainsi épurée de ses élites lui parut-elle encore « la plus belle chose au monde ? » ,.. A moins que, n'ayant jamais pardonné à cette Armée française de l'avoir massivement désavoué en 1940 ( pas un seul officier de la division qu'il commandait ne l'a rejoint après l'appel du 18 juin) l'implacable esprit de vengeance de Charles De Gaulle, qui était à la mesure des outrances de l'homme, ne se soit ainsi trouvé, enfin, assouvi !
« Le roi de France ne venge pas les injures faites au Duc d'Orléans » disait Louis XII, le père du peuple. Ayant toujours ignoré la clémence, cette sublime vertu des princes, De Gaulle l'ambitieux passa toute sa vie à côté de la vraie grandeur, celle que possédait naturellement un de Blignières.
Docteur PIERRE CATTIN
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RAPPEL D'HISTOIRE
VERITAS N°69, janvier 2003
Par André ROSSFELDER
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LE CHATEAU ROYAL REVISITE
Du point de vue de Sirius, on aurait pu penser qu'avant tout tango culturel, l'opération « Algérie 2003 » s'attacherait à rétablir la vérité historique car deux pays ne peuvent pas prétendre à des relations valables en traînant, avec eux, deux Histoires mensongères. Sinon l'un doit alors céder son passé à l'autre. Ce qui est fait. La France a préféré céder le sien, renier la mémoire de l'Algérie heureuse pour accepter le mythe de la nuit coloniale et continuer d'accabler, chemin faisant, ceux qui s'étaient, naguère, naïvement réclamés d'elle (Visitez www.algerie2003.org. et vous saurez de quoi je parle).
Le 15 mars 1962, six inspecteurs de l'enseignement public étaient assassinés, à Alger, au centre de Ben Aknoun, dit « Le Château Royal » et, parmi eux, mon ami, l'écrivain Mouloud Feraoun. J'avais fait sa connaissance au début des années 50 à l'époque où je publiais mon premier roman : Les hommes frontières. Nous avions immédiatement sympathisé mais je n'avais guère l'occasion d'aller en Kabylie et il venait rarement à Alger.
Nous ne nous sommes pas rencontrés plus d'une douzaine de fois entre 1952 et 1960 quand il est finalement venu s'installer à Alger avec sa famille. Il était plus âgé que moi d'une douzaine d'années, mais je le tenais pour un ami, proche et droit.
Son « Fils du pauvre » et son « Journal » racontent son histoire, celle d'un enfant de la montagne kabyle qui avait accédé par son intelligence et sa détermination tranquille et surtout par son talent à une place essentielle dans la littérature française, aux postes supérieurs de l'instruction publique. Son histoire est un tribut à l'œuvre française en Algérie ; c'est aussi l'histoire d'un homme de bonne volonté pris dans les ambiguïtés où la tragédie algérienne le plaçait lui, kabyle, francisé, laïque, socialiste idéaliste de la vieille école et « arabe » selon la terminologie populaire qui divisait l'Algérie élémentairement entre Européens et Arabes, c'est-à-dire suspect dans tous les sens.
Si Mouloud Feraoun n'était pas mort en Algérie, dans des circonstances étranges dont il faut reparler, il aurait pris, comme nous tous (et comme la plupart des écrivains algériens de langue française) le chemin de l'exil et terminé sa carrière en France. Nous nous serions revus, nous aurions parlé du passé avec des regrets certains, mais il est mort et le voilà aujourd'hui actualisé pour « l'année de l'Algérie en France » comme emblème utile des « crimes de l'O.A.S. ».
J'ignorais, jusqu'à l'année dernière, l'identité de ses meurtriers bien qu'elle ait été rendue publique il y a quelques années par les interviews de certains d'entre eux. Mon éloignement de France et mon métier d'océanographe en sont l'excuse. J'en sais, maintenant, un peu plus sur cette affaire du « Château Royal » et je vois que j'avais raison d'écrire dans « Le onzième commandement » que, quels qu'aient été les hommes derrière les détentes, barbouzes ou Deltas, je ne voyais qu'un seul responsable, le grand maître de cette époque.
