N° 242
Octobre

https://piednoir.fr
    carte de M. Bartolini J.P.
     Les Bords de la SEYBOUSE à HIPPONE
1er Octobre 2023
jean-pierre.bartolini@wanadoo.fr
https://www.seybouse.info/
Création de M. Bonemaint
LA SEYBOUSE
La petite Gazette de BÔNE la COQUETTE
Le site des Bônois en particulier et des Pieds-Noirs en Général
l'histoire de ce journal racontée par Louis ARNAUD
se trouve dans la page: La Seybouse,
Écusson de Bône généreusement offert au site de Bône par M. Bonemaint
Les Textes, photos ou images sont protégés par un copyright et ne doivent pas être utilisés
à des fins commerciales ou sur d'autres sites et publications sans avoir obtenu
l'autorisation écrite du Webmaster de ce site.
Copyright©seybouse.info
Les derniers Numéros : 232, 233, 234, 235, 236, 237, 238, 239, 240, 241,
EDITO

Depuis un an, bien des pilules ont été avalées !

        En effet, depuis un an, nous avons eu l’épisode de la canicule dont on accuse l’homme d’en être le responsable, sans se référer aux précédentes canicules depuis des siècles ;
        - Il y a eu le feuilleton de la retraite avec l’usage abusif du 49/3 pour faire avaler une pilule aux rouspéteurs que l’on entend plus, les syndicats ont eu leurs parts pour ne plus rien dire ;
        - La pilule de l’inflation dont la cause serait la guerre en Ukraine ;
        - La pilule des cimetières d’Algérie avec leurs saccages ;
        - Dans quelques jours, il y aura d’autres 49/3 sur d’autres sujets.
        Enfin le pays est gouverné par des incapables qui utilisent un article antidémocratique pour faire avaler les pilules au peuple qui est finalement consentant en attendant de passer à la boucherie comme des veaux.

        Donc, nous avons une rentrée sous les mauvais hospices avec la dictature, les violences de toutes sortes, la gentille grogne de peuple. VIVE la RENTREE.

        Dans un mois c’est la Toussaint qui va nous rappeler de très mauvais souvenirs, mais il y a aussi ceux qui sont restés là-bas et dont nous avons un devoir de mémoire.
        Pour les Amis de BÔNE et alentours.
        Comme chaque année, depuis 2008, l’opération “Jardin des étoiles” est lancée pour le fleurissement du cimetière de Bône. Cette année exceptionnellement, je reprends du service car la trésorière bénévole, Mme Suzy Mons, n’est pas en mesure d’assumer ce travail.
        Sur demande de M. le Consul de France à Bône, M. Mounir Hanéche, (notre entrepreneur) a réparé des tombes, il en reste encore malheureusement beaucoup à faire. Pour montrer à M. le Consul, que les Bônois descendants de nos morts restés sur place, s’intéressent à notre cimetière, il faut que nous soyons très nombreux à participer à ce fleurissement et ainsi M. le Consul débloquera d’autres sommes pour réparer d’autres tombes et fermer les caveaux ouverts.
        Comment Procéder ?
        1) Imprimez le bon de commande à cette adresse.
        http://taddo.piednoir.fr/taddo/jardin-etoiles.html
        2) Le remplir très lisiblement en lettres majuscules : NOM, Prénom, Adresse Mail, N° du Carré, Rang, Nom de la Tombe, Référence de votre choix de travail et quantité.
        3) Me le renvoyer, avant le 23 octobre, à mon adresse postale (sur le bon de commande) en joignant le chèque correspondant à votre commande.
        4) Pour accélérer le processus, en plus du point 3, scannez votre bon de commande rempli et me l’envoyer par mail, un double envoi à M. Mounir Hanéche serait le bienvenu.
        5) Si vous ne vous rappelez plus le nom du carré et le rang pour situer vos tombes vous pouvez voir ces carrés et le rang, sur le site du cimetière. Voici l’adresse des carrés, chaque carré est divisé en deux parties :
        http://taddo.piednoir.fr/taddo/repertoire-carres.html
        Vous pouvez aussi imprimer le carré, entourez votre tombe (avec un feutre de couleur) et le joindre à vos envois en n’oubliant pas d’identifier le carré.

        Je sais que nombre d’entre-vous ont tourné la page, mais ne plus s’occuper de ceux qui n’ont pu s’exiler, c’est les faire mourir une nouvelle fois en leur faisant un nouvel affront. Faisons notre maximum pour que ce cimetière vive encore longtemps et ne donnons pas raison à nos détracteurs.
        Je sais aussi que les temps sont difficiles, mais un fleurissement ne coûte pas très cher et une fois dans l’année, cela vaut bien un petit sacrifice.
        MERCI A VOUS POUR EUX.
Jean Pierre Bartolini          
        Diobône,         
         A tchao.


A propos de Francesco HISSELLI +
Envoyé par Jean-Claude PUGLISI.
Et Les Rois d'Italie

            Qui était Francesco HISSELLI ?

            Francesco HISSELLI est né à RESINA ( Italie ) en 1830.
            Fils de Ignace HISSELLI et de Maria SCOGNAMIGLIO ?

            On disait de lui, qu'il était le fils d'un souverain Italien et d'une roturière avcc laquelle, il avait contracté un mariage dit Morganatique.
            On disait également qu'il était l'hérité de la Couronne d'Italie.

            Arrivé adulte à La Calle, il recevait régulièrement une pension, que lui versait le royaume d'Italie et que par fierté ou dépit il n'a jamais acceptée.

            Francesco HISSELLI, exerçait le beau métier de cordonnier et il s'était marié à RESINA avec Colomba SANNINO.

            Il eut pour fils, Gaëtano HISSELLI - plombier-ferblantier né à RESINA le 07 Février 1874 et marié à La Calle avec Rosine RANDAZZO, née à La Calle le 07 novembre 1880

            De cette union naquit = HISSELLI Cyprien, plombier - zingueur né à La Calle le 15 septembre 1909
            et un autre garçon et une fille.
            Francesco HISSELLI devait décèder à La Calle le 25 décembre 1917.

            L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais, j'ai voulu me pencher sérieusement sur ces rumeurs où, Francesco était supposé être un héritié du trône d'Italie ?

            Je me suis posé la question de savoir - de quel Roi d'Italie serait-il le digne successeur ?

            Je me suis penché sur tous les Rois du Royaume d'Italie, afin de tenter de connaître - le père supposé de Francesco.
            Les différents Rois d'Italie que j'ai pu répertorié =
            Victor Emmanuel I° - né à Turin en 1759 et décédé en 1824

            Victor Emmanuel II - né à Turin le 14 mars 1820 et décédé en 1878
            - Roi de Sardaigne en 1849
            - Roi d'Italie en 1861

            Humberto I°
            - né à Turin en 1844, décédé 1900
            - fils de Victor Emmanuel II - assassiné par l'anarchiste Gaëtano BRESCI.

            Victor Emmanuel III
            - né à Naples en 1869 et décédé en 1947
            - Roi d'Italie de 1900 à 1946
            - Fils de Humberto I°

            Humberto II
            - né à RACONIGI en 1904, fils de Victor Emmanuel III
            - Rois du 09 mai 1946 - puis, naissance de la République Italienne.

            Rappelons que Francesco HISSELLI, serait né à RESINA en 1830 et que si on compare sa date de naissance à celle des Rois d'Italie, on ne trouve aucune concordance de dates, qui pourraientt le faire rattacher à l'un ou l'autre de ces souverains.
            Alors quel était le père de Francesco ?
            Peut-être, le souverain d'un petit Royaume d'Italie ( Royaune des 2 Siciles - de Naples - de Sardaigne...) lorsque le pays était toujours morcelé en petits états - bien avant « le Resorgimento.»

            Cependant, l'examen que j'ai pu faire, sur Francesco HISSELLI à l'Etat Civil de La Calle, révèle qu'il serait le fils de Ignace HISSELLI et Maria SCONAMIGLIO ?
            Etaient-ce bien ses vrais parents ? Où bien, sa mère Maria, ce serait-elle mariée en deuxième noce - avec Ignace HISSELLI ?

            Le mystère demeure, mais il n'empêche, que ces rumeurs d'héritier du trône d'Italie ont peut-être ? un fondement réel voire véritable. Car, comment pourrait-on ? faire courir un tel bruit dans la famille et dans l'entourage, sans qu'il y ait « anguille sous roche » Et que dire de la pension adressée par l'Italie à Francesco. Une pension que recevait un notaire de La Calle et qu'il n'a jamais été réclamée ?
            Pourquoi cette rente, lui aurait-elle était allouée par l'Italie ?
            Mystère s'il en est !

            Que penser de cette histoire,
            Personnellement je pense qu'elle est vraie, car, cet enfant serait le fruit d'un mariage Morganatique, qui aurait été fait dans le plus grand des secrets.

            Que s'est-il passé ensuite ? Une rupture de ce mariage dû a l'inervention de la famille royale, qui ne tolérait certainement pas une telle union. Puis, l'épouse délaissée, se serait-t-elle remariée à Ignace HISSELLI, qui devait par la suite élever l'enfant et l'adopter.

            Francesco HISSELLI est né à RESINA en 1830 et a dû se marier en Italie à Colomba SANNINO. Ils ont eut un fils Gaëtano HISSELLI né à RESINA, donc, Francesco HISSELLI, a dû résidé en Italie avant de venir s'installer à La Calle.
            Pourquoi La Calle ? Là encore mystère.

            J'ai eu l'occasion lors d'un séjour à La Calle, d'aller me recueillir sur la tombe de Francesco HISSELLI et j'ai eu tout à coup une drôle d'impression, en me disant, comment ? l'héritier du Trône d'Italie, pouvait être enterré là et à même la terre - comme le commun des mortels ?

            Drôle de destinée tout de même, mais, Francesco en a-t-il souffert ? J'ose espérer qu'il n'en fut rien et qu'il vécu paisiblement sous le beau ciel de notre La Calle, qu'il ne quitta plus jamais jusqu'à sa mort.
            Je pense, que l'on peut se vanter à La Calle, d'avoir eu un jour sous nos cieux, un Souverain sans trône, peut-être ? Mais un Souverain tout de même.

            N.B. = Je me suis permis d'écrire cet article, avec l'accord d'Arlette HISSELLI épouse CONEDERA, qui m'a demandé de porter cette belle et touchante histoire, à l'attention de nos frères et sœurs Callois.
            Merci à ses arrières petits-enfants : Arlette, mais aussi, à son frère Hubert, qui le premier m'avait autrefois parlé - de cette belle histoire familiale, qui n'en finie pas de me hanter et de me laisser bien rêveur.
Jean-Claude PUGLISI
de La Calle de France
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage.

CAUSERIES
Envoyé par M. Georges Barbara

Monsieur Ciani ( le propriétaire) ; Chounette ( épouse de Zézé ) ; Zézé (le locataire)
.
            - »Ô Chounette, y l’est rentré Zézé ton mari ?

            - » Bonsoir monsieur Ciani...Pas encore... Autour des huit heures et demi y sera là, comme vous savez son apéritf a’c les copains au Café chez Bussetta, ça Diocane c’est sacré Monsieur Ciani !

            - » C’est à quelle heure qu’y te finit son travail d’habitude?

            - » A pourquoi y travaille mai’nant. Y te changera jamais çuila, vous savez pas vous, et ben y me cache tout ! Pourquoi c‘est vous que vous lui avez trouvé un travail ?
            Que personne y voulait s’le prendre Michkinette ! Alors là on peut dire que vous nous aurez enlevé une épine du pied si ça serait vous ! Que Dieu y vous bénisse Monsieur Ciani qu’y vous bénisse !.

            - »A bon parce que par dessur le marché y te travaille pas ? Madonne te m’en apprends une belle là toi, que tu m’as coupé les jambes tout d’un coup !

            - » Mais pourquoi qu’y te travaille ou qu’y travaille pas où y l’est le problème pour vous Mr Ciani ?

            - »Aga moi ça, que moi je suis descendu de Beausejour jusque à la Colonne pour m’entendre dire des choses pareilles ? Diocane moi je me mange le sang, et en plusque qu’avec ma tension que le docteur Pietri y m’a dit de pas m’enerver ! Agas moi ça qu’y m’arrive !

            - »Mais vous z’etes venu exprès pourquoi ? S’pliquez moi bien…. Mais on dirait que je ‘ois que vous êtes tout retourné Mr Ciani ! Vous voulez un verre de l’eau, vous êtes tout blanc comme un cachet d’laspirine... faut pas que vous vous énervez comme ça que c’est pas bon pour la santé, et je m’arrapelle que Nano le fils de Conchette il était mort d’un coup d’sang ! Je dis pas ça pour vous foutre la chcague monsieur Ciani, mais faut faire enttention à votre age, faut faire enttention !

            - »Tout retourné ? Ya de quoi quand ton Chikeur de mari y me doit le loyer que ca fait deux mois que j’lui cours darrière. Comme un tchoutche moi, encore que je t’lattends hier soir au Saint Georges le Café qu’ya au coin du marché. Y m’a même juré sur tous les saints, qu’y devait venir à huit heures pour tout éponger, comme y disait avec sa bouche en coeur ... Tout éponger. En guise d’éponger agads que c’est moi que je vais l’avoir dans l’os ! Ah j’le savais ça, j’le ‘oyais venir comme une avion... Je l’avais même dit à ma femme... Mais la adebon je vais pas t’ le louper. T’sur la tombe de mes morts cette fois il est bon pour que je lui envoie pas un huissier mais deux... Si y sont libres !

            - » Faut pas que vous en arrivez là Mr Ciani, z’etes comme mon père vous le savez. Et pis faut pas qu’on s’la cache la vérité, nous on est venu habiter là juste pour vous rende service, que c’est un appartement que personne y le voulait, et même que les mauvaises langues d’la Colonne y te dise que c’est pas Versailles ! Et pis ça qu’y faut dire et y faut pas s’le cacher aussi, que c’est juste dessur la boulangerie de monsieur Cravario, que dans la chambre y te fait toujours 40 et plusque. Bien sur on économise le chauffage l’hiver, mais qu’a même y faut dire aussi une chose que c’est vrai monsieur Ciani. Et ben l’été pour pas que tu t’attrapes un coup d’chaleur, Zézé y t’a été obligé de me mettre deux ventilateurs qu’elle m’a prétés ma sœur. Et pis je va vous dire une chose que mème Zézé et moi…. ( mais pour l’amour de Dieu, gardez-le pour vous et le répétez pas à personne )...…. nous sommes obligés de te dormir tout nus. Vous croyez que c’est pas honteux ça monsieur Ciani ?

            - »Chounette ma Fi, moi que je t’ai connue toute petite, que même ta mère à devait se marier avec moi, et qu’elle m’la mis bien bien, ça j’ l’oublie pas, quand elle a pris Jeannot mon frère... T’yaurais pu etre ma fillle, aga que tu te lèves du milleu parcequ’adebon ça va mal finir avec ton Zézé. Et pis toi y te fallait pas que tu te prennes un Canemourte pareil. C’etait pas un oualio pour toi.

            - » Comment pas pour moi vous incinerez quoi quand vous me disez ça ? Dites a debon que j ‘suis vilaine aussi ?

            - » J’t’ai pas dit ca Chounette, mais non toi t’y’es pas mal ma fi, et pis si on cherche bien, y doit en avoir des plus vilaines que toi !

            - » Ah Monsieur Ciani avant que vous vous en aller, faut que j’ oublie pas de vous dire, que Zézé y veut que vous déduisez de ça qu’y reste du loyer, le prix de la tapisserie qu’on s’est mis en rentrant, ...pour te cacher l’humidité…. !

            - » Dieu préserve Chounette que je reste plus longtemps ici, parcequ’alors je sens que te vas t’etre obligée d’appeler mon docteur, pour qu’y vient dare dare . Agas que tu fais un fiel et te me dis plus rien ...Laisse moi que je m’en vais !

            - » Et ben au revoir Monsieur Ciani, pisque vous vous le prenez comme ça. C’est bien genti qu’à même d’être venu et quand Zézé y te rentre du café je va lui dire que je vous ai parlé de la tapisserie ! A bientôt Monsieur Ciani... à Bientôt !, et que Dieu y vous garde.

Georges Barbara, Août 2022

LE COURS FENELON
de Geneviève Ternant
Echo de l'ORANIE N°264 septembre 1999

       J'ai commencé ma scolarité au Cours Fénelon, je pense en octobre 1938. Je me souviens que notre domestique Dolorès me tenait par la main pour m'y conduire en ce premier matin d'octobre. Nous avions descendu la rue du Citoyen Bézy et traversé le boulevard des chasseurs quand j'avisais, au milieu d'un haut mur de pierre un portail noir, rébarbatif. Je tremblais que ce fut là ! Mais non, nous Ie dépassâmes et dés lors, ma crainte s'évanouit.
       C'était pourtant, aussi, derrière un haut portail que s'abritait le Cours. Une petite porte s'ouvrait au milieu, le soleil passait sur les feuilles vernissées des "caoutchoucs", une dame rondelette, à cheveux blancs avait posé un sourire d'enfant dans son visage rose: Elle ressemblait à ma grand-tante, ma chère Tatie. Elle prenait ma main et Dolorès disparaissait. Toutes mes craintes avaient disparu. Ce matin là inaugurait des années de bonheur au sein du Cours Fénelon.

       Je vais laisser maintenant la parole à Mademoiselle Coll, devenue Madame Choski, qui a eu la bonté d'évoquer pour nous ses souvenirs :
       "Vous êtes gentille de penser à moi pour nous faire revivre les années heureuses et enrichissantes pour moi passées au Cours Fénelon.
       Vu mon grand age, (94 ans) vous excuserez le décousu de ces souvenirs (NDLR : Ce n'est pas vrai du tout !). Mademoiselle de Theule, d'excellente famille lyonnaise est arrivée à Oran pour être la préceptrice des enfants du Docteur Jarsaillon en 1920, je crois. Après plusieurs années passées chez eux et sur les conseils du Dr Jarsaillon, elle ouvre deux classes pour instruire des enfants au Boulevard Lescure, ce qui fut un succès. Aidée par des parents d'élèves, elle demande à l'Académie l'autorisation d'ouvrir un cours privé d'enseignement secondaire pour jeunes filles, dans un immeuble rue Floréal Mathieu. Autorisation accordée en 1926 : c'est le Cours Fenelon.
       Elle recrute professeurs et élèves et à la côte à Oran. C'est là qu'en 1929, je commence mes débuts d'enseignante, très impressionnée par cette directrice grande dame.

       En 1930, avec l'afflux d'élèves, le local est trop petit. Le cours se déplace et s'installe dans un grand immeuble, rue Monge, face à la mer. Les cours vont de la sixième au bac, Les classes enfantines et primaires étant à la Villa Marie-Thérèse, Boulevard Laurent Fouque, où un internat pour dix élèves est ouvert en 1940.
       Mlle de Theule, submergée par le travail et la Direction cède une partie des responsabilités d'instruction à Mlle Caillon qui ne reste qu'un an. Plus tard, les événements d'Algérie, la santé et des ennuis financiers obligent Mlle de Theule à envisager la fermeture du Cours. Ce qui fut fait le 30 juin 1957.
       Retirée à Figeac, près d'un neveu qui, après avoir eu ses biens, la laissa seule, elle finit pauvrement jusqu'à sa mort Ie 11 janvier 1973.

       J’ai donc enseigné de 1929 à 1957 auprès de collègues dont j'ai retenu certains noms : Mme Coment (anglais), Mlle Nicolas (espagnol), Mlle Dehusses (français), décédée, Mlle Fabreguette (sciences), décédée, Mme Pons, MIle Wifry, M. Brunlet (math).
       J'ai eu beaucoup d'oranaises, dont voici quelques noms : Raoux, Camallonga, Prades (Calia), Moméja, Fossat, Defaye, Marmies, Hugouneng, Saint-Pierre, Delorme...
       Peut être vous donneront-elles quelques souvenirs qui pourront vous être utiles. Je suis heureuse de revivre avec vous ces belles années. Excusez mon écriture, ma main se crispe mais je garde une bonne mémoire. Je pense à cette vie passée à Oran où ma mère et moi sommes nées. (...)
       Votre article sur les demoiselles Mouterde m'a été très sensible car c'est chez elles, à 5 ans, que j'ai commencé à aller à l'école."
       Merci, chère Madame Choski-Coll, pour la précision de vos souvenirs, et votre lettre affectueuse.

       Voici maintenant la lettre de Madame Regnier, fille du Dr Duffau qui habitait le 73 rue d'Arzew dont Monique Rousseau, née Veau, vous a conté l'histoire dans notre n'260.
       "J'y suis entrée (au cours Fénelon) en enfantine en 1931 et sortie en philosophie en novembre 1942. Cette classe n'exista que d'octobre à décembre 42. C'était une création mais le professeur, Monsieur Chaudron, fut mobilisé.
       (...) le Cours Fénelon, 1930 rue Monge, face à l'immeuble Gay. C'était une villa regardant la mer. D'abord les "petites classes", puis elle fit construire le hall d'entrée avec le grand escalier et l'étude, entre la rue Monge et la cour jardin où poussait un immense ficus. Nous étions à peine six ou sept dans les petites classes, sans changer de salle. Puis vint la sixième et la grande étude où chacune avait son pupitre attitré et chaque heure donnait la signal d'un changement de classe et un joyeux va et vient de tabliers bleus qui devenait vite silencieux si nous croisions Mlle de Theule.

       Au premier étage, première classe à gauche, Mme Comment et son terrifiant "Come in" qui, dés le premier cours, nous signifiait que nous ne parlerions qu'anglais. En alternance avec MIle Nicolas, prof d'espagnol, toute en rondeurs linguistiques.
       Deuxième classe à gauche, toujours vue sur la mer, Mlle Coll, professeur de math et calcul, aussi fidèle à l'établissement que moi. Nous y eûmes aussi des cours de couture.
       Troisième classe: Mlle Dehusses qui fit de moi une passionnée de géographie. Il y avait des cartes partout et il était très important de savoir qu'à Tcherrapoundji, il pleuvait plus que partout ailleurs !

       Sur le jardin, toujours au premier, je me souviens de cours de latin avec une jeune et jolie prof, venu de France, Mlle Grillet. Mais c’était au rez-de-chaussée que siégeaient Mlle de Theule, français, latin, histoire, éblouissante. M. Maurin, de l’Echo d’Oran : Histoire et Français. M. Pichard : Histoire et même diction... Et en mathématique et physique, Chimie, en seconde et première : M. Brunlet. Il ressemblait à pasteur dont l'image ornait la couverture de certains cahiers ; Professeur inspiré qui méritait sûrement mieux que notre auditoire.

       Au rez-de-chaussée, il y avait une petite classe qui devint, en première, notre étude sans surveillante. Mlle de Theule était donc une pionnière de l’autodiscipline.
       J’y revois Edmée Jarry, dont le père était amiral, Annick de la Brunière, Michelle Scotto, Maguy Llobet, Sylviane Calia... Si j’oublie quelqu'un, qu'elle me pardonne.
       Mais en plus des souvenirs matériels, je voudrais surtout dire que « Mon Cours Fénelon » était une "maison d'éducation. « Toujours droit, Toujours mieux » était sa devise et Mlle de Theule s’attachait surtout à former des âmes, des intelligences et des caractères.

       Si les cours d'instruction Religieuse était pour elle une matière primordiale, si nous avions la prière le matin dans la grande étude, elle accueillait les israélites, les protestantes, les athées, avec la même générosité. Combien de fois nous a t-elle parlé de la nécessité de la rigueur dans notre tenue physique et morale! combien de fois avons-nous eu droit, à la planche, pour nous tenir le dos droit !
       Ce fut, je pense, pour notre ville un privilège et une grande chance d’avoir eu une éducatrice d'une telle qualité."
       Jacqueline Ayrault, née Canal, écrit : J’ai le plaisir et l’émotion de vous adresser par ce courrier une copie du poème de Raymond canal, mon père, décédé maintenant, poète oranais bien connu. Je souhaite vivement qu'il puisse faire remonter au cœur de toutes celles et de tous ceux qui le liront cette vibration verte dont personne ne pouvait se lasser sous le soleil d’Algérie.

       Je suis née, j’ai habité au-dessus du Cours Fénelon. J'ai eu, toute petite, une vue plongeante sur ce monde majestueux, quelques fois sombre et toujours frais. Certaines nuits, le vent faisait parler la cime des grands arbres tout près du 4ème étage où nous demeurions au 14 Bd. Laurent-Fouque.
       J’y suis allée à l’école et donc entrée dans ce monde vert. Ce fut un grand mystère et certains endroits me faisaient peur. .
       Mes souvenirs de petite enfant sont colorés des capucines qui poussaient contre les verrières basses, sur le coté droit du bâtiment central en le regardant. Les longs cortèges de chenilles processionnaires nous obligeaient à serpenter entre les arbres; Nous ne pouvions plus passer où nous voulions.

       Et puis il me reste l’image d'une grande dame du Cours Fénelon: Mlle wilfried. Elle était l,image de tout ce que nous devions acquérir : l'élégance, la distinction, le savoir, la courtoisie. Même petite, je sentais tout cela.
       J'espère que ces quelques lignes pourront vous aider et je vous remercie de réanimer ces instants de vert-bonheur'"
       Merci Madame Regnier, merci Madame Ayrault, pour la joie émue que vous me donnez en ravivant mes souvenirs.
       Et bien sûr, le beau poème de Raymond Canal, mon vieil ami poète, toujours jeune dans mes souvenirs du temps du Club du p'tit poète, avec la ravissante Rêva Rémy et l'ardente cantalienne et Edmond Arnaud "' Mais ceci est une autre histoire, bien sûr vous le lirez ici"'

       Et puis voici quelques uns de mes souvenirs et des réflexions peut-être un peu iconoclastes. Je vous en demande pardon d'avance : Je n'ai jamais été une tiède, mais, hélas ! trop bien élevée, moi aussi. L'empreinte du cours Fénelon est ineffaçable! Les petites classes, comme nous disions, étaient mixtes. c'est-à-dire qu'au milieu de beaucoup de filles, quelques garçons étaient tolérés. De ma couvée, je me souviens de Joël Bermès, Jean-Jacques Cardet'
       Henri Mas, Jean-Pierre Palumbo, Jacques Valéro, qui, plus tard, devinrent mes copains. Et vous, les filles, vous souvenez-vous ? Mademoiselle Coll, notre professeur de math, son chignon strict destiné à se faire respecter des follasses que nous étions et Mlle Dehusses, en français et géographie, qui, elle, tentait vainement d'assagir sa brune chevelure indomptée, Et la douce et bonne Mme Pons. C'était-là les piliers du cours, esclaves de la toute puissante directrice et qui parfois, tentaient une timide rébellion. Nous en sentions vaguement les ondes révolutionnaires mais nous si jeunes, si innocentes, et si gaies, à peine conscientes de ce qui fut, peut-être, une minuscule tragédie.
       En Sixième, nous avons eu comme professeur de latin, un homme jeune et plutôt beau garçon, chose extraordinaire dans cet univers voué au féminin, très majoritairement.
       On a dit, mais cela ne fut que murmuré, qu'il était venu préparer le débarquement des américains et que ce poste de 'professeur était une couverture. Lui seul pourrait le dire s'il est encore de ce monde. A son age, il aurait dû être mobilisé, à moins qu'il ait été malade...

       Je n'étais pas spécialement mauvaise en latin mais, un jour, je ne sais quel démon me fit traduire une phrase de ma version par cette curieuse envolée : "Dans la bouche du lion les dents s'entrechoquaient » En me rendant ma copie, M. Boulanger s'écria: "Mademoiselle, votre lion aurait besoin d'un bon dentiste !" Au lieu de la contrition attendue, je fus prise d'un fou-rire incoercible, hélas contagieux.
       Ma voisine, puis tout le rang, puis la salle entière se prit à se gondoler malgré la minceur du prétexte, et le pauvre M. Boulanger, décontenancé, eut devant lui une vingtaine de filles hoquetant, pleurant de rire, secouées de spasmes qui s'affaissaient et reprenaient comme une houle irrépressible. Dés que nous levions les yeux vers la tête navrée du pauvre professeur, le rire repartait de proche en proche…

       C'est idiot, mais, un demi-siècle plus tard, je ne puis y repenser sans me remettre à rire toute seule, comme une vieille folle que je suis. ce fut un de ces fou-rires qui mettaient en rage mon mari : "Idiote, ma femme est idiote...", un de ces fou-rires dont je fus longtemps coutumière avant que les épreuves ne viennent me mettre du plomb, sinon dans la tête, du moins dans l'aile...
       Je me souviens d'une camarade de classe qui se nommait Marie-Jeanne Lupianez. Elle dessinait des femmes longilignes, aux épaules carrées, aux hanches fluides, toujours coiffées de grands chapeaux. Ces silhouettes me rappelaient celles que croquait Yves Mathieu Saint-Laurent dont on sait la fulgurante carrière. Je me demande si ma petite camarade a fait son chemin comme styliste, métier auquel elle rêvait de se consacrer.

       Je me souviens aussi d'Odile Jarry, fille de l'amiral, qui était une charmante compagne. Sa maman prisait fort les roses du jardin qu'elle venait cueillir à la ferme de mes parents, à Misserghin. Une autre Odile, Béliard je crois, portait des nattes blondes attachées sur le haut du crâne. Elle était rieuse et jolie. Et Jeanine Névoret qui habitait rue Alsace-Lorraine et avec laquelle j'ai souvent fait le trajet qui traversait ce qui était alors le ravin de la Cressonnière, devenu Square Lyautey. Ma compagne de toujours, Bernadette Lalubie a fait une belle carrière de conférencière du Louvre et continue d'enchanter un public attentif lors des conférences sur la peinture qu'elle sait présenter de façon vivante et claire. J'ai retrouvé à Nice Raymonde Delage devenue Mme Viguier, toujours aussi jolie malgré les années qui ne semblent pas avoir de prise sur elle. Et Colette Cougaud, avec laquelle nous avons, un jour échangé nos copies d'espagnol, qui d'ailleurs étaient semblables puisque nous faisions, le plus souvent, nos devoirs ensemble. Or elle avait toujours d'excellentes notes, et moi, de déplorables.
       La clé du mystère peut être dévoilée aujourd'hui puisque les protagonistes ont rejoint un monde dit meilleur. Colette était la nièce d'un monsieur qui devait épouser, peu de temps après cette anecdote, notre professeur. Aussi cultivait-elle la nièce pour s'attirer les bonnes grâces de l'oncle. Colette eu donc une bonne note avec ma copie et moi, une mauvaise avec la sienne... Ce qui me valut de comparaître, tremblante mais résolue, dans le bureau de la Directrice.
       Elle me sembla plutôt encline à sourire, ce qu'elle faisait rarement... et me recommanda la discrétion. Je m'en tirais à bon compte. La prof, furieuse, me prédit que je n'aurai jamais mon baccalauréat... Je quittais le Cours Fénelon peu après pour entrer au Lycée Stéphane Gsell. Je garde de ces années protégées un souvenir merveilleux.
       Je comprends combien il fut difficile à notre directrice de barrer ce bateau pendant tant d'années et combien sa sévérité était nécessaire. J'allais oublier d'évoquer Mlle Carioux, notre professeur de dessin. Il faudra qu'un jour je vous reparle d'elle. Je n'aurai jamais assez de mots pour dire ma reconnaissance envers ces professeurs qui ont fait de nous des femmes responsables, dignes, et quelqu'un d'à peu près bien de la rêveuse, rebelle que j'étais...
Geneviève de Ternant

Les Arbres du Cours Fenelon
Les exécuteurs sont venus
Avec des scies
Avec des haches
Avec des cordes de pendus.
De quoi manger et de quoi boire
Et sous leurs coups
Les troncs des arbres
Ont éclaté comme des cœurs
Ils ont poussé des cris de titans !
Et maintenant
Ils sont par terre
On les piétine
On leur marche dessus
On les coupe en petits morceaux...
Ils n'auront plus de petits oiseaux dans les branches
Plus de dandinement
Sous la gifle claire du vent.
Ils étaient devenus grands ces arbres
A force de lancer leurs bras
Par-dessus les maisons
Pour attraper le ciel.
Peut-être aussi
Pour voir l'aurore
Poser son pied nu sur l'herbe des champs.
Et cette cathédrale verte
Ecroulée maintenant
A sa place que vont-ils mettre ?
Un lac couleur de verre
Avec au fond le dos des nuages ?
Un cimetière désuet ?
S'ils m'écoutaient
Ils laisseraient le terrain vague,
Les villes manquent d'oasis
Pour les chats maigres
Et les enfants qu'on tient assis.
Mais non ! mais non, ce qu'ils vont mettre
Ce sont des pierres sur des pierres
Avec du ciment et du fer
Un tas d'étages
Planté là monolithement
Avec des alvéoles numérotées
Rationnel comme des Raisons
Propre aussi comme la Chimie
Et par toutes les ouvertures
Vomissant la T.S.F.
Alors les gens, les gens d'en face
Au lieu d’avoir pour horizon
Les arbres du Cours Fénelon
Petite forêt dans la ville
Auront d'autres fenêtres rangées
Comme un jeu de dames
Avec des dames négligées'
Des pots de fleurs
Parmi du linge.
Mais vous les larmes de la poésie
Halte là ! Restez au bord de l'âme
Quelque part dans la cité
On replantera des arbres
De petits, petits, petits arbres
Sans oiseaux, et sans chansons
Pour faire de l'ombre aux fourmis...
Raymond CANAT (Oran)


TARTE FINE A L'OIGNON ET AUX RAISINS

ACEP-ENSEMBLE N° 293-décembre 2014

     Pour 6 à 8 personnes : 15 min - Cuisson : 20 à 30 min


               Ingrédients :

               200 g. de farine complète –
               120 g. de beurre salé –
               2 beaux oignons rouges –
               24 petits grains de raisin blanc –
               80 g. dd parmesan –
               2 cuil. à soupe de thym frais –
               2 cuil. à soupe d'huile d’olive –
               sel –
               Piment d'Espelette ou autre.


               Préparation:
               Versez la farine dans une jatte. Ajoutez le beurre bien froid coupé en petits morceaux. Frottez le mélange entre vos mains pour le sabler, puis versez 3 cl d'eau fraîche en une fois et pétrissez rapidement la pâte pour former une boule.

               Ecrasez-la de la paume de la main. Recommencez cette opération 2 fois, puis étalez la pâte sur un plan de travail fariné.

               Dans un moule à tarte de 30 cm de diamètre, placez cette abaisse de pâte dans celui-ci. Piquez-la de quelques coups de fourchette.

               Pelez et émincez finement les oignons. Lavez et équeutez les grains de raisin.

               Râpez grossièrement le Parmesan. Lavez puis effeuillez le thym. Préchauffez le four th. 7 (210" C)

               Etalez les oignons sur la pâte, puis ajoutez les gains de raisin. Parsemez de thym frais, d'un peu de sel et de piment d'Espelette. Couvrez de la moitié du parmesan préparé, arrosez d'huile d'olive et enfournez.
               Cuisez la tarte jusqu'à ce que la pâte soit bien dorée et croquante. Servez-la aussitôt, accompagnée du reste de parmesan.
               Cette tarte est aussi délicieuse froide.
    


ROUTE de TIGZIRT à DELLYS
Envoyées par Groupe de voyage Bartolini




















MUTILE N°179, 6 février 1921

UN VIEUX ET BRAVE SOLDAT
LE COMMANDANT MARQUET

       De stature moyenne et bien prise, l’œil vif, la démarche toute militaire, tel nous apparaît le Commandant Marquet.
       Parmi les nombreuses distinctions qui ornent sa poitrine, deux suffisent, à nous désigner le vieux brave qui vécut 44 ans dans l'espoir de la revanche ! A côté de la médaille de 1870, la petite croix de guerre de 1915, voisine, toutes deux symboles d’une vie entièrement donnée à la France.
       Après 41 ans de service et au moment ou il atteint 75 ans d'âge, il est intéressant de connaître la vie du Commandant Marquet.

       Né en 1845, le soldat Marquet s'engage en 1963 au 45ème Régiment d'infanterie de ligne. Il passe, par tous les grades. Successivement caporal, sous-officier, nous le retrouvons sous-lieutenant en septembre 1870, puis lieutenant en janvier 1871.. La chute, des aigles impériales, le laisse indifférent. Le lieutenant Marquet vit pour la France qu'il sent alors pantelante, meurtrie et en attendant le 4 août 1914, il va, sur la terre d'Afrique, montrer ses qualités de chef et de père du soldat, car un cœur, d'or bat dans cette poitrine héroïque.
       Capitaine et capitaine adjudant-major pendant la campagne de Tunisie d'où, il, passe en Algérie.
       Chef de bataillon au 1er zouaves, il reste dans ce corps jusqu'en 1901, date à laquelle il fait valoir ses droits à la retraite.

       Mais l'homme qui forma tant de soldats celui qui ne vit que dans l'espoir de voir un jour l'affront de Sedan lavé, dresse dans la carrière des armes les enfants. Il dirige les Sociétés de préparation militaire comme président et inspecteur de telle manière que le Ministre lui adresse, à plusieurs reprises, des félicitations élogieuses.

       Le siège de Belfort l'a compté parmi ses héros, l'atroce campagne de 1870 l’a vu parmi ses derniers défenseurs, la campagne de Tunisie, en conquérant et pacificateur, autant de, campagnes représentées chacune par un insigne glorieux ! Le Gouvernement de la République, conscient d'une telle valeur le fait chevalier, de la Légion d'honneur en 1889, puis officier le 30 décembre 1901.
       Mais aujourd'hui, à qui il est donné d'approcher le commandant Marquet, il est donné aussi de voir sur sa poitrine, la croix de guerre épinglée !

       A l'âge où tant d'hommes sont impotents ou infirmes, à l'âge de 70 ans, le commandant Marquet, ayant dans son coeur et dans ses muscles l'enthousiasme de vingt ans, reprend du service pour la défense du pays et cette "Revanche qu'il a tant désirée !
       Affecté au commandement d'un bataillon de territoriaux bretons, aussitôt adoré de ses hommes, il est partout où la guerre est affreuse ! La Marne, l'Aisne, Crouy, Meaux, Arras, Valmy, Suippes !
       En août 1915, le lieutenant-colonel commandant le 87ème R.I.T. cite à l'ordre le commandant Marquet Jean-Nicolas, chef de bataillon commandant le 4ème Bataillon :
       « A 70 ans, donne l’exemple à la troupe sous ses ordres. Exemple de calme el de bravoure au feu. A contribué pour une grande part, au maintien de l'excellent, moral de son bataillon chargé d'ouvrir des tranchées à Roclaincourt sous un bombardement el une fusillade intenses.
Le lieutenant-colonel. Signé : Di Robieu.


       Puis parmi d'autres témoignages, de sa valeur de chef, vient l'ordre n° 3321 du 27 juillet 1915 :
       « Le colonel Cernesson, commandant le génie du 17ème G. A.
       Le 4ème bataillon du 87ème territorial, placé sous mes ordres directs depuis le 10 juillet, vient de recevoir une nouvelle destination vers laquelle, il doit être dirigé demain.
       Employé à des travaux de fortifications qui, en raison de la proximité, immédiate des lignes ennemies, dans un secteur particulièrement battu, ne pouvaient être exécutés que de nuit, tous, gradés et hommes de troupe ont fait preuve d'un entrain, d'une vigueur que les pertes quotidiennes dues au jeu de l’ennemi, n’ont pu altérer un seul instant.
       Je tiens à le constater, j'adresse au 4ème bataillon du 87ème territorial, avant son départ du secteur, mes remerciements pour son actif concours à nos travaux de défense.
       De nombreuses félicitations officielles ont été adressées au brave commandant Marquet, président d'honneur « des Anciens Zouaves» et de nombreux groupements d'éducation physique.
       Nous lui adressons l'assurance de notre bien vive admiration sympathique et formons nos vœux pour que sous peu la grande chancellerie l'élève à la dignité de commandeur de l'ordre national qu'il a si bien méritée, après de tels faits d'armes et une vie donnée toute à la France. »

LE MUTILE.


Une Macaronade sur l'Île Maudite.

par Jean Claude PUGLISI,
        C'était au cours de l'été 56 ou 57 ? Ce jour-là, le ciel était bleu et la mer d'un calme olympien. Allez savoir pourquoi ? En ce dimanche d'août, notre bande d'amis, avait décidé d'organiser un repas particulier et en plein air, dans un lieu bien insolite - à savoir l'île maudite... Mais, je me demande encore, qui a eu cette curieuse idée ? Et bien, j'avoue, que je suis incapable de le dire aujourd'hui. Je sais, que j'étais arrivé un peu tard au sein de la bande, alors que les choses, avaient déjà depuis longtemps été décidées et bien entendu et j'ai marché dans le coup, sans trop me poser de questions. Après tout, aller sur l'île maudite casser la croûte, n'était pas une si mauvaise idée que cela et je dirais même, que cette idée devait m'enthousiasmer

        Nous voilà donc partis, pour passer une bonne journée d'été au soleil et bien entouré par le bleu de la mer, à une bonne distance de la plage de l'usine, qui à cette époque était toujours noire de monde. Chacun avait apporté sa contribution au cours de cette expédition = certains s'étaient chargés des ustensiles de cuisine - assiettes et verres - cuillères, fourchettes et couteaux - couverture en guise de nappe... D'autres, des boissons = apéritifs - vin rosé - limonade et bouteilles d'eau... Pour le menu du jour était au rendez-vous = une belle pizza toute chaude de chez Tarento et une énorme macaronade accompagnée de sa viande, apportée par les frères Arnaud Alain + et René. Cette superbe macaronade, nous la devions à la grande générosité de leur Mère, l'excellente Mme Alice Arnaud +, qui, ce jour-là, pour nous faire plaisir, n'avait pas lésiné sur la marchandise.

