24 octobre 1999

 

Les jardins du stade et le stade municipal

L'ensemble sportif de notre ville était très complet en ce lieu de verdure, avec un ensemble grossièrement triangulaire partant du chemin de ceinture en face de la double allée de platanes du cimetière, à droite l'avenue du capitaine Dauphin déjà décrite jusqu'à l'entrée du stade en face du Lycée Saint Augustin. L'avenue décrivait une petite courbe et remontait ensuite vers le centre ville et la petite côte, vers le centre de santé et la poste. Au bas de cette côte, un arrondi vers la gauche puis nous suivions la rue Marcel Vigo située au bas du quartier de Beauséjour puis l'avenue des frères Goncourt.

Au milieu de cet ensemble de jardins et de Parc trônait notre magnifique stade municipal qui, sans chauvinisme aucun, était pour l'époque d'avant-guerre où il a été construit, (inauguration si mes souvenirs sont bons en 1937), sinon le plus grand du moins le plus beau d'Afrique du Nord.

Trois entrées, fermées parfois par des portails, y donnaient accès par une route carrossable qui l'encerclait, l'une vers Beauséjour, rue Marcel Vigo et les deux autres, avenue du Capitaine Dauphin . Le terrain de football était entièrement gazonné ce qui n'était pas courant à l'époque et sa pelouse bien entretenue et arrosée pendant la saison chaude. Il n'avait rien à envier à celle de certains stades de France actuellement. Un Tunnel d'accès permettait d'aller aux vestiaires souterrains. Tout autour, une piste de course d'athlétisme en cendrée et l'anneau rose incliné de sa piste cycliste, tout comme alors à Bordeaux ou à Marseille. L'entrée principale avenue du Capitaine Dauphin donnait accès à la tribune principale couverte. Des gradins non couverts se situaient autour de la piste cycliste . En face, se trouvait une petite tribune non couverte et l'entrée du vélodrome lors de l'arrivée des courses cyclistes . Cela constituait un ensemble sportif de 10.000 à 12.000 places assises dont la moitié couvertes.

Le drainage était parfait et il n'y a jamais eu de terrain non jouable. Nos trois équipes de Football principales à savoir l'ASB, La JBAC et l'USMB étaient la gloire de la ville et participaient aux différents championnats départementaux de Constantine, d'Algérie, puis les dernières années; les championnat d'AFN.

 Mis à part les équipes départementales ( ESFMGuelma, JS Didjelli, MOConstantine, JSPhilippeville,USFMSétif, ect... Ceci nous a permis de voir évoluer le RUA, L'ASSE, le GSOrléansville, le GSOran, le SCBelAbbes et plus tard, l'Olympique de Tunis, Le CSHammamLIF, Le CACasablanca, etc... et je n'omettrai pas les tournois d'intersaison avec la participation de grandes équipes métropolitaines ou Européennes. Que de souvenirs du foot qui était roi à Bône et qui a fourni de grands champions à la France, Cottenent,Tenneroni ,Lamia, etc...

En dehors du foot, il y avait aussi une section de Rugby à l'AS Bône plusieurs fois champion d'AFN mais c'était alors un sport moins prisé et pratiqué surtout par des militaires si je me souviens bien. Notre Stade était aussi un Vélodrome avec, en dehors des arrivées, des courses de poursuites individuelle sur pistes et d'autres encore . Nous avions même dans ce sport, notre champion du Monde Daniel Dimèglio, recordman du monde sur piste, sur 24 heures. Discipline peu prisée mais qu'il a améliorée, il a été battu mais à chaque fois il reprenait son record.

Derrière le stade se trouvait une salle d'escrime et de fleuret, des terrains de sport à usage scolaire avec un abri tout en longueur, plus loin je le crois, des terrains de boules .

Le stade

Voilà notre magnifique ensemble sportif. Qu'est-il devenu ? Les rares fois où j'ai essayé de suivre ce qu'était devenu l'ex USMB,  j'ai constaté que le club d'Annaba n'est pas souvent resté en nationale dans le championnat d'Algérie . Il y a maintenant un immense stade de 80.000 places construit pour une demie finale de la coupe d'Afrique vers les Lauriers Roses. Notre stade était entouré d'un écrin de verdure, à savoir au Nord vers le Cimetière, les Jardins Municipaux avec leurs allées roses, leurs bougainvilliers et surtout des mûriers dont je prenais souvent des feuilles pour élever des vers à soie quand j'étais enfant, en cachette du gardien .

Vers le Cimetière, la magnifique double allée de platanes abritait fin octobre les baraques des fleuristes pour entreposer et protéger leurs fleurs avant la Toussaint. De cette époque, je garde le souvenir des magnifiques teintes ocres et rouges des feuilles de platanes avant leur chute. A la suite, la Régie des tabacs faisait l'angle de la rue des frères Goncourt. J'y avais un ami de lycée, Perriau dont j'ai perdu la trace. Cet ensemble de bâtiments a été touché par des bombes allemandes en 1943 car il avait hébergé des troupes américaines, ( les services de renseignements de l'axe devaient bien marcher même en Algérie), il a été vite reconstruit.