A qui profitait ce crime ? Certainement ni à l'O.A.S., ni aux Pieds Noirs, ni aux derniers tenants militaires de l'Algérie Française. Tout au contraire, De Gaulle en avait aussitôt fait une grande manifestation d'indignation nationale à leur encontre à un moment où, au fond du malheur, ils se réclamaient de la solidarité nationale.
Replacez-vous dans ce moment. Nous sommes le 15 mars 1962, à quatre jours de la conclusion des entretiens d'Evian, ces fameux pseudo-accords qu'il fallait faire avaler aux Français. De Gaulle est en train de se débarrasser de l'Algérie en la livrant au pire de ses prétendants avec l'espoir que les « bougnoules » (sic) disparaîtront ainsi de notre Histoire nationale pour longtemps (dixit ! !).
Les Pieds Noirs vivent l'agonie de leur terre ancestrale dans leurs biens et dans leur chair. A Alger, le préfet Vitalis Cros, installé depuis janvier (après avoir pris respectueusement conseil de Maurice Papon en matière de répression, comme il l'écrit dans ses mémoires) s'est entendu avec Azzedine et Oussedik pour lutter ensemble contre l'O.A.S. et faire plier les Pieds Noirs.
Les fiches de police sont transmises au F.L.N. Les enlèvements s'accélèrent. Les disparitions d'Européens ne laissent pas de cadavres sur les trottoirs pour émouvoir la presse métropolitaine. Le siège du quartier de Bab-el-Oued va commencer. Des photos montreront des soldats algériens au casque neuf bouclant les accès du quartier, fusil-mitrailleur en position et des avions français mitrailleront sans cause les façades des immeubles.
Le confrère de Vitalis Cros en matière de répression est le préfet René Petitbon. Il relève, comme lui, de Louis Joxe et, auprès de Jean Morin, il est officiellement chargé de la « jeunesse », c'est-à-dire du principal milieu de recrutement de l'O.A.S., ces jeunes Européens qu'on raflait et qu'on envoyait, au pire, dans les caves des gardes-mobiles et, au mieux, dans des camps en Kabylie où la plupart ont été oubliés à l'indépendance.
René Petitbon est ce même fonctionnaire dont parle Jean Morin dans ses « Mémoires » qui s'était entendu avec Michel Leroy et René Villard, transfuges de l'O.A.S., pour se faire livrer les têtes de cette organisation, ce qui leur avait valu d'être exécutés sur ordre du Général Salan en janvier 1962.
QUESTIONS :
- Pourquoi ressusciter, dans cette conjoncture, alors que le pouvoir est déjà remis aux mains du F.L.N./A.L.N. les « Centres sociaux éducatifs » fondés autrefois par Jacques Soustelle et les placer sous le contrôle de ces préfets-policiers ?
Pourquoi entraîner derrière Max Marchand des hommes tels que Mouloud Feraoun et les engager dans cette entreprise équivoque ?
On sait, maintenant, que l'O.A.S. a été informée par un certain Christian Salarino, depuis Rocher Noir, de la présence imminente au Château Royal » du préfet Petitbon accompagné de ses adjoints. L'ordre d'intervenir aurait été donné par Degueldre pour qui, bien sûr, les noms des « inspecteurs » que Petitbon réunissait ne signifiaient rien. Le préfet Petitbon aurait été informé au dernier instant de cet ordre, ce qui l'a amené à annuler sa visite « au pied même de l'hélicoptère, sans avoir le temps de prévenir les autres ».
Tout cela a été publié mais semble, aujourd'hui, être ignoré.
QUESTIONS :
- Comment l'information sur cette réunion et ses participants a-t-elle été transmise à l'O.A.S. et quelle en était la source ?