        Tout était prêt à emporter et il ne restait qu'à assurer le transport de toute cette cargaison. Un temps, Marc Falki ? S’était proposé, de la conduire par la route à bord de sa voiture, mais, restait ensuite, le problème du transport sur l'île par la mer, ce qui bien entendu était une inconnue, qu'il nous fallut tenter de résoudre... Ce furent les frères Arnaud, qui ont apporté la solution du problème, à la grande satisfaction de toute la bande = ils proposèrent de s'adresser à « la Caroline », une modeste petite barque, rangée le long des petits quais et qui ne demandait qu'à prendre la mer. Ainsi, tout l'attirail et la macaronade, furent embarqués prestement et maniant leurs pagaies Alain + et René, devaient sortir du port, pour rejoindre la plage de l'usine et aller tranquillement se ranger au sud de l'île maudite, dans un petit recoin rocheux bien abrité. Quant au reste de la bande, nous avions rejoint la plage et nous nous sommes mis à l'eau, direction l'île qui ne se trouvait qu'à deux pas. Puis, chacun s'employa à décharger la Caroline et à monter toute la cargaison à son sommet, dans un endroit bien à l'ombre avec vue superbe sur la mer et situé sur une plateforme entre deux gros rochers, bien à l'abri du regard des curieux venus de la plage.

        Enfin tout fut bien en place et déjà nous nous étions tous installés confortablement, dans une ambiance toute amicale et plus que festive... La pizza et la macaronade sentaient bon tant qu'elles pouvaient et nous ne manquions pas de loucher dans leur direction. Je dois dire, que le ballet des fourchettes, commença sans se faire bien attendre. La pizza accompagnée de généreux verres d'anisette, puis, ce fut le tour de la grande gamelle, qui fut bientôt vidée de ses spaghetti et de sa viande. Comme le petit rosé avait coulé à flot, bientôt, certains le cœur chaud, devaient s'adonner sans façon à la sieste... Pour tous les autres, chacun disait la sienne et le temps passait très agréablement, bercé par une bienfaisante brise marine qui s'était levée.

        Mais, l'après-midi avançait et il devait être 16 heures, le ciel était toujours d'un bleu superbe, mais, cependant, nous avions noté, que le vent commençait à se lever et que la mer devenait presque houleuse, ce qui nous fit prendre la décision de plier bagages…Mais combien étions-nous ? Au sein de la bande d'amis. En cherchant dans mes souvenirs, je note qu'il y avait nos aînés = Tounsi Selib, Joseph Giglione, Claude Landrein ( le gardien de phare du Cap Rosa ), puis, la jeunesse = Jean-Jacques Sébire, René Hisselli +, Norbert Gasnier, les deux frères Arnaud et moi... Peut-être ? Que j'en oublie avec le temps qui a passé !

        La Caroline fut prestement chargée, mais, il fallut penser, à ramener certains d'entre-nous qui ne savaient pas nager, j'en veux pour preuve = Tounsi Sélib, Joseph Giglione et Claude Landrein, lesquels furent à leur tour les derniers embarqués. Cependant, il semble, que la Caroline était vraiment trop chargée et alors qu'elle venait à peine de quitter l'île, lorsque la mer commença doucement à envahir le canot. Ce fut tout d'un coup la panique à bord et l'abandon du bateau commença, d'abord, par Tounsi, qui bien heureusement avait encore pieds sur le fond, puis, se fut Joseph, qui compte-tenu de sa petite taille, avait de l'eau jusqu'au menton, restait Claude qui ne pouvait quitter l'embarcation, car, l'un de ses pieds était pris dans un cordage et il s'était mis crier, « j'ai le pieds pris, j'ai le pieds pris... », lorsque enfin on le libéra, il sauta vivement dans l'eau pour rejoindre Tounsi et Joseph, qui avaient prestement regagné le rivage de l'île. Le bateau fut délesté de tout son matériel sur la plage et retourna prestement embarquer nos trois naufragés, qui furent tout heureux de regagner la terre ferme... Pour les autres, ils n'eurent aucun problèmes, pour gagner la plage à la nage où, ils devaient subir tous les quolibets des baigneurs, qui avaient assisté hilares à ces péripéties.

        La Caroline avec les frères Arnaud aux pagaies, devait arriver clopin-clopant le long des petits quais et le matériel ramené à La Calle en voiture par Marc Falki ? Et chacun de nous est rentré à pieds, rêvant encore de cette superbe et inoubliable journée d'été où, nous pourrions fièrement le dire, que nous avions été les premiers et peut-être ? Les seuls Callois, a avoir dégusté une macaronade sur l'île maudite - par un beau jour d'été.
        Lorsqu'il m'arrive de penser à ces temps heureux, qui, aujourd'hui n'existent hélas plus, il ne me reste qu'à me murer dans mes souvenirs, afin de revivre un moment la macaronade de l'île maudite et me rappeler de tous mes chers copains de jadis.
Docteur Jean-Claude PUGLISI,
de La Calle de France -
Paroisse de Saint Cyprien de Carthage
( le 18 décembre 2019 )


PAULO CHEZ LE ZIEUTISTE !
Envoyé par M. Georges Barbara

            - » Eh Zek ! O M’sieu Di Malta agas çà main’nan, pour sur qu’avec cette paire de vitrines que vous z’allez me mette t’sur les yeux, comment je vais t’etre. Diocane ? La classe !… Que toute cette bande des mals appris des copains qu’y sont dans le quartier, y vont te rester Axe, c’est moi que j’vous l’dis ! Grand luxe Madame Antoine, grand luxe ! Et pis y pourront plus me faire marronner adevant les filles en me disant « O Paulo le Tcheugade, et pis aussi, O le Guide à gauche, aussinon comme ce Tchouchte de Nano que c’est un falso de promiere, lui qu’y se régale de me dire ;

            - »Toi t’ya un œil qu’y te pisse dans le corridor de Madame Vella la maltaise et l’aute qu’y te fait la Djeille pour ‘oir si a vient pas !

            -» C’est sur Paulo, laisse les qu’y te crèvent de jalous’rie cet’bande de dandalons, que leur mère a l’est même obligée de leur courir darrière pour qui te rentrent à l’école le matin ! Te le sais ça ?

            -» Ah ça qu’ vous venez de dire, et ben c’est la vraie vérité hein, et j’va vous dire en plusque c’est que le Nano y l’a même reçu dans la classe de Français, un madone de bonnet de Bouricot, AH ! Ah ! Ah ! Que le maître y s’lui a mis t’sur la tête ! Et si y lui a mis ce bonnet c’est que le Jeannot y l’avait fait 10 fautes dans la dictée d’Alexandre Dumas. Et ça que vous savez pas par dessur le marché, c’est qu’y l’a fait les mêmes fautes que son ‘oisin Tonin, à cause qu’il a copié par dessur son épaule. Alors Monsieur Duclos mon maître qu’il est pas tombé ‘ac la dernière pluie et que c’est pas un Tchoutche lui qui te sort de l’ecole anormale de Constantine, y te lui a donné à copier 100 fois le mot ‘’je ne copierai plus ts’ur Jeannot’ ! Et vous savez pas ça qu’y lui a répondu le Nano au maitre ? Et ben il lui a dit:» A ça M’sieur Ducros t’sur la tombe de mes morts çà j’peux pas vous l’jurer que je rocommencerai pas, pourquoi moi j’suis un garçon que quand j’t’achète des caramels mous à chez l’Arabe devant l’école, toujours j’te fais des mitches a’c Tonin. Et pourquoi on se fait des mitches, et ben c’est qu’on s’est associé dans le jeu des noyaux d’abricots et qu’on te partage tout ça qu’on gagne... Alors c’est tout normal que quand y’a la dictée, y doit te faire le partage lui aussi !
            Et du coup vous savez pas ça qu’y l’a fait Monsieur Duclos ? Y les a changé de place… Main’nan y’en a un qu’y l’est quand tu rentres et l’aute à azrine, tout au fond d’la classe !

            - » Et ben ça c’est des maitres d’avant qu’on en fait plus Nano !

            - » Ah oui ! J’allais oublier. Quand vous avez fini m’sieur le Zieutiste y faut que moi je vous demande une chose : Ma mère a m’a dit de vous dire, que ce matin au marché a l’a entendu dire que chez Arcamone dans la rue Perregaux, çuila qui te fait les lunettes aussi, quand tu t’achètes une paire y te fait cadeau une autre lunette, c’est vrai ?

            - » Et zek, qu’est ce que tu me racontes là o Paulo, t’ens ‘oi beaucoup du monde qu’y te font des cadeaux toi, ou alors c’est une paire de lunettes comme y te vend le chinois en haut du marché. Quand t’yachetes une paire d‘espadrilles y te donne des lunettes avec. Et après quand te vas aller voir le matche dimanche au stade te vas ‘oir deux ballons avec ces cats de lunettes ! N’a pas peur Paulo, cet’paire que j’va te faire, a l’est tellement costaud que t’yen a adebon jusqu’à ça qu’tu pars au régiment ! Alors dis y a ta manman tout ça que j’viens de te dire !

            - » Non c’est juste que ma mère a l’avait pensé que je pourrais la donner à Fifine ma sœur. Elle a va les mettre juste quand a va t’sur le cours ! Ma mère a dit que ça va lui donner un peu de chic. Pourquoi la pauvre le bon Dieu y te l’a pas fait trop belle, a’c toutes ses dents qu’elles te sortent d’la bouche !

            - » Aller laisse tomber Paulo, où t’ya vu que des lunettes à te font rentrer les dents ? Aussinon si c’était vrai…. t’yaurais plus des dentistes !

Georges Barbara, 19 septembre 2022



Bénédiction de la Nouvelle Eglise de Fouka
Bibliothèque Gallica Algérie catholique N°7, 1936

       Après une course rapide à travers cette région en bordure du littoral qu'offre aux regards charmés un perpétuel déroulement de vignes prospères coupées de pittoresques bosquets de verdure puissante d'où émergent, lumineuses et riante des gracieuses agglomérations, nous débouchons sur la grande place de Fouka.
       Face à nous, dans une auréole de lumière, une lumière radieuse qu'un déluge tenace et persistant, jusque dans la nuit précédente, n'aurait pu faire espérer, l'église se présente toute blanche, élégante et svelte dans son style gothico-moderne.
       Simple, car elle ne comporte ni sculptures ni ornementation ; sa beauté, réelle, est faite de la pureté de ses lignes, de l'harmonieuse unité de sa forme.
       Nous avons la surprise, surprise heureuse, dans une localité dont l'esprit anticlérical combatif est de notoriété publique, de trouver massée sur la place, une foule considérable qui suit, dans une attitude irréprochable, les cérémonies de la bénédiction de l'église, commencées à 9 heures un quart précises, avec l'exactitude qu'affectionne Son Excellence. Les rites divers se déroulent à l'intérieur et à l'extérieur de l'édifice.
       Dès qu'ils sont terminés, les portes s'ouvrent et la foule pénètre sans précipitation excessive et sans bruit.
       Cette église, vide encore de tout mobilier, se remplit très vite de fidèles, debout, serrés coude à coude, et débordant jusque sur la place.
       La «Cécilia », dont la réputation n'est plus à faire, entonne avec âme un triomphant «Christus vincit, Christus régnat, Christus imperat », doublement de circonstance.
       Monseigneur l'Archevêque, qu'assistent M. le Vicaire général Poggi et le Père Laféteur O. P., se place au fauteuil.
       L'officiant, M. l'abbé Henri Avignon, l'ancien curé de Fouka, qui a été une des chevilles ouvrières de la reconstruction, monte à l'autel servi par quelques Scouts, dont la troupe (la première d'Alger), est malheureusement restée en panne par suite d'un malentendu.

       Nouvelle découverte, la Chorale de Fouka, une excellente chorale, admirablement formée, non moins bien dirigée et soutenue par un accompagnateur de talent, M. Jules Bernardi, composée de chanteurs et de chanteuses aux voix souples, étoffées, puissantes, avec des solistes de valeur, entonne le «Kyrie» de la Messe de César Franck dont elle va d'ailleurs donner successivement toutes les parties. Pas une faute à relever, pas une défaillance ; à signaler, au contraire, un sens de la mesure, de l'harmonie, des paroles liturgiques qui ont tenu sous le charme l'assistance entière.

       Après l'Evangile, Monseigneur parle. Les sentiments divers qui animent l'orateur sont si profonds, si sincères, si vivants de la voix, dans la force avec laquelle il scande l'expression de certaines pensées. Nous sommes heureux de reproduire ci-après cet émouvant discours.
       Après une éloquente et émouvante évocation du drapeau français, Monseigneur termine en donnant la bénédiction, et le «Credo» éclate, un «Credo» retentissant, chanté à l'unisson par la «Cécilia» et la Chorale.

       A l'offertoire, M. Abbadie, accompagnée par Mlle Bernardi, nous donne le régal d'un morceau de violon artistiquement et pieusement exécuté.
       Les clairons et les tambours du Patronage de Sainte-Croix saluent d'une sonnerie de triomphe le Dieu caché qui vient de descendre sur l'autel.
       Pendant que le célébrant distribue la Sainte Communion à quelques fidèles, M. Pierre Bernardi chante, d'une voix souple et profonde, une prière à la Vierge : «Je vous salue Marie ».

       La cérémonie se clôture par un cantique au Christ-Roi qu'exécute la «Cécilia », et la bénédiction donnée du fond du cœur par Son Excellence, « aux présents comme aux absents, aux amis comme à ceux que les passions, l'aveuglement ou l'ignorance poussent à la haine ».
       Puis la foule s'écoule et se masse devant l'église pour acclamer Monseigneur dont le visage resplendit de joie et qui répond de la main à l'enthousiasme des fidèles.
       Pendant ce temps la fanfare exécute avec entrain un joyeux pas redoublé.
       Le succès, succès pieux et profond, de cette belle fête dépasse toutes les espérances. Pas de fausses notes, pas de faux accords, pas d'ombre dans ce tableau de lumière et de joie.

       Nous ne ferons pas, en effet, à la maigre douzaine de petits gamins débraillés qui, pour suppléer à l'exiguïté de leur taille, s'étaient juchés, sur le kiosque à musique, l'honneur de prendre au sérieux leur pâle tentative de contre manifestation.
       Quant aux catholiques de Fouka, qu'ils nous permettent de leur dire l'excellente impression qu'ils nous ont laissée. Ils ne sont qu'une minorité peut-être, mais une de ces minorités qui, à l'exemple des minorités de la primitive église, tenues en haleine par la contradiction ambiante, savent vivre leur foi intégrale, ardente et lentement mais sûrement « rayonner » !

       La reconnaissance de ce jour allait particulièrement vers les bienfaiteurs de cette église ressuscitée, l'architecte, M. Vasselon ; à l'entreprise Haour Frères dont M. Maurice Rajon en est le directeur de l'Agence d'Algérie ; enfin vers ceux qui avaient aidé à la résurrection de ces ruines saintes, et notamment M. Péchot et Mlle Perrin, organisateurs de cette belle cérémonie.
       Puisse, comme l'a souhaité ardemment Monseigneur, la résurrection de l'église de Fouka être pour la paroisse en particulier plus qu'un symbole, mais le présage d'une triomphante et prochaine réalité !
       La Vie succède à la mort, l'Amour triomphe de la haine et c'est toujours le Dieu éternel des siècles qui a, quand il le veut et comme il le veut, le dernier mot !
C. C.
       


LE SCANDALE DE L’ORANGERIE
BONJOUR N°7 du 20 novembre 1932
journal satyrique bônois.
              Nous avons reçu, du Syndicat de Défense des Intérêts de la Cité de l'Orangerie, un communiqué très intéressant et nous regrettons de ne pouvoir le reproduire en son entier.
              Les habitants de la Cité se sont réunis, il y a quelques jours. 150 personnes, environ, étaient présentes. A l'unanimité, elles ont voté un ordre du jour dont la lecture est particulièrement suggestive.
              Les habitants de la Cité, justement émus par le préjudice que le rapport Hudelo a porté à leurs intérêts, demandent au Ministre de la Santé Publique de constituer une commission qui s'assurera si, oui ou non, les terrains de l'Orangerie sont insalubres.
              Entête de cet article, nous avons écrit le mot : Scandale. Il est simplement scandaleux que l'Administration, il y a six ans, «ait délivré des certificats de salubrité et de viabilité, engageant, de ce fait, la population à construire » sur des terrains qui sont, parait-il, aujourd'hui insalubres.

              Il est scandaleux, davantage, qu'après avoir laissé les habitants dépenser tout leur argent dans la construction de leurs maisons, forts qu'ils étaient des autorisations favorables données par l'Administration, on vienne leur dire, après six ans : « Vous n'aurez plus un sou de crédit, vous cesserez de construire, les terrains sur lesquels vous avez bâti sont insalubres ! » Et voici toute une population qui est ruinée sans autres phrases.
              Et cela sur le rapport, étonnant de légèreté et de sans-gêne, d'un ancien fonctionnaire politicien, le sieur Hudelo, qui, en quelques heures, et sans entendre les principaux intéressés, a déclaré, dans sa souveraineté, que l'Orangerie était insalubre.
              Ce même fonctionnaire, nous l'avons lu dans les journaux algériens, a suscité, en d'autres endroits des protestations violentes et sa rentrée au Ministère est accompagnée par des plaintes nombreuses émanant de plusieurs sociétés algériennes dont il a traité les intérêts avec une désinvolture inattendue.
              Les habitants de l'Orangerie enferment l'Administration dans un double dilemme. Les terrains de l'Orangerie étaient, naguère, salubres ou ne l'étaient pas.
              S'ils ne l'étaient, pas pourquoi avoir donné l'autorisation de construire ? S’ils l'étaient, par suite de quel miracle ne le sont-ils plus ?

              La population, lésée gravement dit, en substance, ceci : L'Administration, seule responsable, prendra à sa charge entière la reconstruction de nos maisons, telles qu'elles sont actuellement, en un autre terrain qui sera salubre et à une distance égale du centre de la ville.
              Elle remboursera les prix des terrains qui ont été payés par ceux qui n'ont pas encore construit. C'est la logique même.
              Ceci dans le cas où la Commission demandée déciderait que les terrains sont décidément insalubres.
              Dans le cas contraire, les travaux de viabilité devront être mis immédiatement en chantier. De plus, ladite Commission devra fixer pour les terrains, un prix de base empêchant ainsi leur vente au-dessus de leur valeur réelle.
              Enfin, les habitants de l'Orangerie déclarent que ceux d'entre eux qui l'habitent depuis des années nombreuses, n'ont jamais eu à se plaindre de leur état de santé, que l'air qu'on y reçoit directement des montagnes de Bugeaud a été un bienfait pour eux.
              Nous avons fait personnellement, une promenade à l'Orangerie et nous avons constaté que les enfants, qui y ont été élevés ont des bonnes grosses joues et se portent fort bien.
              Et ceci est un critérium infaillible.

              Il doit y avoir, dans toute cette affaire, une laide histoire qui éclatera un de ces matins.
Le Gérant : P. MARODON
 


VENGEANCE
Par Hugues

             Le mari, sur son lit de mort, appelle sa femme. D'une voix rauque et faible, il lui dit :
             - "Mon heure est arrivée, mais avant, je veux te faire une confession.
             - "Non, non, reste tranquille, tu ne dois faire aucun effort".
             - "Mais enfin, je dois le faire", insiste le mari. Il est bon de mourir en paix.

             Je veux te confesser quelque chose.
             - "C'est bon, c'est bon, je t'écoute" lui répond sa femme.
             -"J'ai eu des relations avec ta sœur, ta mère et ta meilleure amie" confesse le mari.
             - "Je sais, je sais ! C'est pour ça que je t'ai empoisonné", déclare sa femme...


L’Insurrection de Mokrani
Bachaga de la Medjana
Maurice VILLARD
rédacteur en chef honoraire de I’ACEP-ENSEMBLE

ACEP-ENSEMBLE N° 293-décembre 2014
                  
               La Revue ensemble propose à ses lecteurs de trouver sous forme de "série" dans une suite de numéros la présente étude de la révolte du Bachaga Moqrani présentée avec la minutie et le souci de la vérité qui ont toujours illustré les écrits de l'auteur à qui l'on doit de nombreux ouvrages, qui l'ont élevé au rang de véritable historien de la guerre d'Algérie.
                Même si les pouvoirs politiques coupables d'impostures et de forfaitures, aidés en cela par les médias aux ordres et soumis à l'idéologie anti française qui règne depuis 1958 et, par leurs occultations, tenté de faire obstacle à ces témoignages authentiques et à ces vérités, nombreux sont les lecteurs qui en ont la connaissance.

Préface

                Pour ne pas être issu du moule universitaire, l'Auteur n'en est pas moins un Historien avéré. Sa puissance de travail, sa curiosité et sa méticulosité en on fait un « chercheur » de premier ordre ; son charisme, son honnêteté intellectuelle l'ont éloigné des idéologies déformantes pour en faire un analyste objectif et sincère ; la connaissance approfondie de l'histoire des mœurs et des coutumes et le côtoiement journalier des populations rurales au cœur d'un territoire grand comme la France ont fait de lui un sociologue averti du passé et connaisseur du présent, la pratique courante de la langue arabe des Hauts Plateaux et de leurs piedmonts berbères Nord et Sud de son pays lui ont permis de percevoir les nuances et de déchiffrer le sens des mots en même temps que les processus de raisonnement d'une culture indéniablement étrangère aux occidentaux.
                Peu d'auteurs ont ainsi maîtrisé les vérités enfouies dans les arcanes du langage et des traductions ; rares sont ceux qui ont été en mesure d'entendre le non dit et de déchiffrer les allégories qui foisonnent dans la langue arabe dans son expression orale.

                Avec ses précédents ouvrages (1), ce passionné de son pays, I'Algérie, et de son histoire, mais aussi témoin des bouleversements qui I'ont affecté de 1945 à 1962, il a su s'élever au-delà des ressentiments pour conduire ses recherches et parfaire ses analyses en faisant toujours prévaloir la raison et I'objectivité.
                La « Révolte de Mokrani », située dans son contexte historique et chronologique est tout à la fois un récit des plus passionnant et une analyse implacable des réalités de l'époque. Au-delà de l'épopée guerrière, cette présentation des faits, illustre de manières flagrantes les inadvertances et les incohérences qui ont marqué la présence française en Algérie dès 1830.
                Nous trouvons déjà l’inconsistance politique de la France quant au devenir de son occupation avec en conséquence les tergiversations successives mais aussi la méconnaissance, sinon l’ignorance des réalités par le pouvoir parisien installé dans sa fatuité.

                Le mépris du « Politique » de la parole donnée ou de la souffrance de ceux qui ont à pâtir de ses trahisons. En quelques mots la persistance depuis des lustres de l’incompétence à administrer dignement une grande Nation comme la France.
                Il convient toutefois de préciser que ces légèretés et ces manquements ont plus ou moins marqué toutes les « Politiques » de tous les pays à travers tous les temps.

                L’Histoire aura été plus souvent le fait de circonstances que celui de la volonté des hommes qui n'y auront finalement apporté que des péripéties dramatiques.
                Hélas ces comportements inqualifiables ont causé des dommages conséquents aux peuples, qu'ils aient été colonisateurs ou colonisés. Mais ils étaient l'apanage inhérent de I'époque et des régimes politiques contemporain.
                Sous toutes les latitudes, nos temps modernes n'échappent pas à ces carences des « gouvernants » et la démocratie comme la laïcité on atteint leurs limites.
                Il est profondément inquiétant que notre XXIéme siècle n'ait pas tiré enseignement des aberrations qui marquent la gestion des Nations et de l’impuissance de fait des organismes internationaux.
                Ce ne sont pas la démission et la faiblesse devant les agressions démoniaques, matérielles ou verbales, qui protégeront les peuples des déboires qu'ils subissent et des périls qu'ils courent.
                La repentance misérable et honteuse qui est affichée par nos gouvernements et dont on voudrait imbiber nos enfants ou les commémorations larmoyantes des culpabilités d'antan ne sont pas les voies de l'enseignement qui est à tirer du passé ; c'est ainsi hélas que celui-ci est appelé à se reproduire à l’identique au mépris de l’intelligence.

                Ce regard lucide et froid de I'auteur sur « la révolte de Moqrani » est de nature à enrichir le lecteur d'une part quant à ses connaissances historiques et d'autre part quant aux exigences qu'il doit attendre de ses gouvernants.
Fred ARTZ

                (1) La vérité sur l’insurrection du 8 mai 1945 à Sétif et dans Ie Constantinois.
                Menaces sur l'Algérie française.
                Les massacres du 8 mai 1945 Sétif - Guelma - le Constantinois début de 17 années de guerre en Algérie.
                De la régence d'Alger à l'Algérie Française
                Les Hauts Plateaux Sétifiens - La ville de Sétif.
                Les 70 villages des Hauts Plateaux Sétifiens
                Les Villes des Hauts Plateaux Sétifiens et les annexes.

AVANT PROPOS

                Les faits qui se rattachent à ce soulèvement sont mal connus et appréciés. Leurs causes véritables, leur nature ainsi que la connexité du peuplement et de ses différentes origines, moeurs, religions et statuts, qui conduisirent à cette rébellion, ont été déformés, occultés.
                La véritable cause de cette déclaration de guerre à la France est tout autre.
                Contrairement aux idées reçues, ce n'est pas l'application du décret Crémieux accordant la nationalité française aux juifs indigènes qui en est la cause.
                La guerre contre la Prusse, les troupes françaises avaient été acheminées sur la métropole, Il ne restait sur la terre algérienne que quelques régiments.
                La capitulation de Sedan le 1er septembre 1870, la France est envahie. La République remplace l'Empire. Le gouvernement se réfugie à Bordeaux.
                L'armée vaincue, la France occupée par les Prussiens perd aux yeux des Indigènes son prestige de grande puissance.

                Les Officiers des Bureaux Arabes qui avaient la confiance des grandes familles seigneuriales sont remplacés par des fonctionnaires civils qui ignorent les coutumes locales, les promesses faites et qui trahissent, aux yeux des notables Indigènes les plus engagés dans une cohabitation fraternelle, la parole de la France.
                Les Chefs Indigènes crurent que l'occasion était belle de pouvoir retrouver leur indépendance qu'ils avaient perdue depuis la conquête ottomane, bouter hors d'Algérie I'envahisseur chrétien et ainsi retrouver tous les privilèges ancestraux que la France était en train de leur supprimer.
                Ce fut tout d'abord les tribus féodales qui menèrent les combats. Ils seront vite rejoints par les religieux, les marabouts prêchant I'extermination des chrétiens et avec l'appel au djihad, des milliers d'indigènes prirent les armes, ce fut l'embrasement général en Algérie et au Sahara.

                Malgré le retour des troupes françaises de la métropole et l'aide de nombreuses tribus restées fidèles, les combats, les massacres, les destructions des biens durèrent plus de deux années. L'armée perdit plus de 3.000 hommes, des blessés par milliers, les pertes civiles n'en furent pas moins importantes. Les populations rurales furent réduites à se réfugier dans les villes encerclées qui ne durent leur salut que grâce à I'épaisseur de leurs murailles, de leurs pièces d'artillerie et de la vaillance de leurs défenseurs.
                En 1871, peu de personnes connaissaient le passé et la situation réelle des chefs indigènes qui commandaient dans la province de Constantine. On ne voyait en eux que des fonctionnaires avides, peu scrupuleux et peu dévoués à la France, qui les avait investis, comblés d'honneur et d'immunités.
                De plus leur orgueil était proverbial Ils étaient détenteurs d'un immense territoire en friche avec une faible partie, très mal, cultivée, dont il fallait faire bénéficier la colonisation et les prolétaires indigènes.

                Certes cela est bien vrai, mais leur histoire est tout autre. Entre la France et plusieurs de ces seigneurs indigènes ou de leurs ascendants immédiats, il y avait de véritables contrats synallagmatiques qui engageaient la France à respecter les situations acquises et à tolérer certains abus en désaccord avec notre état social et nos aspirations démocratiques.
                Ces chefs, en bon nombre d'endroits, et notamment entre Bordj Hamza et le Sahara, n'avaient jamais été vaincus. Les régions qui étaient sous leur commandement avant nous, de père en fils, n'avaient jamais été conquises par notre armée.
                Les maîtres et seigneurs héréditaires de ces régions, restés plus au moins indépendants sous les Turcs, étaient venus à nous de leur plein gré. Ils nous avaient offert et livré le plus souvent de vastes territoires habités, parfois ils nous les avaient donnés alors que nous n'étions pas encore en état d'en prendre possession.
                Ils avaient ainsi agi croyant y trouver leur intérêt et parce que nous avions promis en retour, de conserver tous leurs avantages, par la force de notre armée si nécessaire.
                Ces promesses avaient été faites dans les premiers temps de la conquête. L’incertitude la plus complète sur le devenir de ce pays, les avis en France étaient contradictoires et on ne savait pas ce que I'on ferait de I'Algérie, si on la conserverait en totalité ou en Partie.
                Les généraux en chefs et les gouverneurs, à qui la métropole refusait I'argent et les moyens d'action, avaient traité avec les grands chefs venus en alliés et acceptant notre suzeraineté.
                A ces auxiliaires si précieux nous avions demandé de combattre à notre service. En retour, nous leur avions garanti la dignité, les honneurs et tous les privilèges dont ils jouissaient depuis toujours comme un droit.
                Cette parole a été tenue, tant que nous avons eu besoin de ces alliés pour conquérir et gouverner. Mais, le jour où nous nous sommes sentis assez forts pour nous passer d'eux, nous avons trouvé qu'ils étaient des alliés encombrants et que nos engagements avaient été, bien imprudents, et nous n'avons plus vu, dans ces partenaires de la première heure, que des gênes pour l’œuvre de progrès et de civilisation que la France entendait accomplir en Algérie afin de justifier sa conquête.

                Nous avons alors essayé de faire comprendre à ces familles féodales, ayant conservé les moeurs et les préjugés du XIIIème et XIVème siècle, les conceptions humanitaires et politiques des sociétés modernes.
                Ils ne comprirent qu'une seule chose, que nous voulions amoindrir leur situation et leur imposer les mêmes devoirs et les mêmes obligations auxquels nous avions astreint les vaincus subissant ainsi les volontés du vainqueur.
                De là, apparurent bien des malentendus et de forts mécontentements, que s'efforcèrent d'atténuer les Officiers des Bureaux Arabes, chargés de la délicate mission de contrôler ces chefs et de discipliner leur concours au mieux des intérêts de I'action de notre gouvernement.
                Grâce au zèle et à l'habilité de ces officiers, si souvent calomniés, grâce aussi au bon esprit et au sens politique dont ces grands chefs faisaient preuve lorsqu'on ne heurtait pas leurs préjugés et leurs intérêts, bien des situations délicates avaient été aplanies en un temps relativement court.

                Mais nos colonies ont toujours été victimes de nos dissentiments politiques ou des malheurs de la mère patrie. L’Algérie, qui depuis 1850 a eu si souvent à souffrir des attaques inconscientes dirigées contre elle dans la métropole, devait, en 1870 et 1871, subir le contre coup des impatiences de I'opposition, et de I'ignorance des hommes que les circonstances appelèrent, sans préparation aucune, à la direction souveraine de ses affaires.
                Cet ouvrage n'est ni une histoire de l'Algérie, ni une étude militaire, c'est l'histoire d'une très grave insurrection indigène. Les faits rapportés ont été tirés de nombreux ouvrages de l'époque, de documents et de notes publiés par les officiers faisant partie des troupes engagées dans les combats, des Officiers des Bureaux Arabes, d'observateurs impartiaux analysant avec lucidité le comportement des principaux instigateurs de cette insurrection.
                Il a été nécessaire pour plus de compréhension de ces événements de faire un long résumé de l'historique des Mokrani.
          Malgré le décousu forcé des opérations de guerre, il est facile de classer les faits de l'insurrection de 1871 en quatre périodes :
          1 - L’époque des difficultés et des révoltes locales.
          2 - La Khouannerie qui couvre l'Algérie de ruines et de sang.
          3 - Les échecs de la coalition
          4 - Les dernières luttes avec I'arrestation de Boumezrag.


                La première période allant du 14 juillet 1870 au 8 avril 1871, époque des difficultés et des révoltes locales. Souk-Ahras, El-Milia, le siège de Bordj-Bou-Arréridj, les premières opérations dans la Medjana et I'Ouennougha, en sont les principaux épisodes. Pendant cette période, et malgré la gravité des faits, nous ne sommes pas en face d'une insurrection générale.
                Seuls le Bachagha et ses frères sont révoltés, leur révolte est localisée sur une portion de I'ancien fief familial, et tous les Mokrani qui ne sont pas du soff de la Medjana combattent dans nos rangs avec l'espoir avoué de remplacer le Bachagha, dont ils sont restés les rivaux ou les ennemis.
                Du 8 avril au 5 mai, l’insurrection est devenue générale. Elle s'étend de la mer au Sahara, et, sous la direction des khouans Rahmanya qui ont proclamé la guerre sainte, elle couvre l'Algérie de ruines et de sang. C'est la Khouannerie qui bat son plein, alors que nous manquons de troupes et que nous assistons impuissants à ces dévastations.

                Du 5 mai, jour où le Bachagha est tué, jusqu'au 13 juillet, jour où le Cheikh-el-Haddad se constitue prisonnier, nos colonnes ont pu être organisées. De tous côtés elles écrasent les rebelles, et la période des échecs de la coalition.
                Mais nos exigences vis-à-vis des vaincus et diverses circonstances empêchent la soumission de quelques-uns des chefs les plus compromis ou permettent de nouvelles prises d'armes par les tribus.
                C'est alors à partir du 13 juillet, la période des dernières luttes qui se terminera le 20 janvier 1872, par I'arrestation de Boumezrag.
                A cette date, I'insurrection est bien terminée, l'ordre est rétabli, mais les poursuites et la répression des rebelles, l'exposé des mesures imposées par ces années de luttes, fournissent encore matière à un chapitre complémentaire qui est l’épilogue de cette histoire.

                C'est bien à partir de cette époque que les Indigènes comprirent qu’ils pouvaient se libérer de la tutelle de la France, retrouver I'indépendance qu'ils avaient perdue au fait de la domination ottomane. C'est alors que des mouvements revendicatifs virent le jour pour s'amplifier, s’organiser au fil des années. Ainsi l’insurrection du 8 mai 1945 fut la préparation de la guerre d'Algérie qui amena I'indépendance.
Maurice Villard

INTRODUCTION
Chapitre 1
LES MOKRANI AVANT LA CONQUÊTE
Chapitre 1- L’histoire.

                Les Moqrani ont des parchemins qui les font descendre de Fatma, fille du prophète Mohammed. Mais les traditions locales les rattachent volontiers, et sans raison, aux émirs de la Kalaa des Beni-Hammad, du Djebel Kiana.
                Au XIe siècle de notre ère, lors de l’invasion musulmane hilalienne, Ies émirs des Ayad-Athbedj appartenaient aux familles des ouled-Abdesselem et des Ouled-Gandouz, noms qui ont continué à être portés par les Moqrani.
                Quoi qu'il en soit de ces origines lointaines, ce qui semble certain, c’est que, dans la seconde moitié du XVème siècle un émir ou prince, nommé Abderrahmane, quittait le Diebel-Ayad et venait s’installer près des Bibans, d’abord à Mouqa, puis à Chouarikh et enfin à la Qalaa, des Beni-Abbès.
                Le massif montagneux situé entre Bordj-Bou-Arreridj et Ie Hodna était dénommé au temps des Berbères, Dfebel-Kiana ou Diebel-Adjissa, du nom de ses habitants. A partir du Xlème siècle, il est devenu Ie Dlebel-Ayad, nom qu'il porte encore aujourd’hui concurremment avec celui de Djebel-Maadid. Sur les ruines de la Qalaa, il y a aujourd'hui la dècherra des Ouled-Sidi-Fadel.

                Son fils, Ahmed-ben-Abderrahmane, fortifia cette localité, en fit la capitale d'une principauté s’étendant de l'Oued-Sahel au Hodna, et pris le titre de sultan. Il fit une guerre acharnée à l'un de ses voisins, le sultan de Koukou, chef des tribus de la rive gauche de I'Oued-Sahel, et, ayant appelé à son aide le corsaire Arroudj, alors à Djidjelli, il vainquit son ennemi, en 1515, chez les Ouled-Khiar, grâce à l'emploi des armes à feu dont les Turcs d'Arroudj étaient pourvus.
                Ainsi fut-il un des premiers alliés des frères Barberousse, devenus la même année, souverains d'Alger, et, en avril 1542, il était à côté de Hassan-Agha, qui, en qualité de khalifat de Khair-eddine, était venu infliger un nouvel échec au sultan de Koukou, resté ennemi des Turcs.

                Le royaume de Koukou fut fondé en 1510 par Ahmed-ben-el-Qadi, qui juge à la cour des derniers rois de Bougie, lors de la prise de cette ville, le 6 janvier 1509, s'était réfugié chez les qbaïls des Aït-Ghoubri, à Aourir. Il était devenu Ie chef d'une confédération puissante. A partir de 1618, la famille se divisa, son influence déclina, le nom même d'Ouled-el-Qadi, porté par les chefs de Koukou, cessa d'être employé, et il fut remplacé par celui d'Oued-Bouketouch.
                Aujourd'hui la famille a été absorbée par l'élément berbère et n'a plus qu'une influence insignifiante dans Ie haut Sébaou. Koukou est une taddert de 600 habitants répartis en six hameaux. Il fait partie de la faction des Immesurable des Ain-Yahia, aux sources du Sébaou.

                Son fils Abdelaziz, fidèle à l'alliance turque, amena, en 1550, à Alger, une petite armée de 15.000 qbaïls à la tête desquels il accompagna dans l'ouest Hassan-Pacha, fils et khalifat du Beglierbey Khair-eddine. Ce fut grâce aux conseils et au courage personnel du sultan des Beni-Abbès que les turcs battirent les Marocains sur Ie Rio-Salado et reprirent possession de Tlemcen.
                Pendant cette expédition, Abdelaziz s'était attaché un groupe des Hachem de Mascara et en avait fait sa garde particulière. Il les ramena avec lui et les installa au pied de la montagne de Qalaa, au nord de la Medjana, ce fut le noyau de la tribu noble des Hachem, qui, jusqu'en 1871, resta makhzène fidèle des Moqrani.
                En 1552, Abdelaziz accompagna encore avec 8.000 hommes le beglierbey Salah-Reïs dans l'expédition contre Touggourt et Ouargla.

                La puissance du souverain Kabyle indispose les Turcs.
                Mais la puissance du souverain kabyle avait porté ombrage aux Turcs. Un jour qu'Abdelaziz, venu sans méfiance à Alger, était logé au palais de la Jenina, il avait failli être assassiné par les janissaires et n'avait dû son salut qu'à I'intervention de soldats gouaoua, originaires de Koukou, Peu après, et sans déclaration de guerre, Salah-Reïs lançait son armée contre le sultan des Beni-Abbès. Un combat eu lieu à Boni, près de la Qalaa. El-Fadel, le frère d'Abdelaziz, y fut tué, mais les Turcs ne purent aller plus loin, et la neige les força à rentrer à Alger.

                Délaite des Turcs face à Abdelaziz.
                Au printemps suivant en 1553, Mohamed-Bey, fils de Salah-Reïs, revint, avec une armée plus forte, se faire battre au même endroit. Ne pouvant réussir en pays de montagne, Ies turcs, en 1554, marchèrent par le Sud vers M'Sila, sous la conduite des renégats grecs Sinane Reïs et Ramdane, ils furent encore battus sur l'Oued-el-Ham, et alors, ils se résignèrent à accepter la domination d'Abdelaziz dans cette région.

                Abdelaziz, étend et consolide sa puissance.
                Profitant de la paix, Abdelaziz, aidé de son frère Ahmed-Amoqrane, étend et consolide sa puissance. Il s'était procuré de l'artillerie et avait organisé une milice chrétienne avec un millier d'Espagnols échappés de Bougie lors de la prise de cette ville en 1555, par Salah-Reïs.
                Il avait formé le projet de s'emparer de Bougie, et, en juin 1557, tout était prêt pour cette opération, quand il apprit qu'à la suite de troubles à Alger son ami Hassan, fils de Khair-eddine, avait été nommé beglierbey et venait de débarquer, Abdelaziz renonça à son expédition, et, sans se risquer à aller lui-même à Alger, il envoya des lettres et des présents à son ancien allié. Les relations amicales reprirent, Abdelaziz fournit des contingents d'infanterie kabyle, et il reçut du souverain d'Alger des lettres lui confirmant la possession de M'Sila.

                L'incurie du gouvernement espagnol avait rendu la défense de la ville de Bougie impossible. Le beglierbey Salah-Reis commençait le siège le 16 septembre. Le 27 il offrait une capitulation honorable, s'engageant à rapatrier en Espagne la garnison entière avec armes et bagages. Le 28, il entrait dans la ville, le gouverneur, Alonzo de Peralta, et cent vingt invalides, furent embarqués et arrivèrent en Espagne, où Alonzo eut la tête tranchée à Valladolid. Le reste de la garnison fut désarmé et conduit en captivité contrairement à la foi jurée. Mais presque tous les hommes s'échappèrent et se réfugièrent chez Abdelaziz, qui les accueillit, leur laissa la liberté et les prit à son service.

                 Hassan-Pacha reprend M'Sila et s'avance dans la Medjana.
                Hassan était resté, plus d'un an, occupé par des expéditions dans l'Ouest contre les Marocains, qu'il avait poursuivi jusqu'à Fez, et contre les Espagnols qu'il avait battus en août 1558, à Mazagran.
                Quand il rentra à Alger, en septembre, Hassan Corso, dont Abdelaziz s'était fait un ennemi mortel en 1550, Ahmed-el-Cadi, sultan de Koukou, et enfin quelques chefs du Hodna qui avaient été razziés par les goums de M'Sila, dénoncèrent au beglierbey les armements et les projets du sultan des Beni-Abbès contre Bougie, Hassan-Pacha marcha en personne avec 3.000 turcs contre M'Sila, qu'il reprit sans difficulté au cours de I'hiver 1558-1559. Abdelaziz ne se méfiait pas, et il était resté dans la montagne.
                Avant qu'il n'en fut sorti, le beglierbey s'était avancé jusque dans la plaine de la Mediana où il faisait élever en hâte deux fortins en pierres sèches, l'un à Aïn-bou-Arréridj, l'autre à Zamora. Il y mit quatre cents hommes de garnison, dont il confia le commandement à Hassan-Corso. Mais il n'osa pas s'engager dans la montagne et rentra précipitamment dans le Hamza, car sa faible colonne commençait à être gravement inquiétée par Abdelaziz et Amoqrane, accourus à la hâte avec leur cavalerie.

