N° 217
juin

https://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Juin 2021
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
https://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
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EDITO

Les fruits de l'Espoir...

        Le mois de juin avec la saison des fruits qui commence à battre son plein annonce dans trois semaines le début de l'été, un été qui sonne comme le fruit d'un espoir pour beaucoup de monde.

        La " pandémie covidienne" a façonné bien des esprits ; a suscité beaucoup de courage parmi les plus touchés physiquement, moralement et financièrement ; a engendré aussi beaucoup d'espérance pour retrouver un semblant de vie normale.

        Mais voilà que des esprits malins veulent créer un nouveau fruit nommé pass sanitaire qui ressemble à de la discrimination et que si l'on ne prend pas garde pourrait être similaire à celui des années 40 avec une certaine étoile et un tatouage numéroté pour une catégorie de personnes qui ne rentrerait pas dans le moule macronien.

        Il me semble qu'un acteur public l'a déjà dénoncé et je pense que sa mise en garde est tout à fait honorable même si je n'aime pas ses vulgarités. Mais ces propos en disent long sur la fissure qui lézarde notre pacte social national.

        Bien entendu, ce n'est pas ce fruit qui est attendu par le peuple. Ce fruit qui commence à être ancré dans l'esprit d'une certaine population décervelée, qui pense que ceux qui ne pensent pas comme eux sont des complotistes, nous ramène à 1938 où en Allemagne, Heinrich Himmler ordonnait la déportation des asociaux : mendiants, tziganes, vagabonds, proxénètes, prostitués, pendant que les autres allemands regardaient ailleurs et faisaient semblant de ne pas comprendre.

        Cela n'était que le commencement de la grande lessive surtout quand on regarde actuellement le délitement du pays avec son président qui bafoue la fonction en compagnie des rappeurs ou des youtubeurs, tout en mettant les citoyens au " pas masqué ".

        Comme disait Saint-Paul, notre nature résiste toujours et les tendances humaines s'opposent à l'esprit malsain, c'est un don du ciel. Souhaitons que cela se vérifie une fois de plus et très rapidement. Rendons grâce pour ce don et son fruit dans notre vie, à l'occasion des très prochaines occasions !

        Les fruits de l'espoir sont à la portée de chacun à condition d'en prendre vraiment conscience et de ne pas laisser les apprentis sorciers jouer avec notre avenir.

        Cette conscience qui nous oblige à nous prendre en main, à cesser de vivre à travers des masques qui empêchent de s'exprimer librement, à nous déconfiner enfin l'esprit et à retrouver la vraie liberté de vivre comme l'on veut et non pas comme veut nous l'imposer le complotisme d'état actuel et qui nous mène droit aux états de Sodome et Gomorrhe.

        Amicalement et sincèrement.
Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         
         A tchao.


C'était un "chansonnier" !
Déjà publiée

           Pour ceux qui ont aimé cet homme et son franc-parler. Plus de 60 ans déjà ! Certains ont dû le lire, mais n'ont pas dû comprendre le sens du message...


           Eh bien, justement, ces phrases écrites en 1958 par Monsieur Pierre-Jean Vaillard, en 1958, on devrait de temps en temps les relire... à l'assemblée ! Pardon petit fellagha.... Il y avait, à l'époque, des gens qui avaient de l'esprit. En 1958, déjà, la repentance... pour les crimes contre l'humanité. Quel talent !

           Ce texte pourrait être actualisé pour un pays où la repentance " macrobienne " est à l'honneur, alors que, sur tout le territoire sévit le terrorisme, les agressions et meurtres racistes anti blanc, les discriminations dans les zones de non droit, les dégradations des cimetières et églises… En résumé la guerre civile s'est installée dans le pays mais les politiciens véreux et la grosse majorité des indigènes ne voient pas ou ne veulent pas voir. Comme dans les années 35/39, ils n'ont pas vu la 5ème colonne s'installer chez eux avec l'appui des staliniens alliés de l'envahisseur (comme à l'heure actuelle) ; c'est vrai qu'ils n'avaient pas Internet, mais en 2021, ils n'ont pas d'excuses. Avant on appelait cela, de la veulerie, de la "trouillardise ", de la lâcheté, de la traîtrise...

           En est-il de même à l'heure actuelle, les leçons du passé ne servent-elles à rien ?

           Le pays est surtout à l'écoute de la comédie " Covid ", cela lui a attaqué les neurones pour la grande majorité de ses habitants ; Cela a permis aux " gouvernant " de mettre le pays à plat au point de vue financier, au point de vue restriction des libertés, de la " pensance " car il n'y a plus de réflexion et bientôt cela empirera avec le pass sanitaire qui augmentera les discriminations et les fichages.
Pardon Petit fellagha
Par PJ VAILLARD chansonnier en 1958 !

            Eh, petit Fellagha, c'est à toi que je pense
            En voyant ta rancune à l'égard de la France.
            J'ai beaucoup réfléchi et ma méditation
            Me décide à venir te demander pardon….
            Oui, pardon, Fellagha, pardon pour mon grand-père
            Qui vint tracer des routes et labourer la terre.
            Il est venu chez toi, il a tout chamboulé.
            Où poussaient des cailloux, il a planté du blé.
            En mettant après ça, Ô comble de l'ignoble,
            Où poussaient des cailloux, il a fait un vignoble.
            Pardon, cher petit Fellagha,
            Oh, pardon de tous ces dégâts.
            Et mon affreux grand-père (il faut qu'on le confesse)
            N'était bien sûr, pas seul à être de son espèce.
            Ces autres scélérats ont bâti des cités.
            Ils ont installé l'eau et l'électricité.
            Et tu n'en voulais pas, c'est la claire évidence
            Puisque on sait que avant que n'arrive la France.
            Tu n'avais en dehors de la Casbah d'Alger
            Que la tente ou bien le gourbi pour te loger.
            Et pour ton éclairage, tu n'avais que de l'huile.
            Alors nos maisons, bien sûr, c'était la tuile.
            De l'électricité, là encore soyons francs,
            Tu ne demandais pas qu'on te mette au courant
            Tu t'es habitué à ces choses infâmes,
            Mais c'est à regret et la mort dans l'âme …
            Stoïquement d'ailleurs, tu supportes ces malheurs,
            Avec force courage et tant de belle humeur.
            Donc tu a engraissé, mais de mauvaise graisse.
            Car tu prenais le car (une invention traîtresse)
            C'est ce même car que, pris d'un délire divin,
            Tu devais, un beau jour, pousser dans le ravin.
            Je comprends ta rancœur, je comprends ta colère,
            Tu n'es pas au niveau des arabes du Caire.
            Tu glandes et tu vis mieux qu'un fellah égyptien.
            A quoi Nasser… Nasser à rien.
            Nous avons massacré tes lions et panthères.
            Nous avons asséché tes marais millénaires.
            Les moustiques sont morts… Les poux… De Profundis.
            Nous avons tout tué, jusqu'à la syphilis.
            Ah pardon Fellagha pour tous ces carnages.
            Nous avons fait tout ça, c'est bougrement dommage.
            Bien pardon Fellagha, de t'avoir mieux nourri,
            De t'avoir vacciné pour le béribéri
            Et d'avoir à tes pieds nus mis (oh maladresse)
            Des souliers…
            Pour nous botter les fesses !
PJ VAILLARD           


Sauveur et le covid
Par M. Marc Donato

         - Atso, Fifine, t'y es malade ?
         - Pourquoi, je suis malade ?
         - Passe que je ois qu'tu sors d'la pharmacie Sonigo.
         - Atso, celle-làlà elle est bonne, passe que je sors d'la pharmacie j'suis malade alors si je sortirais du cimitière, je serais morte !
         - Te vèxe pas, j'a cru qu't'iétais malade.
         - Non, c'est pour Sauveur, mon mari.
         - Sauveur ? Jamais il a été malade cuilà.
         - Eh ben, ma fille, figure-toi qu'il a eu mal en bas le ventre.
         - Zob, ça serait été nous ôtes, tout de suite on aurait pensé qu'on était enceintes
         - Ouais, mais ça c'était quand on était jeunes.
         - Ouais, à not' âge, diocane !
         - Alors on s'est pris par la main et tous les deux on s'est allé oir le docteur Castelli.
         - Cuilà qu'il est en bas la rue Caraman ?
         - Ouais… Alors y s'a arrégardé Sauveur devant, derrière, il s'la fait tousser, y l'y a regardé en dedans la bouche. Il l'y a tapé sur le ventre…
         - Et alors, quesce qu'il a trouvé ?

         Y nous a dit :
         - Il n'y a pas de doute, cher Monsieur… Vous avez le syndrôme.
         - Qué saint drome, j'lui a dit ? Nous ôtres on a saint Aoustine et ça nous suffit. Maintenant s'i y faut rajouter saint drome, ousce qu'on va ?
         - Non, Madame qu'y m'a dit le docteur. Ecoutez, je vais vous expliquer : votre mari y peut encore ?
         - Qu'estce qu'y peut ? Ac tout ça qu'y fait, y peut encore faire un tas de choses.
         - Non , vous ne m'avez pas compris : est-ce qu'il peut…. Enfin…
         Et là, le docteur, y m'a montré son bras et il a levé l'avant-bras avec le poing fermé.
         - Aie Aie, Aie ! Docteur, j'a compris ! Ca, ça fait des années que Sauveur y peut plus. Pour ça, moi, je suis bien tranquille, rien qu'y m'embête plus comme avant quand il était jeune, Manman, tous les jours…

         Sauveur rien q'y rougissait le pôvre.
         - C'est pas vrai, Sauveur ? Tu peux plus, tu peux plus et oilà !
         - Et bien voilà, chère Madame, vous avez tout compris du syndrôme : votre mari, il est pas malade, il le syndrome de la queue vide.
         - Ouille man… C'est pas vrai, docteur. Areusement qu'on fait chambre à part alors ! Ac ce virus, on sait jamais…

Marc DONATO - mai 2021


L'INVITATION AU COUSCOUSS
ECHO D'ORANIE - N°291
En latin d'Afrique...
Une nouvelle chronique de Gilbert ESPINAL

               - Ay ! Aouela quel bonheur de vous revoir ! Fit Angustias en serrant la vieille femme sur son cœur. Chaque fois que je vous retrouve, mon âme elle exulte, comme y disait le Chanoine Caparros en chantant ses cantiques, quand nous montions à Santa Cruz ; et chaque fois que nous nous séparons, je reste là, comme une figue molle... et orpheline ! Elles savent pas, Isabelica et la Golondrina la chance qu'elles z'ont d'avoir une mère comme vous ! A moi, vous me rappelez ma mère la pauv', ma grand-mère et mon arrière-grand-mère !
               - No tanto ya ! Interrompit la grand-mère ; si ça continue, tu vas me faire remonter à Noé, au moyen âge. Quel service tu veux que je te rende ? Pasque pour que tu me fasses tant de pamplines (1) y faut que t'y aies bien besoin de moi !
               - Moi j'ai besoin d'aucun service ! Répliqua Angustias offusquée. Si j'aurais besoin d'un service, assez de gens importants je connais, pour qu'y m'aident en cas de difficultés ! Seulement je venais pour vous inviter, ainsi que tous les membres de votre fami', au couscouss monstre que j'organise dimanche prochain, que c'est l'anniversaire de not' mariage à Bigoté et à moi ; je veux que vous en ayez tous plein la murmuration et que tous vous vous léchiez les babines.
               - Ouille ! Fit la grand-mère, un couscouss a estas boras (2) que depuis l'Algérie, j'achète rien que du Garbit, pasque je sais pas rouler la semoule !
               - Pos, moi, je sais ! coupa Angustias ; je le roule sur le parterre de ma cuisine, après l'avoir frotté à mort, pasque j'ai pas de tajine ; accroupie je me mets, et je roule, je roule, avec de l'eau, du beurre et du safran.
               - Et sur le parterre de ta cuisine tu le fais ? s'enquit ironiquement la grand-mère : là où les gens y marchent en te laissant la saleté de leurs semelles !
               - Chez moi c'est pas sale ! se récria Angustias, que chez moi je brique, j'astique, je lessive, je lave, je ponce donc j'essuie ; je nettoie toute la journée avec le chiffon, le plumeau, le balai, l'éponge, la lavette et les trapos que je découpe dans les vieux tricots de peau de mon mari ! Chez moi c'est prop' comme un sou neuf, vous pouvez regarder sur les armoires; sous les armoires, sous les lits, sous les descentes de lit, sous les fauteuils, sous les coussins ; dans mes toilettes on peut manger la soupe de prop' qu'elles sont ! Elles sont impaic ! Je vous servirais le couscouss, quand vous viendrez, chez moi, dans mes toilettes !
               - C'est pas que je mette ta parole en doute, rigola doucement la grand-mère, mais si je viens un jour chez toi - qu'encore c'est pas décidé !- je préférerais que tu me donnes une assiette de ton service ! J'espère qui t'en reste encore une, pasque depuis le temps que Bigoté et toi, vous vous les envoyez à la fugure, chaque fois que vous vous disputez; tu me donnes une assiette de ton service même esportillada (3) avec un bon morceau de savon de Marseille et un estropajo a que je me la frotte j'qu'à que l'appréhension elle me passe. Y te reste encore une assiette de ton service ?
               - Y me reste plus que la soupière rétorqua Angustias d'un ton marri ; c'est la seule pièce que Bigoté il a pas encore cassé, quand il est en colère ! C'est que, quand y rent' le sor, et qu'au café il a perdu la belote, il est d'une humeur massacrante ! Pour un rien y se met à gueuler ; de rien il est content : "à que ça c'est pas bien ! A que ça c'est pire !" J'ai beau lui dire "quand tu auras fini ton one-matcho (4), viens à table pasque la soupe elle refroidit". Le légumier y me l'a fracassé sur la tête, un jour qu'il était rentré tard et que je lui demandais des esplications, de furieux qu'il était...
               - Y devait être tchispado (5), commenta la grand-mère.
               - Un peu ! disons qu'il était gai ! Il a attrapé le légumier et d'un coup, d'un seul, y me l'a brisé sur le crâne. J'ai eu la tête coupé en deux : une moitié sur chaque épaule, avec le sang qui me coulait le long des bras, de la poitrine et du dos.
               - Por echar la que sea gorda (6) ! ricana la grand-mère.
               - La vérité je vous dis, sauta Angustias : il a fallu faire venir le médecin, qu'y m'a ramassé les deux morceaux du crâne et il les a rapprochés l'un de l'autre et il les a collé provisoirement avec du sparadrap. Le docteur y m'a dit : "madame, si vous auriez une machine à coudre, je vous aurais fait un point de bourdon, de l'arrière à l'avant et vous auriez pu vous coiffer soit en crête, à l'iroquois, soit à la Madone comme Luc Ferry, avec vos cheveux de part et d'autre de votre visage ; je vous aurais ramassé les chairs sur le sommet du crâne et vous aurais, ainsi, tiré le triple et le double menton et aussi les fanons que vous avez sur le cou ; ça vous aurait bridé un peu les yeux mais vous auriez paru vingt ans de moins. "Là j'ai une machine, je l'y ai fait moi !" "Qu'elle marque ?" "Une vieille Elna" "Je travaille que sur Singer" y m'a répondu le médecin, que moi je suis un scientifique !" "Je regrette pas que vous m'ayez pas fait un point de bourdon, je l'y ai dit pasque battante hay avec le cafard qui me prend quand je constate que mon mari, il est brutal. "Veillez bien à ce que les lobes de la cervelle y s'encastrent bien z'uns dans les aut' ; déjà que j'ai des trous de mémoire !" je l'y ai fait pendant qu'y se livrait à l'opération. - Et Bigoté il était là ? demanda la grand-mère.
               - Bigoté il était désolé, rétorqua Angustias, il avait les yeux pleins de larmes ! Quand le docteur il est parti, y m'a pressé dans ses bras, y m'a serré contre son coeur en me berçant et y m'a dit, la voix tremblante d'émotion : "je te demande pardon mon amour, je te demande pardon, ma bien-aimée, de t'avoir cassé le légumier sur le crâne, que c'était le cadeau de mariage de ma pauvre mère, qu'elle avait acheté le service à un prix fou à Prisunic, un jour de soldes : le seul cadeau de valeur que nous avons reçu, pasque dans ta famille, y se sont pas foulés !". J'ai du le consoler comme un bébé, et moi aussi j'étais émue de voir un chagrin si profond...
               - Moi aussi je t'avais offert, intervint vigoureusement la grand-mère, un vase de nuit, en porcelaine de Sèvres avec un oeil au fond, peint à la main avec des cils comme mon doigt de long, qu'on aurait dit un Renoir ; c'est bien pratique, en hiver, quand l'envie elle te prend, qu'y te faut sortir au froid quand t'y es au fond du lit. Qu'est-ce-qu'il est devenu mon pot de chambre ?
               - Lui aussi il me l'a cassé sur la tête, une fois précédente.
               - Ton mari c'est un brise-fer ! glapit la grand-mère, des réceptacles comme c'lui là que je t'avais offert, ça se trouve pas sous la queue d'un cheval. Et com' tu fais maintenant en hiver ? - Pos je cours comme une gazelle !
               - Que ton mari il ait cassé cet objet d'art dont je t'avais fait cadeau et qu'il était unique, ça me fout un coup ! reprit la grand-mère. Je sais pas si je vais accepter d'aller chez toi à partager le couscouss, surtout que tu m'a raconté la manière que tu le roules !
               - Ay ! Aouela, c'est pas pasque je vous ai fait des confidences, que vous devez m'infliger le suffoco (7) de pas venir partager nos agapes, que y'aura tout notre petit monde d'amis : vot' fi' Isabelica, Toinou, Martytio et Pepico Bolbacet, Monsieur et Madame Sacamuelas, Amparo et son mari, Doudou et Oscar, même que Doudou y doit nous présenter son ixième fiancée, une qu'elle tient un bar dans le vingtième arrondissement, à la goutte d'or, et encore d'aut' je crois. Surtout que j'ai déjà acheté les victuailles à qu'on se régale.

               - Et qu'est-ce-que tu as acheté ?
               - Un poulet de batterie, et un deuxième poulet qu'il est pas de batterie, à qu'y couvre le goût du premier ; quatre kilos de collier du même mouton...
               - Quatre kilos de collier du même mouton ? ricana la grand-mère, c'était pas un mouton cet animal, c'était une girafe ! D'habitude, on tire qu'un seul kilo de cou par mouton y-basta !... - Un jarret de bœuf ! interrompit Angustias.
               - Moi, j'aime pas le boeuf dans le couscouss, sauta la grand-mère, ça donne un goût fadasse au bouillon, ça couv' le goût des légumes et pour tout dire, ça te fait un jus de chaussettes. - Ay aouela ! gémit Angustias, j'ai acheté, tiré du jardin voisin, des carottes, des navets, des oignons, de l'ail et du persil, à se met' à genoux devant de frais qu'ils sont.
               - On met pas d'ail dans le couscouss, sauta la grand-mère, ce que tu fais c'est de la bouillabaisse !
               - Le jarret, il est magnifique ! insista Angustias : y pesait cinq kilos.
               - C'est un athlète ton boeuf ! rigola la grand-mère ; pour avoir un jarret de cinq kilos, il avait du tirer la charrue pendant cinquante ans !
               - C'était pas un boeuf, s'empêtra Angustias, c'était une vache ! - J'espère que c'était pas une vache folle ! s'exclama la grand-mère, pasque j'ai pas envie de devenir gâteuse pour avoir répondu à ton invitation !
               - Le boucher y m'a donné un certificat du gouvernement, qui fait foi que la vache elle était vierge !
               - Avec tout ce gentio (8) qu'y va y avoir chez toi, y va falloir se met' de cuerpo presente (9) et moi j'ai rien à me met' ! J'ai que la robe du mariage de Tonina, ma petite fi', que quand je la porte on dirait qu'elle est sur un cintre avec une ouverture sur le devant. Je voulais l'offrir aux Compagnons d'Emmaüs, pour faire plaisir à l'Abbé Pierre, mais c'lui là qu'il est venu la chercher - je lui avais fait téléphoner espécialement pour qu'y vienne avec une voiture de luxe - y m'a dit, "Madame, qu'est ce que vous voulez que l'Abbé Pierre y fout' avec une robe qu'on lui a enlevé les boutons ?" je me suis mise en colère et j'ai éclaté "et aussi vous voulez que j'offre les boutons qui z'étaient en jais véritab' et que la couturière elle me les avait fait payer le gusto y la gana (10) ! Si vous voulez, aussi je vous ferai cadeau d'une demi-douzaine d'épingles à nourrice, une par boutonnière, et la personne qui s'en habillera, de sa vie elle aura été aussi élégante ! Dans ma fami' on a toujours dit que les pauv' y z'avaient pas besoin de boutons, puisqu'y z'avaient froid et qui se racoquillaient à l'intérieur des vêtements. De l'intérieur y pouvaient fermer, en les tenant avec les doigts." Le type du ramassage il en a pas voulu ; il a rouspété comme un voleur et il est parti en se foutant de moi et en chantant "l'Abbé Pierre et ses longs jupons". Maintenant ma fi', tu peux pas faire la charité comme dans le temps ! Ma grand-mère et ma mère elles s'étaient constitué tout au long de leur vie, en coupant les boutons des vieilles robes et des veux manteaux qu'elles offraient aux malheureux, tout le contenu d'une boite de cigares Bastos, pleine de merveilles, avec des boutons en verre, en cristal, en bois, en corne, en corozo, en métal et en bronze ; quand j'étais petite, je me suis amusée comme une folle en jouant à la marchande, avec ces surplus i
               - Et y vous z'ont servi quelques fois, ces boutons que vous avez collectionné, durant toute votre existence ?
               - Jamais, répliqua la grand-mère, pasque à notre époque, quand on allait chez le commerçant, chaque habit y comptait des boutons neufs ; on coupait des boutons nous z'aut' rien que quand on faisait la charité.
               - Et vous avez tout laissé en Algérie ?
               - Les arabes y nous ont tout prit, même ça !

               - Et com' vous allez faire quand vous allez venir chez moi ? questionna Angustias
               - Pos y faut que je recouse les boutons sur la robe dont l'Abbé Pierre n'a pas voulu, ou y faut que j'aille m'acheter un ensemb', au prix qu'elles sont les choses et malgré que les fonds y sont en baisse...
               - Vous z'avez pas un jean ? Màin'nantvous savez le jean y remplace tout ! Vous z'avez qu'à voir Brigitte Bardot, quand elle paraît à la télévision de loin en loin, en jean elle est ! Et ça lui tient lieu de robe du soir.
               - Et tu me vois, moi, en jean ? s'encoléra la grand-mère, à mon âge? Et tu veux que je ressembles à Brigitte Bardot qu'elle est devenue mas fea que pegar un padre (11).
               - C'est vrai, laissa échapper Angustias, que vous avez un q comme une malle arabe ! Mais en mettant une grande écharpe autour du cou, à qu'elle vous tombe jusqu'aux genoux, mes invités y z'y verront que du feu !
               - Déjà que je suis faite comme tu dis, brama la grand-mère, en proie à une colère froide, ton couscouss tu pourras te le garder, avec ton poulet de batterie, et ton collier de bourricot ;
               - Si j'aurais su, fit Angustias, je vous aurais pas dit les ingrédients que je vais met' dans mon couscouss, et vous vous seriez régalés ! Moi j'ai voulu faire la pige à mes cousins Lopec'h de Douarnenez, qu'à la suite de mon invitation, y z'ont lancé la leur pour un gaspacho qu'y doivent organiser pour la Noël...

               - Tes cousins Lopec'h interrompit la grand-mère, c'est ceux-là qu'y font du couscouss avec du porc ?
               - Eux-mêmes ! Comme ça, y participent à la résorption des surplus bretons. Qu'en Bretagne y'a tellement de cochons. qu'on sait plus où les met'. Y paraît que la canicule elle en a supprimé des milliers et des milliers mais encore y'en a dans tous les coins. Mes cousins y font le couscouss avec comme légumes, des choux-fleurs et des artichauts. Au dernier qu'y z'ont organisé y'avait une tête de porc en haut de la pyramide de grains, avec du persil dans les oreilles, le tout dans un plat plat qui couvrait la moitié de la table ; les gens y se sont battus j'qu'à la dernière miette.
               - Tes cousins, conclut la grand-mère, pour avoir fait du couscouss au cochon avec des choux-fleurs et des artichauts, y vont pas tarder à recevoir une fatwa, de Ben Laden et du Mollah Omar, et y faudra pas s'étonner, si un jour on les retrouve, sur une route, ou dans une forêt bretonne avec le sourire kabyle (12).

1 - pamplines : compliments intéressés
2 - estas boras : à cette heure
3 - esportillada : ébréchée
4 - one-Matcho : je pense qu'Angustias a voulu dire un one man's show
5 - tchispado : ivre
6 - Por echar la que sea gorda : pour dire un mensonge qu'il soit gros
7 - le suffoco : l'affront
8 - le gentillo : la populace, la racaille
9 - de cuerpo presente : littéralement bien habillée "de corps présent" sur son trente et un
10 - le gusto y la gana : le goût et l'envie
11 - mas fea que pegar un padre : plus vilaine que le fait de frapper son père
12 - sourire kabyle : le cou tranché, égorgé




LE MUTILE N° 99, 1919

Gasparette y se gagne la Croix !

Monologue dédié aux Mutilés
               Un soir, la charge y sonne. Tous on court en avant.
                Je vous jure, ya khouia, que c'était foudroyant.
                Et nous autres, vinga, coups de dents, coups de tète,
                Pourquoi tous nous avions cassé la baïonnette.
                Partout tu vois des oss ; partout tu vois la mort.
                Delà rage, le sang, par les yeux, y nous sort.
                Après, tous on s'arrête et on pense à sa mère.
                La pauvre, tout le temps y doi être en prière,
                Y pense à son petit qu'il est mort ou blessé,
                Qu'il a un bras en moins, le crâne escagassè.

                Et quand la nuit y vient, les blessés y se plaignent ;
                Maman ! Maman ! Maman ! Dans le sang y se baignent !
                En l'air, tu vois voler des bandes de corbeaux.
                Nous sommes des vivants qu'on est dans leurs tombeaux !
                Un de la Cantéra, qu'on y dit Paloumette,
                L'ancien salaouedji, le buveur d'anisette,
                Çuila-là qu'il était maigre comme un stockfisch,
                Qui vendait des z'ameons, des vers, et du broumich,
                On y a crevé l'œil d'un éclat de torpille
                Et ça li a donné la danse des anguilles.

                Pan ! Pan ! La contre-attaque. "'En avant donc, les gas. "
                Et moi je bouge pas, pourquoi je fais figa,.
                Le caporal y vient : " Et toi, tu fais la sieste ?"
                Pardon, mon caporal, une jambe y me reste
                Et l'autre, je sais pas ousqu'elle est. - Oui, je vois,
                Ce n'est rien, t'en fais pas, t'en auras une en bois.
                Ça vaudrait mieux qui dit ousqu'il est la bulance.
                Je souffre-un peut trop fort ; je perds la connaissance,
                -Tout un coup j'ai tombé endormi et, total,
                Je m'ai trouvé couché sur un lit d'hôpital !
                Paloumette à côté, dessous sa couverture,
                A cause il est laouër, y cache sa figure.

                Le Quatorze Juillet, que c'était festival,
                Y vient des officiers avec un général
                Qui m'a dit comme ça : " Tu t'as rempli de gloire,
                Je te fais chevalier. (D'un peu pluss j'ai la foire-)
                Honneur à tes exploits, glorieux blessé."
                (La paille avec de l'huile y m'aurait pas passé.)
                Partout j'entends : "Saha, vive toi, Gasparette."
                Et Paloumette y dit : " Ti payes la miquette."
                On arait dit un mort qu'il est dans le cercueil.
                Va-t-en la pillencoule ou je te sors l'autre oeil.

                Pour finir, on nous casse un discours sur la guerre ;
                Les roitelets, les rois, jetons-les tous à terre ;
                Qu'on les foute à la mer et qu'on n'en parle plus.
                Les rois, c'est des falso, vive nous, les Poilus.

E. Brouel.               



  Retour à Saint Cloud   
Envoyé Par M. Hecquard

C'était la plage de tous les jours, de tous mes rêves, de tous mes souvenirs… Les quelques lignes qui suivent traduisent les sentiments confus d'une quête ardente et incessante du paradis de mon enfance. Un jour, enfin, j'ai pu toucher à ce bonheur inespéré, 45 ans après ma dernière baignade à Saint Cloud…

          Reverrais-je l'éden au parfum de jasmin
          Où roseaux et palmiers se courbaient sous les brises ?
          Où s'agitait, là-bas, tout au bout du chemin
          La grande mer saphir ? À l'ombre des cytises,

          Je marche maintenant vers le sable doré
          Qui porte encor la trace ancienne de mes jeux
          Enfantins. "- Que fais-tu, ô marcheur éploré,
          Sur ce triste rivage et que cherches-tu ? - Je

          Songe aux bonheurs passés quand je cueillais patelles
          Et tellines, plongeant au cœur des rouleaux bleus,
          Mêlant mes cris aux chants des vagues immortelles."

          Qui m'interpelle ainsi ? Personne ! Mais le vent,
          La plainte du ressac et les flots onduleux
          Ont troublé mon esprit… qui s'apaise en rêvant.

P.Hecquard - 2 mai 2021




PHOTOS DE BÔNE
Envoi de diverses personnes


PLACE DES GARGOULETTES




PLACE ALEXIS LAMBERT




PLACE D'ARMES





VIEILLE VILLE




ENTREE DE LA COLONNE




CINEMA OLYMPIA




VUE AERIENNE DE BÔNE




ROND POINT DE LA PREFECTURE AUX SANTONS




CHRONIQUE HISTOIRE
Envoyé par M. Piedineri
Le Massacre Annoncé...

                  Eléments sur le prévisible massacre oranais du 5 juillet 1962. Il s'agit d'un extrait de l'intervention du député d'Alger Marc Lauriol à l'Assemblée nationale, le 5 juin 1962. La représentation nationale était donc largement avertie des dangers encourus par les Français d'Algérie au lendemain de l'indépendance, qui aboutiront au massacre d'Oran un mois plus tard jour pour jour :
                  " Si vous nous avez désespérés et si vous nous avez trompés, dit Marc Lauriol, c'est que vous avez effectivement quelque chose à nous cacher. Ce " quelque chose ", c'est tout simplement que vous nous livrez. Cela, je tiens tout spécialement à la démontrer à l'Assemblée nationale. […]
                  Vous avez géré nos affaires sans nous, et maintenant vous entendez, vous décharger sur nous de votre faillite. Ce ne sont pas là des procédés corrects. Ils sont disqualifiants, comme vous disqualifie d'ailleurs le fond même du problème, c'est-à-dire l'absence totale de garanties à laquelle vous avez abouti. […]
                  Aucune force militaire impartiale ne peut protéger les Français d'Algérie et exécuter d'éventuelles sentences.
                  L'armée française rembarque. A partir du 2 juillet, elle sera une armée d'occupation en pays étranger, et elle ne pourra plus intervenir sans commettre, en droit, un acte d'agresseur.

                   L'agence F.L.N. d'ailleurs, dans cet esprit, a fort bien précisé le 1er juin dernier que - je cite - " l'armée française n'aura plus aucun rôle à jouer à partir du 2 juillet et devra, regagnant ses casernes et ses camps, préparer son évacuation ". Quant aux forces de police, tous leurs services - je cite encore - " seront, à compter du 2 juillet, transférés à l'Etat algérien ".
                  La seule force publique algérienne sera donc l'armée de libération nationale, l'A.L.N., avec ses différents services. Elle aussi sera partie au litige et c'est bien à elle que nous sommes exclusivement livrés, à elle qui a tant de fois montré sa cruauté et son sadisme qui relèvent de la barbarie la plus antique. Rappelez-vous les massacres de Meknès où des Français ont été atrocement mutilés et brûlés vifs à portée de fusil d'une armée française enfermée dans ses casernes.
                  Voilà ce qui nous menace en Algérie ; voilà ce que nation doit savoir, ce que l'on ne clamera jamais assez, car ce danger est réel, il doit être dénoncé, et ce danger, c'est le Gouvernement qui en porte la responsabilité. (Applaudissements au centre droit et à droite.)

                   Aucun représentant responsable ne peut dans de telles conditions conseiller aux Français d'Algérie de demeurer sur place s'ils sont les otages de l'armée de libération nationale.
                  L'opinion publique, je le répète, doit le savoir. Elle ne sera plus longtemps abusée. Craignez alors sa condamnation, car le peuple de France ne veut pas ce que vous lui faites faire et qu'il ne comprend pas.
                  Sans force militaire impartiale et indépendante, aucune garantie n'existe. Toute garantie passe par la force militaire. C'est un axiome élémentaire de droit, c'est aussi un axiome de bon sens. On peut discuter à l'infini sur telle ou telle institution, sur les regroupements territoriaux si désirables, si salvateurs ; on peut discuter de toutes les règles possibles, elles demeureront toutes lettre morte dès lors qu'aucune force ne sera créée pour les appliquer.
                  Je le dis à la France et à l'étranger ; je le dis aussi aux Français d'Algérie, pleinement conscient de mes responsabilités envers eux : en l'absence de toute force militaire propre à protéger leurs droits naturels, ils prendront tous leurs risques en demeurant en Algérie après le 1er juillet. "
----------

                  Lorsqu'on regarde les choses de près, on se rend compte qu'il n'y eut guère que les communistes et les plus à gauche des socialistes pour approuver pleinement la politique algérienne du gaullisme. Une politique algérienne ayant rejeté toute solution de compromis. Car il faut savoir que le " nationaliste " de Gaulle est allé tellement loin dans sa politique d'abandon, qu'il a réussi l'exploit de se faire donner des leçons de patriotisme par des députés radicaux-socialistes du Sud-Ouest.
                  Voici, exemple parmi d'autres, le discours du député RADICAL-SOCIALISTE du Sud-Ouest Guy Ebrard (1926-2017).
                  Ce dernier - équivalent aujourd'hui d'un François Bayrou - s'exprime à l'Assemblée nationale le 15 décembre 1961 au nom des parlementaires du centre-gauche, en pleine révolte de l'OAS et au moment où l'idée d'un partage de l'Algérie est de plus en plus en vogue. Guy Ebrard s'adresse au gouvernement avec beaucoup de virulence :
                  " Comptez-vous garantir efficacement, et comment, les droits individuels permettant à chaque Algérien, qu'il soit chrétien, juif ou musulman, et quel que soit son statut, de choisir librement entre la nationalité française et la nationalité du futur Etat algérien ?, demande-t-il.

                   Avez-vous stipulé, et comment, les droits collectifs des minorités et défini les moyens efficaces pour empêcher dans l'avenir discriminations et brimades, en donnant au moins à ces minorités ce qui a été reconnu à la minorité turque de Chypre et ce dont bénéficient les communautés non musulmanes au Liban ?

                   Pourriez-vous définir clairement et fermement vos intentions à cet égard ? Si vous le faisiez, vous donneriez à la France le soutien de l'opinion internationale, vous ôteriez au F.L.N. tout espoir d'escompter notre faiblesse et vous rassureriez un peu les Européens d'Algérie. Car, messieurs, quels qu'aient été leurs torts dans le passé, c'est bien à eux que va être demandé le sacrifice essentiel dans l'intérêt national et c'est pour cette raison qu'il fallait mettre dans votre langage une note de certitude et la chaleur humaine, précisément parce que ce langage était destiné à les convaincre. […]

                   Alors, voyez-vous, messieurs du Gouvernement, ce n'est pas l'objectif libéral de votre politique que nous condamnons, ce sont les méthodes que vous avez employées pour la mettre en œuvre, et qui sont à ce point mauvaises qu'elles ont compromis jusqu'à présent le succès de cette politique. Au lieu de définir avec clarté à la face du monde les limites que la France ne saurait dépasser dans la négociation sans livrer l'Algérie au chaos et au massacre, au lieu de définir avec conviction la politique de rechange que vous appliqueriez avec certitude en cas d'échec des négociations, vous vous êtes lancés dans la voie périlleuse des concessions unilatérales octroyées par la France. Au lieu de négocier patiemment en équilibrant concessions de votre part et contreparties de la part de vos partenaires, en définitive, vous avez tout concédé sans jamais rien recevoir.

                   Vous avez abandonné les conditions préalables du cessez-le-feu. Vous avez explicitement reconnu l'unité territoriale de l'Algérie, du Sahara, porteur de tant de richesses qui conditionnent dans une large mesure notre liberté monétaire et notre expansion. Vous avez pratiquement accordé l'indépendance à l'Algérie. Vous avez accordé une représentativité quasi exclusive au F.L.N. Vous intéresseriez cette Assemblée, monsieur le Premier ministre, si vous pouviez, en contrepartie, lui indiquer ce que vous avez, jusqu'à présent, reçu. (Applaudissements sur certains bancs à gauche et sur plusieurs bancs à l'extrême gauche, au centre droit et à droite.) […]

                   Nous pouvons lire dans la presse, souvent mieux informée que nous-mêmes, que le Gouvernement serait sur le point d'obtenir un cessez-le-feu en échange de la constitution d'un gouvernement provisoire. Nous ne demandons qu'à être rassurés et nous espérons que vous nous direz, monsieur le Premier ministre, en même temps, votre détermination et vos exigences, concernant les droits des minorités d'Algérie et la sauvegarde du patrimoine matériel et humain qui s'y attache. (Applaudissements sur certains bancs à gauche.) Car nous autres radicaux, autant nous avons toujours pensé que la formule de l'intégration n'était pas réalisable en Algérie, autant nous avons toujours repoussé, soit l'idée d'un dégagement à tout prix, soit l'idée d'une indépendance qui se réaliserait dans le désordre et dans le sang et qui laisserait peser sur la France, pour des générations, le remords et le regret. Puisque vous avez glissé progressivement de l'autodétermination vers la prédétermination en négociant au fond avec le F.L.N., vous avez le double devoir d'obtenir des garanties et de nous les exposer. C'est peut-être parce que vous avez trop donné l'impression que vous céderiez sur ces garanties que sont nées l'inquiétude, puis la révolte. "

                   Puis Jean-Paul David, autre parlementaire de centre-gauche, prend la parole pour dénoncer l'existence d'une " complicité ou une complaisance vis-à-vis d'une autorité irresponsable, mais à laquelle certains tiennent à laisser la responsabilité de régler dans un certain sens le problème algérien. C'est le " lâche soulagement " dont parlait Léon Blum au lendemain de Munich. " " Il suffit d'un Ben Bella ou d'un Nasser pour nous faire capituler ! ", s'exclame le député de Seine-et-Oise, recueillant de la part de certains de ses collègues de vifs applaudissements.
Marius Piedineri, mai 2021


Ma France par Général Salini
Envoyé par M. H. Jolivet
Lettre d'amour à la France adressée à nos concitoyens politiquement aveugles

            Je ne suis pas sur les réseaux sociaux. Si ce texte vous plait vous êtes libre de le faire lire à vos relations. Avec ma signature : Jean Paul Salini, général d'aviation.

            La France n'a d'autre légitimité qu'historique. Notre capitale est Paris. Mais si l'Histoire avait été différente la France aurait été différente et notre capitale aurait pu être à Toulouse, à Dijon ou à Aix la Chapelle. Aurait-ce été mieux? Aurait-ce été plus mal? Qui peut le dire? La France n'est qu'un produit que l'Histoire a élaboré lentement dans ses cheminements obscurs.

            Cette gestation s'est faite dans les larmes, dans les drames et dans le sang. Notre histoire n'est que bruit et fureur. Des millions de gens sont morts de mort violente pour aboutir au résultat final. Tous, aussi bien ceux qui étaient pour, ceux qui étaient contre, et ceux qui ont été pris malgré eux dans ces querelles, ont contribué par leurs larmes, par leurs souffrances, par leurs sacrifices et par leurs morts à la lente construction de la France. Nous nous sommes tant battus. Nous avons tant souffert. Nous-mêmes contre nous-mêmes. Des torrents et des torrents de sang. Le sang! Le sang! Le sang! Ce ciment, que l'Histoire utilise, sans compter, pour édifier ses constructions.

            Non! Notre histoire n'est pas toujours bien belle. Nous avons fait tout ce que peuvent inspirer le fanatisme, la folie, les convictions religieuses, les calculs sordides. L'anéantissement total des Cathares! De braves gens inoffensifs, victimes de massacres sans nuance : "Tuez! Tuez! Dieu reconnaîtra les siens!".
            Lorsque ce fut fini, que le dernier Cathare eut été brûlé, les tribunaux de l'Inquisition en France se retrouvèrent au chômage. Cette situation ne convenait pas à leur zèle. Ils déterrèrent alors les cadavres de ceux qui étaient morts sans jugement pour les juger. Post mortem! Acharnements imbéciles! Vinrent ensuite les guerres de religion. La grande fête du sang, à Paris pour la Saint Barthélémy.
            Puis les Frondes diverses. Les Camisards! La révocation de l'Edit de Nantes. La Révolution! La Vendée et la Bretagne. C'est le général Westermann, qui annonce triomphalement à la Convention :"Citoyens! La Vendée n'est plus". C'est François Pierre Joseph Amey, qui alimentait les fours à pain avec des femmes et des enfants.(1) Et la guillotine. Toujours et encore la guillotine. Puis d'autres révolutions.
            Celle de 1848. La Commune! Sursaut d'une population affamée, désespérée et humiliée, soutenue par les élucubrations d'une équipe d'intellectuels fumeux. Et j'allais oublier l'aventure récente de la collaboration et de l'épuration.
            Sans compter toutes les petites révoltes locales. Celle des Canuts, celles des mineurs, celle des viticulteurs. L'Histoire de France, ce n'est pas toujours très beau. Y compris dans ses aventures coloniales. La trainée sanglante de Dakar jusqu'au lac Tchad de la colonne Voulet Lemoine. Une voie balisée de têtes coupées, disposées en pyramide. Les répressions en Algérie, en Nouvelle Calédonie, à Madagascar! Partout! J'arrête ! C'est assez!

            Mais voilà que nous avions atteint l'âge adulte! Ou presque! La France que j'ai connue, libérée du fascisme et débarrassée de ses guerres coloniales, assurée de la paix par la crainte qu'inspiraient les armes nucléaires, vaccinée contre les enthousiasmes guerriers par deux guerres mondiales, a connu une sorte de paix aussi bien intérieure qu'extérieure. Les Français, mieux instruits, avaient fait des progrès en matière de tolérance et de civilisation. La France était un pays où il faisait bon vivre. Les mots liberté, égalité, fraternité quittaient les frontons des bâtiments officiels pour se matérialiser dans la vie courante. La sécurité était assurée et les Français se passionnaient pour le combat des Chefs à peu près autant qu'aux matches de rugby et avec la même passion, vive sans doute mais modérée dans ses résultats.
            Notre médecine, notre couverture sociale, les retraites des vieux travailleurs comptaient parmi les meilleures au monde. On pouvait avoir et exprimer ses opinions sans aucun danger. On pouvait enfin espérer que nous serions vaccinés contre les excès imbéciles. Le niveau de vie général allait s'améliorant. Tout le monde ou presque avait une auto. Et l'auto c'était la liberté, les vacances. Les Français étaient heureux. Mais, comme toujours lorsqu'on est heureux, ils ne le savaient pas.

            Et par-dessus tout cela nous avions un immense héritage. Les sacrifices de nos anciens, leurs souffrances, leurs efforts nous avaient laissé riches. Riches de culture, riches de biens, riches d'innovations techniques, riches enfin d'une certaine façon de vivre, riches d'une certaine complicité de raisonnement, riches des rires partagés, riches de souvenirs communs, riches en un mot, d'être français. Il n'y avait pas de raison pour remettre en cause ces richesses-là.
            Changer la France? Progresser! Oui! Mais changer! Et pourquoi faire?
            Et pour aller où?

            Mais voilà que les Corses ne sont pas contents. Voilà que les Bretons ne sont pas contents. Les premiers organisent des nuits bleues. Les autres brûlent le Parlement de Bretagne. Les viticulteurs démolissent les stations de péage. Les banlieusards brûlent les autos. Les casseurs éclatent les vitrines. Des quartiers entiers échappent à l'autorité, à l'ordre. Les rues ne sont plus sûres. La police n'ose plus faire appliquer une loi que la Justice elle-même ne respecte plus.

            Cependant la faible densité démographique de la France attire sur notre sol des populations qui ignorent tout de notre culture et de nos coutumes. Elles apportent avec elles leurs habitudes, leurs traditions, leurs querelles, leurs guerres étrangères. Animées par un sectarisme religieux d'un autre âge, elles imposent leurs intolérances. Notre pays fait un bond vers le passé. De bonnes âmes, inspirées de bonne intentions favorisent cette invasion cachée. D'autres la justifient au nom même de l'intérêt de la France.
            L'immigration est, parait-il, une chance pour notre pays. Et c'est vrai! Oui! C'est vrai! C'est vrai lorsqu'il s'agit de personnes isolées ou de petits groupes. Celui-là qui vient chez nous et qui s'adapte est l'homme à la double culture. Il en est d'autant plus riche et il nous enrichit. Ils sont nombreux, ces ex étrangers qui ont contribué de façon décisive au rayonnement de notre pays. Chaque nouveau venu est une addition. Mais une grande masse c'est une invasion. Car ces grandes masses ne s'adaptent pas, ne s'intègrent pas. Elles vivent entre elles, à l'écart du reste du pays.

            Et trop c'est trop! Trop de monde ne crée pas la qualité de la vie. Et la vraie richesse c'est peut-être la vacuité, l'espace, la faible densité! Est-ce qu'il n'est pas plus agréable de vivre à Toulouse ou à Cannes qu'à Calcutta ou à Sao Paulo? Et les parts du gâteau ne sont-elles pas plus grosses lorsqu'on est moins nombreux à se les partager?

            Entre temps les Français eux-mêmes se consacrent au pillage de notre pays. Les intérêts personnels priment l'intérêt général. Les hommes politiques donnent l'exemple de la rapacité et de la malhonnêteté. On voit, on ne le croirait pas, un ministre du budget tromper le fisc. Les syndicats, sourds aux devoirs qui sont les leurs, défendent quoi qu'il advienne les "avantages acquis" et leurs intérêts de corporation. La CGT a tué le port de Marseille où dorment, sous le soleil, des kilomètres de quais déserts. La Société Nationale Corse Méditerranée est pillée et mise en perce par ses personnels. Elle survit, boiteuse, à grands renforts de subventions. La SNCF bat tous les records de grève et lorsqu'on prend le train on ne sait ni quand on partira ni quand on arrivera.