- Comment l'ordre donné par Degueldre est-il revenu aux oreilles de Petitbon ? Pourquoi ceux qui ont prévenu ce dernier n'ont-ils pas alerté le « Château Royal»?
- Pourquoi Petitbon n'a-t-il pas envoyé un messager par cet hélicoptère prêt à partir ? Un motard depuis la Préfecture ? N'avait-il aucune liaison radio ?
André ROSSFELDER
N.D.L.R. Nous, nous retrouvons ici dans la même conjoncture de piège machiavélique que KATZ a opposé à VERITAS au sujet du 5 juillet 1962 lors de notre première sommation interpellative : « Je n'ai pas pu avertir les troupes d'interrompre le massacre parce que l'O.A.S. avait coupé le téléphone. »
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LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS
Par J.C. Stella et J.P. Bartolini
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Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.
Jean Claude a effectué toutes les recherches et il a continué jusqu'à son dernier souffle. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous, j'ai fait des mises à jour et ajouté d'autres communes, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir. Jean Claude est décédé, et comme promis je continu son oeuvre à mon rythme.
Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.
De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.
Ce travail fait pour Bône, Guelma, etc. a été fait pour d'autres communes de la région de Bône et de Constantine.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et du Constantinois
Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :
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NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers
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Plafonnement des prix
Envoyé par Sylviane
https://www.jeune-independant.net/commercialisation-du-produit-
national-un-plafonnement-pour-mettre-fin-a-la-speculation/
jeune-independant.net - Par: Lilia Aït Akli le 21 octo. 2024
La thérapie de choc?
Les autorités veulent en finir avec les augmentations injustifiées des prix de certains produits, et ce à travers un plafonnement des prix lorsqu’il s’agit de hausses déraisonnables des produits de saison. C’est une révision radicale de la réglementation régissant la commercialisation du produit national pour le citoyen qui est ordonnée par le président de la République, lequel a appelé à une «extrême vigilance» face à tout ce qui pourrait provoquer la pénurie.
La hausse injustifiée et récurrente des prix de certains produits, notamment agricoles, notamment ceux de saison, est dans le collimateur des hautes autorités du pays. Présidant dimanche une réunion du Conseil des ministres, et après un exposé commun des ministres du Commerce, de l’Industrie et de l’Agriculture sur la veille sur la pénurie, le président de la République a donné des instructions fermes pour lutter contre le phénomène de hausse de prix.
Soulignant le fait que le citoyen doit être la préoccupation majeure de chaque fonctionnaire public, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a enjoint au gouvernement de procéder à une révision radicale de la réglementation régissant la commercialisation du produit national pour le citoyen, et ce à travers l’élaboration d’une loi consacrant un système de plafonnement des prix, via des décrets, lorsqu’il s’agit de prix déraisonnables des produits de saison.
Le plafonnement des prix de certains produits s’inscrit dans le cadre des mesures visant la préservation du pouvoir d’achat des citoyens. Pour le professeur en économie, Brahim Guendouzi, le plafonnement des prix est instauré pour éviter la distorsion des prix, affirmant que cette dernière ne reflète pas la disponibilité des produits. Il doit concerner les produits agricoles locaux et ceux fabriqués localement, car ceux importés répondent à d’autres paramètres. Selon lui, il n’y a pas de raison pour qu’il y ait une distorsion des prix s’agissant de la production locale.
Pour ce qui des produits agricoles qui devront voir leurs prix plafonnés d’une manière périodique, d’autant qu’il s’agit de prix non raisonnables des produits de saison, le professeur en économie a tenu à souligner le fait qu’il existe des wilayas productrices et d’autres consommatrices, signalant un déséquilibre entre les différentes wilayas du pays. Les frais de transport et le nombre important d’intermédiaires, en l’absence de réseaux de distribution organisés, font que les prix connaissent une augmentation, d’où la nécessité de réguler, à même de contrôler des hausses des prix qui ne sont pas pour autant justifiées, selon M. Guendouzi.