                Peu après son retour à Alger il apprit que les fortins avaient été enlevés et détruits, que tous les janissaires de Bou-Arreridj avaient été massacrés, que ceux de Zamora s'étaient réfugiés chez les montagnards voisins et indépendants.
                Le beglierbey changea alors de tactique. Il fit des avances au sultan de Qalaa, invoqua d'anciens souvenirs, lui fit entrevoir la destruction du royaume de Koukou, et, pour cimenter l'alliance qu'il désirait, il demanda la main de la fille d'Abdelaziz. Ce dernier refusa net, il était payé pour ne pas se fier aux turcs.

                Hassan-Pacha s'adressa alors au sultan de Koukou, qui lui donna sa fille et ses soldats. Leurs armées réunies entrèrent en campagne à la bonne saison et vinrent prendre position près de Tala-Mezida, où Abdelaziz avait son camp retranché couvrant la Qalaa.
                Tâla-Mézida est resté le meilleur camp près de la Qalaa, c'est le seul point où il y ait de l'eau en abondance. Boni est mal pourvu, et la Qalaa encore plus mal.

                Combats, Abdelaziz est tué, les Turcs renoncent
                On se battit pendant douze jours de suite, le huitième, Abdelaziz fut tué et eut la tête tranchée. Son frère Amoqrane continua le combat quatre jours encore. Les turcs, épuisés, renoncèrent à prendre la forteresse des Beni-Abbès, ils rentrèrent à Alger, emportant comme trophée la tête d'Abdelaziz, qui fut exposée à la porte Bab-Azoun, et qui, ajoute la légende se mit à parler.

                 Le règne d'Amoqrane.
                Encore une fois les Turcs laissèrent en paix les Beni-Abbès pendant quelques années. Amoqrane profita de cette accalmie pour augmenter Ie royaume paternel et étendre son autorité sur les Hauts Plateaux et Ie Sahara. A la tête d'une armée de 11.000 hommes, dont 3.000 chevaux, il se rendit maître de Tolga, Biskra, Touggourt, et des pays des Ouled-Naïl de Bou-Saâda et de Djelfa. Son administration et son gouvernement furent remarquables, et sous son règne Ie pays traversa une ère de prospérité que jamais plus il ne retrouva.
                En 1550, sa puissance était telle qu'il ne craignit pas d'envoyer à Alger un de ses fils pour souhaiter la bienvenue à Djafar-Pacha, arrivé le 24 aout 1580 en qualité de khalifat du beglierbey El-Euld-Ali. il lui apportait un royal présent estimé une vingtaine de mille francs.

                Le Pacha Kieder attaque la Qalaa.
                Dix années de tranquillité avaient permis à Amoqrane de perfectionner l'organisation de son royaume, mais, en décembre 1590, le pacha Kieder, qui voyait augmenter autour des Beni-Abbès les gens refusant l'impôt au beylik, se mit en marche avec une armée de 15.000 à 17.000 hommes pour s'emparer de la Qalaa. Amoqrane lui opposa des forces non moins considérables, l'assaut de la petite place ne put être tenté, et le pacha dut se borner à un investissement qui dura deux mois, pendant lesquels les turcs eurent beaucoup à souffrir des attaques de la cavalerie d'Amoqrane.
                Les environs de la Qalaa étaient ruinés, Ies Kabyles fatigués ; un marabout intervint entre les belligérants et réussit à faire cesser les hostilités.
                Amoqrane paya les frais de guerre, soit 30.000 douros, et les Turcs s'éloignèrent très éprouvés.
                Dix ans plus tard, en 1600, le sultan de Qalaa marchait contre les turcs, commandés par le pacha Solimane Veneziano, qui voulait pénétrer en Kabylie. Il les battait et ruinait l'établissement militaire que ceux-ci avaient élevé en 1595 à Hamza (Bouira), mais lui-même était tué dans ce combat.
                Son règne avait duré quarante et un ans, et son nom devait rester comme désignation patronymique à tous ses descendants.

                Amoqrane signifie, en berbère, grand et aîné, Moqrani est le synonyme en arabe d'Amoqrane. Les Indigènes disent : un Moqrani, des Moqranya ou encore des Ouled-Moqrane. Mais l'usage français a conservé le mot Moqrani au singulier comme au pluriel.
                Son fils El-Menaceur, plus connu sous le nom de Sidi-Naceur-el-Moqrani, était un homme d'étude et de prière, il s'entoura de tolba et de religieux, et fut plus tard vénéré comme un saint, mais il laissa péricliter les affaires du royaume et mécontenta à la fois les chefs de I'armée et les commerçants des Beni-Abbès.
                Ceux-ci l'attirèrent dans un guet-apens et l'assassinèrent.

                Il laissait trois enfants en bas âge, les deux plus jeunes furent sauvés par leurs mères, et ils restèrent dès lors étrangers à la fortune des Moqrani. L’aîné Betka, fut emporté dans la Medjana par les Hachem fidèles, qui l'élevèrent et l'aidèrent à reconquérir sa situation princière en le mariant à la fille du chef des Ouled-Madi.
                Avec les nobles de cette tribu, et avec ceux des Ayad, alors commandés par Slimane-el-Haddad, Betka-el-Moqrani prit part, dans la plaine de Guidjel (Sétif), à la grande victoire remportée sur les Turcs, Ie 20 septembre 1638, par tous les seigneurs et tous les nomades de l'Est, réunis sous le commandement de Cheikh-el-Arab-Ahmed-ben-Sakh-ben-Bouokkaz, l'ancêtre de celui qui nous devions nommer : l'agha Ali-Bey.

                A la suite de cette bataille de Guidjel, il y eut dans la province de Constantine une recrudescence d'indépendance vis-à-vis des Turcs, et Betka-el-Moqrani ne reconnut jamais leur autorité. Il avait renoncé à se parer du titre de sultan ou d'émir, et prenait celui de chikh de la Medjana, que conservèrent ses descendants. Mais il reconstitua le royaume de son grand-père, et battit à plusieurs reprises les Beni-Abbès, sans vouloir retourner à la Qalaa.
                Il mourut en 1680, dans son château de la Medjana, laissant quatre fils. L’aîné, Bouzid-el-Moqrani, exerça le pouvoir dans les mêmes conditions de souveraineté que son prédécesseur.
                C'est lui que le voyageur François Peyssonnel vit en 1523, en passant à la Medjana avec une colonne turque, il l'appelle le sultan Bouzid. Il sut maintenir la bonne harmonie entre tous les siens, et il fit rentrer dans I'obéissance le dernier de ses frères, qui avait un instant cherché à échapper à son autorité.
                Deux fois il battit les turcs, qui avaient voulu envoyer une colonne à Constantine à travers sa principauté.
                Puis, à la suite de ses succès, il consentit à vendre, moyennant une redevance déterminée, le passage à travers ses Etats. Cette redevance ou coutume (ouadia), les Turcs ne purent jamais s'en affranchirent et ils la payaient encore en 1830.

                Bouzid-el-Moqrani mourut en 1524, laissant quatre fils, dont le second, EI-hadi-Bouzid, sur la renonciation volontaire de l'aîné Abderroubou prit la direction de la principauté. Mais, quoique sage et d'un caractère conciliant, il ne put ni maintenir la paix entre ses frères Bourenane et Abdesselem, ni empêcher son cousin germain Aziz-ben-Gandouz-el-Moqrani (Gandouz en berbère signifie le dernier) de se mettre à la tête d’un soff qui se fit l'allié des turcs. Ceux-ci avaient alors précisément de graves griefs contre Ie cheikh de la Medjana qui, vers 1737, avait traîtreusement fait massacrer toute une colonne turque, massacre qui n'était du reste que la vengeance d'un viol commis par le khalifat du bey de Constantine El-hadj-Bakir sur la mère des Moqrani, El-hadj-la-Zouina.

                Aidés des Ouled-Gandouz, et exploitant la mésintelligence qui existait entre Bournane et Abdesselem, les turcs réussirent à battre les différents groupes des Moqrani. Les choses en vinrent à ce point que ceux-ci durent abandonner la Medjana et se réfugier dans les montagnes. El-hadj-Bouzid monta à la Qalaa des Beni-Abbès, Bourennane alla dans l'Ouennougha, et Abdesselem, à Kolla près de Satour, au pied du Djebel-Bounda.

                Déjà à cette époque, leur oncle Abdallah avait quitté le groupe familial et vivait dans les steppes du Hodna avec quelques djouads, dont la descendance devait former plus tard une tribu distincte, les Ouled-Abdallah, qui eurent dès lors une existence à part.
                C'est à cette époque, vers 1540, que, pour la seconde fois, les turcs vinrent en maîtres dans la Medjana, et relevèrent les murs du fortin ou bordj qu'ils avaient bâti en 1559 à Aïn-bou-Arréridj. Cette fois ils y laissèrent 300 janissaires et donnèrent l’investiture du caïdat des Ouled-Madi à Aziz-ben-Gandouz.
                Les Mokrani de la branche aînée supportaient mal cet abaissement de leur puissance. Un moqaddem des khouans Chadelya parvint à réconcilier les trois frères, qui, unis, battirent les turcs, tuèrent leur chef, démolirent le fortin, et renvoyèrent les janissaires survivants à Alger avec une lettre annonçant au Dey que les Mokrani entendaient rester indépendants.

                 Les Deys reconnaissent I'indépendance des Mokrani.
                El-hadj-ben-Bouzid-el-Moqrani reprit alors, sans être inquiété par les turcs, la direction nominale des affaires de la famille dans la Medjana. Les Deys reconnurent implicitement cette indépendance en ne réclamant jamais d'impôts aux tribus des Hachem, Ayad et Beni-Abbès, réputées tribus makhzènes des Moqrani.
                Tous les ans, ils envoyèrent au cheikh de la Medjana un caftan d'honneur et des cadeaux. Par ce moyen ils forçaient celui-ci à des relations qui affirmaient leur suzeraineté et qui leur donnaient des prétextes pour intervenir dans les affaires de la famille ou pour réclamer I'appui des contingents de la Medjana.

                Bouzid-el-Moqrani mourut en 1783, deux ou trois ans après son frère Bourenane. Il avait marié au bey Ahmed-el-Kolli une de ses filles, Daïkra, qui devait être plus tard la grand'mère du dernier bey de Constantine. Il ne laissait que deux enfants, l'aîné, Bouzid-ben-eI-Hadj, accepta la position de khalifat de son oncle Abdesselem, resté le chef de la principauté.
                Luttes fratricides entre les membres de la famille Moqrani.
                Mais à partir de ce moment là, l'historique des Moqrani n'est plus qu'une suite de luttes fratricides entre les membres de la famille divisés en trois soffs rivaux : les Ouled-el-hadj, qui ont avec eux les Ouled-Abdesselem et restent le soff principal, le soff des Ouled-Bourenane, et enfin le soff déjà ancien des Ouled-Gandouz. Les turcs entretinrent avec soin ces divisions qui affaiblissaient les Moqrani, rendaient ainsi de courtes durées les rares réconciliations que le danger commun inspirait aux divers membres de la famille.

                 La perfidie des Turcs.
                Les turcs n'intervinrent presque jamais par la force dans ces querelles de famille.
                Ils faisaient massacrer les uns par les autres, et se bornaient à reconnaître tour à tour comme cheikh de la Medjana le chef du soff qui consentait à percevoir pour leur compte un impôt de 50.000 francs sur les tribus entre l'Oued-Sahel et le Hodna. Ils changeaient d'ailleurs d'allié au lendemain d'un service rendu, si la prépondérance de cet allié vis-à-vis des autres Moqrani pouvait devenir inquiétante pour l'autorité beylicale. Loin de se montrer hostiles aux soffs évincés, les turcs les ménageaient et les tenaient en haleine par des promesses et quelquefois des cadeaux.
                C'est dans ces singulières conditions que les Moqrani furent, depuis la fin du XVIIIème siècle, les feudataires des turcs, qui ne purent jamais reconstruire le soff de Bou-Arréridj, ni s'affranchir de l'oudia que leur avait imposée Bouzid-el-Moqrani. Le cheikh de la Medjana administrait d'ailleurs comme il l'entendait, et exerçait sans contrôle les droits régaliens de haute et de basse justice.

                Il serait sinon sans intérêt, du moins sans utilité, de faire ici l'historique des luttes familiales des Moqrani. Il suffit de rappeler les trois ou quatre grands faits dont le pays a gardé un souvenir vivace.
                En 1809, le bey Tchker, par une trahison longuement préméditée, massacra dans la Medjana même, les chefs du soff des Ouled-Bourenane auxquels il devait en partie son élévation au beylik. De ce jour le soff des Ouled-Bourenane cessa de compter. Ses débris se rallièrent soit aux Ouled-el-Hadj, soit aux Ouled-Gandouz.

                En 1819, ce sont les chefs des Ouled-Gandouz qui, à leur tour, sont traîtreusement massacrés, à EI-Arba, au sud de Bordj-Bou-Arréridj, par les chefs du soff des Ouled-Abdesselem et des Ouled-el-Hadj, agissant à l’instigation du bey Ahmed-el-Hadj. Leurs débris impuissants essayèrent de se grouper avec les Ouled-Bourenane, et se firent battre, en 1824, à El-Gomiz. Par contre, ils infligèrent en 1825, près de Zamora, un léger échec au bey Ahmed, mais ce fut tout.
                A cette époque, il ne restait en situation d'exercer une action politique quelconque que Ie groupe des Ouled-el-Hadj et des Ouled-Abdesselem, habilement conduit par Ben-Abdallah-ben-Bouzid-el-Moqrani.

                Mais, en 1825, leur parent et allié El-hadj-Ahmed ayant été nommé bey de Constantine, la bonne harmonie fut de nouveau troublée dans la Medjana.
                Sans autre motif que de se débarrasser de ceux qu'il croyait gênants, le bey fit arrêter El-hadj-Mohammed-ben-Abdesselem, El-bey-ouennoughi-ben-Bourenane et Salah-ben-Gandouz. Sur les instances de sa femme Aiouch et de Ben-Abdallah, il consentit à relâcher Ben-Abdesselem, son beau-père, mais il ordonna de trancher la tête aux deux autres, Si-el-bey-el-Ouennoghi échappa cependant à cette mort.
                Ceux qui restaient des Ouled-Bourenane et des Ouled-Gandouz se rassemblèrent à Zamora et battirent les turcs commandés par El-hadj-Ahmed, mais ils durent se disséminer pour échapper à la vengeance du Bey, et vécurent depuis en proscrits.
                Ben-Abdallah, toujours cheikh de la Medjana, avait alors comme lieutenant son neveu Ahmed-ben-Mohammed-ben-Bouzid et son parent Mohammed-Abdesselem. Il confia à ce dernier, qui était d'un caractère posé, la perception des impôts dans I'Ouennougha, fonction lucrative que convoitait Ahmed-ben-Mohammed. Ce dernier, froissé, sollicita et obtint du bey sa nomination à la tête du caïdat de Khelil. Mais Ben-Abdallah n'accepta pas de voir un Moqrani dans ces fonctions trop dépendantes, il rappela son neveu en lui faisant de belles promesses, que d'ailleurs il ne tint pas.

                Cette rivalité entre les deux cousins fut le point de départ de la formation des deux soffs qui divisèrent les Moqrani jusqu'à la chute de cette famille.
                A quelque temps de là, Ahmed-ben-Mohammed, qui saisissait toutes les occasions de s'éloigner de son oncle, accompagna à Alger le bey de Constantine. Au retour, des gens du Tittery ayant attaqué ce bey près de Sour-Ghozlane (où plus tard fut bâti Aumale), Ahmed-el-Moqrani le défendit avec un courage qui lui conquit les bonnes grâces du Bey.
                Il en profita pour se faire charger du recouvrement des impôts de I'Ouennougha en lieu et place de Mohammed-Abdesselem, menacé d'une arrestation s'il n'obéissait pas.
                Ce dernier n'attendit pas son rival, il partit rejoindre, à Sour-Ghozlane, Yahia-Agah, qui était en tournée à ce moment. Ce haut fonctionnaire turc était l'ennemi d'El-hadj-Ahmed, il écouta Mohammed-Abdesselem, et, avec un petit détachement de janissaires, il se porta dans la Medjana pour razzier la smala d'Ahmed-el-Moqrani, mais il échoua, à cause de la vigilance des Hachem.
                A partir de ce premier combat, la guerre fut permanente entre les deux cousins.
                Elle fut cependant interrompue par la proclamation du djihad contre les chrétiens, dont on annonçait I'arrivée à Alger.

                Union des soffs à l'appel du djihad contre les chrétiens.
                A I'appel du Dey, les représentants des grandes familles oublièrent un moment leurs rivalités pour faire leur devoir de musulman, ils allèrent chercher dans des combats appelés à un grand retentissement, l'occasion d'affirmer aux yeux de tous, leur valeur et leur supériorité.
                Le vieux Ben-Abdallah, retenu par son âge, resta seul à la Medjana. Ahmed-el-Moqrani et Abdesselem-el-Moqrani accompagnèrent le Bey avec leurs contingents. Tous deux se distinguèrent aux combats de Sidi-Ferruch et de Staouèli.

La Suite au prochain numéro
    


L'hôtelier de la Chiffa
Envoyé par M. Christian Graille

             Entre Blida et Médéa, dans les gorges sauvages que parcourt la Chiffa, un ancien sous-officier de notre armée d'Afrique s'est installé depuis un an avec sa femme et sa jeune fille ; et dans ce lieu très éloigné de nos villes et de nos camps, il a établi une petite auberge pour les colons et les militaires qui vont à Médéa ou qui en reviennent.
             D'abord, l'aventureux soldat n'avait pour abriter sa petite famille que le feuillage d'un immense olivier, sous lequel il avait établi : son fourneau, son cabaret, sa boutique.

                 Bientôt il construisit lui-même une baraque en planches qui le protège un peu mieux contre les intempéries de la saison.
             L'audace de ce colon perdu ainsi au milieu de peuplades ayant : une autre langue, une autre religion, d'autres mœurs est sans doute un fait remarquable, mais ce qu'il comporte surtout de constater, c'est que cet homme sa femme et son enfant n'ont jamais été inquiétés ou insultés par les indigènes, et chose plus extraordinaire encore, ils n'ont jamais été volés.
             Un jour leur âne s'était échappé du logis, il leur avait été ramené au moment où il le croyait perdu.

                 Il n'est pas inutile d'ajouter que l'actif et laborieux aubergiste a fait de bonnes affaires, et que sa dépouille aurait pu tenter les voleurs, car au retour de l'expédition d'Aïn-Taguin il avait acheté à nos troupes : des tapis des tellis (couvertures) ; des vêtements d'hommes et de femmes des bijoux et, d'autres objets que les soldats échangeaient contre quelques litres de vin dont ils étaient privés depuis longtemps.
             Les indigènes fréquentent la boutique du Français. Ils s'y approvisionnent : de tabac, de café, de sucre, d'huile et payent toujours ce qu'ils achètent.

                 Sa jeune fille âgée de sept ans et qui parle l'arabe, va, seule dans les tribus voisines. Son père l'envoie sur les marchés acheter : des œufs, des poules, du lait, et toujours elle a été respectée comme si elle se trouvait sous la protection des baïonnettes françaises.
             Les tribus au milieu desquelles cette famille mène une existence si singulière sont des Kabyles assez connus dans l'histoire de nos guerres, les Mouzaïa et les Beni-Salah.

L'Algérie, courrier d'Afrique (22-03-1844)


 Un mois chez les Touaregs
Envoyé par M. Christian Graille

                Pendant le mois qu'ils passèrent sur le territoire des Foghas les Européens furent de la part de leurs hôtes l'objet des soins les plus assidus.
              Le vieux cheik surtout avait pris M. Lafourche en grande amitié. Quant à M. Hunt, il n'eût certes pas mérité le titre de savant, s'il eût négligé cette occasion unique d'étudier de près l'organisation politique et sociale des Touaregs.
              Les résultats de cette étude sont consignés dans le beau livre qu'il publia, en octobre 1832, (chez Philippe Mulready, 17 bis, Sopmmersel-street, London,) sous le titre de quinze années dans le Sahara et dont M. Onésime Lafourche daigna accepter la dédicace.

              Nous y renverrons ceux de nos lecteurs que ces détails pourraient intéresser. Enfin le moment arriva où ils se sentirent en état de reprendre leur route ; et, un jour, M. Lafourche rappela au cheik la promesse qu'il lui avait faite de lui fournir une escorte.
              El- Hadj essaya de le retenir : " Reste avec nous lui dit-il, nous t'aimons. Es-tu donc malheureux ici ?
              Quelqu'un de nous aurait-il manqué aux égards qu'il te doit ?

              Non cheik, répondit le capitaine, loin de là. Mes compagnons et moi avons reçu dans la tribu un accueil dont notre cœur gardera toujours le souvenir. Mais, comprends-moi bien, je me fais vieux, je n'ai plus que quelques années à vivre, et je ne voudrais pas mourir avant d'avoir revu mon pays.
              Ton pays reprit El-Hadj, la France ; une grande nation n'est-ce pas ?
              Oui cheik, une grande nation.
              Ses soldats sont plus nombreux que les grains de sable de nos plaines, plus forts que le lion de nos forêts.
              Ils seront victorieux, n'est-il pas vrai ?
              M. Lafourche regarda le vieillard avec étonnement.
              Que veux-tu dire ? demanda -t-il.
              Les nouvelles vont vite au désert, répondit El-Hadj.
              Quelles nouvelles ?

              En ce moment le fils du cheik entra sous sa tente.
              C'était un homme de trente à trente-cinq ans au regard fier à la physionomie intelligente. Il s'approcha du capitaine, et lui baisa la main avec respect.
              Othman, dit le vieillard en s'adressant à son fils " apprends à notre hôte les nouvelles que tu sais. "
              Les Francs ont débarqué sur la plage de Sidi-Ferruch, le 14 juin dernier, dit Othman.
              Cinq jours après, ils ont dispersé à, Staouéli l'armée du dey, comme le simoun disperse une bande d'oies sauvages, et, le 5 juillet, ils sont entrés vainqueurs à Alger.
              Hein ! S’écria M. Lafourche stupéfait.
              Je ne te retiens pas reprit El-Hadj je comprends ton impatience.
              Pars donc. Mon fils lui-même te servira de guide."

              Encore ému des paroles du vieillard et des nouvelles qu'il venait d'apprendre, M. Lafourche prit congé du cheik en l'assurant, une fois encore, de son éternelle reconnaissance.
              Le lendemain, pourvus de toutes les provisions nécessaires, et escorté de vingt Touaregs en tête desquels marchait Othman, les colons quittaient la tribu hospitalière.
              Deux jours après ils atteignirent Rhât ; puis grâce aux précautions prises par leur guide et à son ascendant partout respecté, ils gagnèrent sans accident : Ghadamès, Ouargla, Methlili et Laghouat.

              Au-delà de Laghouat, on dut redoubler de prudence, le pays étant sillonné de goums que les cheiks arabes appelaient à la guerre sainte contre les infidèles.
              Mais, cette fois encore, Othman sut préserver de tout malheur les hôtes confiés à sa garde ; et, le 2 septembre, la petite caravane arrivait sous les murs d'Alger, où M. Lafourche put voir flotter dans les airs le pavillon aux trois couleurs.
              Le capitaine sentit ses yeux se mouiller de larmes.
              " Vive la France ! S’écria-t-il et vive l'Angleterre " ajouta-t-il en serrant la main de M. Hunt.
L'oasis, scènes du désert par Ch. Wallut 1885.


Un mariage arabe
Envoyé par M. Christian Graille

                 J'assistais, il y a quelques jours à une brillante fête arabe, dont les impressions sont demeurées en moi ineffaçables. Il s'agissait du mariage d'un riche indigène Lakhal Mohamed Ben Ali, du douar Hazabra jeune homme très intelligent d'une famille aisée et vénérée qui devait épouser en premières noces Bouslama Fatma Bent Rabah, fille du cheick de ce douar.
                 Beaucoup de diafs (invités), et parmi eux un grand nombre de roumis étaient conviés à cette fête, dont je résume en quelques mots les détails de la cérémonie : Les deux familles se rendent à la Mahakma montés sur des mulets, celui de la fiancée caparaçonné des plus beaux harnachements qu'on aurait pu trouver.

                 Son escorte est formée par quelques cavaliers qui, ne manquent pas en cette circonstance de faire parler la poudre pour annoncer leur arrivée.
                 Le fiancé suit derrière accompagné de ses parents et de ses beaux-parents, las de voir toutes ces cérémonies terminées.

                 C'est à la Mahakma, très souvent pour la première fois que le fiancé a le plaisir de voir sa future, et sa curiosité encore ne saurait être satisfaite, la mariée étant entièrement voilée.
                 Le cadi place alors les deux fiancés en face l'un de l'autre ; il leur donne connaissance des devoirs réciproques que se doivent les époux ; puis, s'adressant tout d'abord à la fiancée, il lui dit : " Acceptes-tu ce jeune homme pour mari, et promets-tu de lui rester fidèle ? " Même question est posée au fiancé, et lorsque tous les deux ont répondu affirmativement le cadi donne acte de leurs déclarations et le mariage est conclu.
                 Le père de la mariée se présente alors et le père du fiancé, ou ce dernier lui-même, lui remet une certaine somme variant suivant leur fortune, c'est ce qu'on appelle la Hibba (donation).
                 La jeune fille, elle aussi, reçoit une certaine somme qui lui servira à l'achat de ses bijoux et à la confection de son trousseau.
                 Ceci fait le cortège retourne à la demeure des parents de la mariée, et ce n'est que le surlendemain que le fiancé aura le bonheur de contempler son épouse.

                 Les dames se rendent alors à la demeure de la mariée pour venir l'escorter jusqu'à sa nouvelle résidence. Ce sont elles qui sont chargées : de l'habiller, de la parfumer et de la parer de ses bijoux.
                 L'une la revêt de sa chemise de soie, l'autre de son kalfan (robe longue décorée) dont les bordures d'or et d'argent éblouissent la vue, celle-ci de sa gandoura de satin, celle-là de ses babouches, telle autre de sa ceinture etc ....Et avec cette facilité merveilleuse qui est un don chez les Orientaux, toutes et chacune à leur tour, sur chacun des vêtements composant le costume de la nouvelle mariée sur chacun de ses bijoux, improvise un chant doux et poétique.
                 Pour celui qui connaît la langue arabe, il n'y a rien de plus captivant pour l'esprit que d'entendre ces mélopées dites à mi-voix et d'une douceur infinie.

                 Pendant qu'on la pare, la mariée fière de tous ces honneurs et de ces ornements, applaudit ne cherchant plus à contenir sa joie.
                 Voilée de nouveau et sa toilette terminée, on la monte sur une mule qu'on a choisie de préférence blanche et richement caparaçonnée.
                 On l'installe dans son missen, sorte de tapis de 8 à 10 mètres de long roulé en boudin autour d'elle ; elle est en sorte ni à cheval, ni en amazone, elle se trouve assise les jambes croisées.

                 Les cavaliers l'accompagnent et le père du marié ainsi que les dames montées également sur des mulets forment escorte.
                 Arrivés à une courte distance de la demeure du mari, les cavaliers lancent leurs chevaux à fond de train, faisant encore parler la poudre de leurs moukalas.
                 Le mari sort alors de sa maison et c'est dans le silence général qu'il reçoit sa femme. La journée se passe en divertissements de tous genres. "La fantasia ", car il n'y a pas de fête arabe sans fantasia, est particulièrement brillante.
                 L'heure du déjeuner est arrivée et c'est un crieur qui est chargé de l'annoncer aux invités. Aussitôt et sans se faire prier tout le monde se range en cercle prêt à faire honneur aux plats qui vont être servis.

                 A cette noce où un grand nombre de roumi et parmi lesquels beaucoup de fonctionnaires étaient invités, Mohamed ayant voulu se surpasser, les meilleurs mets furent servis.
                 Les plats étaient tous de composition arabe, mais préparés avec un soin extrême par des femmes arabes parfaitement cuisinières. On nous servit tout d'abord : un " chorba " (potage), un " kefta (mouton aux choux), un " kafan " (quenelles de céleri) enfin un couscous à la marga, plat national arabe.
                 Pour dessert des " bagloua " (gâteaux aux amandes et au miel) et des " lenelebès (espèce de bonbons entourés de crème).

                 Notre aimable hôte n'avait pas oublié en la circonstance de nous faire apporter quelques bouteilles de Champagne et de Bordeaux, qui causèrent un certain étonnement chez les Arabes, occupés à boire une énorme cruche de l'ben (lait).
                 Le repas terminé les tam-tam, les derboukas, les divers instruments firent aussitôt entendre leurs sons aigus et sourds ; pendant plusieurs heures les danses se succédèrent et les you-you éclatèrent de toutes parts.
                 Ces réjouissances durèrent jusqu'au jour, après quoi chacun songea à se retirer après avoir remercié chaudement Mohamed qui ne se possédant plus de joie allait enfin contempler à son aise sa belle Fatma.

L. Destrée. Les clochettes algériennes et tunisiennes (30-03-1902)



Voiture électrique, façon...
Envoyé par M. J.P. Ferrer
A la manière de Jean de La Fontaine
La voiture électrique ayant roulé tout l'été,
se trouva fort déchargée quand l'hiver fut venu...
Pas un seul kilowatt pour le chauffage,
le siège chauffant et autres avantages.
Elle alla crier secours chez sa voisine au diesel lourd,
la priant de la dépanner,
lui prêter de quoi rouler jusqu'à la saison nouvelle…
« Je m'arrangerai, lui dit-elle,
je paierai votre diesel, intérêt et principal ».
La voisine n'est pas rancunière,
c'est une qualité première.
« Que pensiez-vous, au temps chaud ?
dit elle à cette emmerdeuse...
« Nuit et jour, ne vous déplaise,
je roulais, toujours à l'aise... »
« Vous rouliez ? J'en suis fort aise,
eh bien… pédalez, maintenant ! »
Auteur inconnu




Un double assassinat
Envoyé par M. Christian Graille

                 Où s'arrêtera l'audace des protégés de la fameuse Société Leroy-Beaulieu et Cie ! Encore deux nouveaux crimes à leur actif, commis aux portes de Bel-Abbès.
                 Nous nous bornons à marquer les coups, le cœur navré de constater, une fois de plus, l'impuissance de nos gouvernants à donner la sécurité à nos malheureux colons.
                 Ce double assassinat a produit en ville une telle émotion, que nous avons cru devoir nous transporter sur les lieux du crime pour nous rendre compte, par nous-même, de tous les détails de l'affaire :
                 A quatre kilomètres de Bel-Abbès, sur la gauche, et à deux kilomètres du village de Sidi-Lhassen, est située la ferme Masson, tout près de la grande route.

                 Là, habitait une famille de travailleurs, composée : du père, de la mère, d'une fille, tous peinant depuis de longues années, et ayant acquis, à force de labeurs, un certain bien-être.
                 Les Masson sont anciens dans le pays et ils y sont honorablement connus ; chacun sait que la mère, comme la fille, tenaient aussi bien les manchons de la charrue que le plus fort laboureur et qu'elles faisaient leur large part des rudes travaux des champs.
                 Mais, malgré la bonne volonté, on ne peut tout faire soi-même et l'on est bien obligé, au moment des récoltes, de chercher la main-d’œuvre indispensable..
                 C'est pourquoi depuis une quinzaine de jours, la ferme Masson, outre le garçon, comptait deux hôtes de plus, deux marocains.

                 Dimanche dernier, 15 juillet, sur les 3 heures 1/2, le père Masson quittait sa ferme pour se rendre à Sidi-Lhassen chercher de l'argent ; sa femme et sa fille étaient occupées à irriguer un carré de melons et pastèques, et les deux indigènes étendus au pied d'un arbre situé contre un mur de la maison, semblaient reposer tranquillement.
                 Là encore nous trouvons une nouvelle preuve de l'insouciance des colons pour leur propre sécurité ou celle de ceux qui leur sont chers !
                 N'était-il pas de la plus grande imprudence de laisser deux femmes à la garde de deux marocains à peine connus et dont on est toujours en droit de suspecter les intentions !
                 Le père Masson, un vieil algérien aurait dû faire ces sages réflexions et il n'aurait pas aujourd'hui à déplorer le malheur qui le frappe : sa femme et sa fille assassinées !

                 Voici comment, d'après toutes les suppositions vraisemblables, les deux malfaiteurs ont dû accomplir leur crime. Il devait être environ de 4 heures 1/2 à 5 heures, la mère Masson ayant eu besoin, à un moment donné, de se rendre à la cuisine, les deux marocains l'y ont suivie sous un prétexte quelconque et, après une vive discussion, saisissant l'un, un barreau de croisée en fer, l'autre une hachette, ont commencé leur sinistre besogne.
                 La fille, une courageuse gaillarde de 22 ans, admirablement constituée, aux cris poussés par la mère s'est probablement portée à son secours et a succombé, à son tour, sous les coups des assassins.
                 Tout fait croire qu'il y a dû y avoir lutte, avec cette dernière surtout, car on a retrouvé le manche d'un fouet cassé en deux et des traces sur le parquet qui semblaient confirmer cette supposition très vraisemblable, étant donné la vigueur peu commune d'Henriette Masson.

                 Les crimes consommés, les deux marocains, après avoir opéré une visite infructueuse dans les tiroirs prirent la fuite par une petite porte de la cour donnant sur le jardin, et gagnèrent la campagne emportant : une montre en or, des boucles d'oreilles, des cartouches et un fusil Lefaucheux.
                 La montre les boucles d'oreilles et trois cartouches ont été retrouvées dans le jardin.
                 C'est le garçon, qui le premier, a connu ce double assassinat ; après avoir passé son après-midi à Bel-Abbès, il rentra à la ferme au soleil couchant et se mit en devoir de soigner immédiatement ses bêtes.
                 Ce travail terminé il s'étonna du silence qui régnait dans toute la ferme, et appela madame Masson. C'est alors que ne recevant pas de réponse il se dirigea vers la porte de l'office derrière laquelle il sentit une résistance.
                 Continuant cependant à faire effort, il parvint à ouvrir et alors s'offrit à lui un spectacle terrible ; la mère Masson gisait étendue dans une mare de sang ; à côté sa fille, également baignée dans son sang, la tête de cette dernière touchant les pieds de la première.

                 Le malheureux garçon éperdu, prit peur et s'enfuit à Sidi-Lhassen aussi vite qu'il le put et là il fit sa déclaration. Il nous a avoué qu'il lui eût été impossible de faire un kilomètre de plus, ses jambes lui refusant tout service.
                 Le garde-champêtre partit aussitôt pour Bel-Abbès prévenir la justice qui se transporta immédiatement à la ferme et dans la nuit, des télégrammes étaient expédiés dans toutes les directions qu'auraient pu prendre les assassins.

                 Malheureusement il est à peu près certain qu'ils sont aujourd'hui en territoire marocain, à l'abri des poursuites ; on n'aura pas lieu de s'en étonner quand on saura que le télégraphe de Lamoricière, appelé dans la nuit du crime, n'a répondu que le lendemain seulement.
                 Ce fait, que nous n'avons pas à expliquer, est excessivement regrettable dans cette circonstance, d'autant plus que les deux marocains auraient été vus, à la nuit tombante, à 15 kilomètres de Lamoricière. ; ils auraient même demandé si ce centre était encore éloigné.

                 On calcule qu'ils avaient parcouru, à ce moment, une quarantaine de kilomètres, en prenant sans doute par les traverses. Et ils ont pu ainsi continuer leur course, à une moyenne de 10 kilomètres à l'heure, sans être inquiétés, puisque les communications entre Bel-Abbès et Lamoricière n'avaient lieu que le lendemain.
                 Tous les bruits d'arrestation qui couraient en ville et à Sidi-Lhassen sont donc absolument dénués de fondement.

                 L'enterrement de Mme et Mlle Masson a eu lieu, hier, à Sidi-Lhassen ; cette triste cérémonie a été des plus significatives : tout le village, les fermes environnantes, bon nombre de citadins, suivaient les deux cercueils. On évalue le nombre des assistants à 400 environ.
                 Une vive émotion se lisait sur tous les visages et il était facile de comprendre qu'une même pensée préoccupait tous les esprits : La sécurité, tant promise, quand l'aurions-nous ? Arrivés au bord des deux fosses, M. Cazal, instituteur à Sidi-Lhassen, a adressé un dernier adieu à Mme et Mlle Masson. Merci, chers concitoyens, a-t-il dit, merci au nom des parents et amis de celles qui ont eu une si triste fin, d'avoir bien voulu les accompagner à leur dernière demeure. Encore une fois merci ! Adieu ma tante, adieu ma cousine, reposez en paix ! Puis M. Fiole, prenant à son tour la parole, a stigmatisé en quelques mots les agissements des chevaliers de l'asphalte parisien qui ont eu l'impudence de poser les indigènes en victimes des colons : " Au nom de la société je dis à celle qui s'intitule protectrice des indigènes que ces deux cadavres méritent justice ou vengeance !

                 Madame et mademoiselle Masson étaient alliées à M. Denis Masson, maire de Sidi-Lhassen, frère de M. Jules Nicolas Masson, époux et père des victimes.
                 Au dernier moment nous apprenons qu'une circonstance toute fortuite a préservé de coups des assassins le jeune Masson, fils de M. Jules Masson, qui est en pension chez M. Fiole, directeur de l'école laïque de Bel-Abbès : le pauvre enfant devait aller passer le dimanche auprès de ses parents si la permission ne lui avait été refusée ce jour-là. Nul doute qu'il eut subi le même sort que sa mère et sa sœur.
P.P. L'Avenir de Bel-Abbès (18-07-1883)



Population israélite
Envoyé par M. Christian Graille

                 Les révoltes continuelles et sans cesse renaissantes de la population arabe de l'Algérie ont servi à mettre en relief le dévouement de la population israélite de l'Algérie, et ont appelé l'attention toute spéciale du gouvernement sur les Juifs, les seuls parmi les habitants indigènes qui ne nous aient jamais trahi et qui, soient sincèrement ralliés à notre cause.
                 Une ordonnance royale récente vient de préparer les voies pour les faire sortir de l'état d'infériorité et de subalternité dans lequel ils vivaient sous le gouvernement despotique des Turcs.

                 Un savant orientaliste, ancien élève de M. de Sacy, M. Albert Cohn, vient de faire un voyage en Algérie, dans le but de constater l'importance du corps israélite de ce pays, et les recherches auxquelles il s'est livré, et qui seront publiées prochainement dans une brochure intitulée : Les Juifs de l'Algérie, mettront le public et le gouvernement à même d'apprécier tout le parti que nous devons tirer de cette fraction de la population indigène destinée, pendant longtemps encore, à être l'intermédiaire obligé de nos relations avec les Arabes du Tell, du Sahara et même de l'Afrique centrale.

                 Nous devons à l'obligeance de M. Cohn la communication de quelques-unes des notes qu'il a rédigées dans son rapide voyage, et nous nous faisons un devoir d'en donner connaissance, en attendant l'apparition de son travail, dont nous rendons un compte détaillé.
                 Jusqu'à ce jour, on n'avait aucune idée, même approximative, sur le chiffre de la population israélite en Algérie. M. Albert Cohn la fixe à plus de 100.000 âmes.
                 Les principaux groupes formés par cette population sont de l'Est à l'Ouest : Bône qui compte 750 juifs, Philippeville 180, Guelma 26, Constantine 3.540, Sétif 61, Biskra et les Zibans 700 environ, Touggourt Ghardaïa et autres villes de l'Oued-Righ et de l'Oued-Mzab 3.000, Bou-Saâda 700, Alger 6.500, Blida 200, Médéa 587, Miliana 365, Koléa 19, Cherchell 3, Orléansville 2, Teniet-el-Had 11, Mostaganem 530, Oran 4.700, Mascara 750, Tiaret 37, Tlemcen 2.700, Saïda 8, Djama-Ghazaouet 19, Nedroma 250, Chellala 200

                 Souvent dans les récits des voyageurs, il a été question de juifs cultivateurs et nomades vivant au milieu des tribus : arabes, kabyles, Chaouïa, portant le même costume qu'eux et ayant les mêmes habitudes et les mêmes mœurs, sauf les pratiques particulières de la religion, mais jusqu'à présent on ignorait dans quelles tribus ces juifs tenaient leur campement. Bientôt, par les travaux de M. Cohn on sera fixé à ce sujet.
                 Nous savons que chez les Hanencha, jusqu'au moment de la prise de Constantine en 1837, il n'y avait pas moins de 200 tentes juives dont les habitants faisaient la guerre comme les Arabes et, étaient comme eux, armés de longs fusils incrustés d'ornements en argent.

                 Depuis cette époque 150 tentes ont quitté le territoire des Hanencha à cause de l'anarchie qui y régnait pour se retirer dans l'oasis du Bled-el-Djerid, dans le pays de Tunis ; 50 familles seulement sont restées sous notre domination, mais tout porte à croire que bientôt les autres rentreront au milieu de nous.
                 Il existe également d'autres familles juives nomades, mais dispersées dans un grand nombre de tribus dans le Ferdjiouah chez les Beni-Salah sur l'Oudad-el-Deb ; chez les Ouled-Segguen, Ouled-Schouk ; Ouled-Ibasa, au milieu des Beni-Abbès de la rivière de Bougie chez les Beni-Melikah, Beni-Mouchla ; Oued-Alchalt à Bar-Babshah ; à Asmoura ; à Ker-el-Ther et dans un grand nombre d'autres localités.

                 Les familles israélites établies dans ces tribus habitent la tente ou le gourbi suivant l'habitude particulières des contrées où elles résident.
                 Tantôt elle cultivent de compte à demi avec les Arabes tantôt elles labourent pour le propre compte et sont traitées sur le même pied d'égalité que les musulmans.

                 En dehors des travaux agricoles, ces juifs exercent également quelques industries spéciales : teignent la laine, travaillent les matières d'or et d'argent, fabriquent les bijoux et autres ornements que portent les femmes arabes.
                 Rien ne les distingue de la population bédouine ni le langage ni le costume, et la seule différence qui existe entre eux, c'est que les femmes juives ne se tatouent pas pour obéir à un commandement de la Bible qui leur défend cette habitude.

                 Dans la province d'Alger, chez les Kabyles du Djurdjura dans la province d'Oran chez les Beni-Snouss, on compte également des juifs mais ils sont moins nombreux que ceux répandus dans les tribus de la province de Constantine. Cependant on en compte 150 chez les Beni-Snouss.
                 Dans l'intérieur de l'Afrique centrale, parmi les noirs qui font le commerce du Tebber ou poudre d'or, on compte un grand nombre de juifs, et leurs correspondants algériens établis à Metlili et à Timimoun appartiennent à la même religion qu'eux.
                 M. Albert Cohn espère l'année prochaine, dans un second voyage, ramener en France des israélites nègres, et par eux nouer des relations avec le Bled-Soudan.

