EN  RELISANT  LES  NOTES  DE  VOYAGE DE  MONIQUE

Mon épouse a découvert ce coin d’Algérie pour la première fois. Elle a un autre regard, une autre approche, et j’ai trouvé intéressant de vous livrer ses impressions.

Vendredi  11 avril 2008

C’est le jour de prière.

Le jour où toute la population staouélienne se rend aux différentes mosquées.

Ce fut le jour où nous devions aller manger au restaurant que tient Bérich, l’ancien facteur. Le lieu est propre et plusieurs tables sont à la disposition de la clientèle qui ce jour se fait rare puisque nous étions seuls consommateurs. On se retrouve avec quelques effusions de sympathie et l’on nous sert en entrée quelques piments doux que nous trouvons à notre goût. Puis le couscous à la viande de bœuf une exception car mon époux n’aime pas trop le mouton. La garniture en légumes est réduite et l’on sent que l’opulence n’est pas  là. Ce n’est pas un reproche mais les temps sont durs pour les petites gens qui n’ont que très peu de moyens.

Tout en mangeant mon mari offre un livre sur Staoueli à Bérich, sans avoir eut le temps de le dédicacer car le fils de Bérich l’a déjà pris et emporté dans sa cuisine.

Je vois notre hôte tracassé par l’horloge et, après s’être excusé, doit partir pour la mosquée. Il nous laisse la télévision allumée et nous pouvons suivre le prêche de l’imam  en direct sur grand écran.

Une bonne demi-heure se passe, et notre hôte revient de sa prière.

Il n’a pas pu rentrer dans la mosquée car les fidèles étaient trop nombreux, mais il est prévu que la veille les trottoirs soient balayés et ainsi ils peuvent entendre le prêche de l’iman et faire leurs dévotions.

De retour, la conversation reprend, avec cette fois-ci la télé éteinte ; il nous parle du garage de Pape qu’il a transformé en restaurant et maintenant, se sentant trop âgé pour tenir son établissement, c’est son fils qui a repris l’affaire.

Mon mari rencontre un copain de classe du cours complémentaire venu expressément nous saluer et des souvenirs sont remis à jour.

L’heure de nous quitter est venue et nous devons payer notre repas.

Est-ce une fleur que l’on nous fait, est-ce le prix de deux repas, ce qui est sûr c’est que nous avons réglé 1 000 dinars soit 10 €…

Nous avons appris par la suite que la viande de bœuf était hors de prix, et notre gêne fut rétrospective.

Samedi 12 avril 2008

La journée du samedi fut chargée en émotions.

La visite du cimetière, du « cimetière chrétien “ comme on dit là-bas“, fut émouvante surtout pour mon mari qui retrouvait là les restes de ses ancêtres. Quatre générations étaient ensevelies dans ce tombeau laissé à l’abandon et aux dégradations du temps et des hommes. Nous n’en sommes pas certains mais un trou aurait bien pu être un accès creusé pour une visite clandestine des cercueils. Si une certaine presse laisse entendre que ces endroits sont entretenus, vaut mieux y aller voir car le délabrement est réel, et l’entretien inexistant.

Les plaques de marbre où étaient inscrits les noms des défunts avaient été descellées et remises à la hâte car bien sûr notre venue avait été signalée. Le ciment était encore frais et une des plaques collées à l’envers…

Au fond du cimetière, un énorme trou prenant bien les deux tiers de la surface. Dans ce trou, des gamins jouaient au football.

Nous ne nous sommes pas trop attardés car les larmes pointaient près de nos yeux,  à la vue d’un tel délabrement.

Après cette visite, nous étions attendu à Bouchaoui ex-domaine de la Trappe.

Mon mari m’a souvent parlé de ce domaine magnifique, de ses vignes, de ses vins réputés, de ses orangers et clémentiniers…

Pour moi c’était une découverte, et mes yeux n’étaient pas assez grands pour tout voir, tout enregistrer dans ma mémoire.

Passée le porche avec ses moignons de socles qui jadis devaient soutenir des statues, je découvre l’extérieur de la maison Borgeaud qui ressemble à une maison de maître comme on peut en rencontrer en France mais le terme château est exagéré. L’état est malheureusement délabré.