            Les hommes politiques, ceux-là même qui sont censés nous diriger, se complaisent dans le combat des chefs, vieille coutume gauloise dont parlait déjà Jules César. Aucun d'eux ne porte en tête une vision à long terme de la France. Ces nains infirmes s'occupent de tout sauf des deux missions principales qui sont de conserver le pays en paix et d'assurer la survie et le développement de sa civilisation. Deux devoirs sacrés, mais qui se situent hélas, bien au-delà des prochaines échéances électorales.

            Car nous marchons vers la guerre. Nous y sommes peut-être déjà. Les temps sont venus où les innocents vont payer pour les fautes des politiques. Du sang! Encore du sang! Notre pays marche à reculons vers l'abîme. Il n'a pas réussi à assimiler les populations étrangères qui sont venus sur notre sol. Cela ne date pas d'hier. Cela dure depuis longtemps. Depuis l'échec de l'implantation des Harkis sur notre territoire. Cette guerre, comme toujours, les hommes politiques, ces nains(2), trop malins pour être intelligents, ne l'ont ni prévue, ni prise en compte, ni même envisagée.

            Racisme! Vous avez dit "racisme". Oh! Ce n'est pas bien! Ce n'est pas bien du tout. Mais ça existe. Ça fait partie de la réalité. Vous voulez nier la réalité? Cela doit être pris en compte comme la pluie ou le soleil.
            On peut comme l'autruche se cacher la tête. Mais la réalité finit toujours par nous rattraper.

            Il n'y a que peu d'exemples dans l'Histoire de cohabitations réussies entre des ethnies différentes. En général lorsque ça marche, c'est parce qu'il y a une ethnie dominante qui contraint les participants à une tolérance réciproque. C'était le cas de l'empire des czars ou de l'empire turc. Ou bien c'est parce que des populations déracinées trouvaient un vaste territoire à se partager. Elles abandonnaient alors leurs vieux réflexes pour jouir pleinement de leurs nouvelles richesses. C'est ce qui explique la réussite relative du melting-pot américain. Au détriment d'ailleurs des populations primitives. Le racisme latent des nouveaux arrivants s'était trouvé une victime et un ennemi communs.

            La France a perdu de son pouvoir d'attirance. Elle ne séduit plus. Elle n'est plus la terre promise. Elle ne plait que par sa Sécurité Sociale ou son RSA. Ou parce que les gens qui y parviennent sont chassés de chez eux par la misère ou par la guerre. Ils viennent chez nous avec leurs traditions, leurs coutumes, leurs langues.
            Ils apportent dans leurs bagages leurs griefs et leurs guerres. Des conflits, qui ne nous concernaient pas, deviennent nôtres. Ils n'ont pas l'intention de se soumettre à nos lois ni à nos régimes politiques. Petit à petit la France perd son image, sa cohésion, son âme. Qu'est-ce que ce sera la France dans vingt ans. La Yougoslavie…

            J'ai aimé la France. Il y a mille façons d'aimer la France. Et chacun a la sienne. De Gaulle, lui, s'était forgé une sorte d'abstraction. Il y avait LA FRANCE. Un objet presque immatériel. . Il disait "La France" et il n'y avait plus de raisonnement possible. C'était plus l'expression de sa propre passion pour un objet abstrait et qu'il s'était fabriqué que l'amour des choses véritables et terrestres. Et lorsqu'il avait proclamé "La France!", les Français (des veaux!) n'existaient plus. Ils étaient invités à se prosterner devant. Ainsi d'ailleurs que le reste du monde! Mais qu'est-ce que c'est, La France, sans les Français?

            Mon amour à moi est plus charnel. Il n'y a pas de France sans les Français. Ils constituent la France au même titre que ses paysages ou sa culture. Au cours des siècles et des siècles, ils se sont constitué un faisceau d'habitudes, de traditions, de défauts, d'amours et de désaffections qui sont la France. Mon beau-frère, gauchisant et un peu anarchiste, fait volontiers fi des amours franchouillardes mais il retrouve la France pendant les grandes messes du rugby à quinze. Il s'époumone alors :"Allez! La France!" Il la retrouve aussi dans le fond d'un verre de Bourgueil ou dans une poésie de Rimbaud. Par sa curiosité d'esprit, par son amour des idées généreuses, par son culte de l'amitié il est français. Tout autant que moi.

            Pour moi, la France, c'est d'abord un pays, des gens, une culture, des habitudes communes, une langue et une histoire. Ce n'est pas un élément tout seul, un mot tout seul, une chose toute seule, mais une conjonction de phénomènes, un faisceau de sentiments qui se sent plus qu'il ne se définit. Pour moi la France je l'aime autant dans un camembert que dans une chanson. Je la retrouve au fond d'un verre et dans la beauté d'une femme. Et je la retrouve aussi bien dans le Mont Saint Michel que dans le désert des Agriates. Il y a mille façons d'être Français. Il y a des tas de types dont je ne partage absolument pas les idées et qui sont aussi français que moi et que je reconnais comme tels.

            Nous avons tant souffert! Nous avons tant saigné! Nous avons tant aimé! Nous avons tant donné!
            Nous avons tant haï! L'Histoire, notre Histoire nous a fabriqués tous différents mais tous semblables. Le Breton comme le Ch'ti. Elle a fabriqué ce mélange mystérieux que l'on appelle le peuple français. Il est composé de gens de toutes les races et de toutes les religions. Mais cet ensemble est (était) homogène, dans ses habitudes, dans son art, dans ses réactions et même dans ses contradictions.

            Je suis un vieil homme. J'ai connu l'époque du fascisme, de l'occupation étrangère, de la guerre. J'ai connu la France malheureuse de ce temps-là. Qu'elle était belle dans sa détresse ! En 1938, lors de la visite à Bastia de je ne sais plus quel ministre, j'ai prononcé à haute voix, avec tout le reste de la population, le serment de Bastia. C'était un peu grandiloquent mais l'ambiance s'y prêtait. Le fascisme était à la porte et Mussolini affichait son intention d'annexer la Corse. Alors, comme les autres, j'ai répété à voix haute la formule simple que nous envoyaient les hauts parleurs:
            "Sur nos tombes et sur nos berceaux, nous jurons de vivre et de mourir français".

            Les autres, sans doute, ont oublié. Mais, pour un jeune garçon de neuf ans, un serment ne s'oublie pas facilement. D'autant que c'est dans ma vie le seul que j’aie jamais prononcé. Alors j'ai accompli la première partie de ce programme et j'ai vécu français. Il me reste maintenant à remplir la deuxième partie et, selon toute probabilité, cela ne tardera guère.

            Je suis un vieil homme. Au fond de ma tasse de café vide il reste encore quelques grains de sucre. Je les traque avec minutie du bout de ma cuillère. Je déguste avec plaisir ces infimes atomes de saveur. Et ils fondent, trop vite hélas! sous ma langue. Mais ils sont bons.

            Ainsi de ma vie! J'ai vidé la coupe et il ne me reste plus que des plaisirs dérisoires. Mais ces gouttes de miel sont bonnes et j'en profite pleinement. Je regarde le soir la descente sanglante du soleil et je rêve, car l'ouest a toujours été ma direction préférée. Je vais faire la sieste près d'un torrent et le murmure éternel de l'eau me susurre que, même après mon départ, les choses continueront d'être belles. Je contemple la flèche d'une cathédrale et j'admire sa course incessante à travers les nuages pressés par le vent. Je respire une fleur.
            J'apprécie le roulis des hanches d'une femme, qui claudique, gracieuse, sur des talons trop hauts. Toutes ces choses sont bien. Je vis encore. J'ai eu de la chance. La plupart de mes camarades sont morts, jeunes, d'une façon brutale. La mort les emportait. Elle procède avec moi de façon plus subtile. Elle m'entoure, m'enveloppe.
            Je ne la vois pas avancer, mais je l'aperçois autour de moi, qui chemine. Elle n'est pas pressée. Moi non plus.
            Et cela ne me tracasse pas trop.

            Mais je suis gros d'une inquiétude. Si nous ne parvenons pas à franciser toutes ces populations étrangères, que va-t-il advenir de tout ce que j'ai aimé? De toutes ces richesses que nous ont laissées nos anciens. De toute notre civilisation, de nos amours, de nos écrits, de nos chansons, de nos idéaux, de nos croyances?
            De nos rêves?
            Qui comprendra encore dans vingt ans une chanson de Brassens?
 
Jean Paul Salini
Général d'aviation

            (1) Amey fait allumer des fours et lorsqu'ils sont bien chauffés, il y jette les femmes et les enfants. Nous lui avons fait des représentations ; il nous a répondu que c'était ainsi que la République voulait faire cuire son pain. (Rapport de l'officier de police Gannet. Nantes. Janvier 1794).
            Il est à noter que le même Amey fit par la suite une belle carrière. Nommé baron d'Empire en 1808, il est fait chevalier de l'ordre de Saint Louis en 1815, par Louis XVIII. Son nom est gravé sur l'Arc de Triomphe de l'Etoile. Il n'y a pas de justice!!!
            (2) Appréciation injuste, généralisation hâtive, exagération évidente. Mais ça me fait du bien de le dire. Donc je le laisse!!!


Le mystère Yusuf
Envoi de M. Christian Graille

               " On ne colonise pas avec des saints " disait Lyautey. Il n'est donc pas étonnant de rencontrer au temps cde la conquête de l'Algérie, des aventuriers qui se sont fabriqués d'avantageuses légendes.
               Si l'historien essaye de les démasquer, ce n'est pas pour usurper les fonctions de juge des Enfers ; c'est parce qu'ils sont intéressants comme catégorie d'hommes.
               - Les Léon Roches,
               - les Cusson (personnage trouble et énigmatique),
               - les Desaulty et
               - Yusuf

               Dont je vais essayer de découvrir les origines, jouent dans l'établissement des colonies le rôle des commandos dans les corps de débarquement.

               Yusuf, méprisé à son époque par les officier de l'armée métropolitaine, porté aux nues, il y a une cinquantaine d'années par des panégyristes fougueux, est sans doute le plus beau type de ces héros déconcertants qui ont frayé la voie aux vrais constructeurs d'Empires.
               C'est pourquoi il ne doit pas intéresser que les amateurs de curiosités historiques.
               En 1830, ce devait être en juin, nous apprend Ferdinand De Lesseps, étant élève consul auprès de mon père le comte Mathieu De Lesseps, consul général de France et chargé d'Affaires près du Bey de Tunis, je me trouvais avec lui dans sa maison de campagne à la Marsa, à peu de distance des ruines de Carthage, lorsque nous vîmes rentrer au salon un jeune mamelouk richement vêtu, que nous reconnaissions comme attaché au Bach-mamelouk (le chef des mamelouks). Il se nommait Yousouf.

               Il venait, nous dit-il, solliciter la protection de la France car sa vie était en danger…
               Il fut convenu qu'il se rendrait le lendemain, une heure avant le jour, aux Ruines de Carthage, vers l'entrée des anciennes citernes, où il devait me rencontrer.
               Que là accompagné d'un officier de l'Adonis, nous trouverions sur la côte une embarcation qui viendrait faire de l'eau à une source située au pied de l'ancienne citadelle de Byrsa, où Didon (princesse phénicienne) avait reçu Énée (héros légendaire Troyen)

               Le lendemain en compagnie du lieutenant Armand (C'est une erreur. Il s'agit de l'élève officier Thierry ainsi que l'atteste Darrécagais. Ce nom est inscrit sur le rôle d'équipage de l'Adonis, conservé aux Archives du port militaire de Toulon.
               D'après Darrécagais, Yusuf, en 1861, se rappelant le service que lui avait rendu Thierry, envoya au Ministre de la Marine une lettre de recommandation pour cet officier, en racontant tous les détails de son évasion.
               Le capitaine de vaisseau Sizaire, chef du service historique de la Marine à qui j'avais demandé de rechercher cette lettre, ne l'a pas retrouvée. Elle devrait normalement figurer au dossier de Thierry ; mais il est bien probable que Yusuf ne l'a jamais envoyée) du brick de l'Adonis, j'arrivais au moment convenu, au lieu du rendez-vous, où nous attendîmes pendant une heure.

               Ayant aperçu, courant dans la plaine, deux chevaux sellés sans leurs cavaliers, nous nous rendîmes à la plage, à l'endroit où devait se trouver l'embarcation de l'Adonis. Nous apercevons bientôt Yousouf avec son domestique, ayant tous deux le sabre à la main et s'élançant dans le bateau.
               Yousouf avait abattu, d'un coup de sabre sur la tête, un des gardes de la plage qui voulait s'emparer de lui.
               Étant placé sur un point un peu élevé à dix mètres de distance, je couchai en joue, avec mon fusil de chasse, les gardes qui nous menaçaient, leur criant que j'étais le vice-consul de France et qu'ils n'avaient, pour s'en assurer, qu'à se rendre chez le gouverneur de la Goulette, dont la résidence était dans le voisinage.
               En même temps M. Arnaud donnait l'ordre aux matelots de laisser là les barriques qu'on remplissait d'eau, et de se diriger immédiatement vers le mouillage de l'Adonis. Ce brick repartait bientôt pour Alger avec des recommandations pour le Général en chef en faveur de Yousouf
*
*    *

               D'où ce mameluk était-il issu ?
               Le dossier administratif de Yusuf donne les dates les plus diverses pour sa naissance : 1805, 1808 ou 1810.
               On trouve même 1812 dans un acte de notoriété dressé en 1845. Aucune indication sur ses parents. Yusuf disait être né à l'île d'Elbe en 1808 ou 1809.

               Il se rappelait y avoir vu, en 1814 :
               - l'Empereur Napoléon,
               - sa mère et
               - la princesse Pauline sa sœur, chez qui on le conduisait chaque matin et qui lui montrait beaucoup d'affection.
               - Le garde de santé Chialini, qui se disait cousin de Yusuf, donna à Féraud plus de précisions : Yusuf était originaire de Copolivri, petite bourgade de l'île où il naquit en avril 1805.
               - Son père propriétaire aisé, se nommait Signorini et sa mère Zia Lisa.
               - Il avait un frère aîné, Joanni qui était capitaine de la marine marchande.

               D'après le sieur Ventini qui se disait aussi son cousin et l'assaillit plus tard de demandes d'argent, la mère du général était morte de bonne heure.
               Son père l'avait suivi dans la tombe peu de temps après la disparition de leur enfant. Le vrai nom de Yusuf aurait été Ventini.

               Quelques jours après le départ de l'Empereur, la princesse Pauline avait confié l'enfant à une dame polonaise, qui se rendait en Italie et avait bien voulu se charger de le conduire à Livourne où on devait le mettre au collège.
               Il nous faut donc croire qu'on mettait les enfants en pension, à cette époque, dès l'âge de six ou sept ans.
               Entre l'île d'Elbe et la côte toscane à hauteur du cap corse le navire tomba au pouvoir des pirates barbaresques. Ils mirent le cap sur Tunis.
               Le reis qui avait fait la capture offrit l'enfant au Bey Mahmoud qui le fit élever au sérail.

               D'après Ferdinand De Lesseps, c'est dans le port même de Livourne que Yusuf aurait été pris. Le capitaine d'un navire de guerre tunisien l'avait attiré à son bord et enlevé traîtreusement.

               A la cour du Bey, Yusuf reçut une éducation soignée. Il savait déjà l'italien et le français. Il apprit :
               - l'arabe,
               - le turc,
               - la calligraphie et surtout
               - le dessin oriental qu'il pratiquait avec une grande habileté.


               Ici les récits diffèrent de nouveau. Yusuf disait qu'à l'âge de treize ans il fut employé auprès du ministre des Finances en qualité de secrétaire. C'est à 14 ans qu'il aurait été admis dans le corps de mameluks du Bey.
               Il aurait fait partie de toutes les expéditions du prince en particulier de celle qu'il dirigea contre Bey de Constantine.
               A 17 ans il jouissait de la plus grande faveur auprès du nouveau Bey, Hoçain, et soulevait des jalousies sourdes.
               - Quoique petit de taille,
               - il avait bonne tournure, et
               - son visage était des plus séduisants.
               - Brillant cavalier,
               - toujours magnifiquement vêtu,
               - il attirait l'attention des dames de la cour.


               Kaboura, fille aînée du Bey, mariée au bach-mameluk Si Hussein se prit d'une grande passion pour le jeune homme. Une liaison avec une princesse, si elle était découverte, devait coûter la vie au séducteur.

               D'après Féraud, Yusuf, un jour qu'il répondait à un rendez-vous, fut surpris par un eunuque du harem. Il prit l'audacieux parti de suivre le dangereux personnage, se jeta sur lui pendant qu'il traversait le jardin et le noya dans une piscine en lui maintenant la tête sous l'eau.
               Cette mort fut considérée comme un accident.
               Quelque temps après Yusuf eut une vive discussion avec le ministre Sahab Taba à propos d'un livre perdu. Il reçut vingt-cinq coups de bâton.

               Lorsque Yusuf chercha refuge à la maison de campagne du consul de France, il raconta qu'il désirait se soustraire à un terrible danger.
               En pleine audience publique, au palais du Bey, un Arabe était venu avertir le souverain de l'existence d'un scandale dans la demeure de sa propre fille, avec laquelle un mameluk entretenait des relations intimes.
               Yusuf avait été arrêté et enfermé provisoirement dans le palais.
               On avait décidé de l'envoyer en exil à la frontière de Tripoli.
               Mais la fille du Bey qui avait réussi à connaître les intentions de son père, avait fait prévenir son amant que les gardes chargés de le conduire à la frontière devaient le mettre à mort pendant le voyage.
               Yousouf avait réussi à s'échapper et demandait la protection de la France.
*
*    *

               Jolis récits… suspects.
               D'abord parce qu'ils ne se mettent pas d'accord sur le nom de famille du héros. Ensuite parce que Yusuf avait tout intérêt à se dire originaire de l'île d'Elbe, c'est-à-dire Français, puisque cette île, à l'époque de sa naissance faisait partie de l'Empire napoléonien.
               Ainsi il avait la possibilité de devenir officier en sortant du cadre " indigène " qui limitait son avancement. L'armée d'Afrique n'admettait pas qu'on ouvrît la porte aux aventuriers.
               Berthezène écrit un jour au Ministre de la Guerre que le joseph en question :
               - n'a jamais servi et
               - ne connaît rien au service,
               - que sa réputation est mauvaise,
               - qu'il passe pour avoir été le giton (jeune homme entretenu par un amant) du gendre du Bey de Tunis et pour lui avoir volé ses diamants, enfin
               - que sa conduite à Alger n'a été moins rien qu'honorable et
               - qu'il est généralement méprisé.


               Plus tard quand Clauzel proposera de le nommer lieutenant-colonel il faudra faire une enquête pour établis sa qualité d'Européen, le grade indigène n'allant pas au-delà du grade de commandant.
               On ne recueillera que des informations vagues : Yusuf paraît être né en Toscane ; on dit même qu'il cherche à se présenter comme étant d'origine française.
               Il fut amené encore très jeune à Tunis par un corsaire qui le vendit au Bey et il fit auprès de ce prince le métier de mameluk dans toutes ses phases.
               C'est du moins l'opinion du pays et elle est assez vraisemblable. (général note confidentielle sur Yusuf publiée par Esquer d'après une copie des Archives du gouvernement. L'original se trouve aux Archives militaires. Ministère de la Guerre à Vincennes, carton Algérie N° 51)

               L'honnête chroniqueur Pellissier de Raynaud et encore plus catégorique et ose écrire dans le courrier de Lyon : (lettre envoyée d'Alger le 28 janvier 1837 publiée dans ce journal le 9 février. Lettre du Ministre dans le dossier administratif de Yusuf). C'est un enfant perdu de Livourne, fils d'une courtisane qui fréquentait un officier de la marine tunisienne.
               Celui-ci le conduisait à Tunis à l'âge de 14 ans et là il fit pendant quelque temps un métier qui n'est avoué qu'en Orient … "
               Il offrait de fournir sur l'aventurier une documentation irréfutable. Le Ministre de la Guerre par crainte du scandale, interdit à Yusuf de traduire le capitaine Pellissier devant les tribunaux et de demander une réparation par les armes.

               Le premier patron du jeune homme à Alger, le lieutenant général de police d'Aubignasc, nous confie aussi que c'était un enfant de la Toscane enlevé en bas âge peut-être de l'aveu de ses parents …
               Quant à nous c'est en vain que nous cherchons dans nos archives l'indice de la présence d'un corsaire tunisien dans les eaux toscanes en 1815.

               Les Livournais étaient nombreux à Tunis au moment de l'expédition d'Alger. C'étaient presque tous des commerçants juifs. Sur ce point nous avons un autre témoignage troublant, celui d'Ahmed, Bey de Constantine. " … Yusuf n'était qu'un Juif renégat d'Italie. Je connus ces détails par un ancien camarade, le nommé Sélim qui avait passé de longues années avec lui chez Soliman-el-Kaïa de Tunis où ils étaient tous deux mameluks (Sélim el-Kaïa d'origine Georgienne, était premier Ministre et beau-frère du Bey mais en réalité se tenait éloigné des affaires.)
               Il n'est pas vrai qu'il ait été jamais mameluk du Bey. Il n'a jamais servi que le Bach-mameluk du Bey (Sidi Hussein Khodja, renégat sicilien, ancien second vizir. Il avait épousé une fille du Bey.)

               Un jour Yusuf et Sélim s'enfuirent après commis une action coupable envers leur maître. Yusuf alla chez les Français.
               Quant à Sélim il vint me trouver. Je le reçus très bien et lui donnai même, pour le faire vivre, la place de Kaid et Cheirr. Il m'a souvent raconté les particularités qui précèdent et je suis d'autant plus autorisé à le croire que cet homme m'est resté fidèle dans les malheurs qui m'ont accablé …
               Il a toujours aujourd'hui un rang distingué dans l'armée du Bey de Tunis, Ahmed et tous peuvent l'interroger … "
               " l'action coupable " pourrait bien expliquer l'existence des belles armes, enrichies de pierreries que Yusuf emporta, ainsi que la fameuse cassette dont il regretta fort d'avoir été obligé d'abandonner une partie du contenu sur le sable de la plage de Carthage quand il se débattait contre les gardes qui voulaient s'opposer à son embarquement. Clauzel l'a su.

               Il écrivait le 30 octobre au commissaire de police d'Alger : " Je vous envoie un More qui peut indiquer le bâtiment sur lequel le nommé Youssouf a mis une cassette de diamants …. Le même More indiquera une femme qui a chez elle l'argent appartenant au nommé Yousouf et qu'il s'est approprié ".
               Nos héros ont avoué avoir vendu pour 30.000 francs de diamants. Voilà de bien belles économies pour un jeune soldat de la garde.
               Mais sur ces obscurs débats, ne vaut-il pas mieux recourir au témoignage involontaire du jeune Joseph lui-même ?
               Dans une lettre qu'il a écrite au Bey de Tunis, et dont je reparlerai plus loin, Yousouf s'excuse d'avoir fui la cour où il a vécu heureux et honoré.
               Que son bienfaiteur lui pardonne !

               " Lorsque nous avons appris que notre père et nos frères se trouvaient ici, un désir extrême de les voir s'est emparé de nous. Dieu a recommandé aux enfants les égards envers leurs parents quand bien même ces derniers seraient infidèles … " (Dossier administratif cité, Yusuf disait à Darrécagais (p 18) que pendant son séjour à Tunis et ses débuts dans l'armée, aucun membre de sa famille ne s'était jamais inquiété de son sort, ce qui eût été pourtant facile ".)

               Voilà qui est clair. Yusuf a une famille qui a habité Tunis et que le Bey connaît. Quelle singulière victime des pirates barbaresques ! Le jeune homme s'adresse à peu près dans les mêmes termes au bach-mameluk Hussein Khodja, ancien ministre qui lui a servi de père.
               Si ce personnage avait vraiment eu des infortunes conjugales et en avait été fâché au point de vouloir faire périr son ingrat protégé.
               Il est peu croyable que celui-ci lui aurait écrit, trois mois après, une lettre comme celle-ci, où il offre de lui rendre d'éclatants services.

               Puisque sa famille est venue à Alger :
               - pourquoi Yusuf ne s'empressa-t-il pas de faire reconnaître sa nationalité française s'il est bien vrai qu'il est né à, l'île d'Elbe ?
               - Pourquoi affirmera-t-il plus tard que ses parents sont morts depuis longtemps ?
               - A vrai dire, ils ne sont restés que quelques semaines à Alger.

               C'est ce que nous apprend la fin de la lettre au Bey : ils sont partis en même temps que le maréchal de Bourmont.

               Je propose une explication simple. Deux agents du Ministère des Affaires Étrangères MM. D'Aubignosc et Gérardin, ont été envoyés à Tunis quelques mois avant l'expédition pour recruter des interprètes dont le corps expéditionnaire va avoir grand besoin.
               Ils ont embauché quelques juifs livournais qui savent bien l'arabe parlé et un peu le français. Le père et les frères de Yusuf étaient peut-être du nombre.
               (Les interprètes furent répartis en quatre classes. La dernière composée d'illettrés, ne conférait que le titre de guide.
               Ni Féraud, ni Trumelet (le corps des interprètes militaires ….Valence 1881) ne donnent la liste complète des interprètes.
               Nous avons trouvé quelques noms aux Archives Guerre, Algérie N°3 et à la Bibliothèque Nationale aucun Yusuf, Ventini ou Signorini.
               D'après d'Aubignosc sur l'aviso qui transporta Yusuf se trouvaient quelques interprètes déjà enrôlés) à moins qu'ils n'aient été agents de la compagnie Seillière (chargé des fournitures de l'armée) qui acheta des bœufs pour l'armée. Comme nous ignorons leur nom, la vérification est impossible.

               Notre héros appartient à la maison de Hussein Khodja, ministre révoqué à cause des prodigalités qui l'ont ruiné, mais reste chef des mameluks parce qu'il est gendre du Bey.
               Aucune possibilité de faire une brillante carrière dans de pareilles conditions. Joseph estime préférable de tenter sa chance aux côtés des Français.
               C'est d'ailleurs ce que nous lisons dans la note confidentielle de 1836 citée plus haut : Comme il appartenait à la garde du Bey il ne put accomplir son projet publiquement.

               Il s'échappa de nuit et alla se cacher dans la maison de campagne du consul, auquel il se présenta comme un renégat qui voulait retourner à la religion chrétienne et se réhabiliter aux yeux des siens en servant comme interprète dans l'armée française. Le consul se décida à l'accueillir et l'envoya de nuit à bord du brick où étaient déjà les autres interprètes qu'il avait enrôlés et qui mit à la voile le lendemain.
               Il trouva Alger au pouvoir des Français. Les papiers de l'Adonis nous apprennent en effet que ce bateau arriva à Alger deux jours après la capitulation.
               (D'après une dépêche du consul de France à Tunis 5 juillet : M. Raimbert s'est embarqué à Tabarque, sur le brick du Roi, l'Adonis pour se rendre auprès de S.E. le comte de Bourmont. Archives de la Résidence Générale de Tunis, Direction politique N° 15. Le consul n'a pas rendu compte de l'évasion de Yusuf. Aucun rapport à ce sujet aux Archives du Ministère des Affaires Etrangères. Yusuf a bien camouflé sa famille.
               Darrécagais nous dit (page 39) qu'il apporta un jour au général une lettre dans laquelle on l'appelait " mon cher frère ". Yusuf prétendit que c'était le général d'Armandy qui l'appelait ainsi depuis la prise de Bône.
               C'est peu croyable.

               Quand Yusuf tenait la citadelle de Bône, avec quelques Turcs, l'un de ceux-ci entra en relation avec les Arabes.
               Il leur dit que des Juifs avaient livré la Casbah aux infidèles mais que les bons musulmans étaient encore assez nombreux pour les jeter par-dessus les murs. Yusuf fit comparaître l'homme devant ses camarades et lui trancha la tête d'un coup de sabre en lui criant : Voilà ce que le Juif t'envoie (Darrécagais p 46).
               Souvent par la suite les Arabes l'invectivaient en le traitant de Juif et certains officiers français admettaient cette origine (comte d'Hérisson : la chasse à l'homme p 99 ; Grandchamp et Bechir Mokadem : une mission tunisienne à Paris, revue africaine 1946 p 85). Il avait sans doute conservé des relations avec les Livournais.
               C'est un Bacri qui vendit ses diamants à Alger. C'est Lasri qui écoula le fruit de ses pillages à Tlemcen.)

               Le récit des faits d'armes de Yusuf pendant le débarquement qui couvre plusieurs pages du livret de Trumelet est donc de pure imagination.
               Les Juifs embauchés à Tunis étaient trop ignorants pour rendre les services qu'on attendait d'eux. Féraud nous apprend qu'ils quittèrent l'armée aussitôt le départ de Bourmont.
               Le bon musulman Yusuf (qui deviendra un bon chrétien, mais seulement en 1845 pour pouvoir faire un beau mariage) s'est bien gardé depuis cette époque de parer de ses parents " mécréants " car il rêvait de devenir l'organisateur d'une gendarmerie arabe.
               Pour l'instant il faut se contenter d'une modeste place d'interprète de la police que lui donne M. d'Aubignosc, sur la recommandation du consul de Lesseps. Il n'y reste que quelques semaines.
               M. d'Aubignosc ayant dû quitter ses fonctions de lieutenant-général de police, Yusuf est obligé de se mettre comme mameluk, au service du valet de chambre du général Clauzel, le nouveau commandant en chef.
               Malgré ses déceptions, son imagination est toujours en effervescence.
               Un jour, apprenant que Ferdinand de Lesseps, de passage à Alger, va regagner Tunis, il lui confie les deux lettres dont je viens de parler.
               Le consul Mathieu de Lesseps n'hésite pas :
               - à les ouvrir,
               - à les faire traduire et
               - à les communiquer au général Clauzel qui en est éberlué.


               Car Yusuf a écrit au Bey pour lui offrir ses services. Il prétend :
               - qu'il occupe à Alger un poste des plus éminents,
               - qu'il jouit de grands honneurs et
               - de la considération générale ….

               " je me rendrai près de vous par un bateau à vapeur d'ici une quinzaine de jours. Je me disposais à me rendre auprès de vous comme ambassadeur avant l'arrivée du nouveau maréchal.
               J'étais chargé de beaucoup d'affaires avantageuses pour vous … Lorsque le nouveau maréchal est arrivé, il a suspendu mon voyage et il nous a dit qu'il nous enverrait auprès de vous dans les quinze jours avec les présents qu'il voulait que je vous expédie par un navire que j'ai nolisé.

               Un petit bâtiment n'aurait pas pu les contenir car il y a trente caisses de une belle monture :
               - savoir des chevaux des écuries du pacha tels qu'il n'y en a pas à Alger,
               - douze juments du pays de Fez, toutes magnifiques,
               - quatre juments françaises et
               - une mule appartenant au pacha.

               Je vous jure que personne ici n'en possède une pareille.
               J'irai, s'il plaît à Dieu, auprès de vous en personne. Nous vous enverrons les chevaux par le grand bâtiment que j'ai nolisé à cet effet, et, moi " Est-ce un fou ?

               Clauzel s'empresse de faire arrêter le jeune homme. On le trouve chez sa maîtresse et (sans doute parce qu'on n'a pas confiance en la police, à laquelle Yusuf appartient encore) on juge utile de le mettre au cachot sur le brick le Marsouin.
               On l'interroge. Il avoue sans difficulté avoir écrit les deux lettres.
               Maintenant c'est plutôt Clauzel qui est embarrassé.
               Le général a conçu l'idée de faire gouverner l'Algérie par des princes tunisiens.
               Ce n'est pas le moment de se brouiller avec le Bey en avouant avoir intercepté une lettre privée à son adresse. Ce Yusuf a peut-être conservé de bons amis à Tunis.
               (ce n'était pas une crainte vaine. En 1837 se trouvant à Paris en disgrâce, Yusuf se fait recommander au préfet de la Côte d'Or par un aga tunisien. La lettre mérite d'être citée :
               " Tunis le 20 août 1837, Monsieur le préfet, le Bey in partibus de Constantine Youssouf, ancien esclave à la cour de Tunis, devenu le camarade du duc d'Orléans, prince français, honorera de sa présence la ville de Dijon dans la première quinzaine du mois de septembre.
               Vous voudrez bien le traiter selon son rang et ses titres et qualités. Ce que faisant vous aurez droit à ma bienveillance. L'aga du Bey de Tunis : Ali Mustapha ben Kerin. La lettre était partie de Bône.
               Quelque temps après Une enquête sur sa provenance ne donna aucun résultat) et s'il n'est coupable, somme toute, que d'avoir laissé libre cours à son imagination orientale.

               Clauzel préfère réserver au Ministre de la Guerre le soin de régler le compte de l'intrigant mameluk. Il donne l'ordre de l'expédier à Paris.
               Quelque temps après on constate un fait bien étrange. Il y a bien un Yusuf à Paris qui passe son temps au café de la Rotonde, mais c'est un faux Yusuf. Le vrai est à Alger, en prison.
               Comment percer ce mystère ?
               Une lettre postérieure de Clauzel nous donne une petite lueur.
               Le général a appris, quelques jours après l'arrestation, que le jeune homme est en réalité l'agent d'un employé supérieur dans l'armée.
               Sans nul doute " cet employé supérieur " dont on ne donne pas le nom est M. d'Aubignosc, Clauzel lui a enlevé ses fonctions de lieutenant général de police à Alger. Plus tard d'Aubignosc se démasquera en publiant un violent pamphlet contre Clauzel.)

               En 1834, il le soupçonne de fournir des arguments à ses adversaires et se rappelant vaguement de l'affaire Yussuf, il chercher à y trouver des munitions pour contre-attaquer son adversaire en cas de polémique.
               - Mais pourquoi à Paris ce faux Youssouf ?
               - Est-ce un frère de l'interprète ?
               - Est-ce un individu destiné par le service de renseignement à éviter de " brûler " le vrai, devenu agent double ?

               Le secret a été bien gardé.
               A Alger Yusuf est mis en observation. On constate qu'il est doué d'une remarquable intelligence.

               Quand il est question de former un corps de cavalerie indigène, l'autorité militaire estimant qu'il doit avoir quelques compétences en la matière, le consulte.
               Il suggère des idées intéressantes. Il montre de la sagacité et de l'ardeur.
               Cinq semaines après son arrestation, on le sort de son cachot et on le charge d'organiser un corps de mameluks.
               Il en aura le commandement avec le grade de capitaine.
               Est-il content ? Non. Le grade n'est pas à la hauteur de ses mérites. Il rêve d'obtenir la place d'Aga des Arabes ou celle de Bey du Titteri.
               Lorsque ces fonctions seront données à des indigènes, des bruits étranges circuleront, qui auront pour résultat de discréditer et de paralyser les hommes auxquels le général aura conféré ces dignités.
               Yusuf sera fortement soupçonné d'en être l'auteur et d'entretenir une correspondance secrète génératrice de désordre.

               En attendant, il profitait de son grade provisoire le plus agréablement possible. Jusqu'à l'exploit bien connu de la Casbah de Bône, Yusuf ne s'est illustré que par la randonnée qu'il effectua en Mitidja avec de jeunes gens de son âge.
               Il y fit une telle fête et eut un tel succès auprès des femmes de Blida que la population le chassa à coups de fusil.
               Clauzel tenait beaucoup à ses idées. Tant qu'il fut commandant en chef, son jeune protégé ne risquait rien.
               Le général Berthezène était au contraire très attaché aux traditions de l'armée. Quand l'escadron de Yusuf fut fondu dans les chasseurs d'Afrique, le grade de son commandement ayant été confirmé par une ordonnance royale du 25 mai 1931, Berthezène s'en plaignit vivement au Ministre de la Guerre : " L'armée est indignée parce qu'elle connaît la conduite indigne de cet aventurier. "
               Le ministre avait sans doute été conseillé par Clauzel et ne pouvait revenir sur sa décision. Le mameluk avait commencé son cursus honorum (suite des honneurs)

               Pour les principaux épisodes de la vie de Yusuf depuis sa nomination au grade de capitaine jusqu'en 1837, on peut se fier provisoirement à l'étude de M Esquer mais une enquête plus étendue s'impose.
               Souhaitons que d'autres chercheurs s'attachent à une tâche qui ne peut être celle d'un seul homme.
Marcel Emerit Historien. Revue africaine N° 61


La prise de la smala. 
Envoi de M. Christian Graille

                Mai 1843, le Duc d'Aumale, à la tête d'une colonne de fantassins et de spahis, se présente devant la smala d'Abd-El-Kader, installé sur le site de Taguin.
                Il raconte :
                " C'est entre dix et onze heures du matin, lorsque j'avais perdu l'espoir de rencontrer l'ennemi, lorsque j'étais uniquement préoccupé d'arriver à cette source de Taguin qui semblait fuir devant nous, c'est alors que l'agha des Ouled- aiad vint m'informer de la présence inattendue de la smala sur cette eau même dont la possession ne devait pas être le moindre prix de la victoire….

                De l'audace.
                Les spahis, déployés devaient frapper le premier coup ; en deuxième ligne les chasseurs devaient servir de réserve et décider l'affaire.
                Mais lorsque nous descendîmes au grand trot le rideau qui, jusqu'alors, nous avait caché l'ennemi, lorsque nous vîmes cette ville de tentes et cette fourmilière d'hommes qui couraient aux armes, alors je compris qu'il fallait engager tout le monde et que l'audace seulement pouvait décider du succès.
                Je fis obliquer les chasseurs à droite ; ils dépassent les spahis et traversent les tentes sous une vive fusillade.
                L'ennemi est dispersé ; en vain de braves cavaliers cherchent à se rallier et à défendre les populations en fuite : une charge brillante conduite par le lieutenant-colonel Morris la met en pleine déroute.
                Les spahis n'avaient pas pu pousser aussi loin : l'infanterie régulière groupée autour de la famille d'Abd-El-Kader les avait arrêtés quelque temps ; mais l'exemple du colonel Yusuf et de ses officiers leur communique un élan irrésistible et l'ennemi est encore culbuté sur le point.

                La panique du goum.
                Les escadrons indigènes d'Alger ont acquis dans cette journée une belle réputation : la panique du goum aurait gagné une troupe moins solide, ils ont montré une valeur remarquable.
                Cependant je dois vous dire que si j'avais connu la disposition du camp, j'aurais dirigé la troupe française sur le douar d'Abd-El-Kader ; je crois aussi que son trésor aurait été réservé pour l'État ; mais lorsque l'action cessa, tous les Arabes (car le goum reparut une fois l'affaire décidée) étaient disséminées dans les tentes et se livraient au pillage.
                Je dus rallier les chasseurs et les garder pour repousser, au besoin, un retour de l'ennemi. Ce qui est positif, c'est que la mère et la femme d'Abd-el-Kader étaient sous leur tente lorsque la charge a commencé et qu'on n'a pu les y retrouver au retour ; c'est que jamais on n'a pris un butin pareil. Bien des gens sont sortis pauvres de leurs tentes, me disait l'Agha qui compteront désormais parmi les gens les plus riches. "

                Tous les burnous rouges.
                Outre des sommes considérables d'argent, on prit encore :
                - tous les burnous rouges qui devaient investir des aghas ou des kaïds,
                - des gandouras destinées à des gens de loi,
                - des armes de prix,
                - un grand nombre de riches vêtements,
                - des manuscrits précieux,
                - des bijoux etc.


                Nos Arabes enlevèrent :
                - une foule d'esclaves noirs des deux sexes,
                - plusieurs milliers d'ânes,
                - quelques centaines de chameaux,
                - des chevaux,
                - des juments etc.


                Malheureusement nous étions si peu nombreux et tous si fatigués qu'il me fut impossible d'apporter dans la répartition de ces prises tout l'ordre que j'aurais voulu y introduire. Je ne pus faire réserver pour l'État que quelques barils de foudre et des troupeaux considérables ; mais tous ces bestiaux, quoiqu'en fort bon état, étaient déjà très fatigués et la longue marche que la rareté de l'eau nous a forcé de faire en ont fait perdre une grande quantité pendant le retour… "

Le Duc d'Aumale par R. Cazelle. Editions Tallandier.


1789 ? 2021 ?
Par M. Marc Donato

          C'était à la fin de la cérémonie commémorative du 8 mai. La Marseillaise a éclaté, interprétée par les voix superbes du chœur de l'Armée. Mais alors, et pourquoi ce jour-là et pas auparavant, les paroles m'ont-elles sauté au visage ? J'en fus surpris, moi, qui ai chanté notre hymne national plus souvent qu'à mon tour, pendant les événements qui ont marqué ma jeunesse, ou encore avec mes élèves lors de cérémonies multipliées au fil de mes nombreuses années de carrière, me rappelant celles où La Marseillaise était un des chants imposés aux épreuves du Certificat d'Etudes. Probablement l'effet des récentes et violentes exactions ? Ou encore l'effet d'un long confinement ? Finalement, je me suis rendu compte qu'on chante presque inconsciemment, comme on dit " Bonjour ", le matin. Qui pense qu'on souhaite vraiment une bonne journée ? J'ai retrouvé les 7 couplets et c'est là que notre actualité m'est apparue à cha-que vers. Je n'ai retenu que ce qui y fait écho, supprimant volontairement et systématiquement tout allusion à l'action violente. Incroyable ! Je sais le sens des mots, je ne confonds pas 1789 et 2021, émigrés et immigrés … L'histoire ne se répète pas toujours à l'identique, mais quand même, il y a des mots qui ré-sonnent…. Jugez plutôt.

          Entendez-vous dans les campagnes
          Mugir ces féroces soldats ?
          Ils viennent jusque dans vos bras
          Égorger vos fils, vos compagnes.

          Que veut cette horde d'esclaves,
          De traîtres, de rois conjurés ?
          Français ! pour nous, ah ! quel outrage !

          Quoi ! des cohortes étrangères
          Feraient la loi dans nos foyers !
          Quoi ! des phalanges mercenaires
          Terrasseraient nos fiers guerriers !
          Dieu ! nos mains seraient enchaînées !
          Nos fronts sous le joug se ploieraient !
          De vils despotes deviendraient
          Les maîtres de nos destinées !

          Tous ces tigres qui, sans pitié,
          Déchirent le sein de leur mère !
          D'insolents despotes
          Et la bande des émigrés
          Faisant la guerre aux Sans-Culottes

          Leur espoir se fonde
          Sur le fanatisme irrité.

          Incroyable, non ? Comme aurait dit M. Cyclopède. Certes, Claude Joseph, né Rouget, plus connu sous son nom de Rouget de Lisle, ne pensait pas à nous et Philippe Frédéric, le baron de Dietrich, le premier à interpréter lui-même ce chant en public dans son salon, probablement pas plus.
          Le problème, c'est que les " féroces soldats " peuvent à leur tour interpréter les paroles de notre Marseillaise (et notamment celles que j'ai occultées) pour leur compte ! N'oublions pas son premier titre : Chant de guerre pour l'armée du Rhin.
Marc Donato - 11 mai 2021


" Le père Bugeaud ".
A la conquête de l'Algérie.
Envoi de M. Christian Graille

             Au lendemain de la prise d'Alger, la France se limite à une occupation restreinte du pays :
             - Oran, Mostaganem, Bougie, Bône.

             Très vite l'Émir Abd-El-Kader se révèle le plus farouche adversaire des Français. Malgré le traité de Tafna, signé le 30 mai 1837, avec le général Bugeaud, les combats ne cessent pas.
             La chute de Constantine, assiégée par les hommes de Valée et Lamoricière, marque le début de l'invasion générale du pays.
             C'était à la fin de l'année 1837 et la France comptait sur ses héros.
             Le général Valée, nommé après la prise de Constantine maréchal et gouverneur de l'Algérie, bornait son ambition à conserver, à améliorer plutôt qu'à conquérir.
             - L'établissement de postes,
             - la construction des routes,
             - de fortins,
             - une progression lente, à pas comptés, jamais provocante, suffisaient à remplir son activité, et pendant près de deux ans, de 1838 à l'automne 1839, l'Algérie connut une paix relative. Mais cette paix était-elle désirable ?


             Les soldats devenus terrassiers et vivant dans les régions marécageuses, insalubres, prenaient le chemin de l'hôpital, les petites garnisons éparses s'étiolaient dans l'isolement ou périssaient d'ennui ; et de Paris, Bugeaud vitupérait la politique de Valée. " On vivote en Afrique disait-il sans rien créer pour l'avenir.
             C'est une maladie chronique attachée au pays. Il faudrait la rendre héroïque pour la faire disparaître, mais on ne saura pas prendre un parti et on vivra avec elle jusqu'à ce que de grands évènements nous forcent à l'évacuation. "
Les portes de fer.

             Rendre la maladie héroïque, l'Émir Abd-El-Kader s'y employait.
             En septembre 1839, le Duc d'Orléans voulut démontrer que les communications entre Constantine et Alger étaient possibles en traversant les portes de fer, une gorge étroite surmontée de murailles à pic, lieu d'élection pour une embuscade.
             L'expédition réussit et comme l'héritier du trône l'avait dirigée, les louanges débordèrent, la presse entonna le chant du triomphe.
             C'était peut-être excessif, en tout cas maladroit, car l'émir saisissant l'occasion, proclama aussitôt que le traité de la Tafna était manifestement violé, que la perfidie des Français lui rendait sa liberté d'action.
             Depuis deux ans il accumulait du matériel de guerre, équipait, instruisait des troupes régulières à l'abri de ce même traité.
             La Mitidja envahie, Blida, Alger menacées, les jours les plus sombres de la conquête semblent revenus et Valée réclame des renforts.
             Heureusement Changarnier et ses pareils, Lamoricière, Cavaignac…. résistent au choc et l'on voit apparaître dans les bulletins des noms dont les Africains ont l'accoutumance, noms de villes ou de points stratégiques :
             - occupés,
             - évacués,
             - repris,
             - perdus,
             - conquis de nouveau.
             - Médéah,
             - Milianah,
             - col de Mouzaïa…

             Pendant que les soldats se battent, les parlementaires discutent et dans un discours du 15 février 1840 à la Chambre Bugeaud résume la situation de la façon la plus nette.
La force de l'Émir.

             " L'abandon, la France officielle n'en veut pas ; les écrivains, c'est-à-dire l'aristocratie de l'écritoire, n'en veulent pas. Les pères de famille qui voient leurs enfants périr en Afrique, pourraient penser autrement ; mais ils ne parlent pas, ils n'écrivent pas, ils travaillent et ne sont pas consultés…
             Il ne reste donc, selon moi, que la domination, la soumission du pays. "
             Et reprenant la vieille thèse qu'il affectionne :
             " La possession d'Alger est une faute ; mais puisque vous voulez la faire, puisqu'il est impossible que vous ne la fassiez pas, il faut que vous la fassiez grandement car c'est le seul moyen d'en obtenir quelque fruit. Il faut que le pays soit conquis et la puissance d'Abd-El-Kader détruite. " Mais comment y parvenir ?