                 Cet aperçu superficiel de la nationalité israélite en Algérie suffit à faire comprendre son importance et justifier les efforts tentés par le gouvernement et quelques notables israélites de France pour faire sortir les juifs algériens de l'état d'humiliation physique et moral dans lequel ils étaient plongés.
                 Partout les israélites ont répondu à l'appel de M. Cohn ; dans les principales villes ils se sont cotisés pour fonder des écoles à l'usage des enfants des sexes, et là où ils n'étaient pas assez nombreux pour supporter la charge de l'entretien des maîtres ou maîtresses d'école, ils ont accepté d'envoyer leurs enfants aux écoles françaises, quoique dirigées par des chrétiens.
                 Déjà un grand nombre de juifs algériens parlent et écrivent la langue française, et trente-six d'entre eux sont attachés à l'armée ou à l'administration comme interprètes ou employés, et généralement on est content de leurs services.
                 Il en est même qui ont donné des preuves d'un dévouement et d'une fidélité à toute épreuve ; à leur tête figure Léon Ayas, qui pendant deux ans a été attaché au consulat de Mascara, et depuis lors a fait la guerre avec la plus grande distinction.

                 En 1842, dans le Dahra, il a reçu une blessure très grave, et tout récemment, le 18 octobre, sous les murs de Mostaganem, il a tué de sa main cinq cavaliers du goum de Bou-Maza.
                 D'injustes préventions pèsent sur les israélites d'Algérie, et, nous en sommes convaincus, beaucoup d'officiers de l'armée d'Afrique, même parmi les plus éclairés, auront vu avec peine que le gouvernement cherchait sinon à donner aux juifs le pas sur les Arabes, au moins à les élever au même niveau.

                 Sans aucun doute, il y aurait danger peut-être à émanciper avant le temps des hommes qui pourraient abuser de la liberté que nous leur donnons, mais l'ordonnance du 5 novembre dernier a principalement pour but de modérer toute tendance à une réaction des juifs contre les musulmans, en leur donnant comme chefs religieux, des hommes sages et éclairés qui sauront très bien maîtriser les mauvaises passions et maintenir chacun de leurs co-religionnaires dans les justes limites du devoir.


Le village nègre
Envoyé par M. Christian Graille
Les titres de propriétés

                  La mythologie nous raconte qu'un certain Augias, gros propriétaire de ces temps-là, ayant laissé les fumiers s'accumuler pendant de longues années dans ses vastes écuries, eut recours à Hercule.
                  Ce héros ne trouva rien de mieux que de détourner le cours du premier fleuve venu et de le déchaîner sur les immondices.
                  Mais hélas, nous ne sommes plus à cette époque et si nous avons à Bel-Abbès des faubourgs comparables, pour la malpropreté, aux écuries d'Augias, nous n'avons pas sous la main un Hercule capable de détourner même la modeste et capricieuse rivière de la Mékerra ! Race de pygmées, il nous faut user des remèdes proportionnés à notre taille.

                  Aussi, serions-nous heureux de voir l'autorité compétente prendre les mesures nécessaires pour assainir le village nègre, le plus mal entretenu des quatre faubourgs et, de ce fait, le plus digne d'intérêt.
                  Il serait urgent, selon nous, de commencer, avec les moyens d'action dont on dispose, pour opérer un nettoyage aussi complet que possible, faire empierrer les rues, creuser des canaux d'écoulement, ce à quoi la situation de ce faubourg, assis sur un plateau, se prête à merveille et veiller ensuite à la conservation et à l'entretien de ces travaux.

                  Ce sont là des mesures dictées par la pratique la plus élémentaire et ardemment souhaitée par quiconque a souci de la salubrité publique.

                  Mais là ne doit pas s'arrêter la sollicitude de ceux qui doivent avoir à cœur la santé de leurs administrés. Une question se pose en effet : ces travaux exécutés, le Village Nègre dont nous nous occupons plus spécialement aujourd'hui, restera-t-il dans un état de propreté convenable ?
                  Nous ne le pensons pas, tant qu'il sera occupé par les Nègres les Arabes qui forment encore la majeure partie de sa population !
                  Nous parlons de cette population sale et déguenillée dont on a rasé les gourbis et que subitement on a contraint d'élever quatre murs derrière lesquels elle grouille dans la houe et les immondices. Ce sont ces bouges qu'il faut, avant tout, faire disparaître.

                  Ce n'est pas que nous voudrions voir leurs hôtes brutalement expulsés, les arabophiles d'outre-mer nous accusant de ressusciter la traite des nègres, crieraient à la persécution, mais il est un moyen à la fois plus humain et plus radical : Constituer les indigènes propriétaires de leur bicoque et du terrain sur laquelle elle s'élève par la délivrance effective et immédiate des titres de propriétés annoncés depuis si longtemps et n'arrivant jamais.
                  Cette proposition paraîtra de prime abord étrange et paradoxale !
                  Il n'en est rien pourtant : ces maisons, en effet, que les Arabes ont été obligés d'édifier sur un terrain ne leur appartenant pas légalement, ils ne demanderaient pas mieux de s'en défaire ! Nous le savons pertinemment ; poussés par la misère ou par l'appât du gain, ils font auprès des Européens des démarches journalières dans ce sens, et toujours ils se heurtent contre cette question brutale : Avez-vous un titre de propriété ... ?

                  Il est évident que les Européens, bien qu'attirés invinciblement vers ce faubourg que sa proximité de la ville que sa situation exceptionnelle appelle à un avenir brillant, ne peuvent, dans les conditions présentes risquer leurs capitaux dans l'achat de constructions bâties sur le sable tant que là propriété n'en sera pas strictement établie.

                  Nous croyons, d'ailleurs superflu de chercher à prouver les avantages que retirerait le Village Nègre par la substitution de la population européenne à la population indigène ; la preuve apparaît éclatante dans ce qui s'est produit dans la partie du Village Nègre, acquise par les Européens, du domaine de l’État !
                  Ceux qui voient ce quartier aujourd'hui, et qui l'ont connu il y a trois ans, sont réellement surpris : de grandes et belles constructions ont, en effet, remplacé, dans un laps de temps très court, cet amas immonde de gourbis aux murs décrépis et affaissés dont il reste encore quelques vestiges au Nord du faubourg.

                  La Municipalité, croyons-nous, a fait les démarches nécessaires pour aboutir au résultat désiré ; mais avec la lenteur désespérante que subissent les affaires administratives, il est à craindre que cette question ne demeure longtemps enterrée dans les cartons du Gouverneur général.
                  Nous serions heureux si les quelques considérations que nous avons émises à ce sujet pouvaient rafraîchir la mémoire de nos Gouvernants.

L'Avenir de Bel-Abbès (04-07-1883)


Psychiatre : TROP BIEN ! !
De Mme Annie


                 Docteur, j'ai un problème. Tous les soirs, quand je suis au lit, j'ai l'impression qu'il y a quelqu'un caché dessous. Alors, je me relève pour regarder sous le lit et, bien sûr, il n'y a personne.
                 Je me recouche, mais au bout d'un moment, je me dis que je n'ai peut-être pas bien regardé.
                 Alors je me relève pour vérifier de nouveau, sans résultat bien entendu.
                 Bref, j'ai beau me dire que c'est idiot, je ressens toujours le besoin de m'assurer que personne n'est caché sous le lit. Et ça dure toute la nuit ! Docteur, tout cela me pourrit la vie, pouvez-vous faire quelque chose ?
                 Le psychiatre :
                 - Hum... Je vois... Obsessionnel compulsif... Comptez quatre ans d'entretiens de psychothérapie, à raison de trois séances par mois et je vous guéris de votre obsession.
                 - Euh... Combien ça va me coûter, Docteur ?
                 Le psychiatre :
                 - 60 euros par séance, soit 180 euros par mois, soit 2160 euros par an et donc 8640 euros au final.
                 Le patient songeur :
                 - Euh... Je crois que je vais réfléchir.
                 Six mois plus tard, le psychiatre rencontre le type dans la rue, par hasard :
                 - Alors ? Pourquoi n'êtes-vous jamais revenu me voir ?

                  Le patient :
                 C'est que ... 8640 euros ... Alors que mon livreur de pizza m'a résolu mon problème pour 30 euros seulement.
                 Le psychiatre vexé : Votre livreur de pizza ? Vraiment ? Et comment a-t-il fait ?
                 Le patient :
                 - Il m'a conseillé de scier les pieds de mon lit !
                 Bonne journée Docteur.




Le Kouskoussou
Envoyé par M. Christian Graille

                 Chaque peuple a son mets national, qui est en quelque sorte la personnification gastronomique de ses goûts, de son caractère, de son individualité, et je voudrais bien qu'il se trouvât un philosophe naïf et profond comme Montaigne, gourmet comme Brillat-Savarin qui passât sa vie à déguster tous les ragoûts qui s'apprêtent sur le globe et constatât leur influence sur les passions et sur l'état social des peuples.
                 N'est-ce pas une chose curieuse en effet que, dans un temps où tout s'écroule : lois, trônes, religions, les mets populaires restent seuls debout et que :
                 le roast-beef et le pudding à Londres
                 le macaroni à Naples
                 le Risotto à Milan
                 la polenta à Venise
                 la choucroute en Allemagne
                 l'olla-podrida en Espagne (ragoût de différentes viandes cuites longuement)
                 la soupe et le bouilli en France
                 les noudoles en suisse (pâtes)
                 le pilau en Turquie (riz)
                 l'ailloli en Provence
                 le carry dans l'Inde (mélange d'épices)
                 le kouskoussou en Afrique etc., etc.,
                 Soient peut-être les seuls besoins qui puissent encore rallier et passionner les masses ?

                 Et que ne crie pas pour cela au matérialisme que l'on ne croie pas surtout que les peuples n'ont d'autre cœur que leur ventre !

                 Autour du met national, ne sont-ils pas : les parents, les amis, les femmes, les enfants qui viennent s'asseoir et dans ces coutumes populaires dans ces habitudes de gueule comme dit Pantagruel, n'y a-t-il pas toutes les bonnes inspirations de la famille toutes les traditions du foyer domestique ?

                 Quand, à l'approche de la Noël en Provence, les plus pauvres ménages s'imposent de dures privations et vendent jusqu'aux hardes que l'hiver rend pourtant indispensable pour acheter la dinde et le nougat, sans lesquels il n'y aurait pas de fête possible, ne verra-t-on là qu'une grossière gourmandise ?
                 Au prix d'un moins grand sacrifice, ces pauvres gens eussent pu cependant avoir un dîner plus selon leur goût ; mais autour de cette dinde si chèrement achetée les parents éloignés, une famille nombreuse, viendront se réunir.

                 Mais cette fête pour ceux-là même aux yeux de qui elle a perdu son prestige religieux, est toujours une fête de famille, et la dinde de Noël se trouve ainsi intimement liée au repos et à l'union des ménages.
                 Et qui sait l'influence que cet innocent volatile exerce indirectement sur l'activité et la tranquillité publique et par contre-coup sur l'ordre social tout entier ?
                 C'est bien autre chose pour le kouskoussou qui résume en lui toute la nationalité arabe, dont il est à la fois l'impérissable symbole et le plus savoureux débris.
                 Depuis que le souffle mystérieux des destinées humaines, un coup d'éventail, nous a poussé en Afrique, nous nous sommes familiarisés avec le nom, si ce n'est avec la chose, et nous n'aurions jamais eu l'idée d'esquisser la physiologie du kouskoussou si un honnête parisien, ne nous eût, naguère encore, pertinemment affirmé que le kouskoussou était une sorte de fricandeau flanqué de boulettes de pain en guise de petits pois.
                 Supposer que les Arabes mangent du fricandeau est une idée qui ne peut entrer que dans la cervelle d'un parisien pur sang.

                 Le kouskoussou, disions-nous, est toute la nationalité arabe ; il est mieux que cela encore, il est toute la vie de famille, il est la constante occupation des femmes, le lieu de l'hospitalité.
                 Si vous avez le bonheur de pénétrer sous la tente, au milieu des tribus ou dans une maison mauresque regardez ces femmes accroupies les seins demi-nu agitant avec un mouvement d'oscillation de la farine ou de la semoule dans un tamis d'osier ; elles préparent le kouskoussou.

                 Chaque ménage le fabrique lui-même et il se pourvoit des ustensiles nécessaires an sa manipulation : plusieurs tamis en alpha (sparterie) dont le fond est disposé comme une petite claie, et dont les fils longitudinaux sont plus ou moins rapprochés suivant la grosseur que la ménagère désire donner aux grains de son kouskoussou, un gaça, ou grande sébille en bois faite avec le dadar, et ce que les Kabyles du Djurdjura excellent à fabriquer : cette grande sébille sert à humecter le kouskoussou au moment de sa cuisson.
                 Un vase en terre cuite ou en cuivre, beaucoup plus large du haut que du bas, d'une forme assez semblable à ces marmites où se fait le pot au feu parisien, avec cette différence qu"il est percé à son extrémité d'une multitude de petits trous, et s'adaptant parfaitement à un second vase destiné à contenir de l'eau et à résister au feu ( C'est le couscoussier utilisé de nos jours.).

                 Tel est l'ameublement indispensable de tout ménage arabe. La farine de blé dur ou le semoule forment la base et l'élément primitif du grand mets arabe, et c'est là, à notre avis, une des différences essentielles du génie des races orientales et du nôtre.
                 Pour faire un civet de lièvre, il nous faut un lièvre, quoiqu'on prétende que les traiteurs des barrières de Paris s'en dispensent tous les jours ; tandis que pour faire un kouskoussou il n'est pas nécessaire d'avoir du kouskoussou mais seulement un peu de farine.

                 Une vaste toile est étendue sur le sol, la ménagère jette dans un premier tamis, dont les fils d'osier sont très rapprochés, une certaine quantité de semoule, et humectant sans cesse ses mains dans un vase placé à ses côtés, elle la protège également sur toutes les parties du tamis et forme ainsi de petits grains qui s'échappent à travers l'étroite claie.

                 Cette opération, faite avec assez de nonchalance, tient une large place dans les occupations domestiques, et comme elle laisse l'esprit parfaitement en repos, elle est presque toujours l'occasion de causeries et de petits commérages.
                 Pendant que les femmes de la maison, assises dans la cour, travaillent au kouskoussou, il est rare qu'une ou plusieurs voisines : en costume fort négligé, le visage découvert, les jambes nues, la tête couronnée de jasmin, ne viennent, de terrasse en terrasse, se pencher sur le bord intérieur de la cour, et la conversation s'engage du haut en bas sur les cancans du voisinage, sur un mariage projeté, sur la toilette de celle-ci au dernier bain, sur l'achat ou sur l'échange d'un bijou jusqu'à ce que le regard indiscret de quelque voisin, fumant nonchalamment sa pipe sur sa terrasse vienne mettre en fuite les imprudentes causeuses, comme un troupeau de gazelles fuit épouvanté à l'aspect d'un chasseur.

                 Quand le kouskoussou est fait, on l'étend sur un linge, et on le fait sécher au soleil. Mais attendez ! voici qu'on fait de grands préparatifs.
                 Le charbon pétille et flambe dans un fourneau mobile ; la ménagère a relevé les manches flottantes de sa chemise de mousseline qu'elle a nouées derrière l'épaule.
                 Elle remplit le gaça de kouskoussou sec, et éparpillant de l'eau du bouillon ou du lait en petite quantité, elle l'agite et l'imbibe sans que jamais les grains perdent leur forme ou deviennent adhérents. Puis ils sont entassés dans le vase percé de trois qui est placé au-dessus de la marmite d'eau bouillante.

                 Une corde de chanvre effilée, serrée au point de jonction des deux vases, sert à fermer à la vapeur toute autre issue que celle des petits trous du vase supérieur, si bien qu'elle doit se faire jour à travers les grains de kouskoussou, les pénétrer, les cuire enfin.
                 Dès que la vapeur, se frayant un passage, est parvenue à percer la couche supérieure, le kouskoussou est cuit, mais il n'est pas prêt encore.
                 Ici se présentent des détails qui exigeraient la plume exercée de feu M. Carême ou l'habileté pratique de Mlle Marguerite, ce cordon bleu à jamais célèbre dans les fastes de la cuisine bourgeoise. Essayons cependant.

                 Le kouskoussou est presque toujours un plat de résistance, mais il est souvent aussi un excellent plat d'entremets une délicieuse gourmandise dont notre estomac, comme tous les estomacs bien nés, gardera un éternel souvenir.
                 Nous nous souvenons même que dans notre enthousiasme gastronomique, nous avions composé, en l'honneur du kouskoussou, séance tenante, et sous la tente même où il nous avait été offert, ode admirable, ainsi la jugèrent du moins nos hôtes à qui nous la lûmes ; il est vrai qu'ils ne comprenaient pas un mot de français.

                 Quand il est le plat de résistance le kouskoussou est mêlé à des morceaux de mouton ou de volaille cuits avec des légumes et formant une espèce d'olla-podrida dont le bouillon a servi à l'humectation du kouskoussou ; on l'assaisonne fortement de cannelle et de poivre rouge.
                 Quand il est plat d'entremets, il est, après sa cuisson, jeté de nouveau dans le gaça, où, la main habile de la ménagère l'éparpille légèrement et le mêle à du beurre frais ; il est ensuite saupoudré de sucre et parsemé de raisins secs.

                 Nous déclarons humblement que la science culinaire française n'a rien qui puisse être comparé à ce mets succulent.
                 Mais, dans les deux cas le kouskoussou est servi dans un plat immense, la famille s'asseoit sur un tapis autour d'une petite table ronde, que le plat couvre presque entièrement et chaque convive mange à même.
                 Armé d'une cuiller en bois ou en corne, chacun fait son trou dans le monceau commun, et pour que le régal soit complet, on boit du lait, non pas de ce lait fantastique que nos crémières fabriquent par d'ingénieux procédés, mais du lait véritable inconnu au Parisien.

                 A défaut de lait on boit de l'eau, car, quoiqu'on en dise, le musulman pratique encore à cet égard la loi du Prophète, il ne boit pas de vin ; il est vrai que quand il peut s'enivrer avec de l'eau-de-vie ou de l'anisette, il n'en laisse pas échapper l'occasion, mais il est juste aussi de dire qu'en Afrique, par exemple, ce sont nos cantiniers, nos soldats et nos ouvriers qui lui ont inoculé ce vice honteux.

                 Dans les grands jours, le jour de l'Aïn el Kébir, pour les fêtes du grand et du petit Beïram, par exemple, une sorte de crème faîte avec de la farine du lait du sucre et de la cannelle est ajoutée au kouskoussou, et lui sert, en quelque sorte, de corollaire.
                 Car il ne faut pas croire que le kouskoussou soit toute la cuisine arabe ; mais, là aussi, les raffinements d'une civilisation toute différente de la nôtre ont introduit dans le système alimentaire des perfectionnements des créations gastronomiques qui méritent, nous le répétons, d'attirer toute la sollicitude du philosophe et du gourmet.

                 Dans les villes surtout les femmes mauresques et arabes, friandes comme des nonnes, manipulent des pâtisseries qui révèlent un art consommé et qui étonneraient certainement beaucoup nos plus habiles ménagères.

                 Nous nous rappelons entre autres de délicieuses choses, une sorte de gâteau de Savoie qui peut rivaliser, avec tout ce que la pâtisserie européenne produit de plus fin et de plus délicat en ce genre.
                 Elles se servent d'amidon au lieu de farine pour la confection de ces gâteaux.
                 Qu'on nous pardonne d'entrer dans ces détails de ménage.
                 Mais que voulez-vous ? Il faut bien apprendre aux Parisiens qui prennent le kouskoussou pour du fricandeau que tout n'est pas absolument détestable chez ces Barbares, et que la science culinaire arabe, quelque grossière qu'elle soit, révèle cependant un état de civilisation plus avancé que le brouet des Spartiates par exemple, ou même que ce fantastique plat d'arlequin de la rue aux Fèves, immortalisé par les mystères de Paris.

                 On a beaucoup parlé du calumet de la paix des sauvages comme signe de leur hospitalité, mais le kouskoussou est, à notre sens, une forme autrement agréable et beaucoup plus succulente.
                 La première fois qu'arrivant sous une tente arabe, on nous offrit d'abord une pipe et une tasse de café, nous nous dîmes : ces gens là sont tout aussi civilisés que les Grecs d'Athènes ou de Smyrne ; mais lorsqu'au moment où, fatigués d'une longue course, nous commencions à éprouver certains tiraillements d'estomac qui indiquait que la pipe et le café étaient une nourriture fort insuffisante, lorsque, dis-je, on nous servit un plat de kouskoussou fumant accompagné d'une jatte de lait sortant du pis de la vache nous nous inclinâmes avec respect devant ce signe touchant d'une hospitalité intelligente et généreuse.

                 Notre hôte malgré nos insistances refusa respectueusement de prendre part à notre repas. Accroupi comme nous et auprès de nous, les bouffées de son tabac venaient se mêler au fumet de notre kouskoussou et il nous raconta à ce sujet une multitude d'histoires charmantes que nous n'avons pas retenues car en Algérie comme en France : ventre affamé n'a point d'oreilles.
                 Pour les tribus qui ont toutes leur ouada, on fête annuellement, comme Saint-Cloud ou les Batignolles, le kouskoussou est un but de rapprochement et de fraternité et la description d'une de ces fêtes étranges aura certainement un jour les honneurs de notre feuilleton.

                 Et ce n'est pas seulement sous la tente : dans les villes même, le kouskoussou est un mode de manifestation affectueuse sympathique et ceci nous remet en mémoire un souvenir charmant.
                 Nous ne résistons pas au plaisir de l'évoquer, d'autant plus qu'il se rattache à notre physiologie générale du kouskoussou.

                 Un Européen et sa compagne habitaient à Alger une maison située dans le haut de la ville. Il avaient pour voisin une femme arabe dont le mari était militaire. Cette femme n'ayant pas eu d'enfants, en avait adopté deux, un garçon et une fille, pauvres orphelins qu'elle avait pour ainsi dire ramassés dans la rue.
                 La fille était bien la plus gracieuse et la plus espiègle que l'imagination puisse rêver. Elle avait douze ans à peine, et jusqu'à sa puberté, elle pouvait non pas dans la rue mais sur sa terrasse, demeurer le visage découvert aux yeux même d'un homme.
                 C'était une vraie gazelle pour la grâce la légèreté la souplesse de ses mouvements ; ses yeux noirs étaient pleins d'intelligence et de candeur.

                 De bons rapports de voisinage n'avaient pas tardé à s'établir entre les femmes, dont l'une cependant ne savait pas un mot d'arabe, et les autres, pas un mot de français.
                 Mais le baragouin leur venant en aide, elle s'entendaient à force de sabir (savoir) fasir (faire) estar bono (être bien) chapar (prendre) andar (aller) etc. Sorte d'idiome bâtard emprunté à toutes les langues et dont il se fait en Algérie une effrayante consommation entre les femmes européennes et les femmes indigènes surtout ; qu'on dise après cela que les femmes ont de la peine à s'entendre.
                 Il y avait, entre le ménage français et le ménage arabe, échanges de bons procédés de petits services ; on ne voisinait pas de porte à porte, mais de terrasse en terrasse, et il ne se commettait pas de part et d'autre la moindre pâtisserie la plus légère friandise sans que les deux nations ne se communiquasses des échantillons de leurs produits.

                 Toutes les fois que le ménage arabe faisait le kouskoussou, au sucre par exemple, le ménage français en recevait sa part.
                 Mais on n'est pas toujours sur la terrasse ; comment prévenir la voisine qu'on veut lui demander ou lui rendre un service, surtout quand la communication est difficile quand une terrasse domine l'autre de beaucoup ?
                 Dans ce cas la petite mauresque lançait dans la cours de la française de petits cailloux dont la chute l'avertissait.
                 La gracieuse enfant, vêtue d'un pantalon très large serré à la ceinture et tombant jusqu'aux genoux les jambes et les bras nus, attachait, au bout d'une perche, un cabas proprement recouvert d'un linge blanc et le kouskoussou faisait son voyage aérien, non sans courir de graves dangers pendant la traversée.

                 Là encore c'était le mets national qui servait de lien entre les vainqueurs et les vaincus ; le musulman qui n'est pas si diable qu'on le pense, tendait au chrétien sa main pleine de kouskoussou, et celui-ci ne dédaignait pas de l'accepter.

                 Qui sait si entre le Coran et l'Evangile il y a autre chose que la distance d'un plat de kouskoussou ?
                 Qui sait si la question d'Orient n'est pas là toute entière, et si, pour mettre un terme à leur lutte à leur misère à leur haines il ne suffira pas de faire communiquer les peuples sous la forme de ce pain azyme, et à avec le vin des chrétiens.
                 Les journaux annonçaient dernièrement que plusieurs caisses de kouskoussou venues d'Afrique avaient été dirigées sur l'île Sainte-Marguerite, lieu de détention des prisonniers arabes.

                 Le gouvernement mène les choses assez de travers en Afrique pour que, quand par hasard, sans s'en douter, il lui arrive de bien faire, on lui en fasse compliment.
                 Eh bien ! faire manger du kouskoussou aux détenus politiques arabes c'est une idée futile en apparence mais au fond habile et politique.

                 Nous ne parlerons pas de la joie immense qu'on aura fait à ces enfants de l'Afrique en leur servant la ration de kouskoussou, mais figurez-vous que ces gens-là auront à dire de la grandeur de la sociabilité de la France lorsqu'ils retourneront au milieu de leurs frères.
                 D'autres parleront des merveilles de notre industrie, de nos édifices, de nos arts, de nos palais et ils trouveront peut-être des oreilles indifférentes ; eux n'auront qu'à dire : " Nous avons mangé en France du kouskoussou ! "
                 Un mot encore : nous vous avez dit du mets national arabe, tout le bien que nous en pensons, mais si vous le goûtiez, peut-être trouveriez-vous qu'il ne vaut pas la soupe et le bouilli, et vous en auriez parfaitement le droit ; ne disputons pas sur les goûts !
L'Algérie, courrier d'Afrique, d'Orient et de la Méditerranée (06-03-1844)


La fantasia
Envoyé par M. Christian Graille
(Extrait d'une correspondance d'Alger)

          De tous les spectacles que je n’ai jamais vu, le plus émouvant, le plus enivrant est bien la Fantasia ! Et je ne crains pas de l'affirmer, un membre du Congrès de la paix, lui-même, subjugué par ses charmes fantastiques, sentirait, ne fut-ce qu'un instant, s'éveiller en lui l'ardeur guerrière de nos pères les Gaulois.
          Je vais essayer de vous décrire cette scène dont mon esprit est encore tout rempli. Que votre imagination me vienne en aide, donnez-lui carrière, elle ne dépassera jamais la réalité.

          Nous étions depuis un quart d'heure dans notre tribune, lorsque les goums, étendards déployés musique en tête, arrivèrent à l'hippodrome.
          Les musiciens, à cheval comme le reste, s'escrimaient de leur mieux, les uns soufflant dans des chalumeaux en roseaux, d'où ils tiraient trois ou quatre notes monotones et criardes, les autres frappant avec une baguette recourbée sur de larges tambourins, qu'ici on nomme les tam-tams.

          De ma vie je n'ai rien entendu d'aussi barbarement primitif que cette musique, si ce n'est cependant celle des montreurs d'ours, ce qui n'empêchait pas les guerriers arabes de défiler fièrement au son de cette grotesque orchestration, pour venir se ranger en bataille au milieu de l'hippodrome où le gouverneur général est allé les passer en revue.
          Aujourd'hui le nombre des Arabes est bien plus considérable qu'hier ; j'estime que, tant dans la lice qu'autour, on compte bien cinq à six mille indigènes ; c'est que la fantasia est de tous les exercices et de tous les spectacles celui dont l'Arabe est le plus avide.

          Tout à coup la masse des guerriers s'ébranle, le gouverneur général traverse à franc étrier l'hippodrome pour venir se placer dans sa tribune.
          Bientôt la cavalerie indigène se divise en deux camps et chaque troupe va se placer aux extrémités opposées de l'arène.
          Les chefs sont à la tête de leurs goums respectifs ; on les reconnaît facilement à l'or et à l'argent de leurs selles qui miroitent sous l'ardent soleil, et aux longues draperies flottantes qui enveloppent la croupe de leurs coursiers...
          Tout le monde est dans l'attente !
          La même impatience la même soif d'émotions font palpiter l'âme des combattants et de ceux qui les contemplent. La noire prunelle de quelques Arabes placés près de nous dans la tribune étincelle d'un sauvage enthousiasme, leurs lèvres frémissent d'impatience, leurs narines semblent aspirer l'odeur de la poudre !

          En vérité, le burnous aidant, les plus laids sont magnifiques en ce moment !
          Les clairons sonnent la charge ; un immense cri (comme devaient en pousser les Huns lorsqu'ils s'élançaient au combat), part spontanément des deux camps, et la lutte commence.
          D'abord quelques cavaliers isolés se détachent du groupe de gauche, traversent au galop les deux tiers de l'espace, épaulent leur long fusil, ajustent, tirent et, tournant bride spontanément, reviennent vers leur camp.

          Du côté opposé partent à leur tour une douzaine de cavaliers qui exécutent les mêmes mouvements.
          Bientôt ce ne sont plus que quelques cavaliers seulement qui s'élancent vers leurs adversaires ; c'est par vingt par trente par cinquante qu'il faut les compter : nulle discipline, nulle entente dans les évolutions ; c'est un pêle-mêle indescriptible et plein de grandeur sauvage.

          Chefs et soldats animés par la même ardeur, courent sus à l'ennemi, en poussant des hurrahs frénétiques ; des nuages de poussière s'élèvent sous les pieds des chevaux.
          Les décharges de mousqueterie se succèdent sans interruption, mais sans régularité : à travers la fumée de la poudre, on voit briller les mouckalahs (fusils) que les plus habiles jettent en l'air d'un bras nerveux, rattrapent adroitement et déchargent toujours galopant. Plusieurs cavaliers sont renversés ainsi que leur monture.

          Des brancards entourés et recouverts de toiles blanches sont apportés, mais nul des blessés ne veut se laisser emporter comme une femme.

          L'un d'entre eux a la cuisse cassée, ce qui ne l'empêche pas de se relever de remonter à cheval pour rentrer sous sa tente en fier guerrier qu'il est.

          A mesure que la poudre parle, l'ardeur du combattant s'accroît, des cris rauques sortent plus pressés de toutes ces poitrines haletantes. C'est une mêlée générale ! Les étendards des deux troupes confondent dans les airs leurs plis soyeux, le vent soulève et fait flotter les burnous blancs des simples cavaliers, les burnous rouges noirs violets ou verts des agas, les housses chamarrées des coursiers.
          Ceux-ci pris de vertige comme leurs maîtres, semblent ne plus savoir obéir, ils hennissent, se cabrent, s'élancent avec des bons furieux !

          Nulle expression ne saurait peindre cette scène où la passion guerrière atteint son paroxysme !
          Si ce n'était le bruit de la mousqueterie qui ne gâte rien à l'ensemble, nous pourrions nous croire transportés au temps où les musulmans opposaient leurs grands cimeterres leurs terribles damas aux masses d'armes et aux bonnes lames de Tolède des chevaliers croisés. Mais l'éclair des yatagans vient d'étinceler, l'animation tourne à la frénésie.

          Dans les deux camps on est prêts d'oublier que cette lutte n'est qu'un jeu, et le sang va couler ! Le gouverneur général donne ordre de faire cesser ce simulacre de combat.
          Les hérauts d'arme descendent dans l'arène, et de toute la puissance de leurs poumons sonnent la retraite ; mais les goums n'en continuent pas moins de se poursuivre, ils se chargent, se rejoignent, se mêlent de nouveau, chaque guerrier est ivre de poudre, il n'entend et n'écoute que la voix du mouckalah.

          Force est aux chefs des bureaux arabes ( le territoire de l'Algérie est partagé en trois divisions ou provinces, quatorze ou quinze subdivisions et quarante à quarante-cinq cercles ou annexes.)
          L'unité administrative indigène est le cercle... Il est attaché à chaque commandant de cercle un bureau arabe pour tout élaborer : celui-ci est le délégué du commandant et le représente. " Chaque bureau arabe est composé ainsi :
          un bon chef de bureau et
          un adjoint
          un kadhi ( cadi juge musulman) et
          un assesseur
          un secrétaire français
          un secrétaire indigène
          un chaouch (huissier ou garçon de bureau) et
          quelques cavaliers pour agir au dehors porter des ordres etc. »


          Le bureau arabe a dans ses attributions le soin de répondre à tous les besoins, à toutes les demandes, à toutes les tentatives d'initiative de la race conquérante sur le territoire conquis, et ceci seul est une besogne bien grande et souvent bien ingrate.

          On compare quelquefois le bureau arabe à l'autorité des pachas d'Orient.
          Le bureau arabe a sur les musulmans un pouvoir plus étendu puisque, de tout ce que peut faire un pacha, il contrôle en Algérie tout ce qui touche à la religion musulmane, et cela avec bien plus d'indépendance que ne pourrait le faire un successeur des satrapes.
          Le bureau arabe est le trait d'union entre la race européenne qui s'est implantée en Algérie depuis 1830 et l'indigène qui occupait antérieurement ce pays et l'occupe encore. F. Hugonnet (Souvenirs d'un chef de bureau arabe, chapitre 1er) de descendre eux-mêmes dans la lice et de faire sonner sans interruption les clairons.

          A la vue de l'uniforme de ces officiers, dont la puissance est illimitée et qui disposent du sort des tribus indigènes, les moins excités ou les plus prudents d'entre les chefs rassemblent leurs hommes, les calment, font taire les armes à feu et rentrer les yatagans dans le fourreau.

          Les chasseurs d'autruches obéissent les derniers ; durant le combat ils se sont fait remarquer par leur fougue impétueuse, leurs gestes énergiques, leurs cris retentissants.
          Ces hommes à demi sauvages venus des confins de nos possessions dans le désert passent leur vie à chasser l'autruche, dont les plumes sont pour eux un objet de commerce très lucratif, et ils ne descendent guère de cheval que pour dormir.

          Vêtus du burnous comme les Arabes, ils portent sur la tête, au lieu du haïk, un médol, chapeau de paille à très larges bords dont le fond est exagérément haut ; sur ces bords et sur cette forme à la Fra Diavolo sont cousues de courtes plumes d'autruches qui en cachent complètement le tissu primitif.
          Ces plumes qui ne sont pas des plus belles, les chasseurs aiment trop les douros (nom que les indigènes donnent aux écus d'argent français et espagnol) qu'elles rapportent pour employer les plus belles plumes à cet usage, ces plumes dis-je, grises noires plus ou moins sales plus ou moins déchiquetées forment une coiffure dont il est impossible de se rendre compte à distance, et qu'il est encore plus difficile de décrire.

          Quand la fantasia atteint son plus haut degré d'animation et que les chasseurs d'autruches, brandissant leur fusil, laissent voir jusqu'à l'épaule leur bras nerveux et bronzé, ce chapeau, retenu à leur cou par un lien, tome en arrière et, et à chaque bon du cheval, se livre à des évolutions telles, que l'on croit voir un immense oiseau de proie, les ailes pendantes, se débattre dans les dernières convulsions de la mort sur les épaules du cavalier.
          C'est hideux ! c'est presque effrayant ! Le calme, une fois rétabli, les deux troupes, tout à l'heure rivales, se réunissent pour venir défiler lentement devant la tente du gouverneur au son de leur musique barbaro-guerrière qui, toute ridicule qu'elle paraît d'abord, n'enlève pas à cette dernière scène de la fantasia une certaine grandeur.

          Chaque goum en passant incline sa bannière pousse de grands cris décharge ses armes et sort de l'hippodrome pour regagner son campement.
          Puis, comme la veille, la foule émue, s'écoule lentement des tribunes, et moi, tout étourdi, ou plutôt tout enivré de ce que viens de voir et d'entendre, je n'ai plus d'yeux pour ce qui m'entoure, plus d'oreilles pour les conversations des gens qui nous coudoient plus d'autre pensée que d'accourir vous raconter cette merveilleuse fantasia, pour laquelle seule tout français ayant quelques épargnes à dépenser en plaisir devrait faire le voyage d'Alger.
En Algérie par Mme A. Gaël (1881).


ROUTE de TIGZIRT à DELLYS
Envoyées par Groupe de voyage Bartolini





















Pierre Deval, dit "le Maître d'Orvès"
Pieds-Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui - N°201, Novembre 2011
Un village qui travaillait dur…
     
                 Issu d'une famille de soyeux lyonnais, Pierre Deval, dit "le Maître d'Orvès", autodidacte et hors des circuits commerciaux parisiens, fréquente un mois durant l'atelier de Cormon. Pierre Deval a consacré sa longue vie à la peinture. Il y a trouvé le bonheur de vivre, en artiste discret : les grands circuits marchands et les cénacles qui font l'histoire de l'art l'ont oublié.
                 Pourtant Pierre Deval traverse le siècle. A l'orée de la guerre de 1914-18, il échange avec René Clair
                 Lecture à Orvès des enthousiasmes d'adolescent pour la poésie, la musique, la peinture. Au début des années vingt, il partage, à Paris, l'aventure Dada avec Breton, Tzara, Aragon, Soupault, Jacques Rigaut.
                 À Lyon, il dirige une revue avec Jean Epstein. Il est remarqué par Léonce Bénédite au salon de 1921.
                 Une de ses huiles, Ariane, accueillie au Salon d'Automne, est acquise par l'État et exposée au Jeu de Paume.


                 En 1923, pensionnaire de la Villa Abd-el-Tif, en Algérie, il lie une amitié profonde avec Albert Marquet. A son retour, il expose à la Biennale de Venise puis fréquente les grands Fauves sur la Côte d'Azur : Matisse, Manguin, Camoin, Jean Puy, Othon Friez.
                 Ami de Marquet et Jean Launois, il travaille avec eux au Maroc.

                 En 1925,la lumière du Midi le fixe à La Valette-du-Var. Son beau domaine d'Orvès et sa maison de maître du XVIIIe siècle accueillent et inspirent les amis peintres, critiques, éditeurs d'art et écrivains comme Henri Bosco et Pierre-Jean Jouve. Peu à peu, un dialogue s'instaure avec sa terre et Orvès devient partie intégrante de son oeuvre. Si sa vie se lit comme un roman, sa peinture transcende les épreuves.

                 Il était propriétaire du Domaine d'Orvès, dont le parc est aujourd'hui labellisé jardin remarquable. Ce domaine est composé d'une bastide, d'une chapelle et d'un parc botanique alimenté par une source qui alimente les nombreux bassins de la propriété.
                 En effet, malgré les deux guerres mondiales, la crise économique des années trente, la domination de l'art abstrait, le risque de destruction d'Orvès, ses Mauresques à la boucle d'oreille toiles expriment le Bonheur, recréant chaque fois l’image de la vie triomphante et l'harmonie de l'Âge d'Or.
                 L’œuvre de ce peintre, représente une véritable synthèse entre le classicisme, les différents mouvements de peinture du XIXe siècle ( impressionnistes, fauves, ...) et le début du XXe.
                 Sa maîtrise des différents sujets et des différentes techniques est tout aussi impressionnante que la sensibilité de son impression.
                 Le cadrage des personnages. L'attention portée aux postures les plus quotidiennes, les plus naturelles et les moins académiques, rapproche DEVAL de DEGAS et BONNARD dans la recherche du climat d'intimité et de fraîcheur spontanée. De nombreuses oeuvres sont présentes dans différents Musées Français et Etrangers (Lyon, Paris, Toulon, Strasbourg, Bruxelles, Bâle, Genève, Berne, Atlanta, Venise, Victoria,...) Coloriste raffiné, chantre délicat de la femme et de l'intimité, Pierre Deval est un grand figuratif du XXe siècle, aujourd'hui retrouvé.

(Extrait du livre "Deval, le maître d'Orvès" de
Michèle Gorenc aux Editions Autres Temps)
    


Violette
Envoyé par M. Christian Graille

                 Pendant que dans les près fleuris, enfant superbe,
                 Vous couriez,
                 Je n'entendais murmurer un humble chant dans l'herbe
                 A nos pieds.
                 C'était la chanson d'une obscure violette
                 Que nul œil
                 Ne regarda jamais dans sa pauvre toilette
                 Tout en deuil.
                 Elle nous contemplait. " Mon Dieu soupira-t-elle
                 Ardemment,
                 Parmi toutes les fleurs faites-moi la plus belle
                 Un moment !
                 Rien qu'un moment, le temps pour la jeune adorée
                 De me voir :
                 Je voudrais sur son sein briller, fleur préférée,*
                 Tout un soir ! "
                 Hélas votre bottine en jouant, s'est posée
                 Sur la fleur ;
                 Sa corolle est ternie et sa tige brisée,
                 O douleur !
                 Mais je l'entends, tandis qu'innocemment cruelle
                 Vous fuyez,
                 Se réjouir : " Je meurs oui, mais je meurs par elle,
                 " A ses pieds ! "
Albert Marie. Les Clochettes algériennes et tunisiennes (25-06-1893)


PAROLES D’ACTUALITE !
Par M. Roger Brasier
Echo de l'ORANIE N°246 septembre/octobre 1996

       J'entends souvent dire : "Après nous, on ne parlera plus de l'Algérie française, nos enfants et nos petits enfants ne s'intéressent pas à notre Algérie, etc…"
       C'est vrai, mais je pense que la remarque devrait être posée différemment. Nous devrions nous demander "Qu'est-ce que nos enfants et nos petits enfants, tout comme les enfants et petits enfants des Métropolitains, connaissent de l'Algérie française, de cette histoire que la France a écrite en Algérie pendant 132 ans".
       Ils n'en connaissent que les souvenirs, plus ou moins enjolivés, tenus dans nos réunions de famille.
       Ils en connaissent nos démarches et récriminations pour obtenir une indemnisation ridicule. Ils en connaissent surtout ce qu'en disent les Médias qui se font un devoir constant de désinformer leurs auditeurs. Pour elles, l'histoire de I'Algérie se limite aux huit dernières années qui virent naître et s'épanouir une guerre civile qui devait mener à une véritable épuration ethnique, qui ne disait pas son nom, et à des lunettes sélectives qui ne leur permettaient de voir qu'une partie de l'horreur engendrée par la guerre civile, guerre civile qui, après quelques années de trêve, reprend plus implacable en ce moment.
       C'est comme si on se bornait à relater les trois ou quatre années de la vie d'un Centenaire, en ne décrivant que ses délires et sanies, oubliant tout ce qu'il a pu accomplir de remarquable auparavant.

