SUITE ET FIN

Certes les raisons économiques sont de puissants moteurs pour l’exil mais certains auront des histoires plus romanesques à raconter à leurs petits enfants.
L’Amour reste et restera longtemps un facteur d’inconscience mais le récit n’en est que plus beau quand tout se passe bien.

C’est le cas de la famille Marguier.

Eloi-Marie Marguier était gendarme à Besançon et amoureux de Marie Félicie Faivre d’Orchamps native de Vennes dans le Doubs.

A l’époque, avant d’autoriser le mariage d’un gendarme, on faisait une enquête sur la promise.

La jeune fille devait avoir une bonne moralité et posséder une dot.

Or Marie était pauvre et bien sûr sans dot.

En ce temps, un gendarme devait assurer de ses propres deniers l’achat et l’entretien de son cheval. Sa solde lui permettait en tant que célibataire de pourvoir à ces obligations.

Par contre, le mariage impliquait des frais affairant à la famille.

Ainsi la solde ne couvrait plus ces frais supplémentaires, d’où obligation de la dot pour la promise.

Une dérogation pouvait être faite pour les jeunes filles de bonne moralité mais à condition de s’expatrier.

Le gendarme Eloi Marguier fut nommé à Chéragas et, comme Marie était toujours d’accord et amoureuse, elle partit en diligence pour Marseille, son fiancé faisant l’autre moitié du voyage par mer.

Le mariage eut lieu en 1875 à Marseille.

Les jeunes époux retournèrent à Chéragas et quand l’heure de la retraite sonna, c’est à Zéralda que les époux MARGUIER s’installèrent définitivement.
Le gendarme devint agriculteur.

Voici une autre histoire qui montre la difficulté pour un jeune homme de trouver une épouse.

Les veuves étaient souvent d’un certain âge et ne répondaient pas aux critères que les jeunes agriculteurs recherchaient.

C’est pour cela que l’on s’adressait souvent aux orphelinats de jeunes filles. Ces établissements étaient nombreux car, à la suite des fièvres paludéennes, les parents décédés laissaient leurs enfants dans les mains des bonnes sœurs.

Jean-François CELY a 36 ans, il est dans la plénitude de son âge et à force de travail, a mis ses concessions en état et en production. Il a amassé un petit pécule et sa mère aimerait bien qu’il se marie et connaître ses petits enfants à venir.

La mère et le fils décident d’aller à Alger, à l’orphelinat.
Là, ils rencontrent la mère supérieure et Mme CELY demande pour son grand fils une jeune fille saine travailleuse et courageuse … !

La mère supérieure, après avoir longuement réfléchi, leur répond : « J’ai une jeune fille qui conviendrait parfaitement mais elle a été placée dans une famille en Oranie… ! »

Qu’à cela ne tienne ! Rien n’arrête cette maîtresse femme.

En route pour l’Oranie. Là, les jeunes gens se rencontrent.
Elle a 22 ans, se prénomme Marie, elle est la fille d’un tambour-major du second Empire. Ce dernier , natif du Dauphiné, est parti pendant 6 ans en Argentine avec sa femme et ses six enfants. Son épouse est morte en Amérique du Sud, il rentre en France puis décide de s’embarquer pour l’Algérie.

Au bout de quelques mois, il attrape les fièvres et meurt. Sa fille, la petite Marie, âgée de 7 ans, est alors mise à l’orphelinat d’Alger puisque mineure.

Jean-François et Marie se marièrent et demeurèrent à Zeralda pour le plus grand bonheur de Madame CELY mère.

Ce que ne savait pas peut être son époux, c’est que Marie avait eu deux demandes en mariage en même temps, celle de Jean-François et celle d’un cordonnier. Marie hésita entre les deux prétendants et choisit finalement M. CELY, car elle s’était dit ; «  Si j’épouse le cordonnier, je l’aurais constamment près de moi à la maison … » C’est donc par esprit d’indépendance qu’elle fit son choix !

Dans la population d’émigrés, il ne faut pas oublier les soldats laboureurs, chers au Maréchal Bugeaud.

Le soldat Charles RETTENBACH était né en Alsace dans la région de Mulhouse. Il avait débarqué à Sidi FERRUCH en 1830 et ensuite guerroyé dans la région. A l’issue de son temps, il devint soldat –laboureur, dans la région de Rouïba, puis de MAHELMA, pour s’installer définitivement à Zéralda.

C’est un peu la même histoire pour l’engagé volontaire Joseph CORNOUILLER, natif de l’Isère, et dont l’état des services est reproduit ci-dessus.
Après 14 ans de service,il pose son paquetage à Zéralda.

Voilà un bel échantillonnage de la population d’expatriés qui a constitué l’embryon de la colonisation française. L’armée est toujours très présente tant pour la défense, que pour l’aide offerte aux premiers venus.

Vers les années 1904 – 1905 ZERALDA est devenu un centre qui se développe et l’ école publique arrive enfin.

L’Etat a fait parfois quelques erreurstel ce projet d’installation de pêcheurs bretons à Zéralda.

A cause de la pénurie de sardines sur les côtes bretonnes, un esprit illuminé avait trouvé le remède en les faisant pêcher sur la côte algérienne où ce poisson se trouvait en abondance. M. Violard était chargé par le Gouverneur Général de cette réalisation.

Les pêcheurs bretons ne sont jamais venus à Zéralda à cause des difficultés d’abordage sur la plage et de l’absence d’infrastructures portuaires.

Ils furent installés à FOUKA où ils ont souffert du manque de communications avec l’arrière pays.

Peut être aussi de la concurrence des pêcheurs Italiens, mieux organisés, installés à CHIFFALO et BOU -HAROUN.

En guise de conclusion, je dirai que les premières familles de Zéralda ont été sans cesse remplacées ou renforcées par de nouveaux exilés venant surtout du bassin méditerranéen, tels que Espagnols, Italiens, Anglo-Maltais. Ils vont vite s ‘intégrer en allant défendre en 1914 le sol métropolitain. Ils s’y révèleront aussi patriotes que leurs voisins et amis d’origine française.

Mais c’est là une autre histoire puisqu’en 1905 Zéralda devint une commune autonome, se détachant de Staouéli.


la rue principale

Robert ANTOINE.

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