L’application de cette mesure de plafonnement des prix sur le terrain n’est pas pour autant évidente. Le professeur en économie a, en effet, signalé un problème d’application de cette mesure. « La mise en place d’un système de coopératives peut donner des résultats sur le terrain », a-t-il estimé, affirmant que la dimension juridique peut poser un problème d’application.
Satisfecit de l’APOCE
Le problème d’application de cette mesure a également été évoqué par le président de l’Association de protection des consommateurs El Aman, Hacene Menouar. Selon lui, la mesure de plafonnement des prix des produits agricoles principalement serait « une bonne chose quand elle sera appliquée sur le terrain ». Il a, dans ce sens, souligné la nécessité de réaliser une « cartographie agricole » qui permettra, entre autres, de définir les différentes productions et les quantités demandées. « On aura donc une offre équilibrée avec la demande, chose qui engendrera une stabilité des prix », a-t-il précisé, signalant l’importance de garantir l’intérêt des consommateurs et des producteurs en même temps.
Pour sa part, l’Association de protection du consommateur et son environnement (APOCE) a salué les dernières décisions prises lors du dernier Conseil des ministres, relatives à la réservation du pouvoir d’achat des citoyens. « L’APOCE salue les décisions prises lors du dernier Conseil des ministres, relatives à la révision de la commercialisation du produit national, considérant que la protection du citoyen des prix injustifiés est la priorité des priorités », a indiqué l’association dans un communiqué.
Elle a exprimé sa conviction que « la mise en œuvre du système de plafonnement des prix périodique ou la détermination des marges bénéficiaires, avec un contrôle rigoureux des marchés et des produits essentiels, notamment alimentaires, agricoles ainsi que les médicaments, constituent une étape importante vers la réalisation de la stabilité et la protection du consommateur des pratiques avides ».
Les orientations du Président, relatives à la régulation des opérations d’importation, ont également été saluées, sachant que le président de la République a ordonné de ne pas interdire l’importation des matières premières utilisées dans la production. « Cette mesure va promouvoir la production locale sans avoir d’impact sur les besoins des citoyens », a-t-on estimé. Le président de la République a, en effet, ordonné, lors de la réunion du Conseil des ministres, de ne pas interdire les opérations d’importation des matières premières utilisées dans la production et dans les industries vitales, précisant que le reste des opérations d’importation est soumis à une autorisation préalable.
Lilia Aït Akli
Promesses de titres de séjour
Envoyé par Odette
https://www.tsa-algerie.com/promesses-de-titres-de-sejour-voici-comment-une-
fausse-avocate-a-escroque-des-centaines-de-sans-papiers/
- tsa-algerie.com - Par: Amine Ait 16 Oct. 2024
Voici comment une fausse avocate a escroqué des centaines de sans-papiers
L’urgence de devoir régulariser leur situation administrative expose les sans-papiers en France à divers escrocs qui n’ont de but que celui de leur soutirer le maximum d’argent.
La semaine dernière, au tribunal correctionnel de Rouen, s’est déroulé le procès de Linda L, une femme de 44 ans. La prévenue, absente pour des raisons médicales, est accusée de s’être fait passer pour une avocate et d’avoir escroqué plusieurs sans-papiers, rapporte le journal français Paris Normandie ce mardi 15 octobre.
L’affaire commence en 2021, quand le tribunal administratif de Rouen envoie un signalement au procureur. La cour dévoile avoir reçu, depuis novembre 2020, pas moins de 25 requêtes contre des OQTF et des refus de délivrance de titre de séjour.
Le problème, c’est que ces requêtes, qui provenaient toutes de la même société de conseil, ne comportaient ni signatures, ni mentions. Le tribunal souligne que certaines de ces requêtes ne respectaient pas les fondements juridiques.
