Ceux qui ont lu " quand l'orage passa." doivent connaître mon attachement à cette région de la haute Kabylie.

            Ils savent aussi que je recueillais en 1960 le produit des œuvres d'une veuve dont le mari avait été tué pendant cette guerre. Tous les trois mois, je venais chercher le produit de sa production et là je vendais à des amis ou à des connaissances. Les ventes faites, je donnais à cette pauvre veuve de quoi subsister.

            Mais ce n'est pas de commerce que je vais vous entretenir, je voudrais plutôt vous présenter les oeuvres de cette femme qui, avec de l'argile et des teintures naturelles, arrivait à faire, suivant son inspiration, de petites merveilles.




La chaîne du DJURJURA



            Ce village se nommait TARIT. Perdu entre la vallée de la Soummam et la chaîne de Djurjura, un piton rocheux très caractéristique, surplombait les toits plats des habitations.

            Demeures bâties en pierre, toits de chaume, peu d'ouvertures car les hivers sont rudes.

            Village habité par des vieillards, des femmes, des enfants. Les hommes sont en France, dans des usines… ou soldats, dans les deux camps.



            Le mari de cette veuve fut tué par le F.L.N. et, depuis, ses ressources sont minces.

            Pour avoir quelque argent, elle fabrique divers objets en terre ;







            Bien sûr, elle ne possède pas de tour de potier, seulement de la glaise, un peu d'eau et beaucoup de patience pour sortir de la terre brute une forme
            L'objet crée n'est pas de la décoration, il est utile chaque jour, il est nécessaire au journalier.
            La majesté du site, la chaumière, ces gestes qui viennent d'un passé si lointain me font découvrir les premiers âges comme si le XXème siècle n'était pas arrivé dans ce village. Un instinct primaire me fait sentir que je suis proche de ce monde, ma raison me condamne aussitôt.


            Oui, Tarit est un village attachant, tant par l'accueil que par la simplicité de la vie, le besoin de vivre avec si peu mais où le travail remplace les récriminations.






            Les tâches des femmes dans ce village sont si nombreuses que la journée suffit à peine : le bois à ramasser pour le foyer, le repas, la galette à cuire et, quand il pleut ou qu'il neige, les femmes tissent des couvertures en laine aux couleurs vives.

            Mais je m'éloigne de mon sujet, je vous présente donc l'artiste et ses œuvres.

            Toutes les teintures sont naturelles et fabriquées par les gens du village.

            Le vernis qui recouvre parfois certaines pièces est fait avec du jaune d'œuf. Bref, je quitte Tarit avec mes œuvres d'art, espérant avoir été utile à cette veuve, au talent bien réel.



            Je reviendrai dans ce pays de montagnards rudes et fiers, certainement les premiers habitants de ce que les Romains appelait la " Berbèrie. "
            Robert Antoine

(Mis en ligne, janvier 2007)



Précédent RETOUR Suivant