Le voyage en terre staouélienne prend
fin.
Nous venons de passer une dizaine de jours sans trop
bouger, voulant nous imprégner d’une atmosphère différente de celle que
nous avions connue.
Mis à part la gentillesse des anciens de
Staouéli, j’avoue ne plus retrouver ma terre natale. Le rire, le plaisir
de vivre, les éclats de voix ou les discussions un peu fortes qui sortaient des
cafés et des bars sont remplacés par un
sérieux qui glace. Quelques groupes discutent sur la place du village sans trop élever la voix, on complote plus
que l’on ne parle…
Staouéli est une ville de 60 000
habitants peuplée par des « étrangers » comme disent les anciens Staouéliens.
Non, ce pays n’est plus mon pays, je
quitte mon village et mes rêves.
Je garde encore mes souvenirs, mes vieux
fantômes qui restent des compagnons que je visite chaque jour. Avec eux je
retrouve ma gaîté, mes joies d’antan.
Tout cela n’est que fantasmes et je suis
conscient que les réalités sont tout autres car, curieusement, il existe là-bas
deux vérités. Celle que l’on veut vous faire voir, opulente et glorieuse,
l’autre souvent cachée, pauvre,
silencieuse, et digne.
Nous sommes lundi 14 avril 2008 ;
notre bateau doit quitter le quai à 12 heures. J’espère que l’embarquement sera
plus aisé que celui de Marseille et que nous aurons moins de huit heures
d’attente …
Le taxi n° 641 vient nous chercher à 8
heures 30.
La voiture est là, à l’heure indiquée,
conduite par un vrai Staouélien qui à pour nom Nouari. En route pour Alger en
passant par l’autoroute.
Les bouchons freinent la circulation car
c’est l’heure de la rentrée vers Alger.
Les fouilles des voitures sont nombreuses
et la police tatillonne.
Les discussions avec le chauffeur de taxi
sont des plus intéressantes, il se plaint de la vie chère, du coût de la viande
et de la difficulté à joindre les deux bouts en fin de mois, seules les
sardines sont abordables pour son budget, mais manger des sardines** à longueur de semaine … !
Bref, nous arrivons à 10 heures 30 sur
les quais, saluons notre nouvel ami et repartons pour ce que je pense être un
nouveau chemin de croix.
Les passeports sont contrôlés rapidement
et à mon étonnement nous embarquons vers les 11 heures 15 sur un navire
algérien portant le nom de
TASSILI.
Ma surprise est grande car contrairement
aux navires français qui font la ligne ALGER – MARSEILLE celui-ci est récent,
les cabines spacieuses et propres. Plus de passagers dormant dans les couloirs
et la circulation dans les coursives en est grandement facilitée. Un seul
reproche, pendant la navigation les ascenseurs ne fonctionnent plus. Peut-être
y a t il des raisons ?
Midi, les hélices tournent, nous quittons
les quais d’Alger et nos souvenirs.
Avant de laisser définitivement cette terre Algérienne, je dois dire un très
grand merci à Belkacem, à sa famille qui ont été des hôtes très agréables et
d’une gentillesse raffinée. Merci à nos amis staouéliens qui ont gardé au cœur
notre amitié. Je leur souhaite beaucoup de courage et d’abnégation.
Amitiés à Mohamed qui a su conserver ses
souvenirs d’enfance quand il jouait avec mon frère …
Le seul lien qui nous relira sera celui
d’Internet et, tant que je le pourrai, je préserverai pour eux, pour nous, un moment d’Histoire qui
fut la nôtre.
Quand nous quittons le quai et que les
côtes algériennes s’estompent, je ne ressens plus de pincement au cœur, pas de
larmes qui pointent aux bords de mes yeux. Je quitte un pays qui n’est
plus le mien et qui devrait suivre sa propre destinée. Sa richesse, ses
dirigeants, la beauté de ce pays devraient en faire un Eldorado pour ses habitants. Mektoub.
Une traversée sans histoire, une mer
calme, nous longeons les îles Mallorquines, puis la côte espagnole, où les
lueurs des villes au gré des vagues, se mêlent
aux étoiles.
Midi, nous accostons au pied de Notre Dame de
la Garde à Marseille et c’est là que le chemin de croix commence.
Avant d’arriver aux bureaux des douanes
et de la police il faut traîner ses bagages sur plus de 2 kilomètres, un vrai
calvaire pour moi.
On ne se bouscule pas mais on se presse
vers un étroit passage où l’on vous délivre un tampon !
A la sortie, pas de taxi, il faut l’aide
d’un passager inconnu qui va en quérir un. Bref le voyage par voie maritime
vers Marseille – Alger et retour n’est pas au point, loin s’en faut.
Un chauffeur de taxi qui nous mène à la
gare tout en parlant de l’O.M. et nous arrivons juste à temps pour prendre le
« Talgo « qui nous déposera à Perpignan.
Nous récupérons notre voiture et vers 19 heures nous sommes chez nous.
OUF !
Qu’il est bon de se retrouver chez soi.
Il est trop tôt pour de réflexions plus profondes, laissons
le temps agir …
** Lire dans le site du mois de mai “ LE PEUPLE SARDINE
“ dans la même rubrique.