             La force de l'Émir est dans son insaisissabilité. " Elle est :
             - dans l'espace,
             - dans la chaleur du soleil d'Afrique,
             - elle est dans l'absence des eaux,
             - elle est dans la nomadité si je puis m'exprimer ainsi des Arabes …

                Il n'y a à saisir en Afrique qu'un intérêt, l'intérêt agricole. "

             Bugeaud en vient ainsi au système qui lui est cher : une grande invasion derrière laquelle s'établiront des colons militaires ; et comme la Chambre murmure, il riposte aussitôt en demandant au gouvernement s'il a un programme à opposer au sien :
             " La colonisation est nulle. Vous n'avez que quelques jardins autour d'Alger, voilà ce qu'il faut apprendre à la France ! "
             Rhétorique à part, ce discours est une franche déclaration de candidature ; mais Thiers, bien que favorable, hésite à s'aliéner la gauche qui exècre Bugeaud et temporise en donnant de bonnes paroles à son protégé.
             Guizot, homme des conservateurs, prend le pouvoir, et du coup la voie est plus libre ; très à l'aise, le candidat répète à tout venant qu'il ne se soucie pas de retourner en Afrique " un grenier à coups de poing ", mais, quand il est appelé au Conseil des ministres, que Louis-Philippe lui pose carrément la question :
             " Si je vous chargeais de cette entreprise, accepteriez-vous et à quelles conditions ? ", il répond : " J'accepterais mais je demanderais au Roi, cent mille hommes de son armée et cent millions de son budget pendant sept ans. "
Nommé Gouverneur.

             Le Roi, fort pacifique en Europe, ne l'était pas en Afrique car les coups de feu tirés là-bas ne s'entendaient point ; cependant il jugea les chiffres un peu forts, un peu ronds ; et puis il craignait que Bugeaud, dont il voulait réserver le dévouement pour de mauvais jours ne se perdit dans cette difficile mission.
             Mais le Duc d'Orléans, qui pourtant ne désirait pas la nomination du candidat de Guizot, afin fini par adopter sincèrement son point de vue.
             D'accord avec Soult, devenu ministre de la guerre, le Roi nomma Bugeaud gouverneur le 29 décembre 1840.
Savoir-vivre !

             Impopulaire Bugeaud l'est en France et en Algérie comme député et soldat ; mais il fait fi de tout cela, en apparence du moins, et dès son arrivée à Alger, on a l'impression qu'une nouvelle ère commence :
             - il encourage les colons (il y en a 30.000 environ à cette époque),
             - bouscule la paperasserie ,
             - établit les bureaux arabes supprimés en 1834,
             - dresse l'armée pour une guerre de mouvement,
             - abandonne presque totalement le canon,
             - remplace la voiture par le mulet ou le chameau,
             - allège l'équipement du soldat et surtout
             - veille à sa préparation morale,
             - lui enseigne " le spiritualisme de la guerre ".


             Ce rural prédicant à une doctrine, non de " cabinet " mais expérimentale dont il a usé depuis 1808 en Espagne et dont il a pu mesurer l'efficacité : ici, dit-il, point de grande guerre à l'européenne :
             - des offensives foudroyantes à l'aide de petites colonnes très mobiles,
             - poursuite incessante de l'émir,
             - razzias des tribus qui lui demeurent fidèles,
             - occupation de postes peu nombreux mais choisis, non pour servir de barrière à l'ennemi,
             - mais pour rapprocher de lui la base des opérations.


             Une excellente école où chacun, de l'officier au soldat, s'aguerrit par des combats continuels, où on s'accoutume :
             - à la faim,
             - à la soif,
             - à la marche par toutes les températures,
             - aux privations de toute sorte sans se laisser démoraliser.


             " Le difficile dans la guerre, prononce Bugeaud n'est pas tant de savoir mourir que de savoir vivre. "
             Savoir vivre en effet c'est le problème.
             Mais le général Lamoricière, bien avant son chef, l'a résolu ; et le maître sans avouer qu'il n'est qu'un disciple, adopte la méthode : " La guerre que nous allons faire dit-il à ses hommes n'est pas une guerre à coups de fusil.
             C'est en enlevant aux Arabes les ressources que le sol leur procure que nous pourrons en finir avec eux. Ainsi, partez donc, allez couper du blé et de l'orge. "
             C'est par ce thème que se déroule la première campagne de 1841 durant laquelle il refoule Abd-el-Kader avec un succès que reconnaissent même ceux qui s'étaient montrés sévères à son égard.
Un verre d'eau tiré de la mer.

             En septembre, Bugeaud repart vers l'Ouest à la poursuite de l'émir pendant que Lamoricière ravitaille Mascara qui désormais restera en notre possession.
             - Activité dévorante,
             - coup d'œil,
             - audace,
             - habileté incroyable,
             - endurance magnifique chez cet homme presque sexagénaire !
L'armée sent qu'elle a un chef.

             Mais le gouverneur ne juge pas la partie gagnée. Il a reçu ce message d'Abd-el-Kader : " Le mal que tu crois nous faire n'est qu'un verre d'eau tiré de la mer (…) Vois-tu la vague se soulever quand l'oiseau l'effleure de son aile ?
             C'est l'image de ton passage en Afrique. "
Deux armées se joignent sur le Chélif.

             Bugeaud sait bien qu'il n'y a pas là poésie, ironie pures ; il a beau :
             - prolonger ses expéditions,
             - doubler la force de ses convois,
             - harceler l'ennemi,
             - détruire ses forts,
             - couper ou brûler ses moissons,

             - l'émir fortement ébranlé, n'est pas détruit. Il règne encore, reparaît soudain à la tête de cinq ou six mille hommes : un guerrier Protée (personne qui change facilement d'aspect, d'humeur, d'opinion).

             Non la conquête ne se fera pas en une campagne, et c'est ce que le gouverneur s'efforce de faire comprendre :
             - aux impatients,
             - aux bureaucrates du ministère,
             - aux députés.

             Le père Bugeaud, l'aventureux père Bugeaud a su braver la tempête , et, au moment où l'on y pensait le moins, il est arrivé à Mostaganem avec quelques bataillons qu'il amenait d'Alger.

             L'infatigable père Bugeaud, l'intrépide père Bugeaud vient de partir pour Tlemcen, et je ne doute pas qu'il n'achève, par un coup de maître, ce qui est en voie d'exécution. "
             Telle est, vue par un soldat, l'image du gouverneur sillonnant l'Algérie durant l'hiver de 1842 ; mais la campagne d'hiver ne fait que préparer celle du printemps, et Bugeaud ne le cache pas aux troupes qui acceptent sans murmurer.
             Au mois de mai 1842, deux armées, l'une venant d'Alger, l'autre d'Oran opèrent leur jonction sur le Chélif ; mais Bugeaud, non content de ce succès, songe à pénétrer dans l'Ouarsenis, le centre de la puissance de l'émir, pour " houspiller ces coquins de montagnes. "
La confiance règne.

             Ce n'est plus le temps du maréchal Valée où les troupes périssaient dans l'inaction.
             Le gouverneur remue son monde, l'incite à de magnifique efforts ; mais à Paris, aux Tuileries même, on lui en sait peu de gré. On l'accuse :
             - de perdre des hommes,
             - de dépenser de l'argent,
             - de chercher la guerre pour la guerre, et aussi
             - d'exprimer trop ouvertement son impatience d'obtenir le bâton de maréchal.

             " Le général Bugeaud, écrit le duc d'Aumale n'est pas parfait ; il est plus contrarié par le désir ardent d'une haute dignité.
Une colossale fourmilière.

             Mais la France demandait plus et Bugeaud comprit que, pour satisfaire l'opinion, un coup d'éclat était nécessaire. Il ordonna partout l'offensive en vue de prendre l'émir.
             Un matin de mai 1843, le duc d'Aumale, parti de Boghar à la tête d'une colonne composée de :
             - 1.300 fantassins,
             - 560 spahis et
             - 2 à 300 auxiliaires indigènes,
             - se trouva soudain face à la smala d'Abd-el-Kader : une colossale fourmilière, une cité en marche et temporairement au repos d'où s'élevait une assourdissante rumeur.


             Les éclaireurs effrayés conseillèrent au prince de battre en retraite mais il répondit ces mots tout faits pour le Moniteur : " On ne recule pas dans ma race ! "
             Et dans un élan de jeunesse, paladins parmi d'autres paladins, il traversa la smala d'outre en outre, au triple galop précédé ou suivi de ces incomparables cavaliers de la conquête : Yusuf, le mystérieux Yusuf et Moris le fameux chasseur.
             Une heure après malgré la résistance des réguliers de l'émir, la victoire était complète, les vainqueurs gênés seulement par l'immensité du butin et le nombre des prisonniers, hommes, femmes, enfants…
             Mais ce " coup de vaillance et de fortune " n'avait point emporté la décision" :
             Abd-el-Kader manquait au tableau. Il était à des lieues de là, du côté de Tagdempt, son arsenal.
La smala ?

             Quand Louis Philippe apprit la nouvelle, il demanda bonnement : " Qu'est-ce que la smala ? "
             L'Algérie et ses mœurs le préoccupaient beaucoup moins que les commentaires de la presse anglaise sur sa politique ; mais lorsqu'il fut informé, il se réjouit en père et en souverain.
             Aumale vraiment débutait dans les armes de façon royale et l'on pouvait songer sans témérité à faire de lui un gouverneur.
             En effet pour oser tenter un coup pareil,, il fallait, au dire des connaisseurs " avoir vingt ans, le mépris du danger et le diable dans le ventre. "
             C'était bien l'avis de Bugeaud qui, en écoutant le rapport sur la prise de la Smala s'écriait les larmes aux yeux : " Ah ! Le brave soldat ! "
             Il s'attendrissait sur cette courageuse jeunesse et aussi sur lui-même ; cette victoire n'était-elle pas un peu son ouvrage ?
Il reçoit le bâton.

             L'attendrissement passé, il attend qu'on récompense ses services, et comme Soult, qui ne l'aime guère, lui marchande son bâton de maréchal, il déclare tout net qu'il demandera son rappel si dans un mois il n'obtient pas cet honneur, bien tardif à son gré.
             - On le flatte,
             - on l'apaise,
             - il reçoit le bâton
             - et Louis Philippe conclut : " L'Algérie est un lourd fardeau sans doute, un fardeau embarrassant. Le bon maréchal voudrait le déposer entre les bras d'un autre et le confier à Aumale. Mais c'est trop tôt… Notre enfant, l'Algérie est fort bien là où il est, c'est-à-dire dans les bras du maréchal ; il faut qu'il se résigne à le garder. "
A la poursuite de l'Émir.

             Bugeaud ne demande que cela. Félicité de toutes parts, même de parlementaires qui jusque-là lui ont marqué l'hostilité la plus vive, monté sur le pavois et sentant s'élever en lui l'encens des louanges et des adulations. Il a un instant de vertige et proclame : " J'ai vaincu et soumis les Arabes. "
             Puis revenant à une plus saine appréciation de la réalité, il se remet consciencieusement à la besogne.
             La Chambre s'est décidée à lui donner des moyens proportionnés aux difficultés et de 64.000 hommes en 1840, l'armée est passée à 100.000 hommes en 1844 ; il peut enfin commencer " une chasse extraordinaire " à la poursuite de l'émir.
             Au retour d'une campagne destinée à " nettoyer la Kabylie " il apprend qu'Abd-el Kader est parvenu à intéresser le Maroc à sa cause et concentre ses troupes à Oujda.
             Sans reprendre haleine, il repart en campagne espérant en finir cette fois, détruire pour tout de bon l'armée du " Jugurtha renforcé " et en même temps celle de l'empereur du Maroc, les pousser, s'il le faut, jusqu'à Fez.
             Après quelques tentatives de conciliation pour la forme, il notifie aux Marocains qu'il marchera sur Oujda afin de châtier les tribus rebelles qui s'y sont réfugiées.
Vers le Maroc.

             Mais il compte sans la politique. L'Angleterre est intervenue en disant : " Que la France tire un seul coup de canon au Maroc et la guerre éclatera. "
             Louis Philippe et Guizot, devenus soudain timides, arrêtent Bugeaud et bien qu'ils sachent que le gouverneur de Gibraltar Robert Wilson, favorise ouvertement l'exportation des armes et des munitions de guerre vers Tétouan et d'autres villes marocaines, ils cherchent un accommodement, donnent des instructions au prince de Joinville dont l'escadre croise devant Cadix : " Tant que le pavillon de la France n'aura pas été insulté, vous ne devez pas agir. "
             Bugeaud estime cette prudence excessive, presque honteuse.

             Cependant il marque le pas. Heureusement, toute entente avec le Maroc s'avère impossible et le 6 août 1844 Joinville bombarde Tanger. " Vous avez tiré sur moi une lettre de change, lui écrit Bugeaud, avec ravissement. Soyez assuré que je ne tarderai pas à y faire honneur ; vive la France ! "
             Enfin on va marcher.
             Le 12 août l'armée campe sur les bords de l'Isly.

             Le 14 août au matin, 45° à l'ombre, les troupes se mettent en marche, traversent les gués de l'Isly au simple pas accéléré et au son des instruments.
             Sept camps marocains s'étendaient sur un espace plus grand que le périmètre de Paris (c'est un témoin oculaire et peut-être romantique qui l'assure).
             L'armée française fonce à travers les masses ennemies qui l'enveloppent complètement ; elle ressemble au dire d'un Arabe à un lion entouré de cent mille chacals ; mais le moindre soldat connaît son rôle, la place qu'il doit occuper et peu à peu la cohue marocaine fléchit.

             Un instant Yusuf et Morris, emportés par leur ardeur, sont mis en difficulté, mais la situation est tôt rétablie, l'ennemi :
             - refoulé,
             - écrasé,
             - rejeté en pleine déroute vers le chemin de Fez, où l'on ne trouve de l'eau qu'à dix lieues.
Ense et aratro.

             Le 15 août Joinville bombarde Mogador, centre commercial, financier de l'empereur du Maroc qui demande à traiter.
             Le 18 septembre 1844, Bugeaud reçoit le brevet de duc d'Isly et ses admirateurs lui offrent une épée portant gravés sur le pommeau le plan de la bataille et ses armes, sur la coquille sa devise Ense et aratro " par l'épée et par la charrue ".
             Malgré cette nouvelle bouffée de gloire, le maréchal duc ne se déclare point content. Il a trop de judiciaire pour ne pas mesurer, en dépit des grands mots qu'il se permet souvent dans les banquets, ce que sa victoire a d'insuffisant.
             Le fougueux cavalier Yusuf, lancé à la poursuite des Arabes en déroute, n'est parvenu à prendre que le " krodja " de l'émir, son secrétaire intime, et Bugeaud répète qu'il faut s'assurer de la personne d'Abd-el-Kader, obtenir du sultan son internement, sans quoi " on l'aura bientôt sur les bras ".
Le guêpier marocain.

             Mais Louis Philippe, satisfait d'avoir prouvé au Maroc qu'il est dangereux de se jouer de nous et d'avoir évité un conflit avec l'Angleterre, ne songe plus qu'à se retire du guêpier marocain et " à mettre au requiem " ce malheureux incident :
             - il négocie sans tarder,
             - se borne à demander la cessation des rassemblements hostiles aux confins de l'Algérie,
             - le châtiment des agresseurs,
             - l'expulsion de l'émir et
             - la délimitation de la frontière,
             - ce que le sultan accorde.


             Quand Bugeaud apprend qu'on vient de bâcler, le 10 septembre 1844 un traité avec le Maroc contrairement à ses conseils, il entre dans une grande colère : quoi ! Ses soldats ont vaincu pour cela : En vérité on gaspille ses victoires !
             Mais à la tribune du parlement il se fait beaucoup plus conciliant, presque optimiste. " Nous avons rejeté Abd-el-Kader à l'intérieur du Maroc….Cela ne veut pas dire qu'il ne reviendra pas ; je crois même pouvoir prédire qu'il reviendra, non dangereux mais tracassier. "
             Tracassier le mot était faible ; il fallait pourtant rassurer le pays légal.
L'homme à la chèvre.

             En avril 1845 apparut dans le Dahra, au cœur même de la Régence, un fanatique de vingt ans Bou-Maza, l'homme à la chèvre, qui prit figure de prophète et souleva les tribus.
             C'est un exemplaire rajeuni d'Abd-el-Kader et Bugeaud, voyant ses victoires inopinément compromises, adopta non seulement la manière forte, mais la manière brutale, ordonna à ses lieutenants de faire subir aux rebelles " le poids de nos armes ".
             C'est à cette occasion qu'eut lieu en juin l'effroyable tragédie des Ouled-Rhia.
             Cette tribu qui avait soutenu Bou-Maza, s'était réfugiée dans des grottes profondes du massif du Dahra, d'où jadis elle défiait les Turcs ; mais le colonel Pélissier avait reçu de Bugeaud des instructions formelles : " Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes … fumez-les à outrance comme des renards. "
             Et Pélissier obéit.

             De la grotte partaient des coups de fusils bien ajustés qui lui tuaient des hommes et comme l'ennemi ne voulait entendre aucune parole de conciliation, tirait même sur les parlementaires, il fit amener du chaume, des fascines (fagots de bois) et l'on commença à " chauffer ".
             Quand, au bout de deux jours le feu fut éteint, ceux qui pénétrèrent dans la grotte reculèrent devant un spectacle hideux, pareil à " l'enfer de Dante " :
             Plus de cinq cents cadavres :
             - d'hommes, de femmes,
             - d'enfants, debout, asphyxiés, étouffés.


             " Ce sont là monsieur le maréchal, écrivait Pélissier à Bugeaud, de ces opérations que l'on entreprend quand on y est forcé, mais que l'on prie Dieu de n'avoir jamais à recommencer. "
             En France la nouvelle fut accueillie avec indignation, et selon la coutume parlementaire, le ministre de la guerre fut interpellé.
             Dénué de caractère et sans force devant les clameurs de l'opposition, Soult lâcha bravement son subordonné, et l'armée d'Afrique s'indigna à son tour : " Réunion de canailles ! s'écrit Saint Arnaud qui s'entraîne au mépris des députés ; pas un chef en Afrique n'a mis cinq sols dans sa poche. Il y a loin de là aux millions volés du Portugal et de l'Espagne. Nous sommes plus humains qu'on ne l'était à Saragosse, à Tarragone … Sacrées canailles, sacrés lâches ! "
             Quant à Bugeaud profondément ulcéré, il écrivait à Soult : " Je regrette que vous avez cru devoir blâmer, sans correctif aucun, la conduite de M. le colonel Pélissier ; si un gouvernement pensait qu'il y avait une justice à faire, c'est sur moi qu'elle doit être faite. " Il revendiquait toute la responsabilité car il avait donné l'ordre, et à bon escient.
Le Maréchal est en congé.

             Pour conclure, il se disait abreuvé de dégoût et adressait sa démission à Guizot.
             Celui-ci, une fois de plus, constata que le maréchal duc était un agent peu commode. Et il informa Bugeaud du désir qu'avaient le roi et le gouvernement de le voir rester à son poste.
             Une lettre du ministre de la guerre, pleine de bons sentiments, acheva d'apaiser le maréchal qui se contenta de solliciter un congé.
             Le 28 septembre 1845, Lamoricière, gouverneur par intérim de l'Algérie, annonçait à Paris le désastre de Sidi-Brahim.
L'embuscade de Sidi-Brahim.

             Un des paladins de l'armée, le lieutenant-colonel de Montagnac qui commandait le poste fortifié de Demma-Ghazouat (non loin de l'actuelle ville de Nemours) s'était chargé, sans avec reçu aucun ordre à cet effet de protéger une tribu qui nous était fidèle, les Souhalia contre les attaques d'Abd-el-Kader.
             Le 21 septembre avec 350 fantassins et 60 hussards, il quitte sa garnison, atteint après deux marches de nuit le marabout de Sidi-Brahim où il laisse ses bagages, repart à la recherche de l'ennemi et soudain tombe dans une embuscade : sa troupe cernée de toutes parts est anéantie, lui-même mortellement blessé….

             Les vainqueurs dirigés par l'émir en personne assiègent alors le marabout qu'occupent 80 carabiniers ; une résistance héroïque qui dure trois jours ; aux sommations de l'émir qui pourtant leur promet la vie sauve, les assiégés répondent " vive le roi ! " et hissent le drapeau fait de loques tricolores.
             A la fin du troisième jour, une sortie par surprise réussit, les survivants vont échapper, mais, torturés par la soif, ils s'arrêtent près d'une source et, rejoints par les Kabyles, sont massacrés ou pris. Douze seulement parviennent à Djemma-Ghazouat.
Dans le mois du ramadan.

             Puis quelques jours plus tard on apprend la capitulation d'une colonne de 200 hommes partie de Tlemcen pour secourir le poste d'Aïn Témouchent.
             Les nouvelles sinistres affluent et Lamoricière peut à bon droit écrire : " Vous jugerez sans doute qu'il est indispensable que M. le maréchal Bugeaud rentre immédiatement en Algérie. Je ne dois pas vous dissimuler que la situation est fort grave. "
             Le 6 octobre ce pessimisme est confirmé par un aide de camp arrivé d'Alger :
             L'Émir a fait sa réapparition à la tête de nouvelles forces, il ranime le fanatisme des tribus et vient d'envoyer aux Musulmans d'Alger ce message : " Je serai avec vous dans le mois du ramadan. "
La révolte couve.

             Bugeaud, d'abord consterné fulmine contre l'intrusion exorbitante de l'élément civil contre le gouvernement … Puis écrit à Guizot : " Je cours à l'incendie. Si j'ai le bonheur de l'apaiser encore, je renouvellerai mes instances pour faire adopter des mesures de consolidation de l'avenir. Si je ne réussis pas, rien au monde ne pourra m'attacher plus longtemps à ce rocher de Sisyphe (fils d'Éole, fondateur mythique de Corinthe.)"
             Ce qu'il redoute :
             - c'est une nouvelle invasion de la Mitidja,
             - un soulèvement de la grande Kabylie et
             - la guerre aux portes d'Alger.


             Aussi, dès son arrivée, il arme les condamnés militaires qu'il met en réserve à Koléa, organise deux bataillons de milice à Alger même et part en hâte pour Miliana où couve la révolte avec 3.000 fantassins et 450 cavaliers.
             Pendant cinq mois d'octobre 1845 à mars 1846, le maréchal manœuvre :
             - par la pluie,
             - le vent,
             - la neige, le soleil torride.


             C'est sa plus difficile campagne et en apparence la moins glorieuse, car aucune action éclatante ne l'impose à l'opinion.
             - Il court à la poursuite de l'émir,
             - frappe dans le vide,
             - revient, repart,
             - pousse des pointes,
             - refoule l'ennemi qui disparaît ; et la chasse, la traque recommencent ailleurs.


             Vie exténuante, harassante ; seuls les " Africains ", les connaisseurs peuvent comprendre la somme :
             - de courage,
             - d'endurance,
             - d'opiniâtreté que suppose une campagne semblable.


             C'est là que Bugeaud se révèle grand, qu'il développe à plein ses qualités d'homme de guerre et de guérillero ; dans cette redoutable crise, cet homme de soixante-deux ans étonne son entourage par :
             - son calme,
             - sa sérénité,
             - sa gaieté même.

             Un jour, à Médéa, comme il se repose en jouant au Whist (jeu de cartes), il apprend que l'émir menace de nouveau la Mitidja.

             Ses aides de camp sentent " leurs langues desséchées qui s'attachent au palais et ne peuvent parler ". Bugeaud pose ses cartes : " En voilà une bonne !
             Faisons sans tarder ce que nous pourrons. " Il télégraphie à Alger de réunir :
             - les condamnés,
             - les milices,
             - les gendarmes,
             - de les placer en évidence sur les hauteurs de la Mitidja,
             - ordonne à Yusuf de se montrer avec sa cavalerie sur les points les plus en vue, - annonce qu'il partira lui-même dès l'aube puis " messieurs reprenons notre whist. " Peu après, Abd-el-Kader, surpris dans une attaque de nuit par le général Gentil, s'enfuyait vers le Sud (février 1846).


             Quand Bugeaud rentra à Alger :
             - avec une capote usée jusqu'à la corde
             - entouré d'un état-major dont les habits étaient en lambeaux,
             - marchant à la tête d'une colonne de soldats bronzés, amaigris, à figure résolue et portant fièrement leurs guenilles, l'enthousiasme fut au comble. Le vieux maréchal en jouit pleinement ; et lui qui, contrairement à ses habitudes, n'avait rédigé un seul ordre du jour pendant ces cinq mois, proclama publiquement la vaillance de ses hommes, renvoya sur eux les rayons de sa gloire : Abd-el-Kader n'était point pris, mais ils l'avaient vaincu, réduit à l'impuissance, ne lui avaient permis de s'asseoir ni de rien organiser nulle part.
L'armée est tout.

             Pendant près d'un an une paix relative régna en Algérie et Bugeaud profita de ce répit pour caresser à nouveau sa chère idée, " sa marotte " : la colonisation par l'armée.
             A son sens, l'armée est tout en Afrique : elle seule a détruit, elle seule peut édifier ; " Elle n'est pas moins nécessaire pour utiliser la conquête que pour la conserver ; elle est et sera longtemps le seul agent sérieux des grands travaux qui doivent ouvrir à la France les voies commerciales de l'Algérie. "
L'unanimité moins une voix.

             Mais d'autres projets s'opposaient au sien, surtout celui de Lamoricière qui préconisait la colonisation :
             - individuelle,
             - subventionnée,
             - protégée,
             - les concessions accordées à de riches capitalistes.

             Et Lamoricière n'était point un adversaire méprisable, car, élu député en octobre 1846, lié avec les opposants de la gauche, il gagnait à sa cause la plupart des économistes et naturellement des gens d'affaires.
             Guizot avait pris l'engagement formel de demander aux Chambres une allocation pour faire une expérience de colonisation militaire avec 1.000 colons ; le crédit prévu était de 2 millions pour 1847 et 1 million pour 1848.
             Or la question semblait ajournée et quand le projet du gouvernement fut enfin déposé, à l'unanimité moins une voix, la proposition fut repoussée.
Les cornes du taureau du village d'Azrou.

             C'était l'échec définitif et Bugeaud le ressentit vivement ; mais il ne voulut point s'en aller à la manière d'un bureaucrate remercié, après une dernière dépêche et une dernière signature.
             Il lui fallait une sortie guerrière, digne de lui.
             Et au mois de mai 1847, il décida d'entreprendre en Grande Kabylie une campagne qu'il jugeait nécessaire à l'achèvement de son œuvre, au maintien de sa puissance morale.
             Ce fut une courte expédition, marquée surtout par l'assaut du village d'Azrou que défendaient deux tours crénelées nommées " les cornes du taureau ".

             Bugeaud tout en guerroyant :
             - usait d'une mansuétude extrême,
             - rendaient les prisonniers et
             - ne châtiait même pas les déserteurs français trouvés dans leurs rangs ;
             - il nommait des chefs en grande cérémonie,
             - leur remettait des burnous d'honneur.

             C'était pour ainsi dire sa campagne de retraite.
Au bruit des canons, des tambours et des musiques.

             Après le succès apparent qu'il avait obtenu contre les Kabyles, Bugeaud considéra sa tâche comme terminée : il quitterait l'Algérie, mais en beauté …
             Ayant mis ordre à ses affaires, il monta à bord du Caméléon qui devait le ramener en France, embrassa ses intimes, ses amis.
             Ce fut un moment solennel dont, bien des années plus tard, Joinville, l'ancien combattant de Mogador, conservait un souvenir très vif : " Nous rendîmes au maréchal les honneurs vice-royaux et je vois encore sa tête blanche et énergique, lorsque, debout, et découvert sur la passerelle du bâtiment qui l'emportait, il traversa lentement les lignes des vaisseaux au bruit :
             - du canon,
             - des tambours,
             - des musiques jouant " la Marseillaise " et des acclamations des équipages.
             - Il quittait avec tristesse et pour toujours cette terre d'Algérie qu'il avait tant contribué à faire française. "

J. Lucas-Dubreton (Louis Philippe chez Fayard)
Historia Algérie. Histoire et nostalgie. 1830-1987.



Le français en Algérie.
Envoi de M. Christian Graille

             Lors de mon séjour en France au mois de juin j'ai eu une conversation avec une Française qui m'a dit que le français en Algérie était mort.
             Tout de suite j'ai été choquée, surprise même. En même temps comment dire cela d'une langue qui a existé, existe et pour l'éternité existera.
             En Algérie cette langue est née en 1830 et depuis a emprunté le chemin de l'épanouissement. Le français en Algérie c'est un héritage ancien et lointain, qui date de plus d'un siècle et demi. Actuellement parler de l'abandon et de la mort de cette langue est injuste.

             Où vit le Français en Algérie ?
             Dans le langage quotidien, on trouve toujours l'emploi des mots suivants :
             - Ça va,
             - bien tranquille, auto, bus, camion, car normal, train,
             - d'abord,
             - journal, école, lycée, lampe.

             En cuisine les mots utilisés sont :
             - carotte, betteraves, bananes, choux-fleurs,
             - fromage, farine, gâteaux,
             - sardine, etc.

             A propos de l'utilisation du français dans le langage algérien, je n'ai cité que peu de mots, car les Algériens commencent toujours leurs phrases en arabe pour les finir en français.
             Ces mots sont utilisés par toute la population algérienne, même la moins cultivée.
             Je précise qu'en Algérie il n'y a pas eu d'abandon de la langue française.
             La seule dégradation s'est produite pendant l'arabisation sur tout le territoire national.
             Avec cette vague, le français s'est évanoui un moment et il a même failli disparaître. Le secours et la réanimation sont arrivés à temps. Et cela en restant fidèles aux liens culturels. Rassurez-vous : le français en Algérie vit de nouveau.
             Comment le français a-t-il pu résister ?
             On sait qu'après l'indépendance de l'Algérie la première langue étrangère enseignée dans les écoles algériennes était la langue française.
             La francophonie en Algérie a créé des liens.
             La langue de Molière vit sur les autoroutes algériennes.
             Toutes les indications en arabe sont automatiquement répétées en français.
             Dans le commerce :
             
- les appellations,
             - les désignations d'articles,
             - les bons d'achat et les factures sont rédigés à 80 % en langue française.
             Cette langue a aussi pu résister grâce aux célèbres noms données aux rues algériennes pendant la colonisation, comme :
             
- les rues Saint Eugène,
             - la Bastille,
             - place Valero,
             - Gambetta,
             - Delmonte,
             - Charlemagne.
             Et bien qu'on les ait remplacés par des noms d'Algériens, les Algérois ne les connaissent que par leur ancien nom.
             Comment la francophonie a évolué en algérie ?
             Le Français vit toujours en Algérie. Il évolue et s'enrichit régulièrement. En effet, ces dernières années, j'ai remarqué que l'emploi de cette langue se maintient et même se développe.
             Actuellement le français est programmé de bonne heure. Dès la deuxième année d'école primaire, les enfants de sept ans l'apprennent facilement et correctement.
             Comment on a sauvegardé la francophonie en Algérie ?
             Sans doute le côté culturel est en quelque sorte le facteur principal qui a soutenu et sauvegardé la francophonie.
             Dans les universités algériennes, les cours et les discours se font en langue française. Si elle vit toujours c'est largement grâce aux écoles qui lui sont toujours fidèles.
             C'est aussi grâce aux centres culturels français situés dans presque toutes les grandes villes. Les journaux algériens ont aussi un rôle important dans la sauvegarde de la francophonie. Ils sont édités en français à 50%.
             La parabole également est et restera un moyen de sauvegarder pour préserver la langue.
             C'est un des outils à vocation mondiale ; en Algérie c'est un moyen de partage entre les populations.
             Les Algériens et les Français ne sont unis :
             - ni par la religion,
             - ni par la tradition,
             - ni par les coutumes
             - mais par le langage qu'ils partagent à jamais.

             En ce qui concerne l'immigration les Algériens préfèrent la France à d'autres pays parce qu'ils se sentent un peu français.
             En vérité ils ne se sentent vraiment pas dépaysés quand ils y viennent.
             Personnellement cette langue est pour moi un refuge dans lequel je m'exprime en vers pour écrire ma poésie.
             Tous en rédigeant mes mémoires, que j'écris assez souvent en Français, je sens que c'est pour moi un moyen de détente à chaque moment de détresse.
             Je parle l'espagnol mais le français :
             - je le sens battre avec le pouls de mon cœur,
             - je le chéris comme un enfant et
             - je l'utilise comme arme pour l'avenir.

             Je le parle couramment et j'en suis fière.

Nacira Brahmi.
Défense de la langue française.
N° 226. 4e trimestre 2007.



"ALLONS ENFANTS DE LA PATRIE"
De Hugues Jolivet



       Une lettre collective aux Chefs qui se prélassent.
       "La France est en péril, des dangers la menacent,
       La Patrie se délite, meurt dans l'indifférence !
       Nous mêmes à la retraite, restons soldats de France" !
       Généraux, Officiers et même Hommes du rang,
       Prêts à donner leur vie, prêts à donner leur sang.
       Tous d'âge canonique, militaires retraités,
       Patriotes au service de la France maltraitée !

       "Monsieur le Président, Membres du Gouvernement,
       Et vous Parlementaires, halte au délitement :
       La Nation divisée, cultures et Religions
       S'affrontent journellement pour cause de traditions !
       Les lois républicaines ne sont plus acceptées
       Lorsque la loi divine s'impose d'autorité,
       Incitant ses adeptes à interdire l'accès
       Des quartiers de non-droit au quidam francais !

       "La haine prenant le pas sur la fraternité,
       La violence s'accroit entre communautés
       Lors de contestations,objets de défilés,
       Que les Forces de Police se doivent d'annhiler !
       Ne pas rester passifs, la guerre civile est proche.
       Enterrez le chaos, avant qu'on vous reproche
       Des milliers de victimes de combats fratricides
       Qui laisseront la France à l'état d'invalide !"

Hugues Jolivet         
Le 27 avril 2021          




Koléa.
Envoi de M. Christian Graille

                Le mot Sahel s'applique aux massifs de collines qui règnent le long de la mer et qui sont bornées au sud par des plaines. Le Sahel d'Alger est compris entre :
                - la mer, au Nord,
                - l'oued Mazafran, à l'Ouest,
                - l'oued Harrach, à l'Est et
                - la Métidja au Sud.
                - Son point culminant est le Bou-Zaria (407 m).


                On peut y faire un grand nombre de promenades charmantes :
                - en voiture, à cheval ou à pied.
                Le promeneur à pied se munira d'une canne à cause des chiens arabes qu'il pourrait rencontrer sur les limites des propriétés.

                Toutes les excursions dans le Sahel qui demandent 4 à 5 jours sont intéressantes ; mais on ira surtout :
                - au Bou-Zaria,
                - à Birmandreis par le jardin d'essai et le ravin de la femme sauvage,
                - à Sidi-Ferruch par la Trappe.

                Nous recommanderons aussi les excursions :
                - de Blida,
                - du Tombeau de la Chrétienne et surtout celles
                - des gorges de la Chiffa.


                Les tramways, omnibus et corricolos (voiture légère à deux roues) pour les environs d'Alger stationnent sur la place du Gouvernement.
                Le mieux pour les longues excursions est de prendre une calèche à deux chevaux et d'emporter des vivres.
                Koléa est situé au revers méridional du Sahel algérien, à 6 kilomètres au Nord de la mer, en face de Blida dont elle est éloignée de 21 kilomètres et à 38 d'Alger.
                Koléa, sur un plateau élevé à 150 mètres au-dessus de la mer, vu de la plaine de la Métidja et du mamelon qui la domine au Sud-Ouest, présente le tableau le plus champêtre et le plus paisible qu'une âme antique puisse désirer.
                La ville est entourée de la plus fraîche verdure qu'entretiennent des eaux murmurantes. S'écoulant dans un profond et tortueux ravin que les Indigènes ont nommé le cou du chameau (Ank el Djemel).

                On a dit, avec infiniment de grâce, que les maisonnettes blanches composant cette petite cité arabe semblent placées capricieusement dans une corbeille de fleurs.
                Un beau minaret, d'une grande hauteur, accosté d'un superbe palmier, s'élève auprès du tombeau de Sidi Ali Embarek, marabout de l'endroit.

Note historique.

                Koléa n'est illustrée par aucun souvenir antique, pas plus que Blida qui la regarde de l'autre côté de la plaine.
                Les Romains semblaient avoir dédaigné la Mitidja et s'être bornés à occuper les côtes de cette partie de la province.
                C'est à Fouka, situé à 4 kilomètres au nord de Koléa que l'on a retrouvé des restes remarquables de l'occupation romaine :
                - grands tombeaux en pierres,
                - lacrymatoires,
                - vases,
                - médailles en quantité,

                - le tout enfoui aux alentours d'un bocage d'oliviers qui ombrage une abondante fontaine.
                Des travaux d'une époque très reculée ont été exhumés lors de la restauration de ce monument. C'est donc à cette localité, sur un coteau faisant face au nord et à 1 kilomètre de la mer, qu'il faut attribuer le nom de Casae Calventi (les huttes du Chauve).

                Koléa emprunte toute sa gloire de Sidi Ali Embarek, dont les miracles éclatèrent, il y a plus de 300 ans, dans cette ville, lorsque Sidi Ferruch, natif de l'endroit, se fut retiré pour être plus recueilli en Dieu, sur la presqu'île qui porte son nom.
                Sidi Ali Embarek était le serviteur rustique d'un riche propriétaire appelé Bou Smail qui le fit héritier de tous ses biens.
                Le saint homme s'appliqua à la culture, et après une vie toute pleine de bonnes œuvres et de travaux utiles fût enterré entre un cyprès et un palmier très hauts, dont la semence provenait de la Mecque.
                Autour de son tombeau se forma la ville bâtie par Hassan-Pacha et peuplée d'Andalous.
                Il continua, après sa mort, à en faire la prospérité, les pèlerins n'y faisant point faute ; il en venait plus de dix mille tous les ans.

                Dans le tremblement de terre qui eut lieu en 1825 et bouleversa la Métidja, Koléa s'écroula toute entière, le marabout du saint resta seul immobile.
                Le Dey Mustapha Pacha le fit entourer du péristyle qu'on voit encore, et fit élever à côté la belle mosquée qui sert aujourd'hui d'hôpital.

                Nous ne nous étendrons pas davantage sur les vertus champêtres d'Ali Embarek, ni sur ses apparitions dans les nuits d'orage sous forme d'un lion noir.
                Nous, nous bornerons à rappeler que l'armée française parut dans les premiers jours de 1831, sous les murs de Koléa, dont les habitants reçurent avec empressement le général en chef Berthezène.
                La guerre sainte ayant éclaté vers la fin de septembre 1832, le général Brossard fut envoyé pour se saisir à Koléa de l'agha Sidi Mohamed Embarek accusé d'avoir favorisé les soulèvements.
                Ne le trouvant pas il amena prisonniers deux vénérables marabouts de sa famille et frappa la ville d'une contribution de un million 100.000 francs dont elle ne put jamais payer que 10.000.
                En avril 1837, le général Damrémont poussa une reconnaissance jusqu'à Koléa.

                Le 26 mars 1838, le maréchal Valée la fit bloquer par un camp pour en écarter les Hadjoutes qui y faisaient le foyer de leurs rassemblements hostiles. Ces derniers ne la quittèrent qu'en forçant à l'émigration tous les habitants valides.
                A la reprise de la guerre, en 1839, nos troupes descendirent du camp dont les constructions imposantes dominent la ville du côté de la plaine, et l'occupèrent définitivement. Ils n'y trouvèrent que des ruines et une population inoffensive.

                Le 1er mai 1841, elle fut attaquée du côté des deux tours par le Bey de Miliana qui fut mis en pleine déroute. La ville, longtemps restée, par suite de l'arrêté du 17 février 1840, sous l'autorité exclusive des commandants militaires, fut administrée par un commissaire civil, en exécution de l'arrêté du 21 décembre 1842.
                Une justice de paix y fonctionne depuis le 9 septembre 1847.
                Un décret du 21 novembre 1851 l'a érigé en municipalité.

L'Empereur l'a visitée le 6 mai 1865.

                La cité détruite par le tremblement de terre de 1825, ainsi que nous l'avons dit, a été réédifiée entièrement.
                Les maisons qui furent alors relevées et qui sont déjà à l'état de ruines, pour la plupart, ne sont qu'une ou deux chambres au rez-de-chaussée, couvertes en tuiles ; elles occupent le fond d'une petite cour ou fleurissent :
                - un oranger, un grenadier, un citronnier,
                - quelque fois une treille et plus souvent un jujubier.

                Les rameaux de ces arbres y entrelacent un doux ombrage, dont la verdure surabonde, déborde au-dessus des murs de clôture et pend sur la rue.
                Sur six rues larges et tirées au cordeau, il y en a quatre qui ne sont point pavées ; au tomber du jour, les troupeaux qui reviennent des pâturages remplissent à grand bruit leur morne solitude.
                Cette petite ville compte cependant quelques constructions européennes.

                Auprès de la mosquée coule une large fontaine. Devant la caserne de la gendarmerie, à laquelle vient aboutir la rue El-Souk, se trouvent deux bassins.
                Une masse d'eau considérable, prise au Nord de la ville la traverse au moyen de siphons en maçonnerie, ménagés dans l'épaisseur du mur de quelques maisons, et va se jeter dans l'Ank-el-Djemel.
                D'ailleurs dans chaque maison il y en a un et quelquefois deux puits.
                L'enceinte de Koléa est actuellement ouverte de toutes parts.

                Le camp est un établissement militaire de première ligne. Il est assis sur un mamelon au Sud-Ouest.
                Ses vastes pavillons, d'un développement grandiose, détachent leur relief sur l'Atlas, déroulant au loin un oripeau dont le mirage fait quelquefois distinguer tous les replis dorés par une limpide lumière.
                Dans ce camp, 1.200 hommes peuvent être casernés.
                Là aussi sont les magasins :
                - de campement,
                - de subsistances et
                - de la manutention.

                La gendarmerie, en ville, est une grande cour entourée de bâtiments au rez-de-chaussée où les individus appartenant à l'ordre civil sont détenus au besoin.
                Il y a au camp une bibliothèque choisie, à l'usage des militaires qui tiennent un cercle.

                Koléa est arrosé par des eaux abondantes, bien boisé, surtout en oliviers, fertile et propre à toute culture ; les eaux sourdent de toutes parts et sont distribuées avec art dans de magnifiques vergers :
                - d'orangers,
                - de citronniers,
                - de grenadiers qui encadrent les environs de la ville et en font une fraîche et charmante résidence.


                La ville a deux larges et belles rues avec trottoirs et caniveaux et comme promenade publique, une délicieuse orangerie.
                Les maisons sont presque toutes des constructions mauresques.
                Dans le bas de la ville est le jardin des Zouaves, qui est tout à la fois une orangerie et un joli jardin anglais, planté sur les terrains ravinés de l'Ank Djem (cou du chameau) au fond desquels murmurent les ruisseaux qui vont se jeter plus bas dans le Mazafran.
                On y remarque de nombreux parterres entretenus avec le plus grand soin, plusieurs kiosques, des allées en treillage ombragées par d'énormes citronniers et orangers.
                Des rampes descendent dans le ravin et remontent du côté opposé, aux abords de la mosquée de Sidi-Embareck.
                Cette mosquée a été convertie en hôpital mais la koubba dans laquelle sont placés les tombeaux des marabouts a été respectée et en a été totalement détachée.

                Bâtie auprès du tombeau de Sidi Ali Embarek, actuellement affectée au service de l'hôpital militaire elle est un véritable monument pour la solidité et l'élégance de sa vaste construction.
                Deux cents lits sont placés à l'aise sous ses nefs cintrées qui sont au nombre de cinq, soutenues par des colonnes pierre. Nous avons déjà parlé du haut minaret qui la surmonte. Le tombeau du saint personnage, sous la protection duquel cet édifice fut placé, est une chapelle fort pieuse, entourée d'un péristyle et totalement détachée de la mosquée dont une dizaine de pas la sépare.

                Ce tombeau, encastré dans l'ensemble des bâtiments occupés par l'hôpital militaire, en est pourtant isolé au moyen de cloisons en planches, impénétrables aux regards des Chrétiens.
                Il est peu de sanctuaire où l'on respire un air de dévotion plus profondément senti.
                Des tapis, des textes dorés et des lustres en cuivre et en cristal en font le principal ornement.

                L'église est établie dans un ancien caravansérail.
                Au Sud-Ouest de la ville, non loin de la gendarmerie, une orangerie qui compte plus de 300 sujets offre une délicieuse promenade aux habitants.

                Le marché se tient dans la rue El-Souk, devant la mosquée Hanefia.
                Les denrées de premières nécessités n'y sont pas chères.
                Le poisson y est excellent et bon marché.
                Le voisinage de la mer permet d'y voir de magnifiques : - homards, langoustes et coquillages, prisés des gastronomes.

                Tous les vendredis ce marché est fréquenté par les Arabes des alentours qui amènent des bestiaux et apportent du charbon.
                - Il y a un bureau de poste et plusieurs écoles primaires.
                - Les habitants ont formé un cercle.
                - Deux moulins fonctionnent dans la localité.


                Le sol est pratiquement composé de tuf calcaire, en couches inclinées vers la plaine. On croit que ce sont des dépôts de sources thermales.
                Quelques gisements sont fort durs et fournissent une très belle pierre de taille.
                Au-dessus de ces bancs calcaires, on voit percer dans le vallon, comme sur le bord du défilé du Mazafran, des couches épaisses de marne bleu.
                Ces marnes, par leur imperméabilité, retiennent les eaux et donnent naissance aux belles sources de Koléa.

                Les environs sont très verts, très fertiles.
                Une ceinture de feuillage entoure la ville ; c'est une suite de petits vergers et jardins.
                Une troisième zone de larges prairies règne sur des terrains onduleux qui descendent par des pentes rapides, au Nord vers la mer, au sud et à l'Est jusqu'aux rives du Mazafran qui les contourne du Sud-Sud-Est au Nord-Est. On passe ce cours d'eau sur un beau pont de pierre construit par l'Administration des Ponts-et-Chaussées.
                C'est sur la rive droite, non loin d'un gué connu sous le nom de Mokta Nara (gué des Chrétiens), et dans le large vallon qui garde le nom de Mazafran que le 3ème a été cruellement décimé par les troupes de l'émir en juin 1841.

