01 Septembre 1999

Le pont d'Hippone

Bône, Hippone, Annaba

Il y a quelques semaines, j'ai trouvé un message d'un compatriote Algérien, non pas Pied-noir, mais son élégie sur différentes villes d'Algérie m'a redonné un peu de vague à l'âme notamment sur Bône, la "Ouaran de l'est". Par ailleurs, en fouillant un site sur Annaba, j'ai retrouvé quatre photos récentes de la ville et en particulier les nacelles quatre places pour monter vers BUGEAUD, nacelles que nous ne connaissions pas de notre temps.

Je suis parti par Avion le 26 Juin 1963 après avoir tenté de travailler là bas après l'indépendance, comme médecin fonctionnaire. J'avais fini mes vingt sept mois en kaki comme médecin aux Salinnes puis je suis rentré en métropole et j'ai fait une carrière de 34 ans comme médecin en Béarn.

Je suis maintenant retraité et je pense, comme le disait une compatriote dans un récent émail, que c'est vers la soixantaine que les souvenirs reviennent. Au début, la vie active nous a forcé à faire "notre trou" dans une France qui n'était pas celle de notre enfance. J'habite une très belle région à 65 km de la cote Basque et Landaise et à une distance identique des stations d'altitude des Pyrénées Atlantiques mais voilà, ce n'est pas notre Méditerranée ni le massif de l'Edough, sans aucun chauvinisme, le ciel n'est jamais aussi bleu, il y fait chaud mais ce n'est pas la même chaleur, ici elle est très humide.

La passerelle de la tranchée et l'hôpital

Pendant 8 mois, en fin 62 ,début 63,  j'ai essayé de rester comme médecin dans le vieil hôpital au dessus du pont de la tranchée ainsi que dans quelques emplois d'AMG à Morris, Zerizer, Randon. Dans la plaine, je n'avais aucun problème, nous pouvions circuler sans soucis mais voilà nous étions devenus des "étrangers" chez nous . A cette époque, nous étions passé de 70.000 Français à 6000. C'est pour cela que je suis parti en France, en dehors de la grande exode, à la recherche d'une place au soleil. Et même si j'ai fait une carrière honorable de médecin de campagne, je ne suis pas devenu Béarnais car ici, il me manque mes racines .

Ma famille est dispersée en France, côte d'azur, Lille, Lyon, Toulouse, Toulon, Bordeaux et j'ai même une fille qui est partie s'installer au Canada. Voilà pour ce soir, ce ne sont pas de vrais souvenirs mais un simple petit mot d'introduction et de temps à autre dans cette rubrique, j'ajouterai un mot car "on ne quitte que ce que l'on cesse d'aimer "

pierre.leonardelli@wanadoo.fr


02 Septembre 1999

 

La côte nord

Quelques propos un peu décousus sur notre ville avec cette magnifique côte rocheuse et les belles plages du cap de garde vers la ville. Si sauvages quand la mer était agitée avec une teinte d'un bleu si intense couronnée par ses gerbes d'écume. En haut du phare ou du sémaphore, la vue restait aussi belle vers l'ouest et vers les voiles noires au loin, du coté d'Ain Barbar et d'Herbillon .

Depuis la jetée nord du port, les plages se succédaient toujours aussi belles :  le lever de l'aurore, Gassiot, Saint Cloud séparée par le château des Anglais de la plage militaire et de Chapuis.

Le cap de Garde

La ville s'arrêtait ici et la corniche serpentait vers la Carouble, plage de pécheur avec ses nombreux cabanons rustiques sentant bon la peinture verte, brune ou rouge. Le premier fortin puis après un très beau passage en falaise, on descendait sur Toche, la plus belle avec deux chemins d'arrivée, un établissement "café restaurant", et la grande bleue qui paraissait un luxe, alors que si simple.

Toche était la plus belle de nos plages tant par ses dimensions que par ses alentours. Elle a été défigurée quelques années après la guerre de 45 car un "liberty-ship" s'y était échoué et avait coupé la plage en deux . Passé Toche, on remontait à flanc de coteau pour retrouver deux magnifiques petites plages avec un hôtel restaurant à la première et le second fortin au-dessus de la seconde .