       Met-on en valeur et même connaît-on :
       - Le laboureur, défrichant un terrain, creusant des canaux de drainages, récupérant de grosses pierres pour construire sa propre maison.
       - L'ingénieur, construisant des barrages, pour atténuer les méfaits de la sécheresse.
       - L'artisan, le sportif, dont l'un d’eux obtiendra une médaille d'Argent aux J.O. d'Helsinki et d'Or à ceux de Melbourne.
       - le médecin, luttant contre les maladies endémiques du pays : choléra, peste, typhus, trachome et paludisme qui permettre à l'un d'eux d'obtenir un Prix Nobel le Médecine en 1902
       - I'instituteur qui, a son rôle pédagogique adjoindra un travail bénévole d'infirmier, d'assistant social, d'écrivain public, de conseiller agricole ou artisanal.
       - L'écrivain, qui décrira la vie des petites gens de cette province perdue et recevra le Prix Nobel de Littérature.
       - l'Universitaire créant de toute pièce le dictionnaire "Paul Robert".

       Mais qui étaient ces petites gens ? D'où sortaient-ils ? C'était un ensemble de communautés autochtones (Berbères, Juives, Arabes) auxquelles s'étaient ajoutées d'autres communautés (Français, Alsaciens, Espagnols, Italiens, Siciliens, Maltais, Bavarois, Suisses,...) qui vont cohabiter pendant 132 ans, se heurtant parfois, mais qui, sur les lieux de travail et dans la vie courante, s'estimeront et même parfois s'aimeront. Côte à côte elles travaillèrent et enrichirent le pays.
       C'est cette Algérie que les Musée de l'Algérie Française et le Centre de Documentation et de Culture Algérianiste s'efforcent de mettre en valeur.
       A la demande de la Municipalité de Perpignan, des "JOURNÉES PORTES OUVERTES" ont été organisées les 8, 9, 10 octobre à l'intention des jeunes.
       Faites-vous nos propagandistes auprès de vos enfants, de leurs instituteurs et Professeurs. Revenez très nombreux pour constater ce qu'était réellement l'Algérie française. D'anciens enseignants d'Algérie les accueilleront.
       Tous unis pour lutter contre la désinformation. D'avance je vous en remercie.
       Cordialement vôtre
Roger BRASIER.
P. Du Cercle Algérianiste des P.O.
8, rue du Puigmal
Canet en Roussillon



ALGER ETUDIANT
N°192, 27 avril 1935
Source Gallica
JOUEURS DE BOULES
par Edmond DESPORTES

      D'une chiquenaude sous le paquet, Mascarro fait sauter une cigarette...
       — On descend sur la Place... ?
       Il vide son verre et il essuie la lèvre du revers de la main qu'il a noire et gonflée comme un joueur de pelote.
       On descend. Il a plu, hier. Les villas, dans le vert, sont pleines de cris et d'aboiements. Maintenant le soleil fait revivre tout ça.
       Les femmes, les gosses. Et aussi les chiens, les arbres, les guêpes, les sentiers qui sentent bon le pollen, les vieux murs hantés de tarentes, et les jardins avec leur odeur de terre qui reste sur la langue...
       —- Tu oublieras pas d'emporter des citrons, dit Mascarro.
       Des senteurs de freesias courent dans l'air comme un printemps.
       Des toits rouges dans le vallon et des murs blancs. Des chiens se répondent.
       — Regarde ça, dit Mascarro, si ça se construit...
       Et il montre la colline. C'est ça, pour lui, la vie. Des échafaudages dans la verdure, des pierres de tuf dans les champs, des chargements de briques au long des sentiers, l'odeur du ciment. Il tient ses mains ouvertes à cause des doigts qui sont trop gros et de la corne qu'il a dans les paumes. Il les tend vers l'horizon...
       — Ça travaille !...
       Et en disant cela, il remonte son pantalon des deux mains d'un geste machinal. Par habitude, bien sûr, parce qu'aujourd'hui c'est dimanche et qu'il s'est habillé. Des bretelles, une cravate, un feutre.
       La Place, c'est devant le café.
       Pascal est là, qui nous attend.
       Il y a aussi le fils Pascal et d'autres qu'on ne connaît pas.
       — On est huit, crie Pascal, et voilà les boules.
       L'inconnu, on l'appelle maintenant le Parisien parce qu'il ne sait que crier et donner des conseils et qu'on n'entend que lui...
       Et plombe ici, et fais ceci, et fais cela..
       — Et va de là, dit Pascal, si je prends la rigole je m'en vais à Chéragas...
       — Où Chéragas ? Plombe ici, sur mon pied, je te dis. Ta boule morte...
       — C'est le point, dit Mascarro...
       — Si elle touche le bloc ici, c'est le point...
       — Mais si elle touche pas, dit Pascal, elle s'en va à la mer...
       — T'occupes pas...
       Laisses qu'il joue à son idée...
       Le fils de Pascal a quitté lui aussi sa veste et retroussé ses manches sur les bras durs...
       — Si c'est pas malheureux de se ronger les foies pour boire une anisette...
       — Qu'est-ce que tu crois que je joue pour I'anisette ? C'est pour la distraction quoi... Histoire de passer un dimanche...
       — A toi, dit Mascarro. Tu fais les pas à droite, et rien que tu laisses tomber ta boule. Bessif elle prend le point.
       La boule heurte un caillou, suit une rigole, ralentit un moment sur un tertre, écrase un brin d'herbe, prend la pente, repart...

       Nous, on est derrière à la suivre et à le conseiller. Et Pascal qui fait de grands gestes comme pour ouvrir l'horizon, et l'autre qui s'est mis à quatre pattes devant la boule et qui souffle dessus...
       — A la Pointe-Pescade elle s'en va... estime Mascarro.
       Le fils siffle comme on fait dans les T.M.S. pour arrêter un tram...
       — Tiens bon !
       — Aouatt ! Mainnant elle a pris la pente, qui c'est qui l'arrête... ?
       — Tiens bon... !
       — Qu'est-ce que ça sert de gueuler comme ça, dit le vieux, le point c'est pour nous autres et c'est pas pour un autre et le Bon Dieu il l'enlève pas...
       — Elle va s'arrêter dans l'herbe.
       — Quelle herbe ? dit Mascarro.
       Mieux tu vas tout de suite la chercher à la Place du Gouvernement... !
       — Quand même, répète le fils, on s'est bien cassés. Et tout ça pour une anisette de quinze sous.
       Après, c'est Mascarro qui a joué. Lui, on n'oublie pas qu'il a enlevé la bouteille de Phénix au dernier concours, celui que Miguel d'El-Biar avait doté de 200 francs parce qu'il voulait être conseiller et que ces choses-là, c'est toujours question de politique...
       — Je pointe, dit Mascarro. Obligé...
       Il met la boule à la hauteur de l’œil, saute trois fois sur ses jambes courtes et lance le bras avec un haut de poitrine.
       — C'est la bonne ! dit Pascal.
       — A moins qu'il fait un ravage....
       — Attention les têtes qu'elles ont pas d'os!... lance le fils qui veut faire le malin parce qu'il y a une jeune fille qui traverse la place...
       La boule retombe, enlève tout.
       — C'était droit, constate Mascarro.
       — Alors cadeau... concède le Parisien.
       — Cadeau, dit le fils. Mais on bouge de là, ça manque de donzelles...
       On prend les vestes...
       — Va, va faire des cages, dit Pascal qui n'est pas de cet avis...
DESPORTES.


LES ALSACIENS-LORRAINS
EN ALGERIE

Envoyé par Mme N. Marquet
Revue des Deux Mondes
T. 11, 1875
L. Louis-Lande


Exporté de Wikisource le 21 septembre 2023
https://fr.wikisource.org/wiki/Les_Alsaciens-Lorrains_en_Alg%C3%A9rie


Partie I
             Qui ne se souvient de les avoir vus, au sortir de la gare, passer par nos rues en longues files : les hommes, la démarche lourde, les bras ballants, l’air embarrassé et bon enfant tout ensemble, les femmes, reconnaissables à leurs grands cheveux blonds, avec leur large coiffure noire en forme de papillon et la petite jupe courte du pays, traînant par la main toute une troupe de bambins joufflus ?
            La foule s’arrêtait sur leur passage, saisie d’un attendrissement respectueux. Des émigrants ! Murmurait-on, et c’était à qui leur ferait fête, leur ouvrirait sa bourse et sa main. Pauvres et braves gens ! On leur avait dit que tout était fini, que l’Alsace, que la Lorraine, n’étaient plus françaises, que pour elles désormais l’invasion durerait toujours, qu’il fallait en toute hâte fuir, émigrer, quitter le vieux foyer, le clocher, le village, tous ces lieux pleins de souvenirs, ou se résigner à être Prussien, et, simplement, étouffant leurs regrets, ils étaient partis. Beaucoup avaient été ruinés par la guerre, ne possédaient plus rien ; d’autres, la paix signée, s’étaient empressés de vendre à tout prix la petite maison où ils avaient vécu, le coin de terre que de père en fils ils cultivaient de leurs mains : c’étaient là les heureux ; ceux qui restaient, ceux que la nécessité tenait attachés au sol, les regardaient partir avec un œil d’envie.

            Et pourtant qu’allaient-ils faire, qu’allaient-ils devenir là-bas au loin, au-delà des Vosges ? Trouveraient-ils seulement du travail et du pain ? Mais quoi ! nul parmi eux ne songeait à cela, ou, pour mieux dire, nul ne doutait ; ils aimaient la France, leur pays, ils comptaient sur elle, et leur imprévoyance avait la foi pour excuse. Certes les circonstances étaient douloureuses : c’était au lendemain de nos désastres ; aucune des blessures de la guerre n’était encore fermée, on eût pu croire que tant de pertes publiques et privées arrêteraient longtemps encore l’essor de la charité ; il n’en fut rien.
            A la voix des Alsaciens-Lorrains demandant un asile, le pays tout entier s’émut. Ce fut une explosion sublime, un de ces élans de générosité où se retrouve le grand cœur de la France. Des comités se formèrent, des souscriptions s’ouvrirent ; l’argent, les dons en nature, affluèrent de toutes parts : l’un prit sur sa fortune, l’autre sur son salaire, et le plus pauvre fut un jour au moins assez riche pour donner. Dans les villes de l’est, le long de la frontière, et du nord au midi, à Lunéville, à Nancy, à Belfort, à Dijon, à Saint-Étienne, à Lyon, les émigrants étaient accueillis, habillés, nourris ; les municipalités elles-mêmes votaient des fonds de secours. Il semblait que la France mutilée voulût protester ainsi contre le traité que lui imposait la victoire et montrer que pour elle ceux qu’on lui avait ravis étaient encore ses enfants.

            Dans cette lutte de charité et de patriotisme, Paris resta fidèle à son rôle de capitale, à ses traditions ; la grande ville, si cruellement éprouvée par la guerre étrangère et la guerre civile, sut, malgré sa gêne, s’imposer de nouveaux sacrifices ; nulle part les offrandes ne furent plus riches et plus abondantes. Dès les premiers jours qui suivirent la signature du traité de paix, plusieurs sociétés s’étaient chargées de centraliser les souscriptions et de distribuer les secours : l’Association générale d’Alsace-Lorraine, la Société catholique des Alsaciens-Lorrains, une troisième enfin qui prit le nom de Société de protection des Alsaciens-Lorrains demeurés Français : c’est de beaucoup la plus importante. Dégagée de toute considération politique ou religieuse, poursuivant l’intérêt de nos malheureux compatriotes, sans distinction de classe ni de parti, elle répondait le mieux aux intentions généreuses de l’immense majorité des souscripteurs. Pour président, elle eut M. le comte d’Haussonville.

            Sorti d’une de ces quatre vieilles familles qui portent dans les annales du pays le titre singulier de grands-chevaux de Lorraine, M. d’Haussonville a raconté les événements où furent mêlés ses aïeux et ajouté la gloire littéraire au prestige d’un nom déjà illustré par le temps et les services. A bien des titres différents, l’historien de la Lorraine s’était acquis dans la société parisienne une influence incontestée, et c’est cette influence que depuis quatre ans, avec un dévouement sans bornes, il consacre à venir en aide aux Alsaciens-Lorrains demeurés Français.

            Disons d’ailleurs que, pour l’aider dans son œuvre, les collaborateurs ne lui ont pas manqué. Autour de lui étaient venus se grouper nombre d’hommes les plus distingués : artistes, financiers, magistrats ou administrateurs dont la présence à la tête de la société nouvelle était comme la garantie du succès, et en effet pour une entreprise de ce genres où se trouvent engagés des intérêts matériels considérables, il ne suffit pas chez ceux qui dirigent de bon vouloir et d’excellentes intentions, il faut encore une expérience approfondie des affaires. La première difficulté était de créer de toutes pièces une administration complète capable de répondre sur-le-champ avec l’argent recueilli à des besoins aussi multiples que pressants. A force d’activité, on y réussit ; au bout de quelques jours, la société fonctionnait. Elle avait établi son siège rue de Provence, dans une maison qui fut bientôt connue de tout Paris ; c’est là que se rencontraient à la même porte, sur le même palier, le souscripteur apportant son offrande et l’indigent sortant consolé.

            Les plus hautes dames de la ville avaient tenu à honneur de se faire inscrire parmi les dames patronnesses ; elles étaient spécialement chargées des visites à domicile : dans les greniers et les mansardes, au fond des quartiers perdus, elles allaient chercher la misère, porter des paroles d’espoir et de consolation, puis, tous les mardis, réunies en comité, après lecture d’un rapport sur chaque famille visitée, elles décidaient de l’importance et de l’opportunité des secours. Au travailleur on procurait de l’ouvrage, à la femme une occupation, à l’enfant malade des médicaments ; à tous un peu d’argent, des vêtements, des bons de nourriture. En moins de deux ans, plus de 40,000 personnes furent ainsi secourues. Jusqu’à ce qu’ils fussent placés, les émigrants sans famille étaient logés et nourris aux frais de la société ; ceux qui pouvaient justifier d’un travail assuré en province recevaient des billets à prix réduits pour les différentes lignes de chemins de fer. Chaque semaine avaient lieu la distribution des effets d’habillement ou de lingerie, et les consultations du médecin. Une somme importante était employée à payer les frais d’éducation d’un certain nombre de jeunes enfants, une autre encore à soulager directement les misères secrètes, les plus douloureuses à coup sur et les plus profondes.

            Enfin de fortes subventions étaient allouées aux comités locaux établis en province, et par l’intermédiaire de ces comités, l’action bienfaisante de la société s’étendait jusque sur les Alsaciens-Lorrains qui, bien que demeurés en pays annexés, avaient droit encore à sa protection.

            Cependant le gouvernement ne restait pas inactif, et s’efforçait de son côté, au prix de réels sacrifices, de faire rentrer dans la condition commune les malheureuses victimes des derniers événements. Tous les fonctionnaires publics devaient être successivement replacés : c’était justice ; quant aux autres, dans sa séance du 15 septembre 1871, l’assemblée nationale avait décidé d’un vote unanime que 100,000 hectares de terre seraient spécialement affectés en Algérie à doter de concessions les Alsaciens-Lorrains expatriés. En même temps une somme de 400,000 francs était mise à la disposition du gouvernement colonial pour faire face aux dépenses de toute nature occasionnées par l’immigration.

            Le vice-amiral comte de Gueydon commandait alors à Alger : homme actif, énergique, habitué comme marin au calme et à la prospérité de nos possessions des Antilles, il s’étonnait et s’irritait à la fois de l’état précaire où, après quarante-cinq années d’occupation, se trouve encore notre colonie africaine, du caractère inquiet et remuant des Arabes, de l’infériorité des colons français, à peine égaux en nombre aux colons étrangers eux-mêmes ; il avait pris à cœur de mériter ce titre de gouverneur civil, dont il avait été le premier revêtu, et, rompant net avec certaines pratiques du régime militaire suivi jusqu’alors, voulait attirer de la mère-patrie par l’attrait de la propriété, et plus encore par une protection efficace, toute une population de travailleurs qui seule lui semblait capable de consolider notre conquête et de lui faire porter ses fruits. Une enquête venait d’être ouverte contre les tribus indigènes qui avaient pris part à la terrible insurrection de 1871 ; il se montra sévère, inflexible, et exigea des rebelles ce dont la France et la colonie avaient besoin : des terres et de l’argent, 600,000 hectares et 40 millions. Bien des gens prétendaient que les Arabes ne paieraient pas ; tant bien que mal, faisant de nécessité vertu et déterrant les vieux écus noircis qui leur eussent servi plus tard à acheter contre nous de la poudre et du plomb, ils payèrent. C’est sur le produit de cette contribution de guerre que le 25 octobre 1872 un nouveau crédit extraordinaire de 600,000 francs était ouvert au gouvernement de l’Algérie pour suppléer à l’absence de ressources personnelles des immigrants alsaciens-lorrains, et leur fournir, à raison de 1,500 F par famille, le matériel et les vivres indispensables.

            En effet, à la nouvelle que des concessions de terres allaient être accordées, sans tenir compte des 5,000 francs exigés comme première mise de fonds par la loi du 15 septembre 1871, plusieurs centaines de familles étaient parties pour l’Algérie. Elles se trouvaient à leur arrivée dans le plus complet dénuement, et rien n’avait été préparé pour les recevoir. Les renvoyer n’était pas possible ; de concert avec le gouvernement, les comités locaux s’occupèrent d’abord de loger ces malheureux et de les nourrir, puis peu à peu, au moyen de prolonges d’artillerie, on les dirigea sur les terres qu’on leur destinait. Là encore tout manquait ; en attendant que l’administration militaire leur eût construit des habitations suffisantes, on les abrita comme on put, les uns sous la tente, les autres dans des gourbis naguère occupés par les Arabes.
            Des vêtements réformés, capotes de mobiles ou autres, dont par bonheur après la guerre il existait une énorme quantité dans les magasins de l’armée, leur furent distribués, et successivement des terres, des semences, des bœufs, des instruments aratoires : ils touchaient régulièrement des rations de vivres comme les soldats. Encore s’ils avaient pu s’aider eux-mêmes, profiter de tout ce qu’on faisait en leur faveur ; mais, une fois maîtres d’une concession et libres de l’exploiter, ils se trouvaient fort embarrassés : ces immigrants pour la plupart n’étaient pas des cultivateurs, simples ouvriers des villes ou habitants des contrées forestières, ils n’avaient de leur vie conduit une charrue ; plus d’une fois on dut s’adresser aux indigènes eux-mêmes pour les tirer de peine et leur apprendre à labourer.

            Tant de dépenses de toute nature devaient à la longue créer de graves embarras au gouvernement colonial. Si efficace que fût l’intervention des comités locaux aidés par les comités de la métropole, c’est encore sur l’administration que retombait la plus grande partie des charges, et ces charges étaient lourdes. Les fonds inscrits au budget et destinés à la colonisation en général avec les deux crédits successivement votés par la chambre en faveur des Alsaciens-Lorrains avaient été bien vite absorbés ; le gouvernement de l’Algérie se vit alors entraîné à prélever sur ses ressources ordinaires une somme d’environ 700,000 francs pour subvenir aux besoins toujours croissants de l’immigration. De là un certain malaise qui s’est fait sentir dans les finances, de la colonie pendant plusieurs années.

            Étant données les circonstances, il eût été sans doute bien difficile d’y échapper ; le plus pénible encore en tout cela, c’était le sort des nouveaux colons. Dans la précipitation du premier moment, on les avait disséminés un peu au hasard, par groupes plus ou moins nombreux, sur toute l’étendue de la colonie, là où des terres étaient disponibles ; plusieurs centres même avaient été créés dans des endroits dépourvus de routes ou imparfaitement assainis. A leur incapacité, à leur dénuement, s’ajoutaient pour ces hommes du nord les dangers trop réels du changement de climat ; mal défendus par une installation hâtive et incomplète contre les variations de la température, ignorants des plus simples précautions à prendre sous le ciel brûlant de l’Afrique, ils n’avaient pas tardé à payer leur tribut aux fièvres et aux maladies, une assez forte mortalité s’était déclarée parmi eux, chez les petits enfants surtout ; le découragement bientôt avait suivi. Plusieurs déjà quittaient leurs concessions, retournaient à Alger, erraient sur les places publiques et dans les rues, faisant étalage de leur misère et laissant échapper mille critiques passionnées contre les autorités du pays.

            A peine informée de ces tristes événements, la société de protection des Alsaciens-Lorrains se hâta de voter une première allocation, de 100,000 francs pour venir en aide aux immigrés, et, voulant se rendre un compte exact de leurs besoins, elle chargea un de ses membres, M. Guynemer, ancien sous-préfet de Saverne, d’aller vérifier sur place ce qui avait été fait, ce qui restait encore à faire.
            C’était là une mission des plus délicates, car pour la bien remplir, on devait être amené fatalement à des curiosités, à des recherches qui peut-être en haut lieu paraîtraient indiscrètes. L’administration est omnipotente en Algérie et n’admet guère de contrôle : du moins on le prétend. En ce cas particulier, elle avait tout ordonné, tout conduit ; à bien voir, il est vrai, elle n’avait eu personne pour concourir à son œuvre, d’ailleurs elle avait fait de son mieux, et il y aurait eu mauvaise grâce, après tant de peine et d’argent dépensés, à lui reprocher quelques erreurs ou quelques imperfections de détail. Cependant l’intérêt de nos malheureux compatriotes n’en exigeait pas moins qu’on étudiât de près, résolument, cette question si complexe de la colonisation. Nul mieux que M. Guynemer ne pouvait s’acquitter de ce soin ; de son passage dans l’administration, il avait gardé l’habitude des hommes et l’expérience des affaires, il connaissait à fond, comme on dit, les rouages de la machine. Sans aucun titre officiel, n’usant du bon vouloir des autorités locales que dans la mesure qui lui permettait de conserver toute sa liberté d’action et de jugement, il passa près de trois mois en Algérie, parcourut l’une après l’autre les trois provinces d’Oran, d’Alger et de Constantine, visita tous les villages où se trouvent des familles d’Alsace-Lorraine, et à son retour rédigea pour la société un rapport détaillé où étaient consignées, avec le récit de son voyage, ses observations et les résultats pratiques qu’on en pouvait tirer.

            Or, au même moment, venait d’être instituée près le ministère de l’intérieur la commission des Alsaciens-Lorrains, présidée par M. Wolowski. On n’est pas sans se rappeler la « souscription des dames de France » et l’audacieuse tentative qui devait, sans obérer l’état et rien que par l’initiative privée, obtenir la libération du territoire.
            Quoi qu’il en soit, plusieurs millions de francs avaient été réunis en quelques jours ; demeurés sans emploi par suite du succès de l’emprunt des trois milliards, ils étaient toujours déposés au trésor ; la chambre décida que toutes les sommes qui après un certain délai n’auraient pas été réclamées par les souscripteurs seraient, sous la surveillance d’une commission, affectées à l’assistance des Alsaciens-Lorrains. Aussitôt nommée, la commission se subdivisa elle-même en trois comités : comité de l’instruction, comité des secours directs aux familles, enfin comité de colonisation, spécialement chargé d’améliorer le sort des Alsaciens-Lorrains émigrés en Algérie. Un certain nombre des membres de la société de protection furent appelés à faire partie de la commission Wolowski : ainsi M. d’Haussonville fut élu président du comité des secours ; quant à M. Guynemer, une place lui était assignée d’avance dans le comité d’Algérie, et c’est lui en effet qui, mettant au service de la commission ses connaissances en la matière, lui a permis de tirer le plus avantageux parti des fonds qu’elle destinait au soulagement des colons.

            L’installation d’une famille de colons et la mise en valeur d’une concession de terre exigent beaucoup de frais et de travail : il en est ainsi en Australie, en Amérique, mais en Algérie plus que partout ailleurs ; la difficulté sera bien plus grande encore, si cette famille est dénuée de ressources personnelles et n’a aucune notion, aucune habitude de l’agriculture. Le sol de l’Algérie, d’une fertilité incomparable, est généralement déboisé : aussi l’immigrant pauvre ne saurait-il s’y construire à peu de frais un logement provisoire ; pour le même motif, la chaux, la brique, la tuile, ne peuvent la plupart du temps être fabriquées sur place, et la construction d’une habitation définitive, si modeste qu’on la suppose, est également coûteuse. De plus la nature du terrain, sauf dans quelques endroits privilégiés à proximité d’Alger, convient bien mieux à la culture des céréales qu’aux cultures industrielles ou maraîchères, et les concessions de terres doivent avoir certaine étendue, 25 ou 30 hectares au moins, pour une famille de cinq personnes : il s’agit donc d’une petite ferme à monter, avec ses animaux et tout son matériel d’exploitation. Enfin la première année d’une installation ne donne qu’une récolte insuffisante, et ce n’est qu’après la deuxième année, quelquefois même après la troisième, si les circonstances ont été défavorables, qu’une famille peut réellement subvenir à tous ses besoins avec les produits de sa concession.

            À partir de ce moment, il est vrai, avec du travail et de la bonne conduite, son avenir est assuré, et rien ne s’oppose plus à ce qu’elle arrive promptement à l’aisance ou même à la fortune. En résumé, on ne saurait évaluer à moins de 6,000 F, non compris les travaux publics à la charge de l’état, la somme que doit dépenser une famille ou qu’on doit dépenser pour elle avant qu’elle soit définitivement établie et en mesure de réussir. Les essais antérieurs de colonisation, entrepris tant par les particuliers que par le gouvernement lui-même, avaient déjà prouvé l’exactitude de ce chiffre, et l’expérience des trois dernières années n’aura servi qu’à le confirmer.

            Le total des sommes provenant de la « souscription des dames de France » et versées à différentes fois par le trésor dans les mains de la commission s’est trouvé en définitive fixé, à 6,254,000 francs, dont un tiers et plus ont été consacrés à l’Algérie. Consulté sur la situation des émigrants au moment où le comité de colonisation commençait ses travaux, M. le directeur de l’Algérie au ministère de l’intérieur avait déclaré que l’administration évaluait à six cents environ le nombre des familles déjà débarquées en Algérie, que sur ce nombre la moitié pouvait être considérée comme pourvue d’habitations construites ou en construction (trois cents restaient à pourvoir), que toutes les ressources qu’elle pouvait consacrer à la colonisation en général et les deux crédits votés par l’assemblée étant épuisés, elle avait dû prélever sur son budget ordinaire ; une somme de 687,000 francs pour continuer à venir en aide aux immigrants ; que toutefois, dans sa pensée, ce n’était là qu’une simple avance et qu’elle en attendait la restitution sur les premiers fonds votés par le comité. Celui-ci ne fut pas du même avis : l’argent qui lui avait été confié devait, selon lui, servir non pas à combler des découverts, si légitime qu’elle pût être la cause, mais à procurer aux familles qu’il avait à secourir un soulagement nouveau et effectif.

            En conséquence, il se contente d’allouer à l’administration 600,000 francs pour construire trois cents maisons à raison de 2,000 francs chacune, 30,000 francs pour compléter les crédits affectés aux habitations déjà en construction dans la province d’Alger, 350,000 francs enfin pour assister directement les familles aux besoins desquelles n’avait pas pourvu le crédit du 15 octobre 1872.

            Le présent étant ainsi réglé, il fallait s’occuper de l’avenir ; beaucoup de familles nouvelles continuaient, sans y être appelées à se diriger vers l’Algérie, et de promptes mesures étaient indispensables, si l’on ne voulait avant peu se trouver aux prises avec les mêmes difficultés, qui avaient signalé le début de l’immigration. Évidemment il ne pouvait être question d’attribuer à chacun des arrivants la totalité de la somme nécessaire à son établissement. Si, grâce au séquestre, les terres ne manquaient pas, le comité devait tenir compte tout à la fois de ses ressources restreintes et du nombre même des familles à secourir ; par contre, son assistance ne pouvait produire un résultat vraiment utile qu’autant qu’elle fournirait à chaque colon au moins le strict nécessaire pour son installation première, en d’autres termes un logement salubre, les moyens de cultiver sa concession, des vivres jusqu’à la première récolte.

            Plus d’un million restait encore en caisse ; prenant alors pour base une moyenne de 3,500 francs par famille (2,000 francs pour la maison, 1,500 francs pour le matériel et les vivres), le comité fixa à 330 le nombre des installations nouvelles pour lesquelles il allouerait des crédits, ce qui, joint aux chiffres donnés précédemment, devait porter à 900 environ le nombre total des familles d’Alsace-Lorraine établies en Algérie. En attendant que les habitations fussent construites, l’administration prit soin d’arrêter provisoirement le départ des émigrants et la délivrance des passages gratuits sur les paquebots. En somme, l’état et la commission elle-même, débordés par les circonstances et tenus à l’économie la plus rigoureuse, avaient songé bien moins à faire de la colonisation en règle qu’à parer du mieux possible aux nécessités premières des immigrants ; mais peut-être une personne morale comme la société de protection, suffisamment riche et libre de ses actes, pouvait-elle sur un théâtre plus restreint essayer davantage.

            Certaines précautions semblaient s’imposer d’elles-mêmes : qu’avant toute chose on fît choix d’emplacements salubres, pourvus de routes et d’eau potable, qu’on prît soin d’y construire des habitations définitives, qu’on réunît le mobilier, le matériel et les semences nécessaires, et qu’alors seulement on fît venir les colons, — que tous ces colons scrupuleusement choisis fussent de vrais cultivateurs, laborieux et honnêtes, que le nouveau centre fût exclusivement composé d’Alsaciens-Lorrains parlant la même langue, ayant les mêmes mœurs, afin que la transplantation en devînt plus facile, qu’on surveillât leur installation, qu’on leur continuât, aussi largement qu’il serait utile, les avances et les secours ; on aurait ainsi des villages modèles où toutes les conditions de succès se trouveraient réunies et dont la prospérité rapide ne manquerait pas d’avoir sur la colonisation la plus heureuse influence. Qui empêchait en effet que l’exemple donné par quelques-uns, dans un dessein d’humanité et de patriotisme, ne fût suivi par d’autres, dans des vues de spéculation moins élevées sans doute, mais profitables encore aux intérêts généraux du pays ?

            Tel est le plan que la société de protection fut unanime à adopter. Elle y voyait en effet, tout en restant fidèle à son rôle et en rendant service à nos malheureux compatriotes, un moyen de hâter le peuplement si désiré de l’Algérie. M. le comte d’Haussonville n’était pas le moins enthousiaste de cette idée. Sans souci du poids des ans ni des fatigues du voyage, il partit aussitôt pour Alger en compagnie de M. Guynemer ; il se mit en rapport avec les autorités de la colonie, rencontra partout l’accueil le plus favorable, et, après avoir visité en personne les divers territoires qui lui avaient été indiqués, fixa son choix sur trois points : Azib-Zamoun et le Camp-du-Maréchal dans la province d’Alger, Aïn-Tinn dans celle de Constantine.
            Deux conventions à ce sujet furent conclues entre la société et le gouvernement de l’Algérie ; elles portaient que les territoires en question seraient mis à la disposition de la société de protection pour y installer à ses frais des colons alsaciens-lorrains ; le peuplement devait être effectué avant deux ans, à partir du 1er octobre 1873, en ce qui concerne Aïn-Tinn et Azib-Zamoun, — pour le Camp-du-Maréchal, où certains travaux d’assainissement étaient nécessaires, à partir du jour seulement où ces travaux auraient été terminés. La société s’engageait à contribuer pour un quart aux dépenses qu’entraînerait l’assainissement, mais se réservait à titre de compensation la jouissance immédiate du territoire.

            Dans la création des villages, le lotissement, le nivellement et tous les travaux d’intérêt public, tels que rues, fontaine, lavoir, plantations, école, église et mairie, restaient à la charge de l’administration. Les ingénieurs de l’état, civils ou militaires, étaient autorisés à diriger et surveiller les travaux particuliers de la société ; enfin les immigrants destinés à peupler les nouveaux centres auraient droit au passage gratuit sur mer aux frais du budget colonial.
            Suivant la législation qui régit notre colonie, les conventions signées ou approuvées par le gouverneur engagent officiellement l’état. Lorsque le général Chanzy eut été appelé à commander l’Algérie, soucieux, lui aussi, des intérêts de la colonisation, il tint, non moins que son vaillant prédécesseur, à faciliter à la société l’accomplissement de la tâche patriotique qu’elle avait entreprise, et un deuxième traité plus régulier vint ratifier les conditions convenues par lettres avec l’amiral de Gueydon. Dans l’intervalle, par un décret du 23 août 1873, la société avait été reconnue établissement d’utilité publique : cette mesure, qui lui donnait un caractère durable, l’investissait en même temps de nouvelles et précieuses prérogatives, comme de pouvoir ester en justice, recevoir des donations et des legs, acquérir des biens
A SUIVRE



RAPPEL POUR L'HISTOIRE
Par Antoine MARTINEZ
Ces vérités occultées
révélées par les archives

DOCUMENTS : Durant quatre ans, Jean-Jacques Jordi a pu "fouiller" les archives secrètes de la guerre d'Algérie.
Les résultats de son enquête sont stupéfiants. Extraits.

TORTURE : le FLN Aussi
La torture n'est plus une " spécialité " de l'armée française: elle a été largement utilisée par le FLN et l'ALN. c'est ce qui ressort de " la quasi totalité des archives consultées " par l'auteur. Parmi d'autres, le général Gravil, chef du 2e bureau, évoque les " cas tragiques de ces ressortissants impunément torturés, assassinés, contre tous les termes, tant sur le fond que sur la forme, des accords d 'Evian " Un rapport relate le calvaire de Roland Planté, garde champêtre à El Rahel (département d'Oran) : " Le 20 juillet 1962, à 6 heures du matin, quatre hommes du FLN se présentent à son domicile, le ligotent et le jettent dans une voiture. Il est emmené au douar Amadoueh, ou il reste une journée entière, un sac sur la tête et les mains ligotés par du fil de fer. [Le lendemain], il est cravaché par la population musulmane qui l'amène dans une autre mechta à quelques centaines de mètres ou il est alors plus violemment frappé. [Le surlendemain], il est frappé sans discontinuer par deux hommes et deux femmes dont une le brule avec une cigarette. Il s'évanouit. " Libéré le 27 juillet dans un état " hagard " et " sérieusement ébranlé sur le plan de l'équilibre nerveux ", le médecin militaire qui l'examine constate de " nombreux traumatismes sur son corps (tronc, bras et tête) avec fractures multiples des cotes, du sternum... "

" Le 8 septembre, rapporte un autre document, une dizaine d'Européens étaient libérés. [. . .] Toutes ces personnes ont été torturées, soit par électricité, soit par noyade, soit par introduction de corps étrangers dans l'anus. " La découverte de dizaines de charniers confirme ces pratiques. L'un d'eux contient les corps de neuf Français qu'" il ne fut plus possible de reconnaitre tant les personnes étaient affreusement mutilées ". Parmi ces cadavres, " 2 ont été tués a l'arme blanche, les autres par balles et portent des traces de coups dus a un acharnement sur leur corps " constate le médecin colonel. Un rapport évoque aussi des " cadavres ensevelis par la population après avoir été déchiquetés. Le 9 mars 1962, a Eckmühl, " 16 personnes dont 5 femmes périssent carbonisées dans un garage ou elles s'étaient réfugiées et qui est incendié par un commando FLN ".
Ces tortures, que Jordi qualifie de " systématiques ", vont durer longtemps après l'indépendance.

Le 30 janvier 1963, le consul général d'Alger attire encore l'attention du ministre algérien des Affaires étrangères, Mohamed Khemisti, sur l'existence de " locaux de torture dans une villa située chemin Laperlier à El Biar ainsi qu'au cinquième étage de la préfecture d'Alger " d'ou un Français, M. Bordier, s'est " suicidé eu se jetant par la fenêtre, pour échapper à sou supplice ".

Plusieurs documents vont jusqu'à relater le cas de personnes enlevées pour " donner leur sang " jusqu'à la mort.
Un rapport parle de la découverte des corps de " 40 Européens séquestrés, jouant le rôle de donneurs de sang pour les combattants FLN ". Le 21 avril 1962, des gendarmes d'Oran en patrouille découvrent " quatre Européens entièrement dévêtus, la peau collée aux os et complètement vidés de leur sang. Ces personnes n'ont pas été égorgées, mais vidées de leur sang de manière chirurgicale ". Cette collecte de sang se déroule parfois avec la complicité de " médecins français acquis à l'indépendance.
Aucun ne sera inquiété après leur retour en France.
"

Travaux forcés et camps a l'étranger
Des centaines de Français détenus ont été envoyés dans des " camps de travail " du FLN. Ils sont souvent " inscrits sous des noms d'emprunt " afin de " déjouer les démarches faites par les commissions de contrôle et par la Croix-Rouge ".

Un rapport militaire chiffre à 200 le nombre de prisonniers " occupés à des travaux pénibles dans un camp au sud de Cherchell ". Le fils et la belle fille de Maurice Penniello, prisonniers dans le camp de Tendara, " sont employés à la construction d'un hôpital pour les blessés du FLN ". Avant l'indépendance, plusieurs " camps de détention " étaient installés au Maroc et Tunisie, avec la complicité des deux Etats. " Certaines des personnes enlevées sont prisonnières [. . .] dans les camps de l'ALN au Maroc et en Tunisie ", écrit Christian Fouchet, le haut commissaire de la République française.

Les bordels du FLN
De nombreux document évoquent des " viols d'Européennes ", notamment après le " cessez-le-feu ".
A partir du 19 mars, sont cités des " dépôts de plainte quotidiens sur tout le territoire de l'Algérie et plus précisément dans les villes ". Les violeurs sont le plus souvent laissés en liberté : " au soir du 13 septembre 1962, dans Alger centre, trois Européennes sont violées, portent plainte, désignent leurs violeurs qui ne sont pos inquiétés ", expose un rapport.

Le 8 novembre 1962, Amar Oucheur, accuse de Viol et de tentative d'assassinat sur une Française à la fin octobre, est " remis en liberté sans suivi judiciaire ". Concernant le sort des femmes enlevées, nombre d'entre elles sont " livrées à la prostitution " ou " réduites en esclavage dans le Sud ".

Preuve de l'importance de ce phénomène : en janvier 1963, le ministre algérien de l'intérieur ordonne le recensement des Françaises " placées " dans les bordels militaires de campagne (BMC) algériens !

Dans un courrier classé " secret ", le colonel de Reals, attaché militaire auprès de l'ambassade de France, demande des informations à un officier d'état-major :
" D'après des renseignements récents [13 septembre], mademoiselle Claude Perez, institutrice ai Inkermann, enlevée le 23 avril 1962 par le FLN [. . .] est en ce moment dans un " centre de repos " du FLN situé au bord de la mer près de Ténès. Elle est détenue là avec deux autres captives enlevées a Dilian et à Orléansville. " L'auteur cite aussi le cas de " Mme Valadier enlevée à Alger le 14juin 1962 par le FLN et retenue dans une maison close de la basse casbah. " Parvenue à s'enfuir et à rentrer en France, elle sera hospitalisée en neurologie à Nîmes en 1963. Son témoignage, cité à l'époque par plusieurs associations de rapatriés, ne sera jamais reconnu par la France. Il était pourtant vrai !

Avec la caution du pouvoir algérien
Militaires, policiers et proches du pouvoir FLN sont directement impliqués dans nombre d'exactions. Le 12 juillet 1962, la gendarmerie d'Harrach rédige une note indiquant clairement que des " interrogatoires au moyen de la torture sont menés par le lieutenant Saïd, qui appartient à la " Commission mixte ", créée dans le cadre des accords d'Evian pour " gérer " la transition !

Le 22 janvier 1963, le général de Brebisson avertit l'ambassadeur de France en Algérie de " brutalités exercées contre les Français arrêtés par la police algérienne ". Il joint a sa correspondance plusieurs dizaines de témoignages. En vain. Selon les documents, " aucune des plaintes déposées après juillet 1962 par des Européens à l'encontre de musulmans pour des occupations d'appartements, vols, pillages, viols, enlèvements et meurtres n'ont eu de suivi, quand bien même les auteurs de ces crimes étaient identifiés ". C'est notamment le cas de " deux tortionnaires identifiés d'un certain Giuseppe Vaiasicca soumis a l'électricité le 19 septembre 1962 " ; deux inspecteurs de la sécurité algérienne faisant office de gardes du corps d'Ahmed ben Bella, nouveau président du gouvernement algérien !

Rendu a ses bourreaux
Le 11 mai à Belcourt, des Européens sont témoins d'un enlèvement, raconte une note. Aussitôt, le sous-officier se présente à l'officier responsable du secteur pour demander son intervention. Il obtient pour toute réponse : " On en a fini avec le FLN Nous Luttons maintenant contre l'OAS. Oubliez donc ce que vous venez d'apprendre et de voir. "Histoire édifiante révélée par une autre archive : en 1962, figure parmi les libérés d'un camp de détention un certain Christian Bayonnas, mécanicien auto, que les autorités françaises connaissent bien. Apres avoir été " torturé a l'électricité et battu ", il était en effet parvenu à s'enfuir et a se " refugier dans le cantonnement des gendarmes mobiles ", ou il pensait être en sécurité. Mais les inspecteurs algériens le récupèrent sans que les gendarmes s'y opposent ! Ramené a la villa Leperlier, il sera a nouveau battu pendant plusieurs heures.

Barbouzes et Mission C (voir ici)

Enlèvements de masse
Le premier document retrouvé concernant les " enlèvements " perpétrés par le FLN date du 15 décembre 1957. Intitulée " Note au sujet des personnes enlevées par les rebelles algériens ", elle émane de l'état-major mixte et est remise " de la main à la main ", est-il précisé, au colonel Magnv. Le but recherche par les ravisseurs y est ainsi résumé : " affermir par la terreur l'emprise du FLN ".