                On a tant qu'on veut des chevaux et des voitures de louage. Des diligences vont et viennent entre Alger et Koléa et entre ce point et Blida.
                Les routes qui aboutissent à Koléa sont celle :
                - d'Alger au Nord-Est,
                - de Douéra à l'Est,
                - de Blida au Sud,
                - de Cherchell, au Sud-Ouest.

                La population, y compris celle de ses trois annexes :
                - Zoug-el-Abbès,
                - Saïghr et
                - Chaïba,

                Est de : 306 Étrangers, 1.361 Arabes.

Description d'Alger et de ses environs
Par Victor Bérard,
Receveur de l'Enregistrement, des Domaines et du Timbre .
1867. Extraits.



Mon pays, me voici !
Envoi de M. Christian Graille

Mon pays, me voici… J'avais le mal de toi
Ma nostalgie brûlait au feu des souvenirs
Depuis longtemps déjà je voulais revenir
Réchauffer mon cœur lourd à l'ombre de mon toit…

J'avais le cœur blessé de tant de solitude
Que j'évoquais souvent les ombres du passé
Et ces simples bonheurs que j'avais délaissés
Pour adapter ma vie à d'autres habitudes …

Mon pays, me voici ! Voici le banc de pierre
Où je venais m'asseoir par les beaux soirs d'été,
Et noyé dans le bois, le petit cimetière
Où dorment à jamais ceux qui nous ont quittés…

La pierre a résisté aux empreintes du temps
Et je m'en vais rêvant au hasard des allées
Dans cet enclos béni aux teintes désolées
Que conteste à l'automne un timide printemps…

Me voici, mon pays ! L'école de mon père
Réveille en moi soudain de tendres souvenirs
Et j'aurais bien aimé un instant rajeunir
Pour le voir apparaître aux côtés de ma mère…

Tous ces bonheur d'antan, je les croyais perdus
Ils éclatent soudain au hasard des chemins…
Ferveur et amitié à la fois confondues
Font chavirer mon cœur sous les poignées de main…

Tout peut bien m'arriver… Je garderai l'image
Du pays retrouvé sous le même soleil
Ma terre, me voici après ce long sommeil,
Je referme mon livre à la dernière page…
Marc Antoine Cianfarani


Bugeaud.
Envoi de M. Christian Graille

         Il a laissé un nom aussi étroitement associé au souvenir de la conquête que largement populaire dans l'armée d'Afrique.
         Ancien Officier de l'Empire, il avait pris part de 1808 à 1814 à la guerre en Espagne et avait été mis en demi-solde en 1815 comme colonel.
         Tous ses efforts, pour reprendre du service pendant la Restauration, étant restés vains, il s'était consacré à la culture de ses terres en Dordogne et il avait acquis une sérieuse expérience agricole.
         La Révolution de 1830 lui avait permis de rentrer dans l'armée ; promu Maréchal de Camp le 2 avril 1831, il avait été élu député de la Dordogne au mois de juillet suivant. Il était investi de la pleine confiance de Louis-Philippe.
         Lorsque la malheureuse situation du général d'Arlanges, bloqué en mai 1836 au camp de la Tafna décida le Gouvernement à envoyer des renforts en Algérie, Bugeaud fut chargé de conduire au camp de la Tafna trois régiments nouveaux.

         Agé alors de cinquante-deux ans, il était dans toute sa force intellectuelle et physique :
         - De haute taille,
         - d'allure vigoureuse,
         - le visage un peu massif et légèrement gravé de petite vérole,
         - le teint fortement coloré,
         - l'œil gris clair,
         - le nez légèrement aquilin,
         - le front peu garni de cheveux blanchissants ,


         Il avait un aspect :
         - franc, simple et bienveillant.

         Dès son débarquement à la Tafna, le 6 juin 1836, il fit connaître aux Colonels et Chefs de Corps réunis :
         - qu'il entendait se débarrasser des lourds convois et même de l'artillerie,
         - alléger les hommes,
         - faire porter les vivres et les munitions par des chevaux et des mulets, les tentes servant de bâts et de sacs.


         Il écrivit d'ailleurs, dès le 10 juin, au Ministre : " Il faut pour commander en Afrique, des hommes vigoureusement trempés au moral comme au physique.
         Les Colonels et les chefs de bataillon un peu âgés chez qui la vigueur de cœur et d'esprit ne soutient pas les forces physiques devraient être rappelés en France.

         Ce qu'il faut aussi pour faire la guerre avec succès, ce sont des brigades de mulets militairement organisés afin :
         - de ne pas dépendre des habitants du pays,
         - de pouvoir se porter partout avec légèreté et
         - de ne pas charger les soldats. "


         Il considérait comme de la barbarie de faire porter aux soldats :
         - sept à huit jours de vivres,
         - soixante cartouches,
         - des chemises,
         - souliers,
         - marmites, même s'ils étaient choisis robustes et entraînés.

         " Il faut faire les choses largement, concluait-il, ce sera économiser les hommes et l'argent. Il faut être fort ou s'en aller. "

         Bugeaud constatait dans un second rapport du 24 juin que, pour ce genre de guerre " les nouveaux régiments étaient détestables "
         - que les officiers venant à contre cœur n'étaient bons qu'à démoraliser leurs hommes et
         - qu'il fallait " des troupes constituées tout exprès. "


         Ces principes, qui lui apparaissaient aisément parce qu'il avait fait la guerre de partisans en Espagne, ont été maintes fois oubliés en Afrique du Nord et ont chaque fois été rappelés par des expériences coûteuses.
         Pendant son cours séjour de 1836 il eut la gloire de battre complètement à la Sikkak le 6 juillet Abd-El-Kader qui avait voulu lui barre la route de la mer à Tlemcen.
         Il résuma ses observations dans un mémoire sur la guerre dans la province d'Oran qui répétait les principes exposés dans ses rapports, et disait en outre : " Il ne faut point trop multiplier les postes fortifiés qui diminuent les ressources disponibles en hommes, sont coûteux et difficiles à ravitailler et exposent aux surprises. "
         Le succès devait être obtenu, selon lui, par une activité incessante par un système de colonnes agissantes.

         Reparti pour la France dès le 30 juillet et nommé Lieutenant Général, il fut en 1837, chargé d'une nouvelle mission en Algérie.
         Le Gouvernement voulait la paix avec Abd-El-Kader avant d'entreprendre la seconde expédition de Constantine. Bugeaud devait obtenir cette paix, sans avoir à en référer au nouveau Gouverneur, le Général de Damrémont.
         Débarqué le 5 avril 1837 à Oran, il fit des préparatifs pour une nouvelle campagne, mais conclut, dès le 30 mai, le traité de la Tafna.
         Il avait accordé pleine confiance à son adversaire, écrivant au Ministres des Affaires Etrangères : " Je me rends garant de l'Émir et je prouve la foi que j'ai en sa parole par la grande responsabilité que j'assume sur ma tête. "

         Ce traité qui lui fut souvent reproché par la suite était peu avantageux pour la France. Il donnait à l'adversaire un territoire comprenant les provinces d'Oran et d'Alger, sauf les ports et une faible zone réservée à la colonisation.
         Il étendait la puissance d'Abd-El-Kader dans le but d'obtenir une plus grande sécurité commerciale et agricole ; mais il n'envisageait pas assez le danger de cette puissance.
         D'ailleurs, le texte arabe, le seul sur lequel l'adversaire avait apposé son cachet n'était même pas conforme au texte français ; la partie de l'article 1er si importante rédigée : " L'Émir Abd-El-Kader reconnaît la souveraineté de la France en Afrique " était traduite : " le commandeur des croyants sait que le Sultan est grand ", phrase vide de sens.

         La faute en était aux deux interprètes, l'un Syrien, ignorant la langue française, l'autre, Juif, de mauvaise foi !
         Si Bugeaud faisait de marges concessions territoriales c'est que, à ce moment, il ne croyait pas à l'avenir de l'Afrique et estimait préférable de développer des régions de la Métropole encore mal exploitées et mal outillées.
         Il avait d'ailleurs été trompé par Abd-El-Kader, dont il comptait faire un instrument pour la France, tandis que l'Émir ne voyait dans ce traité, qu'une trêve lui permettant d'organiser ses forces pour reprendre au moment opportun une campagne décisive contre les Chrétiens.

         Comme il doublait son grade de Général des fonctions de député, il défendit en 1838, à la tribune de la Chambre le traité qu'il avait conclu.
         Il estimait qu'un arrangement de cette sorte était préférable à des colonnes coûteuses en argent et en hommes, qui, après avoir consommé leurs vivres et brûlé les moissons des Indigènes revenaient à leur point de départ sans autres résultats : " Vous n'avez pas encore de système déclarait-il ; je vous ai donné, par le traité, du temps pour juger ; et quand ce ne serait que cela, ce serait déjà un grand service. "
         Il exposait son système à lui : au lieu de 30.000 ou 40.000 hommes en Algérie, il en fallait 100.000 répartis par colonne de 10.000 hommes, 3.000 au dépôt, 7.000 à parcourir le pays ; ces colonnes devaient avoir des bases de ravitaillement correspondantes sur le littoral.

         Si la France désirait la guerre, l'Émir lui fournirait, affirmait-il, l'occasion de rompre le traité.
         Cette affirmation se réalisa, puisqu'en novembre 1839 Abd-El-Kader reprit les hostilités en lançant ses partisans à l'attaque des postes français.
         Alors Bugeaud monta à la tribune de la Chambre le 15 janvier 1840 pour exprimer toute sa pensée : "L'occupation restreinte me paraît une chimère. Cependant c'est sur cette idée qu'avait été fait le traité de la Tafna. Et bien c'est une chimère ! … et une chimère dangereuse. Tant que vous resterez dans votre petite zone, vous n'attaquerez pas votre adversaire au cœur. "

         Il ne voyait que trois partis à prendre :
         - l'abandon que la France officielle ne voudrait pas,
         - l'occupation maritime de " quelques Gibraltars " qui absorberait des effectifs disproportionnés avec le but à atteindre,
         - la conquête absolue qui s'obtiendrait par la destruction de la puissance d'Abd-El-Kader, grâce à des colonnes empêchant les tribus :
         - de semer,
         - de récolter,
         - de pâturer, jusqu'à ce qu'elles se soumettent.


         Il combattait de toutes ses forces le système des postes fortifiés employés par le Maréchal Valée : " Que diriez-vous, déclarait-il en mai 1840 d'un amiral qui chargé de dominer la Méditerranée, amarrerait ses vaisseaux en grand nombre à quelques points de la côte et ne bougerait pas de là ?
         Vous avez fait la même chose. Vous avez réparti la plus grande partie de vos forces sur la côte, et vous ne pouvez pas de là dominer l'intérieur.
         Entre l'occupation restreinte par les postes retranchés et la mobilité, il y a toute la différence qui existe entre la portée du fusil et la portée des jambes. Les postes retranchés commandent seulement le pays à quinze ou vingt lieues. Il faut donc être avare de retranchements et n'établir un poste que quand la nécessité en est dix fois démontrée. "

         La guerre en Afrique lui semblait d'ailleurs tout à fait inutile si elle n'avait pas pour but de coloniser le pays. Il critiquait amèrement " dix ans de sacrifices infructueux " et il ajoutait : " Cherchez des colons partout ; prenez-les dans :
         - les villes,
         - dans les campagnes,
         - chez nos voisins car il en faudra 150.000 dans peu d'années ;

         On me dira : c'est bien cher ! Comment il faut leur fournir :
         - des terres, des armes, des vivres ?
         - Oui Messieurs, vous le devez si vous voulez rester en Afrique et c'est beaucoup moins cher que ce que vous faites. "


         Lorsque le rappel de Valée fut décidé en décembre 1840, Bugeaud fut désigné pour le remplacer, il avait pour lui mais il avait par contre beaucoup d'ennemis :
         - Chez les légitimistes,
         - chez les républicains et
         - chez les orléanistes eux-mêmes.

         Il avait tellement critiqué l'occupation de l'Algérie qu'il était suspect à ceux qui désiraient en finir.

         Cependant il avait exposé en mai 1840 à la Chambre le programme d'action qu'il préconisait en disant : " Il faut soumettre Abd-El-Kader, il faut le détruire car sans cela vous n'arriverez à rien.
         - Sa capacité,
         - sa finesse,
         - sa duplicité, le rendent fort dangereux. Il faut lui faire une guerre acharnée

         Mais pour cela, il faut de grandes forces et beaucoup de persévérance. "
         Le signataire du traité de la Tafna avait considérablement évolué et il allait remplir de bout en bout, comme Gouverneur, le programme ainsi exposé.

         Le jour même de son arrivée à Alger, le 22 février 1841, Bugeaud adressa une proclamation aux habitants de l'Algérie et une à l'armé.
         Aux habitants, il exposait qu'il avait été l'adversaire de la conquête absolue en raison des moyens humains et financiers qu'elle exigeait, mais qu'il s'y consacrerait désormais tout entier : " La conquête, ajoutait-il, serait stérile sans la colonisation. "
         Plus de fermes isolées difficiles à protéger mais des villages organisés défensivement ayant pour but de faire rendre à la terre tout ce qu'elle pouvait donner ; appel aux capitaux, appel aux colons, tel était son programme.
         A l'armée il disait que son but n'était pas de faire fuir les Arabes, mais de les soumettre, et que, tout en demandant un sérieux effort aux troupes il serait attentif à ménager leurs forces et leur santé. "
         Ces proclamations pleines de franchise et de bon sens furent bien accueillies par ceux à qui elles s'adressaient.

         La guerre qu'il entreprit fut toute différente de celle menée jusque-là ; elle consista à occuper ou à créer de grands postes ou des villes d'où les colonnes allégées et par suite mobiles rayonnèrent, allant frapper dans leurs intérêts matériels les tribus récalcitrantes.
         Par contre les chapelets de camps inutiles installés par le Maréchal Valée furent évacués.
         Les razzia consistant à aller piller les tribus dissidentes en leur enlevant :
         - troupeaux, récoltes, otages, furent empruntés aux procédés de guerre locaux, à défaut d'autre moyen d'atteindre un ennemi qui se dérobait ; elles furent d'ailleurs beaucoup plus humaines que celles des Turcs ou D'Abd-El-Kader.

         Tandis que Bugeaud allait dans la province d'Oran en mai détruire Tagdempt où l'Émir avait installé ses fabriques et ses magasins, puis occuper Mascara par une garnison, le Général Baraguey d'Hilliers faisait tomber dans la province d'Alger Boghar et Taza.

         En juin Bugeaud organisant ses bataillons en faucheurs et batteurs, fit récolter le blé de la tribu d'Abd-El-Kader aux environs de Mascara et l'emmagasina pour l'alimentation de ses troupes.
         En automne, il détruisit la maison et l'établissement religieux du père d'Abd-El-Kader puis la ville de Saïda. Ainsi, l'ennemi voyait tomber successivement toutes ses villes mais continuait à se dérober dans l'espoir d'une revanche occasionnelle.

         Bugeaud résolut de l'atteindre et de ne laisser aucun répit aux tribus qui lui étaient soumises. Il donna ainsi à la guerre en 1842, le caractère nouveau qui a été qualifié " jeu de barres ".
         La Moricière dans la province d'Oran, Changarnier dans la province d'Alger fournirent un effort considérable contre les lieutenants de l'Émir qui se trouvèrent peu à peu chassés des Gouvernements qui leur avaient été attribués.
         Calquant alors les procédés d'Abd-El-Kader, Bugeaud créa des divisions administratives et mit à leur tête des chefs indigènes choisis par la France.
         Il pensait d'ailleurs à utiliser les moyens politiques pour favoriser la pacification. Sachant que d'après les interprétations du Coran, des Musulmans ne pouvaient accepter volontairement la domination des infidèles, il avait envoyé en Orient Léon Roches, qui avait été pendant plusieurs années secrétaire d'Abd-El-Kader pour obtenir une fettoua, c'est-à-dire une décision des savants de l'Islam, expliquant que cette acceptation était possible.

         La fettoua était ainsi rédigée : " Quand un peuple musulman dont le territoire a été envahi par les infidèles, les a combattu aussi longtemps, qu'il a conservé l'espoir de les en chasser, et quand il est certain que la continuation de la guerre ne peut amener que :
         - misère, ruine,
         - mort pour les Musulmans sans aucune chance de vaincre, ce peuple tout en conservant l'espoir de l'aide de Dieu, peut accepter de vivre sous leur domination, à la condition expresse qu'ils conserveront le libre exercice de leur religion et que leurs femmes et leurs filles seront respectées. "

         On comprend l'importance de cette décision pour ceux que seuil le devoir impérieux de la guerre sainte retenait sous la bannière d'Abd-El-Kader.

         Pour frapper l'esprit des Indigènes, Bugeaud se fit d'ailleurs à cette époque graver un cachet portant l'inscription suivante : " La terre appartient à Dieu et il la donne en héritage à ceux qu'il a choisis. " verset tiré du Coran et bien fait pour impressionner les Musulmans qui recevaient ses lettres. A un ancien lieutenant d'Abd-El-Kader auquel il donnait solennellement l'investiture à Alger en octobre 1842 il disait dans son allocution : " La France veut :
         - vous gouverner pour que vous prospériez.
         - Elle veut que chacun puisse jouir paisiblement du fruit de son travail et s'enrichir sans crainte d'être dépouillé.
         - Elle respecte vos mœurs,
         - elle fait observer votre religion,
         - elle choisit parmi vous un chef capable de vous commander.


         Si vous êtes fidèles à vos promesses, la France est grande et puissante et vous deviendrez grands et puissants avec elle. Si vous oubliez votre engagement d'aujourd'hui, malheur ! "
         La création de camps destinés à surveiller le pays marqua en 1843 une étape importante dans l'œuvre de Bugeaud.
         Le camp d'El Asnam qui reçut bientôt le nom d'Orléansville fut la base d'où il partit pour aller occuper le port de Ténès.

         La prise de la Smala au mois de mai, puis la défaite et la mort au mois de novembre suivant, du plus brave et du plus fidèle lieutenant de l'Émir, Ben Alla, avec les restes des bataillons réguliers, portèrent des coups terribles au prestige de l'ennemi qui avait été obligé d'aller établir sa " deïra ", restes très amoindris de la Smala dans la zone saharienne des Chotts (lacs salés), voisine du Maroc.
         Bugeaud, élevé successivement cette année-là aux dignités de grand-croix et de Maréchal de France estimait que son ennemi était vaincu.
         Dans un discours prononcé le 25 novembre 1843 à Alger, à l'occasion d'un banquet offert au Duc d'Aumale, il s'exprimait ainsi : " Je vous dis hardiment que toute guerre sérieuse est finie. Abd-El-Kader pourra bien encore avec la poignée de cavaliers qui lui restent exécuter quelques coups de mains sur les Arabes soumis à la frontière mais il ne peut rien tenter d'important.

         Et comment pourrait-il reconstituer une petite armée ? Il a perdu partout l'impôt et le recrutement ; le pays est organisé par nous et pour nous ; partout on nous paie les contributions, on obéit à nos ordres. "
         L'Émir n'avait cependant pas renoncé à la lutte : comprenant qu'il ne pouvait plus rien conte Bugeaud sans l'appui du Maroc, il chercha à amener le Sultan à la guerre ; à cet effet, il exécuta dans l'Ouest de la province d'Oran des razzia.
         La Moricière fut forcé d'installer un camp à Lalla- Maghnia, d'où grosse émotion parmi les Marocains et attentats de la part des cavaliers d'Oudjda Bugeaud fit la démonstration de sa force en allant le 19 juin occuper Oudjda et revint ensuite dans ses bivouacs.
         Les agressions des Marocains continuant une expédition devint inévitable .
         Le Gouvernement français, craignant de provoquer de graves complications avec l'Angleterre, ne la souhaitait pas, et le laissait entendre au Maréchal et au prince de Joinville, commandant d'une escadre croisant devant les ports marocains.

         Mais Bugeaud écrivit à Joinville que l'honneur de la France importait plus que les susceptibilités britanniques si bien que le jeune prince alla bombarder Tanger le 6 août et se dirigea sur Mogador pour lui faire subir le même sort.
         Bugeaud qui avait en face de lui l'armée marocaine forte de :
         - 6.000 cavaliers réguliers,
         - 1.200 fantassins, et environ
         - 50.000 cavaliers des tribus sous les ordres du fils du Sultan.

         Eût préféré attendre l'attaque en raison de la grosse chaleur ; mais l'attitude passive trop longtemps adoptée vis-à-vis d'adversaires agressifs risquait de décourager les tribus soumises, et il décida de marcher contre les Marocains.

         Le 12 août il écrivait au prince de Joinville : " Mon Prince, vous avez tiré sur moi une lettre de change, je vous promets d'y faire honneur ; demain j'exécute une manœuvre qui me rapprochera, à son insu, de l'armée du fils de l'Empereur, et après-demain, je la mets en déroute. "
         Dans la soirée il s'était étendu sur son lit de camp lorsqu'on vint lui demander de venir jusqu'à un punch offert aux officiers de deux régiments de cavalerie arrivant en renfort.
         Il n'eut qu'à changer son fameux " casque à mèche ", son bonnet de coton rendu légendaire par la chanson contre son képi pour aller à un jardin pourvu d'allées et de portiques qui avait été improvisé avec des lauriers roses sur les bords de l'oued Isly et qui était illuminé de lanternes de papier.

         Au milieu des officiers réunis il s'écria de sa voix forte : " Après-demain, mes amis sera une grande journée, je vous en donne ma parole. Avec notre petite armée de 6.500baïonnettes et 1.500 chevaux je vais attaquer l'armée du prince marocain qui, d'après mes renseignements, s'élève à 60.000 cavaliers…
         Moi j'ai une armée, lui n'a qu'une cohue. Je vais vous prédire ce qui se passera.
         Je donne à la petite armée la forme d'une hure de sangliers.
         - La défense de droite, c'est La Moricière,
         - la défense de gauche, c'est Bedeau,
         - le museau c'est Pélissier
         - et moi je suis entre les deux oreilles.

         Qui pourra arrêter notre force de pénétration ? Ah ! Mes amis, nous entrerons dans l'armée marocaine comme un couteau dans du beurre.
         Je n'ai qu'une crainte, c'est que prévoyant une défaite, ils ne se dérobent pas à nos coups. "

         Tout se passa le 14 août comme le Maréchal l'avait dit.
         L'armée française s'avança en bon ordre, harcelée par des charges incessantes de cavaliers marocains que les fantassins des " défenses " recevaient par des décharges à bonne portée ; elle était semblable selon un cavalier indigène à un " lion entouré par cent mille chacals ".
         Au moment opportun Bugeaud lança en avant sa cavalerie.
         Yusuf en tête la faisait suivre de près par l'infanterie. Le camp marocain laissé en raison de la certitude du succès fut enlevé :
         - l'artillerie,
         - les tentes du fils du Sultan et celles des chefs,
         - les provisions de guerre et de bouche, restèrent entre les mains des Français.

         Le colonel Morris poursuivit l'ennemi avec ses chasseurs si ardemment qu'il se trouva en difficulté et dut être dégagé par l'intervention des bataillons de Bedeau.

         A midi, la poursuite cessa. Bugeaud put prendre possession de la tente du fils du Sultan que Yusuf lui avait fait réserver et auprès de laquelle il avait groupé :
         - 18 drapeaux,
         - 11 pièces d'artillerie,
         - le parasol de commandement du fils du Sultan en fuite jusqu'à Taza et
         - d'autres trophées.

         La victoire de l'Isly eut un immense retentissement et est resté le grand titre de gloire de Bugeaud, quoiqu'il en ait bien d'autres.
         Elle amena le traité de Tanger signé le 10 septembre 1844 mettant Abd El Kader hors la loi au Maroc comme en Algérie.

         Bugeaud reçut de Louis Philippe dès le 18 septembre :
         - le titre de Duc d'Isly,
         - de la population algérienne une épée d'honneur,
         - d'amis connus et inconnus d'innombrables lettres de félicitations.

         Il se rendit en France où il fut fêté partout.
         Pendant ce séjour son grand souci fut de montrer comment cette Algérie, qu'il considérait comme pacifiée, devait être une richesse nouvelle pour la France :
         " Il est essentiel, déclarait-il à un banquet offert par le commerce de Marseille que vous connaissiez bien toute l'importance du marché dont Marseille est le principal entrepôt… Le champ qui s'ouvre devant vous rapporte déjà vingt millions au trésor ! Il y a là un avenir immense qu'à mon âge il ne me sera peut-être pas donné de voir… "

         A la Chambre des Députés, il prononça le 24 janvier 1845 un grand discours :
         - où il défendit ses principes d'administration et de colonisation,
         - où il exposa l'œuvre de l'armée d'Afrique et
         - justifia la nécessité du maintien de ses effectifs.

         Il montra que c'était au prix de marches épuisantes et de privations continuelles que cette armée avait pu obtenir les résultats acquis, remplaçant grâce à sa mobilité l'effectif double qu'aurait exigé l'occupation de postes plus nombreux.
         Les razzias qui lui étaient reprochées n'étaient-elles pas, déclarait-il, le seul moyen de terminer la guerre ?

         Il expliqua la différence entre la guerre européenne où il est possible :
         - d'atteindre les capitales,
         - d'intercepter les grandes routes terrestres ou fluviales,
         - et la guerre africaine

         Où l'on ne peut atteindre que :
         - l'intérêt agricole,
         - les moutons,
         - les bœufs,
         - la population nomade sans villes ni villages.


         L'armée remplissait d'ailleurs ajoutait-il bien d'autres rôles que celui d'instrument de guerre. Les soldats rentrant de colonne n'avaient que trois jours de repos pour réparer leurs effets après quoi ils travaillaient :
         - aux routes,
         - aux ponts,
         - aux bâtiments,
         - à tous les grands travaux d'utilité publique.


         " C'est l'armée déclarait-il, qui vous a fourni des bras nombreux et à bon marché, et sans elle vous n'exécuteriez pas ces travaux car d'abord vous ne voteriez jamais les sommes nécessaires pour les faire, faire par des bras civils. "
         Il calculait :
         - le prix d'un terrassier,
         - d'un ouvrier d'art,
         - d'un maçon,
         - d'un menuisier


         Et montrait que les soldats travaillaient gratuitement pour les remplacer :
         " L'armée :
         - a ouvert depuis deux ans cinq cents lieues de routes, elle a fait seize ponts,
         - une multitude d'édifices militaires sur tous les points,
         - elle a fondé plusieurs villages,
         - elle a créé en un mot tous les grands travaux d'utilité car il n'y a qu'elle qui en fait.
         - Ce n'est pas tout ! Elle porte le secours de son budget au mouvement colonisateur et commercial. "


         En ouvrant des routes l'armée ne faisait pas seulement d'après lui œuvre utile au point de vue stratégique, elle ouvrait des voies commerciales.
         Si elle était allée à Biskra et chez les Ouled-Naïl, c'était dans ce double but :
         " Nous avons marché, expliquait-il, l'épée dans une main et le mètre dans l'autre. Depuis ces expéditions il y a eu un progrès énorme dans le commerce de l'Algérie. Le mouvement du commerce d'Alger s'est élevé en 1844 à 80 millions ; je n'ai pas pu suivre nos tissus dans leur marche mais je ne serai pas étonné que plusieurs fussent allés jusqu'à Tombouctou. "
         Il expliqua aussi à la Chambre que l'occupation restreinte à laquelle il avait cru jadis, était irréalisable ; il démontra cette vérité, si souvent méconnue depuis, qu'il est impossible de faire la conquête partielle d'un pays et que par la force des choses il faut soumettre les régions en bordure parce ce que même si leurs populations ne sont pas agressives, elles donnent refuge à tous les ennemis des régions soumises.
         Enfin il expliqua les avantages du régime militaire tant que le pays n'était pas complètement pacifié et donna un exposé de la colonisation militaire telle qu'il l'entendait, au moyen de soldats allant se marier en France et revenant s'établir en Algérie avec l'aide de l'État et de l'armée.

         L'ère de la colonisation et du commerce paraissait si bien ouverte que le Maréchal fut reçu à Paris par les négociants peu avant son départ pour Alger, dans un grand banquet donné au Palais de la Bourse :
         - le Duc de Nemours,
         - le Prince de Joinville,
         - le Duc d'Aumale et
         - le Duc de Montpensier y assistaient, ainsi que
         - le Ministre du Commerce et
         - le Gouverneur de la Banque.


         A son retour à Alger le 29 mars 1845, Bugeaud adressa aux citoyens et soldats de l'Algérie une proclamation où il leur parla de l'exportation des tissus français dans l'intérieur de l'Afrique, qu'il comptait accroître en ouvrant de nouvelles routes vers le Sud.
         Mais presque aussitôt commença une agitation insurrectionnelle fomentée par un marabout surnommé Bou- Maza (l'homme à la chèvre) qui l'obligea de lancer des colonnes contre les tribus.
         Cependant c'est à la colonisation militaire qu'il pensait avant tout.
         Comme le Gouvernement ne paraissait pas favoriser ses projets, il s'embarqua le 4 septembre pour la France afin d'aller les défendre.
         Les délégués de la population civile d'Alger se réunirent ce jour-là au Palais du Gouvernement pour lui présenter une adresse, et lui donnèrent ainsi l'occasion de leur exprimer toute sa pensée.

         Il avait voulu avant tout, expliqua-t-il, leur donner la sécurité, sans laquelle toute colonisation était impossible ; il avait ensuite fondé des postes autour desquels la population civile était venue se grouper et il avait créé des routes pour les desservir ; il avait été obligé de s'absenter beaucoup d'Alger pour diriger les colonnes ou les travaux, mais il estimait " mieux servir ainsi les intérêts civils qu'en se laissant absorber par des détails minutieux de l'administration ".
         Il disait encore aux colons : " Je vous rends tout l'amour que vous m'accordez et bien que je ne possède pas une obole en Algérie, je défendrai cette terre comme si j'y avait consacré toute ma fortune et toutes mes affections. "
         Il concluait avec sincérité qu'il conserverait leur adresse comme un titre de noblesse à côté de son brevet de Duc d'Isly.

         Au moment même où il s'éloignait ainsi, laissant l'intérim à La Moricière, l'agitation entretenue par les émissaires d'Abd-El-Kader s'accentua et lui-même passant la frontière du Maroc, anéantit presque entièrement la petite colonne du lieutenant-colonel de Montagnac près de Sidi-Brahim, puis fit prisonnier le détachement du lieutenant Marin près d'Aïn-Témouchent.
         L'insurrection gagna rapidement du terrain et la situation devint grave.
         Bugeaud revint en hâte, déclarant que les échecs subis étaient dus à des infractions aux principes qu'il avait posés et même aux ordres qu'il avait donnés ; il décida d'empêcher Abd-El-Kader de rejoindre les divers insurgés de l'Est afin qu'il ne pût pas prendre la direction d'une insurrection générale.
         Dix-huit colonnes sillonnèrent le pays en tous sens, dans des conditions si pénibles que deux de leurs chefs moururent d'épuisement ; elles parvinrent du moins en traquant l'Émir à le rejeter définitivement vers le Sud-Ouest.

         Dans cette lutte décisive les deux adversaires avaient l'un et l'autre déployé toute leur énergie. Le capitaine Trochu, aide de camp du Maréchal écrivait plus tard en l'évoquant ses lignes émues sur son ancien chef : " Quand il rentra dans Alger le 18 mars 1846 :
         - avec sa capote militaire usée jusqu'à la corde,
         - entouré d'un État-Major dont les habits étaient en lambeaux,
         - marchant à la tête d'une colonne de soldats bronzés, amaigris, à figures résolues et portant fièrement leurs guenilles,
         - l'enthousiasme de la population fut au comble.

         Le vieux Maréchal en jouit pleinement. C'est qu'il venait d'apercevoir, de très près, le cheveu auquel la Providence tient suspendues les grandes renommées et les grandes carrières, à un âge (soixante-deux ans) où, quand ce cheveu est rompu, il est difficile de le renouer. "

         Le Maréchal savait que le Gouvernement état disposé à instituer en Algérie une administration civile et à réduire l'armée, et s'opposait vivement à ces mesures.
         Il voulait mettre en pratique son projet de colonisation militaire : au cours d'un séjour en France, de juillet à décembre 1846, il en entretint Louis-Philippe et Guizot, et obtint d'eux la promesse qu'un crédit d'essai serait demandé aux Chambres.
         Apprenant à la fin de décembre que le crédit avait été ajourné, il écrivit à Louis-Philippe une lettre pressante et lui envoya, ainsi qu'à Guizot, un mémoire sur la colonisation.

         Ses démarches eurent peu d'effet. Constatant au début de mars que le projet de loi sur la colonisation, que le système préconisé par La Moricière triomphait du sien, il écrivit à Guizot : " Je suis déjà un peu vieux pour la rude besogne d'Afrique et vous savez que si je tiens à conserver le Gouvernement après avoir résolu les questions de guerre et de domination des Arabes, c'est uniquement pour faire entrer le pays, avant de me retirer, dans une voie de colonisation qui puisse perpétuer notre conquête et délivrer la France du grand fardeau qu'elle supporte. "
         Comme il ne pouvait faire adopter ses idées à ce sujet, il préférait résigner les fonctions de Gouverneur qu'il exerçait depuis six ans.
         Il eut encore la satisfaction au mois d'avril de voir l'agitateur Bou-Maza se rendre au colonel de Saint-Arnaud ; puis au mois de mai, il alla soumettre la partie de la Grande Kabylie qui restait une menace pour la paix, malgré l'ordre reçu du Ministre, au dernier moment de renoncer à cette expédition.
         Après ce dernier fait d'armes, il décida de partir.
         Il a été célébré surtout pour ses campagnes victorieuses contre Abd-El-Kader et les tribus ; et cependant c'est à son œuvre colonisatrice que le vieil agriculteur attachait personnellement le plus grand prix.

         Avant de s'embarquer pour la France, le 5 juin 1847, il résumait lui-même cette œuvre depuis 1841 dans une proclamation qu'il adressait aux colons. " Voyez :
         - les routes,
         - les ponts,
         - les édifices de toute nature,
         - les barrages,
         - les conduites d'eau,
         - les villages qui ont surgi et dites si nous n'avons pas fait en colonisation, au milieu d'une guerre ardue, plus qu'on avait le droit d'attendre en raison des moyens exigus mis à notre disposition.

         Mais ce qui est colonisateur et administratif au-dessus de tout, c'est la sécurité. "

        

         Il leur montrait comment les Indigènes assuraient eux-mêmes cette sécurité en exerçant la police en accueillant les voyageurs.
         Quant au commerce s'il était encore peu important c'est parce qu'il avait été contrarié par la guerre et par le peu de besoin des Indigènes ; mais il était appelé, pensait-il, à " grandir tous les jours par les bienfaits de la pacification. "

         Il prêchait paternellement la patience à ceux qui désiraient voir importer immédiatement les institutions civiles et politiques de la France dans un pays où l'élément européen occupait encore une si petite place dans le chiffre de la population et dans la superficie territoriale.
         Il leur indiquait que :
         - des réformes plus pratiques étaient un large système de colonisation civile et militaire,
         - une augmentation de crédits pour les travaux publics et
         - une décentralisation enlevant à Paris un grand nombre des questions qui s'y traitaient.


         " Plus tard, concluait-il :
         - quand vous aurez grandi,
         - quand votre société sera assise sur de larges bases,
         - quand vous aurez assez s'aisance pour payer des impôts,
         - le moment sera venu de demander des institutions en harmonie avec votre état social. "

         En lisant, avec le recul du temps ces conseils si sages et si judicieux, on constate que ses conceptions méconnues et combattues à son époque étaient les vraies, et qu'elles ont été depuis lors réalisées progressivement à leur heure.

         Dans la proclamation adressée à l'armée il résumait les glorieuses campagnes par lesquelles elle avait :
         - rejeté Abd-El-Kader hors de l'Algérie,
         - vaincu l'armée marocaine et
         - soumis les tribus.


         Il célébrait l'établissement de sa puissance morale qui gardait les routes et protégeait la colonisation sans exiger sa présence constante. Mais ce qu'il louait surtout chez ses troupes, c'était d'avoir compris :
         - que leur tâche était multiple,
         - qu'il ne suffisait pas de combattre et de conquérir,
         - qu'il fallait encore travailler pour utilise la conquête.


         Son exposé à cet égard constituait un plaidoyer pour sa colonisation militaire :
         - Vous avez trouvé glorieux, écrivait-il, de savoir manier tour à tour, les armes et les instruments de travail,
         - vous avez fondé presque toutes les routes qui existent,
         - vous avez construit des ponts et une multitude d'édifices militaires,
         - vous avez créé des villages et des fermes pour les colons civils,
         - vous avez défriché les terres des cultivateurs trop faibles encore pour les défricher eux-mêmes,
         - vous avez créé des prairies,
         - vous avez semé des champs et
         - vous les avez récoltés,
         - vous avez montré par-là que vous étiez dignes d'avoir une bonne part dans le sol conquis et que vous sauriez aussi bien le cultiver que le faire respecter de vos ennemis. "


         L'œuvre accomplie par l'armée et qu'il exposait ainsi était la colonisation militaire qu'il eût voulu développer et réglementer.
         Quand il tenta des expériences pratiques de colonisations militaires il eut parfois des déceptions ; il crut, par exemple que les difficultés inhérentes au travail en commun seraient plus facilement évitées chez les hommes assouplis à la discipline militaire et habitués à ce genre d'effort ; mais dans un village fondé en 1842, il constata en 1843 que ses colons militaires ne travaillaient pas et leur demanda pourquoi : " Parce que, lui répondirent-ils, nous comptons les uns sur les autres et que nous ne voulons pas en faire plus l'un que l'autre et qu'ainsi nous nous mettons au niveau des paresseux. "

         Ses colons lui demandèrent instamment, même les paresseux de les désassocier " !
         Ainsi dans la brochure où il contait lui-même cette déconvenue Bugeaud tirait celle conclusion générale : " Les socialistes affligés de voir souvent la misère à côté de l'aisance et même de la richesse, poursuivent la chimère de l'égalité parfaite. Ils croient l'avoir saisie dans l'association, ils se trompent ; ils n'obtiendront que l'égalité de la misère. "

         La tâche que Bugeaud avait accomplie répondait bien à la devise qu'il avait choisie : Ense et aratro,( par l'épée et par la charrue.)
         Son œuvre eut pu se développer sur une plus large échelle sans empêcher la réalisation simultanée de l'œuvre résultant des initiatives capitalistes et des efforts privés que recommandait La Moricière.
         Mais comme il arrive trop souvent en France, une lutte s'était établie entre les deux " systèmes ", les opposant l'un à l'autre ; ce fut celui de La Moricière qui l'emporta. La rivalité entre les deux hommes, attisée plutôt que calmée par leurs partisans respectifs, a fait du tort à l'un et à l'autre.
         On a cru, par exemple, parce que La Moricière connaissait et aimait les Indigènes que Bugeaud ne s'occupait pas d'eux. Il a, au contraire préconisé par de nombreuses circulaires mes moyens de gagner leur confiance et leur affection : " Nous avons, écrivait-il le 17 septembre 1844, fait sentir notre force et notre puissance aux tribus de l'Algérie, il faut leur faire connaître notre bonté et notre justice, et leur faire préférer notre Gouvernement à celui du Turc et à celui d'Abd-El-Kader. "

         Il voulait que Français et Indigènes se rapprochassent peu à peu de manière à ne former qu'un seul et même peuple sous le Gouvernement paternel du roi des Français. Il recommandait :
         - de choisir avec soin les fonctionnaires indigènes,
         - puis de les surveiller,
         - de les diriger,
         - de les éduquer,
         - de les modifier graduellement.


         Il conseillait de traiter la masse des autres avec :
         - bonté, équité, humanité
         " il faut, écrivait-il, écouter leurs plaintes, leurs réclamations, les examiner avec soin, afin de leur faire rendre justice s'ils ont raison et de les punir s'ils se sont plaints à tort. "


         Les bureaux arabes tels qu'il les organisa en 1844, administraient les Indigènes avec une justice et dans les formes qui convenaient à leurs habitudes.
         Les officiers remarquables qui y furent employés eurent souvent à protéger les Indigènes contre les abus des colons trop pressés de se constituer des propriétés ou de recueillir des bénéfices, et se firent, par cela même des ennemis ; mais ils accomplirent une œuvre utile et féconde.

         Bugeaud entendaient associer les Indigènes à l'effort agricole et commercial de l'Algérie et prenait des dispositions pratiques à cet effet.
         Il imposait par exemple aux tribus de participer aux dépenses nécessitées par les grands travaux mettant leur pays en valeur ; il cherchait à les fixer au sol au lieu de leur laisser pratiquer le nomadisme et le campement sous la tente :
         - " Etablissez des villages, leur disait-il, dans une proclamation du 5 juillet 1845,
         - bâtissez de bonnes maisons en pierres et ouvertes de tuiles pour n'avoir pas tant à souffrir des pluies et du froid en hiver, de la chaleur en été,
         - taillez de beaux jardins et plantez des arbres fruitiers de toute espèce, surtout l'olivier greffé et le mûrier pour faire de la soie. "


         Il leur recommandait des charrues moins primitives et s'élevait vigoureusement contre leur tendance à détruire leurs forêts.
         Il savait quelle rancune les Indigènes conservent contre qui les a humiliés ou rançonnés injustement et rédigea à plusieurs reprises des circulaires à ce sujet.
         Il ne voulait pas que ceux venant en ville fussent molestés par les habitants européens, ni que ceux de la campagne fussent exploités par les colons.
         Il veillait à ce qu'aucun abus ne fût commis au point de vue de la responsabilité collective qu'il imposait aux tribus.

         Pour bien comprendre Bugeaud il serait bon de consulter :
         - les circulaires par lesquelles il imposait à ses subordonnés ses idées en les expliquant,
         - les mémoires par lesquelles il essayait de convaincre les hommes du Gouvernement,
         - les lettres parfois longues qu'il écrivait à ses amis,
         - enfin les nombreuses brochures qu'il a publiées.


         Lorsqu'il partit pour la France le 5 juin 1847, il dut éprouver un douloureux serrement au cœur en pensant qu'il n'avait pu mener à sa fin l'œuvre colonisatrice qu'il voulait réaliser après son œuvre militaire.
         Il n'eut pas la joie de voir l'essor rapide de l'Algérie qu'il avait tant aimée puisqu'il fut emporté le 10 juin 1849 par le choléra.
         Il a du moins laissé une trace profonde dans l'histoire du pays dont il reste le plus grand Gouverneur, celui qui a assuré la paix et qui en a entrepris le développement économique.
         Le nom de Bugeaud est, à juste raison, connu même dans les petits villages de France et d'Algérie.

         Le Maréchal a gagné sa popularité auprès des troupiers parce qu'il s'occupait de leur hygiène et de leur bien-être. Il s'arrêtait à l'occasion auprès d'eux pour leur donner un conseil pratique, comme il eût fait dans sa propriété avec ses ouvriers agricoles :
         - Il les obligeait à porter une ceinture de laine par-dessus leurs vêtements pour se préserver de la dysenterie,
         - il réglementait judicieusement les haltes aux jours de grandes chaleurs,
         - il obligeait les officiers à payer de leur personne dans les moments pénibles et donnait lui-même l'exemple malgré son âge.


         Sa popularité s'est matérialisée dans le couplet " la casquette " que les soldats continuent encore à chanter sur une sonnerie de clairon.
         Ce couplet vient de ce que, lors d'une attaque de nuit, il était accouru aux avants postes sans enlever son bonnet de nuit et que, s'en étant aperçu après l'alerte, il avait demandé sa casquette. La demande s'était répétée avec zèle de bouche en bouche : " La casquette, la casquette du Maréchal ! " et depuis lors cette casquette, déjà fort connue des troupiers pour sa forme spéciale, était devenue légendaire.
         C'est un symbole tout à l'honneur du Maréchal qu'entendre chanter dans les rangs de l'armée, 80 ans après l'épisode nocturne :
         As-tu vu la casquette au père Bugeaud !
         - Ce grand soldat,
         - ce judicieux administrateur,
         - cet ardent colonisateur est resté et restera pour les foules " le père Bugeaud. "

Cahiers du centenaire de l'Algérie IV.
Les grands soldats de l'Algérie par M. le général Paul Azan


Les vieux de mon pays.
Envoi de M. Christian Graille

Les vieux de mon pays.
Je les ai vus, ces pauvres vieux,
Un matin de juillet, peut-être,
Quitter des larmes plein les yeux,
Le soleil qui les avait vu naître.

Ils s'en allaient ces pauvres vieux,
Les membres lourds hochant la tête,
Le dos voûté, le front soucieux
Quand d'autres étaient à la fête.
Je les ai vus ces pauvres vieux,

Tassés sur de vieilles valises,
Ne regardant ni derrière eux,
Ni ces toits neufs d'ardoises grises.
Ils s'en allaient ces pauvres vieux,
Vaincus par l'ignoble bêtise

Des renégats, des ambitieux
Qui de discours se gargarisent.
Je les ai vus, ces pauvres vieux,
Trembler ainsi que des fillettes,
Parfois aussi douter des cieux

Devant cette injuste défaite.
Ils s'en allaient ces pauvres vieux,
Doucement vers le cimetière,
Devenir dans le sein de Dieu
Des citoyens à part entière

Christian Missud-Cardinale


Huile d'olive falsifiée.
Envoi de M. Christian Graille

Tizi-Ouzou le 27 juin 1896.

       On sait ce qu'a coûté à l'Algérie la manipulation répétée de ses vins dans les officines de la Métropole ; les affreuses mixtures qui en étaient le résultat ont eu pour conséquence de déconsidérer auprès de nombreux consommateurs nos produits vrais et généreux, tels qu'ils sortaient de nos caves.
       Nous avons pu, grâce au concours de nos confrères de la Métropole, combattre ces pratiques malhonnêtes et restituer à nos vins la véritable place qui leur appartenait.
       L'Algérie ayant vaincu les fraudeurs sur ce point pouvait se croire à l'abri de toute suspicion ; malheureusement il ne devait pas en être longtemps ainsi.
       L'appât du gain a excité d'autres convoitises !
       On a abandonné le trafic du vin, le moyen était trop vieux, mais on a fabriqué de l'huile d'olive " sans olive ".
       Il nous a semblé bon de dénoncer cette spéculation pour en arrêter l'expansion et mettre nos assemblées électives en mesure de protester et de sauvegarder ainsi une de nos plus riches industries algériennes.