On retombait ensuite sur les terrains de sports à usage scolaire décrits auparavant avec une entrée juste en face du Tennis club de Bône, un peu plus loin à l'angle de la rue Marcel Vigo, une entrée en escalier vers le bâtiment sanitaire et celui de l'escrime. A trois cents mètres, se trouvait l'entrée de la route descendant vers l'entrée du vélodrome. Le reste du domaine sportif et de jardins avait une forme triangulaire, la pointe vers le centre ville. Au centre, les bâtiments d'une pépinière Micalef, je crois et une grande allée de platanes allant vers la place en face du Centre de santé. Ce bel îlot de verdure vue des collines au dessus était encore plus beau, mariant à merveille les différentes teintes de vert et le rose brique du stade surplombé par un ciel bleu et le soleil qu'il ne faut pas oublier. En face de l'entrée du Stade, le lycée Saint Augustin et au nord, le cimetière dont je parlerai la prochaine fois.

pierre.leonardelli@wanadoo.fr


01 novembre 1999

 

Je profite du jour de Toussaint pour parler de deux choses : La Toussaint 1954, et le cimetière de Bône.

 La Toussaint 1954

Triste jour pour nous Pieds-noirs car il marque le début de la guerre d'Algérie qui nous a chassé de chez nous. Ce jour là, j'étais jeune étudiant en seconde année de médecine. Il n'y avait pas de vacances scolaires pour la Toussaint à cette époque et je demeurais à la cité universitaire de Ben-Aknoun. Comme tout le monde, j'ai appris le soir par la radio et par la presse le lendemain, le premier attentat où un couple de jeunes instituteurs avait été abattu dans la région d'Arris, mais que les Aurès étaient loin et que nous étions loin de supposer que cela était le début du conflit qui nous a chassé de notre terre natale...

La Toussaint et le cimetière de Bône

J'ai situé les cimetières dans mes précédents textes, au dessus du jardin du stade et à coté des Béni Ramassés. Depuis quelques jours la double allée de platanes qui voyait ses feuilles jaunir, roussir et tomber, était occupé par les baraques des Fleuristes marchands de chrysanthème offrant leurs pots et leurs bouquets de fleurs aux multiples couleurs; jaunes, blancs, ocre ou rouge, aux Bônois venant fleurir les tombes de leurs familles et honorer leurs souvenirs.

Le Cimetière présentait deux entrées, la principale, large et carrossable au milieu de la contre allée et la seconde plus petite piétonnière après la régie des Tabacs . A droite de l'entrée principale se trouvait le logement du gardien du cimetière et plus loin sur la gauche le reposoir . Toutes les allées étaient bordées de cyprès élancés avec leur feuillage vert foncé qui donnait au site une pénombre et une fraîcheur en plein été propice au recueillement . Il y avait presque en haut de la grande allée à gauche une allée latérale avec sur la droite le tombeau familial des Léonardelli . Un tombeau en hauteur avec huit loges où reposaient mon grand père Joseph, mes oncles et tantes. Un peu plus bas sur une petite allée descendante, la tombe de mon grand père maternel Émile Houlgatte . Comme tout les cimetières Méditerranéens, il y avait aussi de très nombreuses chapelles fermées par une porte plus ou moins luxueuse. Au dessus du Cimetière, il y avait encore beaucoup de places dans l'enceinte. Pendant la guerre, des batteries de DCA Anglo-américaines postaient sur la crête, tiraient sur les bombardiers allemands ou italiens et quelques bombes sont tombées dans le cimetière dont le mur d'enceinte a été détruit à un endroit au dessus de l'école des Beni Ramassés .

Depuis l'Indépendance de l'Algérie le site a été modifié. L'école de garçons des Béni Ramassés à été détruite pour élargir la route. En haut de ce quartier, passe une grande route qui donne sur des tours situées sur le sommet de la colline de Beauséjour et je pense que toute la partie supérieure non occupée du cimetière a été récupérée par la ville de Annaba .

Que de Bônois y ont trouvé leur dernière demeure : 130 ans pour une ville de 40.000 à 75.000 Européens cela fait du monde. Heureusement, le cimetière, comme ceux des grandes villes, a été conservé avec un gardien payé par le Consulat de France. Certes, il y a eu quelques profanations dans les jours qui suivirent l'indépendance :  Les marques de drapeau, et les décorations françaises ont été enlevées mais il semble que le cimetière s'endorme tout doucement dans sa solitude car aujourd'hui, combien de tombes de marbres ont été nettoyées ? combien ont été fleuries ? Le Consulat de France a rouvert depuis peu mais il ne peut s'occuper de tout.

Pour nous pieds noirs, qui n'avons pas de tombes à fleurir, ce jour de Toussaint ramène sa nostalgie . Avant d'écrire ceci,  j'ai quand même pu revoir notre cimetière car je possède une vidéo que mon frère a enregistré il y a 10 ans .

pierre.leonardelli@wanadoo.fr


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