" L'enlèvement de civils devait devenir une volonté de pression sur les familles touchées par le drame, ajoute Jordi. Quand bien même les personnes avaient été tuées, il fallait faire en sorte qu'on ne puisse les retrouver. "


La plupart des personnes enlevées seront néanmoins découvertes assassinées. Hommes, femmes et enfants sont concernés, ainsi des " jeunes Jean-Paul Morio (15 ans), Jean Almeras (14 ans) et Gilbert Bousquet (15 ans), enlevés alors qu'ils faisaient du vélo " et dont " les cadavres seront retrouvés quelques jours plus tard dans un puits ".

Les autorités françaises fermeront souvent les yeux sur ces enlèvements. Le 13 mai 1962 à Alger, " 5 fidaynes [sic !] armés s'emparent de l'employé du cinéma le Rex qui se débat ". Une patrouille des forces de l'ordre intervient : l'employé est relâché, " mais les cinq musulmans ont pu repartir sans ennuis " ! Quant à l'employé du Rex, il sera enlevé le lendemain dans les mêmes conditions. Au même moment, " à la hauteur du Monoprix de Belcourt, Félix Croce est enlevé par un groupe de musulmans sous les yeux d'une patrouille militaire des forces de l'ordre.

Des civils européens, témoins de l'enlèvement, prennent à partie la patrouille en raison de son attitude passive. Le chef de patrouille répond alors
"qu'en exécution des instructions reçues, il lui était impossible de s'opposer à de tels faits" ". Félix Croce sera au nombre des cinq Européens fusillés par le FLN le lendemain rue Albert-de-Mun.

Des dizaines de documents en témoignent : les autorités françaises savent avec précision où se trouvent les principaux lieux de séquestration, mais n'interviennent presque jamais : " Nous sommes impuissants, nous n'y pouvons rien, nous avons reçu l'ordre de les laisser faire ", regrette un militaire dans une note.

La vague d'enlèvements - plusieurs dizaines de milliers au total - atteint son point culminant après le "cessez-le-feu" et l'indépendance ; " en deux mois et demi, du 19 mars à la fin mai 1962, écrit Jordi, il y a eu plus d'enlevés et de disparus qu'entre novembre 1954 et le 18 mars 1962. " A partir d'avril, " les enlèvements d'Européens par le FLN sont quasi systématiques ", ajoute un rapport. Extraits d'une directive interne du FLN saisie par le renseignement militaire : " désormais, les enlèvements ne seront plus effectués sur des individus mais sur des familles entières ". Il reste aujourd'hui près de 4 OOO disparus dont les corps n'ont jamais été retrouvés.

Arnaud Folch - Valeurs Actuelles - jeudi, 03 novembre 2011

https://exode1962.fr/exode1962/presse/va031111-2.html



GROS MAUX
De Jacques Grieu

MOTS DITS
     
« Jeunes gens, prenez garde, aux choses que vous dites :
Tout peut sortir d’un mot qu’en passant, vous perdîtes... »
La citation du maître est déjà fort ancienne
Mais on peut, aujourd’hui , hélas, la faire sienne.
En ces jours inédits où le monde est en transe,
Certains mots sont maudits et porteurs de nuisances.

En vrac ou assemblés, ils nous teintent aux oreilles
Agitent les médias et troublent nos sommeils :
« C’est le covid dix neuf, le coronavirus
Et le confinement, les masques et blocus.
Les tests et le vaccin, la contamination,
Ou bien la pandémie et distanciations. »

Dès qu’un de ces mots-là se trouve prononcé
On voit les gens blêmir, se sentir menacés.
Avec le plus grand soin, il faut donc en user ;
Les pensées volent haut mais les mots vont à pied.
Ils n’en sont que plus lourds et nous font plus d’effet.
Ces noms rébarbatifs ont de quoi tout brouiller :

« Hydroxichloroquine ou simple nivaquine »
Sont plus terrorisants que la vieille « aspirine » !
Les « g ens fragilisés, les risques d’infection »
Nous font craindre le pire avec « l a contagion »
Que ce soit « intubage ou réanimation,
Ou mise en quarantaine, hospitalisation... »

Bien souvent les grands mots sont le pire des maux.
Et nous font un climat à tirer des sanglots.
Ce sont des mots vicieux qui nous gâchent la vie.
Quand ils servent de trop, les mots s’usent et se nient
Ainsi que les bas mots, ils sont souvent douteux.
Plus sonores les mots et plus ils sonnent creux.

Jacques Grieu                  




Tirailleur Algérien, N°17, 10 décembre 1899
N° 16, 3 décembre 1899

Source Gallica
Les Gaîtés de la Semaine

            Ne trouvez-vous pas, camarades, que parmi les personnalités inqualifiables qui défilent, ou s'étalent, comme témoins ou accusés devant la Haute Cour, la plus stupéfiante est le personnage du général Roget ?
            Au milieu de ses soldats en armes, près du drapeau dont il avait la garde, il a toléré qu'un pékin — et quel pékin — se jetât à la bride de son cheval pour la mener à la révolte.
            Il n'a pas cravaché l'impertinent. Il n'a pas fait arrêter le bandit .
            Mais, que serait-il arrivé à un des nôtres, simple pioupiou d'un sou, si, de faction au parc à fourrages, par exemple, un rôdeur fut venu toucher à son Lebel et qu'il l'eût laissé faire ? Convaincu de négligence, il aurait été puni de belle façon. A la boîte il n'y aurait pas eu assez de punaises pour le dévorer et à Biribi — ça n'est pas loin d'ici — pas assez de cailloux pour lui apprendre à vivre et à crever.

            Le général Roget cependant continue à se défendre, et on continue à l'écouter tout en continuant à nous répéter que la discipline est la force principale des armées.
            Je t'écoute, Brigadier, que de la discipline... il en faut, un peu, mais que diable ! Foi de Tirailleur, pourquoi cette discipline n'est-elle plus faite pour tout le monde ? Il me semble que dans la cavalerie on doit faire respecter sa monture comme garder son fusil quand on marche à pied. Que quelqu'un vienne toucher au mien et il saura c'que je m'appelle — Mohammed Ben Laskard de la tribu de Bouffetout.

            Faudra voir maintenant si les farceurs qui font fantasia devant le grand Tribunal de Paris continueront à se payer longtemps encore la tête de nos Sénateurs, J'espère que l'avocat bêcheur saura bien leur river leur clou et leur en boucher un coin. Si c'était, comme il y a quelques années, à Constantine, ça ne serait pas long ! Je me souviens, — j'en tremble encore et sa pauvre vieille mère en est morte, — qu'on y fusilla un pauvre bougre qu'avait jeté un bouton de sa culotte contre le colonel. Il n'avait pas vingt ans et le grand Kébir d'alors avait oublié de le gracier.

            C'est triste, cela, camarades, et il faut cependant avoir courage et bien aimer notre pays, la France. Elle se prépare, racontent les journaux que me lit parfois l'ordonnance du capitaine, à de grandes fêtes pour l'année prochaine, à l'Exposition Universelle. Tous les pays du monde y seront représentés et, nous autres nous y serons aussi, à moins que nous n'ayons à donner quelque bon coup de torchon.
            L'affaire des Boers contre l'Angleterre pourrait bien amener des complications, mais bast ! Nous n'avons pas peur, et je crois même qu'on aurait peur de nous, car nous sommes bien armés et la Nation, débarrassée des brouillons, est prête à tous les événements. Qu'on se le dise chez les voisins, là-bas de l'autre côté de La Manche où un certain M. Chamberlain voudrait tout chambarder.

            Qu'il y vienne ! Nous ne braillerons pas. Vive l’Armée comme les soldats de Déroulède, ou la bande à Régis - quand elle nous faisait trimarder ici des mois entiers, presque sans sommeil, sans gloire et sans profit, - mais nous saurons mettre baïonnette au canon.
            En attendant, le Gouverneur a l'air content. Mon cousin Abdallah, qui est venu en permission, de l'intérieur, pour une affaire de témoignage en justice, alors que le garde-champêtre il avait battu la femme du chaouch, m'a dit que partout on avait fait beaucoup de fêtes, avec des fleurs des lumières la nuit et des youyous sur toute la route. Les roumis et les arabes et les kabyles ils criaient tous « Vive le Gouverneur ! Chacun il a mangé du couscous et il y avait aussi des diffas chez les Caïds, ousqu'étaient invités les adjoints espéciaux avec des membres, qui étaient là très-fiers, des rélégations financières.
            Ça consolait un peu de la politique, qui embête parfois même les journalisses, et ça a donné des forces pour le Conseil Supérieur qui va se réunir bientôt, dont je vous parlerai la prochaine fois et ousqu'il y aura Monsieur Broussais debout.
LE TIRAILLEUR.



LE SANG DES RACES
Par LOUIS BERTRAND
Source Gallica
CHIMO
XIII

Pages de 124 à 132

         Arrivés le matin même de Laghouat, Philipe et Rafael prenaient leur absinthe chez Salvador qui venait de s'improviser cafetier au Faubourg ! Par vanité, Il avait épousé une Française et, après un mois de mariage, celle-ci, mécontente de ses absences, l'avait décidé à quitter la route. Il avait conservé son costume d'autrefois : le pantalon flottant, la taillole rouge et le sombrero à larges lords, ce qui faisait un étrange contraste avec son nouveau métier. Rafael le regardait, en gouaillant, remplir ses carafes de glace pilée et passer l'éponge sur le zinc du comptoir
         - Sais-tu que ça te va bien, le tablier, disait Rafaél, à te voir servir, on jurerait que tu n'as jamais fait autre chose de ta vie...
         Et Philippe reprenait, plaisantant l'accoutrement de Salvador:
         — Tant que tu y es, tu devrais reprendre ton fouet aussi, ça te servirait à taper sur tes mauvais clients.,.
         Une bande de très jeunes gens écoutaient les deux charretiers accueillant par des rires les brocards qui pleuvaient sur Salvador. Un surtout ne quittait pas Rafael des yeux ; c'était un certain Chimo, un petit Mahonnais d'une quinzaine d'années, qui portait déjà le costume des rouliers de Laghouat, le pantalon et le gilet de drap bleu, une cravate rouge au col de la chemise lâche.
         Qu'est-ce que vous blaguez, vous autres — dit le grand Salvador, en haussant les épaules, — attendez un peu que vous soyez mariés ! on verra...
         Il n'était pas trop fier, en disant cela, et il ne levait guère les yeux de dessus le baquet où il rinçait ses verres.
         — Alors, adieu les chansons ! Riposta Philippe. Adieu la guitare et les noces !
         Mais Rafaél, avec une pointe de mépris :
         — Ah ! Cristo ! En voilà un charretier de contrebande !.
         Salvador commençait à se fâcher :
         — Ne parle pas si haut ! Je l'ai fait comme toi ce métier-là ! — et changeant de ton subitement: — Ah ! Ou ! Un joli métier ! Je n'ai pas envie d'attraper des douleurs aux jambes, moi ! Je serais un joli marié, un marié qui ne peut pas bouger.-.
         — Le voilà qui craint les douleurs, maintenant ! s'exclama Rafael... Tu peux mettre ça en chansons, mon ami, tu amuseras le monde !
         Philippe en gaîté, revint à la charge :
         — Oui, te voilà devenu comme Pépico !...
         — Il se retourna tout à coup vers Rafael :
         — Tu ne sais pas ce qui lui est arrivé ?... Il paraît que la Malaguena l'a lâché pour se mettre avec un maçon. Et lui, au lieu de la tamponner, elle et son maçon, sais-tu ce qu'il a fait ? Il continue à lui courir après. On raconte dans tout le Faubourg qu'elle lui a donné une drogue pour l'enrager après elle...
         Les yeux de Rafaël étincelèrent
         — Et tu appelles ça un homme, toi ?...
         Tiens ! Il me dégoûte, ton Pépico ! Voilà longtemps que nous ne sommes plus trop camarades, je te le jure, si je le rencontre tout à l'heure, je ne le regarde pas plus qu'un couffin d'ordures !... Et secouant la tête d'un air de pitié :
         Des hommes pareils, ça n'a pas plus de volonté qu un enfant !...
         Cette déclaration de Rafael ajouta encore à son prestige aux yeux des jeunes gens qui l'écoutaient. Il devint l'unique point de mire de toute la bande.

         Depuis qu'il était fiancé et qu'il faisait de plus fréquentes apparitions au Faubourg, sa réputation avait grandi. Il était devenu le modèle de tous les adolescents: il décidait les vocations. Son frère Juanète, lui-même, entraîné par l'admiration des autres, commençait à lui témoigner un peu plus de confiance. On connaissait sa force et ses talents de « meneur », on copiait ses costumes. Sa parole flatteuse et toujours sonore éblouissait; et, quand il parlait dans les cafés, un sourire de complaisance illuminait les visages. S'il s'était guéri de mentir avec le monde, il mentait encore dans ses récits : il mentait comme les poètes. Ses aventures s'ordonnaient dans sa tête suivant le nombre de ses phrases, les pays parcourus revivaient dans le geste d'un témoin qu'il retrouvait ou dans un lambeau de conversation jailli tout à coup de sa mémoire ; et, à mesure qu'il s'exaltait, les métaphores, chaque fois plus ardentes, se pressaient sur ses lèvres, comme s'il désespérait des mots pour faire passer dans les autres la flamme intense de son imagination nourrie de soleil. Il n'était pas populaire à la façon de Cecco, car son orgueil était souvent blessant, et le sérieux de son caractère n'admettait pas les camaraderies faciles ou vulgaires. Mais, à s'approcher de lui, on éprouvait une satisfaction d'amour-propre.

         Les plus anciens du métier lui montraient de la déférence, et les vieux eux-mêmes aimaient à contempler sa force, ils admiraient en Rafael l'élan superbe de la race.
         Quand il sortit avec Philippe, le jeune garçon qui l'avait le plus regardé le suivit.
         Entendant des pas derrière lui, Rafaël se retourna. L'enfant s'arrêta court, un peu rouge. Son costume de roulier faisait ressortir encore son extrême jeunesse :
         — Ecoute, dit-il, Rafaelète! Je voudrais te demander une chose... Emmène-moi avec vous autres pour le prochain voyage : je te servirai d'homme de peine. Je ne te demande que la nourriture... Tu verras, je suis capable, je conduis déjà un petit tombereau... Je t'en prie, Rafaelète! laisse-moi partir avec les équipages- Je veux que tu m'apprennes le métier, parce que je sais que, pour mener des bêtes, il n'y en a pas de plus fort que toi...
         Rafael était pressé d'aller rejoindre Assompcion à la sortie de l'atelier
         — Moi, cela ne me regarde pas, dit-il à Chimo je ne suis pas le patron. Parle à Bacanète. Mais, si tu veux, viens ce soir à la maison, nous causerons ensemble. J'ai à faire maintenant...
         L'adolescent promit de venir. Rafael le regardant s'en aller ne put s'empêcher de dire à Philippe :
         — Il est bien, le petit !... celle qui l'a fait n'a pas perdu son temps...

         Mais Philippe songeait à tout autre chose. Jaloux des fiançailles de Rafaël, il était repris par son rêve de mariage. Il répondit
         — Moi, sais-tu ce que je vais faire ?...
         Je crois que je vais parler à la chica, ce soir...
         Rafael se moqua de lui :
         — Toi, qui me prêchais si bien dans les temps!... Dire que tu ne peux pas te décider! Je crois que tu es comme Pépico: tu n'as pas de volonté!...
         Assompcion, qui travaillait toujours à la robe merveilleuse de l'actrice, parut un peu plus tard chez la tia Rosa. Elle s'était concertée d'avance avec Rafael.
         — Maman, dit-il, lorsqu'elle entra,
         — Assompcion vient pour que tu lui montres à repasser les blouses, comme tu faisais pour mon père,..

         Les deux femmes sourirent :
         — Ah ! Dit la mère, tu sauras te faire servir aussi, toi !
         — Comment ?... Ça serait un peu fort, si ma femme ne savait pas me repasser mon linge ! ce ne serait pas la peine d'être marié, alors
         — Ne craignez rien, tia Rosa, interrompit Assompcion, je sais repasser comme je sais coudre. Seulement Rafaelète prétend que, pour les blouses, il n'y a que les vieilles qui sachent faire les plis...
         On débarrassa rapidement la table, et, tandis que Rosa cherchait une blouse de Rafael dans un tas de linge lessivé, Assompcion mit les fers au feu. Quand tout fut prêt, Rosa déchiffonna l'étoffe où le séchage avait conservé les marques de la torsion, et elle l'étala sur la couverture.
         C'était une de ces belles blouses d'Aix, qui rivalisent, pour l'élégance et la solidité, avec celles de Montélimar. Elle venait de la bonne fabrique du Cours Sextius, antique maison ombragée de platanes, où des femmes, qui gardent les traditions des aïeules, continuent le luxe rustique de l'ancien temps, s'usant les yeux et se piquant les doigts à couvrir le col des blouses, les poignées et les échancrures de leurs broderies naïves et compliquées. La toile bleue lustrée comme un satin forme une draperie chatoyante aux mille plis, que relève encore la doublure rouge des poches fendues sur la poitrine et garnies de boutons d'émail. Rosa enseigna d'abord à Assompcion que, pour conserver le lustre de l'étoffe, il convenait de faire macérer la blouse dans de l'eau salée et vinaigrée. Puis elle la disposa méthodiquement sur la table, les deux manches en croix, et, avec l'ongle, elle marquait les plis, avant qu'Assompcion les écrasât sous le fer: quatre dans le dos, et six sur le devant, à savoir trois de chaque côté, en ayant soin de ne pas cacher les poches.
         Elle en était là de sa démonstration, lorsqu'on frappa timidement à la porte:
         — Voilà Chimo dit aussitôt Rafael.
         Mais on vit entrer une petite vieille ratatinée avec un fichu noir sur sa tête, c'était la mère de l'enfant. Elle fit une révérence à la tia Rosa, une autre à Rafael et à Assompcion, et elle se mit à parler tout de suite d'un ton mécanique et saccadé, comme si elle récitait une leçon :
         — Ecoute, Rafaelète Le petit m'a parlé, je sais qu'il veut partir avec toi. Mais, je t'en supplie, Rafae,lète ! Ne le laisse pas venir avec vous autres. J'ai trop peur qu'il ne lui arrive du mal en route...
         — Qu'il fasse comme il voudra ! Fit Rafael, je lui ai déjà dit ce soir: moi, je ne suis pas le maître. Tout ça dépend de Bacanète...
         — Asseyez-vous, la Chusca dit la mère ; en avançant une chaise.
         Mais la vieille, l'air craintif et soupçonneux, refusa de s'asseoir:
         — Vois-tu, Rafaelète, reprit-elle, c'est mon dernier, tous les autres sont morts. Tu comprends; n'est-ce pas?... Alors tu me promets de ne pas l'emmener?...
         — Combien de fois faut-il vous le répéter, tia Chusca ? Moi, cela ne me regarde pas.
         Si la chose ne dépendait que de moi, je lui dirais non, puisque vous ne voulez pas. Cependant, si le petit veut faire le métier, il n'est pas trop tôt pour commencer...
         — Non, non, Rafaelète, fit la vieille effarée, en se précipitant sur ses mains.

         Rafaël dut renouveler sa promesse. Au même moment son frère Juanète entra. A la vue du jeune homme, la Chusca s'empressa de faire sa révérence, et elle disparut sans vouloir qu'on la reconduisît, on aurait dit que cette maison de Rafael lui brûlait les pieds.
         Assompcion et Rosa avaient repris le repassage de la blouse. Juanète, saluant du bout des lèvres, alla s'asseoir sur le lit de repos.
         Mais Rafael, aussitôt, le rudoya d'être rentré si tard. Maintenant qu'il avait atteint ses quinze ans, il s'était mis à travailler. Comme Chimo, il avait pris un petit tombereau, et il était tout fier de porter la blouse. Jouant déjà au grand garçon, il allait le soir au café faire sa partie avec des camarades.
         Il ne répondit rien aux réprimandes de Rafael, qui, après un silence, ajouta :
         — C'est toi, ce n'est pas Chimo, qui devrais me demander de partir avec moi.
         — Pour ça non ! Dit impétueusement la tia Rosa: c'est mon dernier aussi. Moi, je pense comme la Chusca. Juanète, froissé des reproches de son aîné, le regarda entre ses sourcils, avec un air têtu, et il dit froidement :
         — Moi, je fais la volonté de ma mère !..
         Plus tard, si tu as besoin de moi, je ne dis pas non...
         — Et puis, qu'est-ce qu'il irait chercher dans ton pays de brigands ? — reprit la tia. Rosa.
         — N'est-ce pas, Assompcion, qu'il n'y a pas de bon sens de s'en aller si loin ?..
         D'ailleurs, pour le moment, je ne veux, pas... il est encore trop faible, le petit...
         — Trop faible !
         — dit Rafaël.
         — Ah ! Il est de la famille, lui aussi ! Regarde-le ! Il a une poitrine comme un cheval de France !...
         Juanète ne broncha pas à ce compliment.
         Il se replongea dans son mutisme, et Rafael perçut de nouveau l'hostilité sourde de l'enfant. Il voyait que, celui-là, il ne le conquerrait jamais. Il se demandait avec tristesse quelle rancune il y avait sous ce front serré, dans ces yeux obstinément baissés devant lui et plus que jamais cette idée l'affligea, qu'ayant l'affection de tous les autres il ne pût être aimé de son frère.

         Cependant Assompcion tenait la blouse repassée, au bout de son poignet. Donnant de petits coups sur l'étoffe, elle assurait la belle symétrie des plis, et la toile drapée miroitait aux feux de la lampe. Elle était si contente de son œuvre, qu'elle voulut que Rafael revêtit la blouse encore chaude du fer, pour l'accompagner.
         Suivant leur habitude, ils prirent par le plus long pour revenir chez le tio Martino, et comme Assompcion avait parlé la première à Rafaël du scandale causé dans tout le Faubourg par l'a conduite de la Malaguena avec son ami Pépico, il dit brusquement à la jeune fille;
         — Si tu t'avisais jamais de me faire un coup pareil...
         - Un commencement de colère tremblait dans sa voix, si bien qu'Assompcion, piquée, lui demanda d'un ton presque agressif:
         — Eh bien ?...
         — Eh bien ! Je te raserais le cou à la mode arabe, en t'enfonçant le rasoir jusqu'à l'os !
         — Et moi, dit Assompcion, si tu me quittais pour une autre, je t'empoisonnerais !
         Ils avaient l'air si résolus tous les deux c'est qu'Ils s'effrayèrent un peu de leurs réponses. Ils s'appliquèrent à refouler l'émotion qui les poussait déjà l'un contre l'autre, et pour chasser ces idées mauvaises, Ils se mirent à reparler de leur mariage. Cette fois Rafael était décidé. Il fut convenu que leurs noces se feraient au printemps, dans la semaine de Pâques,

         Rafael avait depuis longtemps oublié l'aventure du petit Chimo, que Bacanète, le matin même de leur départ, avait éconduit sur les instances de la Chusca. L’enfant les avait regardait partir, les larmes aux yeux, et Rafael, devant son désespoir, s’était reconnu et retrouvé lui-même, tel qu'il était au temps de son apprentissage chez le bourrelier, quand il voyait le chariot du Borrégo s'en aller sans lui vers la ville.
         Les équipages descendaient de Bou-Cédraya. Bacanète, le fusil à la main, donnait la chasse aux gangas, et il s'était avançait si loin, qu'il avait perdu de vue les chariots, Il distinguait déjà, sur une hauteur, le long de la piste, la toiture d'une cambuse abandonnée, qu'habitait autrefois un alfatier espagnol. Il s'approcha, quelqu'un bougeait auprès du puits. Une silhouette grêle se détachait en noir sur le couchant.
         Bacanète en fut d'autant plus surpris que jamais personne ne s'arrêtait à cet endroit, la maison ayant une réputation sinistre dans le pays : le propriétaire et sa femme — deux vieillards — avaient été assassinés et coupés en morceaux par les Arabes.

         Quand il fut au sommet de la montée, celui qui était auprès du puits cria vers lui et l'appela par son nom c'était Chimo. L'enfant avait attaché un de ses souliers au bout de sa ceinture leur tirer un peu d'eau, et il s'apprêtait à boire.
         Bacanète, comprenant aussitôt pourquoi il était là, l'interpella rudement en le traitant de « brigand » et de « four à chaux ».
         En effet, il avait l’air aussi dépenaillé qu'un gitane. Ses espadrilles s'effilochaient à ses pieds, et son pantalon bleu, usé par le bord, semblait déteint, tellement il était gris de poussière. Bacanète lui fit sauter des mains son soulier plein d'eau.
         Tu ne sais pas que les Arabes jettent des bêtes crevées dans les puits ?.. On va te donner à boire au chariot,, espèce de meurt-de-soif !
         L'enfant ne parut nullement déconcerté.
         --- Je t'en prie, Bacanète, ne me chasse pas ! Je suis venu à pied depuis Boghari, pour retrouver tes équipages.

         Alors il raconta qu'il avait quitté Alger à l'insu de sa mère, avec l'argent de sa semaine dans la poche. Il avait pu payer ainsi la diligence jusqu'à Boghari. Là, il avait acheté une paire d'espadrilles, pour ménager ses souliers, il avait confié au garçon d’écurie son paquet de linge, et il s'était mis en route, à la recherche des chariots, couchant à la belle étoile et se faisant héberger par les charretiers qui passaient.

         Une telle obstination désarma Bacanète. D’ailleurs, cet enfant, pouvait-on l'abandonner ainsi en plein pays désert ?
         Un bruit de grelots se fit entendre : les mulets de volée de l'équipage de Rafael. Puis l'attelage, dans toute sa longueur, se déploya, avec le chariot, très haut sous, sa bâche. Les jambes fines des bêtes reflétées sur le sable s’allongeaient dans la lumière d'or du couchant. Le jeu des ombres mouvantes augmentait la profondeur des files. On aurait dit toute une pompe en marche.
         A cette vue. Chimo, transporté, quitta brusquement Bacanète, et Il se mit à courir au-devant de Rafael.
         ---- Maintenant tu ne pourras plus me chasser dit l'enfant en lui prenant la main.
         Il regarda Rafael avec des yeux tellement ravis, que celui-ci en fut plus fier que du compliment d'un ancien. Chimo lui plaisait déjà cause des promesses de sa jeune force : il l'aima pour sa bravoure et parce qu'il s'en voyait aimé.
         Désormais Chimo partagea la besogne de l'homme de peine, c'est-à-dire qu'il passait ses nuits à panser les mulets. Le matin, il dormait sur le chariot, et, le soir, il cheminait aux côtés de Rafael, dont il prenait le fouet pour s'exercer à conduire
         — Allons, pour un Mahonnais, tu ne seras pas trop bête, lui dit un jour Rafael, qui l'observait. — On croit que le premier bourricot venu est capable de conduire un équipage ! Mais il n'y' a pas de métier où il faille plus d'attention et d'intelligence...
         Et il montrait au garçon tout ce que la sottise du charretier ajoute à la fatigue des bêtes et à l'usure des chariots.
         Quand ils furent de retour à Alger, la Chusca, résignée, vint recommander son fils à Bacanète.
         — Je pensais bien qu'il était avec vous autres, dit-elle. Vous n'avez pas été plutôt partis que l'enfant s'est mis à dépérir, il ne faisait que pleurer et il ne mangeait plus...
         — Voyez-vous, tia Chusca, dit Rafaël, il a ça dans le sang, Chimo quand ce métier-là vous prend, on ne peut pas en faire d'autre, on aime mieux crever de faim ! Bacanète était si content du petit Mahonnais qu'il congédia son homme de peine arabe et lui donna sa place. Un rude voyage s'annonçait. On devait aller jusqu'à Ghardaïa avec un chargement de matériaux et de poutrelles de fonte destinées à la charpente d'un hôpital.
         Rafael, qui faisait ce voyage pour la première fois, partit enchanté. Chimo ne le quitta plus.
         Il avait acheté pour son travail une longue blouse blanche comme les maçons, et, dès l'arrivée à l'étape, avant même qu'il eût soupé, on l'entendait à l'écurie faire racler l'étrille. Il chantait une chanson, en patois des Baléares, toujours la même et que personne ne comprenait. Bacanète ne cessait de le taquiner à cause de sa chanson et surtout de sa blouse blanche, qui le faisait, disait-il, ressembler à un enfant de chœur.
         A tout instant il le singeait. Il avait même inventé une « scie», qui durait depuis le départ d'Alger et qui consistait à lui répéter du matin au soir «Voyons, l'employé de l'écurie, as-tu apporté les ustensiles voulus ?»
         — Bacanète mettait à renouveler cette scie un tel entêtement d'idiot, une telle régularité d'automate, que Philippe et Rafael eux-mêmes en étaient exaspérés.
         A Médéa, il voulut absolument que Chimo l'accompagnât chez les Mauresques, et il s'amusa des mines effarouchées de l'enfant, quand une grande fille le fit asseoir sur ses genoux.
         Pour toutes ces raisons, Chimo se faufilait sous la bâche du chariot, dès que sa besogne était finie et, sitôt réveillé, il se réfugiait auprès de Rafaël, qui le défendait contre les taquineries de Bacanète.

         Petit à petit, Rafaël en vint à reporter sur Chimo un peu de l'affection qu'il aurait voulu donner à son frère Juanète, Comme jadis le Borrégo avait fait pour lui, il prit plaisir à le former. Mais Ce qui le touchait surtout, c'était de voir ses idées, ses habitudes, jusqu'à ses gestes et aux intonations de sa voix se répéter chez l'enfant. Il lui apprit à gratter l'intérieur des colliers, afin que la poussière accumulée n'écorchât pas le cou des bêtes ; à nouer si artistement les attaches, que tout en étant fort solides, elles se dénouaient en un clin d'œil, — et mille autres habiletés qu'il ignorait encore. En échange, Chimo s'ingéniait à lui faire plaisir et à le soulager dans son travail. L'après-midi, il lui conduisait son équipage, tandis que l'autre montait se reposer sur le chariot. Le soir il lui étendait son hamac pour dormir et lui remplissait un sac de paille fraîche, en guise d'oreiller.
         Philippe souriait de ces attentions. Chimo en avait aussi pour lui, mais il sentait bien que celui-ci lui préférait Rafael. Son sérieux éloignait un peu l'enfant. Un jour il dit à son camarade:
         — Il t'aime comme un frère, Chimo !
         — Moi aussi, je l'aime, dit Rafael. Mais ce n'est pas la même chose, vois-tu, nous ne sommes pas du même sang !... Tiens ! Je donnerais le meilleur doigt de ma main, pour que Chimo soit mon frère.
         Chimo, de son côté, considérait Rafael comme une manière de dieu. Ses moindres actes lui apparaissaient revêtus d'une beauté qui n'était qu'à lui. Lorsque Bacanète ne pouvait pas l'entendre (car il avait peur de ses moqueries), il imitait les grands jurements sonores de Rafael : Tramontana ! Sirocco ! Mais les bêtes, qui ne se trompaient pas au timbre de la voix, n'accéléraient pas pour cela leur allure, se bornant à agiter leurs longues oreilles, comme au bourdonnement importun d'une mouche. Alors Rafael, sortant de sa somnolence, se soulevait à demi sous la bâche, et il reprenait de sa grosse voix le jurement affaibli par Chimo.
         Tramontana !... Aussitôt la petite mule de volée se jetait en avant, et toutes les bêtes, la peau de la croupe frémissante, tendaient le jarret et se précipitaient à leur tour, comme si soudain un vent de colère eût couru sur toutes les échines. Chimo, ébahi, regardait l'attelage s'emporter.
         Ils avaient quitté de grand matin le caravansérail d'El-Mesrane, et ils approchaient du Rocher-de-Sel. On apercevait, déjà les deux marabouts qui bordent la rivière, lorsqu'un cavalier arabe passa, rapide, dans son manteau rouge. De loin, il cria aux charretiers
         — N'avancez pas !... la rivière est grosse !
         Il disparut au galop, cependant, Bacanète remarqua que son cheval était couvert jusqu'au ventre d'une écume jaunâtre.
         On arrêta les équipages et l'on tint conseil. Le ciel était très sombre et l'air était lourd, sans un souffle de vent. Il avait dû pleuvoir du côté de Djelfa et des Hauts-Plateaux. Bacanète fut très contrarié de ce contre-temps. Il quitta brusquement ses hommes et courut à la découverte du côté de la rivière.
         Il revint, le front soucieux:
         — Mauvais, mauvais!... Pourtant je crois que nous pouvons passer tout de même. Il n'y a pas beaucoup plus d'eau que d'ordinaire. Seulement la couleur est vilaine, et il y a des petits tourbillons vers le milieu...
         — Ça ne coûte rien d'essayer, dit Rafael, je vais monter sur mon grand mulet Marquis, je verrai bien si on peut risquer le passage...
         Mais Chimo l'interrompit vivement ;
         - Non, Rafaelète, laisse-moi monter sur le mulet. Je peux bien faire cela, moi, ce n’est pas du travail pour toi..
         Il a raison, dit Bacanète. Vous autres, vous allez doubler pendant ce temps-là ; ce sera du temps gagné ! ...
         - Mais auparavant il proposa de manger et de boire une casserole de vin afin de prendre des forces.
         — Si nous passons, dit Bacanète, il faudra batailler dur, chargés comme nous le sommes !.,
         Le vin et la nourriture leur rendirent un peu de gaieté, Ils étaient presque joyeux quand ils se levèrent pour ranger dans le caisson les bouteilles et les boites de conserves. Bacanète s'était remis à gouailler.
         Mais Chimo avait dételé le mulet Marquis et, tout fier, il sauta sur le dos de la bête devant les trois charretiers qui le regardaient.
         — Allez ! Hardi, Chimo, cria Rafael.
         Et Bacanète reprenant son éternelle scie :
         As-tu emporté les ustensiles voulus, au moins ? »
         L'enfant, piquant des deux, partit au trot, en lui jetant au nez sa chanson des Baléares, pour le narguer, On l’entendit longtemps chanter à tue-tête.
         La rivière était distante d'un kilomètre environ. Quand Chimo arriva au bord un grondement sourd venait des montagnes où le torrent s'infléchit. L'eau avait monté de petites lames irritées claquaient contre la rive, et, vers le milieu, ces vilains tourbillons, dont parlait Bacanète, semblaient s'élargir, A la vue de cette grande surface mouvante et trouble, qui roulait de la terre et des herbes, la peur le prit tout à coup. Instinctivement il descendit de son mulet, dans la crainte que la bête ne l’entraînât. Une seconde, il songea à s’en revenir, mais il crut entendre tout près de lui la voix de Rafael :
         — Allez ! Hardi Chimo !
         Il eut honte d'avoir hésité et, bravement prenant le mulet par la bride, il s'aventura dans la rivière peu profonde. Il fit cinq ou six mètres ainsi, n'ayant de l'eau que jusqu'aux mollets, puis il s’arrêta en chancelant. Ses jambes commençaient à fléchir, ses veux se brouillaient, tout tournait autour de lui. L’eau trouble bouillonnait avec un bruit farouche. Il se vit perdu comme un homme jeté la mer. Hébété par le mouvement de l'eau, il ne songea même pas à lâcher la bride du mulet qui se cabrait et cherchait à revenir en arrière, Il ne poussa pas un cri : il n'eut qu'une pensée, c'est qu’il allait mourir pour Rafael. Alors, comme fasciné par la mort, il ferma les yeux. Le mulet l'entraîna dans le tourbillon, et une trombe énorme, qui dévalait de la montagne avec un horrible fracas, les roula tous les deux.

         Il était près de quatre heures, et la nuit allait venir, Chimo n'était pas de retour. Bacanète s'impatientait.
         Pourvu qu'il ne lui soit rien arrivé ! Dit Rafael.
         On l'aurait entendu crier, dit Philippe.
         A la fin, Bacanète et Philippe se décidèrent à allumer les lanternes et à aller au devant de Chimo, Rafael resta pour garder les équipages.
         Au bout de deux mortelles heures, ils revinrent désespérés. La nuit était profonde et l'air toujours aussi lourd : la pluie ne voulait pas tomber. Bacanète dit simplement à Rafael:
         -- Il est mort !
         Rafael, croyant à une facétie macabre de Bacanète, sentit la colère l'emporter.
         Tu en as menti ! Dit-il.
         Les deux autres ne répondirent pas. Il les regarda à la lueur de sa lanterne, ils étaient très pâles. Son cœur se serra, et sans écouter Bacanète ni Philippe, il se mit à courir comme un fou vers la rivière. Pendant toute la soirée, jusqu'à plus de minuit, il ne fit qu'aller et venir le long des berges, en criant « Chimo, Chimo ! » Son cri était si terrible qu'il arrivait jusqu'aux équipages.
         Philippe le ramena presque de force. Il jeta par terre sa lanterne, qui se brisa, et, sans rien dire à ses camarades, il s’abattit comme une masse sous les roues du chariot. Au même moment, il poussa un tel sanglot que ni Bacanète ni Philippe n’osèrent s'approcher de lui. A ses cotés, son chien Maboul, un vieux sloughi, qui était devenu fou à force d'être attaché, lui léchait les mains, en hurlant, comme auprès d'un mort.
         Le lendemain, il fallut passer la rivière, dont les eaux avaient baissé, La bataille fut terrible, la terre étant détrempée tout autour des rives. Puis, avec des gens du caravansérail, qui se trouvaient de l'autre côté, ils se mirent à la recherche de Chimo. Ils ne le trouvèrent que très tard, une lieue plus loin. Le mulet Marquis était si couvert de terre rouge que de loin, ils l'avaient pris pour un bœuf. L’enfant gisait auprès, couché sur le ventre, son fouet dans sa main crispée... Sous l'ardent soleil de la journée, l'eau qui mouillait ses vêtements s'était évaporée, et des fleurs de sel le recouvraient tout entier comme un suaire,
         Rafael, les yeux secs, le coucha sur son chariot, pour l'emmener à Djelfa, où ils devaient l'enterrer. Le trajet fut lugubre et interminable. Ils le conduisirent au cimetière, derrière l'hôpital, par un triste soir de février. Perso ne s'était joint à eux. Rafael se rappela une cérémonie toute semblable et déjà bien vieille, cet autre soir où ils avaient porté la couronne à Fernando. Il chercha sa tombe à côté de celle de Chimo. Mais il ne la trouva pas, Quelqu'un avait déjà pris sa place.

         Rafael, en sortant du cimetière, se sépara de ses camarades. Il était tellement oppresse de chagrin que la vu de Bacanète et de Philippe lui était insupportable. Ce Djelfa, avec ses avenues géométriques et ses airs de caserne, lui pesait encore plus que sa tristesse. Par une vieille habitude, il remonta la rue du M'zab, celle où se tiennent les Ouled-Naïls et les cabaretiers maures. Le long des maisons basses, les joueurs de flûte assis sur des bancs de bois tiraient de leurs instruments une petite mélodie aigrelette, et, barrant tout le trottoir, des femmes étaient accroupies par terre, dans leurs robes violettes lamées de paillons d'argent. Elles tournèrent vers Rafael leurs profils de vipères encadrés de grosses tresses arrondies comme des roues, et, de leurs deux mains rapprochées en un geste obscène, elles le convièrent à entrer.
         Il passa sans les voir. Les sons d'un piano fêlé sortirent d'un bouge à soldats. Il se hâta davantage, il franchit la porte de Charef, et, tout à coup, il se trouva seul en pleine désolation de la terre.

         La route, sur un petit pont, enjambe le lit d'un torrent sans eau, puis elle fait un coude brusque et se perd au flanc d'un monticule aride qui se dresse là, pareil à une muraille. Pas une herbe, rien que des cailloux et des sables dévalant le long des plateaux en pente. De l'autre côté, le mur d'enceinte de la ville, dont la surface polie a pris la couleur des roches.
         Rafael s'assit sur le parapet du pont. Il roula machinalement une cigarette. Aucun être vivant n'apparaissait. Sous le ciel triste d'hiver, c'était le silence, l'immobilité absolue. Très longtemps après, un Arabe passa, chassant un âne devant lui, puis, beaucoup plus tard, un vol de gypaètes tournoya au haut de la montagne. Rafael entendit leurs cris.
         Il ne pleurait pas, il ne songeait même plus à Chimo. Ce qu'il éprouvait, c'était comme un accablement de tout son être, au point que le moindre mouvement lui eût coûté une réelle souffrance, et que, pour lui, rien ne valait plus la peine d'un effort.
         Et, cédant à une sorte de vertige, il s'hébétait à regarder, du haut du pont, les cailloux énormes qui obstruaient le lit du torrent.
         Il resta ainsi, les jambes pendantes, sur le parapet, jusqu'au moment où la nuit se mit à descendre. Alors, il songea brusquement que, peut-être, ses bêtes n'avaient pas bu. Il se leva précipitamment et redescendit vers la ville.
         Cependant, il fut lent à se remettre. Sa gaieté ne lui revint qu'à Laghouat, quand il prit la route de Ghardaïa. Ce tour de force de faire passer près de cent lieues de sables à des chariots écrasés de marchandises exaltait d'avance son orgueil, comme une besogne héroïque. Seuls, perdus dans ce vaste désert sans eau, ils n'arrivaient pas toujours pour la nuit au caravansérail. On campait autour des équipages ; mais on goûtait la joie d'avoir vaincu la distance et de dormir pour la première fois sur une terre inconnue.
         A Ghardaïa, Rafael écrivit une lettre à sa fiancée, où il l'appelait « ma chère bien-aimée». Il rapporta pour elle une douzaine de mouchoirs de soie, des tourterelles blanches et, dans un coffret arabe, quelques-uns de ces coquillages du désert, dont les bords sont dentelés comme des fleurs et qu'on appelle des « roses de sables »

Louis Bertrand



PLUS BLANC QUE BLANC ?

De Jacques Grieu

TIR à BLANC

Le racisme, on le sait, est un vilain défaut
Et rien n’est trop seyant pour le clamer bien haut,
Pour montrer à chacun qu’on est un humaniste
Et que sa coulpe on bat d’ancien esclavagiste.
Des crimes du passé, on se repent très fort,
Et d’être né trop blanc, nous couvre de remord.

Car de bien des méfaits je me rendis coupable,
Que les discours du jour me montrent inacceptables :
J’ai lu, même relu, Robinson Crusoé,
Et aussi Jules Verne et Céline ou Hergé,
Sans oublier « Autant en Emporte le Vent »
Qui ne vaudraient pas mieux que le feu ou l’encan.