       On n'a pas été sans remarquer l'arrivée sur les quais d'Oran, depuis quelque temps, d'environ deux mille fûts d'huile de graines de coton provenant de New-York, et on s'est demandé à quel usage cette énorme quantité de matière grasse pouvait servir.
       Nous allons le dire, afin d'interrompre un commerce qu'il serait bon de tuer dans l'œuf, dans l'intérêt même de l'Algérie.
       Il est utile de dire, tout d'abord que l'huile de coton est presque incolore et sans goût ; ses propriétés fluidiques en font un produit assimilable ; ses usages sont divers : employée dans l'industrie elle donne de bons résultats ; au point de vue de la consommation, elle constitue un produit inférieur dédaigné de tout le monde.
       Mais l'ingéniosité humaine a supplée à sa pauvreté en principes alimentaires et elle a fait d'elle, après une certaine préparation, un produit mixte pour la consommation, mais incapable de résister à un examen sérieux.

       C'est à Salon, en Provence, croyons-nous, que furent faites les premières tentatives que nous allons préciser :
       Il y a quelques dix ans, la réputation de l'huile d'olive de Salon ayant accru la demande au point de la rendre supérieure à la production des propriétaires industrieux, mais peu honnêtes, conçurent le projet d'augmenter les quantités disponibles en créant un produit nouveau.
       L'huile de coton était là et ils s'en servirent.
       Le procédé est, du reste, des plus simples ; il suffit d'opérer des mélanges savamment combinés d'huiles de graines de coton et d'huiles d'olives ou plus exactement encore de faire macérer durant un certain temps des branches et des feuilles d'oliviers dans l'huile de coton pour obtenir un produit assez semblable à l'huile d'olive originelle, mais vicié au point de vue de la délicatesse, du goût et de l'authenticité du produit.

       Il ne faudrait pas à la réputation de l'Algérie cette nouvelle tare, et c'est pour cela que nous signalons une spéculation qui menace de se généraliser. Les huiles d'olives de Tlemcen et de Kabylie ont conquis sur les marchés de la Métropole une juste renommée qui fait partie du patrimoine de la colonie ; la laisser diminuer dans l'intérêt de quelques-uns serait un véritable crime et c'est pour cela que nous intervenons.
       Nous espérons qu'il nous aura suffi de signaler cette situation pour voir le Gouvernement et les Chambres de Commerce prendre des mesures contre une industrie nuisible à la réputation et à l'intérêt de notre agriculture et de notre commerce.

Le petit Kabyle (08-06-1896)
    
 


Un "bouquet de variants" !
Envoyé par M. Hugues

Une nouvelle sérieuse (sic) circulant sur divers forums : le point de vue de l'Agence européenne du médicament sur l'efficacité des vaccins face à l'arrivée des nouveaux variants.

      - Savez-vous que le variant Travolta donne toujours de la fièvre, mais seulement le samedi soir.
       - Alors que le variant Suisse reste neutre, quel que soit le test PCR, antigénique ou sérologique
       - Pour le Bordelais, pas de souci on a les Médoc.
       - Le variant Normand est difficile à prévoir : "p'têt ben qu'oui, p'têt ben qu'non".
       - Cependant que le variant Belge serait redoutable, ça finit généralement par une mise en bière.
       - Ne craignez plus le variant Chinois, il est cantonné.
       - Par contre, le variant SNCF arrivera plus tard que prévu.
       - Contrairement aux apparences, le variant du Bénin serait grave voire dangereux.
       - En ce qui concerne le variant Italien, vous en prenez pour Milan.
       - De son côté, le variant Ecossais se tient à carreau.
       - Apparemment avec le variant Japonais, il y a du sushi à se faire.
       - On parle de l'émergence d'un variant Colombien, mais il semblerait que ce soit de la "poudre" aux yeux.
       - Vivement l'arrivée du variant Jamaïcain, ça va détendre l'atmosphère mondiale.
       - S'agissant du variant Moscovite, c'est un méchant ViRusse.
       - Pour sa part, le variant Corse s'attrape au bouleau et il est transmis par l'écorce.
       - Le premier symptôme du variant Breton, c'est quand on commence à entendre le loup, le renard et la belette chanter.
       - Après le Nutabreizh, le Breizh Cola, le Covibreizh, v'là le variant Breizhilien.
       - Le variant Cévenol, il danse la carmagnole.
       - La variant alpin c'est un véritable chasseur.

       - Le variant Français du Covid existe déjà, mais il est en grève ! Cocorico !



 Le frais vallon. 
Envoi de M. Christian Graille

               C'est sur la place du Gouvernement que stationne la voiture qui, toutes les 2 heures (à 1, à 3, à 5 h ¼) part pour le Frais Vallon.
               On traverse le faubourg de la Cantère pour lequel la municipalité a fait beaucoup depuis quelques années, mais qui encore renferme à côté de beaux édifices neufs, des rez-de-chaussée laids et sales.
               La population espagnole et pauvre y grouille ; cependant vous assisterez à des jeux pittoresques, entre autre au jeu de pomme, en pleine rue.
               Si une balle au ventre de son, lancée par un bras musculeux, vous atteint en pleine figure, ne vous en offensez pas : nos aïeux en ont vu bien d'autre… à Valmy ou à Jemmapes.
               La voiture a tourné, elle se dirige vers les coteaux élevés, étalés devant vous en éventail, entre lesquels s'insinuent des ravins étranglés.
               Les coteaux sont verdoyants et boisés, et des maisons de forme variée les escaladent. Tout au haut, vous voyez un groupe de toits rouges : C'est Bouzaréa.

               Vous avez quitté le faubourg, c'est la campagne. Sauf le fond du décor, le paysage pourtant est triste et sans grande beauté.
               La route est poussiéreuse ; quelques arbres gris ; des eucalyptus et des pins, à droite et à gauche, des chèvres tintinnabulantes.
               L'Oued-Mkacel, à droite, vous apparaîtra par moment comme une brillante couleuvre rampante entre les pins.
               Quelques méandres et vous atteignez le hameau de Climat-de-France ; vous y admirez de gracieuses villas avec des jardins mignons et fleuris, grands comme des cours mauresques ; mais ne vous fixez pas au nom de Climat de France, c'est un des coins les plus ensoleillés et les plus chauds des environs d'Alger.

               Encore un grand coude, vous passez devant une poudrière ; les chevaux en tendant péniblement tous leurs muscles vous traînent jusqu'à un olivier :
               - noueux, tordu, écorché, poussiéreux
               - et qui vit quand même et qui vivra plus que nous mais qui n'a jamais entendu le chant d'une fauvette.


               A partir de là, c'est un enchantement : de l'ombre du frais, un sentier sinueux qui vous révèle une surprise à chacun de ses détours, de rondes taches flottantes de soleil sur le sol, des gazouillements à toutes les branches.
               A gauche, une montagne vous surplombe, et votre vue est bornée, mais à droite, votre regard plonge, d'arbre en arbre, de villa en villa, jusqu'à l'oued qui serpente au fond du ravin abrupt et fronde, puis se relève pour mesurer une haute colline aux allures alpestres, qui monte, qui monte, avec ses demeures humaines et ses feuillages, demeures d'oiseaux, d'étage en étage, jusqu'à la crête couverte de pins.
               Vous, vous croyez enfermés dans un ravin sans issue, dans un vallon suisse sans glacier : qu'importe ! On est là si bien ! Ne peut-on y vivre, y aimer, y mourir ?
               Il ne manque même pas les orangers de Mignon dont les fruits d'or piquent tous les ombrages environnants.

               Quand vous descendrez de voiture, entrez au café maure et prenez un caoua ; en écoutant le parler lent des Arabes, le bruit confus de lac rivière cristalline qui chante sur des rocs ou s'engouffre sous un tunnel, et en contemplant le cercle des hauteurs poétiques qui vous emprisonnent.
               Rêvez ainsi de longues heures, ce sera assez de bonheur pour une fois ; je vous reconduirai là pour vous montrer d'autres curiosités.

Errans.
Les Annales algériennes (11-12-1892)

L'été à Aïn Taya.
Envoi de M. Christian Graille

             Beaucoup de ceux qui vont passer les mois d'été en France ne s'imposant ce coûteux déplacement que pour trouver là-bas ce qu'on ne leur dispense ici que très parcimonieusement c'est-à-dire des distractions :
             - Fêtes,
             - concerts avec vedettes,
             - Music Halls
             - excursions en forêts ou en montagne.

             Mais beaucoup vont aussi là-bas uniquement pour ranimer dans un air pur et vif leur organisme délabré par un climat débilitant.

             Eh bien à ces derniers nous disons avec la plus absolue conviction : l'air d'Aïn Taya vaut l'air de France ; tous ceux qui l'ont habité soit l'été et l'hiver, soit l'été seulement ce charmant village sont unanimes à le déclarer.
             Si un autre témoignage irréfutable celui-là était nécessaire on le trouverait dans la mine fraîche et respirant la santé des originaires du pays :
             - gars vigoureux à l'allure souple et décidée,
             - jeunes filles aux fraîches couleurs,
             - bambins aux joues roses et joufflues.


             Combien de fois avons-nous vu des gens de passage s'arrêter pour admirer cette belle jeunesse qu'on dirait celle d'un village montagnard de France ou de Suisse.
             C'est un fait hors de contestation que si dans les petites villes du littoral :
             - Dellys,
             - Cherchell,
             - Tipaza,
             - Castiglione,
             - Fouka,
             - Bérard,
             - Guyotville,


             Il y a dans la journée même pendant les heures de fortes chaleurs des heures de fraîcheur et de brise marine c'est à Aïn Taya qu'il fait frais et bon toute la journée. Dans cet heureux village où l'ombre est versée par une profusion :
             - de frênes,
             - mélèzes,
             - érables et de
             - magnifiques platanes
             - et où une eau cristalline court en gazouillant dans de petits canaux qui la dispensent aux jardins et aux vergers qui lui font une verdoyante ceinture.

             Dans ce beau village, disons-nous, le sirocco et les moustiques sont à peu près inconnus et l'on y perd jamais ni l'appétit ni le sommeil.
             Pour nous résumer Aïn Taya est l'endroit idéal pour passer l'été en Algérie.
             Vous pouvez y ajouter " pour y passer la vie " nous murmure à l'oreille un enthousiaste d'Aïn Taya qui était venu pour quelques mois seulement dans ce petit éden, s'y est installé et a résolu de ne plus le quitter.

La Cotinière.
(Annales africaines 18-06-1926)


Ephémérides algériennes.
Envoi de M. Christian Graille

4 décembre 1852

             Le chérif, Mohammed Ben Abdallah, soulevait le Sud contre nous.
             Il devint, malgré quelques échecs, tout puissant à Laghouat et le général Pélissier dut attaquer la place. On craignait de retrouver là la résistance opiniâtre de Zaatcha.
             Les révoltés avaient d'ailleurs arrêté net le général Youssouf, venu de toute hâte de Djelfa au premier bruit de la révolte.
             Mais Pélissier avait une précision de conception admirable ; arrivé le 2 il donna aussitôt à la cavalerie l'ordre d'escadronner dans la plaine pour empêcher l'entrée de nouveaux contingents.
             Le 3 il étudia la position et fit enlever la Koubba de Sidi Aïça érigée sur le mamelon appelé Kaf Tisgraria.

             La prise de ce mamelon coûta 72 hommes mais on établit un canon et on détruisit deux tours qui flanquaient l'enceinte.
             Le lendemain 4, dès les premières lueurs du jour, on battit en brèche pendant que Youssouf opérait une diversion par le Nord.
             A 10 heures, un bataillon du 2e zouave guidé par le commandant Morand s'élançait en tête de la colonne d'assaut qui était sous les ordres du général Bouscarein.
             A 11 heures le drapeau des zouaves flottait fièrement au sommet de la Kasbah tandis qu'une fusillade intense et les mille cris d'un combat terrible s'élevait dans la ville, qu'il fallut enlever rue par rue, maison par maison.

             Le chérif s'échappa.
             On dit que sa bravoure n'était pas très grande. Il laissait derrière lui plus de 1.200 cadavres des malheureux qu'il avait fanatisés.
             Nous avions aussi de grandes pertes : le général Bouscarein et le commandant Morand étaient mortellement blessés.
             Pélissier fit glorieusement enterrer nos morts sous la brèche…
             Les Laghouati tués barraient les rues et déjà une odeur de mort couvrait la ville, attirant corbeaux et vautours ; on jeta les cadavres dans des puits qu'on mura le mieux possible afin d'éviter l'infection.
             Les chiens devinrent dangereux pour les Européens.

             En faisant fouiller les jardins on découvrit des femmes, des enfants, on les installa dans la ville qui se repeuple peu à peu et devient très prospère sous notre administration.

M.P.
Les Annales algériennes (25-12-1892)



Le ventriloque et le fermier !!!
Envoyé par Annie


      Un type se perd dans la fôret !!!
      Heureusement il se fait héberger par un paysan qui lui offre le gîte et le couvert. Le lendemain, le type qui voudrait remercier le paysan, constate qu’il n’a pas un rond en poche, mais comme il est ventriloque, il décide de lui faire un petit tour en guise de remerciements.Le type va vers une poule et lui dit :Salut Madame la poule ! Comment ça va ?
      La Poule : - Bonjour Monsieur, ça va bien, il y a juste le paysan qui me pique mes œufs, mais autrement ça va…Le paysan, estomaqué Dedieu!!! vous faites parler les poules ?

       Le type : Oh, pas rien que les poules, regardez
      Il va vers la vache Salut la Vache, comment ça va ?La Vache : Bonjour Monsieur, ça va, il y a juste le paysan qui me tire mon lait tous les matins, mais sinon ça va…
      Le Paysan : Crévindiou !!! les vaches aussi ?

       Le type :Oh tous les animaux, regardez celle-ci. Il s’approche de la chèvre
      Bonjour Madame la chèvre !
      Alors le paysan tout affolé dit au type L’écoutez pas !

       C’est une menteuse
         




Croquis algérien.
Envoi de M. Christian Graille

La diligence

             C'est dans une vieille patache (ancienne voiture hippomobile peu confortable) délabrée, aux couleurs ternies, que je faisais le voyage de Tlemcen à N… lorsque je venais d'Alger pour passer les vacances chez mes parents.
             Elle avait dû, jadis, briller au soleil et arrêter l'œil des passants par les couleurs chatoyantes de ses panneaux de tôle.
             Mais aujourd'hui, hélas ! La pluie, la poussière de nos routes algériennes l'ont bien enlaidie.
             Le soleil a mangé le rouge de ses jolis rideaux qui pendent tristement, déchirés et fanés, devant des cadres vierges de vitres.
             L'eau et le vent arrivent jusqu'aux malheureux voyageurs, cahotés, secoués dans cette vieille diligence aux ressorts distendus, cheminant sur une route pleine d'ornières, tirée par trois chevaux étiques très maigres qui, baissant tristement la tête et secouant tout leur harnais, font entendre un son argentin de grelots.
             Les pauvres bêtes ! Elles reçoivent, sans plus y prendre garde, les coups de fouet du postillon, tant elles y sont habituées depuis plus de dix ans qu'elles font le service !

             Quelle cohue au moment du départ !
             Sur l'impériale, au milieu de marchandises de toutes sortes, sur un amas :
             - de caisses, de ballots, de sacs,
             - quelques Arabes au burnous brun, s'accroupissent à la mode orientale et murmurent doucement quelques versets du Coran.


             Dans le coupé où je prends place, se trouve :
             - un vieux brigadier de spahis qui regagne son corps,
             - un bon prêtre, la soutane râpée, lisant son bréviaire,
             - un chef arabe étalant fièrement sa croix d'honneur sur son blanc burnous,
             - un espagnol en grand " sombrero ", à la mine farouche sous sa cape rejetée sur l'épaule et, enfin, à mes côtés,
             - une jeune fermière, mignonne et gentille au possible qui revient de faire ses achats à la ville.


             Comme le chargement est terminé, le cocher, après le dernier verre d'absinthe absorbé à la hâte grimpe sur son siège.
             - Un claquement du fouet qui cingle les flancs amaigris des chevaux,
             - le tintement des grelots,
             - le grincement des essieux mal graissés et nous voilà en marche.


             Au loin devant nous la route se déroule, blanche et poudreuse.
             A droite et à gauche, les champs s'étendent à perte de vue et pendant huit longues heures, toujours devant nous, cette route s'allongera comme un long ruban de moire.
             Nous verrons jusqu'au soir les champs bordés de figuiers de barbarie, semés çà et là de quelques palmiers qui dressent fièrement leur tête palmée vers l'azur pur du ciel, et jusqu'à la halte de nuit, nous entendrons :
             - le murmure monotone des Arabes priant,
             - le tintement aigu des grelots,
             - le grincement des essieux et
             - les coups de fouet tombant sur l'échine des pauvres bêtes.

M. F. Berthonne.
La Revue Mondaine oranaise (06-09-1903)



Chemins romains.
Envoi de M. Christian Graille

             Vous êtes à El-Biar. Vous, vous dirigez vers l'église, et à droite, un sentier romain avec une plaque indicatrice de Club Alpin, se montre à vous.
             Prenez-le : il est délicieux. Il monte d'abord un peu, bordé d'arbres, à droite et à gauche. A cent mètres environ, il redescend et c'est alors un enchantement. Les oliviers qui le couvrent l'ombragent complètement, forment une voûte verdoyante qui s'enfonce en une perspective ravissante.
             La vue n'est pas étendue : à peine entrevoyez-vous quelque peu de terrain et quelques maisons, d'un côté et d'autre, par les interstices des ramures.
             La promenade a un charme d'intimité et de fraîcheur.
             Vous avez, du reste, l'avantage de marcher sur une voie ferme, bien entendu qui n'a presque jamais ni poussière, ni boue.

             A l'endroit où le sentier va se relever de nouveau il y a latéralement une double ligne sinueuse d'arbres d'un effet très pittoresque.
             On peut difficilement avancer de quelques pas entre ces deux rangées ; on croit se frayer un passage dans quelque forêt vierge.
             Vous sortez de votre niche de feuillage et continuez votre chemin.
             Un peu plus loin le sentier est creusé entre deux murailles de roc jaunâtre et recouvert de tant de frondaisons qu'il y fait sombre en plein jour.
             Appelons-le : le défilé de la nuit.

             Cependant :
- les feuilles disparaissent,
             - la clarté sourit,
             - le paysage s'étend, des vignes, des coteaux verdoyants.
             Vous êtes en route depuis une demi-heure environ lorsque vous apercevez un grand chemin blanc et poussiéreux qui coupe le sentier paisible. C'est la voie départementale de Dely-Ibrahim. Vous êtes à Ben-Aknoun.
             Le petit lycée ouvre devant vous son allée large, ombragée d'arbres très hauts et très robustes. Il doit être doux de se promener en rêvant ou en étudiant, dans cette allée majestueuse, au fond de laquelle se montre à demi l'établissement scolaire, comme une demeure seigneuriale au fond d'un parc.

             En tournant à droite, vous serez en 20 minutes au Petit Château Neuf où vous rencontrerez de nombreuses voitures pour vous ramener à Alger. Vous cheminerez jusque-là entre des prés et des vignes.

Errans.



Bois de Boulogne.
Envoi de M. Christian Graille

             Le service de la Colonne-Voirol nous débarque à l'entrée du bois de Boulogne.
             Un coteau dominant un panorama immense, couvert d'eucalyptus et de plus ; c'est ce qu'on appelle le bois de Boulogne.
             Tout y est délicieux.
             - La vue dont on jouit.
             - Au Nord, les hauteurs du Sahel.
             - La mer sans borne,

             Alger comme un fouillis blanchâtre, enserrant, pressant contre lui, entre les deux grands bras de ses jetées, les eaux calmes de son port garni de navires.
             A l'Est des pentes :
             - boisées, fleuries, verdoyantes.

             Avec des villas aux architectures multiples dégringolant jusqu'au grand carré plan du Champ-de-Manœuvre, puis toujours :
             - le golfe si varié d'aspect, à la vie si diverse suivant les heures et les jours,
             - le cap lointain,
             - la pointe de Dellys plus distante encore et
             - le Djurjura neigeux.


             Au sud et à l'ouest, un paysage plus intime :
             - des arbres,
             - des sous-bois mystérieux,
             - des ravins proches, plantés de vigne.


             Tout y est délicieux :
             - la fraîcheur qui vous pénètre,
             - les senteurs résineuses qui vous montent aux narines,
             - le zéphyr qui met une voix susurrante à toutes les fines aiguilles des pins.


             Promenez-vous en tous sens, au hasard ; ne suivez pas les grands chemins, le bois n'est pas assez vaste pour que vous vous égariez.
             Vous rencontrerez pêle-mêle mille surprises agréables :
             - des fleurs fraîches et odorantes,
             - des champignons et
             - des ombrelles multicolores,
             - des familles faisant la dînette.


             Le soleil qui filtre à travers les rameaux met un rayon sur les lèvres et dans les yeux, et allume d'un rubis éclatant les vins vulgaires.

             Vous verrez fuir quelque jeune fille au costume riant, et vous croirez que c'est une nymphe de ces beaux lieux ; surtout si elle disparaît subitement à quelques détours, dans le nuage rose ou bleu de sa robe. Oh ! Les vierges sous les ombrages ! Tâchez de ne pas heurter du pied quelque dormeur !

             Cueillez des champignons, si vous les connaissez mais ne demandez pas à un de ceux dont c'est le métier et qui sont nombreux au Bois de Boulogne de vous indiquer à quel signe on distingue les vénéneux. Vous les mettriez en fureur :
             " C'est bien le moins, vous dirait-il, que ceux qui sont assez rares pour ne pas m'acheter des champignons s'empoisonnent avec. "

             Si vous gênez les concerts galants des oiseaux, détournez-vous ; fermer les yeux si vous rencontrez un couple d'amoureux. Je ne pense pas que vous vous heurtiez contre des duellistes. Ils ne ferraillent là que les jours de semaine, aux regards des fauvettes mélodieuses qui les déclarent parfaitement ridicules, n'a-t-on pas mieux à faire sous les feuillées que de se couper la gorge ?

Errans.
Les Annales algériennes (12-02-1893)



PHOTOS DIVERSES
Envoi de diverses personnes

BÔNE, PLAGE ST-CLOUD ET LES CABANONS





BÔNE, PLAGES ST-CLOUD ET CHAPUIS




BÔNE, ENTREE PLAGE CHAPUIS





BÔNE, PLAGE ST-CLOUD ET LES CABANONS





BÔNE, PLACE FAIDHERBE





BÔNE, LE VIVIER





GUELMA, HAMMAM MESKOUTINE




BÔNE, PHARE DU CAP DE GARDE





TIMGAD
Brochure de 1951
À LA MEMOIRE DE TOUS CEUX À QUI NOUS DEVONS TIMGAD
RESSUSCITEE ET PARTICULIEREMENT Â CELLE DE
CHARLES GODET QUI LUI CONSACRA SA VIE

TIMGAD
Antique THAMUGADI

Christian COURTOIS Chargé d'enseignement à la Faculté des Lettres d'Alger 

VI
LES FAUBOURGS DE L'OUEST

                 Les faubourgs du Sud se présentent, on l'a vu, sous la forme de deux ensembles encore isolés l'un de l'autre : celui que forment les thermes du Sud et le quartier industriel d'une part, celui qui occupait l'emplacement de la forteresse byzantine d'autre part. Cependant, les fouilles en cours tendent à en reconstituer l'unité. On a pu déceler quelques éléments de la voie qui les traversait et sur laquelle s'amorçait la route de l'Aurès.

Le Capitole au XVIIIe siècle. - Dessin de Bruce.


                 Les faubourgs de l'Ouest, les plus développés de tous, se présentent de façon assez incohérente dans l'état actuel des choses. Des ruines discontinues couvrent les ondulations du plateau, dont le raccord n'est pas toujours facile. Beaucoup d'entre elles ne sont guère identifiables et le caractère même de ces quartiers apparaît mal. Des cuves et des fours voisinent avec de luxueuses maisons. De plus on rencontre des édifices d'époques très différentes. Pour la simple commodité de l'exposé, on décrira ceux qui se trouvent au Sud de la route de Lambèse avant de passer à ceux qui la bordent, puis à ceux qui se trouvent au Nord.
                 Du fort byzantin on aperçoit sur la gauche les hautes colonnes du Capitole vers lequel on se dirigera. On rencontre à gauche et à droite des ruines assez informes. Sur la colline se voient quelques tombes romaines à proximité desquelles subsistent les restes d'un petit TEMPLE, qu'on a cru, sans raison valable, voué à Mercure. A 50 mètres plus au Nord apparaît le CAPITOLE.

                 Cet immense édifice a subi plus gravement peut-être que tous ceux de Timgad les atteintes du temps ; et si les ruines ont acquis une poésie qui leur est propre, il faut quelque imagination pour retrouver une vision approximative du temple tel qu'il fut jadis. Il est curieux qu'un édifice consacré aux divinités majeures n'ait point trouvé place dans le périmètre que Trajan avait assigné à la colonie, mais l'édifice compensait en splendeur sa situation écartée et la triade capitoline, Jupiter, Junon et Minerve, avait à Timgad l'un des sanctuaires les plus considérables de l'Afrique.

                 Le Capitole se compose d'une vaste enceinte ou péribole quadrangulaire de 90 mètres de long sur une largeur qui varie de 62 à 68 mètres. Cette enceinte orientée Sud-Ouest, Nord-Est, s'ouvrait à l'Est sur une large rue dallée qui joint le marché de Sertius au quartier industriel. La façade sur la rue était constituée par un portique de douze colonnes précédé par un petit perron, légèrement décalé par rapport à l'axe de l'édifice. L'architrave portait une inscription qui, quoique mutilée, permet de déterminer qu'au temps des empereurs Valentinien 1er et Valens, et plus précisément entre 365 et 367, les portiques du Capitole qui tombaient en ruine furent restaurés par les soins du Gouverneur de Numidie, Publilius Caeionius Caecina Albinus et du même coup d'identifier sans conteste le monument.

                 Une ou plusieurs portes permettaient de pénétrer dans une vaste cour entourée de portiques, sur lesquels donnaient, semble-t-il, au Nord et au Sud des alignements de cellules. La cour était dallée, mais les fragments qu'on distingue aujourd'hui çà et là n'appartiennent pas au dallage originel. Au milieu de la cour un bloc de maçonnerie indique l'emplacement qu'occupait l'autel. Quant au temple lui-même il s'élevait sur une plate-forme à laquelle on accédait par un escalier de trente huit marches, coupé par un palier. La cella, que précédait un vestibule ou pronaos aujourd'hui disparu, mesurait environ 17 mètres sur 11. Au fond se trouvaient les chapelles des divinités capitolines. Cette cella dont on ne distingue que les substructions était jadis plaquée de marbre. Sauf à l'Ouest où elle s'adossait à un mur, elle était entourée de colonnes : huit de chaque côté, six en avant. Deux de ces colonnes ont été relevées et témoignent de la majesté de l'édifice. Les fûts cannelés atteignent une douzaine de mètres et les chapiteaux corinthiens qui les couronnent sont de grandeur d'homme. On regardera ceux qui gisent à terre. Ils paraissent, eux aussi, plus grands morts que vivants.

                 On est presque tenté d'imaginer un dialogue entre les ruines du Capitole, symbole du paganisme vaincu, et les médiocres constructions chrétiennes qu'on aperçoit à une centaine de mètres plus à l'Ouest et qu'on a appelées malencontreusement le monastère de l'Ouest.
                 Ces ruines, que l'on gagne en passant à côté d'une petite EGLISE à trois nefs, construite à très basse époque avec des éléments pris à d'autres monuments n'ont à vrai dire rien d'un monastère. C'est un ensemble assez confus d'édifices énigmatiques, élevés peut-être sur l'emplacement de la première nécropole de Timgad. Il est vain de chercher à les identifier si ce n'est quelques maisons et surtout la CATHEDRALE DONATISTE, et ses dépendances.

                 La cathédrale est un édifice de plan basilical, long de 63 mètres et large de 22. Elle est divisée en trois nefs par une double rangée de colonnes gemmées, de provenances diverses et dont quelques-unes seulement subsistent encore. Le chevet est marqué par une abside. Du côté opposé, un atrium carré, entouré par vingt et une colonnes, était orné d'un bassin central dont on voit les restes. On pénétrait de l'atrium dans la nef centrale par trois entrées dont la principale était précédée d'un étroit perron. Cette église ne présente donc, on le voit, aucune particularité notable quant à son plan et l'état de conservation ne permet guère de s'en représenter l'élévation ; mais il convient d'en remarquer l'orientation exceptionnelle : l'entrée est au Nord-Ouest, presque au Nord comme dans l'église de la nécropole et non franchement à l'Ouest comme il est de règle.

                 Mais le véritable intérêt de cette église n'est point d'ordre architectural ; il est d'ordre historique. Latéralement au mur oriental, se trouve en effet une chapelle de 26 mètres sur 17, orientée perpendiculairement à la précédente et terminée comme elle par une abside dont il ne subsiste que la crypte. Il semble que cette chapelle, dont une construction postérieure a défiguré l'aspect, s'ouvrait directement sur la grande église. Or, des fouilles récentes ont révélé dans l'angle formé par le mur de la cathédrale et le mur Nord de la chapelle l'existence d'une petite MAISON à péristyle, et une bonne fortune nous a conservé une inscription en mosaïque qu'elle contenait et qui est aujourd'hui au Musée. Cette inscription fait connaître que la maison était l'œuvre de l'évêque Optat qui fut, on l'a dit, le leader du donatisme à la fin du IVe siècle. L'étroite liaison de la maison, de la chapelle et de l'église mène à penser que l'église a pu être, comme la maison, construite par Optat, l'ancienne chapelle étant devenue trop petite pour recevoir la masse des fidèles qu'il avait gagnés. Nul doute, en tous cas, que l'on soit ici au cœur même du quartier donatiste et que l'église - la plus vaste de Timgad - ait été un temps la cathédrale des schismatiques.
                 Un autre monument, moins évocateur certes du point de vue historique, mais d'une toute autre qualité artistique, ne manquera pas de retenir l'attention : c'est le BAPTISTERE. Cet édifice auquel était attenante, comme de coutume, une petite installation balnéaire est situé à l'Ouest de l'atrium auquel il est contigu. Une construction moderne en assure la protection. Les éléments architecturaux, souvent assez bien conservés dans les édifices de cette sorte, particulièrement à Djemila, ont ici complètement disparu. Mais la décoration en mosaïque, habituellement fragile, est au contraire dans un miraculeux état de conservation. La cuve baptismale, de forme hexagonale, était surmontée d'un dais que supportaient des colonnes placées à chaque angle de la cuve, sur un rebord malheureusement mutilé. On y descendait par trois marches couvertes de mosaïques à décor géométrique : zigzags sur les parois, carrés interposés dans le fond. Des chrismes décorent les angles. Mais ce ne sont pas seulement les mosaïques de la cuve qui ont subsisté, ce sont celles de la salle tout entière et qui sont d'ailleurs d'un style assez différent. Ce sont ici des feuillages et des fleurs stylisés qui se développent en amples rinceaux aux départs de quatre vases situés en angle et qu'enserre une étroite bordure. Sans doute le baptistère de Timgad n'évoque-t-il pas comme celui de Djemila l'émouvante procession qui accompagnait le néophyte à sa naissance véritable. N'étaient les chrismes, on oublierait presque la destination de la cuve où il descendait comme Jésus avait fait dans l'eau du Jourdain. Mais, à défaut d'une émotion religieuse, on a la joie toute profane que crée l'enchantement des couleurs et des lignes qui entraînent les yeux et les perdent dans les attraits de leurs multiples détours.


                 Laissons les bâtiments qui enveloppent ceux qu'on vient de décrire et dont l'interprétation ne peut guère être, pour l'instant, répétons-le, qu'un aimable exercice d'imagination. On se dirigera vers l'arc dit de Trajan qu'on aperçoit à gauche, entre des édifices ou des groupes de ruines presque contigus les uns aux autres mais confus et au total d'intérêt assez faible. On trouve d'abord à mi-chemin entre le quartier donatiste et le Capitole un établissement thermal auquel on a donné le nom de THERMES DU CAPITOLE, mais qui est sans rapport aucun avec cet édifice. Il ne présente pas de caractères particuliers, non plus que les THERMES DE L'OUEST, situés à 50 mètres plus au Nord. On poursuit par la voie qui rejoint la route de Lambèse. Un peu à gauche une vaste MAISON, avec bains privés, a livré la mosaïque de salle à manger qui orne aujourd'hui la grand'salle du Musée.

                 L'arc dit de Trajan marque la limite entre la colonie primitive et les faubourgs de l'Ouest. Le decumanus maximus, ou si l'on veut la route de Lambèse, oblique sensiblement vers le Nord-Ouest. Il ne conserve pas la quasi-horizontalité qu'il avait en traversant la partie occidentale de la ville. Ici la pente est rude et l'on aperçoit en contre-bas la porte qui marquait la limite des faubourgs au-delà d'une longue théorie de piliers et de colonnes.

Le Temple du Génie de la Colonie

                 Tout de suite à droite, se trouve le TEMPLE DU GENIE DE LA COLONIE auquel étaient d'ailleurs associées d'autres divinités. Cet édifice, que l'épigraphie a permis d'identifier, est de dimensions modestes et de construction médiocre, mais de proportions charmantes. On accède par un perron à une cour quadrangulaire, mais à laquelle diverses circonstances et particulièrement l'oblicité de la route ont imposé un tracé asymétrique. L'œil n'en est pas pour autant blessé. La cour était bordée du côté de l'entrée et sur ses faces latérales par des portiques à colonnes. Au milieu se trouvait un autel dont il ne reste que le soubassement. Le temple proprement dit, situé sur la face Nord de la cour, se compose d'une chambre rectangulaire ou cella de 7 mètres sur 8 mètres 50, précédée d'un péristyle formé de quatre colonnes corinthiennes auquel conduisait un escalier de seize marches. De chaque côté de la cella, mais au niveau de la cour, deux petites chambres dont la destination reste indéterminée s'ouvraient sur les portiques.

                 Juste en face du temple, bordé vers l'Est par la rue dallée qui mène au Capitole, se trouve le MARCHE DE SERTIUS. Cet édifice mérite l'attention à cause de son élégance, mais aussi parce que c'est, avec le marché de Cosinius à Djemila, l'un des plus caractéristiques de son espèce. L'entrée principale donnait sur la route de Lambèse. Mais, plus soucieux de symétrie que celui du temple du Génie de la Colonie, l'architecte a écarté la difficulté que soulevait la déviation de la route en ménageant en avant de l'édifice une place en forme de trapèze. Une entrée latérale s'ouvrait à l'Est sur la voie du Capitole.




                 La façade était bordée par un portique formé par six colonnes. La porte centrale était flanquée par deux statues. A droite, celle du chevalier M. Plotius Faustus Sertius, à gauche, celle de sa femme Cornelia Valentina Tucciana Sertia. A l'intérieur du marché, deux statues analogues représentaient les mêmes personnages. Les inscriptions que portent les bases - et d'autres - nous apprennent que l'édifice était un marché, un macellum, et que c'est à Sertius qu'on en doit l'érection (début du IIIe siècle). On sait aussi que c'est après la mort de Cornelia que Sertius, mari fervent ou veuf abusif, avait eu souci de l'embellir encore en l'ornant de la statue de la défunte et de la sienne propre. Si vraiment il faut reconnaître Cornelia dans une statue mutilée qu'on voit au Musée, on peut douter du bonheur de cette initiative.


                 Le marché de Sertius se présente sous la forme d'un vaste rectangle de 38 mètres sur 25, que complète, du côté méridional, un demi-cercle dont le diamètre est presque égal à ce côté lui-même. Sept boutiques sont réparties autour de cette sorte d'abside ; six autres en occupent le côté opposé, c'est-à-dire celui de la porte principale. La majeure partie de l'édifice est constituée par une cour bordée de portiques dont on voit encore quelques colonnes et au milieu de laquelle se trouvait un bassin carré. Le nom de Sertius figurait encore sur l'architrave de la colonnade.

                 Rien n'est plus évocateur de la vie romaine que ces étroites boutiques (tabernae) fermées par des dalles de pierre sur lesquelles les marchands étalaient les produits qu'ils offraient au chaland. Elles reposent sur des dalles verticales et il fallait passer dessous pour pénétrer dans la boutique. Aucune trace de clôture. C'était l'édifice tout entier que ton fermait pendant la nuit.

                 Du marché de Sertius, on gagne une sorte de terrasse sur laquelle s'ouvre un édifice dont l'entrée principale, précédée d'un portique tétrastyle, donne sur le decumanus. Cet édifice est peut-être le MARCHE AUX VETEMENTS. C'est une salle rectangulaire de 24 mètres sur 10, dallée en calcaire bleu, sauf au centre où le dallage forme un damier de porphyre rose et de calcaire noir. Du côté Sud, il est complété par un petit hémicycle, surélevé de deux marches et qui abritait une statue de la Concorde. Une inscription nous apprend qu'il fut construit par le même Publilius Caeionius Caecina Albinus qui restaura les portiques du Capitole, c'est-à-dire aux temps de Valentinien I" (364-375) et de Valens (364-378). A l'angle Sud-Ouest de ce monument se trouve un ETABLISSEMENT THERMAL situé au milieu de constructions assez confuses parmi lesquelles on distingue cependant des maisons d'habitation.


La fontaine de Liberalis et l'arc dit de Trajan

                 Si l'on poursuit sur la route de Lambèse, on rencontre, sur la gauche, une construction octogonale, dont un bassin épouse la forme et qui était la plus belle FONTAINE de la ville. La masse centrale du monument était ornée de colonnettes et vraisemblablement de statues. P. Tullus Liberalis, qui en dota la colonie, sut se montrer libéral comme son nom le prédisposait à l'être. Il lui en coûta 32.348 sesterces, à peu près 8.000 francs or. A 150 mètres environ au Sud-Ouest du baptistère, on a retrouvé les bassins de décantation que traversait l'eau destinée à la fontaine.

                 La limite du faubourg Ouest est à une centaine de mètres plus avant. Comme sur la route de Mascula, elle est marquée par une PORTE triomphale élevée sous Marc Aurèle et Lucius Verus, plus précisément entre 166 et 169. C'était une porte à une seule baie, formée de deux massifs de maçonnerie appuyés par des avant-corps qui supportaient des colonnes corinthiennes. De cet ensemble; il ne subsiste que les bases et les colonnes grêles qui se détachent sur l'horizon.

                 Du côté Sud de la route, entre la fontaine de Liberalis et la porte du faubourg Ouest, se trouve un groupe de ruines assez considérable. Les plus notables sont un édifice à portique de belle apparence qu'on a pris longtemps pour un entrepôt et qui est en réalité, comme l'ont montré des fouilles plus poussées, une vaste MAISON particulière, jadis richement décorée ; un ETABLISSEMENT THERMAL, sans intérêt particulier d'ailleurs, et enfin une huilerie mal conservée.



                 Ce n'était que la ville des vivants qui s'arrêtait à la porte du faubourg Ouest. La loi romaine interdisait, on le sait, les inhumations à l'intérieur des villes, mais c'est à leur limite que commençaient les nécropoles, disposées assez généralement, en Afrique comme partout, le long des routes. Il faut d'ailleurs noter que les limites ne furent pas intangibles et qu'à basse époque les prescriptions légales ne furent plus observées. A Timgad même, on a retrouvé des tombes chrétiennes jusqu'au coeur de la ville de Trajan, à la maison de Januarius par exemple. A proximité de la maison signalée plus haut un petit cimetière a livré quelques unes des rares inscriptions chrétiennes de Timgad. Cependant, la règle est en général valable et c'est à 200 mètres environ de la porte du faubourg Ouest qu'a été découverte la plus importante des NECROPOLES PAIENNES connues jusqu'ici. Elle comprend des tombes à inhumation et des tombes à incinération, remarquables par leur diversité. A côté des tombes à caissons et à stèles, ornées de reliefs plus ou moins grossiers, on rencontre déjà les tombes à tuiles affrontées, analogues à celles de la nécropole chrétienne.
                 A la limite du cimetière païen, se sont élevées, à une époque qu'il ne semble pas possible de préciser, une EGLISE chrétienne et diverses constructions afférentes.

                 L'ensemble était précédé d'un portique de six colonnes encadré par deux petites chambres. L'église elle-même est divisée en trois nefs, par deux rangées de quatre colonnes qui proviennent, ainsi que les chapiteaux qui les couronnent de divers édifices antiques. La nef centrale se termine par une abside bâtie au-dessus d'un crypte. De chaque côté de l'abside une petite salle, celle de droite également bâtie sur crypte. Presque au milieu de la nef, une fosse contient un sarcophage. Du côté Nord, l'église est flanquée d'une cour qui a servi de cimetière.

                 De la porte du faubourg Ouest, on aperçoit, à gauche, un important ensemble de ruines situé presque à l'angle de la ville de Trajan et dont l'élément le plus remarquable est une EGLISE à laquelle ses dimensions cependant assez modestes (39 m. X 17) ont valu sans raison valable le nom de cathédrale. Cet ensemble est relié au decumanus maximus par une voie qu'on rencontrera sur la gauche à une centaine de mètres en avant de l'arc dit de Trajan. L'église est un édifice à plan basilical, divisé en trois nefs par deux rangées de dix colonnes géminées. On gagnait l'abside surélevée et jadis pavée de mosaïques par deux escaliers latéraux aujourd'hui disparus.

                 Entre eux, un espace rectangulaire marque sans doute l'emplacement d'un autel en bois. C'est en somme la disposition générale de la cathédrale donatiste. Mais deux différences sont essentielles. D'abord l'absence d'atrium, ensuite l'existence, de part et d'autre de l'abside, de pièces annexes qui communiquaient avec les bas côtés : celle de droite, de forme carrée et de dimensions modestes, celle de gauche plus grande et terminée du côté gauche par une abside. Quant aux constructions qui environnent l'église, elles sont quelque peu énigmatiques à l'exception du baptistère, situé en avant de l'édifice et qui communiquait avec la nef principale.

                 Une autre pièce est symétrique à ce baptistère, si bien que la porte de l'église est à l'extrémité d'un couloir. On comprend mal le rôle de l'étroite cour à portique (3 mètres 70 de large) qui borde l'édifie tout au long du mur méridional, et pas davantage celui de la vaste cour (33 mètres X 18) entourée de portiques qui se trouve à l'Est de l'église. La date de la construction ne peut guère être fixée. Notons cependant que la qualité en est médiocre et que les éléments sont en partie prélévés sur des monuments antérieurs. A une quarantaine de mètres au Nord-Ouest de la basilique, on aperçoit un ensemble de bâtiments dans les-quels on reconnaît une vaste MAISON.

A SUIVRE


COTES
Par M. Bernard Donville
   
            Bonjour à tous, Bonjour les fidèles,

            Chers amis,
            Nous arrivons dans une zone où il faut un bon accent, nous arrivons à ORON...
            Mais d'abord la baie d'Arzew (pour certains d'Arzou) ancien site phénicien de pourpre et devenu le moderne site d'exportation du gaz d'Hassi R'Mel que nous avons amené à la côte ( toujours aussi serviables !).
            Nous survolons Oran bloqué à l'ouest par le Murdjadjo au-delà duquel nous entrerons dans la baie de Mers el Kébir. Et enfin on va taper le bain à Ain el Turk ! C'est pas sympa tout çà ?

            Puis nous voilà à la dernière étape de ce long voyage le long de nos côtes. Le contexte est moins connu car moins occupé voire moins habité ; mais je ne veux pas faire injure à vous ôtres oranais de ne pas être attirés par la mer ! Profitez de ce dernier envoi pour regretter, une fois de plus, ce que nous avons perdu.
            J'espère que ce que je vous ai fait éventuellement découvrir à illuminé vos souvenirs.

            Dans 15 jours, si vous voulez continuer avec moi, j'attaquerai une longue série que vulgairement j'avais intitulé dans mes conférences :
            "Comment qu'c'était,comment qu'c'était devenu"
            Soit "Ce que l'on avait trouvé à notre arrivée et ce que l'on a laissé à notre départ."
            Chacun pourra faire le bilan et le faire partager autour de vous, si besoin est...
            Amitiés, Bernard

Cliquer CI-DESSOUS pour voir les fichiers

Cotes 10 Oran

Cotes 11 Oranie

A SUIVRE



Re(con)naissance
Par M. Marc Donato

          Ah ! Covid, je ne te remercierai jamais assez ! Quel bonheur tu m'as procuré !
          L'autre matin, c'était le 17 mai, premier jour du troisième déconfinement, je passais en voiture sur le boulevard et je dus regarder à deux fois pour appréhender un spectacle auquel je n'étais plus habitué depuis des semaines. Le temps de réagir et c'était bien ça, les terrasses des cafés étaient pleines à craquer. Depuis ce matin-là, les bars et les brasseries avaient l'autorisation de recevoir du public. L'odeur de l'expresso se frayait un chemin à travers la vitre ouverte, les babils des consommateurs parvenaient jusqu'à mes oreilles encore sensibles en partie… Quelle joie tout à coup ! Depuis des mois, les jours s'étaient alignés, moroses et silencieux sur ces trottoirs vides de tables et de chaises. Mon esprit avait imprimé ce spectacle du néant et il lui fallait rembrayer sur la réalité du jour. Dans Covid, il y a " vide " ; vide, comme les terrasses des bars, vide, comme les rues de la ville, vide, comme les boutiques du centre-ville, vide, ma tête après ces mois de pandémie qui nous avaient finalement habitués à ces déserts urbains.

          Mais, ce matin de déconfinement, avec ce spectacle qui nous était devenu étranger, je ne saurai dire combien je te remercie, Covid, car dans Covid, il y a aussi " vie ". Même que ce matin à la tévé, j'ai vu Manu et Jeannot attablés ; oui, notre président et notre Premier ministre. Comme ça, tout naturel ! Oh ! seuls, certes, mais à distanciation respectable, un groupe de figures pas tibulaires mais presque (Ah ! Coluche) veillaient au grain.

          J'imagine que Jeannot-Légitimus était passé chercher Manu-Bourdon à l'Élysée, comme dans un sketch des Inconnus dont je ne peux - et c'est dommage - rendre ici l'accent banlieusard :

          - Manu, tu descends,
          - Et pour quoi faire ?
          - Bof, j'sais pas moi, moi, descends.
          - Et pour quoi faire ?
          - Écoute, on va voir, viens, descends...
          - Et pour quoi faire ?
          - On va boire un café…
          - Je vais demander à Brigitte. Mais non, moi, Brigitte elle veut pas, j'y vais pas…
          - Putain ! Il est naze, lui, il a peur de Brigitte, lui…


          Finalement, ça colle bien avec notre président jeune qui tape à tout va dans le jeunisme. Après la vidéo à Saint-Barth et le geste obscène, voilà-t-y pas que notre président jeune s'affiche avec Mc Fly et Carlito. Oh ! Je vous entends de là :
          - Ouais, c'est parce qu'il veut s'attirer les jeunes… C'est parce qu'il prépare l'élection de 2022…
          Vraiment, il faut avoir l'esprit tordu pour penser cela : un président jeune, ça voit jeune. J'ai pas dit juste, j'ai dit jeune ! Et tant pis pour les vieilles badernes de plus de 40 ans !