Après, la côte devenait plus escarpée, une belle ferme au milieu de quelques vignes sur la gauche, une dernière petite plage entourée de roches rouges puis c'était la longue montée, (quand on la faisait en vélo...), vers le sémaphore et le phare du cap de Garde.

A mi côte, entre les grandes tiges d'aloes en fleur, un chemin de terre descendait vers quelques petits cabanons en dur avant le Cap et les dernières années, on y avait installé un vivier où on dégustait des huîtres venues de France avec ce parfum de la haute mer, surtout accompagnées d'un petit vin blanc de la plaine de Bône...

Et par dessus tout cela les sommets de l'Edough culminant à mille mètres avec leurs belles forêts de chênes lièges et plus vers le cap, le maquis avec ses parfums bien typiques.

Voilà, c'est tout pour ce soir, mais vous comprendrez que le surnom de Bône la coquette soit resté...

pierre.leonardelli@wanadoo.fr


03 Septembre 1999

 

La côte nord, (suite)

Je continue ce soir avec la côte de l'autre coté de la baie, à l'est du port, vers le Cap Rosa . Tout de suite après les terres pleins du port, en arrière de l'énorme centrale électrique qui dominait toute la petite darse en face du quai Warnier, on trouvait d'abord l'estuaire de la Seybouse, notre imposante rivière qui, juste avant son embouchure, recevait la Boudjimah, rivière un peu marécageuse venant de l'Ouest  juste sous la colline de Saint Augustin .

Les bords de la Seybouse

Vue du pont, sur la route de La Calle, elle nous paraissait très large, au moins aussi large que la Seine à Paris , c'était un magnifique plan d'eau allant ainsi jusqu'à Duzerville. Cela nous permettait d'avoir un club de Rowing très connu par ses succès locaux, nationaux et Internationaux, Mrs Tapie et Fourcade gagnèrent un titre olympique juste avant la guerre en deux sans barreur.

Passé le pont , sur la gauche, la route de la Choumarelle sur une petite digue allant vers l'estuaire, c'était un quartier de pauvres gens à grande majorité d'origine Française, Italienne, Maltaise etc..., sans aucun luxe si ce n'est la plage juste à coté. Les quelques crues de la Seybouse transformaient cela en un marécage, paradis des moustiques.

Sur la route de La Calle, à trois cents mètres à gauche, partait une route vers les dunes avec au bout, les abattoirs municipaux . Je me rappelle y être allé quelques fois ramasser des crabes de sable, (petits crabes blancs), qui constituaient un excellent appas vivant pour la pèche, un peu avant une petite usine, "Aluminium JP",  fabriquant quelques ustensiles ménagers.

Après les abattoirs, sur cinquante kilomètres, la côte était sablonneuse avec des dunes. A dix kilomètres, les marais salants avec un chemin de terre pas loin de l'aérodrome des Salines conduisant à la Station de pompage au bord de la mer. A cet endroit, il m'est arrivé d'aller pécher au lancer, la nuit, dans les vagues . On y prenait des ombrines et d'autres poissons parfois très gros mais j'avoue ne jamais avoir eu beaucoup de succès .

A douze kilomètres de Bône, l'aérodrome des Salines avec l'aérodrome civil par où j'ai quitté Bône le 28 Juin 1962 avec mon épouse, mon chien et quelques valises.

Tout à coté, la base militaire avec une importance accrue pendant toute la guerre d'Algérie. J'y ai passé ma dernière année de service militaire en 1962. Médecin de base, quelques évacuations sanitaires sur la Métropole, mais aussi quelques missions médicales en Alouette pour aller à la base de Radar au sommet de l'Edough ou vers un poste de l'aviation à la frontière Tunisienne.

Au milieu de la grande courbe, l'estuaire commun de l'Oued el Kébir et de la Bou Namoussa, rivières venues de la frontière du coté de Lamy et de la région de Blandan. Le Tarf sur la route de La Calle, j'y suis allé une seule fois pécher .

Ensuite commençaient des régions marécageuses jusqu'aux lacs Melah et Oubeira . Le Cap Rosa voyait réapparaître la cote rocheuse avec un phare que l'on voyait briller par temps clair depuis Bône . Voilà mes souvenirs en deux épisodes sur la baie de Bône.

pierre.leonardelli@wanadoo.fr


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