Tout ce qui est bien blanc a des airs de délit
« Plus c’est noir, plus c’est beau », Soulages nous le dit.
Si « l’homme de couleur » a toujours la peau sombre,
Voilà qui, à certains, a parfois fait de l’ombre.
Avoir des ides claires est chose fort suspecte.
La noirceur deviendrait l’attitude correcte ?

Le vin blanc, pour autant, va-t-il passer de mode,
Et de pinot bien noir faut-il qu’on s’accommode ?
De grimper au Mont-Blanc, faudra-t-il s’abstenir
Et pour les élections, « voter blanc » s’interdire ?
Il faut rebaptiser la rue des Blancs Manteaux,
Celle du docteur Blanche et peut-être Clairvaux ?

Se battre « à l’arme blanche » est la faute interdite,
Et le nom de « blanc-bec » est l’injure maudite.
En musique « la blanche », horreur, vaut bien « deux noires »!
Le racisme anti-blanc : douleur expiatoire ?
A quoi Dieu pensait-il, qui fit blanche la neige
Et noires les idées de l’homme en ses manèges...

Jacques Grieu                  



ROUTE de TIGZIRT à DELLYS
Envoyées par Groupe de voyage Bartolini





















PROVINCE D'ORAN.
Gallica : Revue de l’orient, 1852-1, pages 240 à 243

SOUVENIR DE LA VALLEE DE L’ISSER

                 Le territoire des Ouled-Mimoun, l'un des plus riches de la province de Tlemcen, est situé sur l'isser, qui prend sa source entre Labdou et Djâroum. Ce dernier lieu occupe l'emplacement d'une ancienne ville romaine, assise sur un banc de rochers très remarquables, et adossée à trois pitons, dont deux ont la forme de dents molaires et le troisième celle d'une dent canine. Elle commandait la plaine du côté de laquelle elle était défendue par un mur de rochers perpendiculaire et formant une terrasse à pic, et avait à sa gauche la rive droite de l'Isser au cours torrentueux, entraînant dans sa pente si rapide les roches qui partout en rendent le passage difficile.
                 Le génie a détourné l'Isser, l'a conduit sous Djâroum même et au moyen d'irrigations bien entendues, a donné la fertilité à six cents hectares de prairies domaniales. J'ai traversé ces prairies au moment de l'enlèvement des foins. Au lever du soleil, elles sont peuplées de caravanes de chameaux et de mulets qui transportent les balles de fourrage à Tlemcen située à sept lieues de distance. C'est un coup d’œil plein d'animation et de vie.
                 Le bassin des Ouled-Mimoun forme une espèce d'arc irrégulier, dont la corde serait l'Isser et entouré de montagnes dont les plateaux et les crêtes sont des forets et lentisque. Arrivé au sommet de l'arc, on trouve Aïn-Tlessoul, qui, traversant en zigzag cet arc, vient se jeter dans I'lsser.

                 J'ai rencontré peu de points de vue aussi merveilleux que celui dont on jouit â la source de Tlessoul ; il provoque l’admiration des touristes qui ont savouré les Paysages de la Suisse. Rien n'est comparable à la beauté de cette source sous son linceul de lauriers roses. Elle fournit sur un espace de trois cents mètres, trois belles cascades formant des excavations dans les rochers comme les cuves de Sassenage, avec cette différence qu'elles sont à découvert. Dans cette zone privilégiée, la végétation acquiert sa plus haute puissance. Les lentisques y sont à l'état de gros arbres, l'orme y est l'arbre de charronnage de nos grandes routes de France, le frêne menace le ciel, la vigne s'appuie partout sur ces grands arbres et va chercher à leur cime le soleil qui doit mûrir ses raisins. On observe sur les bords de la première cascade un pan de vieille tour romaine, castellum qui servait de vigie à Djâroum.
                 Le beau bassin des Ouled-Mimoun est rempli de fontaines, de jardins arabes, j'y ai vu des mûriers francs et des safsafs (peupliers) du plus fort diamètre.
                 Partout aussi des marabouts à l'ombre des arbres ; il ne manque à ce riche pays si fertile en céréales que la vie des villages européens. La cascade formée par le détournement de l'Isser au-dessous de la vieille ville romaine donne une chute d'eau qui fait marcher un moulin. Une petite casbah, sur le point culminant, sert de demeure aux gardiens des eaux.
                 Nous avions pour compagnon de voyage et pour guide dans notre promenade Sidi Mohamed-Ben-Gana ou Ould-Gara des Ouled-Zeir et aga de l'agalik d'Aïn-Temouchent.
                 En aussi bonne compagnie, nous ne pouvions manquer de recevoir partout une riche et abondante hospitalité. Après avoir de l'eau fraîche et limpide de Tlessoul et parcouru ses bois et ses jardins si remarquables, nous donnâmes un souvenir à la vieille Djâroum, traversant de nouveau deux fois I'Isser. Le caïd des Ouled-Mimoun Sidi-Marabot, nous accompagnant jusqu'aux limites de son commandement, voulut nous donner à déjeuner à la Louia, autre nid de verdure et de fraîcheur sur la rive gauche de I'Isser.
                 Le soir nous vînmes planter nos tentes chez les Sidi-Ben-Abdeli, tribu de nobles marabouts guerriers, très considérés pour leur ancienne origine, chez les populations arabes. Le territoire des Abdeli est aussi un riche et beau gays sur l'Isser.

                 Là, sous un gigantesque palmier à deux tiges et sous un massif de figuiers jaillit une source d'eau chaude à trente-huit degrés. La piscine romaine existe encore dans toute sa forme demi-sphérique. Les énormes blocs de béton qui fermaient l'enceinte ont résisté au temps, et de leurs fissures sortent des figuiers qui masquent partout la salle de bain et vous préservent des ardeurs du soleil. Le fond du bassin est garni d'un sable fin et brillant. Après que nous nous fûmes baignés dans ces eaux délicieuses, nos ordonnances y conduisirent nos chevaux, qui semblèrent les apprécier encore plus que leurs cavaliers. Le lendemain à trois heures j'allai m'y plonger de nouveau avant de remonter à cheval. J'ai pris peu de bains aussi agréables. Par une bizarrerie de la nature, à cinquante pas de la source d'eau chaude, se trouve une source d'eau froide. Ces deux sources mêlant leurs eaux, forment une petite rivière qui parcourt la vallée, fait tourner un moulin arabe, et de chutes en chutes va grossir l'Isser.

                 Le marabout des Sidi-Abdeli est une petite mosquée d'une architecture fort élégante et qui rappelle la grandeur de cette noble famille. On foule aussi à chaque pas dans ce bassin les vestiges de l'occupation romaine, où et je me demande pourquoi nous n'y avons encore rien fait.

                 Le troisième jour de notre campagne, chevauchant par monts et par vaux, chassant lièvres et gazelles, montant toujours, nous arrêtant de temps en temps pour jeter un dernier regard de regrets sur Tlessoul, Djâroum et les Abdeli, fixer notre vue sur Tlemcen, le berceau des rois, nous arrivâmes à El-Bridje, castellum romanum, où se trouve l'une des source de l'Oued-Snam.
                 Là, on dit adieu à l'Hospitalité arabe qui nous avait offert pendant notre excursion ses melons, ses pastèques, son mouton si bien rôti, que j'ai le mauvais goût de ne pas assez apprécier, son tadjuin et ses galettes au miel. Après une sieste sous l'influence de la brise de mer, nous rentrâmes à Aïn-Temouchent, terme de notre voyage.

M" DE MASSOL,
Officier au 1er régiment de la Légion étrangère.


Eugène-Etienne-Hennaya
Pieds-Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui - N'201, Novembre 2011
Un village qui travaillait dur…
     
                 Ce centre a été créé en 1851 lors du passage du général Bugeaud, dans le canton de Tlemcen le département d'Oran sous le nom d'Hennaya.
                 Il restera attaché administrativement à la commune de Tlemcen pendant de longues années, et ce n'est que le 26 janvier 1874 qu'il sera érigé en commune de plein exercice.

                 Près d'un siècle plus tard, en 1922, le village est baptisé «Eugène Etienne» en hommage à Eugène Etienne (15.12.1884 Oran 13.05.1921 Paris) Inspecteur des Chemins de Fer - Sénateur sous la IIIe République et Ministre de la Guerre en 1905. (voir notre magazine n" 24)

                 Les créations des quatre villages (Négrier, Mansourah, Saf-Saf et Bréa) n'avaient pu suffire à caser les différents colons qui attendaient à Tlemcen et à satisfaire les nombreuses demandes de concession qui parvenaient de la Métropole. On fut donc amené à envisager la formation de nouveaux villages et l'on estima que des terres tout à fait propices à la colonisation existaient à 10 kilomètres de Tlemcen dans la région dite « l'Hennaya ».

                 L'administration supérieure décida ainsi la création de ce nouveau centre en 1850, après de durs combats livrés par les colonnes françaises de 1842 à 1846, sous les murs d'El Hennaya. Le rapport de Commandant de la Subdivision de Tlemcen, au général Pélissier, du 25 septembre 1849, précise en effet, le problème qui se posait à l'administration supérieure, et la nécessité qu'il y avait de créer un nouveau centre, ainsi que les avantages que pouvait offrir Hennaya. Les 509 lots concédés en 1848 et 1849 aux habitants de Tlemcen ont enlevé toutes les terres appartenant à l'État situées dans la banlieue de cette ville : il est donc nécessaire de créer de nouveaux centres sur des points un peu plus éloignés.



                 Aujourd'hui, Tlemcen renferme encore 240 colons, dont un grand nombre d'anciens soldats, qui devront recevoir des lots de 8 à 10 hectares de terres labourables : parmi eux, on en trouve 110 qui s'engagent à élever eux-mêmes leur habitation si on leur délivre des terres à Hennaya : les 130 autres n'ont devers eux aucune ressource. Hennaya situé à deux lieues de Tlemcen, dans une position où il y a des eaux assez abondantes, 1000 pieds d'oliviers appartenant à l'État et des terres, en grande partie à défricher, suffisantes pour 150 familles, est certainement le premier point à occuper. Mais, comme il se trouve à quelques lieues seulement de la frontière, il est indispensable que le village qui y sera établi soit entouré d'une enceinte suffisante pour le mettre à l'abri d'un coup de main.


                 Dès que cette enceinte sera construite, on pourra autoriser immédiatement les 110 colons à commencer leurs habitations sur ce point, et y placer en même temps 40 familles de Tlemcen, dont les maisons devraient être construites aux frais de l'État. « Les 150 habitants destinés à ce village habitent déjà Tlemcen depuis plusieurs années : ils sont presque tous d'anciens soldats et bien qu'ayant été souvent dans un état de gêne, ont constamment refusé de quitter Tlemcen dans l'espoir d'occuper un jour Hennaya. Je demande donc avec insistance que les terres qui avoisinent ce centre futur leur soient réservées » M. Mac Carthy, qui parcourut le site d'Hennaya avant toute installation des Français, le décrit ainsi : «
                 Au détour d'une petite côte, à l'extrémité du long et bas promontoire qui les sépare (Oued Hennaya et oued Simoun), on est vis-à-vis de nombreux oliviers disposés en lignes ou en quinconces, comme l'eut fait le dessinateur d'un élégant jardin : ils s'élèvent sur des pelouses unies ou entre des sillons labourés. Sur le fond d'un vert grisâtre de leur feuillage encore épais, se détache le minaret élancé de Sidi Yahia, au pied duquel sont quelques-unes des habitations qui forment le village, habitations toutes arabes, comme la population entière, qui peut être de 150 à 200 individus. » ( Le minaret de Sidi Yahia est de la brillante époque tlemcénienne et à la forme de tous ceux de cette ville.
                 C'est une tour carrée surmontée d'une autre beaucoup plus petite, qui en est le clocheton et autour de laquelle se développe une galerie d'où le Moudzen appelle à la prière. A quelque distance d'Hennaya, toute culture cesse : on entre dans les grandes plaines couvertes de palmiers nains, de cèdres et de jujubiers, qui n'ont même pas pour limite les bornes de la vue ». Le général de Mac-Mahon commandant la subdivision de Tlemcen, demanda au Ministre de la Guerre de lui envoyer le plan du village.


                 De nombreux colons étaient arrivés alléchés par la promulgation du décret présidentiel du 25 avril 1851 qui créait le centre, et le plan n'arrivait pas. En juillet 1851 le plan était prêt, mais il n'était pas applicable au centre en raison des accidents du terrain dont il n'était pas tenu compte. Poussé par les réclamations des colons impatients, le général ordonna au service du génie de tracer immédiatement le village.
                 Le 13 juillet 1851, le Général se rendit sur l'emplacement du futur village pour en arrêter définitivement le tracé. Il aurait, dans un endroit tout couvert de palmiers nains, planté son épée en disant :
                 C'est ici, Messieurs, qu'il nous faut tracer la Grande Place du nouveau village » (Calzaroni, Hennaya, B.S.G. Oran, juin 1930, p. 120).
                 Une vaste enceinte fortifiée fut élevée, destinée à protéger les colons et à abriter contre les coups de main des insurgés. Le mur qui, par la suite, fut, naturellement, l'occasion de démêlés nombreux entre la commune et le génie militaire, a été supprimé en 7926. Le village fut enfin crée et ainsi que l'avait fait connaître le Commandant de la Subdivision de Tlemcen, il fut immédiatement peuplé. Le nombre des demandes de concessions ayant même dépassé le nombre de lots disponibles.

                 Les colons reçurent à Hennaya des lots de culture proportionnés en effet aux terrains dont on pouvait disposer. Chacun reçut un lot de jardin de 0ha20, une olivette de 0 ha 40 à 0 ha 80, un lot de prairie de 0ha 50 et des terres de culture d'une superficie variant entre 1 et 3 hectares. Il fallait donc au plus vite trouver le moyen de venir en aide à ces colons et de les mettre en possession de terrains dont l'étendue leur permettrait de vivre eux et leur famille. Tout permet de croire que M. le préfet Majorel parvint à réaliser ses projets car le village d'Hennaya reçut bientôt un accroissement considérable de territoire.
                 On voit, en effet, en 1854 la superficie bâtie concédée, passer de 3 ares 50 à 10 ares 21. C'est surtout la superficie à cultiver qui prend une grande extension Elle saute brusquement de 312 hectares à 1966 hectares. A cette date le village d'Hennaya doit donc être considéré comme définitivement crée. Il est en possession de toutes les terres qui vont devenir entre les mains des colons, travailleurs et économes, des champs très fertiles, où les plus magnifiques récoltes ne tarderont pas à pousser. Le centre d'Hennaya se développa très rapidement ; une étude rapide des statistiques démographiques nous démontre que ce fut un des rares villages où les naissances l'emportèrent nettement sur les décès. On comprend dans ces conditions que la situation du village était prospère. La venue des nouveaux colons augmentait encore son développement.
                 Un certain nombre d'artisans et de commerçants vinrent s'établir à Hennaya, pour subvenir aux besoins de la consommation locale. Hennaya était d'ailleurs le mieux pourvu en 'gens de métiers. On y trouvait :
                 2 bouchers : Collet louis et Alliaux Sébastien. 1 boulanger : Fortuni Roger. 4 maçons ou entrepreneurs : Granès Bonaventure, Cazelle Louis, Rival, Gravier. 1 tailleur d'habits : Madame Yidal. 2 couturières : Portalès Dolorès et Martin Delphine. 2 Blanchisseuses : Lamotte et Verdoux. 1 Forgeron : Berger Ferdinand. I cordier : Lemaître Charles. 1 meunier : Fulcran Jullien.

                 Afin de recueillir les enfants, le sieur Doneret Pierre sollicita l'autorisation d'ouvrir une école auprès de l'administration académique et l'établissement fut fondé en 1852.


                 La première institutrice fut Madame Loustalot qui venait de Tlemcen, remplacée en 1858 par M. Faure Marius. La même année, M. Roqueplan était placé à la tête de l'école d'Hennaya. Il y resta jusqu'à sa mort et fut remplacé par M. Bourdages. Le service religieux fut assuré pendant les 2 premières années par le clergé de Tlemcen dans une maison chapelle qui deviendra par la suite le bureau de Postes. Le 29 janvier 1853 y était érigée une église dont la construction dura 7 ans. Le premier curé, après le très rapide séjour d'un certain abbé Desbois, fut l'abbé Pierre Joye. De 1859 à 1962, se succèderont 13 prêtres à Hennaya. Avec l'abbé Emile Douteau, curé de 1932 à 1948, I'église se vit illuminée de vitraux et dotée d'un carillon à 6 cloches, installé en 1935. En 1938, des religieuses de Notre Dame des Apôtres ouvraient, pour tous les habitants, un dispensaire à Hennaya. L'aménagement en est moderne et plus de 150 malades, musulmans pour la plupart indigents, y sont soignés.
                 À ce jour, les religieuses sont toujours présentes au village. Les derniers curés ont été : de 1948 1954, l'abbé Roche, de 1954 à 1960, l'abbé Koeger (qui dirigea le Foyer rural « Saint-Raymond ». Ancien curé de Mers-el-Kébir, il organisait des séances de cinéma pour tous les habitants du village) et de 1960 à 1964, l'abbé Pérez.
                 Le 28 janvier 1874, on sépara définitivement Hennaya de Tlemcen, pour en faire une division administrative distincte et en juillet 1922, on lui donna le nom d'Eugène Etienne.
                 Jusqu'à cette date, le village fut rattaché administrativement à Tlemcen et dirigé par un adjoint spécial faisant partie du Conseil Municipal et représentant la municipalité.
                 Nomination : 14/12/1857 : Bonnemaison Sébastien, 1/2/1864 : Rougerat, 10/8/1867 : Simard François, 27 /10/1867 : Fleury.
                 Les gardes champêtres furent : Henry, Farges, Quiquerez Pierre, Taillaudat Jacques (1865), Thorrignac Ferréol (1 890).


                 Dans le Bulletin de la Société : Les Amis du Vieux Tlemcen (1956), Yvon Grasset, Maire du village, écrit : Hennaya est centenaire. Une centenaire qui se porte bien et qui travaille dur, après avoir défriché, planté ou semé 300 ha d'agrumes, 2 000 ha de vigne aujourd'hui en rapport, 2 300 ha de terres à céréales, 700 ha de cultures maraîchères irrigables dans la plaine. Au total, 5 542 ha presque entièrement cultivés font vivre 8000 habitants, dont 1000 Européens et 7000 Français-Musulmans.
                 Hennaya voudrait s'agrandir comme elle le mérite, un projet qui vise 6 000 ha nouveaux, doublerait son territoire.

                 Le bourg d'Hennaya est traversé par la route nationale n° 22, qui conduit d'El Aricha, au Sud, à Beni-Saf. De Tlemcen, et de ses 806 mètres (à la mairie), elle descend rapidement puis traverse notre bourg (attitude 400 m, distance 11 km) et toute la plaine d'Hennaya jusqu'à Montagnac. Elle rejoint alors la Tafna, qu'elle suit de près jusqu'à Rachgoun.
                 Le chemin de fer Tlemcen-Beni-Saf, qui contournait notre bourg, a été supprimé, il y a une dizaine d'années, rails et traverses furent même enlevés récemment.


                 Plusieurs lignes de grands cars :
                 T.R.C.F.A, partant de Tlemcen, desservent Hennaya par la nationale 22, et de Nemours, et vice-versa. De plus, les cars de Menou font le service Tlemcen-Hennaya, tous les jours et à toutes heures, ainsi que quatre taxis.
                 La route nationale 22 est donc la grande artère nourricière, d'où se détachent des artères secondaires pendant la traversée du bourg : la route de Nedroma (n" 38) par le plateau des Zenata, qui va jusqu'à Nemours : la route de Lavayssière-Ain-Youcef (n° 38) jusqu'à Aïn-Kial ; enfin, la route de Béni-Mester à Lamiguier, la moins fréquentée, qui relie la nationale 7 (Tlemcen-Oujda) à la nationale 2 (Tlemcen-Ain-Temouchent et Oran ).
                 Plusieurs chemins nouveaux ont été ouverts et empierrés par la commune, comme celui de Melilia. Qui se détache de la R.N 22 à 3 km au Sud, pour desservir les hameaux d'Ain-el-Hadjar et de Melilia, d'où il redescend à la route des Béni-Mester. Un autre, dit « chemin de la Sikkak » a été ouvert, lui aussi, et empierré sur 2 ou 3 km.
                 Notre territoire s'étend à l'Ouest jusqu'à l'oued Messaoud, encore appelé oued Bou-Ennag dans [a région pittoresque des grottes du Dehar Mendjel (mont de la Faucille). A l'Est, c'est l'oued Sikkak et son sauvage affluent l'oued Sennoun, qui nous font une longue limite naturelle.

                 Les communes limitrophes sont celles de Tlemcen au Sud de Remchi au Sud-Est, de Lavayssière au Nord-Est et au Nord, de Remchi encore à l'Ouest. Ce territoire coincide à peu près avec la région naturelle que les géologues et les géographes appellent « la plaine d'Hennaya », qui est plus large à l'Ouest de la ville, et surtout au Nord, et qui se prolonge : au Nord, par la plaine des Ghossel (Lavayssière) ; au Nord-est, par la plaine (ou le plateau) des Zenata (entre les vallées profondes de l'oued Messaoud et du Chabet bou Hallouf).
                 Ce sont trois plaines de piedmont, dont le sous-sol est constitué par les terrains tertiaires miocènes, à savoir des marnes et des grès de l'étage helvétien ou de l'étage tortonien, comme dans toutes les « plaines de Tlemcen », les oueds ont creusé facilement ces marnes miocènes, et montrent de belles coupes sur leurs hautes berges. Les grès tortoniens jaunes d'or d'Hennaya sont identiques à ceux de Tlemcen-ville. Ces marnes et grès sont recouverts d'alluvions quaternaires anciennes, qui sont monastiriennes (Hennaya), ou tyrrhéniennes avec tuf calcaire (Ghossel) ou siciliennes (Zenata).


                 Très peu de terrains secondaires jurassiques (très calcaires) sur notre territoire. Ils constituent, on le sait, les monts de Tlemcen, leur prolongement, c'est les collines des Béni-Mester (850-650 mètres), avec le Teffatisset, le Dehar Mendjel, le Djebel Djelida, le Djebel Aïn-el-Hout, qui s'avancent vers le Nord sans guère dépasser Ain-el-Hout.
                 C'est justement là, en bordure du Dehar Mendjel, que notre territoire est traversé par la conduite des Béni-Bahdel, depuis les gorges de l'oued Messaoud (chevauché par un grand aqueduc) jusqu'à la route nationale 22, en passant très près des hameaux de Melilia et d'Aïn-el-Hadjar.
                 La plaine d'Hennaya, qui s'abaisse graduellement vers le nord, est sillonnée par les trois oueds parallèles qui descendent vers le Nord ou le Nord-est, tous tributaires de la Tafna (ou de l'Isser) :
                 L'oued Messaoud (bou-Ennag) descendu du col du Juif;

                 Le Chabet Hallouf, qui est une rivière de plaine exclusivement, beaucoup plus simple que les deux autres ;
                 L'oued Sikkak (grossi de l'oued Sennoun), descendu du plateau de Terni.
                 Ce dernier est précieux par l'irrigation ; un barrage de dérivation débite 100 litres par seconde. En outre, les sources dites d'Aïn-el-Hadjar débitent 21 I/s. Outre les cultures maraîchères, on peut arroser, en hiver, une grande partie des vignes. Dans la plaine d'Hennaya, le sol contient des éléments grossiers. surtout siliceux, peu calcaire. Il convient aux olivettes indigènes et olivaies européens, aux vergers (plutôt au Sud), aux céréales (plutôt au Nord, où le sol devient marneux). Des milliers d'oliviers sont en plein rapport, on récolte des milliers de quintaux d'olives, de raisins, de pommes de terre, d'agrumes, de poivrons, de tomates, de fruits divers. Dans les terres à céréales, on récolte de même, par milliers de quintaux : blé, blé tendre, orge, avoine, légumes secs, etc.
                 Les routes et les chemins de culture découpent géométriquement la plaine d'Hennaya en larges parcelles monotones, qui sont des rectangles ou des trapèzes. Ce sont, certes, de belles et grandes fermes que celles de MM. Jacomo frères, Grasset Paul et Derasse Louis, Leutenegger Walter, Cazenave Guy, Meyer frères, et d'autres encore...


                 La commune d'Eugene-Etienne Hennaya compte trois hameaux : Melilia, le plus important, Ain-el-Hadjar et Zaouia.
                 1- Melilia, situé à 4 km à l'Ouest du centre, est peuplé de 870 Français-Musulmans, dont quelques fellahs et ouvriers agricoles, sous la surveillance d'un chef de douar. Il jouit de l'éclairage électrique, grâce à une source abondante très proche, cette dechra est dotée depuis assez longtemps d'eau potable, d'un lavoir-abreuvoir, et de l’irrigation des jardins, où l'on récolte des olives, des pommes de terre, des poivrons, divers légumes, et des céréales. A 1 km plus loin, au bord de l'oued Messaoud, jaillit une petite source thermale appelée « bain de Melilia », qui guérit, parait-il, certaines maladies, et devrait être mieux aménagée. Elle se trouve sur le territoire de la commune mixte de Remchi. Elle est d'origine profonde, (comme Tahammamine près de Ain-el-Hout). Pendant sa construction, la conduite des Béni-Bahdel avait réveillé l'activité de Melilia. Il en est resté un bel aqueduc sur l'oued Messaoud, une cheminée d'équilibre à la cote la plus élevée, des chemins nouveaux ou améliorés, quelques monceaux, aqueducs, etc...

                 2- Aïn-el-Hadiar est à 3 km au sud, comme Melilia, il est éclairé par l'électricité, et surveillé par un chef de douar. Ses 396 habitants sont surtout des ouvriers agricoles. On y remarque les deux grandes fermes de MM. Granier et Bouhadjar, et une école neuve. Les sources captées sont les mêmes que celles de Hennaya. Aïn-el-Hadjar dispose de 7 l/s pour irriguer ses terres, où l'on récolte du raisin, des olives, des céréales, des pommes de terre, du tabac à mâcher.

                 3- Zaouia: à 5 km au nord-ouest près de la ferme Vve Lauque, route de Lamiguier. Un chef de douar 272 habitants ; tous les chefs de famille travaillent dans les fermes environnantes.
                 La ville d'Hennaya se fait remarquer des automobilistes de passage par sa grande place publique, ses maisons coquettes, son installation moderne, et par quelques beaux monuments neufs.
                 Il faut citer : Un monument aux Morts pour la France, édifié en 1920 sur la place publique, face à la mairie,
                 Une mairie neuve, qui a coûté plus de 23 millions en 1952,
                 Un marché couvert qui a coûté 11 millions,
                 L'Eglise et la Mosquée qui ont été agrandies à la satisfaction de tous,
                 Une salle paroissiale construite entre le presbytère et l'église, (elle a été bâtie grâce à la générosité des catholiques et avec l'aide de la municipalité),
                 Un presbytère agrandi, depuis quelques années, par les mêmes moyens,
                 Une Vierge, dite « Notre-Dame d'Hennaya », élevée depuis une dizaine d'années près du cimetière musulman, au carrefour des routes de Nemours et des Béni-Mester.

                 La municipalité étudie, d'ailleurs, quelques travaux d'initiative, pour aménager les places publiques, les principaux boulevards et les égouts. Citons encore :
                 Une grande école, qui coûtera 20 millions, en construction au bourg ; elle contiendra 4 classes et 3 logements ;
                 Deux écoles de hameaux. A Ain-el-Hadjar, une école à deux classes a été construite, et s'est ouverte le 1
er octobre 1954. A Melilia, une école est projetée.
                 Le téléphone a 36 abonnés, il y a trois facteurs des P.T.T.
                 La conduite principale d'eau potable a été améliorée en 1951, à la grande satisfaction de la population... Coût : 10 millions et demi. (les sources se trouvent à 2 km au Sud) ;
                 Les nouveaux chemins de Melilia et de la Sikkak etc.
                 Hennaya a derrière elle un siècle de travail... autour d'elle, la plaine qu'elle a fertilisée..., devant elle, la plaine qu'elle a fertilisée, devant elle, encore le travail, la paix, le progrès pour tous.
Source : Bulletin de la Société :
Les Amis du Vieux Tlemcen (1956)
par : Yvon GRASSET
Maire de la commune Hennaya d'Eugène-Etienne
    


 
Le poignard de Brutus
par M. Robert Charles PUIG.
Le poignard de Brutus persévère
à détruire le temps de l'Algérie française

         Par l'arrêté du 25 août 2023, le gouvernement macroniste décide l'ouverture d'archives relatives à la guerre d'Algérie. En fait c'est la mise à disposition sur la place publique de faits de guerre et surtout des actes des patriotes français et pieds-noirs contre l'abandon de la province d'Algérie, française depuis 1830. Voilà donc le locataire de l'Élysée qui continue son action contre un pan de l'histoire nationale. Son but ? Ranimer dans l'esprit des métropolitains ce mépris, ce rejet des événements d'Algérie et justifier par ces "mises à jour" que les enfants de cette province française n'étaient qu'une horde sauvage et criminelle au service de l'O.A.S. et offrir à l'Algérie FLN des arguments pour nous traiter d'enragés dangereux tout au long de la guerre et non pas de permettre au peuple français de prendre conscience des horribles massacres du FLN contre la communauté européenne et musulmane fidèle à la France. Il ne faudra pas évoquer les assassinats d'enfants, de femmes à El Malia, Palestro, El Arrouch, Oued Zenatti et Ain Abid ou le massacre évité à Souk Arras par l'ALN de jeunes militaires français grâce aux escadrilles de Bône envoyées pour les protéger malgré l'opposition du pouvoir parisien devant justifier de se "débarrasser" de l'Algérie.
         En vérité, cette ouverture d'archives qui met en évidence, en pâture, les actions des patriotes contre l'abandon de ce territoire ne servira à Macron que pour démonter qu'il faut encore aujourd'hui se méfier de cette extrême droite, ces ultras agressant les institutions de la république. Une page nouvelle est ouverte contre notre vérité et nous risquons de rester prisonniers des mensonges d'un pouvoir qui provoque un schisme en ouvrant une boîte de Pandore et en déformant les actions d'une jeunesse pied-noire idéaliste et croyant à la pérennité de sa vie sur ce sol d'AFN. Ne l'oublions pas ! C'est pour cette raison qu'elle se révolta mais ce qui n'était que l'expression d'un patriotisme désespéré, va devenir sous les mots des élus de "Renaissance" un sujet de désinformation pour la délectation du clan "En marche", des socialo-communistes, des francs maçons et de cette chrétienté progressiste qui, comme au temps de Monseigneur Duval, dit "Monseigneur Mohamed" préférait le FLN à l'action des défenseurs de l'Algérie française.
         Je devine déjà au fil des écrits à venir combien la diffusion de cet arrêté va démontrer dans une fausse propagande combien ceux qui étaient des héros pour nous n'étaient qu'une bande de mercenaires et de rebelles méritant la pendaison. Ils seront encore comparés à des census ou des vampires s'abreuvant au sang de leurs victimes ! Quelles victimes ? Les assassins fellaghas, les poseurs de bombes pour éliminer les civils. Voilà ce que la publicité mensongère de Macron et ses alliés de gauche vont oser présenter en dénaturant l'œuvre et les actions des européens d'Algérie et en insistant finalement pour dire ou écrire que cette terre était un leurre, une utopie. Plus de 60 ans après l'indépendance offerte par De gaulle, les yeux bornés du gouvernement, les esprits obtus des élus au pouvoir n'évoqueront pas la Sainte Barthélémy du 26 mars 1962 mettant en place au cœur d'Alger les tueurs d'un ex FLN soutenus une armée française défaillante, complice de notre fin avec le sieur Fouchet au Rocher noir, valet des ordres gaullistes.
         Sans illusion, cet arrêté du 23 août 2023 est fait pour attiser la haine contre les pieds-noirs et leurs actions de patriotes. Il ne sera pas question d'évoquer le 5 juillet et les actes barbares, démentiels subis par la population civile oranaise sous la coupe des hordes FLN. Des meutes sanguinaires qui envahirent la ville pour assassiner sans que le général Katz, suppôt de De Gaulle fasse intervenir les troupes françaises calfeutrés dans les casernes oranaises. Une fois de plus le pouvoir agissait pour effacer définitivement 132 ans de présence en Algérie, alors que les services secrets français devaient être au courant du massacre programmé. C'est cette vérité que Macron refuse depuis son honteux discours de 2017. Il faut cependant que les métropolitains sachent que des mesures furent prises par le pouvoir en 1962 pour éliminer une jeunesse qui faisait peur car elle était partie prenante du combat pour préserver l'Algérie française de son abandon. Le pouvoir parisien avait carte blanche pour imposer sa loi : suppression des sursis, chasse de la jeunesse pied-noire arrêtée dans le cadre d'un "Plan simoun", permettant de la mobiliser à partir de 18 ans et de l'envoyer dans des casernes en France, après un passage au camp du Lido aux portes d'Alger, pour éviter leur engagement dans le combat pour l'Algérie française.

         Soyons sérieux ! La promulgation officielle de cet arrêté et l'ouverture des archives de ce temps de la honte ne mettra en exergue que les actions des européens contre l'indépendance et peut être considéré que comme un acte de servilité, inféodation de Paris au profit d'Abdelaziz Tebboune, le dictateur algérien. Il faut faire plaisir, jouir devrais je dire, ce président algérien qui exige et obtient beaucoup d'Emmanuel Macron. C'est une revendication de plus de ce pays du Maghreb l'encourageant à cracher sur ce temps ancien et donnant au FLN des arguments pour démontrer que la jeunesse pied-noire était liée à l'O.A.S. et agissait en son nom contre les algériens. Une jeunesse qui était fière de se croire française et honteuse de la soumission de Paris aux thèses progressistes qui s'offraient déjà au croissant islamiste. En vérité, il n'y a pas que Macron qui se courbe, capitule face à l'Algérie. Rappelons nous François Hollande. Il envoya à Alger son secrétaire aux anciens combattants Jean Marc Todeschini, le représenter à au 70 ième anniversaire du "massacre des algériens" (?) sous la colonisation. Il décréta le 19 mars 1962 et une cérémonie du 17 octobre 1961 en faveur d'une manifestation FLN à Paris.
         Comment la France d'aujourd'hui peut-elle se faire respecter lorsqu'elle ne fait que s'incliner ? Nous avons le cas du Mali, du Burkina, du Niger et peut être du Gabon. Ils nous quittent, amères ou déçus de notre infantilité ou notre mépris impoli. En fait, Macron réveille une plaie, une meurtrissure et remet en scène une page d'une histoire où la jeunesse pied-noire croyait à la victoire de la vérité sur le mensonge d'Etat. Une jeunesse qui a participé à la lutte pour une plus grande France avec ses ainés et qui a payé cher son engagement dans les casernes du colonel Debrosse ou sous la coupe de la mission "C" du commissaire Hack, allié au FLN. Faut-il oublier combien de charniers furent découverts après l'indépendance de l'Algérie dans les fiefs des barbouzes de Roger Frey ? Par cette décision de l'Élysée, voilà une page d'un combat pour l'honneur qui est mis en pâture pour satisfaire l'Algérie, la gauche française et sans doute Macron lui-même, toujours obsédé par l'effacement de la saga pied-noire.

         Permettez moi avant de terminer mon écrit d'évoquer deux amis, deux héros de ce temps de guerre. Ils avaient mon admiration et mon amitié. Aujourd'hui, ils ne sont plus, mais leurs souvenirs ne pourront pas être effacés des pages de notre Algérie française. Je veux juste me rappeler d'eux : Jean Claude Pérez, un héros défenseur de l'Algérie française et un responsable important de l'O.A.S. Il sacrifia une partie de sa vie pour défendre sa terre natale. Je veux aussi me souvenir de Marc Pélissié. Un grand homme courageux et modeste. J'ai mis un certain temps, tout en le connaissant, à apprendre que c'était lui l'homme du GMC qui défonça les grilles du gouvernement Général le 13 mai 1962 ! Bien entendu il y a eu de nombreux autres héros de ce temps de guerre. Ils méritent tous notre respect car ils furent des exemples du vrai patriotisme
         C'est pour ces raisons, ces actions et ces drames qu'il nous faut continuer à veiller, entretenir cette vérité si fragile et qui vacille hélas sous la haine, la propagande d'Etat de ce pouvoir actuel. Il nous faut continuer à dénoncer l'hypocrisie, la tromperie, les contrevérités qui veulent notre fin, notre effacement. En fait, Macron vient de sortir de sa boite à malices ce nouvel arrêté pour surnager à une défaire à venir. Pour cela, il veut s'appuyer sur la duplicité de l'histoire, prêcher le faux une fois de plus, épouvanter le peuple en transformant le passé en actes de rebellions pour retrouver un rôle qui lui échappe et éviter que demain une droite nouvelle, patriote, responsable décide enfin de prendre le destin du pays dans ses bras pour redonner à la Mère patrie sa place dans le concert des nations.

         En vérité, je ne pense pas être le seul dans ce combat pour la véracité, l'authenticité, le vrai. Personnellement, comme dans un rêve je crois en un changement à venir, à une unité des droites depuis la molle LR à celle de Zemmour et Marine le Pen pour un pays de l'ordre, du droit, du bon sens et de l'espoir. Brutus a fait son temps, il est mort mais notre vérité demeure indestructible.
       
Robert Charles Puig / septembre 2023
        


Réflexions sur l'Abaya
Par M. Jacques LOUFRANI - 05/09/2023

        Bonjour à tous,
        J'ai l'intime conviction que vous devez suivre l'actualité et notamment ce qui actuellement alimente les débats télévisés notamment en ce qui concerne le port de l’Abaya à l'école.
        Je n'ai pas la prétention de refaire la trame de ces débats mais ma conscience de Français que je n'ai jamais délaissée, et ma volonté de combattre inlassablement tout ce qui n'est pas conforme à ce que nos parents nous ont enseigné au regard de notre histoire, de notre culture de nos modes de vie me contraint à chercher une analyse dont la sévérité des conclusions peut paraître excessive.
        Comme vous le savez tout ce qui touche à cet islamisme galopant, mortifère et destructeur est pour moi non seulement un sujet de réflexion et une volonté inexorable d’en combattre les effets par tous les moyens
        De prime abord je pense que l'on accorde trop d'espace médiatique à ceux qui en sont les promoteurs et qui n'attendent que cela pour déverser leurs théories sur des Français globalement peu rompus à l’islam car n'ayant pas vécu comme nous dans des pays arabes.

        Quand on suit précisément ces débats télévisés (cf hier sur C8 avec cet Hanouna, aux positions un peu fumeuses) on mesure combien le salafisme et le frèrisme ont gangrené la France qui pour moi ne s'en remettra pas !
        J'ai suivi avec attention les interventions de la première femme imame chez Jean-Jacques Morandini ainsi que d'une islamologue dont j'ai oublié le nom : toutes deux tiennent le même discours qui consacre le caractère religieux à ce vêtement. Cette position est même combattue par le frèriste venu chez Hanouna en compagnie et qui affirme avec un aplomb consommé que ce vêtement est un simple vêtement civil sans aucun caractère religieux.

        Voilà où « le pas de vagues », le déni des gauchistes, la mollesse des autres y compris des républicains, l'insouciance de Macron et l'ineffable bêtise de Hollande, les lâchetés du monde universitaire et de la gauche face à l’avancée de l’intégrisme religieux, ont conduit la France.
        Ce processus d'entrisme, sournois, invisible, compassionnel est beaucoup plus destructeur qu'un affrontement délibéré.
        En effet, le phénomène salafiste, est une forme particulière capable d’opérer un « recodage religieux de la réalité sociale française et européenne » et perçue par de plus en plus de musulmans « comme l’incarnation objective de l’islam (B. Rougier – Universitaire). Ce phénomène n'a rien à envier aux lavages de cerveaux rencontrés le siècle dernier en URSS, au Vietnam, à Cuba, au Cambodge, et bien d'autres endroits encore.

        Il y a pourtant une cause essentielle qui a donné naissance à ce raz de marée islamiste venu d'Arabie Saoudite dans les années 1980 et suivantes. En effet, l'Arabie Saoudite reste un pays à caractère tribal fédéré autour d'un roi qui pour asseoir et maintenir son pouvoir dispense des royalties provenant des pétrodollars.
        Or il y a une conjonction d'intérêts inévitable entre ce roi et ces tribus analphabètes, rejetant le progrès occidental évidemment, et qui cherchent à appliquer les principes de l'Islam dans toute sa rigueur, notamment par la construction de mosquées dans le monde occidental, le financement d'organisations islamistes, sans parler de celles qui sèment le terrorisme de par le monde.
        Tous les attentats que nous avons connus en Europe (Charlie hebdo, hyper kasher, Strasbourg, Nice, Colonel Beltrame, Berlin, etc.) sont les produits de ces courants de pensée qui font une application stricte du Coran selon lequel l'islamisation de la planète est l'objectif premier et ultime des musulmans.

        La Charia est au droit ce que la barbarie est à la Civilisation !
        C'est que cette volonté d’islamisation planétaire a comme point de départ la France en premier, car elle est une pièce essentielle et c’est ici que l’Islam gagnera ou perdra face à l’Occident. Il le croit, voilà pourquoi il s’y investit avec tant de rage derrière laquelle cependant, agit un monde étonnant de froide intelligence et de patience ?
        Pourquoi la France ? Au moins deux raisons :
        · · c'est le pays qui est le plus proche du Maghreb et des autres pays arabes, excepté l'Italie
        · · mais c'est surtout le seul pays en Europe qui possède une loi de protection contre l'influence religieuse dans la société civile c'est-à-dire la laïcité
        Les islamistes ne luttent pas contre la laïcité parce qu’elle est dure. Elle est dure parce qu’ils la combattent !

        Les islamistes, inscrivent cet investissement dans des logiques militantes depuis des années, et tentent de multiplier les points d’ancrage dans tous les lieux à caractère social : aucun ne doit leur échapper. Salle et terrain de sport, mosquée, restaurant, librairie, école… Dans ces lieux, on fait circuler des préconisations religieuses (vestimentaires, alimentaires) aux musulmans pour leur faire honte en mobilisant le sacré. Le but est d’homogénéiser les comportements en utilisant les catégories du haram (l’interdit) et du halal partout. La domination des quartiers n’est pas littérale mais sur ces territoires, personne n’ose lancer de défi aux islamistes.