          Finalement, ils étaient là, attablés comme de vieux amis qui ne s'étaient pas rencontrés depuis des mois au bistrot où ils avaient leurs habitudes.

          - Alors, Manu, un petit noir ?
          - Ah ! Jeannot, plus bas, on pourrait nous entendre et nous traiter de racistes.
          - Pour moi, ce sera un déca
          - C'est ça, des cas, vous avez l'habitude…


          Et les terrasses de ma ville avaient retrouvé leurs consommateurs.
          La vie, disais-je. La vraie vie avec ses bistrots, ses magasins… mais aussi la vie avec toi, Covid. Un président de la République et un Premier ministre au bistrot. Normal, non ?

          Merci encore à toi, Covid, mais je me méfie de toi, on commence à te connaître. Parti par la porte, tu reviens par la fenêtre et tu es bien capable de nous faire fermer ces terrasses encore une fois !
Marc Donato - 17 mai 2021


France-Algérie :
Quelle(s) histoire(s)?

par M. Boualem Sansal
Envoyé par M. JP Lledo

        Article paru aux Editions de l'Arche
https://www.journaux.fr/larche_news-opinions- politique_actualite_248936.html

"L'homme libre est celui qui n'a pas peur d'aller jusqu'au bout de sa pensée" Léon Blum


        Il semblerait que l'Histoire doive toujours s'écrire en trois phases, éloignées les unes des autres dans le temps, et se terminer par des points de suspension. Dans la première période, elle rassemble ce que tout le monde sait de la dite histoire ou croit savoir, pour l'avoir vécue ou pour avoir approché ceux qui l'ont vécue ou qui l'ont sue par d'autres, au fil du temps, suivant une chaîne de transmission aléatoire, comme tout en ce bas monde. Â ce stade, on a des matériaux en vrac, de bonne ou de mauvaise qualité, on ne sait, et pas de plan ni d'outils pour construire un édifice dédié à tel ou tel usage collectif. L'épisode suivant est le temps des historiens, qui viennent mettre de l'ordre dans ces récits, trier, élaguer, documenter ce qui peut l'être et tenter de trouver une logique des faits, à partir de quoi ils tireront une théorie, une conviction, qui peut-être deviendra vérité d'évangile, je veux dire quelque chose qu'on enseigne à l'école, le lieu où se fabriquent la nation et son peuple. La troisième phase verra arriver d'autres récits, d'autres documents, des vrais et des faux, qui changeront la perspective, provoqueront des schismes, peut-être des guerres, qui produiront d'autres histoires et infailliblement des guerres entre historiens, dont on sait qu'elles ne finissent jamais, d'où les points de suspension. En histoire, il ne faut jurer de rien. Le dernier survivant, seul, saura le mot de la fin...

        L'exemple type de ces constructions problématiques est l'histoire entre l'Algérie et la France. Français et Algériens ont ceci de commun qu'ils ne connaissent pas leur histoire commune. Les Algériens savent par cœur la version algérienne officielle et les propagandes qui l'accompagnent jour après jour, et les Français ne savent, semble-t-il, que la version française courante, faite de clichés, de dénégations, de non-dits et de quelques bribes de vérité.
        Il semblerait que les présidents algérien et français, Tebboune et Macron, aient voulu y remédier pour le bien commun, en vérité pour leur bénéfice, l'un pour se donner une légitimité qu'il n'a pas et ne peut avoir puisque imposé par l'armée, l'autre pour conserver celle qu'il a obtenue par défaut et qu'il risque de perdre à la prochaine élection. Tout chétifs qu'ils sont, ils ont compris que, contrôler l'histoire, c'est contrôler les affects, et, ça, ça aide, en politique.
        Ils se seraient dit au téléphone : "Aidons-nous, écrivons l'histoire commune qui nous arrange et réconcilions nos pays sur cette base, nos électeurs nous en seront reconnaissants. " Ils ont missionné Benjamin Stora et Abdelmadjid Chikhi à l'effet de leur en fournir le mode opératoire. Le premier a remis son rapport au président Macron, et celui-ci l'a rendu public.
        " Bof ! " Ai-je cru entendre, ici et là-bas. Du second, nous ne savons rien, a-t-il écrit quelque chose, ou l'a-t-il seulement soufflé à l'oreille de son chef ? Nous ne savons donc pas ce que celui-ci pourrait apporter à l'humanité assoiffée de vérité.
        Mais, si j'en juge par le seul rapport Stora, je crois qu'on est plus loin que jamais de l'objectif de réconcilier les mémoires, car il ne traite d'aucune manière de ce Que j'appelle les histoires à ne pas dire, pour reprendre le titre du film de Jean-Pierre Lledo. Dans l'histoire algéro-française, il y a ce qui se dit et, surtout, il y a ce qui ne se dit pas, ne peut passe dire, ne sera jamais dit, et, sans réponse à ces questions, point de réconciliation. Ce sont ces histoires que je voudrais exposer ici. J'en ai choisi cinq, les plus signifiantes selon moi.

        Première histoire à ne pas dire. Elle renvoie à la question: l'Algérie existait-elle avant sa conquête par la France, en juin 1830 ?
        Poser la question à Alger est un blasphème. Ne le faites pas. En plus de vous lapider, on vous enverra dire que l'Algérie existait bel et bien, et cela depuis sa libération de la jahiliyya, les ténèbres de l'ignorance, par les cavaliers d'Allah, venus d'Arabie lui apporter les Lumières de l'Islam. Dire que ce vaste territoire sans frontières était peuplé par d'innombrables tribus berbères, animistes, polythéistes, chrétiennes ou judaïsées, et de tribus juives, chacune reine en ses terres, serait une deuxième injure.
        On vous dira que l'Islam a uni et arabisé les unes et imposé la dhimma, conformément à la sainte loi, aux autres. Rappeler que Berbères et juifs se sont coalisés sous la houlette de la reine juive Kahina pour bouter les Arabes serait une autre impardonnable insulte. Dire que le pays a ensuite été conquis et vassalisé par l'Empire ottoman, aux VIème siècle, est une autre vilaine injure, les Ottomans sont des musulmans, des frères, donc, que les Algériens avaient expressément invités à s'installer chez eux pour les défendre contre les expéditions militaires des chrétiens, chose qu'ils ont su faire jusqu'en 1830,date à laquelle la France a traîtreusement envahi la terre sacrée d'Algérie. Dire que l'Algérie sous sa forme et ses frontières actuelles est une création française est une autre provocation.
        On vous dira que la France n'a rien construit, elle a seulement détruit.
        La conquête s'inscrivait dans un plan chrétien visant à arracher la Méditerranée à l'Islam, à l'Empire ottoman. On comprend pourquoi le calife Erdogan ne rate jamais l'occasion de dénoncer la France pour ses crimes en Algérie. Ce sujet ne doit donc en aucun cas être abordé, ce que Benjamin Stora a évité de faire. Qui osera dire que la France a libéré les Algériens, Berbères, juifs et Arabes, de la terrible domination turque ? Le hic est que la France n'est pas venue pour ça, elle est venue prendre sa place et faire aussi mal.

        Deuxième histoire à ne pas dire. Elle renvoie à la question : de qui, les Français ou les Algériens, l'émir Abdelkader est-il le héros ?
        Le jeune Abdelkader, élu émir par sa tribu, a pu fédérer quelques tribus de l'Ouest algérien, provinces de la régence ottomane d'Alger, et amené un combat héroïque contre l'armée française six années durant, de 1831 à 1837,date à laquelle il signe avec le général Bugeaud le traité dit " de la Tafna ", qui lui donne le contrôle de Mascara, sa région natale, étendue jusqu'à Oran et au Titteri, en échange de la reconnaissance par lui de la souveraineté impériale de la France sur le pays. Après dix années de paix, durant lesquelles l'émir fonde un État sur son territoire, avec pour capitale le village de Tagdempt, la guerre reprend du fait de la France, qui a renié sa parole, jusqu'en 1847,date à laquelle, épuisé, acculé, trahi, l'émir se rend à la France avec la promesse qu'il lui sera permis, ainsi qu'à sa smala et à ses fidèles, d'aller vivre au Proche-Orient. Trahi une nouvelle fois, il sera détenu en France, notamment dans le château d'Amboise. Grâce au soutien d'éminentes personnalités françaises et étrangères, Napoléon III le libère en 1852, lui accorde une pension à vie (qui sera versée à ses descendants jusque dans les années2000) et lui permet d'aller vivre à Damas, sous le serment de ne jamais fomenter de troubles en Algérie. Il tint parole.

        Son action à Damas en faveur des chrétiens persécutés par les musulmans lui vaut une reconnaissance mondiale.
        Napoléon III augmente sa pension, lui décerne la grand-croix de la Légion d'honneur, ainsi que le titre d'Ami de la France, et l'invite à Paris, où il reçoit un hommage extraordinaire, officiel et populaire. Il reçoit mille autres honneurs, venant du Royaume-Uni, de la Grèce, de la Turquie, des États-Unis, qui donneront son nom à une ville (Elkader, dans l'Iowa), du pape Pie IX, etc. Le Grand Orient de France lui ouvre ses portes et lui décerne le titre de grand maître. Si, à Alger, vous racontez ainsi la geste de l'émir Abdelkader, vous risquez gros. Vous auriez l'air de démontrer que l'émir est un héros national français.
        Son image en Algérie est ambivalente. Officiellement, il est le combattant, le commandeur des croyants, l'ennemi irréductible de la France, le fondateur de l'État algérien moderne, mais cela est dit du bout des lèvres. Une place et un lycée portent son nom. Point. Ni commémorations, ni livres, ni films, ni débats. Rien. En secret, on lui reproche d'avoir signé la paix avec la France coloniale et reconnu sa souveraineté sur le pays, et d'avoir été honoré par la France et la chrétienté comme jamais président algérien ne l'a été au milliardième depuis l'indépendance, d'être soufi et franc-maçon. L'image de l'émir brille sur le monde mais jette une ombre sur l'Algérie des dictateurs calamiteux qui l'ont colonisée.

        Troisième histoire à ne pas dire. Celle-là, l'Algérie officielle ne la pardonnera jamais à la France, repentance ou non.
        Elle a osé commettre un triple crime : contre l'islam, contre les musulmans, contre l'honneur. Parle décret Crémieux, en 1870, elle a attribué d'office la citoyenneté française aux Israélites indigènes d'Algérie, les sortant de leur dhimma séculaire pour les mettre au-dessus de leurs maîtres, les musulmans, soumis quant à eux au régime dégradant de l'indigénat. Eux ne pouvaient devenir français qu'à leur demande et sous réserve de satisfaire à plusieurs conditions, draconiennes. Chose impossible car un musulman ne peut se soumettre à un chrétien et quémander sa nationalité. Dans le même temps, influencée par les saint-simoniens, la France affichait un tropisme arabe qui a fait rêver Napoléon III d'un empire arabe ami de la France, de Rabat à Bagdad, et d'une Méditerranée franco-arabe. Le tropisme n'est pas mort, il continue d'inspirer le Quai d'Orsay.

        Quatrième histoire à ne pas dire. L'abandon des pieds-noirs et des harkis à leur sort.
        En la matière, la France a fait montre d'un cynisme qui, de nos jours, la ferait condamner pour génocide et crime contre l'humanité par la justice internationale. Elle a livré les premiers à la misère et au mépris, et les seconds à la mort. Qui osera en parler pour apaiser les douleurs des uns et des autres et leur permettre d'être eux aussi acteurs de la réconciliation recherchée ?
        Comme la France a reconnu l'assassinat par l'armée française de Maurice Audin et d'Ali Boumendjel, elle doit reconnaître sa responsabilité dans la fusillade de la rue d'Isly, à Alger, contre des pieds-noirs, et l'Algérie doit reconnaître sa responsabilité dans les massacres de pieds-noirs d'Oran commis contre des éléments du FLN et des harkis à travers tout le territoire. La réconciliation est pour tous ou pour personne.

        Cinquième histoire à ne pas dire. Les DAF, ou la guerre des DAF et des Malgaches.
        Il n'est jamais sûr qu'une guerre officiellement achevée le soit réellement. La guerre d'Algérie, close par les accords d'Evian, s'est poursuivie en trois guerres secrètes, qui ont fait et font encore aujourd'hui leur comptant de morts et de destructions.
        La première est la guerre des clans pour le contrôle du pouvoir et l'accaparement des richesses. Les clans sont nombreux et il s'en crée de nouveaux en toute occasion, mais tous se rattachent, plus ou moins, aux trois clans historiques, nés durant la guerre d'Algérie : le clan dit " du Bec de canard ", le clan des DAF et le clan des Malgaches.

        Pour faire court, le premier clan, appelé aussi le " clan BTS " (du fait que les dirigeants algériens sont presque tous originaires du triangle formé par les trois principales villes du Sud-Est algérien, Batna, Tébessa et Souk-Ahras), appelé aussi le " clan d'Oujda ", ville du Maroc où était stationné l'état-major de l'Armée de libération nationale (ALN, bras armé du FLN), a été créé par le duo Boumediene-Bouteflika, qui, à eux deux, ont régné trente-deux ans sur le pays.
        Le second clan, le clan des DAF, s'est formé autour d'officiers algériens de l'armée française qui l'avaient opportunément désertée la veille de l'indépendance pour rejoindre l'ALN, d'où leur nom, les " Déserteurs de l'armée française ". Avec le temps, ce clan, secrètement soutenu par la France (il se dit que ces officiers auraient démissionné avec armes et bagages, et avec leurs soldats, sur ordre du pouvoir français, pour infiltrer l'ALN et, plus tard, prendre le contrôle de son armée et maintenir l'Algérie dans le giron de la France), est devenu le maître de l'armée, à la faveur de la guerre civile de la décennie1990.Les amitiés entre ces officiers et leurs officiers traitants en France sont connues de tous,
        Le troisième clan, celui des Malgaches, s'est formé autour des dirigeants du Renseignement rattaché au ministère de l'Armement et des Liaisons générales (MALG) dans le gouvernement provisoire de la Révolution algérienne (GPRA). Ils ont longtemps dominé les services secrets algériens et continuent d'être très efficaces. Ces clans s'affrontent en Algérie et en France. À ce marigot qui évidemment a ses relais, ses répondants et ses vis-à-vis en France, on a donné un nom: la " Françalgérie ".
        Depuis la décennie noire, s'est créé un nouveau clan, très puissant : celui des islamistes, qui lui aussi a ses antennes et ses vis-à-vis en France, l'" Islamic Connection". Ce clan est devenu international, il déborde aujourd'hui la relation strictement algéro-française.

        En matière de religion, la réconciliation est un péché, à Allah revient le dernier mot.

BOISERIES
De Jacques Grieu

      
      "J'aime le son du cor, le soir, au fond des bois."
       Si on n'est pas de bois, on ne sait pas pourquoi,
       C'est là un de ces vers qui ne laisse pas froid ;
       Hautbois ou bien sous-bois, il suscite un émoi.

       Certains sont faits du bois "dont on a fait les flûtes"
       Dont la grande terreur est la moindre dispute.
       Jamais "sortir du bois", ils n'ont même essayé :
       Ce bois-là, en brûlant, ne donne que fumée….

       Faut-il "taper un bois pour aller sur le green
       Ou plutôt un long fer en suivant la routine ?",
       Réfléchit le golfeur en prenant ses repères.
       Même si, de nos jours, tous ses bois sont en fer...

       Faire feu de tout bois pour trouver des impôts
       Est pour ceux de Bercy un jeu de bonneteau.
       C'est bien au coin du bois qu'ainsi nous sommes "faits" :
       L'homme serait du bois dont est la vache à lait ?

       On quémande parfois un "aménagement" :
       Sur nos jambes de bois, c'est comme un pansement !
       Le fisc est le plus fort : en cendres, les vaincus !
       C'est en charbon de bois qu'ils auront survécus…

       "Je bois pour oublier", affirme le buveur.
       "Je bois aux souvenirs", prétend certain rimeur ;
       "Je bois et donc je suis", aurait dit un auteur :
       De la langue de bois sont-ce là les vapeurs ?

       Boiseries, beuveries, ne confondons donc pas.
       Pour la gueule de bois, pas les mêmes dégâts !
       De quel bois on se chauffe, il faut le proclamer :
       Croix de fer, croix de bois ! Et parfois l'allumer…

       "Volés comme en un bois", c'est parfois dure loi :
       Pourtant, de "chèque en bois", le plus petit qu'il soit,
       Dans ma très longue vie, je n'ai eu dans les doigts ;
       Pourvu que cela dure ! Et je touche du bois !

Jacques Grieu                  



Avis de Jean-Pierre Lledo
Sur le Rapport de Benjamin Stora


Envoyé par M. JP Lledo

Cet avis a été publié par la Revue politique et parlementaire.

         Avant toute chose, il me semble nécessaire de dire que je ne suis pas historien, mais cinéaste ; que je suis né comme Benjamin Stora en Algérie, trois ans avant lui ; que tout comme lui, je suis juif, mais contrairement à lui uniquement par ma mère ; que je n'ai quitté l'Algérie dont j'ai encore la nationalité, qu'en 1993, chassé par le terrorisme islamique du FIS-GIA ; que j'ai été un militant communiste partisan de l'indépendance de l'Algérie ; que dans cette Algérie indépendante, j'ai toujours été un contestataire ; que j'ai été en quelque sorte excommunié à partir du moment où je me suis posé la question du ''pourquoi ?'' de l'exode massif des non-musulmans en 1962, et que mes films, réalisés à partir de la France, m'ont mené à l'évidence que c'était le projet nationaliste même qui excluait toute mixité ethnique. Le point d'orgue étant la censure de mon film 'Algérie, histoires à ne pas dire'' par les autorités algériennes en 2007, et, plus grave encore, ma condamnation par mes anciens ''camarades''.

         D'emblée il me faut dire que je ne puis dissimuler mon effarement devant la personnalisation de ce ''rapport''. Dans cette démarche de ''réconciliation'' souhaitée par le Président de la République, Stora représenterait donc la Voix de la France ? Mais même si cela était vrai, n'eût-il pas fallu que son auteur s'efface ? Au lieu de quoi le lecteur, gavé d'auto-citations, se voit encore infliger son autobiographie politique, et même ses amitiés algériennes ! (1)
        Jusque-là, je croyais que lorsqu'on était missionné par l'Etat, on accomplissait une tâche d'envergure nationale. Généralement, et comme il se doit, lorsque l'on n'est pas soi-même un cadre de l'Etat, on est même rémunéré. Serait-ce une indiscrétion de demander à quelle hauteur l'a été Stora qui, par ailleurs, fait éditer ce rapport sous forme de livre, à son propre nom naturellement ?
        Ceci pour la forme.

        Pour le fond, on est troublé par la question du statut de ce ''rapport''. On ne sait jamais à qui ce rapport est destiné. Apparemment à la France, surtout. Mais, sur le ton de la prière, à l'Algérie aussi puisqu'on lui demande de faire ''son possible'' pour que les Harkis puissent librement y circuler, ou qu'on la prie de bien vouloir faciliter l'accès aux archives pour les étudiants français. Ce qui est une grande supercherie, car Stora devrait être le premier à savoir que les archives de la guerre ALN-FLN ne seront jamais ouvertes ni aux Algériens ni encore moins aux étrangers, en tous cas tant que la démocratie ne pourra s'y imposer. Si l'objectif est bien de réconcilier des mémoires meurtries, il y avait pourtant tant de choses à demander à l'Algérie ! (voir plus bas, ''mes préconisations'').

        Mais au fait, n'était-il pas prévu originellement une rédaction duelle, franco-algérienne ? Pourquoi Stora ne commence-t-il pas par s'expliquer à ce sujet ? Pourquoi donc une publication unilatérale qui déséquilibre profondément ce rapport, une publication qui, on peut le supposer, n'aurait pu être consentie sans une lecture préalable du Président de la République lui-même ?

DESEQUILIBRES

        Je suis en effet atterré par le profond déséquilibre qui marque et délégitime ce ''rapport''. ''Réconcilier'' après un conflit, quel qu'il soit, exige au minimum que l'on écoute les parties en conflit avec autant de respect, voire d'empathie.
        Or lorsque des ''massacres'' y sont évoqués, il ne s'agit que de ceux dont ont été victimes les ''Algériens''. Stora ignorerait-il que dans la région de Sétif en Mai 1945, puis dans le Constantinois le 20 Août 1955, ce sont les nationalistes arabes qui déclenchèrent des insurrections dont la cible, au faciès, furent les non-musulmans, n'épargnant même pas les communistes, pourtant partisans de l'indépendance ? Stora ignorerait-il les livres de Roger Vétillard (2) ? Lorsque l'on parle des Harkis, on évoque des ''représailles'', ce qui est reprendre à son compte le narratif de l'Etat algérien les criminalisant. (3)

        Lorsqu'on cite les noms de ceux dont on a pris conseil, on peut par exemple lire le nom de l'association ''Coup de Soleil'', dirigée par le socialiste Georges Morin, proche des convictions de l'auteur, mais pas celui du ''Cercle Algérianiste'' qui est pourtant la plus grande association de Pieds Noirs, d'opinions politiques diverses.
        Déséquilibre encore lorsque l'on convoque certains historiens, et pas d'autres… Comment ignorer Pierre Vermeren, pour ce qui est de l'histoire contemporaine du Maghreb ou de Jacques Marseille lorsqu'on parle de colonisation, lequel, à contre-courant, démontra qu'à compter de 1930, l'empire colonial fut loin d'être d'un bon rapport pour les Etats et qu'il entrava même le développement économique de la France... Pressé depuis des années de parler du massacre du 5 Juillet 1962 commis à Oran par le FLN-ALN, Stora y consent enfin, mais lorsqu'il évoque ''la question des disparus'', il ne cite pas ''Silence d'Etat'', de Jean-Jacques Jordi qui est le seul historien à avoir publié sur cet événement et ses conséquences. Déséquilibre aussi lorsqu'il détaille l'action musclée de l'armée française durant la ''Bataille d'Alger'' sans dire qu'elle fut provoquée par une vague terroriste FLN de grande ampleur qui cibla avec des bombes essentiellement des civils. Stora parle ''des 3 000 disparus algériens de la " bataille d'Alger "'', mais pourquoi tait-il les 3000 disparus non-musulmans de l'année 1962, et à partir du ''cessez le feu '' du 19 Mars 1962, largement documenté par Jean Monneret ? Déséquilibre encore lorsque Stora donne les noms de femmes arabes torturées et violées par des militaires, mais pas ceux de ces deux enfants Nicole Guiraud et Danielle Chiche dont la bombe posée au Milk Bar d'Alger par Zohra Drif, arracha, respectivement, le bras et la jambe.

        Ces ''déséquilibres'' sont trop nombreux pour être ici signalés, ils sont la trame même de ce ''rapport''. L'auteur avait pourtant tenu à se revendiquer d'une ''histoire non hémiplégique'' (formule du ''Cercle Algérianiste'' dont la source est tue !). Mais est-il possible de se refaire, lorsque toute sa vie on a pratiqué l'histoire comme un militant politique sans s'obliger à se remettre en question, comme tout historien lié par ses origines à cette histoire devrait s'y astreindre ?
        Dans le cas de Stora, c'est évident que non. Cependant, hormis la propre responsabilité de l'historien, n'y a-t-il pas celle tout aussi évidente du Président de la République qui a confié un rapport si délicat à un seul homme, en faisant automatiquement un historien officiel. Qu'il ait été incapable de s'évader de ses propres préjugés ou qu'il ait essayé de répondre à la demande politique du président, Stora a chuté, gravement. Comme ne manqueront pas de chuter tous ceux qui se dispenseront d'interroger les narratifs historiques à l'œuvre tant en France qu'en Algérie. Car ceci est un préalable.

NARRATIFS DE L'ETAT ALGERIEN ET DE L'ETAT FRANÇAIS

        Le narratif de l'Etat algérien est assez sommaire. L'Algérie a été colonisée. La colonisation est un crime absolu (économique, politique, culturel). La guerre de libération a été la seule manière d'accéder à l'indépendance. Seuls les Arabo-musulmans sont automatiquement Algériens, ce que le Code de la nationalité de 1963 entérine. Les autres, les colons, c'est-à-dire des étrangers, se devaient de quitter l'Algérie. L'indépendance n'a pas mis fin à la négativité du colonialisme, puisqu'il a mué en ''néo-colonialisme''. 60 ans après, l'Algérie en subit toujours ''les séquelles'', sans doute ad vitam aeternam. La France doit se repentir, sans doute aussi ad vitam aeternam.

        Le narratif de l'Etat français est presque aussi caricatural, sauf qu'il a tant évolué qu'aujourd'hui il serait presque le calque du narratif de l'Etat algérien. Mai 1945 et Août 1955 ont été des ''massacres'' commis uniquement par l'armée française. Et par la bouche de son dernier et actuel président de la république, ''la colonisation a été un crime contre l'humanité''. Hier, bienfait civilisationnel, aujourd'hui méfait absolu.
        Pour ma part, je considère que le principal obstacle à la réconciliation franco-algérienne réside dans ce double, voire aujourd'hui unique, narratif historique, car il fait écran à la vérité. Ne pas s'interroger à son sujet, ne pas le remettre en question conduira à reproduire sans fin les ressentiments des uns et des autres. Cette remise en question ne pourra être le fait que d'authentiques historiens capables de tenir à distance leur opinion politique, voire leur nationalisme, et non d'historiens officiels adoubés par les deux Etats. Indépendance des historiens, liberté de pensée, accès libre aux archives algériennes et françaises, sont des préalables absolus.

MON AVIS

        Bien que non historien, mais ayant eu de par mes films à me coltiner notamment à cette question de la guerre d'Algérie, dans plusieurs de ses dimensions, j'aimerais pouvoir dire ci-après mon opinion de citoyen. D'abord au sujet de ces narratifs.
        Je pense que le narratif de l'Etat français n'a pas évolué en fonction de considérations scientifiques, mais économiques et politiques. A l'instar de l'Europe, la France a eu besoin de main-d'œuvre et de pétrole. Elle a ''dealé'' avec l'OCI (organisation de la coopération islamique) qui a imposé ses conditions et ses narratifs sur l'islam, religion de paix et d'amour, sur la remise en cause de la laïcité, sur l'immigration, sur les colonisations… et sur Israël.
        Quant à l'inamovible narratif de l'Etat algérien, il ne pourra jamais changer, tant que cet Etat restera totalitaire dans son essence, tant que les Archives FLN-ALN ne seront pas libérées, tant qu'il ne sera pas possible de remettre en question les dogmes du nationalisme algérien, concernant la guerre d'Algérie, la colonisation et l'identité nationale. Ce narratif ne pourra jamais changer car il est le socle même de l'Etat algérien depuis 60 ans. Sans lui, il s'effondre.
        Malgré d'impressionnantes richesses naturelles qui ne servent qu'à la consommation, l'Etat-FLN a perdu toute légitimité sur le plan de l'économie (Stora note que c'est la France qui exporte des hydrocarbures vers l'Algérie, sans que cela le fasse réagir !!!), sur le plan de l'identité (les Amazighs désormais en rupture de ban, réclament leur indépendance), sur le plan de la santé (les présidents donnent l'exemple en allant se soigner à l'étranger), sur le plan de la culture (les écrivains et les cinéastes tentent de se faire éditer et produire en France), et plus largement sur le plan du bien-être général et de l'espoir (le rêve de toute une jeunesse est de ''foutre le camp''). Ceci sans parler de la gangrène-corruption. Face aux diverses contestations, notamment la plus dangereuse, celle des islamistes, l'unique légitimité qui subsiste est donc celle de la légitimité historique, celle d'avoir mené la ''guerre de libération''.

        L'Organisation des Anciens Moudjahidine (ONM) adoube chaque nouveau président en contrepartie de la reconduction de multiples avantages moraux et (surtout) matériels. Donnant donnant… Des rencontres quasi-annuelles ''d'écriture de l'histoire de la guerre de libération'', rien de consistant n'en est jamais sorti depuis 60 ans.
        Le plus grand mythe produit par les jeunes promoteurs nationalistes de cette guerre qui créeront le FLN, est son inévitabilité. Faute de pouvoir contester politiquement et pacifiquement la colonisation, il fallait recourir à la lutte armée.

        Or comme tous les mythes, s'il a la vertu de l'auto-justification, il ne correspond nullement à la réalité. Car depuis la fin de la première guerre mondiale, jusque dans les années cinquante, tous les marqueurs d'une vie politique et associative sont en progression constante et de façon géométrique. De plus en plus d'associations, de syndicats, de partis, d'organisations de femmes et de jeunes, de journaux, de revues, de meetings, de manifestations, etc, qui correspondent à de plus en plus de lettrés, d'intellectuels, d'écrivains et d'artistes… Une telle progression, durant une décennie encore, aurait eu le triple avantage de former une société civile que la guerre détruira, de ménager une sortie pacifique de la colonisation, et sans doute aussi de faire de la nouvelle Algérie, une société multi-ethnique garantissant les droits culturels et cultuels de ses minorités. Au lieu de quoi, nous aurons une guerre de plus de 7 ans, des exactions de part et d'autre, 300 000 morts, le massacre des Harkis et l'exode d'un million de non-musulmans.

        Enfin, cerise sur le gâteau de l'indépendance, les militaires au poste de commandement, et ce jusqu'à ce jour. Mais quand on détruit sa propre société civile, à quoi d'autre peut-on s'attendre ?
        Les historiens auront à nous dire pourquoi c'est l'option violente qui été choisie.
        Mon hypothèse est qu'elle était la conséquence inéluctable de la pensée nationaliste fondée sur l'islam pour laquelle l'identité nationale avait été, de par le sang, arabo-musulmane avant 1830, et qu'elle devait le redevenir. Et de fait, la guerre fut menée sous les auspices de l'islam, comme un djihad, une guerre sainte (4), ''fi sabil illah'' (pour la cause de dieu), qui ciblait par un terrorisme qui n'avait rien d'aveugle, les civils non-musulmans, chrétiens et juifs, et dont le but était de pousser ces derniers vers l'exode, de préférence avant même l'indépendance, afin que l'exode prenne l'aspect d'un départ volontaire. ''La valise ou le cercueil'' n'est pas un slogan de l'OAS comme certains l'ont dit, mais bien un slogan dessiné sur les murs des villes, depuis 1945, par les nationalistes. Et c'est précisément parce que ce sont des combattants arabes qui témoignent dans mon avant-dernier film ''Algérie, histoires à ne pas dire'' de cette stratégie du ''nettoyage ethnique'' (5), qu'il a été interdit dès sa sortie en 2007.

        Le narratif de l'Etat algérien repose sur un deuxième pilier, principal pilier fondateur sans lequel tout s'effondre : le discours nationaliste sur la colonisation, lequel repose sur une quantité d'idées fausses.

        ''La France a colonisé l'Algérie''. Le problème, c'est que l'Algérie… n'existait pas comme nation ou comme pays autonome ! Et qu'en 1830 la France s'empare d'une dépendance ottomane depuis 3 siècles qui fait régner la terreur contre les Berbères et les Arabes d'Afrique du Nord, mais aussi en Mer Méditerranée avec la piraterie, et la mise en esclavage - y compris sexuel - des Européens kidnappés. " Considérer la présence turque en Algérie comme une colonisation, remettrait en question la politique d'aujourd'hui des deux pays ; le politiquement correct l'emporte sur l'Histoire. " avance courageusement une nouvelle historienne algérienne, Abla Gheziel (6)

        Le droit d'user du concept de ''colonisation'' n'impose-t-il pas préalablement d'en discuter le contenu ? L'Europe aurait-elle été la seule puissance coloniale ? Les conquêtes menées au nom de l'islam, en Europe, au Moyen-Orient, et en Asie, infiniment plus violentes que celles menées par l'Europe - les historiens indiens n'évaluent-ils pas les morts à plus de 80 millions entre 1000 et 1500 (7) ? - pourquoi ne seraient-elles pas aussi qualifiées de ''coloniales''? Cela ne pourrait-il pas aider à faire des comparaisons entre les diverses colonisations ?
        De plus, lorsque l'on veut évaluer de façon scientifique un état de société, ne se doit-on pas de le comparer avec ce qui a précédé ? Les bienfaits de la colonisation ottomane auraient-ils été supérieurs à ceux de la colonisation française ? Quelles villes, quelles universités, quels lycées, quelles écoles primaires, quels hôpitaux, quels barrages, quelles routes ont-ils construits ?
        Quelles maladies ont-ils éradiquées ? Quels marais ont-ils asséchés ? Quelle société civile ont-ils aidée à naître ? On pourrait poser mille questions comme cela.
        Diaboliser la seule colonisation française n'est-ce pas une manière de jeter un voile pudique sur la réalité crue de la société existante en 1830, une société tribale et clanique, dont l'islam même n'arrive pas à surmonter les divisions, une société agraire de très gros propriétaires fonciers, chefs de tribus en général, et de khammes (8) qui n'ont aucun pouvoir sur les affaires du pays, et en Kabylie une agriculture de survie gérée par le clan familial, une société qui, de ce fait, sera incapable de fonder une nation et de se débarrasser des colonisateurs arabes, ottomans puis français… On accuse la colonisation française de n'avoir accordé aux Arabes (en fait des Amazighs arabisés par l'islam), et sur le tard, qu'une demi-citoyenneté, ne devrait-on pas ajouter que l'Empire ottoman ne leur en avait octroyé aucune et que jamais il ne mit en place une Assemblée algérienne avec 60 députés arabes ? Ne devrait-on pas enfin dénoncer le crime culturel de la conquête arabe qui priva la population amazigh de sa langue, de sa culture, de sa personnalité ?

        Emboîtant le pas à ses homologues algériens actuels et précédents, le futur président français en pleine campagne électorale, qualifia en 2017 à Alger la colonisation de ''crime contre l'humanité'', tombant ainsi dans le piège de la concurrence mémorielle que Stora nous dit vouloir éviter. En effet depuis que l'extermination de 6 millions de Juifs a été ainsi qualifiée par le Tribunal de Nuremberg, la Shoah est devenue l'étalon de la revendication victimaire. N'est-ce pas dans l'avion qui le ramenait de Jérusalem en janvier 2020, qu'Emmanuel Macron confia aux journalistes qui l'accompagnaient qu'il venait d'avoir l'idée d'une initiative qui ait " à peu près le même statut que la Shoah pour Chirac en 1995 " ?

        Les Amazighs et les Berbères qui se revendiquent ''Arabes'' auraient-ils subi une extermination planifiée par l'Etat français durant plus d'un siècle ? La croissance démographique de ces derniers aurait-elle été stoppée ? Faudrait-il pour autant nier que furent perpétrées des exactions ? Faudrait-il pour autant ne retenir que les exactions de l'armée française ? Et oublier que les troupes de l'Emir Abdelkader dont on se plaît aujourd'hui à souligner la noblesse, et qui sauva plus tard des Chrétiens de Damas, se distinguèrent par le massacre des Juifs dans sa ville de Mascara (9), et aussi par la décapitation de 300 prisonniers français ? Sans parler des trop nombreux massacres, pogroms, et actes de barbarie commis avant et après la création du FLN-ALN ? On aimerait que le Bien et le Mal soient bien départagés, mais quand et où cela fut Monsieur le président ?

        Certes le système colonial ne peut être structurellement qu'inégalitaire, et à ce titre générateur d'iniquités et d'humiliations. Mais pourquoi pareillement la conquête arabo-ottomano-musulmane n'a-t-elle pas été qualifiée de ''crime contre l'humanité'' ? N'aurait-elle pas, elle aussi, généré parmi les chrétiens et les juifs (10), inégalités, iniquités et humiliations, et ce, en application du Code de la dhimma (11) dont s'inspirera plus tard le Code de l'Indigénat (1881-1945)… ?

        Serait-ce manquer de respect à un Président de la République que de lui demander quel est le système conçu par l'humanité qui n'a pas été inégalitaire, inique, violent, et humiliant ? Une décision, une action, marquées par une intention, peuvent être ''criminelles'', mais un système de socialité humaine ?
        L'Histoire est cruelle. Mais lui intenter un procès ? Depuis toujours, et donc jusqu'à aujourd'hui, n'est-ce pas le rapport de forces économiques, politiques, militaires qui a présidé aux relations entre les groupes et à la formation des systèmes ? La plupart du temps par la guerre et la conquête ? Pourquoi Monsieur le Président ne vous demanderiez pas plutôt pourquoi lorsqu'une guerre éclate entre deux pays d'égale puissance, cela donne un vainqueur et un vaincu (comme avec l'Allemagne et la France) mais jamais un colonisé et un colonisateur (comme la France et l'Algérie) ? Alors que tel est toujours le cas, lorsque s'opposent un pays développé et un pays sous-développé comme l'on disait il y a quelques décennies ? Un penseur algérien Malek Bennabi (1905-1973), spécialiste en civilisation islamique, eut d'ailleurs le courage d'avancer l'idée en 1951 que les peuples colonisés l'avaient été parce que… colonisables.

        " La colonisation prend racine dans la colonisabilité. Là où un peuple n'est pas colonisable, la colonisation ne peut s'établir sur son sol. " (12)
        Cette idée, pourtant de bon sens, déplut fort aux communistes qui idéalisaient ''les peuples'', et plus encore aux nationalistes qui voulaient faire endosser la responsabilité de la colonisation aux seuls pays colonisateurs, en faisant l'impasse sur les responsabilités propres à chaque peuple, et à ses retards historiques et civilisationnels… Ce qui permet encore aujourd'hui, 60 ans après l'indépendance, aux dirigeants algériens d'imputer aux ''séquelles du colonialisme'' l'impéritie, la corruption, le clanisme, l'autoritarisme, l'indigence culturelle, qui obèrent tout dynamisme social, et ôtent tout espoir à la jeunesse qui ne rêve que d'une chose, fuir. Il y a une quinzaine d'années, l'homme politique le plus intelligent qu'ait produit l'Algérie, Mouloud Hamrouche, n'avait-il pas fait le triste constat qu'en Algérie, ''il n y a pas de politique, il n'y a que des clans… Pour trouver de la politique, il faut remonter aux années 40…''. Et hormis le fait que l'on pourrait même remonter aux années 30, quel hommage à la colonisation, qu'il ait été volontaire ou non !

        Car contrairement au discours de beaucoup d'organisations pied-noir, mettant en valeur l'héritage matériel de la colonisation, ce qui me paraît plus important encore, c'est l'héritage politique et intellectuel, suggéré trop rapidement par le président Bouteflika lorsqu'en l'an 2000 devant les députés français, il reconnut que ''la colonisation avait introduit la modernité…. Par effraction''. (13)

        En effet, d'où sont venues les idées d'indépendance, de république, de nation, de démocratie, de nationalisme, de syndicalisme, de communisme, sinon du pays colonisateur ? Le FLN n'a-t-il pas été créé par des militants du MTLD, lequel avait pris la suite du PPA (14), lequel provenait de l'Etoile Nord-Africaine, créée à Paris à l'initiative du PCF ? Dans quelle langue se sont transmises ces idées parmi les élites politiques et médiatiques musulmanes ? N'est-ce pas l'écrivain Kateb Yacine qui avait qualifié la langue française de ''butin de guerre'' dans lequel ont aussi puisé Mouloud Feraoun, Mouloud Mammeri, Mohamed Dib, et continuent de puiser quantités d'écrivains d'après l'indépendance de Rachid Boujedra à Boualem Sansal, tous d'excellents patriotes que je sache ? Oui, qui par le développement des transports et de l'enseignement même dans les endroits les plus reculés, a fait progresser la prise de conscience nationale malgré l'extrême division de l'espace social clanique ? Qui, en substituant au système tribal parcellaire la centralité d'une administration moderne, a posé les bases du futur Etat algérien ? Qui, en libérant le khammes de sa tutelle seigneuriale ou clanique et en le transformant en ouvrier salarié, en a fait un être capable d'initiatives, y compris politiques, y compris indépendantistes ? Qui a donné à l'Algérie son nom même et ses frontières actuelles, d'ailleurs aux dépens de la Tunisie et du Maroc ?

        Pour parler d'un espace de mixité ethnique, le rapport Stora évoque par un euphémisme l'existence ''d'un monde du contact'', sans mentionner étonnamment ni le monde du travail et ses syndicats pourtant mixtes et très puissants, ni le monde des journalistes et des lecteurs, ni le monde des arts et de la littérature avec ses célèbres amitiés Feraoun-Robles, Dib-Pélégri, ni le monde des instituteurs (particulièrement visés par le FLN) et des élèves, ni le monde des avocats et de ceux qu'ils défendaient, ni le monde des gens simples qui dans les villes et les campagnes, et en tant que voisins ou non, savaient transgresser les frontières ethniques invisibles en inventant une coexistence égalitaire, ni même le monde des politiques se côtoyant dans diverses assemblées, parmi lesquels le parti communiste, le seul composé de musulmans, de juifs et de chrétiens, le seul à prôner une Algérie indépendante et multiethnique, projet qu'il ne put jamais imposer aux nationalistes, partisans eux d'une Algérie strictement arabo-musulmane, comme le dira devant ma caméra de ''Un Rêve algérien'' (15), Lakhdar Kaïdi, le célèbre dirigeant de la CGT dans les années 40 et 50 du siècle précédent.

        Sans la guerre et ses atrocités, et sans l'idéologie racialiste des nationalistes rejetant comme étrangers les Juifs, là depuis plus de 2000 ans pour certains, et les Pied-Noirs, des travailleurs de tout le bassin méditerranéen, ayant fui la misère, eux là depuis au moins un siècle, ce ''monde du contact'' aurait pu encore grandir et devenir une décennie plus tard, le socle d'une nouvelle Algérie, libre, multi-ethnique, respectueuse de toutes ses différences, et entreprenante. Une telle société aurait-elle pu résister à la vague islamique de ces trente dernières années ? Difficile de l'affirmer quand on voit ce qui s'est passé au Liban et en Irak d'où sont partis ou ont été chassés 150 000 Juifs et deux millions de chrétiens.

RETOUR AU RAPPORT STORA

        Ceux qui auront eu la patience de lire ce rapport aussi long qu'ennuyeux parce que sans âme, ressassant certaines données, et passant sous silence des quantités d'autres, conviendront qu'aucun questionnement d'importance ne le traverse. C'est là son défaut majeur, mais loin d'être le seul.
        N'importe quel ''rapport'', il est vrai, sera toujours insuffisant. Mais les ''manques'' ou les bavures de celui de Stora sont trop idéologiquement orientés pour être innocents. Ils mettent à nu cet historien qui s'est toujours voulu avant tout un militant anticolonialiste désireux de ne pas déplaire aux Algériens, pouvoir et intellectuels nationalistes sans distinction. Et ce comme beaucoup d'autres Juifs, dont j'ai été, qui ont cru pouvoir échapper à l'antisémitisme en évitant les sujets qui fâchent, Stora ne dit rien du terrorisme du FLN dirigé contre les juifs et contre les chrétiens, qui transforma cette guerre dite de ''libération'' en ''guerre d'épuration'' (16)
        Ainsi, alors qu'il nomme dans ''ce monde du contact'' des musiciens juifs qui ont contribué au moins autant que les Arabes (Amazighs arabisés) au développement de la musique andalouse, Stora s'entête à la nommer ''musique arabo-andalouse''. Plus gravement, s'il cite le nom de son compatriote constantinois, le célèbre musicien juif Raymond Leyris, il ne dit jamais qu'il fut assassiné le 22 Juin 1961 et qu'à ce jour le crime n'a pas été revendiqué par ses auteurs, le FLN-ALN(17). Stora récidive car, dans le livre financé par l'Europe et dont il est le co-rédacteur, ''Histoire des relations entre juifs et musulmans des origines à nos jours'' (Albin Michel, 2013), destiné à vanter une coexistence heureuse sans faille, démentie pourtant par la terrible réalité de la dhimma (18), ce dont témoignent abondamment, entre autres, 800 pages d'archives in ''L'Exil au Maghreb'' de David Littman et Paul Fenton, il y a un article sur Raymond Leyris. Signé par son ami Abdelmadjid Merdaci, cité plus haut, ce dernier en fait l'éloge comme Maître de la musique andalouse qui chantait en arabe et comme symbole de la bonne coexistence entre Juifs et Arabes, mais omet de dire… qu'il avait été assassiné !!! Un détail, comme dirait l'autre… Manifestement Stora n'a réglé ni sa question juive, ni sa question algérienne.

        Il y a dans ce rapport bien d'autres malhonnêtetés intellectuelles, notamment la manipulation des citations, très dommageable pour l'idée du métier d'historien et très gênante pour une commande du Président.
        Déjà citées plus haut, Fatima Besnaci-Lancou, Dalila Kerchouche et 49 cosignataires (19), signalent une honteuse manipulation textuelle, quand Stora, citant un entretien de l'historien Mohammed Harbi datant de 2011, dans le quotidien algérien El Watan, où il évaluait le nombre des Harkis et goumiers à environ 100 000 hommes et à quelques 50 000 les victimes algériennes, substitue l'expression "actes du FNL/ALN" à "bavures du FLN/ALN"… Ou encore lorsque Stora nous donne en annexe plusieurs discours de chefs d'Etat français, mais omet comme par hasard celui où Jacques Chirac déclarait aux Invalides, le 25 septembre 2001 : "Les Harkis et leurs familles, ont été les victimes d'une terrible tragédie. Les massacres commis en 1962, frappant les militaires comme les civils, les femmes comme les enfants, laisseront pour toujours l'empreinte irréparable de la barbarie…. ".

        Citant le témoignage de Louisette Ighilahriz (publié par le Monde, le 20 juin 2000), Stora nous rappelle que cette ''militante algérienne indépendantiste, jeune fille alors âgée de vingt ans fut atrocement torturée à l'état-major de la 10e Division parachutiste du général Massu.'' Mais il tait la suite… lorsque L. Ighilahriz ajoute qu'elle a été sauvée par le médecin militaire de la 10e DP, le commandant Richaud. Cette précision valut à la concernée une flopée d'insultes de la part ''d'anciens moudjahidine'', mais Stora qui n'a pas son courage devrait pourtant savoir qu'une demi-vérité travestit l'histoire autant qu'un mensonge.