Elle se fait passer pour une avocate : ses victimes se compteraient par « centaines »
Les enquêteurs découvrent, grâce à Me Madeline, avocate rouennaise, que la mise en cause, Linda L, se faisait passer pour une avocate depuis au moins 2014 et qu’elle faisait signer à ses clients des contrats de mandat en leur promettant des résultats concernant leurs démarches de régularisation auprès de la Préfecture. Les clients versaient des sommes qui auraient servi à corrompre les agents de la préfecture, explique le président du tribunal durant le procès.
Linda L. a été placée en garde à vue pour la première fois en mai 2022. Elle a nié en bloc les accusations portées contre elle, assurant qu’elle ne fait qu’accompagner ses clients dans leurs démarches administratives et qu’elle n’avait jamais promis de résultats.
A la fin de sa garde à vue, la mise en cause dissout sa société mais continue son activité avec une autre, et ce, à Grand-Couronne, puis au Petit-Quevilly, enfin à Saint-Sever à Rouen. En mai 2024 elle est de nouveau placée en garde à vue après pour avoir employé un sans-papier sans le déclarer.
Dix-sept personnes ont porté plainte contre la fausse avocate. Ce vendredi 11 octobre, les parties civiles défilent à la barre. Selon leur avocat, « des victimes, il y en a des centaines et des centaines ». Il ajoute qu’il s’agit de « gens vulnérables » à qui cette fausse avocate « prend toutes leurs économies ».
Elle est condamnée par le tribunal
Interrogés par la défense, certains plaignants assurent que la mise en cause s’est présentée comme une avocate tandis que d’autres expliquent qu’elle s’est faite passer pour telle par le décorum de son bureau, ses conversations au téléphone, ou encore grâce à des « clients satisfaits ».
Le parquet a estimé qu’il s’agit là d’une « contrefaçon du travail d’avocat » et requis contre la mise en cause une peine de trois années d’emprisonnement avec sursis, assortie d’une interdiction définitive de gestion d’entreprises, et d’afficher au sein des tribunaux et dans la presse locale.
Bien qu’il ait requalifié l’exercice illégal de la profession d’avocat en consultations juridiques non conformes, le tribunal a reconnu la prévenue coupable du reste des faits dont elle est accusée durant la période allant de 2017 à 2024.
Le juge a condamné la mise en cause à 18 mois de prison avec sursis probatoire tout en suivant les réquisitions du parquet pour les peines complémentaires.
Amine Ait
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Statistiques ... à méditer !!!!
Envoyé par Elyette
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- L'inventeur du tapis de course est mort à 54 ans
- L'inventeur de la gymnastique est mort à l'âge de 57 ans
- Le champion du monde de bodybuilding est mort à l'âge de 41 ans
- Le meilleur footballeur du monde, Maradona, est mort à l'âge de 60 ans.
- James Fuller Fixx a contribué à lancer la révolution du fitness en Amérique en popularisant la course à pied. Il est mort d'une crise cardiaque pendant son jogging à l'âge de 52 ans.
MAIS
- L'inventeur de la marque Nutella est décédé à l'âge de 88 ans.
- Le cigarettier Winston est mort à l'âge de 102 ans
- L'inventeur de l'opium est mort dans un tremblement de terre à l'âge de 116 ans.
- L'inventeur de la liqueur Hennessey est mort à l'âge de 98 ans.
Question existentielle : Comment les médecins ont-ils conclu que l'exercice prolonge la vie ?
Le lapin est toujours en train de sauter en l'air mais il ne vit que 2 ans et la tortue qui ne fait aucun exercice vit 400 ans.
Alors......, repose-toi, détends-toi, reste au frais, mange, bois et profite de ta retraite.
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Notre liberté de penser, de diffuser et d'informer est grandement menacée, et c'est pourquoi je suis obligé de suivre l'exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d'information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d'expression, tel qu'il est reconnu par la Résolution 59 de l'Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d'expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».
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