        « Quand un individu vit dans l’espace résidentiel, l’espace religieux, l’espace amical, l’espace scolaire, l’espace sportif, l’espace numérique, l’espace du loisir, l’espace du café comme étant des lieux où la norme circule de l’un à l’autre, il ne peut plus en sortir. »

        Quand on s’intéresse à ce qui se passe dans les banlieues, (?) et notamment aux règlements de comptes quotidiens entre dealers, on ne peut s'empêcher de penser que l'islam en est encore la cause. En effet, l’offre idéologique portée par les islamistes justifie le trafic de drogue, le braquage de banques, tant qu’il s’exerce contre les mécréants. Tout est pensé, conçu, exécuté par les islamistes pour affaiblir les pays qui n'ont pas comme religion d'État l’islam. C'est pour cette raison que je pense que l'islam n'est pas qu'une religion comme pourraient l'être le judaïsme ou le christianisme. C'est un modèle de stratégie militaire, donc une armée, avec un but très précis comme évoqué ci-dessus. Et c'est ce que toutes nos élites n’ont toujours pas compris. On voit bien que cette stratégie très dissimulée, trouve son meilleur allié chez les gauchistes ou les uns sont la béquille des autres, même si leurs intérêts fondamentaux divergent quant à leurs expressions. Les uns veulent détruire la République pour satisfaire leurs ego électoraux, les autres veulent la remplacer pour en faire un terrain d'expression privilégiée de leur culte, les uns et les autres étant aidés en cela par une justice qui n'a jamais été autant défaillante ainsi que par des médias trop complaisants.

        La France s'en sortira-t-elle ? Bien entendu je l'espère mais j'en doute profondément. Il me semble que l'état de dégradation est trop avancé au pouvoir vive dans la Belle France que nous avons connue dans notre enfance. Certes le monde change, les sociétés évoluent , mais les principes originels de notre civilisation doivent rester immuables.

        Je ne peux plus supporter à longueur de journée ces excuses liées à la minorité d'un délinquant, aux droits bafoués subis par d'honnêtes français, ni encore à cette indolence et cette passivité élevée au rang d'une institution par 50 millions de prétendus Français. Oui je dis « prétendus Français » tout simplement parce que ceux-ci ont oublié ce qu'ont fait leur père ou leur grand-père en s'élevant contre la barbarie nazie qui n'a rien à envier à celle de l'islamisme. La France n'est jamais tombée aussi bas et ne pourra pas se sortir de ses coups de butoir dispensé de-ci delà par tous ceux qui veulent déconstruire notre société et notre état. Je ne veux plus prendre exemple d’Israël pour ne pas être taxé de prosélyte, et pourtant ce petit pays pas plus vaste que la région PACA et moins étendue que la Belgique tient tête à plus de 500 millions d'individus qui ,d'ennemis d'hier sont devenus des partenaires aujourd'hui pour la plupart d'entre, jusqu'au prochain conflit d'envergure avec l'Iran.

        Pourquoi la France est-elle devenue si molle pour notre plus grand désarroi, alors qu'elle aurait pu resplendir porter sa culture universelle de par le monde ??
Jacques LOUFRANI - 05/09/2023




Pour nos chers Amis Décédés
Nos Sincères condoléances à leur Familles et Amis

Envoyé par M. Eric Krantz
Décès de M. Christian Agius

        Christian Agius, né à Bône le 5 avril 1939, fils de gendarme, est décédé le 22 aout 2023.
        Christian a été un des premiers chroniqueurs de la Seybouse jusqu'à sa maladie qui l'en a tenu éloigné.
        Christian AGIUS a passé toute son enfance près des Quatre Chemins, rue de Strasbourg. Après le le primaire à l'école Sadi Carnot, le secondaire au lycée Saint Augustin, il est rentré à la Corniche du lycée Bugeaud, à Alger, et, après deux ans, a intégré l'Ecole de Saint Cyr à Coetquidan.
        En 1962, alors qu'il était en formation à Saint Maixent, Il a fait partie de la bande des 5 jeunes Sous-Lieutenants qui ont rejoint l'OAS en 1962. Sur une promotion de 320 élèves, ils furent 5 à faire passer l'Honneur avant la carrière ...
        Il sert en Kabylie, sous les ordres de Chateau-Jobert mais se voit obligé de regagner clandestinement la métropole au début de l'été.
        Là commence une période de clandestinité dont il sortira grâce aux lois d'amnistie de 1968. Il devient alors visiteur médical pour un groupe pharmaceutique et gravira les échelons pour devenir membre de ce groupe. Durant cette période qui durera jusqu'à la retraite, il emmènera plusieurs fois des clients à des parties de chasse en Afrique et nouera de bonnes relations avec le milieu médical dans le Sud Ouest.
        Etabli à Pressac avec sa première femme et ses quatre enfants, il divorce et s'établit près de Périgueux, à Chancevinel, avec sa deuxième femme avec qui il aura une fille. Il reste toujours actif et attaché à des associations locales (rugby, chasse, ..).
        Il publiera également des livres sur l'Algérie et sur son passage à l'OAS. Toujours attaché à la Méditerranée, il acquiert une maison en Espagne, au sud de Tarragone, où il va passer de longues périodes malgré une santé marquée ces dernières années par un diabète nécessitant trois séances de dialyse par semaine.
        C'est dans cette résidence en Espagne qu'il terminera sa vie. Il a été inhumé à Chancevinel le 31 août en présence d'une foule nombreuse d'amis dont beaucoup d'anciens de Saint Cyr, de pieds-noirs et de membres du milieu médical.
        Christian Agius de Bône, promotion Jeanpierre à ST CYR. Les honneurs lui ont été rendus par ses camarades de promotion et ses amis de "là bas".

L'ADIEU Un jour dans la fusillade,
Galopant à l'inconnu
Nous étions en cavalcade,
Tu étais mon camarade
Celui que j'aimais le plus (bis)

Un cavalier par bravade,
Des siens le plus résolu
Me porta son estocade,
Ce fut toi, mon camarade
Ce fut toi qui la reçut (bis)

J'ai vengé l'estafilade,
Que ce coup t'avait valu
Mais très tard dans la nuit froide,
J'ai pleuré mon camarade
Près de son corps étendu (bis)

Je suis ma route maussade,
Et je chevauche sans but
Au hasard d'une embuscade,
J'ai perdu mon camarade
Je ne rirai jamais plus (bis)

Toi qui écoutes ma ballade,
Et mon appel éperdu
Prie le Dieu des cavalcades,
De placer mon camarade
A la droite de Jésus (bis)

L’adieu de « la JEANPIERRE », lu par M. Philippe COEFFET
Traduit et adapté par Jean de Brem officier parachutiste engagé dans le combat clandestin pour l'Algérie Française, fut abattu par la police à Paris en 1963


====================

Envoyé par Mme N. Marquet
Décès de Mme Geneviève de Ternant

        C’est avec une immense tristesse que nous avons appris ce 1er septembre la disparition à l'âge de 91 ans de Geneviève de Ternant, née 16 juin 1932 à Oran.
        Écrivain, poète, historienne, auteur de nombreux ouvrages, Geneviève de Ternant nous laisse de splendides poèmes, notamment réunis dans Passe-Muscade et Poèmes dans la tourmente, recueil qui reçut un prix de l’Académie française.
        Mais elle était aussi l’auteur de L’Agonie d’Oran, ce bouleversant ouvrage en trois volumes qui a mis en mots la tragédie du 5 juillet. Grâce a elle, cet épouvantable drame ne pourra jamais être complétement occulté.
        Femme de coeur, de grand courage, de convictions fortes, elle était une référence par ses nombreux Editos et récits relatés dans "l'Echo de l'Oranie" et rapportés par la Seybouse.
        C’est une icône que nous perdons. nous sommes en deuil.

        Les Obsèques de Geneviève de Ternant ont eu lieu le Mercredi 6 Septembre à 14h30, en l'église du Sacré Cœur, à Nice.




LIVRE D'OR de 1914-1918
des BÔNOIS et ALENTOURS

Par J.C. Stella et J.P. Bartolini


                            Tous les morts de 1914-1918 enregistrés sur le Département de Bône méritaient un hommage qui nous avait été demandé et avec Jean Claude Stella nous l'avons mis en oeuvre.

             Jean Claude a effectué toutes les recherches et il continu. J'ai crée les pages nécessaires pour les villes ci-dessous et je viens de faire des mises à jour et d'ajouter Oued-Zenati, des pages qui seront complétées plus tard par les tous actes d'état civil que nous pourrons obtenir.

             Vous, Lecteurs et Amis, vous pouvez nous aider. En effet, vous verrez que quelques fiches sont agrémentées de photos, et si par hasard vous avez des photos de ces morts ou de leurs tombes, nous serions heureux de pouvoir les insérer.

             De même si vous habitez près de Nécropoles où sont enterrés nos morts et si vous avez la possibilité de vous y rendre pour photographier des tombes concernées ou des ossuaires, nous vous en serons très reconnaissant.

             Ce travail fait pour Bône, Aïn-Mokra, Bugeaud, Clauzel, Duvivier, Duzerville, Guelaat-Bou-Sba, Guelma, Helliopolis, Herbillon, Kellermann, Millesimo, Mondovi, Morris, Nechmeya, Oued-Zenati, Penthièvre, Petit et Randon, va être fait pour d'autres communes de la région de Bône.

POUR VISITER le "LIVRE D'OR des BÔNOIS de 1914-1918" et ceux des villages alentours :
    
CLIQUER sur ces adresses : Pour Bône:
http://www.livredor-bonois.net

             Le site officiel de l'Etat a été d'une très grande utilité et nous en remercions ceux qui l'entretiennent ainsi que le ministère des Anciens Combattants qui m'a octroyé la licence parce que le site est à but non lucratif et n'est lié à aucun organisme lucratif, seule la mémoire compte :

http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr
                         J.C. Stella et J.P. Bartolini.
 


NOUVELLES de LÁ-BAS
Envois divers


Livraisons de gaz

Envoyé par Céline
https://www.tsa-algerie.com/lalgerie-a-double- ses-livraisons-de-gaz-vers-la-france/


tsa-algerie.com - Par : Ali Idir 19 Sept. 2023

L’Algérie a doublé ses livraisons de gaz vers la France

         Si les relations politiques entre l’Algérie et la France traversent épisodiquement des périodes de froid, les échanges commerciaux entre les deux pays ne cessent de progresser.

         C’est ce que confirment les chiffres des Douanes françaises, repris par la Lettre économique de Business France Algérie dans son numéro de ce juillet-août 2023. La dynamique est notamment portée par le gaz naturel.
         Les échanges entre l’Algérie et la France ont encore progressé au premier semestre 2023, s’établissant à 5,8 milliards d’euros, soit une augmentation de 17,6 % par rapport à la même période de 2022.
         Le solde de la balance est nettement en faveur de l’Algérie qui a exporté vers la France pour 3,6 milliards d’euros (+23 %) et a importé du même pays pour 2,2 milliards d’euros de marchandises.

         Même si le solde de la France est négatif (-1,4 milliards), ses exportations vers l’Algérie ont aussi bondi de 18,8 % par rapport au premier semestre de 2022.
         Les exportations algériennes se composent essentiellement de gaz naturel (49,9 %), de pétrole (29,8 %) et de produits pétroliers raffinés (13,4 %).
         À noter la très forte progression des exportations algériennes de gaz vers la France qui ont presque doublé par rapport à la même période de 2022 (1,5 milliard d’euros, soit + 92,1 %).
         À l’issue de la visite en Algérie du président français Emmanuel Macron en août 2022, des médias français, dont Europe 1 et BFMTV, avaient rapporté que l’Algérie avait donné son accord pour augmenter de 50 % ses livraisons de gaz vers la France.

         Le contexte était celui d’une Europe qui appréhendait un hiver difficile à cause des incertitudes sur les approvisionnements russes. L’engagement des autorités algériennes a donc été tenu.
         Algérie : moins de pétrole et plus de gaz vers la France

         Les exportations de pétrole algérien vers la France ont en revanche légèrement baissé pendant la même période (-3,2 %, s’établissant à 904 millions d’euros).
         Concernant les importations algériennes de France, elles sont composées essentiellement de produits industriels, d’équipements mécaniques et de matériels de transport.

         La revue de Business France souligne une baisse très légère (0,03 %) de la production de pétrole de l’Algérie à cause des réductions décidées par l’Opep+ (48 000 barils/jour en avril et 20 000 B/J en août). Concernant les cours du Brut, il ont nettement régressé d’une moyenne de 105 dollars au premier semestre 2022 à 79,5 dollars pendant la même période de l’année en cours.

         La production de gaz de l’Algérie a pour sa part augmenté de 15,4 %, passant de 8,2 à 9,5 milliards de m3 pendant les deux périodes considérées.
         La même source souligne une augmentation significative de la consommation intérieure de gaz qui a bondi de 33 % au premier semestre de 2023, passant de 3,9 à 5,3 milliards de M3.
         La hausse constante de la consommation intérieure a amené le président Abdelmadjid Tebboune à émettre le vœu en décembre 2022 de voir la production de gaz doublée et de dégager la moitié de la production à l’exportation.

         Business France fait état par ailleurs de la poursuite des efforts de l’Algérie pour augmenter sa production et ses exportations d’hydrocarbures, rappelant qu’au premier semestre 2022, Sonatrach a porté à cinq le nombre de contrats signés avec les firmes internationales sous l’égide de la loi sur les hydrocarbures de 2019.
         En juillet, plusieurs contrats ont été signé avec le Français Total Energies, dont un portant renouvellement d’un marché d’enlèvements de GNL.
         La Lettre de Business France, qui reprend un rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), fait état par ailleurs d’une chute drastique des flux d’investissements directs étrangers (IDE) en Algérie, passant de 870 millions de dollars en 2021 à seulement 89 millions en 2022, soit une baisse de près de 90 %.

         Ce recul survient paradoxalement dans une année qui a connu un net regain (+58 %) des IDE dans la région Afrique du Nord.
         Toutefois, souligne la CNUCED, le stock d’IDE en Algérie demeure en progression, passant de 33,9 milliards de dollars en 2021 à 34,1 milliards en 2022.
          


Finance islamique

Envoyé par Fabrice
https://www.jeune-independant.net/finance-islamique- pres-de-700-milliards-da-de-depots-bancaires/


Algérie-patriotique - Par : Rim Boukhari le 16 sept. 2023

Près de 700 milliards DA de dépôts bancaires

         Selon des données récentes de l’Association des banques et établissements financiers (ABEF), les produits bancaires islamiques totalisent, approximativement, 700 milliards de DA, de dépôts bancaires collectés par près de 600 points de vente, entre agences dédiées et fenêtres islamiques au niveau des agences classiques réparties au niveau du territoire national.
         « Cela porte à plus de 4% la part des dépôts bancaires islamiques dans les ressources globales collectées par les banques de la place, contre un peu plus de 1% il y a cinq ans », a indiqué Sofiane Mazari, président du Comité finance islamique à l’ABEF. Soulignant que « la réelle volonté politique à promouvoir la finance islamique », ce résultat est très intéressant et encourageant pour l’ensemble des banques vu la croissance de la collecte des ressources, les financements mais aussi la panoplie de produits bancaires conformes à la Charia et qui ne cesse de s’étoffer.
         A fin août 2022, les dépôts bancaires islamiques avaient totalisé 500 mds de Da, les financements 400 mds de DA, alors que le nombre de fenêtres islamiques au niveau des banques avaient atteint les 469, d’après un précédent bilan communiqué par la Banque d’Algérie.
         Actuellement, on compte 12 banques, publiques et privés, proposent des produits bancaires islamiques, notamment depuis la promulgation, en 2020, du cadre régissant cette finance, à savoir le règlement 2020-02 définissant les opérations de banque relevant de la finance islamique, et l’instruction 03-20 définissant les produits relevant de la finance islamique et fixant les modalités et caractéristiques techniques de leur mise en œuvre.

         De plus, la nouvelle loi monétaire et bancaire promulguée en juin dernier consolide davantage le cadre juridique de ce secteur, en consacrant, entre autres, la création de banques exclusivement dédiées aux produits islamiques, Mazari, pour qui cette loi ouvre la voie aussi à des partenariats nationaux et internationaux pour la création de nouveaux établissements bancaires et financiers islamiques en Algérie.
         « Compte tenu de la croissance très rapide des fenêtres islamiques, je pense qu’il va y avoir de nouveaux acteurs sur le marché, de nouvelles banques islamiques étrangères qui vont s’installer notamment du Moyen Orient, du Qatar, de Turquie ou même de la Malaisie”, a-t-il avancé à ce propos.
         Interrogé, par ailleurs, sur la perspective de lancement des sukuk comme moyens de financement alternatif et leur impact sur le segment de la finance islamique, le représentant de l’ABEF estime qu’ils permettront aux banques et aux compagnie d’assurance takaful de développer leurs investissements et de placer leurs trésoreries excédentaires. De plus, a-t-il ajouté, ces obligations islamiques notamment souveraines (lancées par le Trésor public) sont de nature à favoriser la création, à terme, de banques d’affaires qui sont les plus à même de faire ce type de montages financiers et de les gérer.
Rim Boukhari           


Rentrée scolaire à Annaba

Envoyé par Céline
https://elwatan-dz.com/rentree-scolaire-a-annaba- les-zones-rurales-en-pole-position

El Watan - Par : Leïla Azzouz 20/09/2023

Les zones rurales en pole position

           L’objectif est d’assurer aux élèves de bonnes conditions de scolarisation
           Il a fallu imposer une cadence de travail en 3x8 aux entreprises de réalisation pour pouvoir réceptionner les infrastructures programmées dans les délais.

           Avec 406 établissements scolaires, dont 256 écoles primaires, 102 CEM et 48 lycées, la wilaya d’Annaba peut être qualifiée d’être une région parmi les plus favorisées du pays en matière d’infrastructures scolaires. Sur ce nombre important d’établissements, onze seront réceptionnés et exploités dimanche prochain. Il s’agit de sept groupements scolaires, deux lycées, deux CEM et 34 extensions.

           Ces chiffres ont été communiqués, hier à la faveur du lancement officiel de la rentrée scolaire dans la wilaya d’Annaba. «Pour ce faire, il a fallu mobiliser les équipes des entreprises réalisatrices en régime de 3x8 en un temps record», s’enorgueillit le nouveau wali d’Annaba, Abdelkader Djellaoui.

           Dans ces infrastructures, anciennes et nouvellement réceptionnées, pas moins de 159817 élèves, dont 73 405 du premier palier, 58 368 du cycle moyen et 28 044 lycéens se sont bousculés, hier, premier jour de la rentrée scolaire de l’année. Sur le plan de l’encombrement des classes, le wali a constaté que le lycée implanté au niveau du pôle urbain d’El Kalitoussa où la rentrée scolaire a été lancée officiellement est trop vaste par rapport au nombre de lycéens qu’il a reçus.

           Composé de 22 classes pour 182 lycéens, il demeure sous exploité. D’où sa proposition de le scinder en deux. «Ce lycée est trop vaste pour accueillir ce petit nombre d’élèves. Il faut penser à soulager les autres établissements de la région de la surcharge des classes et les transférer dans cet établissement, tous paliers confondus. Même le transport scolaire leur sera assuré», a plaidé M. Djellaoui.
           La cantine scolaire a été aussi un sujet important, abordé par le chef de l’exécutif avec la directrice de l’éducation. «Je veux que tous les élèves, sans exception aucune, mangent des repas chauds dans la cantine», a martelé le wali. Quant aux aides, sur les 7100 octroyées par l’Etat aux familles démunies, seules 4311 familles en ont bénéficié.

           Ce qui a poussé le wali à interpeller la directrice en insistant : «Vous êtes en retard. Il faut les consommer dans les brefs délais.» Force est de souligner que le nouveau CEM situé à la localité d’Ain Sayed, dans la commune d’Ain Berda, a été baptisé au nom du défunt moudjahid et réalisateur de renommée internationale, l’artiste Amar Laskri, natif d’Ain Berda. Cette reconnaissance a été bien accueillie par le monde de la culture, car elle représente un hommage à un personnage important de l’histoire de la nation et de la région.
            


Frontière avec la Tunisie

Envoyé par Edwige
https://www.tsa-algerie.com/frontiere-avec-la-tunisie- le-calvaire-des-vacanciers-algeriens/

tsa-algerie.com - Par: Rédaction —03 Sept. 2023

Le calvaire des vacanciers algériens

           L’été tire vers sa fin mais la ruée des vacanciers algériens sur la Tunisie ne s’estompe pas. Au poste frontalier d’Oum Tboul, l’un des principaux passages entre les deux pays, des embouteillages continuent à se former quotidiennement.
           Après deux années de restrictions, l’affluence des Algériens sur le pays voisin a sensiblement repris en 2022 et a retrouvé cette année ses niveaux d’avant la pandémie de Covid-19.

           Le nombre de touristes algériens se rendant en Tunisie est allé crescendo depuis le début de l’année en cours. Au premier trimestre, un record a été enregistré avec plus de 560 000 Algériens qui ont traversé la frontière. Jusqu’à fin juin, ils étaient plus de 1,3 millions à se rendre en Tunisie, selon le ministre du Tourisme de ce pays.
           En juillet, l’Office tunisien du tourisme a indiqué qu’il attendait une affluence de 2,5 millions d’Algériens à l’issue de la saison estivale.
           La ruée des Algériens constitue une bouffée d’oxygène pour le secteur du tourisme en Tunisie, durement frappé par les conséquences de la pandémie de Covid-19.

           Frontière algéro-tunisienne : « J’ai passé 10 heures au poste frontalier d’Oum Tboul »
           Face à une offre locale inadéquate ou trop chère et les restrictions sur les visas pour l’Europe, les Algériens trouvent pleinement leur compte en passant leurs vacances en Tunisie. La plupart s’y rendent en voiture ou en bus, d’où les embouteillages qui se forment aux postes de passage aux frontières.
           Il y a en tout neuf postes frontaliers entre les deux pays, deux dans la wilaya d’El Tarf, deux à Souk Ahras et trois à Tébessa. Étant donné que les villes côtières tunisiennes sont la principale destination des Algériens, ce sont les deux postes de la wilaya d’El Tarf (Oum Tboul et El Ayoun) qui sont les plus fréquentés.
           Celui d’Oum Tboul est particulièrement pris d’assaut quotidiennement depuis le début de la saison estivale. L’affluence est telle qu’il faut plusieurs heures, voire une journée ou une nuit entière d’attente pour passer la frontière.

           Les autorités tant algériennes que tunisiennes assurent régulièrement avoir pris toutes les dispositions pour alléger les formalités douanières et policières, mais il reste le problème épineux des files d’attente, notamment au poste d’Oum Tboul. Des images d’embouteillages monstres continuent à être partagées en ce début septembre sur les réseaux sociaux.
           Les témoignages des vacanciers décrivent un calvaire. Un d’entre eux affirme avoir dû attendre dans sa voiture de 22h jusqu’à 8h du matin, soit 10 heures, pour pouvoir passer la frontière.
           « Nous sommes arrivés par bus, dans le cadre d’un voyage organisé, au poste frontalier d’Oum Tboul jeudi dernier à 22h00. Nous sommes sortis de ce poste à 08h00 le lendemain. L’attente était interminable du côté algérien. Nous étions fatigués après des heures de route. Les enfants et les personnes âgées ont souffert. J’ai regretté d’avoir fait ce voyage. Nous avons vécu un véritable calvaire », raconte un touriste algérien qui est parti avec sa famille pour passer quelques jours de vacances en Tunisie.
           De nombreux internautes partagent des témoignages similaires. La situation est d’autant plus intenable que la plupart se déplacent en famille, avec parfois à bord des enfants en bas âge. Les autorités des deux pays devraient songer à augmenter les capacités d’accueil des postes existants ou en ouvrir d’autres dans la wilaya d’El Tarf.
            


Céréales

Envoyé par Gérard
https://www.tsa-algerie.com/cereales-lalgerie- fonde-de-grands-espoirs-sur-le-sud/

  - tsa-algerie.com - Par: Djamel Belaid —14 Sept. 2023

L’Algérie fonde de grands espoirs sur le sud

           Un nouveau schéma stratégique de développement de la production céréalière en Algérie a été présenté lundi 11 septembre à Alger.

           Il a été élaboré par une commission composée de chercheurs, d’experts et de responsables de divers secteurs : agriculture, enseignement supérieur, industrie, énergie, hydraulique et transports. Il s’agit d’une première en Algérie.

           Ce schéma vise à réunir les conditions nécessaires pour atteindre l’autosuffisance en matière de céréales, avec l’objectif de produire massivement du blé dur notamment dans le sud pour dégager un excédent à l’exportation.
           C’est à l’École nationale supérieure d’agronomie (Ensa) d’El Harrach et en présence du ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Mohamed Abdelhafid Henni, du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Kamel Baddari, et du ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique, Ali Aoun qu’a eu lieu la présentation officielle des travaux de la commission.
           Dans le grand amphithéâtre de l’Ensa où s’est tenue la remise du rapport de la commission la presse nationale était présente et a abondamment couvert l’événement.
           Lors de sa prise de parole, Abdelhafid Henni a remercié le ministre de l’Enseignement supérieur pour l’implication de l’université dans la recherche de la sécurité alimentaire et a tenu à rappeler les opérations réalisées au niveau de son département ministériel.
           Il a ainsi longuement énuméré, l’augmentation de 30 % des prix d’achat des céréales auprès des agriculteurs, le soutien de 50 % accordé aux engrais, la réalisation de 6.500 forages durant la campagne agricole écoulée avec une aide de 60 % de leur coût, la création d’une banque de semences, l’emploi de moyens modernes dont les drones et les images de satellites, le développement des cultures stratégiques avec la ré-introduction prochaine de plans de culture par wilaya, l’effort de collecte des céréales.
           Il a aussi cité le développement des capacités de stockage, le programme d’attribution d’un million d’hectares de terre au sud, dont 460.000 déjà attribués à des investisseurs algériens ou étrangers, le programme d’irrigation portant sur l’irrigation de 500.000 hectares dont 350.000 déjà réalisés et les prochaines caravanes de vulgarisation des instituts techniques agricoles.

           Céréales en Algérie : priorité à l’agriculture saharienne
           Il n’a pas manqué d’évoquer le changement climatique et ses effets sur l’Algérie, notamment la réduction de la pluviométrie ces 5 dernières années, ajoutant qu’en moyenne les régions céréalières du pays ne disposent que de 65 jours de pluie contre 265 pour les plus grands pays producteurs de céréales.
           Abdelhafid Henni a insisté sur la production de céréales dans le sud algérien rappelant l’importance des superficies existantes, les moyens matériels et techniques disponibles, la législation, le rôle de l’Office de développement de l’agriculture saharienne (Odas) et l’implication d’entreprises publiques comme Cosider, Sonatrach, Madar et Agrodiv dans la culture des céréales.
           Quant aux ressources en eau du sud, il a rappelé que le volume des nappes souterraines est estimé entre 30.000 et 60.000 milliards de m3, nappes qu’il s’agit d’exploiter de façon raisonnée, a précisé Abdelhafid Henni.
           Le ministre a rappelé l’objectif d’attribution d’un million d’hectares. Il a évoqué l’intérêt de l’irrigation continue par rampes-pivots au sud et les rendements obtenus : 60 à 70 quintaux avec des pointes à 110 et 115 quintaux à Timimoune et de plus de 100 quintaux au sud de la wilaya de Khenchela ainsi qu’à Adrar estimant qu’avec un million d’hectares, l’Algérie pourrait obtenir son autosuffisance en blé tendre.
           Il a cependant rappelé les dangers d’une consommation excessive de farine blanche tels que l’obésité et le diabète qui sont en augmentation en Algérie.
           Après la remise du rapport aux différents ministres présents, le directeur de l’Ensa, Tarik Hartani, a présenté les grandes lignes du travail de la commission.
           Les propositions du groupe de travail ne se focalisent pas seulement sur l’irrigation et l’agriculture saharienne. Elles portent également sur les moyens d’améliorer la production de céréales en condition pluviale, c’est-à-dire non irriguée. Un type de culture qui couvre 7 millions d’hectares au nord et qui concerne la plus grande partie des agriculteurs algériens.
           Tarik Hartani a insisté sur la nécessité d’une cartographie permettant de situer les meilleures terres à blé dur, blé tendre ou orge ainsi que l’indispensable recours aux rotations des cultures en privilégiant légumes secs et cultures stratégiques dont les oléagineux.
           De même qu’il a été proposé une association adaptée de l’élevage à la culture des céréales de manière à favoriser le maintien de la fertilité des sols.
           Il a également été proposé de donner plus de moyens à la recherche agronomique en convertissant l’une des fermes pilotes en un centre de recherche dédié à l’agriculture pluviale et en développant la coopération scientifique avec des pays possédant une expertise en matière de céréales.

           Il est à rappeler qu’en 2016, l’Algérie ne disposait que de 17 chercheurs pour 100.000 personnes engagées dans l’agriculture.
           Outre l’augmentation de la production, il est suggéré le développement d’une politique de qualité en encourageant « les bonnes pratiques dans la filière céréalière ».
           Suite à la présentation des travaux de la commission, un débat a suivi. Le ministre de l’Agriculture et Du développement rural a rappelé le travail accompli en collaboration avec d’autres ministères que le sien : « En une année, la Sonelgaz a raccordé 30.000 exploitations agricoles au réseau électrique ce qui représente 17,40 km de lignes électriques ».
           Abdelhafid Henni a expliqué que l’utilisation des énergies renouvelables est envisagée précisant que jusque-là l’intensité et le voltage nécessaires restaient insuffisants pour faire fonctionner les pompes immergées.
           Des pompes qui consomment jusqu’à 90 % des besoins en électricité, le reste étant utilisé pour mouvoir les gigantesques rampes pivots. Les contacts pris avec de jeunes chercheurs, des start-up ainsi que des entreprises privées permettent d’envisager à l’avenir des alternatives à la mise en place d’un réseau électrifié de plusieurs milliers de kilomètres.
           Le ministre a également indiqué que des études étaient en cours au niveau de l’entreprise publique de matériel agricole (PMAT) afin de porter la largeur des barres de coupe des moissonneuses-batteuses produites localement à 8 ou 10 mètres de large, voire à 14 m alors qu’elles ne sont actuellement que de 2,85 m en moyenne. Il a précisé qu’étant données les températures de 40 à 50°C dans le grand sud, il était nécessaire de récolter dans les délais.
           Abdelhafid Henni a pronostiqué qu’avec une couverture des besoins de l’ordre de 90 %, l’autosuffisance en blé dur était à portée de main, ajoutant que l’exportation était même envisageable. Des exportations qui pourraient financer une partie des importations de blé tendre dans la mesure où la valeur du blé dur est plus importante.

           Céréales : l’Algérie mise sur le sud pour assurer sa sécurité alimentaire
           Le ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique a assuré de la production de tracteurs et matériel adaptés aux grandes surfaces. Il a indiqué qu’il ne suffisait pas d’augmenter les rendements car la multiplication des surfaces emblavées pouvait également contribuer à l’autosuffisance en blé.
           Rappelons que sur les 7 millions d’hectares de terres céréalières au nord de l’Algérie, un récent recensement a montré que seul 1,8 million d’hectares était emblavé. Pour augmenter les surfaces emblavées, une meilleure disponibilité représente une option intéressante.
           Au cours du débat, Abdelhafid Henni a indiqué qu’après la sécheresse de la campagne écoulée, des indemnisations étaient prévues sous forme de dotations en semences et engrais ainsi que par des rééchelonnements des crédits de type Rfig sur une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans.
           Il a encouragé le monde agricole à se protéger en assurant les productions et a rappelé que le recours à l’assurance restait obligatoire dans le cas des exploitations recourant aux aides publiques comme dans celui des concessions agricoles attribuées par l’Odas.
           Concernant les tarifs d’assurance pratiqués, il a évoqué les discussions quant à la possibilité de réduire leur montant dans le cas spécifique des grandes surfaces.
           Il ajouté que « les agriculteurs pouvaient être sereins quant au déroulement de la prochaine campagne de semis » et rappelé le montant de l’aide de l’État : 60 % pour la réalisation de forages et de l’acquisition de matériel agricole.
           Quant au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, il a évoqué l’ouverture de deux écoles d’agronomie saharienne dans le sud du pays dès cette rentrée universitaire.

           Le ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique, Ali Aoun, a rappelé l’importance qu’accorde son département à la production de tracteurs et de matériel agricole et a déploré la part importante prises par les importations ces dernières années plaidant pour que le secteur public reprenne la place qui était la sienne. « J’ai visité les usines, on dispose des moyens nécessaires pour produire et même exporter » a-t-il ajouté.
           Le travail de cette commission intersectorielle avec la participation d’universitaires est une première en Algérie. Cette réflexion intervient après le forum de la sécurité alimentaire sur le blé dur organisé en mars dernier.
           Ces initiatives témoignent de la volonté des pouvoirs publics de réduire la forte dépendance de l’Algérie vis-à-vis de l’étranger en matière de céréales. Dépendance qui se traduit par des importations croissantes et la diversification des partenaires à l’image de la récente percée du blé russe en Algérie

Djamel Belaid                

De M. Pierre Jarrige
Chers Amis
Voici les derniers Diaporamas sur les Aéronefs d'Algérie. A vous de les faire connaître.
    PDF 170A                                                  PDF 171
    PDF 171A                                                  PDF 172
    PDF 173                                                  PDF 173A
    PDF 174                                                  PDF 174A
    PDF 175                                                  PDF 175A
Pierre Jarrige

Site Web:http://www.aviation-algerie.com/

Mon adresse : jarrige31@orange.fr

Notre corps, très intéressant !
Envoyé par Eliane
Il n'est pas exagéré de dire que chaque partie
de votre corps est un miracle.

     1. Il est possible pour votre corps de survivre sans une grande partie de ses organes internes. Même si vous perdez une partie de votre estomac, la rate, une partie de votre foie, de vos intestins, un rein, un poumon, vous ne serez pas en très bonne santé, mais vous survivrez.
     2. Au cours de votre vie, vous allez produire assez de salive pour remplir deux piscines.
     3. La plus grande cellule dans le corps humain est l'ovule et la plus petite est le spermatozoïde du mâle. L'œuf est en fait la seule cellule dans le corps qui est visible à l'œil nu.
     4. Le muscle le plus fort du corps humain est la langue et l'os le plus dur, la mâchoire.
     5. Les pieds humains ont 52 os ce qui représente un quart de tous les os du corps humain.
     6. Les pieds ont 500.000 glandes sudoripares et peuvent produire plus d'un demi-litre de sueur par jour.
     7. L'acide dans votre estomac est assez fort pour dissoudre des lames de rasoir. La raison pour laquelle les cellules de votre paroi de l'estomac se renouvellent si souvent. Vous obtenez une nouvelle muqueuse gastrique tous les trois à quatre jours.
     8. Les poumons humains contiennent environ 2 400 kilomètres de voies et 300 à 500 millions de cavités creuses, ayant une superficie totale d'environ 70 mètres carrés, à peu près la même surface qu'un terrain de tennis. En outre, votre poumon gauche est plus petit que votre poumon droit afin de faire de la place pour votre cœur.
     9. Un éternuement dépasse régulièrement 160 Km/h.

     10. Votre corps dégage assez de chaleur en 30 minutes pour porter à ébullition un demi-litre d'eau.
     11. Votre corps a suffisamment de fer pour fabriquer un clou de 7,5 cm de long.
     12. La production de cérumen est nécessaire pour la bonne santé de l'oreille. Il protège l'oreille interne des bactéries, des champignons, de la saleté et même des insectes. Il nettoie aussi et lubrifie le conduit auditif.
     13. Tout le monde a une odeur unique, sauf pour les vrais jumeaux.
     14. Vos dents commencent à pousser 6 mois avant votre naissance ; c'est pourquoi un nouveau-né sur 2 000 a une ou plusieurs dents à la naissance.
     15. La tête d'un bébé représente un quart de sa longueur totale mais, à l'âge de 25 ans, elle ne sera plus que d'un huitième de sa longueur totale.
     16. Les bébés naissent avec 300 os, mais à l'âge adulte, leur nombre est réduit à 206. Certains des os, comme certains os du crâne sont amalgamés les uns aux autres, ramenant le nombre total à 206.
     17. Il n'est pas possible de se chatouiller. En fait, quand vous essayez de vous chatouiller, vous êtes tout à fait conscient de la manière dont le chatouillement va se faire et quand il va se faire. Quand quelqu'un vous chatouille, il y a effet de surprise...
     18. Moins d'un tiers de la race humaine a une vision parfaite.
     19. Votre nez peut se souvenir de 50 000 odeurs différentes. Mais, si vous êtes une femme, vous êtes un meilleur "nez" que les hommes et vous le resterez tout au long de votre vie.

     20. Le corps humain possède environ 98 000 km de vaisseaux sanguins.
     22. La durée de vie d'un cheveu humain est en moyenne de 3 à 7 ans. Chaque jour, on perd en moyenne 60 à 100 cheveux. Mais ne vous inquiétez pas, vous devez perdre plus de 50% de votre chevelure avant que cela soit trop visible.
     23. Les cellules du cerveau humain peuvent contenir 5 fois plus d'informations qu'une encyclopédie. Votre cerveau utilise 20% de l'oxygène qui entre dans votre circulation sanguine et est lui-même constitué de 80% d'eau. Bien qu'il interprète les signaux de la douleur par rapport au reste du corps, le cerveau lui-même ne peut pas ressentir la douleur.
     24. La dent est la seule partie du corps humain qui ne peut pas se réparer.
     25. Vos yeux ont toujours la même taille depuis la naissance.
     26. À 60 ans, 60% des hommes et 40% des femmes ronflent.
     27. Nous mesurons environ 1 cm de plus le matin que le soir. Pendant des activités normales au cours de la journée, le cartilage des genoux et autres zones du corps se compressent lentement.
     28. Le cerveau fonctionne avec la même quantité d'énergie qu'une ampoule de 10 watts, même pendant que vous dormez. On constate cependant que le cerveau est beaucoup plus actif la nuit que pendant la journée.
     29. Les neurones continuent de croître tout au long de la vie humaine. L'information circule à des vitesses différentes dans les différents types de neurones.

     30. Il est constaté que les gens qui rêvent souvent et de façon intense ont un quotient supérieur à la moyenne.
     32. Les poils du visage poussent plus rapidement que sur n'importe quel autre endroit du corps. Cela est vrai pour les hommes comme pour les femmes.
     33. Il y a autant de poils par centimètre carré sur votre corps que sur un chimpanzé.
     34. Un fœtus humain acquiert ses empreintes digitales à l'âge de trois mois.
     35. À l'âge de 60 ans, la plupart des gens ont perdu environ la moitié de leurs papilles.
     36. Environ 500 000 bactéries couvrent chaque cm2 de votre peau. Mais ne vous en inquiétez pas, une majorité de ces bactéries sont inoffensives et même utiles.
     38. Les lèvres humaines ont une couleur rougeâtre en raison de la grande concentration de minuscules capillaires juste sous la peau.

     39. Trois cents millions de cellules meurent dans le corps humain à chaque minute.
     40. Comme les empreintes digitales, chaque individu a une empreinte de la langue qui est unique et qui peut être utilisée pour une identification.
     41. Une tête humaine reste consciente pendant environ 15 à 20 secondes après une décapitation (horreur !!!).
     42. Il faut 17 muscles pour sourire et 43 pour froncer les sourcils.
     43. Les êtres humains peuvent vivre plus longtemps sans nourriture que privés de sommeil. Pourvu qu'il y ait de l'eau, l'humain moyen pourrait survivre un mois à deux mois sans nourriture en fonction de sa masse graisseuse et d'autres facteurs. Les gens commencent à ressentir des changements radicaux de la personnalité et des problèmes psychologiques seulement après quelques jours sans sommeil.
     44. Le sang le plus commun dans le monde est de type O. Le type de sang rare, AH ou Bombay sang, en raison de l'emplacement de sa découverte, a été décelé sur moins d'une centaine de personnes.
     45. Après avoir été conçu, chaque être humain a passé environ une demi-heure comme cellule "unique". Peu de temps après, les cellules commencent à se diviser très rapidement et commencent à se former les composants d'un minuscule embryon.
     46. Les droitiers vivent, en moyenne, neuf ans de plus que les gauchers. Ceci est largement dû au fait que la majorité des machines et des outils que nous utilisons quotidiennement sont conçus pour les droitiers, ce qui les rend un peu plus dangereux pour les gauchers qui les utilisent. Il faut savoir que cela donne lieu à des milliers d'accidents et de décès chaque année.
     47. Vos oreilles sécrètent plus de cérumen lorsque vous avez peur.
     48. Les koalas et les primates sont les seuls animaux qui possèdent des empreintes digitales uniques.
     49. Les humains sont les seuls à produire des larmes émotionnelles.
     50. Le cœur humain crée assez de pression pour que le sang puisse gicler à 9 mètres dans les airs.

     Notre corps étant composé de 60 à 70 % d'eau, les spécialistes recommandent d'en boire 1,5 litre par jour.
     Le corps humain a besoin d'un minimum d'eau pour se débarrasser des toxines de notre système.
     Il est donc bon d'en boire à certain moment de la journée pour maximiser son efficacité :
     - 2 verres d'eau après le réveil aident à activer les organes internes
     - 1 verre d'eau 30 minutes avant un repas aide à la digestion
     - 1 verre d'eau avant de prendre un bain aide à abaisser la pression artérielle
     - 1 verre d'eau avant d'aller au lit évite un accident vasculaire cérébral ou cardiaque

     Boire de l'eau au coucher aide également à prévenir les crampes nocturnes dans les jambes.
     Vos muscles des jambes sont à la recherche d'une hydratation lorsque survient une crampe alors, n'oubliez pas de boire de l'eau avant d'aller vous coucher.





Si vous avez des documents ou photos à partager,
n'hésitez-pas à nous les envoyer. D'avance, Merci.

                 EN CLIQUANT. ===> ICI

Notre liberté de penser, de diffuser et d’informer est grandement menacée, et c’est pourquoi je suis obligé de suivre l’exemple de nombre de Webmasters Amis et de diffuser ce petit paragraphe sur mes envois.
« La liberté d’information (FOI) ... est inhérente au droit fondamental à la liberté d’expression, tel qu’il est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies adoptée en 1946, ainsi que par les Articles 19 et 30 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948), qui déclarent que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».
Numéro Précédent RETOUR Numéro Suivant