        Le choix des citations n'est pas moins tendancieux. Stora cite le philosophe juif constantinois Raphaël Draï faisant l'éloge de la réconciliation. Mais pourquoi ne pas avoir cité aussi, par souci de vérité, cet autre passage : " Ceux qui ont fait assassiner Raymond [Leyris] veulent vider intégralement Constantine de ses Juifs. La communauté juive était présente ici des siècles avant la conquête de l'islam. Faire fuir les Juifs, sans qu'il en reste personne, c'est vouloir effacer les traces de cette présence antérieure. " ?

        Pareil pour l'écrivain algérien Mouloud Feraoun… pourquoi n'avoir pas aussi choisi un passage où il se fait l'écho des pratiques autoritaires et vexatoires des maquisards de l'ALN vis-à-vis de la population musulmane dans les montagnes de Kabylie. Ou alors par exemple, lorsqu'il dénonce les mariages ''moutaa'' (''mariages temporaires'' pour satisfaire les besoins pressants des combattants, tout en restant légal du point de vue de la charia).
        Pareil pour Albert Camus. Stora cite un passage de son " Appel pour une trêve civile en Algérie ", omettant l'essentiel, notamment qu'il " s'adresse aux deux camps pour leur demander d'accepter une trêve qui concernerait uniquement les civils innocents ", et qu'il n'aura aucun effet sur la pratique terroriste du FLN qui ira en s'amplifiant. " Bientôt l'Algérie ne sera peuplée que de meurtriers et de victimes. Bientôt les morts seuls y seront innocents " avait prédit Camus.
        Comme il avait prédit qu'une Algérie uniquement arabo-musulmane déboucherait inéluctablement sur le ''panislamisme''.

        Et quand Stora s'en prend à ceux " qui voudraient annexer Camus, le lire de façon univoque, l'enrôler dans leur combat politique ", ne parle-t-il pas plutôt de lui-même, qui omet de dire que jusqu'à ''la fin de sa vie'' Camus n'eut qu'une seule obsession, empêcher ce qui finalement arriva : un million de chrétiens et de juifs chassés de leur pays. Au fait comment Stora peut-il aller jusqu'à l'indécence d'écrire ''qu'à la fin de sa vie Camus se prononcera en faveur d'un fédéralisme ….'', suggérant une évolution d'opinion dû au grand âge, comme si l'écrivain n'était pas mort, à l'âge de 47 ans…. dans un accident d'auto ?!!!

MES ''PRECONISATIONS''.

        Les quelques ''préconisations'' que je suggèrerais n'auront pas la prétention d'être exhaustives. Elles auront surtout l'ambition de faire respecter le principe premier de toute réconciliation : la réciprocité, sans laquelle il n'y en aura jamais.

        Je ''préconise'' donc que : 1 - les Etats français et algérien cessent d'instrumentaliser l'histoire de la colonisation et de la guerre d'Algérie, et laissent s'en occuper leurs sociétés civiles : l'histoire aux historiens, la mémoire aux citoyens et aux artistes, la réflexion aux intellectuels.
        Je considère en effet que ces Etats ainsi que leurs dirigeants, contraints par des agendas politiques, sont depuis 1962 le principal obstacle à la réconciliation largement pratiquée par les populations depuis des décennies. En témoignent les innombrables récits de pieds-noirs ou bien d'enfants de Harkis, qui sont retournés dans leurs villes et villages natals, ou dans ceux de leurs parents ou grands-parents.

        2 - les Etats français et algérien garantissent aux chercheurs et aux créateurs la liberté d'expression, de circulation, d'investigation, de création, de diffusion, veillent au respect de l'expression des courants de pensée minoritaires, et surtout mettent fin à toutes les formes de censure. L'accessibilité à toutes les archives est la condition sine qua non de la réconciliation. En effet seules les archives et leur contenu pourront corriger les travers de la mémoire.
        Attribuer au cinéma la vertu d'être un ''formidable catalyseur de mémoire'' sans dire un mot de la menace de la censure, est une forme de démagogie. Mon avant dernier film ''Algérie, histoires à ne pas dire'' est le parfait exemple des formes diverses qu'elle peut avoir : interdit de diffusion en Algérie, jamais programmé par une TV en France, bien que loué par la critique lors de sa sortie en salles de cinéma. Adulé en Algérie par les anciennes et les nouvelles générations, le chanteur Enrico Macias, est depuis 60 ans interdit d'antenne et de scène dans son pays natal. Et ce, alors que tous les chanteurs amazighs ou amazighs arabisés peuvent se produire en France.

        3 - les Etats français et algérien devront faire respecter la liberté des pratiques religieuses dans tous les espaces publics qui leur sont destinés, le plus strictement possible, et punir tous les fanatismes générateurs de violence, ainsi que toutes les formes de haine à l'encontre des Amazighs, des Amazighs arabisés, des Harkis, des Pied-Noirs, et des Juifs.
        Ce ne sera pas faire preuve d'un esprit partisan que de reconnaître que dans ces trois domaines, c'est l'Algérie - où par exemple, faute de Juifs, ce sont les Amazighs, les chrétiens, les athées et les Noirs qui continuent d'être persécutés - qui a le plus à faire. De plus, la France ferait bien aujourd'hui de ne pas reproduire sa cécité passée par rapport au désir d'autonomie, voire d'indépendance des Amazighs. Ainsi que de faire toute la lumière sur les assassinats à Paris de l'avocat et homme politique kabyle Ali André Mécili, le 7 avril 1987, et du fils de Ferhat Mehenni, président du Gouvernement provisoire kabyle en exil, le 19 juin 2004, manifestement signés.

        4 - les Etats français et algérien pourraient grandement faciliter et accélérer la mise en application de ces stratégies de gestion de la mémoire et de l'histoire franco-algérienne, donc sans attendre les résultats des recherches en ces deux domaines, si à l'occasion du soixantième anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, ils reconnaissaient solennellement trois injustices historiques, vis-à-vis : - des populations amazighs et amazighs arabisées privées de la pleine citoyenneté durant la presque totalité de la période coloniale (relativisons cependant : la moitié de la population française, les femmes, n'accéda qu'en 1944 au suffrage universel, lequel ne concerna tous les hommes qu'avec la Troisième république en 1875, un siècle après la Révolution française !)
        - de la population non-musulmane (Juifs et Pied-Noirs) poussée à l'exode en 1962.
        - de la population harkie abandonnée par la France, martyrisée en Algérie.

        Le rétablissement dans leur algérianité de ces deux dernières catégories serait sans aucun doute le geste déterminant vers la réconciliation.

        Si la reconnaissance de la première injustice ne devrait plus poser de problème, la reconnaissance des deux autres devrait permettre de comprendre qu'à la source de toutes les violences extrêmes de la fin de guerre d'Algérie furent ''Les Accords d'Evian'', dits de ''cessez le feu'' par certains et ''de paix'' par d'autres, publiés le 19 Mars 1962 mais jamais signés par les Algériens, l'organe suprême, le Congrès de Tripoli réuni en Juillet 1962, les rejetant même ! En effet, durant presque trois années, la France accepta de négocier, secrètement puis officiellement, avec le FLN en tant que ''seul représentant du peuple algérien'', ce qu'il n'était pas, puisque le FLN ne représentait ni la population non-musulmane, ni les messalistes (20), ni les Harkis.

        Ces trois catégories de la population algérienne furent sacrifiées sur l'autel du pétrole que la France était autorisée à exploiter encore 10 ans. La création de l'OAS peut être comprise comme un acte de protestation contre cet état de fait, et comme une tentative tout à fait légitime pour se faire accepter comme représentant des Pied-Noirs. Et si le recours à la lutte armée et au terrorisme par l'OAS en 1961-62 fut une option aussi catastrophique que celle du FLN en 1954, leurs causes n'en restent pas moins totalement légitimes.

        Quant aux Harkis, il conviendrait de comprendre que la double tragédie qu'ils ont endurée, a été d'abord la conséquence d'une fausse représentation de leur identité. Compte tenu de la conception ethnique et tribale du combat indépendantiste qui a été celle du FLN et qui le demeure, les Harkis, parce que musulmans, ne pouvaient être que des ''traîtres'', alors que les Pieds-Noirs et les Juifs, eux des ''étrangers'', n'étaient que des ''ennemis''. C'est cette vision qu'il faut préalablement et une fois pour toute abandonner. La France n'était pas l'Allemagne nazie, et les Harkis n'étaient pas des ''collabos''.

        Aujourd'hui très nombreux sont les Algériens qui, constatant le désastre économique et politique de ces six dernières décennies, la fuite des cadres ainsi que de toute une jeunesse, et le fait que l'Algérie n'a jamais été aussi dépendante que depuis l'indépendance, se disent qu'à la place de leurs grands-parents, ils auraient choisi l'option d'une autonomie au sein d'une Fédération française que proposèrent en 1936 et en 1946 les nationalistes modérés de Ferhat Abbas ainsi que les communistes… Au moins, disent-ils, ''on n'aurait pas besoin de fuir, on serait en France sans bouger et sans mourir en Méditerranée !''. Ces Algériens qui vivent leur algérianité comme un enfermement, et leur désir de francité comme une libération, seraient-ils aussi des ''collabos'' ?

        5 - Les Symboles.
        Ils ne pourront atteindre leurs objectifs - refermer les plaies, apaiser, réconcilier - que s'ils sont consensuels, réciproques et exempts d'esprit revanchard.

        Des plaques ?
        Oui, mais il faut avoir en vue qu'il en manquera toujours une… De plus chaque pays devrait s'occuper des siennes. Pourquoi la France s'est-elle cru obligé d'honorer Maurice Audin, qui se considérait Algérien, puisque l'Algérie l'avait déjà fait ? On pourrait se demander par contre quand l'Algérie inscrira le portrait de Raymond Leyris sur ce mur de Constantine où figurent déjà les portraits géants de quatre grands représentants de la musique judéo-amazigho-arabo-andalouse, et non ''arabo-andalouse'' comme vous l'écrivez M. Stora ! Ce serait une belle manière de faire oublier les propos indignes de Khalida Toumi, quatre fois ministre de la Culture dans les gouvernements Bouteflika, qui s'était promis de ''déjudaïser la musique arabo-andalouse'' (21) …

        Des Journées commémoratives nationales ?
        Oui, mais alors elles ne peuvent être que consensuelles. Pourquoi le 17 Octobre 1961, qui tel que présenté par Stora serait une manifestation syndicale, alors qu'elle fut organisée par le FLN, lequel sachant qu'elle serait réprimée vu qu'elle était interdite, mit femmes et enfants en tête des cortèges ! Pourquoi pas plutôt le 26 Mars 1962, puisque 80 Pieds-Noirs sans armes furent froidement assassinés à bout portant au centre d'Alger à coup de fusils-mitrailleurs par l'armée française ?
        Et pour ce qui est du 19 Mars, comment accepter cette date à laquelle ont été publiés les ''Accords d'Evian'' qui ont scellé le sacrifice d'une population non-musulmane de plus de 1 million de personnes, et d'une population de Harkis de plus de 150 000 personnes, et déclenché une violence urbaine inégalée ?
        Ma proposition est qu'une Journée Nationale fériée soit consacrée à toutes les victimes de la guerre d'Algérie, et que chaque groupe concerné puisse honorer la mémoire de ses morts.

        Le Panthéon ?
        Oui, mais pas Gisèle Halimi, originaire de Tunisie, qui hormis son métier d'avocate, se positionna comme une militante anti-harki et anti-pied-noir. Non plus que Henri Alleg, qui aurait été plus crédible s'il avait aussi dénoncé la torture et les mutilations pratiquées durant la guerre par le FLN. Si elle n'y était pas déjà, l'anthropologue française et ancienne déportée des camps nazis, Germaine Tillion y aurait eu droit pour son amour équilibré de toutes les populations de l'Algérie, et pour ces paroles admirables : " Que le colonialisme soit essentiellement un type de relation anormale, viciée, oppressive…. de tout cela j'en suis convaincue depuis longtemps… Mais c'est la relation qu'il faut redresser et non pas le cou des gens qu'il faut tordre… ". (22)
        Albert Camus, qui dénonça autant la misère arabe des années 30, que les représailles disproportionnées des massacres nationalistes en 1945, et qui prédit autant le nettoyage ethnique que le panislamisme, aurait dû y entrer depuis longtemps, mais sa famille s'y opposerait.
        Je proposerais donc l'écrivain Jean Pélégri (1920-2003), auteur de romans presque tous édités par Gallimard, notamment ''Les Oliviers de la Justice'' (dont il fit aussi un film), ''Le Maboul'' (23), et de l'essai ''Ma mère l'Algérie'' édité d'abord en Algérie (Laphomic, 1989), puis en France (Actes Sud, 1990).
        Toute son œuvre est marquée par l'idée de la complémentarité mémorielle entre l'Arabe et le Pied-Noir, par les drames de l'injustice coloniale vis à vis des Arabes, puis de l'injustice algérienne vis à vis des Européens qui voulaient rester après l'indépendance.

        " Quand il est arrivé pour moi le moment de la prise de conscience et du choix, ce ne sont pas les idéologues procédant par exclusions qui m'ont déterminé, si célèbres fussent-ils (je pense à Sartre) mais des gens simples : un ouvrier agricole, une femme de ménage illettrée, du nom de Fatima.
        Avec eux parce qu'ils parlaient juste et qu'ils n'excluaient pas les miens, j'avais confiance. Je les croyais sur parole. "…….
        " Ce ne sont pas les Français de la métropole qui détiennent le souvenir de notre vie passée et de notre famille. Ce sont certains Algériens et eux seuls. Eux seuls se souviennent des jeux de notre enfance, des usages familiaux, des paroles de nos pères, des vignes arrachées, de l'arbre planté.
        Sans eux, une partie de notre vie s'évapore et se dissipe. Là aussi, sous l'histoire apparente et cruelle, il y a une autre histoire, secrète, souterraine, qu'il faudra bien un jour inventorier. ".
        Jean Pélégri. (Maghreb dans l'Imaginaire français. EdiSud, 1985)


        " Or les Algériens sont les seuls à pouvoir nous comprendre, parce qu'ils ont connu le désespoir de ne pas avoir de patrie. Et ils sont seuls à pouvoir nous réconcilier, par l'avenir partagé, avec une partie de notre passé. "
        Jean Pélégri (Propos tenus après la présentation au Festival de Cannes de 1962 du film " Les Oliviers de la Justice ", adapté de son roman éponyme).

EN GUISE DE CONCLUSION PROVISOIRE

        Malgré le refus du repentir du Président de la République française, force est de constater que le Rapport qu'il a commandité et apparemment accrédité, est du début à la fin un acte de repentance qui ne dit pas son nom. S'il devait être maintenu tel quel, il vouera à l'échec l'ambition d'en faire un instrument de la réconciliation entre l'Algérie et la France.
        De plus, faire croire que condamner '''ce crime contre l'humanité'', dixit le Président de la République française, qu'aurait été ''la longue histoire coloniale qui a provoqué tant de blessures, de ressentiments, de ruminations mémorielles…'', dixit Stora, permettrait de mettre fin à toutes les conflictualités, et même, selon Kamel Daoud (24), de résoudre la question de ''l'islam de France'', serait tragique si ce n'était pas tout simplement comique.

        L'islamisme qui menace la France laïque n'a rien avoir avec la colonisation, mais tout avec la déferlante islamique qui est partie à l'assaut du Monde, lorsque celui-ci accepta la condamnation à mort de Salman Rushdie par l'ayatollah Khomeyni, et tout avec le déni de sa dangerosité par les élites politiques et médiatiques françaises, malgré la démonstration de sa férocité durant la ''décennie noire'' des années 90 en Algérie, et du terrorisme intellectuel en matière de religion dont l'Etat continue de se faire lui-même l'agent (25).

        Chercher dans l'histoire coloniale des explications à l'impéritie ou à la corruption des pouvoirs algériens, est une autre manière de déni d'un état de fait : la gestion autoritaire et hypercentralisée a paralysé l'esprit d'initiative, et a gelé toutes les sortes de créativité.
        Tout le monde se souvient que lorsque le président Jacques Chirac se rendit à Alger en 2003, les centaines de milliers d'Algériens en liesse ne lui demandèrent pas des comptes sur ''la longue histoire coloniale'', mais tout simplement ''des visas'' !
        Voilà qui devrait faire méditer…
        Quant aux réactions des autorités algériennes et de ses intellectuels ''organiques'', il ne faut pas non plus être grand clerc pour les imaginer…
Février 2021
''Missionné'' par ma propre conscience,
Jean-Pierre Lledo

Cet avis a été publié par la Revue politique et parlementaire :

https://www.revuepolitique.fr/rapport-de-benjamin-stora-avis-de-jean-pierre-lledo-1ere-partie/

https://www.revuepolitique.fr/rapport-de-benjamin-stora-avis-de-jean-pierre-lledo-2eme-partie/

https://www.revuepolitique.fr/rapport-de-benjamin-stora-avis-de-jean-pierre-lledo-3eme-partie/

https://www.revuepolitique.fr/rapport-de-benjamin-stora-avis-de-jean-pierre-lledo-4eme-partie/

https://www.revuepolitique.fr/rapport-de-benjamin-stora-avis-de-jean-pierre-lledo-5eme-partie/

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1 Ici, Merdaci, gratifié de ''grand historien'' sans que nous sachions à quel titre ! L'ayant connu depuis 1963, donc bien avant Stora, je puis témoigner qu'en Août 2005 alors que je préparais mon dernier film sur l'Algérie, il me parla de la conférence qu'il allait prononcer lors de la grande messe annuelle d'un ''Colloque national pour le 20 Août 1955'', en me disant son admiration pour Zighout Youcef, qualifié de ''grand stratège'', lequel dirigea le massacre au faciès de 130 non-musulmans…
2 ''Sétif, Guelma, mai 1945, Massacres en Algérie'' (2de édition), éditions de Paris, Versailles, 2011. ''20 août 1955 dans le Nord-Constantinois : un tournant dans la guerre d'Algérie ?'', éditions Riveneuve, 2011,
3ème édition augmentée 2014. ''La dimension religieuse de la guerre d'Algérie 1954-1962'', éditions Atlantis, Friedberg, 2018. ''La guerre d'Algérie, une guerre sainte ?'' éditions Atlantis, Friedberg, 2020
3 Fatima Besnaci-Lancou, Dalila Kerchouche et 49 cosignataires. Figaro du 28 Janvier 2021
4 Lire le dernier livre de Roger Vétillard, ''Guerre d'Algérie, une guerre sainte ?'' (Ed Atlantis, 2020)
5 Formule utilisée par l'historien algérien contestataire Mohamed Harbi.
6 https://algeriecultures.com/interviews/les-turcs-regnaient- par-la-force-en-algerie-bla-gheziel-historienne/
7 Selon le Professeur à l'Université de Delhi, Kishori Saran Lal, et son livre La Croissance de la Population musulmane en Inde (Growth of Muslim Population in Medieval India, 1973).
8 Le khammes est un paysan qui reçoit 1/5ème de la récolte…. quand il y a récolte.
9 https://www.cairn.info/revue-archives-juives1-2005-2-page-7.htm
10 Par exemple, en 1805, le Chef de la Nation juive, Nephtali Busnach est tué lors ''d'émeutes'', des dizaines de Juifs sont tués, des familles s'exilent. Le Grand-Rabbin d'Alger Isaac Aboulker (1755 1815) fut décapité le 7 juin 1815…
11 https://dhimmi.watch/
12 http://www.cu-relizane.dz/ETD/images/Cours-TD/FR/FR. Master01.DLA.Mr.Medd.BOUDAOUED.Cours.Malek%20Bennabi.S02.pdf
13 Le 14 juin 2000. Discours en français, devant l'Assemblée nationale française, en présence de Jacques Chirac.
14 Le MTLD (Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques) succède en 1946 au PPA (Parti du peuple algérien) interdit en 1939.
15 Long métrage documentaire sorti en Algérie et en France en 2004. N'ayant pu conserver cette séquence dans le montage du film, je l'ai mise en Bonus, dans le DVD.
16 Lire ''La judéophobie musulmane en Algérie avant, pendant, et après la période française'' de JP Lledo, in ''Juifs d'Algérie'', dirigé par Joëlle Allouche-Benayoun & Geneviève Dermenjian (PUF, 2015). Ben Khedda, président du GPRA (Gouvernement provisoire de la république algérienne, 1961-1962) n'en fait pas mystère : " En refusant notamment la nationalité algérienne automatique pour un million d'Européens, nous avions prévenu le danger d'une Algérie bicéphale " (" La fin de la guerre d'Algérie ", Casbah Ed. Alger, 1998).
17 D'après mon enquête auprès de dirigeants du FLN de Constantine, l'ordre n'est pas parti de Constantine, ce dont je suis bien persuadé. Les conséquences étaient trop importantes pour ne pas émaner du niveau de la direction suprême. Il s'agissait en effet de provoquer le départ de la communauté juive toute entière déjà victime d'attentats terroristes tout au long de la guerre et sans interruption.
18 Statut juridique islamique qui en échange ''d'une protection'' soumet les juifs et les chrétiens à toutes sortes d'humiliations.
19 Fatima Besnaci-Lancou, Dalila Kerchouche et 49 cosignataires. Figaro du 28 Janvier 2021.
(20) Messali Hadj, leader historique du nationalisme depuis les années 20, réprouva la création du FLN en 1954, créa le MNA (Mouvement national algérien), début d'une guerre d'une cruauté épouvantable tant en Algérie qu'en France qui causa des milliers de morts.
21 Propos tenus le 10 Février 2008 dans le quotidien algérien arabophone, de tendance islamique, Ech Chourouq.
22 ''A propos du vrai et du juste'' (Seuil, Paris, 2001).
23 ''Les Oliviers de la Justice'' (1959). ''Le Maboul'' (1963).
24 https://www.lepoint.fr/editos-du-point/sebastien-le-fol/kamel-daoud-france-algerie- que-faire-si-on-arrete-la-guerre-23-01-2021-2410865_1913.php


La virgule est-elle utile ?
Envoyé Par M. Régis


          Une nouvelle institutrice toute jeune qui débarque dans sa première école.
          Par malheur pour elle, la ministre de l’éducation nationale, est de sortie dans cette école.

          Voulant voir les capacités de cette petite jeune, elle demanda à assister à son premier cours, lequel justement portait sur le bon usage de la virgule.
          Sonne l’heure de la récré. Les enfants sortent en piaillant, la ministre s’approche de l’instit.
          “C’est bien, dit-elle, avec son sourire mielleux. Mais...”.
          Il y avait un “mais”.

          La ministre avait trouvé qu’une demi-heure sur la seule petite virgule, c’était un peu long.
          Surtout que, dans sa tête, elle préparait déjà le nouveau français pour les cancres.
          “Mais, Madame la Ministre, c’est quelque chose de fondamental, la ponctuation, se défendit l’enseignante.

          Tenez, allez au tableau et écrivez...”.
          Et elle fait écrire à la ministre les deux phrases suivantes :
          1 – La Ministre dit, l'institutrice est une imbécile.
          2 - La Ministre, dit l’institutrice, est une imbécile.

          Alors ! Sans importance la virgule ?
         



Nous vivons dans une drôle de France.
Par M. Robert Charles PUIG

       Cela fait un moment que je n'ai plus ouvert mon ordinateur pour lancer un cri d'alerte à ce pays qui se dilue dans le doute, l'amer et surtout dans ce besoin d'effacer, de déconstruire nos valeurs et notre histoire. Dans ce vent de tempête il me semble tanguer comme un bateau ivre. Comment peut-on être en France, cette terre de la culture, de la connaissance un territoire qui fut si grand et qui aujourd'hui se comporte comme le pire des esclaves vendu à l'Orient ?
       Je lis, j'écoute et je vois. Des politiciens qui achètent la paix des banlieues et ferment les yeux sur les révoltes des banlieues, des politiciens qui acceptent cette idée de transformer de grandes écoles en des fiefs ouverts à tout un monde sans le savoir apte à de grandes institutions ; des régions sans ordre comme on le constate dans ces quartiers soumis à la police des gangs et des cartels de la drogue puis ces policiers tués par l'islamisme radical le plus dangereux mais que l'on camoufle derrière cette idée d'un cerveau atteint de troubles mentaux pour pouvoir éviter de le mettre en accusation de meurtres ou d'incendiaires sanguinaires et que l'on ne veut pas condamner ou si peu.

       Je me demande dans quel monde la France se trouve. Il semble que l'esprit " woke " venu des U.S.A. habite notre pays et ses dirigeants. Ils ne sont plus européens au sens noble du terme. Ils sont " Bidénistes " pris dans l'idéologie progressiste du nouveau président des États-Unis, dans la nasse d'un monde nouveau, mondialisé ou rien de ce qui était notre histoire ne doit exister.
       Déjà Macron Emmanuel a pris ses distances avec ce temps de l'Algérie française, les 132 ans où cette terre maghrébine et algérienne fut française en révisant son Histoire, en tranchant une fois de plus le cou à ces aventuriers européens d'un autre siècle qui créèrent un État là où les derniers envahisseurs turcs de ce territoire ne surent que soumettre les juifs et vivre de rapines et de l'esclavage des européens pris à l'abordage par les felouques de Barberousse.

       Je vois loin dans le passé et je me rappelle le coup de l'éventail du Dey Hussein. Il gifla la France de Charles X. Ce dernier mit un certain temps avant de réagir puis il prépara le débarquement à Sidi Ferruch... Hier en ce mois d'avril 2021, le pouvoir macroniste qui n'a qu'un but, enterrer notre histoire algérienne, vient de subir un nouvel affront de la part de cette Algérie dictatoriale et haineuse qui a refusé de recevoir une délégation française menée par le premier ministre Castex. Un autre coup de l'éventail de la part du nouveau Dey Hussein de cette Algérie que même son peuple rejette. A-t-on eu une réaction du macronisme à cet insulte ? Non ! Comme si la soumission du pouvoir Exécutif parisien aux exigences FLN algériennes était la règle, comme si les menaces d'un gouvernement algérien soixante ans après la fin de notre présence étaient encore présentes dans l'esprit de ce nouveau pays vexé de se rendre compte, sans le reconnaître, que si cette nation algérienne existe, c'est grâce à nous, à l'œuvre de nos anciens, ces Pieds-noirs qui ont bâti ce nouveau monde, une Algérie qui nous doit TOUT, depuis ces maisons haussmanniennes à ses infrastructures du bord de la Méditerranée au Sahara. Mais il est un fait, une règle que ce pouvoir arabo-musulman applique pour aveugler son propre peuple, c'est celui de TOUJOURS nous accuser pour faire avaler ses propres turpitudes et la destruction de ce que nous avons construit et faire croire à son peuple inconscient de son propre malheur que nous sommes les coupables.
       C'est l'œuvre de dirigeants indignes mais à qui le macronisme accepte d'obéir sans réagir. Il s'incline devant les exigences algériennes ; il courbe le dos en une soumission d'esclave aux demandes sans cesse répétées de " repentance " comme si la France, il y a presque deux siècles, n'avait pas agi en réponse au règne néfaste d'une terre turque despotique et esclavagiste.

       De nos jours nous faisons l'objet de l'affront et du mépris algérien et il semble que des ministres FLN s'abreuvent des propos de l'historien Alain Besançon qui, évoquant la pratique soviétique de la sidération, assurait : " Intimider par le faux ; un faux si énorme, si écrasant qu'il tire sa force sidérante de l'invraisemblable audace avec laquelle il s'impose. "
       C'est ce que nous subissons et ce que notre gouvernement si progressiste prend pour argent comptant pour nous faire avaler le rôle passif des bourgeois de Calais face aux étonnantes exigences d'une gouvernance FLN et algérienne tellement " grand guignolesque. "

       Certains en France ont compris combien le pays allait mal. Des militaires retraités puis de l'Active réagissent. Ils réclament de l'ordre, de la sécurité pour le pays et le peuple. Ils espèrent des mesures pour que la France ne meure pas. Aussitôt, la meute des aboyeurs-marcheurs fonce sur eux, les traite de nouveaux putschistes, d'hommes d'un passé resurgi d'un 1961 abhorré et prônant la fin d'un règne. Unis sur les marches de l'Élysée, c'est l'artillerie lourde du " ni-ni " qui bombarde ces militaires des foudres de la mise aux arrêts. Bien entendu les médias aux ordres du pouvoir y vont de leurs couplets. Ils se revoient au temps de la braderie de l'Algérie française et Paris réarmée par les socialo-communistes pour défendre la capitale de l'assaut des parachutistes. Puis vient le mot qui désigne les coupables qui crient au feu contre les défaillances du pouvoir et on nomme en une mauvaise imitation de De Gaulle, ce " quarteron " de militaires des hommes à abattre. Il y a le feu et l'Élysée se protège en lançant son venin et sa propagande progressiste sans se rendre compte combien notre pays sombre dans le doute, l'insécurité, l'angoisse du lendemain.
       Finalement, ce que le peuple doit craindre, c'est cette approche de 2022, car à la tête du pays il y a un démiurge qui prétend déconstruire la France. Mettre au " panier " son histoire et ses grands instants de gloire. Il veut appuyer sur la touche " effacer " pour que son nouveau règne s'accomplisse et s'accouple à un monde robotisé ou l'humain n'est plus humain et la France sans frontières, fondue dans une mondialisation progressiste et libérale.
       En vérité, faudra-t-il demain laisser le pouvoir à un tel Méphistophélès ?
Robert Charles PUIG / mai 2021       
      


LA CRAINTE SOURD ! L'ETAT EST SOURD.
De Hugues Jolivet



       La crainte sourd, enfle, grandit, puis interpelle
       Président et Ministres, Députés, Sénateurs,
       Tous assis sur un siège, chacun dans sa chapelle,
       Songeant à son avenir, soignant ses électeurs !
       Le tir de sommation de Généraux conscients
       D'un climat délétère néfaste à la Nation,
       Ne déclenche pas l'alerte, mais un ordre cinglant
       A rentrer dans le rang sous peine de damnation !

       Les zones de non-droit ne sont pas cantonnées
       Aux cités des quartiers, cavernes des trafics,
       Où les Forces de l'Ordre sont toujours condamnées
       A éviter l'affront, les heurts catastrophiques !
       L'impossible paix sociale, volonté de l'Etat,
       Est un leurre et un frein à l'assimilation,
       Car contraire à l'Islam qui impose son diktat,
       Ses pratiques, ses lois, sa civilisation !

       Nos Armées sont poluées, compagnies et sections.
       En "Opex" au Mali, des hommes de troupe affirment :
       Les collègues musulmans refusent l'interception
       De leurs "frères" djihadistes, une faute gravissime !
       Le risque de guerre civile menaçant la Nation
       Ne pourra être traité par l'Armée régulière.
       Il sera fait appel aux troupes de la Légion,
       Ses Unités d'élite, fidèles et chevalières !

Le 18 mai 2021          




Aucun groupuscule n’a le droit de se revendiquer de l’OAS !
De M. M. Gomez,
Envoi de Mme A. Bouhier
               Nul ne peut s’arroger le droit d’utiliser le sigle « OAS », ni un groupuscule, ni une association, ni un individu.
                SEULS PEUVENT REVENDIQUER L’HONNEUR D’AVOIR APPARTENU À L’OAS CEUX QUI L’ONT SERVIE ET SE SONT BATTUS POUR SON « UNIQUE OBJECTIF » : CONSERVER À LA FRANCE ET À SA RÉPUBLIQUE « UNE ET INDIVISIBLE », SES DÉPARTEMENTS D’ALGÉRIE.

                Aujourd’hui ils sont peu nombreux car tous ont 75 ans et plus mais, s’il fallait se battre de nouveau pour une juste cause, ils le feraient, ils auraient encore la force d’appuyer sur une gâchette.

                Je m’adresse ici à tous ces journalistes ignares et incultes qui ont pour ordre d’influencer les esprits du peuple en tentant de faire croire que l’OAS était d’extrême droite.

                L’OAS n’avait aucune idéologie politicienne, elle n’était ni de gauche ni de droite, elle n’était pas raciste, ni antisémite. Nombreux furent les arabes et les juifs qui se sont battus dans ses rangs et sont tombés au champ d’honneur des patriotes.

                Inutile donc, messieurs les « journaleux » de mettre à profit quelques arrestations de jeunes d’extrême droite pour tenter de salir encore l’OAS.

                Si j’ai bien compris vos allégations, un groupuscule a baptisé l’un de ses projets « OAS » ! Ils auraient aussi bien pu le baptiser FFI ou FFL ou CNR, etc.

                L’OAS a eu pour cible principale le général De Gaulle, c’était tout de même une autre ambition qu’un Mélenchon, un Castaner où un autres de ces gauchistes ridicules.

                Enfin, voyons, soyons sérieux, un Castaner ! Qui peut croire que l’OAS aurait perdu une once de son énergie pour « un Castaner » ?

                L’OAS, dîtes-vous, messieurs les « journaleux », a ensanglanté l’Algérie. Permettez-moi de vous rappeler que l’OAS n’a existé que seize mois, de fin février 1961 à début juillet 1962, et que ceux qui ont ensanglanté l’Algérie de 1954 jusqu’à fin 62 ce sont le FLN et l’ALN, pas l’OAS.

                L’OAS a exécuté des individus communistes et gauchistes qui étaient les complices justement de ceux qui ensanglantaient l’Algérie, les « porteurs de valises » qui les finançaient, ceux qui fabriquaient leurs bombes et assassinaient en leurs noms, ceux qui leur fournissaient de faux papiers, de l’aide et de l’assistance.

                L’OAS a plastiqué les entreprises et les commerces de ceux qui abandonnaient leur pays en guerre pour fuir en métropole et, dans les dernières semaines, a abattu parfois, après le 19 mars 1962, date des « Accords d’Évian », des innocents pour répondre aux enlèvements et aux assassinats dont été victimes en masse la population de l’Algérie par ses « nouveaux maîtres » et tenter de remplacer l’armée française qui restait « par ordre » l’arme au pied et se déshonorait, obéissant à un chef d’état et à un gouvernement d’abandon.

                L’OAS a été créée par les plus glorieux officiers de l’armée française, les plus décorés sur les champs de bataille, et dans ses rangs se battaient du plus petit ouvrier de Bâb-el-oued et d’Oranie jusqu’au général 5 étoiles et ils n’ont pas à rougir du sang qu’ils ont versé pour la France, leur patrie et son drapeau.

                Si quelqu’un, en France, souhaite débattre sur l’OAS, il reste encore quelques hommes pour leur répondre, tous n’ont pas encore, tant mieux ! Disparus.

                N’oubliez jamais qu’après le général Salan, l’officier le plus gradé et le plus décoré de l’armée française, c’est M. Georges Bidault qui l’a remplacé à la tête de l’OAS. Georges Bidault qui fut le dernier président du CNR (Conseil National de la Résistance), l’homme qui a remplacé Jean Moulin, après sa disparition, comme responsable de la résistance française face aux nazis.

                L’OAS est née après le « putsch » des généraux dans l’unique but de conserver l’Algérie à la France.

                Ces généraux, ces officiers, ces soldats, se révoltaient contre un chef d’état qui s’était parjuré et les avait trahis, et cette trahison mettait en danger la vie de leurs hommes. De Gaulle a été responsable de milliers de morts, militaires et civils, pour sa politique programmée d’abandon.

                Après les quelques années de guerre de conquête, qui, comme toutes guerres, furent barbares des deux côtés, « les crimes contre l’humanité », Emmanuel Macron, ce n’est pas la colonisation qui les a commis, mais le FLN d’un côté et De Gaulle de l’autre

                90% de la population d’Algérie soutenait l’action de l’OAS sans y participer physiquement, y compris de très nombreux musulmans.

                Voilà ce qu’était l’OAS, messieurs les journalistes et nul ne peut, ni aujourd’hui ni demain, s’approprier ce sigle disparu dans l’honneur et la fierté du devoir accompli.

                Le plus bel hommage que l’on pouvait rendre à l’OAS, lui a été justement rendu par son ennemi le plus acharné, le général De Gaulle : « Les gens de l’OAS me haïssent parce qu’ils sont aveuglés par leur amour de la France. »

M. Publié par Manuel Gomez le 22 avril 2021

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Manuel Gomez pour Dreuz.info.


Florence Parly ne pardonne pas aux militaires de vouloir sauver la France
Par M. Jacques Guillemain.
Envoyé par M. H. Jolivet

https://ripostelaique.com/florence-parly-ne-pardonne- pas-aux-militaires-de-vouloir-sauver-la-france.html

         Décidément, la tribune des généraux dérange l'exécutif au plus haut point. Dans cette dictature de la bien-pensance qu'est devenue la France, il ne fait pas bon dire la vérité et tirer la sonnette d'alarme sur la menace existentielle qui plane sur le pays. La gauche immigrationniste est bien entendu vent debout contre les "mutins".
https://ripostelaique.com/pour-melenchon-des-generaux- qui-appellent-a-defendre-la-france-sont-des-factieux.html

         Il est vrai que cette gauche en perdition bichonne son nouvel électorat après s'être fait siphonner son traditionnel électorat ouvrier par le RN.
         Notre ministre des Armées, Florence Parly, descend donc dans l'arène en rappelant à nos étoilés en colère que "les militaires ne sont pas là pour faire campagne". Ce à quoi Marine Le Pen répond à juste titre "qu'ils ne font qu'alerter sur la situation actuelle". Et Parly veut des sanctions.
         On notera qu'à droite, seule Marine et Nicolas Dupont-Aignan ont défendu les signataires de cette tribune. Chez les Républicains, on rase les murs comme toujours. Il est vrai que chez LR, on est souvent plus en phase avec LFI qu'avec le RN. Ce n'est pas nouveau, la droite a toujours fait une politique de gauche, en pire.
         A-t-on le droit de dénoncer le délitement de la nation ? Non ! Ce qui est un comble au pays des droits de l'homme.
         Nos signataires ont-ils le profil de putschistes ? Non.
         Mais Florence Parly a néanmoins décidé de siffler la fin de la récré et veut des sanctions, d'autant plus qu'aux dernières nouvelles, ce ne sont plus 20 généraux et plus de 1000 militaires qui ont signé la tribune, mais 25 généraux et plus de 3 000 militaires. (Entendu ce jour chez Morandini).
         Des soldats qui ont servi leur patrie, acceptant le sacrifice suprême s'il le fallait, sont traités comme des rebelles alors qu'ils veulent protéger le pays du naufrage !! Comprenne qui pourra.
         Florence Parly invoque une violation du devoir de réserve. Mais dénoncer la fracture identitaire et l'échec patent de l'intégration, est-ce enfreindre le devoir de réserve ?
         Y a-t-il divulgation de données confidentielles ? Y a-t-il un putsch qui menace ?
https://www.huffingtonpost.fr/entry/tribune-des-generaux-dans-valeurs-actuelles-parly- veut-des-sanctions-le-pen-les-defend_fr_6087ba11e4b0ee126f6b8917

         La dernière victime du système qui ne souffre aucune contestation est le général Piquemal, ex-patron de la Légion étrangère, qui avait été radié des cadres de l'armée en 2016. Son crime ? Il avait participé à une manifestation interdite, contre les migrants de Calais.
         Pourtant, on ne compte plus le nombre de fois où une interdiction de manifester est violée par les participants… en toute impunité.
         La sanction fut sévère. Ce qui n'empêche pas le général Piquemal, qui a conservé son grade, de signer la fameuse tribune qui hérisse l'Élysée.
         À la menace de sanctions réclamée par la ministre de la Défense, Marine Le Pen vient de déclarer : "On aimerait qu'il y ait autant de fermeté à l'égard de la criminalité et de la délinquance qui pourrit l'existence de nos compatriotes". On ne saurait mieux dire.
         Et je ne vois pas en quoi ces militaires ont manqué de loyauté envers leur pays alors que c'est tout le contraire. Leur Patrie, ils entendent la sauver du naufrage identitaire.
         Que risquent ces militaires ?

         En matière de devoir de réserve, c'est le flou le plus total.
https://www.penseemiliterre.fr/liberte-d-expression- et-obligation-de-reserve-ce-que-dit-la-jurisprudence_942_3000457.html

         Le statut général des militaires se contente de dire que " les militaires doivent faire preuve de discrétion pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions ".
         La notion n'existe pas dans les textes législatifs et réglementaires régissant la fonction publique française. Par exemple la Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne fait nulle part mention d'un " devoir de réserve ", ni d'une " obligation de réserve ".
         Une réponse à une question écrite d'un député en 2001 le redit de façon différente :
         " L'obligation de réserve, qui contraint les agents publics à observer une retenue dans l'expression de leurs opinions, notamment politiques, sous peine de s'exposer à une sanction disciplinaire, ne figure pas explicitement dans les lois statutaires relatives à la fonction publique. […] Il s'agit d'une création jurisprudentielle, reprise dans certains statuts particuliers, tels les statuts des magistrats, des militaires, des policiers… "
         Mais il est clair que le pouvoir n'acceptera pas cette humiliation sans sanctionner pour l'exemple.
         Et le Conseil d'État suppléera aux carences de la loi si besoin.
         La sanction du général Piquemal fera sans doute jurisprudence. Radiation des cadres de l'armée, interdiction de porter l'uniforme mais conservation de la retraite.
         Une sanction symbolique diront certains. Non. "Une sanction humiliante et vexatoire" pour un soldat qui a mis sa vie au service de la Patrie, nous dit le général Piquemal.

         Enfin soulignons, alors que cette affaire tourne à l'hystérie collective, la sagesse d'Hélène Conway-Mouret, sénatrice socialiste des Français établis hors de France et rapporteuse défense de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, qui appelle à relativiser.
         " C'est une tempête dans un verre d'eau " estime la sénatrice. Bravo !
         Oui madame la sénatrice, mais ce gouvernement qui a échoué sur tout et laisse le pays couler, devrait se demander pourquoi autant de généraux, d'officiers et de gradés tirent par milliers la sonnette d'alarme.
         Au lieu de quoi la ministre fait éplucher tous les dossiers de ces éminents patriotes pour débusquer un militaire d'active !
         Le pays est en grand danger de désintégration et on persécute des soldats qui ont servi la nation parfois au péril de leur vie, parce qu'ils crient "la Patrie en danger" ! C'est sidérant.
         Et dans le même temps on libère des centaines de jihadistes qui ne rêvent que de détruire la France ! Nous sommes gouvernés par des fous.
         On devrait les féliciter tous ces courageux militaires.

Jacques Guillemain - Avril 27, 2021


Sanctions contre les généraux :
craindraient-ils le peloton d'exécution ?

Par Jean d'Acre
Envoyé par M. H. Jolivet

https://ripostelaique.com/sanctions-contre-les-generaux- craindraient-ils-le-peloton-dexecution.html

        Suite à l'appel au retour à l'honneur de nos gouvernants par un groupe de militaires, on a eu droit à une levée de boucliers d'une grande partie de la classe politique et médiatique.

         Madame Parly s'est fendue d'une remarquable erreur d'analyse qui ne l'honore pas du tout avec le devoir de réserve, la gauche a crié au putsch, comme si une prise de pouvoir par des militaires se déclarait d'avance par une annonce de presse.
        De son côté, madame Runacher s'est allée à une comparaison avec l'appel de 1961 en évoquant un quarteron de généraux en charentaises, et la gauche mélanchoniste en a avalé son cigare castriste à s'en étouffer : on a du mal à trouver des lits de réanimation, c'est pas le moment pour nos politiciens de faire encore plus les zouaves, ils le sont déjà assez.

        Il faut revenir au texte et examiner la phrase qui fait le plus polémique : " Par contre, si rien n'est entrepris, le laxisme continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une explosion et l'intervention de nos camarades d'active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national. On le voit, il n'est plus temps de tergiverser, sinon, demain la guerre civile mettra un terme à ce chaos croissant, et les morts, dont vous porterez la responsabilité, se compteront par milliers ".
        Ce que ne supportent pas les politiciens actuels et qui les conduit à une inflation de verbiage totalement décalé de la réalité du pays, et on l'a vu avec la pandémie actuelle, c'est d'être mis en face de leurs responsabilités d'avoir à faire face à des milliers, peut-être des centaines de milliers de morts, par la guerre civile inéluctable dont ils ont eux-mêmes mis en place les éléments de sa réalisation par une immigration massive, notamment musulmane mais pas que, qu'ils ont favorisée.

        Cette peur bleue explique leurs réactions : ils veulent bien la guerre civile, mais refusent le peloton d'exécution qui sera chargé de rendre la sentence dès que la seule qu'ils devraient encourir sera prononcée. Pourtant il faudra bien qu'ils assument, quand les forces de l'histoire se mettent en marche, plus grand-chose ne peut les arrêter, et en tous les cas pas les pusillanimes gouvernants actuels.
        Ce que l'appel de ces militaires laisse craindre, vu le chaos allogénique actuel qui s'est répandu comme une mauvaise peste dans tout l'Hexagone, c'est que le sol national devienne sous très peu un théâtre d'opérations extérieures que rien ne distinguera du Mali ou de l'Afghanistan. Il suffit de passer un peu de temps dans les quartiers, les grandes villes et leurs banlieues pour se rendre compte de la tiers-mondialisation totale du territoire et son envahissement incontrôlable et incontrôlé par les haineux.

        Les militaires qui voient la police se faire botter les fesses tous les soirs dans toutes les banlieues sans jamais oser défourailler sentent bien que la vie tranquille n'en a plus pour longtemps dans ce pays : ils en ont trop connu, des théâtres d'opérations extérieures, pour ne pas faire le rapprochement entre la faiblesse des États d'Afrique ou d'Asie où ils sont intervenus ou interviennent et la situation actuelle de la France.

        Les militaires qui voient et lisent un président de la République, donc constitutionnellement leur chef en qualité de chef des armées, se répandre dans les médias américains en affirmant qu'il faut déconstruire l'Histoire de France, quand un tel Président se rend à Alger et se met à genoux pour allégeance, les dirigeants d'Alger lui faisant remarquer que la France est l'ennemi éternel, et qu'ils le voient s'en revenir sans rien dire, laissant en place toute son ambassade, ont bien raison d'y voir le signe du déshonneur.

        Les militaires qui voient des dirigeants européens se rendre chez Erdogan, et madame Ursula von der Leyen se laisser cantonner d'office à sa place de femme au divan du sérail, prête à l'emploi pour la jouissance du Sultan sans que l'Europe ne lève le moindre sourcil, déjà soumise, sentent bien qu'il n'y en a plus pour longtemps sur ce continent, avec 4 millions de Turcs en Allemagne et 1 million en France dont tous les gouvernants civils ont une telle peur qu'ils leur accordent des milliards de faveurs et de subventions pour construire des mosquées et des écoles coraniques. Ces militaires sont obligés de faire le parallèle avec la Serbie, Milosevic, les Balkans et le Kosovo, et se demandent tout simplement maintenant qui va dégainer le premier.