Nous continuons notre périple vers le cimetière trappiste où une grille cadenassée nous empêche de pénétrer. Tout à côté, de l’autre coté d’un fossé, se trouve la tombe, très simple, de Lucien BORGEAUD qui semble bien conservée et entretenue.

Urbanisation de BOUCHAOUI ex la TRAPPE

De là, mon mari tenait à se rendre à la croix blanche et, pareillement, nous n’y trouvons que le socle. Tout près, un homme s’entraînait à des exercices physiques et après l’avoir saluer et échanger quelques mots, il nous  dit cette phrase surprenante «  revenez quand vous voulez, vous êtes ici chez vous ! »

Notre visite est terminée, le reste que nous aurions aimé tant visiter n’est pas accessible en ce moment pour différentes raisons qui laisse un peu pantois mon mari. Ainsi la croix noire est inaccessible, les caves sont détruites et il n’existe plus un cep de vigne sur tout le domaine. Quant à l’orangeraie c’est du passé…

Notre guide nous invite à déguster une Pizza (plat national) dans une guinguette au milieu de la foret tenu par un nommé Bouchaoui.

La discussion est à bâtons rompus, on évoque le tout et le rien sur ce qu’était la Trappe, et ce qu’est devenu BOUCHAOUI.

Dimanche13 avril 2008

Je laisse mon mari à l’hôtel pour explorer un peu mieux les lieux de ce complexe d’Etat de Sidi Fredj... 

Je suis attirée par une boutique dont la porte étroite n’engage pas à entrer.

A l’extérieur, quelques objets hétéroclites. Un couple essaie d’expliquer à ses enfants l’usage de ces antiquités. Ma curiosité féminine l’emporte et je franchis le seuil. Ma surprise est grande car je découvre la caverne d’Ali Baba.
Si l’entrée est étroite le magasin s’élargit et se prolonge. On y voit de tout et de très bonne facture. Des meubles arabes anciens tels que des fauteuils sculptés au prix incroyable de 150 000 dinars l’un, une magnifique encoignure toujours en style arabo-mauresque à 100000 Dinars, de nombreux meubles, Napoléon III et toutes époques, récupérés chez les anciens « colons », des tableaux d’orientalistes ou des tableaux de famille, œuvres de peintres renommés, des cuivres de toutes régions, des livres anciens en particulier des livres notariaux et pour finir des tapis de toutes factures…  Je ne parlerai pas des vêtements, et des sous vêtements époque 1900 ayant appartenus à des européens, entassés ou mis en valeur sur certains meubles, des armes mauresques de l’époque de la conquête, des sabres, des poudrières, des selles damassées  etc. … Au sortir, un sentiment de frustration, de dégoût, de révolte m’étreint. J’ai déconseillé à mon mari de s’y rendre, ayant eu peur que l’émotion soit trop forte de revoir ses débris de souvenirs entassés.

Plage “CARRIO

Afin de me remettre les idées en place,  il est tant de goûter les plaisirs de la baignade. La plage est déserte et je fais ouvrir les grilles de l’hôtel « El Riad «  pour avoir accès à la mer. Je me baigne jusqu'à la ceinture et ce par trois fois car bien qu’en ce mois d’avril, l’eau n’est pas à la température idéale pour une vraie baignade, elle reste très acceptable. Je longe la plage “ Carrio“  toujours  ainsi nommée et, tout en pataugeant, je rejoins l’hôtel “EL RIAD“ qui se trouve d’après l’indication de mon mari entre la plage “Moretti “ et la plage « Carrio “. Là, de nouvelles barrières mais je découvre un oursin. .. Il paraît que cette espèce d’échinoderme a complètement disparu des rivages de Sidi Fredj mais, à mon retour, mon mari a été très heureux de pouvoir le partager avec moi.

De vieux souvenirs d’oursinades refaisaient surface et il évoqua ses copains plus habiles à les manger qu’à les ramasser.

Je termine ici mes notes, avec des sentiments qui se mêlent, n’appréhendant pas l’ensemble d’une situation où le bon cohabite avec le mauvais. Se court séjour ne m’a pas suffisamment éclairée, la complexité du pays est si grande…

Je laisse cette tâche aux Algériens.

                                                                                          Monique ANTOINE


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