Tout près du port et de la Méditerranée,
Au pied de Bugeaud domine la cité
Embaumée de jardins et d'odeurs épicées,
Elle s'appelait la rue Sadi Carnot, c'était mon quartier.
A l'ombre de ces rues le soleil s'affichait
Colorant les murs de rires et d'amitié
Quelle que soit la saison, hiver, automne, été,
Elle s'appelait la colonne et c'était mon quartier.
Elle était le domaine des filles et des garçons
Jouant à la toupie, à la marelle et au ballon,
Au noyau d'abricot, à la course au bouchon,
Ces bruits, ces exclamations, c'était notre maison.
D'la rue Sadi Carnot à la colonne Randon
Le passant solitaire trouvait un compagnon,
Quelle que soit sa couleur, sa race, sa religion,
Il était le bienvenu dans notre maison.
Sur les bancs de l'école l'amitié fleurissait
Entre français, juifs, arabes, italiens et maltais
Et prenant son envol durait l'éternité,
C'était mon quartier où régnait l'amitié.
Le rire en bandoulière, le tape cinq ravageur,
Le salut mon frère et le fier bras d'honneur,
L'enfant de mon quartier respire le bonheur,
Elle s'appelait la maison du bon dieu, c'était ma demeure
De la place d'armes au cours Bertagna
Cafés et brasseries vous offraient la kémia
Le ricard, l'anisette et le bon kaoua
Elle s'appelait Cordina, Mustauha, Didona, Chemama, et c'était ma casbah
Le forum, l'alhambra, l'olympia, le majestic,
Les variétés, le colisée, le jardin botanique
Le rex, la basilique, le bijou maléfique
Elle s'appelait la cité; c'était mon Amérique
Une vieille dame en blanc protégeant nos enfants,
Qu'ils fussent israélites, catholiques, musulmans,
Sainte Anne de Bône dame aux sentiments
Elle régnait sur la place et c'était mes quinze ans
Le cours Bertagna, rue Sadi Carnot, rue Garibaldi
Ont Gravé leurs empreintes sur mon cœur et ma vie
Afin que dans mes yeux ne se lise l'oubli !
Elle s'appelait Bône la Coquette, c'était mon pays.