        Car ces militaires ont bien vu l'Arménie attaquée par les forces azerbaïdjano-turques sans que l'Europe ne bouge ni ne lève le petit doigt, les dirigeants de l'Union continuant de se prosterner devant le même sultan turc : ils sont obligés d'en conclure, comme tout homme censé enseigné sur l'histoire de l'Humanité, que cela allait bientôt, un jour ou l'autre, déferler sur Paris si personne ne se lève comme c'est le cas depuis trente ans.

        Ces mêmes militaires qui voient les villes de France devenues théâtres d'opérations d'armées ennemies étrangères qui règlent leur litige à la mosquée de Dijon, la police française terrée dans son "bunkerkomissariat", ne peuvent y voir que le signe du délitement qui préfigure l'effondrement comme celui de l'URSS dans les années 90.
        Ces militaires qui lisent la presse savent que le gouvernement actuel laisse même les milices d'Erdogan sillonner les rues de France à la chasse aux opposants et au Kurdes.
        Voir de véritables armées étrangères, un jour ou l'autre leurs ennemies, vaquer tranquillement sur le sol national leur fait comprendre à quel degré d'avilissement en est arrivé le pouvoir civil français actuel.
https://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/sur-la-piste- des-commandos-d-erdogan_2016248.html

https://kurdistan-au-feminin.fr/2020/09/14/france-le-cdk-f- denonce-la-chasse-aux-kurdes-du-quai-dorsay/

        Ces militaires, qui ne sont pas sourds, entendent les dirigeants musulmanisés du Pakistan et du Bangladesh qui appellent à tuer des millions de Français, et Paris qui ne répond rien, tandis que des Pakistanais installés aux frais du contribuable en France paradent dans les rues, hachoir à la main, pour égorger du mécréant, comprennent que ce n'est pas avec un pouvoir civil de cet ordre actuel que la civilisation occidentale va en sortir vainqueur.
        Ces militaires, qui ont appris l'histoire de France, ne peuvent que faire le parallèle entre la période actuelle et le grand effondrement de mai 1940, et ont bien raison de s'y préparer.

        On voit déjà que les administrations de l'ordre public ne répondent plus à aucun levier : toute une partie de la magistrature a déjà fait cause commune avec la voyoucratie et les islamiques, les policiers, pourtant légalement armés, ne se défendent même plus, préférant brûler dans leurs voitures de service plutôt que de défourailler et buter tout ce qui bouge comme cela devrait l'être quand la vie est en jeu lorsqu'on est attaqué.
        Ce qui empêche le citoyen de comprendre les enjeux de civilisation dont il est fait état dans l'appel des militaires et pourrait lui laisser accroire à une exagération de la gravité de la situation par ces derniers, c'est l'omerta générale de l'ensemble médiatique à la botte du pouvoir, toutes les rédactions de la " bonne " presse ayant reçu l'ordre de se taire ou de largement minimiser les faits anti-France quotidiens. C'est cette volonté de mettre un couvercle sur la réalité qui a conduit le pouvoir à dissoudre Génération Identitaire : ils n'étaient pas dangereux dans leurs actes mais devenaient dangereux à mettre le réel au vu et au su de tous sur le devant de la scène. Finalement les " En Marche " ne font rien que copier Orban en matière de censure qu'ils dénoncent par ailleurs, c'est l'ironie de la chose.

        Pourtant les quelques faits que je rappelle ci-dessus montrent bien la réelle déliquescence de la Nation qui fonde cet appel de soldats.
        Et si l'effondrement comme celui de 1940, inéluctable compte tenu de la trajectoire de veulerie actuelle de nos politiciens, se produit, comme en 1940 tout le monde fera l'étonné car toute la période préalable au désastre qui y aura contribué aura été soigneusement cachée aux citoyens par les complices médiatiques du pouvoir. Dans les termes comme dans la forme, cet appel n'est en rien un appel au putsch mais au contraire un appel à la lucidité face aux réalités : quand des pays musulmans déclarent qu'il faut tuer des Français et que la France est l'ennemi éternel, on ne laisse pas les ressortissants de ces pays baguenauder impunément sur le sol national, ni les 5 colonnes croître et prospérer en toute tranquillité.

        Cet appel est un pré-appel de Londres face aux Munichois qui déclarent toujours négocier, on a vu où cela mène avec les gens de mauvaise foi, c'est bien le cas de ces pays musulmans qui n'ont pas la bonne foi de la paix mais celle de la haine, et il faut vraiment être, soit un politicien moyen français comme il y en a de trop, soit un traître, pour ne rien vouloir voir, comme il en a été en 1938.
        Madame Parly s'empêtre dans son désir de sanctions administratives et de devoir de réserve.
        Imagine-t-on le général de Gaulle à Londres ne pas faire son discours devant le risque d'un blâme de la part du ministère des Armées du maréchal Pétain ?
        Non, Madame Runacher, le quarteron en charentaises ne veut pas le pouvoir, mais le sauver du chaos où l'entraîne votre soumission aux ennemis de la France. Votre réaction montre que vous habitez dans un univers parallèle qui vous empêche de lire et comprendre le français, et que vous avez séché les cours d'histoire dans votre jeunesse en confondant l'appel de Londres avec l'appel d'Alger.

        C'est ici encore la marque de la totale déliquescence de la classe politique du pays de ne rien comprendre aux réalités du monde et du territoire, de l'Histoire et des futurs qui se gravent dans le granit du vouloir de l'aujourd'hui, pas sur les sables des déserts de volonté.
        Il y a un dernier détail de l'Histoire que la classe politique actuelle n'a pas saisi : par leur engagement, leur formation et les valeurs consubstantielles à la notion d'armée nationale, les militaires français ne sont pas aux ordres d'un parti, qu'il soit au pouvoir ou non, mais doivent aux nécessités de la République, de la Nation et de ses citoyens.

        La Nation en danger comme actuellement, ils doivent obéir à la France, pas à leurs supérieurs ni aux gouvernants qui voudraient les empêcher.
        On se rappellera Ferrat qui chantait Potemkine et ses marins qui tournèrent leurs carabines.
Jean d'Acre Avril 27, 2021

        Quelques pages sur cet appel :
https://www.valeursactuelles.com/politique/pour-un-retour-de-lhonneur- de-nos-gouvernants-20-generaux-appellent-macron-a-defendre-le-patriotisme/

https://www.lefigaro.fr/flash-actu/la-gauche-s-insurge-contre-une- tribune-de-militaires-et-l-appel-de-marine-le-pen-20210424

https://www.valeursactuelles.com/politique/marine-le-pen- messieurs-les-generaux-rejoignez-moi-dans-la-bataille-pour-la-france/



La grande muette l'ouvre sur les ondes :
Jusqu'où peut aller la désobéissance civile?

Par M. Nicolas Gauthier
Envoyé par M. H. Jolivet

https://www.bvoltaire.fr/la-grand-muette-louvre-dans- valeurs-actuelles-jusquou-peut-aller-la-desobeissance-civile/  

        Manifestement, la lettre ouverte signée par une vingtaine d'officiers supérieurs à la retraite et publiée sur le site de Valeurs actuelles n'en finit plus de faire des vagues. À droite, pour commencer, où l'on n'a jamais été tout à fait guéri du syndrome du militaire providentiel, entre généraux Boulanger et Villiers. Mais plus intéressantes sont les réactions d'une gauche stigmatisant une " désobéissance civile " à géométrie variable : "démocratique " quand pratiquée par son camp, mais donnée pour " factieuse " dès lors qu'elle concerne celui d'en face.

         Évacuons, tout d'abord, l'anachronisme historique, pire ennemi des historiens, comme chacun sait. Avril 2021 n'est pas avril 1961. Le putsch d'Alger participe d'une autre histoire et, soixante ans après, il n'est plus tout à fait question de sauver l'Algérie française. De plus, on se souviendra que les généraux Salan, Challe, Jouhaud et Zeller n'étaient pas " d'extrême droite ", tel qu'on voudrait nous le faire croire aujourd'hui, mais seulement des héros de la Seconde Guerre mondiale, tous gaullistes, mais aussi déçus par ce même gaullisme. Ce qui n'empêche pas que les premiers résistants venaient de cette même " extrême droite ", tel que rappelé par Simon Epstein dans son essai, Un paradoxe français. Mais il s'agit encore, là, d'une autre histoire…

         On passera donc sur les déclarations de Florence Parly, ministre de la Défense, qui voit chez ces pétitionnaires des " gens qui attisent la haine ", alors qu'ils " ne représentent qu'eux-mêmes ". Il faudrait savoir : cette question est-elle dramatique ou tout simplement anecdotique ? C'est selon, l'une ou l'autre, mais pas les deux à la fois. Et là, le gouvernement se retrouve plus que gêné aux entournures.
        Car aux origines de cette même " désobéissance civile ", il y a un autre général, Charles de Gaulle, " l'homme qui a dit non ", fondateur de notre Cinquième République, ayant opté pour la légitimité contre la légalité. Comme quoi les militaires révoltés n'ont pas fait que du mal à la République, même si fille de cette Révolution française parvenue au pouvoir par la force pour ensuite s'y maintenir par la terreur avant qu'un autre général, Napoléon, ne vienne y remettre bon ordre. Bref, ce ne serait pas la première fois que la gauche française se trouverait fâchée avec l'Histoire, la sienne, et celle de la France au passage.

         Mais là où le "Système " commence à dérailler pour de bon, c’est qu’il n’est plus capablecommence à dérailler pour de bon, c'est qu'il n'est plus capable de faire la différence entre " désobéissance civile " d'agitateurs professionnels, pro-migrants, pro-islamistes ou pro-mariage pour tous, ne risquant qu'une Légion d'honneur ou une montée des marches au Festival de Cannes, tel le cinéaste Cédric Herrou, et la sourde colère montant de cette France donnée pour être " profonde ", cette majorité dite " silencieuse " ayant commencé à faire entendre sa voix, gilets jaunes en tête. La preuve en est que les militaires signataires, pourtant épris d'ordre - leurs devanciers n'ont-ils pas fusillé, sans pitié, le peuple des communards ? - s'émeuvent désormais face au traitement plus que sauvage exercé face à cette jacquerie.

         Tous les pouvoirs ont toujours eu deux craintes. La première consiste en ce moment charnière où le gouvernement ne peut plus et où le peuple ne veut plus. La seconde, c'est quand les forces de l'ordre commencent à fraterniser avec ceux qu'ils sont censés réprimer.

        La France n'est certes pas au bord de l'insurrection. Mais cela pourrait nous annoncer une prochaine élection présidentielle plus qu'inattendue.
Nicolas Gauthier 27 avril 2021



Le Père Richard KALKA
Envoyé par Mme A. Bouhier

Le Père Richard KALKA, ancien aumônier des parachutistes de 1985 à 2015, répond au Chef d'État-Major des Armées, François LECOINTRE, suite à sa prise de position concernant la tribune des généraux publiée dans Valeurs actuelles.
https://lalettrepatriote.com/lancien-aumonier-des-parachutistes- 1985-2015-admoneste-le-chef-detat-major-des-armees/

        Au chef d’état-major des armées :

        Mon Général, nous nous sommes croisés la dernière fois en juin 2019, au colloque consacré au 25ème anniversaire de l’opération Turquoise. Je ne suis pas très connu dans l’armée française, mais l’armée de terre me connaît, surtout les parachutistes. La plupart des soldats savent qui je suis : celui qui, depuis 1985, les a accompagnés sur tous les théâtres d’opération. Je dis bien « tous », jusqu’à l’Afghanistan, la dernière mission de mon parcours. J’ai toujours répondu « présent » pour être en tant que prêtre, ami et frère d’armes dans n’importe quelles conditions à côté de ceux qui avaient besoin de moi. Dans « la boue, la sueur et la bagarre », comme ils disaient. Et ils étaient nombreux, très nombreux. Il suffit de leur poser la question ; encore faut-il pouvoir le faire, car pour les questionner il faut être près d’eux, à leur côté. Ce qui n’est plus ton cas depuis fort longtemps, même si tu peux t’encenser d’un fait d’armes à Sarajevo, grâce au courage des soldats-marsouins de ta section.

        Comme tu le sais - mais tu préfères l’ignorer - nous étions deux ou trois fois sur les mêmes théâtres d’opération. Aujourd’hui, nous sommes aussi ensemble au combat, mais ce combat est d’une autre nature. Tout chef, lorsqu’il doit prendre des décisions importantes, est seul. J’ai connu, à plusieurs reprises, cette solitude des chefs : dans certains cas, ils m’ont demandé de prier pour eux. Comme aujourd’hui, je prie pour toi. Mais il y a deux catégories de chef et deux sortes de solitude. Le premier est pendu au câble du téléphone et attend les directives venant d’en haut. Quelles que soient ces directives, il les accepte sans broncher, car il ne pense qu’à son avancement. Le second se met devant Dieu et sa conscience, et décide. Oui, je sais, ce n’est pas évident de prendre ce genre de décision, c’est même très dur d’assumer ainsi cette volonté qui pourrait être, et en général elle l'est, celle du Ciel. Elle vient toujours du Ciel, d’ailleurs, dès qu’il est question de vérité, de courage et d’honneur.

        En voulant aujourd’hui punir et sanctionner les soldats – je les appelle « soldats », quel que soit leur grade parce qu’ils ont eu le courage d’aller au feu – tu revêts l’uniforme du premier, celui qui ne pense qu’à lui et à son avancement. En es-tu fier ? Quel avancement, puisque tu es au sommet de la carrière militaire ! Je te plains sincèrement : tu devras un jour en répondre devant Dieu, si tu es croyant. En attendant, tu pourras t’enorgueillir d’avoir cassé tes Anciens qui n’avaient pour bouclier, face au pouvoir politique indigne, que leur honneur mué en un cri d’alarme. Et surtout tu pourras te complimenter d’avoir puni sous les feux de la rampe des soldats plus jeunes parce qu’ils avaient osé s’associer à ce cri de désespoir, à la vérité qu’il traduit. Tu pourras te vanter d’avoir en même temps jeté l’opprobre sur les Anciens et sanctionné des Jeunes, à cause de leur courage."


        
        Le Père KALKA fut aumônier du 1er régiment de chasseurs parachutistes, mais aussi ancien curé de Mazères dans le Gers. D’origine polonaise, il est marqué dans son adolescence par le joug soviétique. À l’âge de 16 ans, saisi par la foi, il trouvera son chemin. Après son bac, ce sera le séminaire et l’ordination en 1975.
        En 1978, il arrive en France pour continuer ses études. Ne parlant que quelques mots de français, Richard KALKA travaille la langue de Molière pour, par la suite, intégrer la Sorbonne et ressortir quelques années plus tard avec un doctorat en philosophie.
        Il devient aumônier militaire en 1985 et est amené à accompagner et soutenir par sa présence pendant près de trente ans les soldats, plus particulièrement les parachutistes et les légionnaires, aux quatre coins du monde : au Tchad, au Cambodge, dans le Golfe, au Rwanda, à Sarajevo, au Kosovo, en République centrafricaine, au Burundi, au Gabon ou encore en Afghanistan.
        Son engagement lui a valu d’être titulaire de nombreuses décorations parmi lesquelles le grade de chevalier de la Légion d’honneur, la Croix de guerre des théâtres d’opérations extérieurs avec une citation, la Croix de la valeur militaire avec une citation et depuis le 8 mai 2018 il est élevé au grade de commandeur de l’ordre national du Mérite, dont la médaille lui est remise par le général de division Frédéric THUET.
        Ce père hors normes qui aime dire «je ne crois pas en Dieu, je vis avec» a également publié deux livres : «Dieu désarmé, journal d’un curé de campagne» et «Père Jego, un prêtre, un para, une légende».




“Se réveiller ou mourir”
Par M. Jacques Guillemain.
Envoyé par M. A. Bouhier
Désastre annoncé ... Restez assis et lisez sereinement ..!!!

         Question bête: Est-ce ce qui suit qui va changer l'avenir de la France?? Depuis le temps que tout le monde dénonce cette situation, que les dirigeants ignorent! Combien de temps cela va-t-il durer?

         Rioufol met les pieds dans le plat : se réveiller, ou mourir ! ( A lire jusqu'au bout )
         C’est par ces deux mots qu’Yvan Rioufol conclut sa chronique hebdomadaire dans le Figaro.

         Et de son côté, Édouard Philippe annonce des lendemains douloureux, au pays des Bisounours et des inconscients :
         “Je pense que nous allons affronter une tempête – une tempête économique, une tempête sanitaire, une tempête à tous égards – et peut-être une tempête sociale, peut-être une tempête politique. Et je pense que les temps qui viennent sont des temps difficiles”.

         Il aurait pu ajouter une tempête identitaire et confessionnelle, tant le chaos racial et l’arrogance islamiste ont pris possession du pays.

         Qu’on apprécie ou pas l’ex-hôte de Matignon, celui-ci a le mérite de parler vrai, même s’il n’ose mentionner l’immigration comme cause majeure de ruine, de violence et de désordre. “Une tempête à tous égards”… l’ex-Premier ministre ne croit pas si bien dire.

         Et il est vrai que tout s’effondre, et pas seulement l’économie, ravagée par la pandémie du Covid-19 et par une immigration de masse, qui coûte plus cher en social que sa contribution au PIB. La France cigale, qui danse inconsciemment depuis la fin des Trente Glorieuses et a cru pourvoir partager ses richesses et son fabuleux social avec toute la planète, est au bord de la faillite et du chaos social et racial. Le peuple va payer au centuple les décennies de trahison de ses élus, mais également son incroyable aveuglement.

         Car si les élus ont pu détruire le pays en une seule génération avec autant de facilité, c’est grâce à l’appui constant des électeurs lors de chaque scrutin. A chaque sondage les Français se montrent lucides sur les maux du pays, mais à chaque élection ils persistent à mal voter, c’est-à-dire à reconduire ceux qui coulent la nation depuis si longtemps. Les fossoyeurs de la France n’ont jamais volé leur mandat. Ils ont toujours été élus. Dans notre France de 2020, tout part en vrille et il n’y a aucun pilote capable d’en sortir. Le mouvement des Gilets jaunes, qui avait espéré renverser la table en faisant trembler Macron, a été laminé par la violence des Black Blocs et les voyous des cités. Le mouvement est mort. Les plans sociaux vont s’enchaîner à grande vitesse et le fiasco ” Bridgestone” n’est qu’un petit épisode de l’hécatombe à venir.

         La sphère politique est dévastée. La droite, depuis trois ans, n’a ni leader ni programme, au point que ses rescapés rallient en masse la Macronie. A gauche, communistes, socialistes, France insoumise et Verts voudraient nous refaire le coup de la grande union de 1981. Autant dire que c’est l’Apocalypse à l’horizon…

         Quant au RN, il en est venu à défendre la députée raciste Obono , pour un article de fiction paru dans Valeurs Actuelles, seul journal de droite du pays. C’est dire combien le RN se macronise, obsédé par sa dédiabolisation.

         Les mouvements racialistes et islamistes ont pris le pouvoir un peu partout en France, permettant au Verts de rafler la mise dans les grandes villes. Les minorités font la loi. Tandis que Macron feint de dénoncer le séparatisme, les coloniaux, indigénistes et islamistes sont comme des poissons dans l’eau.

         Seuls les populistes, les identitaires et les patriotes sont dans le collimateur du pouvoir, des élites et parfois de la justice.
         Macron accélère l’immigration comme jamais. En 2019, ce sont 177 000 demandeurs d’asile qui ont frappé à la porte de la France, pays du tout gratuit, paradis des migrants économiques et des sans-papiers. Un record. Mais les expulsions, déjà rarissimes, sont en chute libre. Un clandestin est protégé comme un VIP par un filet juridique démentiel, qui le met à l’abri pour des années, voire à vie. Les policiers, qu’on peut traiter de “nazis” en toute impunité dès qu’ils font leur travail de maintien de l’ordre, contrôlent systématiquement les clandestins en pure perte. Plus de 110 000 contrôles sont effectués chaque année, mais la justice ne suit pas.

         En France, un squatteur n’a besoin que d’un ticket de pizza pour prouver qu’il est chez lui depuis 48 h. Mais le propriétaire des lieux depuis 30 ans doit prouver son identité et fournir un acte de propriété. Moyennant quoi, selon le bon vouloir du juge et du préfet, il pourra récupérer son bien dans les deux ans, le plus souvent saccagé. Et si le propriétaire se réinstalle chez lui de force, il y a violation de domicile puisque le squatteur est chez lui selon la loi. Et dans ce cas, les peines de prison et d’amende encourues sont le double de celles du squatter !
         C’est cela la France de 2021 !

         Voilà des décennies que les gouvernements, de droite comme de gauche, refusent de changer la loi, pour ne pas déplaire aux associations et aux anticapitalistes de tout poil. Cette loi ne changera que quand des élus et autres nantis du système se feront squatter leur résidence secondaire. Et avec le tsunami migratoire, cela ne va pas tarder.

         En France, on baisse la retraite des Français, mais on accorde 880 euros à tout étranger de 65 ans qui n’a jamais travaillé ni cotisé dans notre pays. Des millions de Français ne perçoivent pas cette somme, si, avec leur conjoint, ils dépassent 1 400 euros par mois. Bien des femmes d’artisan, qui ont aidé leur mari, n’ont droit à rien, si celui-ci dépasse ce seuil de 1 400 euros pour un couple. Cela s’appelle la justice sociale…

         En France, 140 000 SDF logent sous les ponts, mais 25 000 clandestins sont logés à l’hôtel chaque soir. Le droit au logement, c’est à la gueule du client.

         En France, on peut organiser des évènements interdits aux Blancs. Toutes les élites détournent aussitôt le regard pour ne rien voir. Mais ces mêmes élites s’abattent en meute sur le pauvre pâtissier qui appelle son gâteau “tête de nègre”, comme le faisait son père ou son grand-père, bien avant la toute-puissance du terrorisme intellectuel.

         Ni la droite, ni la gauche n’ont voulu protéger le peuple français. La préférence étrangère est systématique.
         Il semblerait néanmoins que les citoyens ouvrent les yeux sur l’ampleur du désastre national.

         Selon un sondage paru dans Le Monde :
         78 % des Français pensent que leur pays est sur le déclin
         60 % jugent la mondialisation dangereuse
         82 % réclament un vrai chef pour remettre de l’ordre
         55 % sont pour le rétablissement de la peine de mort.


         Nous assistons, comme le dit Yvan Rioufol, à l’effondrement d’un système qui ne maîtrise plus rien : “Ni la sécurité, ni l’autorité, ni l’immigration, ni le roman national, ni les lois essentielles, ni la monnaie”.

         L’édifice vermoulu de la Ve République s’écroule. Seules les redistributions sociales massives, financées par l’emprunt, retardent l’effondrement final.

         Macron nous mène au chaos généralisé, car il refuse d’admettre que les peuples ont une identité propre, une Histoire qui leur appartient et des traditions qui ne sont pas celles des autres peuples. Le multiculturalisme conduit notre France millénaire tout droit en Enfer.

         Ils sont une poignée, comme Zemmour, Rioufol et quelques autres mousquetaires, à batailler pour défendre la France que nous ont léguée nos ancêtres. Mais qui les écoute ? La torpeur du peuple n’a que trop duré.

         “Se réveiller ou mourir”, il n’y a pas d’autre issue possible.
Jacques Guillemain
Ancien Officier de l'armée de l'Air
Pilote militaire puis pilote de ligne.

Repentance....
Envoyé Par
Lettre ouverte à monsieur Macron,
par le Général de corps d’armée (2s) Michel Franceschi
Tribune 10/02/2021-RV-


        Ancien inspecteur des Troupes de Marine, héritières des Troupes Coloniales, j’ai l’impérieux devoir de prendre es qualité leur défense morale, en réaction à votre diabolisation de la colonisation. Ma carrière d’officier colonial épanoui, à la charnière de la colonisation et de la décolonisation de l’Afrique, me confère le double caractère d’acteur de terrain et de témoin privilégié. Je me sens donc parfaitement qualifié pour vous administrer une salutaire leçon d’histoire que vous n’aurez pas volée.

         Tout d’abord, je dois vous rappeler que la conception de l’épopée coloniale de la France fut l’œuvre de grands Républicains appartenant au Panthéon de votre obédience politique. N’est-ce pas Jules Ferry qui a voulu « porter la civilisation aux races inférieures » ? Albert Sarraut a défini notre « politique indigène comme étant la Déclaration des Droits de l’Homme interprétée par Saint Vincent de Paul » (sic). De son côté, Léon Blum a déclaré en 1925 à la tribune du Palais Bourbon « il est du devoir des races supérieures de venir en aide aux races inférieures ». Et honni soit qui mal y pense de ce vocabulaire !!!

         Les prestigieux artisans de cette grande œuvre humaniste s’appelèrent Gallieni, Lyautey, Savorgnan de Brazza, Auguste Pavie, Charles de Foucauld et autre docteur Schweitzer, figures de proue d’une nombreuse cohorte de valeureux exécutants plus humbles. Résumons leur œuvre à l’essentiel. Ils ont d’abord libéré les populations autochtones du joug sanguinaire de ce que l’on a appelé les « rois nègres », à la source de l’immonde chaîne de l’esclavage qu’ils ont aboli. Ils ont mis un terme aux perpétuelles guerres tribales qui saignaient à blanc le continent africain, apportant un siècle de « paix française ». A défaut d’une totale liberté qui n’était pas l’aspiration prioritaire, ils ont apporté l’Ordre et la Justice de nos admirables administrateurs coloniaux. Ils ont éradiqué les épidémies qui anéantissaient des tribus entières. Ils ont fait disparaître les endémiques famines qui aggravaient la dépopulation.

         Libre à vous, monsieur Macron, de penser que les conquêtes de la Liberté, de la Paix et de la Santé sont des crimes contre l’humanité !

         Il est de notre devoir de Français d’honorer la mémoire de tous ceux qui ont laissé leur vie dans cette grandiose aventure humaine dont nous devons être fiers. J’ai pu me recueillir sur bon nombre de leurs sépultures, qui jalonnent notre épopée coloniale. J’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour remédier à leur état lamentable, jusqu’à m’attirer les foudres d’une administration lointaine. En ces lieux émouvants, cadres et simples soldats côtoient leurs frères d’armes du service de santé, particulièrement éprouvés par leur place en première ligne des épidémies. Ces Français de condition modeste avaient votre âge, monsieur Macron. Ils avaient quitté courageusement le cocon métropolitain pour servir la France au loin sans esprit de lucre et au mépris des dangers encourus. Alors, de grâce, daignez leur accorder un minimum de respect.

         Voilà, monsieur Macron, ce que j’ai eu à cœur de vous dire. Au Tribunal de l’Histoire devant lequel je vous ai fait comparaître, je laisse à votre conscience et au suffrage universel le soin de prononcer le verdict.
Général de corps d’armée (2s) Michel Franceschi

Lettre d'information - Mai 2021
www.asafrance.fr
Envoi de l'ASAF
      
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La ligne, la crête et la plaine

      En se succédant et en s’amplifiant, les tribunes, les pétitions et leurs commentaires entraînent, auprès des responsables de l’ASAF, des réactions tant des adhérents que de nos amis, qui sont l’occasion d’une réflexion sur le positionnement, pas toujours bien compris, de notre association.

      Rappelons donc, en guise de « ligne » que nous sommes d’abord des citoyens, libres d’opinion, réunis par un souci commun : celui de la force des armes de la France, indissociable d’une Nation libre et souveraine et au service des intérêts supérieurs du pays que sont sa liberté et sa souveraineté. De ce fait, si l’ASAF est apolitique au sens partisan du terme, elle atteint au Politique, compris comme souci ou soin de la Cité, étant entendu que s’attacher à défendre nos armées sans se préoccuper de leur finalité ultime et de la situation du pays qui forme leur substrat serait absurde.

      C’est précisément cette situation qui nous inquiète, comme elle inquiète, depuis longtemps, une grande majorité de nos compatriotes. Sauf à mépriser les sentiments venus de la profondeur d’un peuple, il n’est pas possible d’ignorer l’effet produit sur les esprits par la fragmentation de la société, la violence croissante et souvent impunie ou les tentatives de reconstruction de l’Histoire, le tout se greffant sur un affaiblissement moral et intellectuel reconnu par des personnalités de tous horizons.

      Dans un tel contexte, il n’est pas surprenant, sur le fond, que se manifestent des gardiens de la Cité, anciens ou actuels, alors que par ailleurs l’on pourra toujours évoquer des risques de récupération politique. S’il appartient à l’Institution, pour ce qui la concerne, de se prononcer sur la forme prise par cette expression, il n’en reste pas moins que ces tribunes, les postures et les exclamations outragées qui les accompagnent nous appellent aussi à réfléchir : à l’émotion doit succéder la raison, à la stérilité des polémiques doit être préférée la fécondité des enseignements. En d’autres termes : « Prenons de la hauteur ! Tenons la crête ! ».

      De ce point de vue, c’est peut-être, ces derniers jours, la question de la relation entre l’État et son bras armé, plus que celle du devoir de réserve stricto sensu, qui mérite réflexion, compte-tenu à la fois de notre longue histoire et des gros temps qui s’annoncent à l’horizon. Sans instrument de mise en œuvre de la violence légitime ou sans volonté ferme et déterminée de l’exercer, l’État ne serait plus qu’une organisation frappée d’obsolescence. Mais sans État, lui assurant ressources, écoute et reconnaissance, l’autorité militaire ne serait rien, et de la combinaison des carences naîtraient le malheur, la relégation ou la disparition de la Nation.

      En réalité, nous recommençons à découvrir, nous, Français, que nos destinées individuelles et collectives ont partie liée avec les destins indissociables de l’État et des armées qui, elles, doivent être le rappel permanent à un ordre dérangeant des choses : c’est là d’ailleurs que réside une grande part de leur légitimité.

      Ces considérations faites, il faut redescendre dans la plaine, réelle ou virtuelle. C’est là où se frottent les intelligences, s’affrontent les volontés et se confrontent les opinions, là où celui qui a le souci de la Cité et de ses soldats, fort de points de vue mûris et documentés, informe par de multiples procédés et, le cas échéant, débat et intervient.

      En tout état de cause, avec la perspective des élections présidentielles de 2022, les mois qui viennent ne manqueront pas de fournir matière à réflexion et action dans les domaines de la sécurité et de la défense : il faudra saisir les occasions offertes, au-delà des controverses de forme qui ne sont pas toutes négligeables, pour que soient mis en lumière, avec intelligence et souci du Bien Commun, les grands enjeux qui conditionnent notre avenir et que soient explicitées les réponses que les prétendants à la magistrature suprême veulent y apporter.

      Que ceux qui partagent ces soucis n’hésitent donc pas à rejoindre les rangs de l’ASAF !

La RÉDACTION de l’ASAF
www.asafrance.fr


LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.
             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens de faire des mises à jour et d'ajouter Oued-Zenati, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.
             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.
             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Clauzel, Duvivier, Duzerville, Guelaat-Bou-Sba, Guelma, Helliopolis, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Oued-Zenati, Penthièvre, Petit et Randon, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.
POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :

 LA VILLE DE BÔNE A SUBI UNE MISE A JOUR TRES IMPORTANTE
AU MOIS D'AOUT 2020   

CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :
http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P.Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers


PÊCHE

Envoyé par Andrée
http://www.lestrepublicain.com/index.php/regions/item/9027848- le-prix-du-thon-rouge-a-la-baisse


Par El Watan - l Par B.Salah-Eddine 29 Mai 2021

Le prix du thon rouge à la baisse

         Situé à la limite de la wilaya d’Annaba, à une dizaine de km au nord du village touristique de Marsa (Skikda), le Cap de fer est, aujourd’hui, considéré par les armateurs, comme étant la région de pêche au thon du littoral algérien.
         Ainsi avant même l’ouverture officielle de la saison pêche au thon la plus importante de l’année en cours, des prises exceptionnelles ont effectuées au niveau de ce plan d’eau, signalent des marins pêcheurs. Ces derniers assurent que même les petits métiers et les plaisanciers, étaient de la partie dans ce coup de filet de cette variété des types de pêche au thon observée, notamment celle artisanale qui demeure, aux yeux des mareyeurs, un important pourvoyeur d’emplois et source de nourriture.

         Et de faire noter que la saison du passage du thon au large du Cap de fer ne dure que 3 à 4 mois, signalant l’existence dans cette zone maritime d’un couloir qu’empruntent es différents espaces de thon. Une zone qui est également réputée pour ses richesses en bancs de sardines, d’anchois, de sprats, de maquereaux et de méduses, dont les thonidés se nourrissent. L’abondance du produit a, par ailleurs, induit une chute significative du prix de ce poisson sur le marché. Ainsi, au niveau de l’abri de pêche de la Marsa, le kg du thon rouge a été écoulé à 40 DA, selon les habitants de cette localité.
         Région poissonneuse par excellence et véritable vivier naturel, la région rocheuse du Cap de fer fait partie de la plus importante zone de reproduction du mérou du pays, allant du cap de garde d’Annaba jusqu'à Guerbez (Skikda), en passant par les rivages des deux frères, Ain-Barbar, Chetaibi et Akacha.
         Considéré comme étant la pointe la plus avancée du littoral algérien, en méditerranée, le cap de Fer, encore à l’état sauvage, attire, en outre, depuis quelques années, des centaines, voire des milliers de vacanciers, dont la majorité opte pour le camping sauvage.

         Cependant, cette partie des rivages annabis et Skikdis, est menacée en raison « des agressions liées aux activités humaines, avec pour conséquences la disparition d’espèces et la diminution alarmante de leurs effectifs ».
B.Salah-Eddine           


Enseignantes agressées à Bordj Badji Mokhtar : ce que l’on sait

Envoyé par Pierre
https://www.tsa-algerie.com/enseignantes-agressees-a- bordj-badji-mokhtar-ce-que-lon-sait/

Par TSA-Algérie - Par: Rédaction 18 Mai 2021


           On en sait un peu plus sur l’agression lâche qu’ont subie une dizaine d’enseignantes exerçant dans un établissement de Bordj-Badji-Mokhtar dans l’extrême sud de l’Algérie.

           Dans un communiqué publié ce mardi 18 mai, le Syndicat algérien des travailleurs de l’éducation (SATE) donne quelques détails.

           Il explique que l’« acte barbare » commis contre des institutrices a eu lieu dans la nuit de lundi à mardi dans leur lieu de résidence au sein de l’établissement scolaire (lycée) où elles exercent.

           Elles auraient été attaquées vers 2 h du matin par un groupe d’individus munis d’armes blanches. Le supplice de ces dix enseignantes a duré deux heures, durant lesquelles, poursuit le SATE, des objets leur appartenant leur ont été subtilisés dont des PC portables, des téléphones et de l’argent en liquide.

           Le plus dramatique dans cette affaire est que les agresseurs n’en ont pas eu une once de compassion pour un nourrisson d’une des enseignantes. Le SATE informe que les institutrices ont été admises à l’hôpital de la ville dans un état psychologique catastrophique, certaines d’entre elles ont été blessées.

           Les syndicats en colère
           Plus préoccupant encore, cette agression « lâche et inhumaine » est la quatrième du genre à viser le nouveau lycée n°10.

           Plus tôt ce mardi, le coordinateur du Syndicat national des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), Meziane Meriane, écrivait sur Facebook : « Des enseignantes agressées et violées à Bordj-Badji-Mokhtar dans leurs logements de fonction, deux d’entre elles ont été poignardées et se trouvent à l’hôpital », avant de lancer un appel « aux autorités locales et la direction de l’éducation afin de protéger les jeunes enseignantes qui se sont déplacées au fin fond de l’Algérie pour enseigner et accomplir ce travail si noble ».

           « Nous suivons avec une attention particulière cet acte ignoble », a conclu le syndicaliste.

           Meziane Meriane explique que les enseignantes agressées ont déjà fait part à leur tutelle de menaces et de tentatives d’agressions. Après cette agression, c’est le branle-bas de combat au sein des états-majors des syndicats de l’éducation. Le Conseil national des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest) a convoqué une réunion d’urgence sur cette « affaire grave » selon Messaoud Boudiba joint par TSA.

           « Agresser des enseignantes à l’intérieur du lieu de résidence est une affaire très grave et démontre l’absence de sécurité pour les enseignants », dénonce le syndicaliste.
                    


           NDLR : Faut il rappeler le lourd tribu que payérent les enseignants durant les 8 années d'exactions FLN, et en particulier les femmes parfois sous les yeux de leurs élèves ? Le boomerang leur revient dans la figure.
           Liste des enseignantes tuées par le FLN... CLIQUEZ ICI


L’Algérie rouvre partiellement ses frontières à partir du 1er juin

Envoyé par Antoine
https://www.tsa-algerie.com/alerte-lalgerie-rouvre- partiellement-ses-frontieres/

Par TSA-Algérie - Par: Rédaction 16 Mai 2021


          L’Algérie va rouvrir partiellement ses frontières à partir du 1er juin prochain. La décision a été prise ce dimanche lors de la réunion du Conseil des ministres, a annoncé la présidence de la République dans un communiqué.

           Ces frontières sont totalement fermées depuis le 1er mars dernier, au lendemain de la détection des premiers cas du variant britannique du Covid-19 en Algérie.

           Selon le communiqué, le Conseil des ministres, qui a été présidé par le chef de l’État, a donné son accord pour la réouverture partielle des frontières aériennes et terrestres, à partir du 1er, avec au début cinq vols quotidiens de et vers trois aéroports du pays : Alger, Oran et Constantine, avec l’obligation de respecter strictement les mesures sanitaires anti-Covid.

           « Le conseil des ministres a adopté les propositions d’ouverture partielle, avec, dans un premier temps, cinq vols quotidiens en moyenne de et vers les aéroports d’Alger, Constantine et Oran à partir du 1er juin prochain », indique le communiqué de la présidence de la République.

           La réouverture se fera avec le strict respect des mesures de prévention, ajoute la même source, précisant que les modalités d’organisation de l’opération seront rendues publiques la semaine prochaine.

           Les frontières aériennes, terrestres et maritimes de l’Algérie sont fermées depuis mars 2019 pour cause de pandémie Covid-19. Des vols de rapatriement ont été organisés par Air Algérie. Ils ont permis à des milliers d’Algériens de revenir au pays. Ces vols ont été totalement suspendus le 1er mars dernier.
                   



Ferrovial diversifie sa production

Envoyé par Diane
https://www.liberte-algerie.com/est/ferrovial-diversifie- sa-production-358320


 TSA-Algérie - Par A. Allia le 06-05-2021

ELLE EST LA PLUS ANCIENNE UNITÉ INDUSTRIELLE À ANNABA

           Ferrovial d’El-Allelik s’est lancée dans la production de fours, d’incinérateurs et de petites locomotives destinés aux activités minières. © D.R

           L’entreprise nationale de construction de matériels et d’équipements ferroviaires Ferrovial d’El-Allelik (Annaba) s’est lancée dans la production de fours, d’incinérateurs et de petites locomotives destinées aux activités minières, en plus de transporteurs de matériel et de stations-services mobiles.

           Dans le cadre du renforcement de sa position sur le marché national et de son adaptation aux besoins des opérateurs économiques locaux, l’entreprise nationale de construction de matériels et équipements ferroviaires Ferrovial d’El-Allelik (Annaba) s’est lancée dans la production de fours, d’incinérateurs et de petites locomotives destinées aux activités minières, en plus de transporteurs de matériel et de stations-services mobiles, a annoncé son directeur général, Amri Bouyoucef. Ce responsable indique que cette orientation s’inscrit en droite ligne avec le principe de diversification de la production de cette entité économique tel qu’adopté en 2019 et qui s’était déjà concrétisé, en 2020, avec la fabrication de 8 000 containers pour compte du groupe de transport maritime Gatma, ex-Gestramar. À ce propos, Amri Bouyoucef fera noter que la fabrication de containers par Ferrovial est une première en Algérie et en Afrique et qu’elle vise à faire économiser, entre autres, au pays les quelque 50 millions d’euros qui étaient supportés annuellement par le groupe national Gatma à titre de location des différents types de caissons métalliques.

           “Cette activité permettra de créer, à court terme, des bases logistiques au niveau des grands ports algériens de location de containers et d’offrir aux opérateurs économiques un service de transport maritime et terrestre de marchandises vers les marchés africains et maghrébins”, a assuré le directeur général de Ferrovial. Et d’ajouter que son entreprise ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, puisque qu’elle s’est investie également dans la production, courant 2021, de transporteurs de matières de 55 m3 de volume, d’incinérateurs industriels d’une capacité de 180 kg à l’heure destinés au traitement des produits chimiques et pharmaceutiques et des déchets hospitaliers. Cela, en plus de petites locomotives utilisées dans les activités minières et autres produits industriels spécifiques à même de satisfaire la demande des différents opérateurs économiques nationaux. M. Bouyoucef rappelle que Ferrovial a consacré une enveloppe financière de 4,2 milliards de dinars pour son plan de développement, montant qui inclut plus de 2 milliards de dinars réservés à la modernisation de ses installations industrielles et de soudure, en particulier, qui étaient devenues obsolètes.

           Il s’est aussi félicité de l’excellence des relations de coopération qu’entretient Ferrovial avec le Laboratoire de recherche en métallurgie de l’université d’Annaba, qui est ouvert au sein de l’entreprise. Il y a lieu de rappeler que Ferrovial El-Allelik emploie 500 travailleurs, dont la moitié a été recrutée au cours des cinq dernières années et que cette entreprise projette, dans le cadre de sa convention avec l’université Badji-Mokhtar, de recruter les diplômés majors de leur promotion dans les filières des technologie et métallurgie.
A. Allia                      


La production d’huile d’olive au centre des préoccupations

Envoyé par Justin

https://www.liberte-algerie.com/est/la-production-dhuile-dolive- au-centre-des-preoccupations-358514

  - Par Liberté Algérie - par A. Allia le 10-05-2021

LES RÉCOLTES BAISSENT D’ANNÉE EN ANNÉE À ANNABA

           Les spécialistes attribuent cette baisse de récolte à des facteurs naturels qui ont influé négativement sur la production de l’olive en Algérie. © D.R

           Les techniciens ont imputé cette situation au caractère de production biannuel qui compose la majorité des oliveraies de la wilaya, accentuée par le vieillissement du verger oléicole et les maladies, notamment la mouche de l’olive et le manque, voire l’absence d’entretien des champs.

           Contrariée l’an passé avec une très faible production d’à peine 16 quintaux à l’hectare au lieu des 30 quintaux, en moyenne, qu’on en attendait, l’oléiculture est au centre des préoccupations des services agricoles de la wilaya d’Annaba. Citant à titre d’exemple les producteurs de Chetaïbi et de Berrahal, qui seraient les plus lésés cette saison, les responsables du secteur assurent qu’il s’agit là de l’une des plus mauvaises récoltes oléicoles jamais enregistrée dans la région. On parle même de catastrophe naturelle au sein du collectif desdits producteurs. La rareté du produit s’est bien évidemment répercutée sur le prix de vente du litre de l’huile d’olive nouvelle, lequel est cédé entre 700 et 750 DA par les détaillants, alors que les huileries l’ont coté unilatéralement à 650 DA. Les spécialistes attribuent cette baisse de production à des facteurs naturels qui ont influé négativement sur la production de l’olive en Algérie. Il s’agit essentiellement, estiment ces derniers, du manque de précipitations à des moments-clés du développement du fruit, conjugué à des pratiques agronomiques inadaptées à cette spéculation arboricole.
           Les techniciens ont imputé cette situation au caractère de production biannuel qui compose la majorité des oliveraies de la wilaya, accentuée par le vieillissement du verger oléicole et les maladies, notamment la mouche de l’olive et le manque, voire l’absence d’entretien des champs. L’un d’entre les exploitants explique que cette baisse de la production est aussi engendrée par la réduction des superficies oléicoles par les incendies qui détruisent chaque été des dizaines, voire des centaines d’hectares d’arbres fruitiers, principalement des oliviers, et par la non-maîtrise de la taille de fructification et la récolte tardive, qui se poursuit parfois jusqu’au mois de mars, ce qui engendre la destruction des bourgeons de la saison d’après. “Sur un autre registre, il faut toujours garder à l’esprit que le phénomène des changements climatiques est pour beaucoup dans la chute des productions agricoles en général, notamment la production de l’olive. Tous ces facteurs ont d’ailleurs découragé et contraint plusieurs agriculteurs à changer de filière”, regrette-t-il.

           Et d’ajouter que ces prémices de production oléicole vont impacter négativement les cours de l’huile d’olive sur le marché local, où la production de l’année actuelle va être écoulée dans une fourchette supérieure à celle de l’année précédente. Les oliviers existants sont, faut-il le signaler, plus que centenaires, ce qui engendre la chute considérable et prématurée des fruits. La méthode de cueillette reste archaïque à travers la région d’Annaba, ce qui se répercute négativement sur le rendement des oliviers. On en est encore au “gaulage” des branches, l’arrachage étant devenu quasiment impossible du fait de la réticence des ouvriers à escalader les arbres, par peur des risques encourus lors d’une telle opération.

           Autant d’aléas qui condamnent à terme le développement d’une culture qui a de tout temps fait la richesse des régions d’Annaba et de Guelma, comme en témoignent les archives des nombreuses exploitations oléicoles locales. L’olive de table locale autant que l’huile qui en est extraite sont d’une qualité exceptionnellement bonne, assurent les spécialistes, tout en regrettant que peu d’efforts soient consentis pour en promouvoir la culture intensive. “Notre huile a un taux d’acidité des plus recherchés aujourd’hui et qui lui confère la qualité d’extra-vierge. Du coup, l’Algérie exporte une quantité très limitée par rapport à sa production, et le plus souvent pour ces mêmes gros producteurs européens qui en font un mélange”, signale encore cet exploitant.
A. Allia                     

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Celui qui sait, une histoire de Nasrudin
Envoyé par Fabien
Un jour, Djeha-Hodja Nasreddin décida de voyager pour parfaire son savoir. Quand un jeune homme lui demanda quels gens il allait chercher à rencontrer, il dit, se rappelant quelques sages paroles entendues au marché :

    - Celui qui ne sait pas et ne sait pas qu’il ne sait pas, il est stupide. Il faut l’éviter.
    - Celui qui ne sait pas et sait qu’il ne sait pas, c’est un enfant. Il faut lui apprendre.
    - Celui qui sait et ne sait pas qu’il sait, il est endormi. Il faut le réveiller.
    - Celui qui sait et sait qu’il sait, c’est un sage. Il faut le suivre.
     Djeha-Hodja Nasreddin marqua une pause puis continua :
    - Mais, vous savez combien il est difficile, mon fils, d’être certain que celui qui sait et sait qu’il sait, sait vraiment.


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